« Grâce aux Jeux olympiques de Paris, les chercheurs ont établi une relation de confiance avec les entraîneurs et les sportifs »
Christophe Clanet directeur du programme Sciences2024
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08.24/09.24
HORS-SÉRIE
Ont contribué à ce numéro
Michel Audran est professeur émérite à la faculté de pharmacie de Montpellier et ancien directeur du laboratoire national de lutte antidopage de Châtenay-Malabry.
la Science
par Loïc Mangin Rédacteur en chef adjoint à Pour
Pendant quelques semaines, la planète entière va vibrer au rythme des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Mais pourquoi ? Selon Henri Bergson, il s’agit de contempler notre « puissance de libération […] vis-à-vis de l’automatisme corporel ». C’est que l’humain est le seul à déployer autant d’e orts, notamment musculaires, autrement que pour sa seule survie.
A-t-on jamais vu un guépard piquer un sprint pour le plaisir ? C’est pourquoi, paraphrasant Aristote, il voit dans l’humain un « animal sportif ».
Le philosophe aurait pu aller plus loin dans son rapport au sport, tant il s’est intéressé aux idées de temps, essentiel pour départager les concurrents, et même à la science, en disant d’elle : « [Elle] a pour principal objet de prévoir et de mesurer. » Et c’est bien ce que font aujourd’hui physiciens, biologistes, mathématiciens… lorsqu’ils s’associent aux entraîneurs et aux sportifs pour optimiser les performances de ces derniers, comme on le découvre dans ce numéro.
Et tous ont à cœur de donner raison au sociologue Edgar Morin, pour qui « un beau spectacle sportif fait partie de la qualité de la vie ».
Jules Boyko est un ancien footballeur et professeur de sciences politiques à l’université du Pacifique, à Forest Grove, dans l’Oregon, aux États-Unis.
Christophe Clanet est directeur de recherche au CNRS, membre du laboratoire LadHyX de l’École polytechnique et directeur du programme Sciences2024
Claire Thomas-Junius est une ancienne athlète, professeur à l’université d’Évry Paris-Saclay et directrice du Laboratoire de biologie de l’exercice pour la performance et la santé.
www.pourlascience.fr
p. 6 Repères
Des schémas, des chi res, des définitions : toutes les clés pour entrer sereinement dans ce numéro.
p. 8 Grand témoin
Christophe Clanet
Certains, qui se sont penchés sur la question en détail, pronostiquent un total de 60 médailles… À suivre !
p. 16 Et pourtant, il nage
Nunzio Lanotte et Sophie Lem
La propulsion d’un nageur résiste encore à toute élucidation.
p. 26 « Bonne santé et performance sportive sont indubitablement liées »
ENTRETIEN avec Claire Thomas-Junius
p. 32 Sa majesté le quadriceps
Jean-Michel Courty et Édouard Kierlik
Nombre de records s’appuient sur un seul muscle.
p. 38 Histoires paralympiques
PORTFOLIO
p. 46 Usain Bolt et la puissance… du calcul
Steven Strogatz
Faire des maths avec l’humain le plus rapide du monde.
p. 56 La consécration des foils
Marc Fermigier
Comment optimiser les embarcations équipées de foils ?
p. 64 La fibre sportive
Yves Rémond et Jean-François Caron
Les matériaux composites, décisifs pour les sportifs.
p. 72 L’ingénierie des paralympiques
Sophie Bushwick
Comment fauteuils roulants et prothèses sont-ils optimisés ?
p. 78 « Point break » à Tahiti
Jean-Michel Courty et Édouard Kierlik
Le secret d’un surfeur ?
S’inspirer du… snowboard.
p. 84 Le pari manqué de l’écologie ?
Jules Boyko
Les Jeux olympiques face aux enjeux environnementaux.
p. 90 « Nous savons déjà si la France sera dans le top 5 des nations »
ENTRETIEN avec Adrien Sedeaud
p. 96 La fin des records sportifs
G. Berthelot, I. Hamri, J. Schipman, M. Guillaume, A. Sedeaud et J.-F. Toussaint
Pourquoi de moins en moins de records du monde sont-ils battus ?
p. 104 « Les produits qui améliorent les capacités cognitives m’inquiètent… »
ENTRETIEN avec Michel Audran
p. 109 Rendez-vous
110 En image
112 Rebondissements
116 Infographie
118 Incontournables
Claire Thomas-Junius est une ancienne athlète de demi-fond, professeur à l’université d’Évry Paris-Saclay et directrice du Laboratoire de biologie de l’exercice pour la performance et la santé.
À l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, le Collège de France a organisé un grand cycle de sept tables rondes.
Durant la 4e séance, le 2 mai, sous la conduite d’Emmanuel Laurentin, producteur à France Culture, et de Sonia Garel, professeuse au Collège de France, titulaire de la chaire « Neurobiologie et immunité » et directrice de l’équipe « Développement et plasticité du cerveau à l’institut de biologie » de l’École normale supérieure, à Paris, il fut question de la biologie de la performance sportive. En quoi consistent les recherches sur lesquelles s’appuie l’entraînement des athlètes ? Comment le sport est-il utile pour préserver une bonne santé, mais aussi pour la recouvrer dans un contexte de pathologie ?
Claire Thomas-Junius s’est attachée à répondre à ces questions, et à bien d’autres. Morceaux choisis.
Emmanuel Laurentin. Au Collège de France, à l’occasion de ce cycle de tables rondes où beaucoup d’historiens interviennent, on découvre que la question de l’histoire du corps est devenue très importante dans la recherche actuelle en de nombreux domaines. Dans le vôtre, entre le moment où vous étiez sportive de demi-fond et aujourd’hui, après avoir gravi tous les échelons de la recherche, avez-vous constaté une évolution dans la connaissance du corps ?
Claire Thomas-Junius. Depuis que je baigne dans le monde du sport, j’ai observé de nombreuses transformations, notamment dues au progrès des technologies Dans les années 1960, on mesurait la consommation d’oxygène et les échanges gazeux avec des masques et des tubes pendant que le sujet courait sur un tapis roulant ou pédalait sur un vieux vélo Depuis une vingtaine d’années maintenant, on dispose d’outils miniaturisés « embarqués » qui enregistrent divers paramètres sur le terrain , durant les entraînements et les compétitions À l’appui, plusieurs appareils d’analyse révèlent à partir d’une simple goutte de sang ou de salive nombre d’informations , jusqu’aux différents ARN que peuvent contenir les échantillons . Les
chercheurs ont identifié des dizaines de biomarqueurs qui sont extrêmement puissants pour calibrer l’entraînement, mais aussi faire avancer la recherche fondamentale et conduire à des applications des sciences du sport dans le domaine sociétal.
E. L. Qu’est-ce qui, aujourd’hui, fait progresser les recherches sur la performance sportive ?
C. T.-J. Tout repose sur un dialogue entre chercheurs et institutions Placés sous la tutelle du ministère de la Recherche et du ministère des Armées, diverses fédérations sportives et plusieurs universités nationales et internationales. Par exemple, avec la Fédération française de cyclisme, nous nous sommes intéressés il y a quelques années aux effets des séances d’entraînement soit à haute intensité, soit à des allures variables sur le corps des athlètes, avec des méthodes d’investigation peu invasives Puis, en collaboration avec notamment l’université Victoria, en Australie, nous avons poursuivi nos recherches à un niveau plus fondamental pour comprendre, cette fois aux échelles cellulaire et moléculaire, à partir de biopsies musculaires, les réponses aux séances d’entraînement Sonia Garel. Pour rebondir, je pense que le domaine de la biologie de la performance sportive s’est énormément développé ces dernières années grâce à des technologies nouvelles relevant de la génétique et des approches dites « omiques » (transcriptomique, métabolomique, protéomique… ). En d’autres termes , il est
désormais facile de séquencer le génome d’athlètes, mais aussi d’individus lambda, de patients… d’étudier l’ensemble des métabolites présents dans le sang après un effort, une activité sportive, de façon globale. À partir d’observations chez l’humain, les scientifiques émettent des hypothèses, les testent ensuite sur des modèles animaux, pour finalement identifier des liens de causalité, et non plus de simples corrélations C’est aussi une façon de regarder les organismes dans des conditions un peu extrêmes, de perturber des équilibres naturels fondamentaux pour leur physiologie, et d’en apprendre beaucoup sur le rôle, par exemple, de certaines pratiques sportives dans des contextes de pathologies, de thérapies appliquées, pour un accompagnement individualisé de la santé Et puis, au passage, certaines idées reçues volent en éclats !
E. L. Quelles idées reçues avez-vous pu battre en brèche dans votre laboratoire ?
C. T.-J. Demandez à quiconque autour de vous quel est l’effet de l’acide lactique, il y a de grandes chances qu’on vous réponde qu’il s’agit d’un déchet à l’origine des crampes Qu’en est-il réellement ? Cette molécule – on parlera de lactate, car elle est le plus souvent ionisée – est bien synthétisée, essentiellement par les fi bres musculaires à contraction rapide , sollicitées lors d’exercices de haute intensité Rien de plus normal, puisque, pour créer de l’énergie, ces fibres utilisent des sucres, et qu’au terme des réactions métaboliques, du lactate est bel et bien produit.
