Cerveau & Psycho n° 92 - octobre 2017 (extrait)

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Cerveau & Psycho

N° 92 Octobre 2017

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L’HYPNOSE, LE POUVOIR DE VOUS TRANSFORMER

ALZHEIMER LES NOUVELLES RAISONS D’ESPÉRER TRAVAIL À QUOI DEVRAIT RESSEMBLER UN BUREAU IDÉAL

ÉCOLE LAISSEZ LES ENFANTS COMPTER SUR LEURS DOIGTS ! STRESS URBAIN L’IMPACT DES VILLES SUR LE CERVEAU VACCINS OBLIGATOIRES LA CONTRAINTE EST-ELLE EFFICACE ? D : 10 €, BEL : 8,5 €, CAN : 11,99 CAD, DOM/S : 8,5 €, LUX : 8,5 €, MAR : 90 MAD, TOM : 1 170 XPF, PORT. CONT. : 8,5 €, TUN : 7,8 TND, CH : 15 CHF, ESP : 7,70 €


Que se passera-t-il quand les machines surpasseront l’intelligence humaine ? Les robots vont-ils nous sauver ou nous détruire ? Dans cet ouvrage unique, best-seller international traduit en 19 langues, Nick Bostrom nous révèle les difficultés que la recherche d’une intelligence supérieure va nous poser et comment les résoudre. Il s’agit sans doute du plus grand défi auquel l’humanité aura à faire face. Il faut s’y préparer.

N. BOSTROM • 9782100764860 • 464 pages • 28 €

« À lire absolument… Nous devons être très prudents avec l’intelligence artificielle. » Elon Musk

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« Je recommande vivement cet ouvrage. » Bill Gates


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N° 92

NOS CONTRIBUTEURS

ÉDITORIAL

p. 42-49

SÉBASTIEN BOHLER

Laura Poupon

Post-doctorante à l’University College School of Pharmacy de Londres, elle étudie les molécules impliquées dans la transmission de l’information dans les neurones, et leur potentiel thérapeutique dans le traitement de certaines lésions cérébrales.

p. 50-53

Bruno Dubois

Professeur de neurologie et directeur de l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer (IM2A) de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, Bruno Dubois est à la pointe des méthodes de diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer.

p. 70-72

Patrick Peretti-Watel

Patrick Peretti-Watel, sociologue et directeur de recherche à l’Inserm, a été membre du comité de suivi de la concertation vaccinale, qui a recommandé l’extension de l’obligation vaccinale à tous les vaccins recommandés de la petite enfance.

p. 78-81

Catherine Thevenot et Justine Dupont-Boime

Professeure à l’Institut de psychologie de l’université de Lausanne et doctorante au département de psychologie de l’université de Genève, elles explorent les stratégies de comptage des enfants – notamment sur les doigts !

Rédacteur en chef

Dépister plus tôt pour mieux soigner

L

’espoir, quand on parle d’Alzheimer, est un mot à manier avec précaution. Dans ce dossier, nous en esquissons quelques pistes. Celle de la prévention, puisque les premières études longitudinales de grande ampleur ont permis de confirmer que certains modes de vie réduisent effectivement le risque de développer la maladie (notamment une bonne alimentation, une pratique sportive régulière, des activités cognitives soutenues et une vie sociale active), mais aussi la question du dépistage et des thérapies. Dépister, c’est la clé. Pour Bruno Dubois (page 50), pionnier du domaine, il est certain que l’on disposera un jour de molécules capables de minimiser les lésions cérébrales causées par la maladie (voir aussi notre article qui fait le point sur les traitements en page 42). Le point critique sera de pouvoir les administrer avant que ces lésions ne soient trop importantes, car le processus devient alors irréversible. Mais le problème est que ces lésions apparaissent des années avant les premiers symptômes tels que les pertes de mémoire. Il faut donc encourager les méthodes de dépistage en amont, notamment l’analyse du liquide céphalorachidien et l’imagerie cérébrale en routine. On se heurte alors à l’engorgement des infrastructures d’imagerie cérébrale dans notre pays, notamment l’IRM, pour laquelle nous sommes notoirement souséquipés (un taux d’équipement cinq fois inférieur à celui de l’Allemagne). Il y a donc lieu d’espérer une prise de conscience du problème, mais aussi l’arrivée sur le marché des nouvelles méthodes de dépistage, comme la toute récente technique de mesure des plaques amyloïdes dans la rétine des patients, mise au point au centre médical Cedars-Sinai de Los Angeles, par simple imagerie rétinienne. Avec un pouvoir prédictif actuellement testé en étude clinique, elle pourrait alerter les personnes à risque avant qu’il ne soit trop tard. £

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SOMMAIRE ALZHEIMER p. 41-69

Dossier

N° 92 OCTOBRE 2017

p. 14

p. 20

p. 26

p. 34

LES NOUVELLES RAISONS D’ESPÉRER

p. 6-38

DÉCOUVERTES p. 6 ACTUALITÉS La molécule qui booste le cerveau Des sourires qui n’ont plus de secret Fumer déstresse ? Non, au contraire ! Comment utiliser son argent pour être heureux p. 12 F OCUS

Les inégalités rassurent notre cerveau Plutôt que de redistribuer les richesses, nous préférons préserver les hiérarchies. Sébastien Bohler

p. 14 C OGNITION

Plus de choix, moins de liberté ?

Attention : si vous vous sentez libre, c’est peut-être que vous ne l’êtes pas.

p. 26 N EURO-URBANISME

Cerveau des villes, cerveau des champs Psychoses, angoisse et dépression : notre cerveau souffre en ville. Faut-il d’urgence migrer vers les campagnes ? Judith Rauch

p. 32 I NFOGRAPHIE

Une ville où il ferait bon vivre Janosch Deeg et Younsun Koh

p. 34 GRANDES EXPÉRIENCES DE PSYCHOLOGIE DANIELA OVADIA

Stephan Lau

p. 20 C AS CLINIQUE

L’homme aux mille métiers

Il se dit successivement avocat, médecin et barman. La faute à une lésion au cerveau. Daniela Ovadia

Seligman et les lois de la résignation

Martin Seligman a le premier montré comment les échecs répétés se transforment en désespoir. Daniela Ovadia

Dans certains domaines spécifiques, oui. Aljoscha Neubauer

ENFIN L’ESPOIR D’UN TRAITEMENT ?

Les pistes de traitement se multiplient ; certains sont testés sur des animaux, d’autres en phase clinique. Laura Poupon

p. 50 I NTERVIEW

LES AVANTAGES DU DIAGNOSTIC PRÉCOCE L’imagerie cérébrale et les biomarqueurs, en détectant les lésions cérébrales au plus tôt, rendront les traitements plus efficaces. Bruno Dubois

p. 54 N EUROSCIENCES

COMMENT ÉVITER LA DÉMENCE

Quatre facteurs protecteurs sont identifiés : sport, alimentation, vie sociale et activité cognitive. Miia Kivipelto et Krister Håkansson

p. 62 S ANTÉ

LA MALADIE D’ALZHEIMER EST-ELLE CONTAGIEUSE ?

p. 24 L A QUESTION DU MOIS

Peut-on améliorer son intelligence ?

p. 42 N EUROBIOLOGIE

Deux offres d’abonnement exceptionnelles sont proposées également en page 39 et 61. En couverture : © De Ella Sarkisyan/shutterstock.com

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Des découvertes récentes ont laissé penser que la maladie pourrait se transmettre entre individus. Alison Abbott


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p. 94

p. 70 p. 74

p. 78

p. 84 p. 88

p. 76

p. 70-77

p. 78-87

ÉCLAIRAGES

VIE QUOTIDIENNE LIVRES

p. 70 R ETOUR SUR L’ACTUALITÉ

p. 78 NEUROÉDUCATION

Vaccins obligatoires

Rendre huit nouveaux vaccins obligatoires suffira-t-il à surmonter les réticences du public vis-à-vis de la vaccination ?

p. 88-94

Laissez les enfants compter sur leurs doigts

Patrick Peretti-Watel

C’est signe que leur esprit fonctionne bien, et cela fera d’eux de bons élèves en maths.

p. 74 À MÉDITER

Catherine Thevenot et Justine Dupont-Boime

CHRISTOPHE ANDRÉ

Nos frères les arbres

Ils sentent, communiquent ! Et cela change notre rapport à la nature… p. 76 P SYCHO CITOYENNE

p. 82 L ’ÉCOLE DES CERVEAUX

Apprendre à lire en quatre mois

C’est le défi qui attend les élèves de CP. Nos connaissances sur le fonctionnement du cerveau peuvent-elles les aider à le relever ? Olivier Houdé

p. 84 L ES CLÉS DU COMPORTEMENT

p. 90 B ONNES FEUILLES

Hypnose : le pouvoir de se transformer

L’hypnose augmente la flexibilité psychologique en débranchant nos automatismes mentaux. Extraits d’un livre publié chez Belin en partenariat avec Cerveau & Psycho. Betty Mamane

p. 94 N EUROSCIENCES ET LITTÉRATURE

CORALIE CHEVALLIER NICOLAS GUÉGUEN

Quand l’inertie favorise Mon bureau idéal le changement Parfois, pour modifier les comportements dans le bon sens, le mieux est… de ne rien faire !

p. 88 S ÉLECTION DE LIVRES Quand nos émotions nous rendent fous La Science à contre-pied Le Souci de la nature La Communication du vivant Qui va prendre le pouvoir ? Tribus morales

Les sciences du comportement livrent des clés pour organiser son lieu de travail afin de s’y sentir mieux et d’y être plus efficace.

