The Red Bulletin Mars 2018 - FR

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FRANCE MARS 2018

HORS DU COMMUN

DEPECHE MODE (RE)MET LES GAZ COMMENT CE GROUPE « SANS AMBITION » TIENT ENCORE LA ROUTE APRÈS 40 ANS D'EXISTENCE ? RENCONTRE AVANT SES CONCERTS EN FRANCE

EN KIOSQUE CHAQUE 3 e SAMEDI DU MOIS AVEC MAGAZINE SPONSORISÉ



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ÉDITORIAL

Fred et Vince, aka les Soul Flyers (ces virtuoses des airs en parachute, wingsuit ou ailes propulsées) ont fait le carton de l’année 2017 avec leur vidéo A Door in the Sky, qui cumule à date près de 200 millions de vues sur le web. Pour savoir comment ils ont pénétré dans un avion − en vol − à 140 km/h, sautez en page 26. Côté musique et en couverture, Dave Gahan a dû lui, à l’inverse, ralentir pour régénérer Depeche Mode. En page 64, il vous explique sa notion du tempo.

La légende sud-africaine (et aveugle) du MMA, Ronald Dlamini, se réjouit au contact de la musculature de notre journaliste Tom Ward. L’incroyable histoire du « Black Mamba » est à retrouver en page 34.

Mais le guest le plus épatant de ce numéro est assurément Ronald Dlamini (ci-dessus, à gauche sur la photo). Au sommet de son art, le MMA, il a perdu la vue, mais a décidé de ne pas abandonner le combat. Toujours ­d’attaque, l’athlète coache aujourd’hui les combattants les plus prometteurs, à lire en page 34. Bonne lecture ! Votre Rédaction

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CONTRIBUTEURS NOS ÉQUIPIERS

JONAS BENDIKSEN

Photographe primé et basé à Oslo, Bendiksen a construit sa carrière en rejoignant des terres sauvages pour l’agence Magnum ou encore le National Geographic. Il voyage pour nous en Islande à la rencontre d’une équipe de sauvetage. « Une mission de rêve, dit Jonas. Ces volontaires bravent les éléments, juste parce qu’ils aiment être là, dehors, dans des conditions difficiles. Inspirant ! » Tout le monde à l’eau en page 52.

PATRICIA OUDIT

« Ce qui frappe, chez eux, c’est leur petit côté siamois. » Journaliste spécialiste des aventuriers de l’outdoor qu’elle suit partout sur la planète, Patricia Oudit a rencontré Fred et Vince, alias les Soul Flyers, ces hommes volants qui sont rentrés – en wingsuit – dans un avion en vol. « Ils sont en osmose en l’air, mais aussi à terre », précise-t-elle. Retrouvez ses reportages sur le site neufdixieme.com et l’exploit des Soul Flyers en page 26.

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SONY MUSIC/ANTON CORBIJN (COUVERTURE), ARNFINN JOHNSEN, DOM DAHER

DES VUES PAR MILLIONS



SOMMAIRE

BULLEVARD

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GUIDE

mars

Un mode de vie hors du commun

10 Chris « Thor » Hemsworth face

aux fantômes de son passé 12 Aston Martin s’associe à Red Bull Racing, ça fait braaaaap ! 14 Après le Juste Debout, vous ne voudrez jamais rester assis... 16 L’apocalypse, c’est très chic 17 Dita Von Teese hausse le ton 18 Un resto en dessous de tout 20 La comédienne Margot Robbie ne patine jamais dans l’ennui 2 2 Skate et silex : c’est le feu... 24 … sur l’échelle du piment aussi 25 Jake sublime vos sneakers

Voir. Avoir. Faire. 78 Red Bull TV : chaud-froid !

TOUT TELLIER...

La scuplturale Dita Von Teese se lance dans la chanson avec la complicité de l’artiste français Sébastien Tellier.