Cependant, dans les fibres lentes, ce composé est consommé pour fournir de l’énergie : l’idée de déchet s’effondre. Plus encore, des travaux ont montré qu’un muscle ayant le choix entre du glucose ou du lactate qui circule dans le sang préférera ce dernier, avec l’avantage de freiner une possible hypoglycémie. Autre effet bénéfique, le lactate est transporté à l'extérieur des muscles avec les protons et contrecarre ainsi l’acidose musculaire, source de fatigue. Des chercheurs ont aussi montré qu’il stimule les adaptations à l’entraînement et les capacités d’endurance Et dans notre laboratoire, un étudiant en thèse explore le rôle de l’acide lactique dans la communication entre le muscle, le tissu adipeux et le foie. Enfin, des études préliminaires sur des modèles expérimentaux ont révélé que cette molécule participerait à la régulation de la masse musculaire. À la clé, de possibles applications pour mieux récupérer d’une telle blessure. L’acide lactique , ou plutôt le lactate, est ainsi réhabilité !
E. L. Dans votre laboratoire, vous portez un intérêt particulier au rugby à 7, discipline olympique récente et qui sera sous les projecteurs cet été grâce à la participation d’Antoine Dupont. En quoi la performance dans ce sport est-elle di érente de celles en athlétisme et, dans cette discipline, entre un 100, un 400 et un 800 mètres ?
C. T.-J. Le rugby est une activité dite « intermittente », en d’autres termes qui alterne des phases de course et de récupération. À l’inverse,
en athlétisme, quelle que soit la distance parcourue, l’effort est continu De la sorte, chaque spécialité est caractérisée par une demande énergétique particulière et des contraintes spécifiques. Les méthodes d’amélioration des performances seront donc adaptées En ce qui concerne le rugby à 7, la Fédération française de rugby a été précurseur, car dès 2009 elle a créé une « cellule recherche » dirigée par Julien Piscione et avec laquelle je collabore. Ce projet s’est traduit par plusieurs thèses appelées « Cifre » ( elles associent entreprise privée et laboratoire public ), financées par l’Agence nationale de la recherche et de la technologie (ANRT), destinées à mieux comprendre les exigences physiques du rugby à 7. Lors de tournois internationaux, nous avons muni les joueurs de l’équipe de France de GPS, de cardiofréquencemètres… Dès que l’un d’eux sortait du terrain, il se dépêchait de nous rejoindre pour des prélèvements sanguins De la sorte , nous avons recueilli quantité d’informations sur le nombre d’accélérations , les vitesses de courses , les consommations énergétiques… pour ensuite mieux préparer les entraînements
Quant à l’athlétisme , plus la distance est longue, et plus les différentes filières énergétiques sont sollicitées. L’une d’elles est le métabolisme aérobie, c’est-à-dire qui consomme de l’oxygène, et l’on a longtemps cru qu’il fallait au moins trois minutes pour le stimuler fortement ; aussi n’aurait-il concerné que les longues distances, à partir de 1 500 mètres Mais c’est là encore une idée reçue !
Nous l’avons montré en équipant des coureurs de 400 mètres de capteurs miniaturisés pour suivre au plus près leur course . Durant celle-ci, l’athlète part vite et essaie de résister à la décélération inéluctable Lorsque pendant une épreuve un concurrent en dépasse un autre dans les derniers 100 mètres, ce n’est pas qu’il a accéléré, c’est qu’il a moins ralenti… Avec mes collègues de l’Insep, nous avons tenté de comprendre ce qui se passe métaboliquement et physiologiquement dans les différentes tranches de 100 mètres de la course et notamment dans la dernière Et nous avons mis en évidence l’activation maximale du métabolisme aérobie au bout de seulement 250-300 mètres, soit beaucoup moins que trois minutes ( le record du 400 mètres est de 43,03 secondes).
E. L. Vous travaillez également sur l’adaptation aux conditions extrêmes, dans des environnements très froids ou très chauds, par exemple. Qu’avez-vous découvert ?
C T.-J Sur ces sujets-là, nous collaborons avec l’Institut de recherche biomédicale des armées, à Brétigny-sur-Orge, qui dispose d’une chambre climatique, un équipement qui permet de reconstituer des conditions extrêmes de chaleur, d’humidité, de vent… De fait, ceratines problématiques du froid sont communes aux sportifs et aux militaires : un rugbyman engagé dans un match à Dubaï et un soldat en mission au Sahel sont tous les deux confrontés au problème d’acclimatation à la chaleur
Les observations de mes collègues montrent que, dans les deux cas, il est conseillé avant de se rendre dans un pays chaud de s’entraîner avec des séances d’endurance, qui sont en quelque sorte des microsituations de chaleur, éventuellement dans des chambres climatiques. Et une fois sur place, il importe de maintenir une activité physique pour adapter les mécanismes de la sueur. Cela peut s'accompagner d'une déshydratation lorsque l'on réussit à bien transpirer, et donc à bien s'acclimater,, aussi faut-il boire en quantité suffisante, et compenser par des apports les pertes en minéraux.
E. L. Bien que le sport soit aujourd’hui mondialisé, existe-t-il des « écoles nationales » sur l’amélioration de la performance ?
C. T.-J. Les différences portent essentiellement sur des considérations éthiques. En France, pour comprendre les adaptations à l’exercice, une seule biopsie, au repos, est autorisée par phase d’entraînement de trois à quatre semaines. Dans les pays scandinaves, aux États-Unis, au Canada… les chercheurs peuvent procéder jusqu’à huit biopsies musculaires immédiatement après l’effort. Les possibilités de recherche ne sont donc pas du tout les mêmes. Plus encore, en Norvège, en Suède… les biopsies ont été possibles chez des enfants dès l’âge de 11 mois pour comprendre l’évolution des fibres musculaires C’est impensable dans l’Hexagone !
S. G. C’est vrai, et je le vois dans ma spécialité : sur un plan éthique – et j’ai envie de dire que ce n’est pas plus mal –, l’ensemble des recherches est fortement encadré juridiquement.
E. L. Comment le sexe est-il pris en compte dans vos recherches sur la performance sportive ?
C. T.-J. Le monde de la recherche, et moi la première, s’est longtemps autocensuré. Pour nos études, nous recrutions uniquement des hommes entre 18 et 35 ans, pour écarter tout biais méthodologique. Et un jour, en 2012, tandis que nous cherchions des cyclistes pour les livrer à des tests extrêmement intenses d’une minute, s’est présentée une jeune fille, alors 4e au championnat du monde de BMX… À part sa vitesse de sprint, inférieure à celle des hommes, puisqu’elle avait des muscles moins puissants , ses réponses
physiologiques étaient identiques. Ainsi, nous avons décidé de l’intégrer à notre pool de sujets. C’était la première fois
Depuis, pour différents projets de recherche sur l’athlétisme , le rugby à 7, en aviron… les groupes sont mixtes. Il en ressort que le métabolisme est équivalent, mais que les femmes sont moins sensibles à la douleur liée à l’exercice Désolé messieurs…
Jusqu’à 11-12 ans, avant la puberté, filles et garçons ont les mêmes capacités. Après, c’est la société qui impose tous ces stéréotypes de genre sur la différence entre les sexes, entre les qualités supposées des uns et des autres.
S. G. De fait, de façon générale, dans les études en biologie animale, on a eu pendant très longtemps un biais cognitif selon lequel les femelles étaient des mâles, mais avec des hormones en plus qui auraient risqué de fausser les résultats. De même, avec des humains, seuls les individus européens ont été privilégiés dans les panels d’étude Heureusement, cette façon de voir est en train de changer, et l’on s’en réjouit.
C. T.-J. Cette vision a même des impacts sur la santé. Un de nos étudiants, formé en sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) et désormais directeur d’une équipe de recherche aux États-Unis, a travaillé sur le cancer pédiatrique. Quel est le lien avec le sport ? Le point de départ est un constat : après une leucémie, l’espérance de vie est nettement supérieure chez les garçons que chez les filles. Pour quelles raisons ? Un élément de réponse mis en évidence réside dans les recommandations distribuées aux uns et
Bonne santé et performance sportive sont indubitablement liées
aux autres Aux garçons, il est souvent conseillé de continuer à bouger, d’aller jouer avec les copains, de faire du foot… pendant que les filles sont encouragées à rester à la maison, à se ménager. L’activité physique a donc des bienfaits sur l’organisme et sur la prise en charge thérapeutique jusqu’à être un déterminant de l’espérance de vie
E. L. On comprend alors pourquoi votre laboratoire associe dans son intitulé « performance » et « santé ».
C. T.-J. Lorsque nous l’avons créé, cette dualité était très présente dans nos esprits, et aucun des chercheurs n’aurait l’idée de séparer ces deux aspects Nous travaillons avec des sujets sains ou malades, des sportifs, des militaires…, voire des marathoniens diabétiques de type 1, tout un panel d’individus aux réponses différentes à l’effort et à l’exercice, et avec des motivations diverses, mais qui se recoupent pourtant Pour un athlète de haut niveau, il est inimaginable d’espérer une bonne performance sans être en bonne santé. À travers des stratégies nutritionnelles, d’entraînement, de sommeil, de gestion du stress… nous prenons un sportif, un militaire, un patient dans sa globalité pour le rendre efficace à la fois au niveau physique, au niveau cognitif, dans les prises de décision Être en bonne santé et être performant, c’est indubitablement lié Et sans nécessairement rechercher la performance, nous ne pouvons que conseiller à tous la pratique très régulière d'activités physiques ou sportives pour être en bonne santé, et ce tout au long de la vie !
Cet article est publié en partenariat avec le Collège de France dont les enseignements sont librement accessibles sur le site : www.college-de-france.fr
À regarder
> L’intégralité de la table ronde : www.college-de-france.fr/fr/ agenda/grand-evenement/lesjeux-au-college-de-france/biologiede-la-performance-sportive
À quelle vitesse l’humain le plus rapide du monde peut-il vraiment courir ? Répondre oblige à étudier en détail sa course et à faire un peu de maths…
> Usain Bolt est recordman du monde du 100 mètres, c’est entendu.