SEBASTIAN DIEGUEZ

La Rochefoucauld et les mirages de l’amour-propre

L’amour de soi, critiqué sous la plume de La Rochefoucauld, est aujourd’hui étudié en laboratoire sous le nom de « biais de complaisance ».

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DÉCOUVERTES

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p. 12 Focus p. 14 Plus de choix, moins de liberté ? p. 20 L’homme aux mille métiers p. 24 Peut-on améliorer son intelligence ? p. 26 Cerveau des villes,

Actualités Par la rédaction NEUROBIOLOGIE

La molécule qui booste le cerveau

Mise au point dans un laboratoire en Californie, cette molécule augmente les capacités de mémoire et de cognition d’animaux de laboratoire jusqu’à 100 %. À quand son application chez l’homme ? J . Leon et al., Peripheral activation of a klotho fragment enhances brain function, Cell Reports, vol. 20, pp. 1360-1371, 2017.

© Unol/shutterstock.com

P

enser plus vite, réviser ses examens à la perfection, maîtriser une présentation de projet de A à Z… Puis, à mesure que l’âge avance, conserver intactes ses capacités intellectuelles, sans voir sa mémoire décliner, et pouvoir rivaliser avec les plus jeunes en vitesse de réflexion… Seriez-vous intéressé ? Alors, c’est peut-être la molécule klotho qui vous l’offrira. Klotho est une protéine naturellement synthétisée par l’organisme, et dont les chercheurs avaient déjà identifié le rôle dans la longévité (ils avaient réussi à faire vivre des souris et des rats plus longtemps en augmentant leur taux de klotho par génie génétique). Or une fois amputée de un dixième de sa longueur, cette protéine se met à avoir des effets sur la cognition. Des neurobiologistes de l’université de Californie à San Francisco l’ont injectée à des souris qu’ils ont ensuite soumis à divers tests. Résultat : après une seule injection de klotho dans

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cerveau des champs p. 32 Infographie p. 34 Seligman et les lois de la résignation PSYCHOLOGIE SOCIALE RETROUVEZ LA PAGE FACEBOOK DE CERVEAU & PSYCHO

Des sourires qui n’ont plus de secret M. Rychlowska et al., Functional smiles : Tools for love, sympathy, and war, Psychological Science, à paraître.

ALZHEIMER, PARKINSON… Klotho n’en finit plus de faire des miracles. L’équipe de San Francisco l’a testée sur des souris atteintes de symptômes de la maladie de Parkinson, dont le cerveau se remplit progressivement d’une protéine appelée alpha-synucléine. Ces souris, comme les patients humains, ont à la fois des problèmes d’apprentissage et de motricité : or l’injection de protéine klotho leur rend leurs mouvements fluides et restaure leurs capacités d’apprentissage… À quand un médicament délivrable par injection ou par voie orale pour soigner les troubles de la mémoire dans des maladies comme

Alzheimer ou Parkinson ? Il faudra d’abord détailler le mode d’action de klotho à l’échelon moléculaire. De ce point de vue, le travail est déjà bien avancé puisque les scientifiques ont découvert que cette molécule favorise la plasticité des neurones (leur capacité à faire varier la force de leurs connexions en réponse à l’apprentissage) dans une zone du cerveau impliquée dans le stockage de nouveaux souvenirs et qui commence à rétrécir sous l’effet de la maladie d’Alzheimer : l’hippocampe. L’équipe californienne a même identifié les récepteurs neuronaux responsables de cette plasticité améliorée : il s’agit – pour les connaisseurs – des récepteurs du glutamate de type NMDA. Reste un mystère gros comme le poing : klotho ne pénètre pas dans le cerveau car elle est trop grosse pour pénétrer à travers le fin maillage de vaisseaux sanguins qui filtrent le sang en provenance du cœur. C’est donc par l’intermédiaire d’autres molécules messagères qu’elle stimule la plasticité des neurones. On ignore pour l’instant desquels il s’agit, mais nul doute que les efforts pour les trouver vont redoubler. D’un autre côté, c’est une chance : parvenir à améliorer le fonctionnement du cerveau sans y introduire directement un composé est le rêve de tout développeur de médicaments pour le cerveau ! £ Sébastien Bohler

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U

n sourire, ce ne sont pas seulement deux lèvres qui se relèvent et une impression générale de bien-être. Les psychologues distinguent au moins trois formes différentes de sourires : le sourire « de récompense » exprime la gratitude ou le contentement lorsqu’on vous fait un cadeau ou un compliment ; le sourire d’affiliation est esquissé pour exprimer ses intentions pacifiques ou conciliantes ; et le sourire de domination… Celui-là est un peu différent des autres. Un brin carnassier, c’est celui du collègue qui marque son territoire, ou du supérieur qui veut vous confier une tâche… Savoir distinguer ces trois sourires constitue un avantage indéniable pour percer à jour les intentions et émotions de son entourage. Aux universités de Cardiff, de Glasgow et du Wisconsin, des chercheurs ont décomposé des centaines de sourires en contractions de différents muscles faciaux, appelées unités d’action faciale. Ils ont constaté que le sourire de récompense se caractérise par une élévation symétrique des coins de la bouche et par des sourcils relevés ; le sourire d’affiliation y ajoute un pincement des lèvres. Quant au sourire de domination, il est asymétrique : un coin de la bouche se relève plus que l’autre, et la pommette de la joue se soulève vers l’œil, rétrécissant son diamètre. Il partage en cela des points communs avec l’expression faciale du mépris. Une signature caractéristique qui vous évitera peut-être d’être mené(e) en bateau. £ S. B.

© LarsZ/shutterstock.com

l’abdomen (il n’est même pas nécessaire de viser directement le cerveau), les souris déploient des capacités d’apprentissage supérieures de 50 % à 100 % pour reconnaître leur chemin dans un labyrinthe. Et cela vaut aussi bien pour les souris jeunes que pour les vieilles. Autrement dit, les jeunes apprennent mieux et plus vite, et les vieilles rattrapent leur déclin cognitif. Un avantage qui profite à différentes formes de mémoire : la mémoire à long terme (se rappeler son chemin le lendemain) et la mémoire « en direct », ou mémoire de travail, qui permet de savoir ce qu’on vient de faire à l’instant pour aborder la nouvelle étape d’une tâche.


DÉCOUVERTES A ctualités

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NEUROSCIENCES

Pourquoi la générosité fait du bien . Q. Park et al., A neural link between S generosity and happiness, Nature communications, en ligne le 11 juillet 2017.

D

onner fait du bien. Si vous faites un cadeau à un ami, vous serez plus heureux que si vous vous l’offrez à vous-même (plusieurs études scientifiques l’ayant confirmé). Mais pourquoi ? Que se passe-t-il dans le cerveau ? Soyoung Park, de l’université de Lübeck, en Allemagne, et ses collègues ont demandé à 50 volontaires, dès leur arrivée au laboratoire, de remplir un questionnaire pour évaluer leur ressenti personnel de bonheur. Puis les chercheurs leur ont annoncé qu’ils allaient recevoir 25 francs suisses (environ 23 euros) chaque semaine pendant un mois. La moitié des sujets devaient dépenser cet argent pour eux, en allant au restaurant par exemple, et l’autre moitié devait l’utiliser pour des personnes de leur entourage, en les invitant à dîner. Dans la seconde partie de l’expérience, tous les sujets ont réalisé une tâche de prise de décision pendant qu’on observait leur cerveau en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle. Lors de cet exercice, les participants devaient choisir s’ils acceptaient ou non de donner une certaine somme d’argent (qui variait à chaque essai) à une personne qu’ils avaient au préalable choisie. Puis ils remplissaient à nouveau le questionnaire de bonheur.

Les neurosciences au tribunal : une réelle avancée ?

C

haque année, dans environ 200 procès aux États-Unis, des avocats tentent d’obtenir des circonstances atténuantes pour leur client en expliquant que leur comportement délictueux s’explique par des défauts cérébraux dont ils ne sont pas responsables. Ces arguments

Les résultats de cette étude n’étonnent pas : les personnes qui se sont engagées à dépenser leurs 23 euros pour autrui se sont montrées plus généreuses que les autres lors de la tâche de prise de décision et sont reparties du laboratoire plus heureuses (alors qu’elles n’avaient encore réellement rien donné à qui que ce soit). Dans leur cerveau, leur jonction temporopariétale, liée à l’empathie et au fait de savoir se mettre à la place des autres, s’activait davantage que celle des sujets moins généreux. Et plus ces volontaires donnaient (fictivement) de l’argent, plus la connexion entre cette jonction et le striatum, associé au plaisir et aux récompenses, était stimulée. Enfin, plus le striatum était actif lors de la tâche, plus les gens étaient heureux à la fin de l’expérience. Bonheur et générosité sont donc liés dans le cerveau via une modulation du striatum par la jonction temporopariétale. C’est la première preuve neurobiologique et comportementale que donner rend simplement – et biologiquement – heureux. £ Bénédicte Salthun-Lassalle

ont-ils un impact important sur la décision des jurés ? À l’université du Minnesota, des neurojuristes (le neurodroit est une branche universitaire aux États-Unis) ont étudié les attitudes de ces derniers et ont constaté qu’ils prennent en compte davantage (environ deux fois plus) les pièces à conviction classiques que les éléments neuroscientifiques. Les auteurs en concluent qu’à l’avenir, les neurosciences pourraient, telle la vidéo dans l’arbitrage sportif, jouer un rôle d’appoint. £ S. B.