80 Fitness : stimulation portable 82 Montres : regardez en dessous 84 Tous au Mondial du Tatouage ! 86 Agenda : que du très cool 88 Matos : coming out... door 96 Ours : ils et elles font le TRB 98 Makes You Fly : objectif lune

26 L’AVION ? DÉPASSÉ !

Entrer dans un avion en plein vol, à près de 140 km/h, en wingsuit, c’est désormais chose faite pour les Soul Flyers. 6

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JOHN RUSSO/GETTY IMAGES, MAY HAIM/RED BULL CONTENT POOL, PAUL SAMUELS

34 BON PIED...

... bon œil, pourrait-on plaisanter à propos de ce pro du MMA toujours opé malgré la cécité, mais l’histoire de Ronald n’inspire que le respect.

REPORTAGES

2 6 Une porte dans le ciel

« J’avais rêvé que je sautais d’une montagne et que je rentrais par la porte, dans l’avion… » Ce rêve, Fred Fugen et Vince Reffet en ont fait une réalité.

3 4 Le visionnaire

Le champion de MMA devenu aveugle n’a jamais abandonné le combat.

4 2 Tanja Erath

L’Allemande est devenue cycliste sur route pro en se préparant dans son salon.

4 4 Mets le paquet !

Après avoir lu ce sujet, vous ne verrez plus les coursiers à vélo du même œil.

52 Le héros pluriel

Sauver des vies dans les eaux glacées de l’Islande, c’est leur job. Bénévolement.

6 2 Elan Gale

Le concept TV du Bachelor, c’est lui. Ses conseils de vie sont à suivre, ou pas.

6 4 Depeche Mode

En ne courant plus après la gloire et les excès, son chanteur s’est régénéré.

7 0 #nofilter

Les Ricains d’Awolnation se mettent à nu pour enregistrer un LP à l’ancienne.

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BULLEVARD U N

ST Y L E

D E

V I E

H O R S

D U

C O M M U N

L’homme qui valait presque 3 milliards : la star de Thor parle de son enfance dans l’arrière-pays australien.

JOHN RUSSO/CONTOUR BY GETTY IMAGES

CHRIS HEMSWORTH « AU PLACARD LE PORTABLE ! » PAGE 10

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RÜDIGER STURM

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Action man et surfeur occasionnel. « Plus la vague est grosse, plus le plaisir est grand. »

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ans sa jeunesse, Chris Hemsworth se baladait dans la nature, pieds nus de préférence. À 34 ans, l’Australien fait partie du gratin (chaussé) d’Hollywood. Avec trois volets de Thor à son actif, l’acteur encaisse près de deux milliards. Il change de registre en 2018 avec le film de guerre américain Horse Soldiers. the red bulletin : Monsieur Hemsworth, votre dernier opus se consacre à une unité de Forces Spéciales et à son implication en Afghanistan. Quelles sont les personnes les plus courageuses que vous ayez rencontrées ? chris hemsworth : Ma mère et mon père. Quand j’étais petit, nous avions peu d’argent. Mais mes parents ne nous ont jamais fait nous sentir pauvres, mes frères et moi (les acteurs Liam et Luke Hemsworth, ndlr). Ils ont trimé pour nous offrir de belles vacances et nous payer la planche de surf de nos rêves.

Chris Hemsworth L’interprète des 3 opus de Thor a grandi dans l’outback. Jusqu’à aujourd’hui, la nature est sa principale source d’inspiration.

« C’ÉTAIT PEUPLÉ DE BUFFLES, DE FANTÔMES » THE RED BULLETIN

Vous avez grandi dans ­l’outback, en Australie… … dans diverses communautés aborigènes, en effet. C’était radicalement différent de ce que nous connaissons aujourd’hui. À quoi ça ressemblait ? Les buffles passaient dans la rue, dans les fleuves on trouvait des crocodiles. On avait une télé (cassée la plupart du temps) avec deux chaînes. À quoi occupiez-vous votre temps ? Nous passions nos journées dehors. Nous étions immergés dans la culture aborigène, ses mythes et ses histoires. De quoi ces histoires parlent-elles ?