En bref
> Mais l’analyse détaillée de ses courses livre plus d’informations, notamment le moment où sa vitesse est maximale.
> Cette application des mathématiques révèle l’utilité de la modélisation et du calcul, ainsi que ses limites.
« L’art , disait Pablo Picasso , est un mensonge qui nous fait prendre conscience de la vérité » Il en est de même du calcul en tant que modèle de la nature Pour comprendre , laissez-moi vous raconter l’histoire du sprinter le plus rapide de la planète. Le 16 août 2008, par une soirée sans vent à Pékin À 22 h 30, les huit hommes les plus rapides du monde s’alignent pour la finale olympique du 100 mètres. L’un d’eux, un certain Usain Bolt, sprinter jamaïcain de 21 ans, est relativement nouveau dans cette épreuve Connu plutôt sur le 200 mètres, il a supplié son entraîneur pendant des années de le laisser concourir à la course la plus courte et, au cours de l’année écoulée, il est devenu très bon dans cette discipline Il se distingue des autres sprinters par son allure dégingandée, son 1,96 mètre et une longue foulée. Enfant, il s’adonnait au football et au cricket, jusqu’à ce qu’un entraîneur remarque sa vitesse et lui suggère l’athlétisme À l’adolescence, il a continué de progresser en tant que coureur, mais il n’a jamais pris le sport ou luimême trop au sérieux. Il est enjoué, espiègle et a un penchant pour les plaisanteries. Ce soir-là, dans la capitale chinoise, une fois que tous les athlètes ont fini de s’agiter devant les caméras de télévision après les présentations, le stade devient silencieux. Les sprinters placent leurs pieds dans les starting-blocks et s’accroupissent, prêts à bondir Le rituel « à vos marques, prêts » résonne, le coup de pistolet retentit, et tous s’élancent…
Usain Bolt jaillit, mais pas aussi vite que les autres. Son temps de réaction plus lent le place
en septième position sur huit au départ. Prenant de la vitesse, il se hisse au milieu du peloton à 30 mètres Puis, toujours en accélérant, il prend la tête et creuse l’écart.
À 80 mètres, il jette un coup d’œil sur sa droite pour repérer ses principaux concurrents. Se rendant compte de son avance, il ralentit visiblement, ramène ses bras le long du corps et se frappe la poitrine avant de franchir la ligne d’arrivée Certains y ont vu de la vantardise, d’autres une célébration joyeuse, mais dans tous les cas le Jamaïcain n’a manifestement pas ressenti le besoin de courir à fond jusqu’au bout, ce qui a donné lieu à des spéculations sur la performance qu’il aurait pu accomplir. Malgré tout, et avec en plus un lacet défait, il a établi un nouveau record du monde en 9,69 secondes, battant le sien, datant de mai 2008, de 3 centièmes de seconde À quelle vitesse a-t-il couru ? Eh bien, facile ! Une distance de 100 mètres parcourue en 9,69 secondes, cela donne 100/9,69 = 10,32 mètres par seconde (m/s), soit environ 37,15 kilomètres par heure (km/h). Mais il s’agit là d’une vitesse moyenne sur l’ensemble de la course Or il est allé moins vite au début et à la fin, mais plus vite au milieu. Les temps intermédiaires enregistrés tous les 10 mètres sur la piste fournissent des informations plus détaillées Il a parcouru les 10 premiers mètres en 1,83 seconde, ce qui correspond à une vitesse moyenne de 5,46 m/s (19,67 km/h). Ses meilleurs temps ont été enregistrés entre 50 et
60 mètres, entre 60 et 70 mètres et entre 70 et 80 mètres Il a franchi ces sections de 10 mètres en 0,82 seconde chacune , pour une vitesse moyenne de 12,19 m/s (43,88 km/h). Dans les 10 derniers mètres, lorsqu’il a ralenti, sa vitesse moyenne est descendue à 11,1 m/s (39,96 km/h).
L’être humain a évolué pour repérer les schémas, c’est pourquoi, au lieu d’étudier les chiffres, il est généralement plus instructif de les visualiser, par exemple sur un graphique (voir la figure a, page suivante) montrant les temps écoulés pendant lesquels Usain Bolt a franchi 10 mètres, 20 mètres… et ainsi de suite jusqu’à la ligne d’arrivée.
On peut connecter les points par des lignes droites pour guider l’œil, mais il faut garder à l’esprit que seuls les points sont des données réelles. Ensemble, les points et les segments de droite qui les relient forment une courbe polygonale. Les pentes des segments sont d’autant plus faibles que la vitesse, sur la portion de 10 mètres considérée, est petite
Il est naturel de se demander à quel moment il a couru le plus vite et à quel endroit de la piste cela s’est produit Nous savons que sa vitesse moyenne la plus élevée, sur une section de 10 mètres, se situe entre 50 et 80 mètres, mais une vitesse moyenne sur 10 mètres reste une… moyenne, pas un maximum. Imaginons que le sprinter porte un compteur de vitesse À quel moment précis a-t-il couru le plus vite ? Et à quelle vitesse exactement ?
Selon le philosophe présocratique Zénon d’Élée, Usain Bolt ne pourra jamais rattraper une tortue partie avant lui
Ce que nous recherchons ici, c’est un moyen de mesurer sa vitesse instantanée. Le concept semble paradoxal À tout moment, Usain Bolt est en un endroit précis, figé comme sur un cliché. Quel sens y a-t-il à parler de sa vitesse en un moment précis, puisqu’un tel paramètre ne vaut que pour un intervalle de temps ?
L’énigme est ancienne et relève aussi bien des mathématiques que de la philosophie Elle figure dans les redoutables paradoxes que Zénon d’Élée énonça vers 450 avant notre ère. Rappelons que celui d’Achille affirme qu’un coureur, même Usain Bolt, ne peut jamais rattraper une tortue, certes plus lente, mais partie avant (le poursuivant doit d’abord atteindre le point où est le poursuivi, si bien que le plus lent, avançant toujours, conserve perpétuellement une longueur d’avance). Et dans son paradoxe de la flèche, Zénon soutenait qu’une flèche en vol ne pouvait jamais se déplacer (elle est continûment dans l’instant, et donc en permanence immobile). Quelles qu’aient été les motivations du présocratique dans l’élaboration de ses paradoxes, on peut supposer que les subtilités inhérentes à la notion de vitesse à un instant donné l’ont troublé, de même que ses continuateurs, comme Platon et Aristote Leur malaise explique peut-être pourquoi les mathématiques grecques ont toujours été si peu disertes sur le mouvement et le changement.
Deux mille ans après Zénon, les fondateurs du calcul différentiel ont résolu l’énigme de la
(en secondes) Temps (en secondes)
vitesse instantanée Leur solution intuitive a consisté à la définir comme une limite et, plus précisément, la limite des vitesses moyennes prises sur des intervalles de temps de plus en plus courts. Pour que cette stratégie réussisse, nous devons supposer que la distance parcourue sur la piste par Usain Bolt varie de façon régulière. Sinon, la limite recherchée n’existera pas et les résultats ne s’approcheront de rien de raisonnable à mesure que les intervalles rétréciront Mais est-ce le cas ? Nous n’en sommes pas certains. Les seules données disponibles sont des échantillons discrets des temps écoulés tous les 10 mètres sur la piste. Pour estimer la vitesse instantanée, nous devons aller au-delà et faire une supposition éclairée de l’endroit où il se trouvait entre ces points.
L’interpolation est un bon moyen de le faire. L’idée est de tracer une courbe régulière entre les données disponibles En d’autres termes, nous voulons relier les points non plus par des segments de droite, mais par la courbe lisse la plus plausible qui passe par les points, ou du moins
Le graphique (a) montre la course d’Usain Bolt, à Pékin, en 2008, découpée par tranches de 10 mètres (les points bleus, reliés par des segments) et les durées pour chacune d’elles. De celui-ci, on peut déterminer une courbe lisse (b) reliant tous les points et à partir de laquelle on calcule les vitesses instantanées (c) : cette courbe révèle une accélération continue pendant environ 8 secondes, puis une décélération. La vitesse maximale du Jamaïcain a été de 12,3 m/s (44,28 km/h). À Berlin, en 2009, le même sprinteur a été suivi par des dispositifs enregistrant la vitesse instantanée en temps réel (d, la courbe rouge). Chaque oscillation correspond à une foulée : le coureur ralentit quand il pose le pied et accélère après l’appui. Une courbe moyenne (en bleu) montre la tendance générale. Cette fois, Usain Bolt n’a pas ralenti avant la ligne d’arrivée.