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20 % de chances en plus d’arrêter de fumer quand le prix du paquet augmente de un dollar (0,83 euros). Source : S. L. Mayne et al., Epidemiology, 16 août 2017.


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NEUROBIOLOGIE

Les neurones de la dominance

Fumer déstresse ? Non, au contraire C. Morel et al., Molecular Psychiatry, en ligne le 25 juillet 2017.

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© Sergey Nivens/shutterstock.com

t s’il suffisait d’activer quelques neurones pour transformer un introverti craintif en mâle dominant, gonflé d’assurance ? C’est en tout cas ce que viennent de réussir sur des souris Tingting Zhou, de l’Institut biologique des sciences de Shanghaï, et ses collègues. En enregistrant l’activité cérébrale de deux rongeurs placés face à face dans un tube, les chercheurs ont détecté des neurones qui s’activaient davantage quand ils avaient d es comportements dominants, comme pousser l’autre. Par des techniques dites d’optogénétique, ils ont ensuite activé artificiellement ces neurones chez des mâles dominés, qui ont alors imposé leur loi dans le tube, contraignant leur congénère à reculer. Les neurones découverts sont situés dans le cortex préfrontal dorsomédian, une zone impliquée dans l’évaluation des coûts et des bénéfices, ainsi que dans celle des efforts nécessaires. Ce type d’analyse, plus ou moins consciente, pourrait donc bien sous-tendre l’adoption de comportements dominants. £ Guillaume Jacquemont

L

es fumeurs en sont persuadés : griller une cigarette déstresse. Pourtant, la plupart d’entre eux sont stressés ! Certes, le manque de nicotine provoque du stress, jusqu’à la prochaine cigarette. Mais les effets du tabac seraient encore plus insidieux : c’est la nicotine ellemême qui rendrait en fait les fumeurs plus sensibles au stress. C’est ce que Philippe Faure et Jacques Barik, du laboratoire neurosciences Paris-Seine et de l’université de Nice-SophiaAntipolis, viennent de montrer. Du moins chez les souris soumises à un stress social, c’est-à-dire aux attaques répétées de leurs congénères plus forts et plus agressifs. Après ce genre de confrontations, les victimes manifestent des signes d’anxiété et évitent tout contact avec un autre rongeur inconnu, même non agressif (alors que les souris non stressées interagissent beaucoup avec ce nouveau congénère). Les chercheurs ont donc stressé des souris et enregistré, grâce à des électrodes implantées dans leur cerveau, l’activité des neurones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale. Cette dernière appartient au circuit de la récompense, qui est mis en jeu quand on obtient une gratification ou que l’on prend du plaisir – ce que le fumeur ressent quand il inhale une bouffée. En parallèle, Philippe Faure et ses collègues ont inhibé à l’aide d’une molécule bloquante les

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récepteurs nicotiniques des souris, sur lesquels se fixe normalement la nicotine, ou bien les ont activés en faisant boire aux rongeurs une solution à base de nicotine. Les résultats sont inattendus. Les souris dont on inhibe les récepteurs nicotiniques ne sont plus stressées face à un congénère inconnu, même si elles ont subi des attaques pendant dix jours. En revanche, celles ayant bu de la nicotine le sont davantage que les souris témoins : après une seule attaque, elles développent un stress social. Et dans leur cerveau, on constate une augmentation de l’activité dopaminergique dans l’aire tegmentale ventrale. D’ailleurs, stimuler un certain type de récepteurs nicotiniques dans l’aire tegmentale ventrale suffit à engendrer un stress social chez les souris après une seule agression. C’est la preuve que les récepteurs nicotiniques interviennent dans la réaction au stress et surtout que la nicotine augmente le stress, indépendamment de toute sensation de manque, en amplifiant l’activité du système de la récompense et du plaisir. Faire passer son stress en fumant une cigarette serait en fait la meilleure façon de l’augmenter… £ B. S.-L. En partenariat avec Télématin, de Laurent Bignolas, sur France 2, retrouvez ce sujet dans la chronique de Christelle Ballestrero le mercredi 27 septembre à partir de 6 h 30.


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Plus de choix, moins de liberté ? Par Stephan Lau, chercheur en psychologie à l’Institut de psychologie de l’université Ernst-Moritz-Anrd, à Greifswald.

Être en situation de choisir, en son âme et conscience, parmi de multiples options, n’est-ce pas une définition de la liberté ? Seul problème : nous avons alors le sentiment d’être moins libres. Un paradoxe bien gênant.

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DÉCOUVERTES C ognition

Être libre, c’est avoir le choix, non ? Sauf que, paradoxalement, un choix plus vaste procure souvent un sentiment de liberté plus ténu. De quoi faire réfléchir sur la validité de nos décisions.

P EN BREF

© T. Dallas / shutterstock.com

££Étonnamment, les choix variés et complexes nous laissent le sentiment d’être bloqués ou entravés. ££À l’inverse, les choix très simples dont l’issue est heureuse nous donnent l’impression d’être libres comme l’air. ££Notre sentiment de liberté nous trompe : il correspond généralement à une liberté moins étendue.

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ouvoir façonner sa propre existence comme bon nous semble, qui ne le souhaiterait pas ? Cet idéal, toutefois, est bien plus difficile à atteindre qu’on ne l’imagine. Prenez Anne Kauditz : cette jeune femme de 28 ans, qui a terminé ses études il y a deux ans, travaille aujourd’hui comme juriste au sein d’une entreprise. Appliquée et investie dans son travail, elle vit en outre une relation heureuse avec son ami, et ils espèrent avoir bientôt des enfants. Et c’est sur ce point que, comme de nombreuses femmes en Allemagne, où il faut souvent choisir entre famille et carrière, elle se pose de plus en plus souvent une question : doit-elle accorder l’entière priorité à son travail ou penser à devenir maman ? Et disons-le tout de suite : Anne a du mal à se décider entièrement pour l’une ou l’autre option. Car poursuivre les deux objectifs simultanément, malgré tout ce qu’elle entend dire dans les médias, lui semble impossible. Quand on donne tout pour son travail, il ne reste que peu de temps pour la

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DÉCOUVERTES C as clinique

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DANIELA OVADIA

Codirectrice du laboratoire Neurosciences et société de l’université de Pavie, en Italie, et journaliste scientifique.

L’homme aux mille métiers Qu’est-il arrivé à Giovanni D., diplômé de littérature et politique influent ? Du jour au lendemain, il se prend successivement pour un médecin, un avocat ou un barman. Jusqu’au moment où on découvre que dans son cerveau, une zone du contrôle comportemental a été endommagée.

EN BREF ££Après un arrêt cardiaque et un manque d’oxygénation de son cerveau, Giovanni D. adapte systématiquement sa personnalité aux individus et aux objets qui l’entourent. ££Une lésion du lobe frontal lui a fait perdre son identité propre, et il est incapable de se souvenir de son passé. ££Il est tour à tour médecin, cuisinier, barman… sans se souvenir de ce qu’il a fait ou dit quelque temps avant.

À

65 ans, Giovanni D. est encore bel homme. Après une maîtrise en lettres, il s’est lancé en politique, tout en consacrant une bonne partie de ses loisirs au théâtre, une activité qu’il a pratiquée avec passion tout au long de sa vie. Il y a trois mois, Giovanni a un grave infarctus, qui entraîne un arrêt cardiaque prolongé et un manque d’oxygénation de son cerveau. Après la phase aiguë de l’accident, il rentre chez lui. Mais quelques semaines plus tard, sa femme le ramène à l’hôpital : Giovanni est devenu irritable, obsessionnel, voire désinhibé, et perd facilement le contrôle des

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situations. Lorsqu’il entre dans la salle d’examen, il est toutefois cordial et collabore volontiers avec le neurologue qui le reçoit. « Vous savez, je suis médecin moi aussi », commence-t-il. « Vraiment ? Je l’ignorais », répond le neurologue qui est prêt à y croire s’il ne voyait pas, dans le dos de Giovanni, les grands gestes de dénégation de madame D. Son regard est éloquent et semble dire : « Vous voyez ! Il n’a plus toute sa tête. » L’entretien et l’examen mettent en évidence plusieurs troubles : de graves anomalies de la mémoire autobiographique, qui permet de se souvenir des événements marquants de sa vie ; des « confabulations », à savoir des discours délirants, incohérents et hors de contexte ; et une « anosognosie », c’est-à-dire une absence de conscience de sa propre maladie. Giovanni souffre aussi d’amnésie antérograde, un trouble de la mémoire qui l’empêche de mémoriser de nouveaux événements (voir


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LA DÉPENDANCE À L’ENVIRONNEMENT

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© Illustrations de Stefano Fabri

’est le neuropsychologue français François Lhermitte qui a décrit pour la première fois, en 1986, le syndrome de dépendance à l’environnement. Le sujet atteint de cette pathologie adapte sa personnalité à l’environnement dans lequel il se trouve. Le stimulus auquel il s’identifie est soit un élément concret – l’ameublement, la présence d’objets particuliers –, soit la personnalité de son interlocuteur. Ce trouble est dû à une lésion importante des lobes frontaux, en particulier du système qui contrôle le comportement social de l’individu et qui permet à sa personnalité d’être cohérente avec l’environnement : un système qui, en pratique, crée l’identité du sujet à l’intérieur de son cerveau. Selon une autre interprétation liée à de récentes découvertes en neurobiologie, des comportements comme celui de Giovanni seraient également liés à des anomalies de certains circuits qui gouvernent la capacité à éprouver de l’empathie, à s’ajuster aux émotions des autres. Des neurones particuliers, les « neurones miroirs », rendent possible cette aptitude. Mais en l’absence des freins, ou inhibitions, émis par les lobes frontaux, le mécanisme de miroir émotionnel domine, s’emballe, ce qui provoque une perte d’identité personnelle en faveur d’une adaptation continuelle à celle des autres.