De fantômes qui vivent dans l’outback. Mes copains et moi, nous fabriquions des armes puis partions à la découverte des grottes alentour. Une fois, nous avons même découvert une peinture murale. Ce sont des expériences qu’on ne peut faire dans aucune école. Vous êtes resté un fan de nature. Qu’y cherchez-vous ? J’ai beaucoup d’énergie. Quand je ne trouve pas de soupape pour évacuer le trop plein, je ne supporte pas de rester enfermé. Ça m’arrive quand je suis longtemps en ville pour un tournage. Je ne veux pas non plus rester le nez collé sur un écran. Alors de temps en temps, je mets mon portable au placard. Et je m’éclipse dans la nature. Et où parvenez-vous le mieux à déconnecter ? Sur les vagues, quand je surfe ! Plus elles sont hautes, plus je dois m’aventurer hors de ma zone de confort, mieux c’est. Dans ces moments-là, il faut être présent à 100 %. Je m’efforce de garder cette sensation vivace pour le reste de la journée.

Les fantômes, les vagues. D’où puisez-vous encore votre inspiration ? Je trouve qu’il est dangereux de rester toujours au même endroit. Car la vision qu’on a du monde peut se réduire comme une peau de chagrin. Sortez de votre bulle. Ce qui m’intéresse, c’est d’aller à la rencontre des hommes et de leurs cultures, d’apprendre à les connaître et à les comprendre. Nous avons beaucoup de choses à en tirer.

Horse Soldiers, actuellement au cinéma.  11


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Voiture d’exception Son allure est futuriste mais cette Valkyrie à 2,5 millions d’euros est bien une version de série, prête à rugir.

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allez surtout pas dire que l’Aston ­Martin Valkyrie est un supercar, ce serait une offense. Ce bolide sculptural, fruit d’une collaboration entre le constructeur britannique et Red Bull Racing, est ce qu’un connaisseur appellerait un hypercar avec des performances et un design hors du commun et sans équivalent à ce jour. Conçue presque entièrement en carbone et sans aucun composant en acier, la ­Valkyrie est plus légère qu’une Mini Cooper, mais avec plus de chevaux (1 130 exacte-

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ment) que deux Porsche 911. Concrètement, c’est une F1 de série – son moteur V12 ­hybride de 6,5 litres dépasse allègrement les 320 km/h sur circuit. « Elle est menue et puissante, pareille à un champion poids mouche, explique Marek Reichman, directeur de la création d’Aston. L’aérodynamique atteint un sommet. Pour qualifier sa conduite, seul un mot me vient à l’esprit : ­incroyable. » Tout comme son prix, 2,5 millions d’euros au bas mot et inutile de consulter votre solde en banque, les 150 unités

prévues sont déjà attribuées. Parmi les futurs propriétaires, Aston Martin précise que plusieurs sont d’anciens ou d’actuels pilotes de F1. De plus, 450 amateurs sont sur liste d’attente dans l’espoir d’un éventuel désistement. Sollicité pour définir la forme atypique de la carrosserie, Reichman la compare à un bel insecte ou à un requin ­filant à travers l’océan. « Rien de tel n’existe, poursuit-il. Et rien de tel n’existera plus. » global.astonmartin.com

THE RED BULLETIN

PETER FLAX

LE REQUIN DES ROUTES


Très proche d’une F1 sur la route, la Valkyrie tourne et freine aussi agressivement que la RB6 de Red Bull Racing.

La voiture est sans acier. Sa carrosserie aérodynamique en fibre de carbone et son plancher ouvert maximisent l’adhérence. THE RED BULLETIN

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Juste Debout Il régale les fans de danse chaque année. Parmi les 4 000 talents de sa seizième édition, la Japonaise Kyoka, 21 ans, va (re)faire le show.

TOUTE LA PLANÈTE DANSE S’Y EXPRIME

Paris Queens : dans quelques minutes, Maïka (gauche) et Kyoka seront les gagnantes du Juste Debout, catégorie Hip-Hop.