Temps (en secondes)
qui en est très proche Les contraintes sont les suivantes : la courbe ne doit pas trop onduler ; elle doit passer aussi près que possible de tous les points ; et elle doit être compatible avec la vitesse nulle au moment du départ. De nombreuses courbes satisfont ces critères, et les statisticiens ont conçu de multiples techniques pour ajuster des courbes lisses aux données. Elles donnent toutes des résultats similaires et, chacune ayant une part d’approximation, prenons-en une au hasard (voir la figure b, ci-dessus)
La courbe étant lisse par construction, nous pouvons calculer sa pente en tout point Le graphique obtenu donne une estimation de la vitesse d’Usain Bolt à chaque instant de sa course pékinoise (voir la figure c, ci-dessus) On y voit que le sprinteur a atteint une vitesse maximale d’environ 12,3 m/s (44,28 km/h) aux trois quarts de la course. Il a constamment accéléré jusqu’à ce maximum, puis a décéléré, sa vitesse tombant à
Usain Bolt et la puissance… du calcul
Vitesse instantanée
Vitesse moyenne
Distance parcourue (en mètres)
10,1 m/s (36,36 km/h) sur la ligne d’arrivée Le graphique confirme bien ce que chacun a vu L’année suivante, lors des Championnats du monde 2009 à Berlin, Usain Bolt a mis tout le monde d’accord, et s’est obstiné jusqu’à l’arrivée pour au final pulvériser son propre record avec un temps de 9,58 secondes. En raison de la grande attente suscitée par cet événement, des chercheurs en biomécanique se sont rendus sur place avec des pistolets laser, semblables à ceux de la police pour contrôler les excès de vitesse Grâce à ces instruments de haute technologie, il devenait possible de déterminer la position des sprinters, dont le Jamaïcain, 100 fois par seconde. C’est la vitesse instantanée mesurée en direct (voir la figure d, ci-dessus) !
Les petites oscillations observées correspondent aux variations de vitesse qui se produisent inévitablement au cours des foulées La course, après tout, est une série de sauts et d’atterrissages. La vitesse diminue dès qu’un pied touche le sol, puis augmente lors de son décollement, au moment de la propulsion vers l’avant.
moins vite qu’Usain Bolt, mais ils sont allés plus loin╯
Aussi intrigantes soient-elles, ces petites fluctuations sont gênantes pour une analyse de données pour laquelle seule compte la tendance Pour l’obtenir, la méthode précédente consistant à ajuster une courbe lisse aux données est tout aussi pertinente (voir la figure b, page précédente). Cependant, à mes yeux, ces oscillations sont aussi une métaphore, une sorte de fable pédagogique sur la nature de l’approche de phénomènes réels par le calcul. En poussant trop loin la résolution des mesures, en examinant un phénomène dans ses moindres détails, que ce soit dans le temps ou dans l’espace, nous perdons des informations essentielles.
Dans les données relatives à la vitesse d’Usain Bolt, les petites variations confèrent à la courbe un aspect touffu. La même chose se produirait avec n’importe quelle forme de mouvement si nous pouvions le mesurer à l’échelle moléculaire À cette échelle, le mouvement devient saccadé et le calcul n’aurait plus grand - chose à nous apprendre, du moins pas directement. Si ce qui nous intéresse, ce sont les tendances générales, il peut suffire d’aplanir les soubresauts Les connaissances que le calcul nous a apportées sur la nature du mouvement témoignent de la puissance de la régularité, aussi approximative soit-elle Il y a une dernière leçon à tirer En modélisation mathématique, comme en toute science, nous devons faire des choix, souligner telle information, ignorer telle autre. Galilée a découvert la loi
L’auteur
du mouvement d’une balle roulant sur une rampe en négligeant le frottement et la résistance de l’air. Isaac Newton a utilisé le calcul et ses lois du mouvement et de la gravité pour expliquer pourquoi une planète du Système solaire a une orbite elliptique, mais, pour ce faire, il a ignoré l’attraction des autres L’art de l’abstraction consiste à savoir ce qui est essentiel et ce qui est superflu, ce qui est signal et ce qui est bruit, ce qui est tendance et ce qui est déviation. C’est un art, parce que ces choix comportent toujours un risque en ce qu’ils relèvent du vœu pieux et de la malhonnêteté intellectuelle Les plus grands scientifiques, comme Galilée et Newton, ont marché le long de ce précipice, pas aussi vite qu’Usain Bolt, mais plus loin.
> Steven Strogatz est professeur de mathématiques appliquées à l’université Cornell, aux États-Unis.
Cet article est une traduction de « Usain Bolt’s split times and the power of calculus », publié sur le site Quantamagazine.org le 3 avril 2019.
> S. Strogatz, Infinite Powers : How Calculus Reveals the Secrets of the Universe, Houghton Mi in Harcourt, 2019. À lire
Adrien Sedeaud est chercheur à l'institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport (Irmes) et au pôle performance de l’Insep.
Depuis quand collecte-t-on des données liées au sport ?
De façon plus ou moins empirique, le principe existe depuis toujours. Nous connaissons des traces très anciennes de ce qui s’apparente à des cahiers d’entraînement où sont consignées et archivées les informations sur la durée des séances, l’intensité, les performances atteintes… des athlètes de haut niveau. En revanche, ce qui a grandement évolué ces dernières années, c’est le nombre de ces données. Le développement concomitant des capteurs d’une part et des capacités des ordinateurs d’autre part a permis un grand bond en avant qui s’est traduit par une explosion de la quantité de données recueillies et des possibilités de captation, de traitement, de stockage, de visualisation, de restitution… Tout concourt à un suivi très fin de toutes les étapes de la vie des athlètes de haut niveau.
Schématiquement , on peut distinguer les données collectées quand ils sont jeunes, dans des phases de détection et d’estimation des potentiels, celles utiles à la préparation des athlètes afin d’optimiser l’individualisation, celles liées à l’estimation des risques de blessures et leur prévention au moment des compétitions, celles nécessaires pour l’analyse de la concurrence et l’identification des points forts et faibles des adversaires…
Les données concernent les résultats en compétition, ceux à des batteries de tests, notamment physiologiques, métaboliques, physiques… à partir desquelles on obtient une sorte de cartographie qui aide à situer le sportif à un moment donné. Citons aussi toutes les données inhérentes à l’entraînement, ce que l’athlète a encaissé, ses déplacements, ses accélérations… N’oublions pas également l’ensemble de ce qui a trait à la récupération et à son efficacité. En ce qui concerne l’analyse de la concurrence , nous assistons aujourd’hui à l’essor de la computer-vision qui autorise l’analyse automatique de vidéos La liste de données possibles est presque infinie pour répondre à une multitude d’objectifs au service des athlètes et du sport de haut niveau !
Ces informations sont-elles centralisées ?
D’où qu’elles viennent, les données sont en effet centralisées dans un athlète management system (AMS). Dans certaines équipes, l’AMS va jusqu’à prendre en compte les couleurs des urines pour en déduire l’état d’hydratation du sportif. Les informations sont à la disposition, en permanence, de tout acteur associé à la performance Ainsi, un membre du staff, absent à une séance d’entraînement, peut savoir rapidement ce qui s’y est passé et s’adapter lorsqu’il s’agira de préparer la suivante. En un mot, l’AMS offre une image de
l’athlète à 360°, et c’est pour cela que le nôtre, à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), est baptisé A360.
Revenons sur les enjeux de détection. Quels sont-ils ?
La question est de savoir comment une fédération détecte des potentiels en considérant différentes informations, comme l’âge relatif, l’âge biologique et l’âge d’entraînement qui correspond au nombre d’années d’entraînement. De fait, pour des enfants dans une même catégorie, essentiellement jusqu’à la puberté, être né en début ou fin d’année a des implications sur les résultats Plusieurs études internationales, dont une de notre laboratoire sur les équipes de France jeunes, ont montré qu’en compétition, que ce soit au niveau départemental, régional, national, et surtout international, ceux nés en janvier ou février sont surreprésentés
Le pic pubertaire est aussi une information importante, car une fois qu’il est passé, les jeunes sont en mesure d’exprimer pleinement leurs capacités Et bien sûr, il importe de savoir depuis combien de temps tel ou tel enfant pratique le tennis, par exemple. Avec toutes ces informations, nous nous plaçons en amont de toute sélection.
L’âge des jeunes sportifs peut être une information trompeuse, prise isolément ?
Nous ne cherchons pas à prédire que tel individu a le maximum de chances, comparativement aux autres , de devenir champion olympique . Avec les outils que nous avons élaborés, c’est tout l’inverse ! Nous pointons les jeunes qui ne seront pas sélectionnés parce qu’ils sont moins âgés biologiquement, ont moins d’années d’entraînement derrière eux… parce que d’autres variables de nature psychologique, sociologique ne sont que peu prises en compte aujourd’hui de manière massive sur de nombreux jeunes Nous disons donc aux fédérations qui se focalisent sur des performances à l’instant t qu’elles sont possiblement en train de louper des potentiels. Nous l’avons fait en natation, mais aussi en athlétisme et en aviron Restons avec la natation Nos modélisations ont permis de recalibrer les performances des enfants, notamment en fonction de l’effet de l’âge relatif, en donnant un petit
bonus à ceux de fin d’année : certains , qui étaient absolument en dehors des radars, sont d’un coup rentrés dans le top 10 ! Au-delà de la direction technique nationale et des coachs nationaux, ces travaux aident à sensibiliser les parents, les entraîneurs de club…
L’enjeu dépasse le cadre du sport de haut niveau, et a des répercussions en termes de santé publique Ainsi, nous avons appliqué des modèles statistiques de survie aux membres de la Fédération française de natation en tenant compte de l’activité sportive et l’on s’est rendu compte que les moins performants étaient nés en fin d’année Or les plus jeunes dans chaque catégorie, qui ont des niveaux de performance inférieure, sont les plus enclins à abandonner le sport, découragés, car leur potentiel et leurs capacités de progression n’ont pas été estimés à leur juste valeur Ils arrêtent la natation, mais pire encore, ils peuvent être amenés à renoncer à toute pratique sportive.
On parle là de capital santé, d’enjeux sanitaires globaux , et l’on a une carte à jouer pour améliorer la situation Au laboratoire, nous travaillons sur l’épidémiologie de la performance, mais aussi sur la prévention par les activités physiques ou sportives, car finalement les mêmes méthodes d’étude peuvent être déployées sur ces deux champs d’investigation.