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© Seasontime / shutterstock.com

Faut-il vraiment s’enfoncer dans cet amoncellement de gratte-ciel ? L’étude des liens entre urbanisme et maladies mentales incite à y regarder à deux fois, du moins tant que d’autres solutions sont envisageables.

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DÉCOUVERTES N euro-urbanisme

Cerveau des villes, cerveau des champs Par Judith Rauch, biologiste et journaliste scientifique.

Notre cerveau souffre en ville. Les maladies psychiques sont en lien direct avec la taille des mégapoles. D’où l’importance de pouvoir prendre de la distance. Voire d’intégrer les acquis du neurourbanisme dans la conception de nos futures villes.

EN BREF ££Même si les grandes villes sont plus sûres et moins dangereuses qu’il y a quelques siècles, le risque de développer une série de maladies mentales y est beaucoup plus élevé qu’à la campagne. ££En cause : concentration humaine, bruit et anonymat sécrètent une forte dose de stress. ££Une discipline appelée neuro-urbanisme aide à concevoir des espaces urbains plus adaptés aux besoins de notre cerveau.

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«

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oilà la principale cause de nos maladies. Le passage des voitures dans les sinuosités des rues étroites, les jurons du muletier qui n’avance plus ôteraient le sommeil [...] à des veaux marins. » C’est en ces termes que le poète romain Juvénal décrivait, voici deux millénaires, l’agitation et la nuisance causées par l’encombrement et le bruit dans les rues de Rome. Plus près de nous, jusqu’au xixe siècle, les conditions d’hygiène dans les grandes villes étaient désastreuses. L’approvisionnement en eau et les conditions de transport n’étaient pas à la hauteur de la croissance démographique effrénée. Il était dangereux de vivre à Londres, Paris ou Vienne. La mortalité infantile était plus élevée, et la nourriture moins bonne qu’à la campagne. Épidémies, incendies et accidents de circulation faisaient de nombreuses victimes. Aujourd’hui, plus de la moitié de la population mondiale habite en ville. Selon les estimations des Nations unies, cette proportion

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DÉCOUVERTES L ’infographie

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Une ville où il ferait bon vivre Pour assurer un bon équilibre psychique, les villes gagneront à réunir un certain nombre d’ingrédients clés, d’après les psychologues. Ils sont résumés sur un schéma d’ensemble.

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Texte : Janosch Deeg / Illustration : Younsun Koh

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Les symboles d’identité

Ces signes visibles sont la carte de visite de la ville et son caractère.

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1 2

Les facteurs sociaux

Logement abordable, garderies, écoles et lieux de travail à proximité facilitent l’organisation quotidienne de la vie.

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Les espaces verts

Passer du temps dans la verdure aide à déconnecter du travail, fait baisser le stress et améliore les performances cognitives.

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Des sources d’énergie écologiques

La production d’énergie durable réduit le bilan en CO2 et renforce la conscience environnementale des citoyens.

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Des pièces d’eau

Les étendues et cours d’eau proposent un contraste à l’image habituelle de la ville, faite de pierre et d’asphalte. Ils réduisent le sentiment de stress.

6

Sport et jeux

Jouer et être en mouvement maintient le corps et l’esprit en bonne condition. Les expériences collectives dans ce domaine luttent contre la solitude.

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Surfaces en friche

L’espace peut ici être utilisé à sa guise par chaque individu et servir de socle à la créativité.

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Vergers et potagers

Le jardinage et la culture de ses propres moyens de subsistance apportent bien-être, épanouissement et équilibre.


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Des espaces de détente proches

Les forêts environnantes, les montagnes ou les cours d’eau offrent un moyen de se changer rapidement les idées.

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10 Une offre culturelle Cinémas, théâtres et musées procurent non seulement du divertissement, mais également un sentiment d’appartenance collective.

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La diversité urbaine

La multiplicité des quartiers – vieille ville, banques, quartier étudiant – crée un sentiment de variété et de renouvellement.

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Le Wifi

L’accès gratuit à Internet facilite la communication et la circulation de l’information, créant un sentiment d’appartenance et de liberté.

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Les espaces piétons

Les zones piétonnes sont idéales pour flâner et faire des rencontres de manière détendue. Et les enfants peuvent y jouer plus facilement.

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La vie nocturne

En soirée ou le week-end, c’est ici qu’on lie amitié ou qu’on se rencontre entre collègues, camarades ou connaissances.

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Les zones commerçantes

Un bon dosage de petites boutiques, de magasins pour la semaine et de grands centres commerciaux permet de satisfaire des besoins variés.

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Les transports en commun

Des transports publics efficaces allègent le trafic automobile, la pollution aux particules fines et les nuisances sonores.

5 SOURCES L. Tyrväinen et al., NeuroLines : The incidence of urban green environments on stress relief measures : A field experiment, Journal of Environmental Psychology, vol. 38, pp. 1-9, 2014. S. De Vries et al., Streetscape greenery and health : Stress, social cohesion and physical activity as mediators, Social Science & Medicine, vol. 94, pp. 26-33, 2013. K. G. Lambert et al., Brains in the city : Neurobiological effects of urbanization, Neuroscience & Behavioral Reviews, vol. 58, pp. 107-122, 2015.

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DÉCOUVERTES G randes expériences de psycho

Seligman

et les lois de la

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résignation Par Daniela Ovadia, codirectrice du laboratoire Neurosciences et société de l’université de Pavie, en Italie, et journaliste scientifique.

Quand on perd l’espoir, on baisse les bras et on voit tout en noir. Un psychologue, Martin Seligman, a montré que cette résignation est généralement le fruit d’un apprentissage. C’est la confrontation répétée aux situations insolubles qui nous fait renoncer à essayer de nous en sortir.

EN BREF ££Face à un événement que l’on ne contrôle pas, on se résigne parfois et on l’accepte.

© Stefano Fabbri

££Le psychologue Seligman a prouvé que l’impuissance pouvait ainsi être apprise ; les chiens de ses expériences ne fuyaient plus la douleur quand ils s’étaient résignés à l’accepter auparavant. ££C’est ainsi que certaines personnes généralisent leur impuissance à toute situation de leur vie. Une cause probable de dépression.

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arfois, quand un psychologue devient une star, ses découvertes se banalisent et ses expériences, malgré toute leur élégance, sont oubliées. C’est le cas de Martin E. P. Seligman, un Américain né en 1942. Selon une enquête récente, il est le treizième psychologue le plus cité au monde par la presse, juste après des monstres sacrés comme Freud et Jung. Il doit sa célébrité à la publication de plusieurs best-sellers de développement personnel, un genre qui ne convainc guère les scientifiques en général. Et le courant auquel il appartient s’appelle la psychologie positive, avec le cortège d’attentes et de simplifications (comme l’idée selon laquelle il faut voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide) qu’un


Dossier

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ALZHEIMER

© Eduard Gurevich /shutterstock.com

ENFIN L’ESPOIR D’UN TRAITEMENT ?

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La maladie d’Alzheimer est de mieux en mieux comprise. Aujourd’hui, plusieurs molécules sont au banc d’essai afin d’être validées en tant que traitements potentiels. D’où la question cruciale : l’une d’entre elles sera-t-elle efficace ? Par Laura Poupon, post-doctorante à l’UCL School of pharmacy de Londres.

EN BREF ££De plus en plus de pistes de traitements sont explorées pour la maladie d’Alzheimer. ££Certaines molécules luttent contre l’inflammation des neurones, d’autres ciblent les plaques amyloïdes qui causent la neurodégénérescence. ££Une partie de ces traitements sont testés dans des essais cliniques, mais il faudra attendre encore plusieurs années pour espérer des résultats.

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n 2017, d’après l’Organisation mondiale de la santé, 47,5 millions de personnes étaient atteintes par la maladie d’Alzheimer. C’est plus que la population de l’Espagne. Et en 2050, ce chiffre atteindrait 135 millions de personnes. On a le vertige, d’autant plus que cette pathologie pose un défi : alors que des maladies qui faisaient autrefois des ravages comme la variole, la poliomyélite ou la tuberculose, ont été pratiquement éradiquées d’un grand nombre de pays par des traitements efficaces, la maladie d’Alzheimer ne semble pas avoir trouvé de traitement probant. Est-ce une question de temps ? Quel espoir apportent les progrès scientifiques pour surmonter ce fléau ? Pour le savoir, les chercheurs ont travaillé depuis des décennies à une compréhension fine de ce qu’est la maladie d’Alzheimer. Elle fait partie de ce qu’on appelle les démences, et elle représente à elle seule 9 cas sur 10 de ces fameuses démences, parmi lesquelles on compte aussi les démences frontotemporales, à corps de Lewy ou vasculaires. Alzheimer est en outre une maladie neurodégénérative, c’est-à-dire qu’elle se caractérise par une perte progressive des neurones. Évolutive et – à ce jour – irréversible, elle

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INTERVIEW

BRUNO DUBOIS

Professeur de neurologie et directeur de l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer (IM2A) de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.