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epuis 2002, le Juste Debout, concours de danse hip-hop « debout » fondé par Bruce Ykanji, est devenu une institution planétaire. Ce sont plus de 4 000 talents issus de sélections françaises et internationales qui s’y affrontent tous les ans jusqu’à la désignation du grand gagnant de chaque discipline (Locking, Popping, Hip-Hop, House ou Experimental) en son temple, l’AccorHotels Arena à Paris. En 2016, en duo avec Maïka, la Japonaise Kyoka – originaire d’Osaka – remportait la catégorie Hip-Hop face à Jeems & Lil’Blade. Flashback. the red bulletin : Kyoka, remporter le Juste Debout, ça a dû être mémorable ? kyoka : Je me suis vraiment dépassée pour l’emporter, et j’étais heureuse que ça ait payé. Aucun Japonais n’avait gagné la catégorie Hip-Hop par le passé, j’ai donc ajouté à cela la fierté de représenter mon pays. Gagner contre des hommes, c’était particulier ? Au départ, on peut se dire : « Je suis une nana, je ne peux pas gagner face à des mecs. » Mais on a usé de cette saveur et de ce style propres aux filles... Alors, mesdames, ayez confiance, et foncez !

PH CAMY

16 000 personnes dans le public, ça met la pression ? J’ai surtout ressenti du plaisir à danser devant une foule immense, mais pas de pression.

TEDDY MORELLEC/LA CLEF

Quel est l’entraînement de Kyoka, au quotidien ? Pas de routine ! J’essaie de ne pas trop réfléchir, et de connecter avec la musique. Naturellement.

Juste Debout, le 4 mars 2018 à l’AccorHotels Arena. Grande finale sur Red Bull TV ; juste-debout.com THE RED BULLETIN

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En classe survie Du flegme en toutes circonstances grâce à cette panoplie digne de James Bond.

MEURS UN AUTRE JOUR 16

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n ces temps turbulents où se succèdent catastrophes naturelles et humanitaires, l’entreprise californienne Preppi a conçu des kits d’équipement d’urgence pour survivre avec style. Le sac Prepster Black contient tout ce dont deux personnes ont besoin pour ­tenir au moins 72 heures. Il approvisionne en nourriture et électricité, donne de quoi s’hydrater, procure un abri et un moyen de communication. Le tout est livré dans un sac en toile et cuir cousu main orné d’un monogramme. Il est aussi agrémenté d’une

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poche ­fraîcheur pour les mets délicats (garnie d’adorables ­petites cuillères ; le caviar, lui, n’est pas inclus). D’autres produits ont été sélectionnés par le designer : du chocolat Mast Brothers, du thé Kusmi, une bougie Malin+Goetz… et un jeu de Backgammon. Qui a dit qu’il fallait endurer la fin du monde comme des barbares ? Son prix glaçant (4 310 €) vous permettra de faire des trocs très intéressants après que la bourse aura flambé… preppi.co

EN DÉTAIL 1. Panneau

solaire 2. Ponchos 3. Kit chargement et alimentation, câbles USB 4. Gants 5. Sacs de couchage 6. Poche fraîcheur et cuillères 7. Balise GPS via satellite 8. Torche tactique 9. Paracorde 10. Outil multifonction 11. Space Pen 12. Allumettes de survie 13. Torche LED 14. Radio solaire et manuelle 15. Jeu de poker. 16. Carnet 17. Poche pour stocker l’eau 18. Kit de premiers soins 19. Bougie 20. Chocolat 21. Désinfectant pour mains 22. Thé 23. Dentifrice 24. Brosse à dents Plus : tente, bandeaux LED, filtres à eau, gourde, lunettes infrarouges, nécessaire de toilette, lanterne solaire, Backgammon, nourriture et eau, bougies. THE RED BULLETIN


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Dita Von Teese La reine du burlesque devenue chanteuse pop raconte en quoi un tempérament touche-à-tout peut être valorisant.