Pourriez-vous décrire un exemple éclairant des vertus de l’analyse de données pour le sport de haut niveau ?
Dans le champ de l’analyse de concurrence, un doctorant, Thibaut Ledanois, a travaillé avec
╭ Au Club France, à Paris, nous proposerons
une « météo des médailles », c’est-à-dire les chances de voir le lendemain des athlètes français sur les podiums
la Fédération française de triathlon à partir des profils des sportifs, de la typologie des parcours, du nombre de virages… Rappelons qu’un triathlon, au format olympique, est la succession de 1 500 mètres de natation, 40 kilomètres de vélo et pour finir 10 kilomètres de course à pied. Il disposait d’une base de données conséquente à partir de laquelle il a créé des modèles capables d’estimer le déroulé d’une course, de simuler des scénarios plausibles. Et ceux-ci se sont avérés corrects sur l’ensemble des épreuves (garçons, filles et mixtes) des Jeux olympiques de Tokyo.
De la sorte, il a pu montrer pour un athlète français que s’il n’était pas dans le peloton de tête à la sortie de l’eau, il pouvait éventuellement rejoindre, durant le parcours à vélo, le groupe des échappés, mais à aucun moment, après la course à pied, il ne pouvait prétendre à terminer sur le podium. À l’inverse, s’il était parmi les premiers au terme de l’épreuve de natation, et qu’il intégrait le groupe des échappés à vélo, il figurait très régulièrement dans les trois premiers
Ce type de résultats est typique de ce que l’on propose. Nous objectivons les réponses aux questions des entraîneurs en leur fournissant des informations chi ff rées qui , la plupart du temps, confirment leurs intuitions
Il y a donc une part de prédiction dans vos résultats ?
Certes, et de fait, un de nos projets, mené avec l’Agence nationale du sport, consiste justement à estimer la probabilité d’être champion olympique. Il n’est pas public, et on le comprend, mais sur la
base de performances passées, de l’estimation des niveaux des adversaires et des Français, des scénarios de courses, de matchs… nous pouvons estimer les résultats, olympiques notamment, mais avec une marge d’erreur, car comme nous le rappelle justement Edgar Morin et Pierre Rabhi dans Frères d’âmes : « Le sûr n’est jamais certain, l’improbable n’est jamais impossible »
Vous savez donc déjà si l’objectif fixé par le gouvernement d’être dans le top 5 des nations sera atteint ?
Tout à fait Je vous invite à passer au Club France, un espace à la grande halle de la Villette, à Paris, dédié aux équipes de France. Nous y présenterons cette application qui suit tous les athlètes de la planète, leurs évolutions, leurs dernières performances afin de proposer une « météo des médailles », c’est-à-dire les chances de voir le lendemain des athlètes français sur les podiums.
À l’arrière-plan, il y a le « Sport Data Hub », en quoi consiste ce projet ?
Après que la France a obtenu les JO, en 2017, la refonte de la gouvernance du système sportif français a conduit à la création de l’ANS en 2019. En son sein, Claude Onesta, chargé du sport de haut niveau, nous a sollicités pour rédiger le « Plan national data », préfigurant le « Sport Data Hub » Il s’agit d’abord de regrouper toutes les données du sport de haut niveau français, mais aussi d’accompagner avec des data scientists, des développeurs, des architectes, des juristes… les
fédérations sur différents projets – nous en avons décrit quelques-uns – et d’offrir des services, comme l’« Athlète Management System » A360.
Pour composer avec autant de données, qui plus est disparates, est-ce que l’intelligence artificielle joue un rôle ?
Il y a très peu de projets qui au sein du sport de haut niveau français fonctionnent avec de l’intelligence artificielle Par exemple, avec les outils de prédiction dont nous parlions, nous prohibons les modèles dits de «boîte noire», car si l’on déclare que tel individu va être champion olympique ou a telle probabilité de se blesser, il faut savoir expliquer pourquoi sur la base de ses dernières performances, de son historique de blessures, de son niveau de fatigue, de ses charges d’entraînement, de ses modalités de récupération, de la quantité et qualité de son sommeil… et l’expliquer de façon individuelle, car les poids de ses facteurs sont différents pour chaque athlète et évolutifs. Aujourd’hui ce sont principalement des modèles de machine learning, supervisés ou non, qui sont exploités pour aborder ces questions
Cela pose la question des limites du recueil de données à grande échelle.
Quelles sont-elles ?
Elles sont inhérentes aux choix des données, à la fiabilité des capteurs utilisés, à leurs modélisations et restitutions. Des biais peuvent se nicher à toutes les étapes de la vie des données. Par exemple, pour aider un entraîneur à anticiper les risques de blessures, il importe de quantifier le niveau de fatigue des athlètes. Mais comment faire ? Une autoévaluation quotidienne sur une échelle de 1 à 10 ? La mesure du ratio cortisol/ testostérone dans des prélèvements salivaires ? Soumettre les sportifs à des tests d’effort répétés pour appréhender sa fatigabilité ? Des choix s’imposent et chaque option a ses inconvénients, ses biais d’interprétation que l’on retrouve à tous les niveaux dans les informations transmises Et c’est le cas pour tous les paramètres pris en compte. Il est essentiel de les connaître afin d’offrir les meilleures options : c’est un devoir déontologique
À côté de ces limites inhérentes aux projets, il y a celles d’ordre sociologique et sociétal qui sont liées à la captation massive de données, mais aussi aux coûts que cela implique de les stocker…
Les rugbymen professionnels d’un club anglais ont fait l’objet d’une étude nommée « We are humans, we’re not numbers » dans laquelle les auteurs ont mis en avant une frustration des joueurs et une envie de stopper certains suivis, notamment, quand ils partaient en week-end, ils ne souhaitaient pas nécessairement, en famille, indiquer ce qu’ils avaient mangé, bu, leur quantité de sommeil…
Dans ce texte, ils s’opposaient aussi au KPI (key performance indicator, soit « indicateur clé de performance ») mis en place par le club, des indices globaux et spécifiques de la performance individuelle de chaque joueur. Même si dans les faits, les rugbymen savaient quelles cases cocher pour augmenter leur score De fait, les chercheurs ont révélé que ces KPI devenaient des armes de négociation dans l’attribution des primes de match, ou dans la renégociation des contrats… et ce parfois au détriment de la performance collective.
Vous prônez la construction d’une culture « data éclairée ». Quels en seraient les grands principes ?
Le premier est de ne pas être obnubilés par les données fournies par les capteurs et les algorithmes ! Ce sont des informations à contextualiser, avec toutes les autres, et elles n’ont pas plus de poids, elles sont juste là pour éclairer la prise de décision Un peu comme l’IA en médecine : elle est un outil pour le médecin, et ne le remplacera jamais. Sinon, les dérives guettent.
Propos recueillis par Loïc Mangin
À lire
> A. Sedeaud (dir.), Gagner avec les données : comment les mettre au service du sport de haut niveau, Collection Insep, 2024.
> A. Sedeaud et C. Colombo (dir.), Individualisation de l’entraînement : exemples dans le sport de haut niveau, Collection Insep, 2022.
P. 112
REBONDISSEMENTS
DES ACTUALITÉS SUR LES THÈMES DES HORS-SÉRIES PRÉCÉDENTS
P. 118
LES INCONTOURNABLES
DES LIVRES, DES EXPOSITIONS, DES PODCASTS… À NE PAS MANQUER
P. 110
EN IMAGE UNE IMAGE QUI A RÉCEMMENT FAIT L’ACTUALITÉ
P. 116
INFOGRAPHIE
UN BON SCHÉMA VAUT MIEUX QU’UN LONG DISCOURS
« L’Égypte est un don du Nil », déclara le Grec Hérodote lorsqu’il découvrit le royaume des pharaons au milieu du Ve siècle avant notre ère, mais savait-il que le fleuve bienfaiteur avait eu une histoire complexe ? C’est ce qu’ont découvert Angus Graham, de l’université d’Uppsala, en Suède, et ses collègues, en reconstruisant la dynamique du fleuve lors des 11 500 dernières années grâce à l’analyse de 80 carottes sédimentaires prélevées d’une rive à l’autre dans la région de Louxor (l’ancienne Thèbes). Jusqu’à il y a environ 4 000 ans, dans la région, le fleuve coulait, tumultueux, dans des chenaux entrelacés, des sortes de canyons. Puis, à la suite d’un changement climatique en amont, le cours d’eau s’est brusquement déplacé et a par ailleurs déposé de plus en plus de sédiments qui ont finalement constitué une large plaine fertile, stable. Le fleuve s’est assagi, et l’une des plus célèbres civilisations antiques a pu s’épanouir.
Loïc Mangin
J. Peeters et al., Shi t away from Nile incision at Luxor ~4,000 years ago impacted ancient Egyptian landscapes, Nature Geoscience, 2024.
HORS-SÉRIE N° 123 : DINOSAURES, DANS L’INTIMITÉ DES GÉANTS
Chez toutes les lignées de théropodes ayant pris la voie du gigantisme, le fémur s’est adapté de la même façon, indépendamment.