LES AVANTAGES DU

DIAGNOSTIC PRÉCOCE

Quelle est l’étendue actuelle de la maladie d’Alzheimer ? La maladie d’Alzheimer est la pathologie du cerveau la plus répandue dans la population générale : 5 % des plus de 65 ans et 15 % des plus de 85 ans sont concernés. Elle se caractérise par deux types de lésions qui touchent certaines régions cérébrales et progressent lentement. D’abord, apparaissent des troubles de la mémoire, puis, à mesure de la progression des lésions, d’autres symptômes : des difficultés d’orien-

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tation dans le temps et dans l’espace, dans la capacité à s’exprimer, des troubles de la reconnaissance visuelle et de l’identification, notamment des visages. On observe aussi des modifications du comportement, en particulier une apathie, c’est-àdire un manque d’entrain, d’envie, d’engagement dans l’action. Résultat : les sujets deviennent de plus en plus dépendants au quotidien, moins autonomes. Et quand ils ne peuvent plus s’occuper d’euxmêmes, on parle de démence. Rien à voir bien sûr avec la folie ou un désordre mental. Cette démence est incurable, mais elle n’est que le stade tardif de la maladie ; longtemps avant, on est capable de détecter les sujets qui développeront ces symptômes. Ce qui permet donc de les prendre en charge plus tôt. Dans ce contexte, quelle est l’importance d’un diagnostic précoce ? Plus on repère tôt les patients, plus on peut les inclure dans un projet de prise en charge – ou de prise en « soin » comme on le dit maintenant – globale, qui associe des mesures d’accompagnement du patient et d’aide à son entourage, des médicaments et des traitements non pharmacologiques. De nombreuses études scientifiques ont révélé que cela ralentissait effectivement l’évolution de la maladie. Comment déterminer si les pertes de mémoire dont on souffre presque tous en vieillissant sont normales ou les prémices d’une éventuelle maladie d’Alzheimer ? C’est toute la question de la qualité du diagnostic précoce. Il est possible de détecter un patient tôt si on connaît bien le fonctionnement de la mémoire, car des tests simples permettent de repérer les troubles de la mémoire spécifiques de la maladie d’Alzheimer qui apparaissent au tout début. Cette pathologie entraîne en effet un syndrome amnésique très particulier qui correspond à une ano-

malie de stockage des informations. Par exemple, le patient rencontre pour la première fois son arrièrepetit-fils, lui dit bonjour, mais se demande 10 minutes plus tard qui est cet enfant qui tourne autour de lui. Ce qu’il faut comprendre, c’est que la mémoire fonctionne en trois temps. La première étape est l’encodage des informations dans la mémoire, qui

exemple perturbe la première étape, l’entrée des données en mémoire, la maladie d’Alzheimer la deuxième, le stockage dans le coffre-fort, et l’âge, ou le vieillissement, la troisième, la récupération des informations pourtant bien stockées en mémoire. Ce sont en gros les trois situations auxquelles le médecin généraliste est confronté. Or nous avons mis au

La maladie d’Alzheimer entraîne des troubles de la mémoire très particuliers qui se distinguent totalement de ceux que l’on observe dans toutes les autres affections mentales. dépend de l’attention – on ne retient que ce à quoi on est attentif. Puis vient le stockage des données dans le coffre-fort, grâce à l’hippocampe en l’occurrence. Troisièmement, la récupération des souvenirs : l’information est dans le coffre, mais il faut l’en faire sortir pour s’en souvenir. La première région cérébrale touchée par les lésions de la maladie d’Alzheimer est l’hippocampe. Des tests relativement simples permettent de détecter ce que l’on appelle un syndrome amnésique de type hippocampique, qui se distingue totalement des troubles mnésiques que l’on observe dans les autres affections mentales. Ce qui est une « chance » pour les médecins. Les autres maladies, comme les accidents vasculaires cérébraux, la démence frontotemporale, la dépression, les troubles du sommeil, etc., perturbent le fonctionnement de la mémoire, mais d’une autre façon. À quoi correspond le syndrome hippocampique ? Un trouble mnésique peut concerner l’une ou l’autre des étapes de la mémorisation. En schématisant, je peux dire que la dépression par

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point pour l’usage courant un test à destination des médecins qui permet d’isoler la deuxième étape, fragilisée dans la maladie d’Alzheimer, en vérifiant que les première et troisième étapes sont bien efficaces. Combien de temps avant l’apparition de la démence peut-on faire ce test mnésique ? Dès qu’une personne se plaint de troubles de la mémoire. Si le test est positif, le patient est peut-être dans la phase dite prodromale de la maladie d’Alzheimer. Cette période est très longue et résulte uniquement de l’atteinte de la région hippocampique, avec peu ou pas d’autres symptômes associés. Elle change complètement notre vision de la maladie, car elle est isolée et focalisée sur le stockage des données en mémoire et peut être mise en évidence précocement. Elle peut durer plusieurs années, jusqu’à 7 à 10 ans d’après mon expérience clinique. Puis, dès que les lésions s’étendent à d’autres régions cérébrales, tout s’accélère : les autres troubles cognitifs et comportementaux apparaissent, et le patient tombe rapidement dans la démence.


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Un essai clinique a révélé qu’un bon régime alimentaire, une activité physique et une vie sociale adaptée peuvent prévenir le déclin cognitif lié, entre autres, à la maladie d’Alzheimer.

COMMENT ÉVITER LA

DÉMENCE N° 92 - Octobre 2017


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Par Miia Kivipelto et Krister Håkansson.

EN BREF

© GettyImages.com / Al Bello / Employé

££La plupart des médicaments testés contre la maladie d’Alzheimer sont inefficaces. Or le nombre de patients ne cesse d’augmenter. ££Une étude récente a cependant prouvé qu’un régime alimentaire adapté, l’exercice physique et d’autres habitudes de vie améliorent les aptitudes cognitives, comme la mémorisation et la réactivité, des sujets. ££De fait, les chercheurs ont établi une première liste de conseils liés à l’alimentation, à l’activité physique et à l’implication sociale.

C’

est une évidence : nous vivons de plus en plus vieux. L’espérance de vie est passée de 45 ans au début du xxe siècle à plus de 80 ans aujourd’hui dans différents pays, dont la plupart des nations européennes, le Japon, le Canada et l’Australie. Si cette tendance se confirme, de nombreux bébés nés en 2017 dans ces pays dépasseraient leur centième anniversaire. Mais il y a toujours un revers de la médaille : nous vivons plus longtemps, mais pas forcément

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mieux qu’avant. Des études menées dans plusieurs pays révèlent que, après l’âge de 60 ans, la majorité des personnes souffrent d’au moins un trouble chronique, par exemple d’une maladie cardiovasculaire ou du diabète. En Suède, des chercheurs ont même montré qu’après 80 ans, seul un individu sur dix vit sans aucune maladie. Et la plupart de ces personnes âgées présenteraient au moins deux pathologies chroniques. D’où les enjeux de la médecine moderne : prévenir, prendre en charge et contrôler ces troubles liés à l’âge. Mais certains résistent aux tentatives de prévention et de traitement mises en place : c’est le cas de la maladie d’Alzheimer, la pathologie neurodégénérative la plus fréquente et la première cause de démence dans le monde. La maladie suit une évolution inexorable qui prive, lentement mais sûrement, la personne de sa mémoire et de son sentiment d’identité. Des pertes qui ont des conséquences dévastatrices non seulement pour le patient, mais aussi pour son entourage, en particulier sa famille et ses amis.


DOSSIER A LZHEIMER : LES NOUVELLES RAISONS D’ESPÉRER

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LA MALADIE D′ALZHEIMER EST-ELLE

Par Auteur Xxxxxxx Fonction xxxxxxxxxxxxxxxx

Les plaques amyloïdes (en jaune) entre les neurones sont une des lésions de la maladie d’Alzheimer. On soupçonne qu’elles se transmettent d'une personne à l'autre à la manière des prions.

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CONTAGIEUSE ? Une étude controversée a fait souffler un vent de panique en avançant que la pathologie neurodégénérative la plus fréquente serait peut-être transmissible entre les hommes. Derrière les paillasses, la recherche s’accélère pour découvrir la vérité.

Par Alison Abbott, correspondante senior Europe de la revue Nature.

EN BREF

Legende photo xxxxx xxx xxxxx xxx xx xxx xxxxx xxx xxxxxxx xxx xxxxx xxx xxx xx xxx xxxxx xxxxxx xxx xxxxx xxx xx xxxx xxxxx xxx xxxxx xxx xxxx xxx xxx xx xxx xxxxx xxx xxx xx xxx xxxxx xxx

© Gettyimages/Juan Gaertner/Science Photo Library

££En septembre 2016, l’équipe du chercheur John Collinge annonce que la maladie d’Alzheimer serait peut-être transmissible d’homme à homme comme celle de Creutzfeldt-Jakob. ££En effet, le prion et la protéine amyloïde formant l’une des lésions de la maladie d’Alzheimer présentent des similitudes. Et Collinge a retrouvé des « graines » amyloïdes dans le cerveau de patients envahi de prions. ££Reste à savoir si ces graines se transmettent bien en transférant des liquides ou des tissus humains. Pour l’instant, les chercheurs n’en sont pas certains.