Le Hors-Série n° 123 : « Dinosaures, dans l’intimité des géants » racontait comment plusieurs lignées de dinosaures, carnivores et herbivores, avaient pris le chemin du gigantisme au cours des quelque 180 millions d’années durant lesquelles ils ont régné sur la planète. Ce fut notamment le cas chez les théropodes, des prédateurs comme le célèbre tyrannosaure, qui étaient tous des bipèdes et dont les oiseaux actuels sont les descendants : au cours de leur histoire, ils sont devenus énormes à au moins douze reprises indépendantes les unes des autres. Mais chaque fois que la voie de la démesure était empruntée, les adaptations du squelette nécessaires pour soutenir un corps de plus en plus gros ont-elles été semblables, ou distinctes selon les lignées ? C’est ce qu’ont voulu savoir Romain Pintore, du Muséum national d’histoire naturelle, à Paris, et ses collègues. Pour ce faire, les paléontologues se sont intéressés au fémur de 68 théropodes représentant six groupes di érents. Parmi les espèces retenues, la plus petite pesait 2 kilogrammes et la plus grande plus de 8 tonnes, et une vingtaine pesait plus
de 1 tonne. Les fossiles, ou plus précisément les scans 3D venus du monde entier, ont été scrutés par morphométrie géométrique 3D. Il s’est agi ici d’analyser les variations anatomiques de certaines régions osseuses et de les comparer. Résultat ? Un bel exemple d’évolution convergente, car dans chaque groupe de théropodes ayant évolué vers le gigantisme le fémur s’est adapté de la même façon et a acquis une structure semblable ! Plus précisément, les extrémités de l’os (les épiphyses) sont devenues plus robustes, tandis que la supérieure (la tête fémorale) était orientée vers le haut, autorisant une posture plus stable, car l’os est alors dirigé vers l’extérieur de l’animal. Chez les carcharodontosaures, connus pour leur grande taille, ce dernier caractère était particulièrement précoce et précédait notablement l’évolution vers le gigantisme : peut-être était-ce même celui qui l’a facilité chez ce groupe en particulier. Autre observation, plus une espèce était lourde, plus l’attache des muscles entre la jambe et la queue (le quatrième trochanter), à l’arrière du fémur, était basse, augmentant ainsi la puissance de la marche. Ces travaux renseignent également sur l’évolution des oiseaux, car
Les fémurs « moyens » de théropodes de petite taille (à gauche) et géants (à droite) se distinguent par plusieurs caractères : les di érences se révèlent en couleur (au centre, l’importance de l’écart allant croissant du bleu au rouge) lorsque les deux os sont superposés.
chez les théropodes non aviens les plus proches de ceux-ci, on constate d’autres adaptations du fémur, avec notamment une incurvation et la fusion de deux régions importantes de la tête de l’os, le petit et le grand trochanter, deux sites de fixation musculaires. L’ensemble conférait à l’animal une posture plus « accroupie ». Ainsi le fémur est-il la clé de voûte de deux destins évolutifs opposés, le gigantisme et l’envol, même si, raconte Romain Pintore, « des dinosaures très proches des oiseaux, qui marchaient comme eux, pouvaient peser jusqu’à 500 kilogrammes » ! Ces deux adaptations ne semblaient donc pas mutuellement exclusives.
Loïc Mangin
R. Pintore et al., The evolution of femoral morphology in giant non-avian theropod dinosaurs, Paleobiology, 2024.
HORS-SÉRIE N° 120 : IL ÉTAIT UNE FOIS LA VIE
Speculoos-3 b, qui orbite autour d’une naine rouge, est une exoplanète rocheuse riche de promesses quant à l’exploration de ce type d’astres, et donc pour la recherche d’une éventuelle trace de vie.
L’idée de vie soulève bien des questions et le Hors-Série n° 120 : « Il était une fois la vie » en explorait de nombreuses, dont celle de savoir si la vie est possible sur d’autres planètes. Elle surgit presque à chaque fois qu’une exoplanète est découverte, et avec une acuité particulière dans le cas de celle que l’équipe de Michaël Gillon, de l’université de Liège, en Belgique, a repérée. La planète est Speculoos-3 b, une exoplanète rocheuse de la taille de la Terre orbitant en dix-sept heures autour d’une étoile de type naine rouge située à 55 années-lumière. Ces étoiles (des ultrafroides de type spectral M6,5), particulièrement répandu, ont pour caractéristiques d’être environ deux fois moins chaudes que le Soleil mais « vivent » 100 milliards d’années, soit 10 fois plus que notre étoile. C’est un atout pour qu’une possible vie se développe sur une planète de leur système. De fait, selon Émeline Bolmont, de l’université de Genève, « de nombreuses études montrent que la vie pourrait se développer sur les planètes orbitant autour des naines rouges ». Il y a cependant loin de la coupe aux lèvres, car Speculoos-3 b tourne très
Speculoos-3 b en orbite autour de son étoile (vue d’artiste)
près de son étoile et reçoit de la sorte beaucoup de rayonnements de haute énergie : elle n’est donc pas dans la zone dite « habitable » de l’étoile. De plus, la planète, verrouillée par des e ets de marée, exposerait toujours la même face à la lumière de son étoile. Mais, selon les auteurs de l’étude, qui plaident par ailleurs pour que le JWST tourne ses « yeux » vers Speculoos-3 b, cette dernière « représente l’une des meilleures occasions d’étudier la surface de planètes rocheuses en dehors du Système solaire ». Et ainsi, peutêtre, de trouver une trace de vie…
L. M.
M. Gillon et al., Detection of an Earth-sized exoplanet orbiting the nearby ultracool dwarf star SPECULOOS-3, Nature Astronomy, 2024.
Avec l’éolien, l’énergie solaire, ou photovoltaïque, est de celles sur qui l’on compte pour décarboner notre monde, comme le racontait le Hors-Série n° 121 : « Quelles énergies pour demain ? ». Pour ce faire, la course au rendement bat son plein, et c’est à qui proposera le matériau qui convertit le mieux l’énergie solaire en électricité. Aujourd’hui, les pérovskites tiennent la corde, moins chères et plus simples à mettre en œuvre que le silicium pour des rendements à peu près équivalents. Haiyuan Wang et Alfredo Pasquarello, de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, en Suisse, ont proposé d’améliorer les performances des pérovskites grâce à l’intelligence artificielle. Le critère important est la bande interdite, ou gap, c’est-à-dire la bande d’énergie interdite aux électrons dont la hauteur (en énergie) correspond à l’énergie minimale nécessaire pour libérer les électrons. La première étape a consisté à rassembler les données précises sur les gaps de 246 matériaux pérovskites. Ces informations ont ensuite servi à entraîner un modèle d’apprentissage automatique auquel ont enfin été soumis 15 659 matériaux candidats. Il en est ressorti 14 pérovskites sans plomb, jamais étudiées, avec une bande passante appropriée pour le photovoltaïque avec un haut rendement. À retrouver bientôt dans vos panneaux solaires ! L. M.
H. Wang et al., High-quality data enabling universality of band gap descriptor and discovery of new photovoltaic perovskites, JACS, 2024.
HORS-SÉRIE N° 122 : PHYSIQUE QUANTIQUE
Comment s’assurer que des erreurs ne se glissent pas dans la manipulation des qubits ? Grâce à des « peignes de fréquence » photoniques !
Comment s’assurer que des erreurs ne se glissent pas dans la manipulation des qubits ? Grâce à des « peignes de fréquence » photoniques ! La seconde révolution quantique est en marche, et avec elle la promesse d’ordinateurs quantiques et de dispositifs de communication tout aussi quantiques, comme s’en faisait l’écho le Hors-Série n° 122 : « Physique quantique et réalité ». De fait, le rythme des avancées s’est accéléré depuis une dizaine d’années, et la maîtrise de l’information quantique n’a jamais semblé aussi proche. Quelques obstacles restent à franchir tout de même… L’un de ces écueils, lorsqu’il s’agit de manipuler de l’information quantique, est de s’assurer que des erreurs, soit lors de mesures soit apparaissant spontanément, ne faussent pas les calculs, mais sans provoquer l’e ondrement de la superposition des qubits (l’équivalent du bit classique). Pour ce faire, il est important de disposer, comme avec l’informatique classique, de codes correcteurs d’erreur : l’objectif est de choisir des mesures afin de dire si l’état d’un qubit a été modifié sans pour autant le modifier ! L’équipe de Pérola Milman, du laboratoire Matériaux et phénomènes quantiques, de l’université Paris-Diderot, a récemment proposé une stratégie
e cace fondée sur les propriétés des photons. La solution la plus répandue est fondée sur la redondance, qui consiste à utiliser plusieurs qubits pour coder une seule unité d’information quantique et de suivre les propriétés collectives de l’« agrégat ». Et c’est celle que suivent la chercheuse et ses collègues, avec des photons en guise de qubits, placés dans un état dit « de Gottesman, Kitaev et Preskill » (GKP), du nom des trois physiciens (Daniel Gottesman, Alexei Kitaev et John Preskill) qui l’ont proposé en 2001 : en un mot, il s’agit d’obtenir un résonateur. En l’occurrence, des photons d’un faisceau laser sont convertis chacun en une paire de photons intriqués, qui sont autant de qubits : la fréquence de l’un est corrélée à celle de l’autre. La conséquence de ce procédé est que, pris ensemble, les photons créent un « peigne de fréquence » où les fréquences du système s’agencent de façon discrète et sont régulièrement espacées, comme les dents d’un peigne. De la sorte, les propriétés globales du paquet de photons, par exemple la moyenne des fréquences des photons, renseignent sur l’état, détérioré ou non, de chacun des constituants. La méthode est plus robuste qu’avec un photon
seul, car il y a un e et de dilution. Autre détail qui a son importance, la méthode est plutôt facile à mettre en œuvre selon les auteurs de l’étude, car les états GKP à deux photons sont d’ores et déjà produits dans de nombreux laboratoires équipés de plateformes photoniques. L’information quantique est à portée de main ! L. M.
E. Descamps et al., Gottesman-KitaevPreskill encoding in continuous modal variables of single photons, Phys. Rev. Lett., 2024.