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n 25 ans de carrière en neurologie, John Collinge a vu passer des centaines de cerveaux humains. Mais ce qu’il découvre ce jour de janvier 2015 sous l’objectif du microscope est une première. L’équipe de pathologistes avec laquelle il travaille est en train d’examiner le cerveau autopsié de quatre individus ayant reçu des injections d’une hormone de croissance dérivée de cadavres humains. Quelques-unes de ces préparations cérébrales contiennent une protéine mal repliée (à la configuration spatiale anormale), nommée prion, la cause de l’encéphalopathie rare et mortelle qu’est la maladie de Creutzfeldt-Jakob (voir la figure page 65). Et les quatre patients, quadragénaires ou quinquagénaires, sont décédés de cette pathologie. Toutefois, ce qui intrigue vraiment Collinge ce


ÉCLAIRAGES p. 74 Nos frères les arbres p. 76 Quand l’inertie favorise le changement

Retour sur l’actualité PATRICK PERETTI-WATEL

Sociologue et directeur de recherche à l’Inserm.

Vaccins obligatoires La contrainte est-elle efficace ?

Il y a du bon dans l’idée d’imposer une nouvelle série de vaccins. Mais sans persuasion en parallèle, l’idée peut faire long feu...

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ortée par la figure héroïque de Louis Pasteur, la vaccination a longtemps été le premier symbole des succès de la santé publique dans notre pays. Hélas, les temps ont changé : depuis plusieurs années, les chercheurs qui observent et mesurent les attitudes et les opinions de la population à l’égard de la vaccination constatent une défiance croissante, qui semble d’ailleurs plus marquée en France que dans d’autres pays, même si ce phénomène est loin d’être cantonné à l’Hexagone. Il faut souligner que cette défiance a des conséquences concrètes. La campagne de vaccination contre la grippe H1N1 a ainsi été un échec retentissant (seuls 8 % des Français ont accepté le vaccin en 2009), depuis lors la couverture vaccinale recule pour la grippe saisonnière, et cette couverture reste insuffisante pour plusieurs maladies infantiles, favorisant notamment des épidémies de rougeole (depuis 2008, 24 000 cas et 10 décès en France, selon Santé publique France).

© gettyimages/BSIP/Contributeur

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L’ACTUALITÉ

LA SCIENCE

L’AVENIR

Au début du mois de juillet, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé que 8 nouveaux vaccins, jusqu’alors recommandés pour les tout-petits (coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque et méningocoque C), seront dorénavant obligatoires.

La France est, selon un récent sondage, le pays dont la population est la plus hostile aux vaccins. Le caractère obligatoire peut apporter des réponses, notamment en rassurant les personnes sur l’efficacité et l’innocuité des vaccins. Mais le risque existe de voir certains parents recourir à de faux certificats pour pouvoir inscrire leurs enfants à l’école ou à diverses activités.

La priorité pour l’avenir sera de diminuer la crainte du public vis-à-vis des vaccins tout en augmentant la confiance dans leur efficacité. Par exemple, en mettant en avant les risques représentés par les maladies en jeu, et en formant les médecins afin qu’ils sachent exposer à leurs patients les risques et les avantages des vaccins d’une manière cohérente.

En organisant l’an dernier une concertation citoyenne sur la vaccination, les pouvoirs publics ont marqué leur volonté de lutter contre ce phénomène. Mais les recommandations proposées par le comité d’orientation de cette consultation, comité qui a procédé à ses propres auditions et mené ses propres réflexions, ont déjà fait couler beaucoup d’encre, puisqu’elles défendent une extension de l’obligation

Pour certaines personnes, le fait qu’un vaccin soit obligatoire plutôt que recommandé constitue un signal révélateur de sa qualité. N° 92 - Octobre 2017

vaccinale à tous les vaccins jusqu’ici seulement recommandés pour la petite enfance, ce qui concerne un total de 11 vaccins (en plus de la diphtérie, de la poliomyélite et du tétanos qui étaient déjà obligatoires, 8 autres s’ajouteront en 2018 : coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque et méningocoque C). CONTRAINDRE... MAIS AUSSI CONVAINCRE ! Or une telle mesure, reprise par la nouvelle ministre de la Santé et annoncée pour l’année prochaine par le Premier ministre lors de son discours de politique générale, a de quoi heurter. Non seulement on ne voit pas comment l’obligation vaccinale pourrait mettre fin au désamour entre les Français et les vaccins, ou plus précisément comment elle pourrait restaurer leur confiance, mais en outre elle prend le contre-pied de tous les discours qui promeuvent la responsabilisation et l’autonomie des personnes, exhortées à devenir les entrepreneurs de leur propre existence, et en particulier de leur santé. Que peut-on attendre de cette mesure ? Une hausse des couvertures vaccinales, très probablement, car le caractère obligatoire d’un vaccin


VIE QUOTIDIENNE

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p. 82 Apprendre à lire en quatre mois p. 84 Mon bureau idéal

Laissez les enfants

compter sur leurs doigts Par Catherine Thevenot et Justine Dupont-Boime.

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n 1964, une petite fille de 11 ans, née sans avant-bras, dit pouvoir compter sur ses doigts comme s’ils étaient là. Pendant ses premières années de scolarité, elle place ses mains imaginaires sur la table et compte sur ses doigts tendus un à un, tout comme les autres enfants. Comment ne pas voir dans cet exemple un signe du lien profond qui unit les doigts et les nombres ? Et un indice de l’intérêt qu’il y aurait, pour les enfants, à utiliser ses doigts pour réussir des calculs simples durant les premiers apprentissages ? Cette petite fille née sans mains disait percevoir mentalement ses doigts de façon très précise. Cette aptitude à ressentir une partie de son corps s’appelle « gnosie ». Et lorsqu’il s’agit des doigts en particulier, on parle de gnosie digitale. Une capacité qui peut varier selon les individus et qui semble, fait étonnant, liée aux performances mathématiques. En effet, dès 1998, des

« Pas avec les doigts ! » dit la maîtresse. Pourtant, des recherches récentes montrent que cette pratique conduit plus tard à de meilleures performances en mathématiques.

EN BREF ££Que faire quand un enfant s’aide de ses doigts pour compter ? ££C’est probablement qu’il est intelligent ! Les plus malins ont le réflexe de le faire et cela semble correspondre au fonctionnement du cerveau. ££Mieux encore : les enfants ayant une bonne représentation mentale de leurs doigts deviennent meilleurs en maths. ££Des méthodes pourraient aider à « bien » compter sur les doigts.

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chercheurs ont demandé à de jeunes enfants de 5 à 6 ans de placer leurs mains derrière un cache, bras tendus et paumes sur la table de manière à ne plus voir leurs doigts. Les chercheurs touchaient délicatement un ou deux doigts des enfants qui, une fois le cache retiré, devaient désigner quels doigts avaient été touchés. C’était une façon de mesurer la finesse de la perception que les enfants ont de leurs doigts, la fameuse gnosie digitale. Eh bien, les enfants réalisant les meilleures performances à cette tâche avaient aussi les meilleurs résultats en mathématiques, un an et trois ans plus tard… LES AVANTAGES DE LA GNOSIE DIGITALE De ces résultats intrigants, peut-on conclure qu’une meilleure sensibilité des doigts permet le développement de capacités mathématiques supérieures ? Actuellement, l’une des hypothèses les plus solides est que la gnosie digitale favorise


© Michal Knitl / shutterstock.com

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Spontanément, certains enfants s’aident de leurs doigts pour apprendre à compter, à additionner... Jusqu’à un certain âge, cette pratique devrait être encouragée. Elle disparaîtra ensuite naturellement.

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VIE QUOTIDIENNE L es clés du comportement

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NICOLAS GUÉGUEN Directeur du Laboratoire d’ergonomie des systèmes, traitement de l’information et comportement (lestic) à Vannes.

Mon bureau idéal

V

Bien-être, concentration, créativité… Tous ces facteurs peuvent être stimulés par quelques aménagements de votre espace de travail.

ous avez probablement déjà entendu de nombreux conseils ergonomiques pour agencer votre espace de travail, afin de prévenir certains troubles physiques. Il est par exemple recommandé de bien régler la hauteur de son siège et de son écran d’ordinateur pour s’éviter un mal de dos chronique. En revanche, peu de solutions sont proposées pour optimiser des facteurs comme le bien-être ou les performances. Les recherches en psychologie montrent pourtant qu’il y a de vrais leviers à ce niveau ! Quelques aménagements simples devraient ainsi vous permettre de vous sentir mieux au bureau... PERSONNALISEZ VOTRE ESPACE Premier conseil : personnalisez votre espace de travail. Photos, plantes vertes, tableaux, dessins des enfants… Tout est bon ! Meredith Wells, de l’université du Kentucky, a montré les bienfaits de cette habitude dans une enquête menée auprès

EN BREF ££Au bureau, de nombreux paramètres agissent sur notre état psychologique : la décoration, l’éclairage, ce que nous voyons par la fenêtre… ££Les enquêtes montrent alors que personnaliser son espace de travail permet de s’y sentir mieux. ££Disposer quelques plantes dans son bureau augmente par exemple le bien-être et la créativité, tout en diminuant les sensations de fatigue et les migraines.