Des photons dans un état GKP sont caractérisés par des variables collectives (W1 et W2) qui se répartissent périodiquement, selon un peigne de fréquences. La modification de l’état de l’un des n photons (la flèche rouge, W0) à l’intérieur du système se traduit par un petit changement détectable de l’ensemble (la flèche noire, W0/√n)
Les espoirs de décarbonation du domaine des transports reposent pour beaucoup sur le développement rapide des véhicules électriques, et donc celui des batteries dont elles sont le ressort essentiel. Dans ce domaine, celles à lithium-ion (Li-ion) monopolisent le marché. Mais cet âge d’or touche peut-être à sa fin, tant les limites semblent atteintes ou proches, notamment en matière de densité d’énergie et, comme le racontait le Hors-Série n° 121 : « Quelles énergies pour demain ? », c’est au tour des batteries dites « tout solide » de susciter l’engouement. L’idée est de remplacer l’électrolyte liquide des premières par un solide dont la conductivité ionique serait notablement supérieure.
Avec ce projet en tête, Joël Gaubicher, de l’institut des matériaux de Nantes Jean-Rouxel, et ses collègues ont mis en évidence les propriétés remarquables de l’électrolyte halogéné Li2ZrCl6 à l’état solide. Outre une très bonne conductivité, ce composé peut, dans certaines conditions, devenir une source supplémentaire d’électrons et d’ions lithium pour la batterie, dont une partie joue le rôle d’électrode sacrificielle : plus favorable à l’oxydation, celle-ci protège le reste du dispositif, à commencer par les électrodes, en l’« attirant ».
De la sorte, les batteries sont plus performantes et durent plus longtemps ! Elles sont même plus sûres, car moins sensibles à la surchau e, l’un des inconvénients majeurs des modèles
Li-ion actuels.
L. M.
B. Stamenkovic et al., Fueling from the electrochemistry of halide solid electrolytes, Journal of the Electrochemical Society, 2024.
HORS-SÉRIE N° 123 : DINOSAURES, DANS L’INTIMITÉ DES GÉANTS
Quels dinosaures ont bénéficié d’une endothermie pour conquérir des régions froides ? Et quand ?
Qu’elle est loin l’image des dinosaures patauds, stupides, gris… qui prévalait il y a quelques décennies. Les paléontologues se sont évertués à rendre justice à ces animaux, comme le démontraient les articles du Hors-Série n° 123 : « Dinosaures, dans l’intimité des géants ». Une étiquette que l’on accole facilement aux reptiles est celle d’animaux à sang froid. De fait, c’est le cas des lignées actuelles de crocodiles, de tortues, de serpents. En revanche, les oiseaux, les « dinosaures actuels », sont à sang chaud. Quand l’homéothermie (le maintien d’une température corporelle constante) et l’endothermie (la production de chaleur corporelle), deux caractères décisifs pour espérer conquérir la planète, sont-ils apparus ? Alfio Alessandro Chiarenza, de l’University College, à Londres, et ses collègues se sont penchés sur la question en étudiant la répartition géographique d’un millier de fossiles, couvrant tout le Mésozoïque (entre 230 et 66 millions d’années), qu’ils ont ensuite confrontée à des modèles paléoclimatiques, l’histoire des continents et la phylogénie des dinosaures.
Dès le début du Jurassique, il y a 180 millions d’années, les théropodes,
Le Velociraptor avait le sang chaud, utile pour couver sous la neige.
comme les tyrannosaures, et les ornithischiens, tels que les stégosaures, les tricératops… se seraient aventurés dans des régions aux climats froids, ce qui plaide pour une apparition précoce de l’endothermie, dont les oiseaux actuels ont hérité. Ce fut sans doute un avantage alors que la Terre venait de connaître un « événement anoxique océanique », c’est-à-dire un fort appauvrissement des océans en oxygène et un réchau ement global.
À l’inverse, les sauropodes, ces herbivores quadrupèdes, seraient restés à cette époque cantonnés dans les régions les plus chaudes. Leur stratégie évolutive fut le gigantisme, une autre façon de limiter les pertes de chaleur, plutôt que de la produire soi-même !
L. M.
A. Chiarenza et al., Early Jurassic origin of avian endothermy and thermophysiological diversity in dinosaurs, Current Biology, 2024.
Une étude montre que, dans l’organisme, plus un type de cellule est grand, plus il est rare, et inversement. C’est l’occasion de dresser l’inventaire.
Texte : Clara Moskovitz, Iluustrations : Jen Christiansen et Ni-ka Ford
De nombreux aspects de notre monde, de la taille des villes à la longueur des mots, suivent la loi, empirique, de Zipf : plus c’est grand, plus c’est rare. Ian Hatton, de l’université McGill, au Canada, et ses collègues ont montré que cette règle vaut aussi pour les cellules du corps humain. Selon les chercheurs, cette observation pourrait aider les médecins à mieux comprendre certains systèmes corporels et types de cellules di ciles à dénombrer. L’étude suggère, par exemple, que les lymphocytes seraient beaucoup plus nombreux qu’on ne l’imaginait.
Tête
Téguments et tissu adipeux 17 000 Poids des systèmes corporels (en grammes)
Nerveux et endocrine 1 100 Digestif 1 920 Osseux 2 560
Cardiovasculaire et lymphatique 2 650
Musculaire 13 600
Types cellulaires
Sang
Les érythrocytes (globules rouges), les plaquettes et les leucocytes (globules blancs) comme les lymphocytes, les macrophages…
Épithélial et endothélial
Les cellules épithéliales couvrent les surfaces des organes et du corps. Les cellules endothéliales tapissent les vaisseaux sanguins.
Fibroblastes et ostéocytes
Les fibroblastes constituent le tissu conjonctif. Les ostéocytes composent les os.
Adipocytes
Les adipocytes stockent les graisses dans di érentes parties du corps : la peau, divers organes, la moelle osseuse…
Cellules souches, germinales…
Ces cellules, comme les ovocytes, ont la capacité de se développer et de se spécialiser en di érents types cellulaires.
Neurones et glie
On distingue 57 types de neurones et 22 de cellules gliales, ces dernières assurant protection, soutien, nutrition… des premiers.
Myocytes
Ces cellules contractiles des muscles sont soit striées (cœur, muscles squelettiques…) soit lisses (parois d’organes, yeux…).
Le nombre de cellules et le poids de leur ensemble, selon leur type (ci-dessus), ont été calculés pour une femme de 60 kilogrammes. Les classements respectifs (ci-contre) révèlent que les cellules les plus nombreuses sont souvent les plus légères, tandis que les plus massives sont plus rares. La somme des masses n’est pas égale à celle du corps entier, car il manque celles des liquides circulants : plasma, lymphe…
Masse de l’ensemble des cellules (en grammes)
Les globules rouges circulants, au nombre de 19 200 milliards, sont les cellules les plus nombreuses du corps humain.
Plaquettes
Chaque cercle correspond à un type cellulaire et, à l’intérieur, chaque polygone à un sous-type.
Les globules rouges circulants représentent 1 880 grammes.
Parmi les myocytes striés, ceux du muscle sartorius, qui s’étend du haut du bassin jusqu’au tibia, sont les cellules les plus lourdes du corps humain avec 452 microgrammes chacune.
À VISITER
L’exceptionnel patrimoine mégalithique de la Corne de l’Afrique est au cœur d’une exposition au musée Fenaille de Rodez. Dépaysement garanti !
ÀRodez, dans l’Aveyron, le musée Fenaille s’enorgueillit de la plus grande collection de statues-menhirs d’Europe. Ces figures anthropomorphes, érigées autour du IIIe millénaire avant notre ère, sont les plus anciennes représentations de l’homme en grand format connues en Europe occidentale. Fort de ce patrimoine unique, l’établissement s’est engagé dans un « tour du monde » de ce type d’objets archéologiques. Ainsi y eut-il en 2018 « L’ombre des dieux », une exposition de divinités de l’île de Pâques sculptées dans le bois et dans la pierre. En 2021, ce fut « Idoles », o rant un regard croisé sur les statuettes anatoliennes et cycladiques.
Aujourd’hui, direction l’Éthiopie, avec l’exploration du mégalithisme de la Corne de l’Afrique. À côté des célèbres obélisques d’Aksoum ou des stèles à épées de Tiya, c’est un univers largement méconnu d’une richesse insoupçonnée, d’une diversité étonnante. De fait, dans le sud de l’Éthiopie, sur les
contreforts orientaux de la grande vallée du Ri t, dans le « corridor mégalithique », près de 130 sites identifiés à ce jour rassemblent plusieurs milliers de stèles phalliques ou anthropomorphes. La densité de ces monuments est telle que le « paysage mégalithique » du pays Gedeo, à l’est du lac Abaya, dans le sud de l’Éthiopie, a été inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco en septembre 2023. Cachés par une végétation luxuriante, les sites n’ont été découverts qu’à la fin du XIXe siècle, par le capitaine italien Antonio Cecchi, puis l’explorateur français Paul Soleillet, l’associé d’Arthur Rimbaud. Depuis, les missions scientifiques se sont succédé là-bas pour comprendre l’origine de ces mégalithes, associés à des sociétés qui se seraient épanouies dans la région entre le VIIIe et le XVe siècle. Le dernier programme de recherche archéologique – « Abaya » – date de 2018, et fut notamment soutenu par le ministère de l’Europe et des a aires Étrangères et le musée ruthénien. Et c’est le résultat de cette expédition qui est donné à voir, complété notamment par un exceptionnel ensemble de stèles éthiopiennes prêté par le musée des Cultures du monde de Francfort, en Allemagne,
une collection rapportée par Adolf Ellegard Jensen en 1934. Aussi bien tournée vers le passé que vers l’avenir, l’exposition voyagera ensuite en Éthiopie, où elle sera présentée au musée national d’Addis-Abeba avec la collaboration de l’EHA (Ethiopian Heritage Authority). Par ailleurs, un important programme de sensibilisation et de formation des communautés locales en pays Gedeo accompagne ce projet.
Loïc Mangin
« Éthiopie. La vallée des stèles », au musée Fenaille, à Rodez, jusqu’au 3 novembre 2024. musee-fenaille.rodezagglo.fr/
À VISITER
Le musée ethnographique de la ville invite à redéfinir le statut des collections ethnographiques et à inventer leurs futurs.
Depuis quelques années, beaucoup de musées de par le monde se sont engagés dans un mouvement de restitution d’œuvres d’art aux pays où elles ont été prélevées, le plus souvent à l’époque coloniale. Ainsi, en 2022, la France rendait aux autorités de Cotonou, au Bénin, les 26 pièces du trésor d’Abomey, des « prises de guerre » du général Alfred Dodds lors de la conquête du royaume du Dahomey en 1892. Le musée d’ethnographie de Genève s’est lancé dans un projet autrement ambitieux avec l’exposition « Mémoires. Genève dans le monde colonial » dont l’objectif est d’explorer l’histoire de ses collections liées à l’ère coloniale. Dans un premier espace – « La Collection » – sept objets emblématiques du musée sont replacés dans leur contexte. Le visiteur y découvre l’histoire, souvent étonnante, parfois tragique, d’un sabre géant votif forgé de Kairouan, en Tunisie, à la fin du XIXe siècle, d’un bracelet de Muhammad Bahādur Shāh, dernier monarque de l’Empire moghol, d’un tambour hexagonal du peuple Sami, fabriqué à la fin du XVIIIe siècle…
Ailleurs, « Les Capsules » proposent de s’immerger dans cinq univers indépendants conçus et cocréés avec des partenaires invités. C’est l’occasion de découvrir, entre autres, l’engagement de Deskaheh, représentant la Confédération hodinohsho :ni, en Amérique du Nord, pour l’inscription des droits des peuples autochtones dans le droit international.
Enfin, au cœur du dispositif muséographique, un « Salon » est dédié aux discussions, à des performances, à des lectures… pour que chacun puisse réfléchir activement au rôle d’un musée aujourd’hui. N’hésitez pas, car, outre que l’enjeu est d’importance, le musée a décidé d’être gratuit pour célébrer les 10 ans du nouveau bâtiment ! Et pour préparer votre venue, un site spécialement conçu rassemble tous les contenus et propose des pistes d’approfondissements.
L. M.
L’exposition « Mémoires. Genève dans le monde colonial », au musée d’ethnographie de Genève, jusqu’au 5 janvier 2025. www.meg.ch et colonialgeneva.ch
À VOIR
Il est des endroits di cilement accessibles qui réservent des surprises. Ainsi en va-t-il de la dorsale Salas-y-Gómez, une chaîne de plus d’une centaine de monts sous-marins qui s’étend sur des milliers de kilomètres loin au large du Chili, près de l’île de Pâques. Les engins robotisés de la récente expédition de l’institut océanique allemand Schmidt, dans ce que l’on considère comme une des plus riches régions en matière de biodiversité, y ont repéré en à peine quarante jours quelque 160 espèces inconnues : étoiles de mer, éponges de verre, oursins, crabes, une langouste épineuse… et même un poisson de la famille des chaunacidae (voir la photographie ci-dessus) Ces découvertes vont renforcer le dossier de ceux qui souhaitent faire de cette zone une aire protégée.
L. M.
schmidtocean.org
À VISITER
Le Festival international des jardins de Chaumont-sur-Loire met à l’honneur les forces vitales qui irriguent le vivant sous toutes ses formes.
Prenons-en un au hasard, Le Jardin du paradoxe. La parcelle fleurie et arborée met en scène le pergélisol, cette couche de sols gelés en permanence que l’on rencontre sous les latitudes les plus septentrionales de l’hémisphère Nord. Les deux concepteurs belges, l’un paysagiste, l’autre artiste, souhaitent attirer l’attention sur cette source de vie méconnue en figurant un glissement de terrain, en installant des arbres penchés… L’idée ? Montrer comment des écosystèmes fragiles qui ont réussi à patiemment s’édifier dans ces régions sont aujourd’hui menacés par le réchau ement climatique. On peut aussi y voir une invitation à réfléchir sur l’adaptation humaine. Ce jardin est l’une des vingt-cinq propositions retenues par le jury du Festival international des jardins du domaine de Chaumontsur-Loire avec cette année pour thème : « Jardin, source de vie ». Et c’est peu de dire que les directions suivies sont diverses ! Ainsi, le Jardin des murmures s’intéresse aux plantes, des pionnières, qui osent s’installer en milieu urbain et entraînent avec elles un cortège d’espèces animales. C’est bel et bien une source de vie, dans des zones particulièrement touchées par le dérèglement climatique, qu’il convient de protéger, de favoriser, de guider dans les interstices et les anfractuosités
du bâti pour l’aider à s’installer durablement. Et pour l’illustrer, des cônes en béton bas carbone, zébrés de sillons, se laissent envahir par une multitude d’espèces, résistantes et néanmoins colorées !
Plusieurs jardins en lice font la part belle aux pollinisateurs, d’autres au cycle de la vie, tel qu’un chablis, un arbre tombé au milieu d’une forêt, contribue à perpétuer. De fait, en o rant vivre et couvert à des oiseaux, des insectes, des bactéries, des champignons… l’arbre mort se réincarne. Plus largement, le festival clame haut et fort que les jardins sont indispensables à notre propre vie d’humains, toujours plus urbains, en nous prodiguant nourriture, ombre, sérénité et bien d’autres choses encore. Et quoi de mieux pour faire passer le message que de tabler sur l’émerveillement, la surprise, les émotions…
Une autre option, tout à fait compatible avec une visite du festival, consiste à écouter et échanger avec des artistes, des scientifiques, des philosophes, des paysagistes… lors des Conversations sous l’arbre, ces journées d’échanges en toute convivialité, organisées par le domaine de Chaumont depuis 2023. D’ailleurs, après « La perfection des fleurs » les 12 et
13 septembre, il sera question les 17 et 18 octobre de « Gastronomies proches de la nature ». Vous avez dit « source de vie » ?
Festival international des jardins, domaine de Chaumont-sur-Loire, jusqu’au 3 novembre 2024, et Conversations sous l’arbre, jusqu’en octobre 2024, puis reprise au printemps 2025. domaine-chaumont.fr
À VISITER
À REGARDER
Les performances des athlètes humains sont bien souvent dérisoires comparées à celles d’autres espèces vivantes. Raison de plus pour s’engager dans la protection de ces dernières.
Le monde s’apprête à vibrer à l’unisson en regardant les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Judo, canoë-kayak, surf, aviron, saut en longueur… autant d’épreuves lors desquelles les athlètes venus des quatre coins de la planète vont rivaliser pour espérer remporter une médaille. Une chance pour eux, ils concourront entre… humains ! Car si d’autres êtres vivants, animaux ou végétaux, venaient à s’aligner sur la ligne de départ, ils feraient pale figure. C’est ce qu’on apprend en regardant la série Les Athlètes de la nature, coproduite par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (MTECT) et le Muséum national d’histoire naturelle, avec Gedeon Programmes. Les vingt épisodes, de une minute et demie à deux minutes, seront di usés sur France 2 pendant les Jeux
M.
De Léonard de Vinci, on connaît les tableaux, les machines, les croquis… mais on sait moins qu’il portait un intérêt particulier au monde des parfums. C’est cette facette méconnue qu’a choisi d’explorer le Clos Lucé, la dernière demeure du maître, en plongeant le visiteur au cœur de ses expériences et de ses découvertes sur les fragrances, mais aussi de ses recherches sur l’odorat, sur la macération et la distillation. Plus largement, l’ambition est d’o rir au regard, et au nez, l’univers des parfums à la Renaissance, mais aussi l’héritage culturel reçu par Léonard de sa mère Caterina, esclave a ranchie originaire d’Orient. Ce voyage en odorama nous emmène du Caucase à la mer Noire, de Constantinople à Milan en passant par la Toscane, Venise, jusqu’au Val-de-Loire, grâce à une soixantaine d’œuvres originales venues de musées français et italiens. Un périple à tous les sens… du terme ! L.
Exposition « Léonard de Vinci et les parfums à la Renaissance », au Clos Lucé, à Amboise, jusqu’au 15 septembre 2024. vinci-closluce.com
olympiques. Il s’agit de susciter l’émerveillement mais aussi d’éveiller les consciences des spectateurs quant aux menaces qui pèsent sur la biodiversité en mettant en scène des espèces présentes sur le territoire français et souvent menacées à l’échelle mondiale. Le tournage s’est déroulé pendant sept mois, des gorges du Tarn à la Guyane en passant par Noirmoutier. Quelques exemples ? La fourmi ridiculise les meilleurs haltérophiles en soulevant plus de 30 fois son poids. Le fou de Bassan plonge de plus de 40 mètres de hauteur là où les athlètes olympiques se cantonnent à 10 mètres. Le record du 50 mètres nage libre humain est de 20,91 secondes… alors que le phoque met 6 secondes pour couvrir la même distance. Alors, devant votre écran, voire dans les stades, face aux « exploits » des humains, sans vous moquer, ayez une pensée pour les autres espèces, c’est un premier pas pour les préserver.
L. M.
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