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de 338 employés, travaillant dans une vingtaine d’entreprises différentes. Elle a constaté que plus un employé personnalise son bureau, plus il se déclare satisfait de son environnement et de son métier. Conséquence logique : les entreprises qui laissent leurs employés libres d’aménager leur espace comme ils l’entendent sont celles où le niveau de bien-être et le moral des troupes sont les plus élevés. Le climat social – mesuré notamment par le nombre de fois où des collègues s’entraident dans la journée – y est aussi meilleur, tandis que le taux d’absentéisme est plus bas. Personnaliser son bureau agirait sur l’humeur de multiples façons. D’abord, les employés se sentent plus « chez eux ». Ensuite, ils ont l’impression que leur individualité est davantage reconnue – qu’ils ne sont pas qu’un rouage de la machine, en quelque sorte. Les éléments de décoration comme les photos ou les dessins leur inspirent en outre des souvenirs et des émotions agréables. Enfin, ils ont


© Charlotte-Martin/www.c-est-a-dire.fr

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LIVRES

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p. 90 Hypnose : le pouvoir de se transformer p. 94 La Rochefoucauld et les mirages de l’amour-propre

SÉLECTION

A N A LY S E Par Sylvie Berthoz

SCIENCE ET SOCIÉTÉ Le Souci de la nature de C . Fleury et A.-C. Prévot (dir.) CNRS Éditions

PSYCHIATRIE Q uand nos émotions nous rendent fous de P hilippe Jeammet O dile Jacob

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our le psychiatre Philippe Jeammet, notre vie intérieure se caractérise par une lutte entre des forces contraires : l’appétence et l’aversion, le plaisir et le déplaisir, la confiance et la défiance… Ces forces se tempèrent mutuellement et se traduisent par des émotions qui nous poussent à agir. Chacune a un intérêt : il est aussi utile de fuir ce qui nous menace que d’aller vers ce qui nous nourrit. Mais que se passe-t-il quand l’équilibre est rompu ? C’est ce qu’explore l’auteur dans cet ouvrage. Par la narration de nombreux cas cliniques et témoignages de patients, il montre à quel point les réactions de chacun dépendent de ses besoins, de ses valeurs, de sa manière de se jauger par rapport aux autres, de ses expériences passées et de ses aspirations. Une même situation peut alors être vécue de façon totalement différente, laissant certains quasi indifférents tout en suscitant chez d’autres des émotions démesurées. Au point de déclencher ce que le psychologue américain Daniel Goleman nomme un « coup d’État neuronal », expression reprise ici par Philippe Jeammet : « Le centre limbique sonne l’alarme et prend le contrôle du cerveau. » Dans les cas extrêmes, un basculement dans la violence ou la folie s’ensuit. Le lecteur découvrira donc ici un nouvel éclairage sur les maladies mentales, décrites au travers des dysfonctionnements de l’émotivité. Tout au long des chapitres s’intègrent de manière féconde les enseignements des neurosciences et de la psychologie. Ainsi, c’est en véritable « polyglotte » que l’auteur, imprégné de multiples disciplines et nourri de ses années de pratique clinique, nous explique les déterminants émotionnels de nos comportements. C’est dans les multiples niveaux de son analyse que réside l’originalité du livre. Le message le plus fort est peut-être que rien n’est figé : même si les émotions sont devenues dysfonctionnelles au point de déclencher une maladie mentale, tout peut encore se transformer, se rejouer. Questionner les ressentis, les partager plutôt que les taire, les accepter plutôt que les annihiler, sont quelques-unes des clés que donne l’auteur pour rouvrir la voie vers le rétablissement de l’harmonie intérieure. Sylvie Berthoz est chargée de recherche dans l’Unité INSERM U669 et psychologue à l’Institut mutualiste Montsouris, à Paris.

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PSYCHOLOGIE La Science à contre-pied de C ollectif Belin

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epuis une dizaine d’années, nombre de blogs scientifiques ont émergé sur le Web. Cet ouvrage collectif rend hommage à ce nouveau mode de vulgarisation, en compilant les textes d’une quarantaine de membres du Café des sciences, l’une des principales plateformes francophones. Vous y apprendrez par exemple que les pigeons sont physionomistes, que des cellules fœtales colonisent le cerveau des futures mamans ou que l’idée que nous n’utilisons que 10 % de notre encéphale est un parfait mythe. Bref, une plongée au cœur de la science étonnante, qui fait la part belle aux découvertes des neurosciences et de la psychologie.

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a protection de la planète sera l’un des grands enjeux du XXIe siècle et la psychologie a toute sa part à prendre à ce combat. C’est ce que l’on comprend à la lecture de cet ouvrage collectif. D’abord, parce que cette discipline révèle les multiples bienfaits du contact avec la nature (sur le stress, l’humeur, la fatigue attentionnelle…). Ensuite, parce qu’elle donne des moyens d’agir. De nombreuses études se penchent en effet sur les façons d’inciter les gens à adopter des comportements plus écoresponsables et de transmettre le respect de l’environnement à nos enfants. Un livre précieux, donc, pour la bataille environnementale qui s’annonce.


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COUP DE CŒUR Par Laurent Bègue

PSYCHOLOGIE ANIMALE Qui va prendre le pouvoir ? de P ascal Picq Odile Jacob NEUROSCIENCES La Communication du vivant de J oël Bockaert Odile Jacob

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ans cet ouvrage, le biologiste et académicien Joël Bockaert ne suggère rien moins que remplacer le « Je pense donc je suis » de Descartes par « Je communique donc je suis ». Il montre ainsi à quel point la communication est à la base du vivant. Si l’homme est champion en la matière, grâce au langage et aux moyens techniques modernes, même les bactéries échangent des informations ! Les messagers utilisés sont chimiques, électriques, acoustiques, visuels… L’auteur décrit ce monde de communications omniprésentes avec une grande érudition, depuis l’échelle des cellules jusqu’à celle des sociétés.

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os cousins primates vont-ils prendre le pouvoir, comme dans le film La Planète des singes ? C’est peu probable, nous explique l’éthologue et paléoanthropologue Pascal Picq, tant de nombreuses espèces sont menacées d’extinction. Mais ils nous offrent une opportunité unique de prendre du recul sur les différentes formes d’intelligence et sur le fonctionnement de nos sociétés, eux qui sont doués d’humour, de sens politique, de sociabilité… L’auteur étend ensuite son analyse à l’intelligence artificielle, dans ce livre foisonnant qui invite à réfléchir à ce qui fait l’homme.

PSYCHOLOGIE T ribus morales de J oshua Greene M arkus Haller

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’étude des processus psychologiques qui sous-tendent les conduites et les jugements moraux a réalisé d’étonnants progrès depuis une quinzaine d’années. Pourtant, trop rares sont les livres publiés en langue française qui en font état. On ne peut donc que saluer cette traduction de l’ouvrage du psychologue américain Joshua Greene, mondialement connu dans le domaine. Du point de vue évolutionniste, la morale semble à première vue paradoxale : comment la sélection naturelle a-t-elle favorisé l’émergence de comportements parfois contraires aux intérêts individuels ? L’auteur définit alors la morale comme « un ensemble d’adaptations psychologiques qui permet à des individus naturellement égoïstes de tirer avantage de la coopération ». L’empathie, une de ces « adaptations psychologiques », aurait ainsi favorisé notre survie car nous sommes plus forts ensemble. Mais ce processus aurait aussi conduit à l’émergence d’un tribalisme fondamental : un ensemble d’automatismes sociaux et affectifs, comme les tendances à distinguer entre « nous » et « eux » et à éprouver davantage d’empathie pour les membres de son groupe, nous pousse à favoriser ce dernier au détriment des autres. Chaque « tribu » – chaque groupe socioculturel, ethnique, religieux… – définit alors ses propres valeurs, sources de divergences et de conflits. L’auteur délivre pourtant un message d’espoir : ces antagonismes n’ont rien d’inéluctable, car nos réactions automatiques peuvent être « corrigées » par la pensée rationnelle. Il propose alors diverses pistes pour parvenir à une métamorale, c’est-à-dire un ensemble de critères susceptibles de concilier les différents systèmes de valeurs. Plutôt que sur des intuitions morales, Joshua Green parie donc sur les forces de la rationalité. Son ouvrage est remarquable à plus d’un titre. D’abord, parce qu’il tente de résoudre les apparentes contradictions de la morale et de l’évolution. Ensuite, car il introduit avec limpidité une multitude de travaux fascinants issus de la psychologie, de l’économie expérimentale et des neurosciences. Enfin, parce qu’il trace brillamment de nouvelles perspectives scientifiques. Tout simplement un livre de référence. Laurent Bègue est professeur de psychologie sociale à l’université de Grenoble.

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LIVRES B onnes feuilles

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BETTY MAMANE Journaliste scientifique.

Hypnose

Le pouvoir de se transformer

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programmées de notre cortex. Un test connu des psychologues, mis au point par James Stroop en 1935, consiste à dire rapidement de quelle couleur sont les lettres utilisées pour un mot désignant une couleur différente. À savoir par exemple : le mot « bleu » écrit en rouge. Un temps d’hésitation est alors tout à fait naturel car notre cerveau se trouve déstabilisé face à deux informations qui lui semblent contradictoires : spontanément on a tendance à lire le mot (bleu), alors qu’ici il est demandé d’indiquer sa couleur (rouge). En 2012, l’équipe d’Amir Raz, du département de psychiatrie de l’université McGill, a eu l’idée de faire réaliser ce test à des sujets après

omme le révèlent les neurosciences, l’hypnose modifie nos processus cognitifs et sensoriels. Elle entraîne à revisiter la réalité et la perception que l’on en a et, par là même, à développer des comportements et des facultés inédites. L’hypnose a ainsi la particularité de désamorcer certaines réactions

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© Charlotte Martin/www.v-c-est-a-dire.fr

Une des clés de l’efficacité de l’hypnose : sa capacité à débrancher les automatismes et à favoriser la flexibilité psychologique. Un atout analysé par la journaliste Betty Mamane dans son dernier livre publié chez Belin en partenariat avec Cerveau & Psycho. Extraits.


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une séance d’hypnose. Et ils l’ont mieux réussi que d’autres qui n’avaient pas été hypnotisés. DÉBRANCHER LES AUTOMATISMES Les chercheurs ont ensuite réitéré le même type d’expérience mais impliquant les perceptions auditives : les participants sont installés face à un écran qui projette l’image d’une personne en train de parler et il leur est demandé de noter les sons qu’ils perçoivent. Cependant, ce qui n’est pas précisé aux volontaires, c’est que le seul son émis est « ba », alors qu’à l’image, la personne prononce d’autres syllabes comme « pa » ou « fa ». L’incohérence entre les deux messages (entre le « ba » entendu et le « pa » ou la prononciation du « pa » ou du « fa » qui se dessine sur les lèvres) fait que 75 % des sujets notent un son erroné. C’est une conséquence de « l’effet McGurk », du nom du psychologue qui l’a mis en évidence. Preuve que notre cerveau combine automatiquement les dimensions visuelle et auditive d’un message. S’il y a une incohérence entre les deux, la perception se brouille. Dans un second volet de l’expérience, l’expérimentateur annonce aux participants qu’il va les hypnotiser pour les rendre plus réceptifs au test : « Pensez comme dans un rêve éveillé, et laissez vos paupières se fermer doucement, relâchez vos épaules, vos muscles, imaginez que vous êtes très lourds, et tout en écoutant ma voix, je voudrais que vous remarquiez à quel point il est facile de vous concentrer sur ce que vous entendez, et de repérer les sons. Votre sens de l’ouïe domine tout le reste. Ce super sens auditif va être très important quand vous allez refaire l’exercice sur l’ordinateur. Avec cette aptitude particulière, vous pourrez repérer immédiatement le son que vous

Nous sommes souvent enfermés dans une façon de voir, et l’hypnose nous permet de changer de point de vue. Pr Amir Raz, université McGill (Canada)

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entendez. » Après cette suggestion hypnotique, le taux d’erreur sur la perception du message sonore tombe de 75 % à 25 %. La démonstration est ainsi faite qu’il est possible, sous hypnose, de déprogrammer des réactions ou des perceptions qu’on pensait complètement automatiques. « Cela soulève des questions très importantes sur la façon dont nous pouvons agir sur le comportement humain, et aider certaines personnes à le changer, remarque Amir Raz. Beaucoup de comportements dont nous souffrons, dans lesquels nous sommes enfermés, et dont nous n’arrivons pas à nous libérer, sont des comportements devenus automatiques. »


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LIVRES N eurosciences et littérature

SEBASTIAN DIEGUEZ Chercheur en neurosciences au Laboratoire de sciences cognitives et neurologiques de l’université de Fribourg, en Suisse.

La Rochefoucauld et les mirages de l’amour-propre

Pour l’auteur des Maximes, l’amour-propre est le pilier de notre vie mentale et nous pousse à tout interpréter sous un jour qui nous est favorable. Plusieurs siècles plus tard, les neuroscientifiques découvriront le fonctionnement cérébral de ce biais cognitif.

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os vertus ne sont, le plus souvent, que des vices déguisés. » Cette épigraphe, qui introduit les Maximes du duc François de La Rochefoucauld (1613-1680) dès leur quatrième édition, résume parfaitement l’idée générale de ces brèves sentences. Au nombre de 504, elles font essentiellement ce même constat : l’être humain est profondément faux. Tel qu’il nous apparaît, il n’est rien d’autre que le résultat d’opérations mesquines visant à préserver son image, à ses yeux et surtout à ceux des autres. Certes, La Rochefoucauld modère son propos en précisant que c’est « le plus souvent » le cas, donc pas toujours. Mais la lecture complète des Maximes ne laisse guère de place à ces exceptions admirables, qui n’existent pour ainsi dire qu’à titre de contrepoints purement rhétoriques, aussi fugaces que des fantômes. Globalement, le duc

EN BREF ££Dans les Maximes, La Rochefoucauld défend l’idée que notre amourpropre fausse notre perception du monde et de nous-même, déguisant par exemple nos vices sous l’apparence flatteuse des vertus. ££La psychologie a depuis confirmé notre tendance à tout interpréter en notre faveur. ££La neuro-imagerie a aussi révélé que cette tendance s’ancre dans nos automatismes cérébraux.

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dresse un tableau de notre vie mentale et sociale qui détruit toute aspiration à l’authenticité, la sincérité ou la spontanéité. Nous ne visons au final que notre intérêt personnel, lequel est guidé par l’amour-propre, qui à son tour est influencé et malmené par des passions internes que nous ne contrôlons pas (les humeurs et les émotions), le tout étant contraint par les aléas externes de la fortune (le hasard, la chance). LES DÉGUISEMENTS DE L’AMOUR-PROPRE Pour La Rochefoucauld, ce processus psychologique est toujours à l’œuvre derrière l’apparente diversité de nos comportements quotidiens. L’amitié ? C’est un simple « ménagement réciproque d’intérêts […] ; un commerce où l’amour-propre se propose toujours quelque chose à gagner ». L’humilité ? « [U]ne feinte soumission, dont on se

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Le saviez-vous ?

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PRÉVENTION

« Le contrôle de la pression artérielle ou du diabète constituerait le premier facteur de prévention contre le développement de la maladie d’Alzheimer. » Miia Kivipelto, professeure d’épidémiologie clinique à l’institut Karolinska de Stockholm.

p. 74

ACACIA PENSANT

Dans la savane africaine, un acacia augmente la teneur en tanins dans ses feuilles lorsqu’il se fait brouter par une girafe, et la repousse. Il prévient également ses voisins en envoyant dans l’air de l’éthylène qui déclenche le même phénomène chez ces derniers. p. 51

p. 8

UNE NOUVELLE PROFESSION

Le neurojuriste intègre les avancées des neurosciences dans le droit et la justice. Il pose des questions telles que : « Dans quelle mesure une tumeur au cerveau, si elle modifie les circuits neuronaux de l’agressivité, peut-elle être une circonstance atténuante pour une personne accusée de meurtre ? » De plus en plus souvent, il donne son avis lors de procès organisés aux États-Unis.

SYNDROME HIPPOCAMPIQUE

Dans la maladie d’Alzheimer, le syndrome hippocampique désigne une atteinte particulière de la capacité à former de nouveaux souvenirs. Lié à la dégénérescence d’une structure précise du cerveau, l’hippocampe, il se détecte par des tests de mémorisation et de restitution différée de listes de mots ou d’objets. Spécifique de la maladie d’Alzheimer, il permet de la distinguer d’autres troubles de la mémoire.

p. 86

DIPLÔME OU PLANTE VERTE ?

« Pour se sentir bien au bureau et être plus efficace, chacun a sa méthode. Alors que les femmes préfèrent installer des plantes vertes, les hommes affichent volontiers leurs diplômes au mur. » Nicolas Guéguen, éthologue, directeur du laboratoire LESTIC à Vannes.

p. 31

p. 20

ANOSOGNOSIE

L’anosognosie est une absence de conscience de sa propre maladie. Elle peut se produire pour des troubles physiques (paralysie d’un membre, que le patient refuse d’admettre) mais aussi psychiques, comme la maladie d’Alzheimer. C’est en quelque sorte l’inverse de l’hypochondrie, où l’on se croit atteint d’un mal alors qu’on en est exempt.

AUTODISCIPLINE

Aux Pays-Bas, tous les panneaux de signalisation ont été retirés de certains quartiers d’une ville. Le nombre d’accidents de circulation a diminué parce que les gens sont automatiquement devenus plus prudents et plus attentifs. Le concept d’espace partagé fait son chemin…

p. 83

BIEN ÉPELER

« Tracer chaque lettre d’un mot au tableau, sur une ardoise, une feuille ou une tablette, tout en l’épelant renforce son organisation spatiale et temporelle. » Olivier Houdé, professeur à l’université Sorbonne-Paris-Cité.

Imprimé en France – Roto Aisne (02) – Dépôt légal octobre 2017 – N° d’édition M0760092-01 – Commission paritaire : 0718 K 83412 – Distribution Presstalis – ISSN 1639-6936 – N° d’imprimeur 17/08/0002 – Directrice de la publication et Gérante : Sylvie Marcé


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