« ÊTRE HAÏE, ÇA PEUT ÊTRE EXCITANT... »

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ita Von Teese passe de ballerine à ­mannequin puis danseuse burlesque dans ses vertes années, avant que Hugh Hefner ne la fasse poser en une de Playboy en 2002. Elle devient une icône pop, célèbre pour ses spectacles osés, sa gamme de vêtements, ses livres et son mariage avec Marilyn ­Manson. À 45 ans, elle part à la conquête de nouveaux horizons avec un album regorgeant de slows, sensuel et funky, écrit par et enregistré avec Sébastien Tellier.

the red bulletin : On vous connaît pour vos shows burlesques, mais moins pour vos chansons... dita von teese : Je ne suis pas chanteuse. J’ai confiance en moi lorsque je monte un spectacle burlesque, dessine de la lingerie ou crée un parfum. Mais j’aime aussi me mettre dans des situations où je suis vulnérable. Pourquoi vulnérable ? Je contrôle l’image que je ­projette. Tout ce que je fais sur scène, inondée de cristaux et baignée de lumière rose, est une version glamour de ma personne. Pour cet album, j’ai adoré être dans le studio d’enregistrement, avec les artistes, peu sûre de moi. J’étais dans une position très différente. Cela ne semble pas être une expérience très agréable... C’est une bonne chose d’expérimenter cette sensation. C’est enrichissant de laisser quelqu’un d’autre prendre le contrôle. J’estimais que si ­Sébastien me faisait confiance, il n’y avait aucune raison de ne pas saisir l’occasion de faire quelque chose qui m’oblige à sortir de ma zone de confort.

JOHN RUSSO/CONTOUR BY GETTY IMAGES

MARCEL ANDERS

Dita : modèle, danseuse burlesque et aussi pop star.

Peut-être que si, quand le public est hostile ? Je suis la première à dire à qui veut l’entendre que je ne suis pas chanteuse. Mais je ne vais pas m’enfermer à la maison de peur que quelqu’un dise que c’est nul. C’est la vie ! Au fond, c’est excitant quand les gens haïssent ce que vous faites. Je prends cela comme un compliment, parce que cela veut dire que je ne suis pas médiocre. Quand tout le monde aime ce que vous faites, il se peut tout à fait que cela ne vaille rien.

Dita Von Teese dans les bacs le 18.2 ; ­artoftheteese.com

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nder ressemble à bien des égards à Moby Dick – cachalot blanc d’une ampleur gargantuesque, émergeant des abysses pour tout avaler sur son passage. Lorsqu’il ouvrira ses portes l’an prochain à Lindesnes (Norvège), Under sera la plus grande table sous les mers. Le menu (raffiné) comprendra exclusivement des aliments ayant parcouru de courtes distances : poissons et crustacés issus de la mer glaciale visible de l’autre côté de la baie vitrée panoramique, ainsi que moutons sauvages et oiseaux marins des alentours. Under permettra d’observer et de déguster la faune. Grâce à des effets olfactifs, sonores et lumineux, le plancton sera attiré pour à son tour aguicher les poissons. Ce qui ajoutera un maillon supplémentaire à la chaîne alimentaire de cette ­expérience culinaire unique. under.no

Immersion gustative Plongeant des falaises vers les fonds marins, cet établissement norvégien apporte une nouvelle dimension à la cuisine. La faune locale figure au menu. Elle provient des eaux, terres et cieux environnants.

NE PREND PAS LES TICKETS REST’EAU

Un mur de verre acrylique met en scène l’écosystème local – et le plat du jour.

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MIR/SNØHETTA/STIAN BROCH

TOM GUISE

Le menu se constitue d’ingrédients issus des eaux, forêts et plages alentour.

Le bâtiment aux allures de rocher, ­dessiné par les architectes de l’agence Snøhetta, plonge près de 6 m sous l’eau. THE RED BULLETIN


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ors d’une audition déterminante pour sa carrière, Margot Robbie a eu l’honneur de ­gratifier Leonardo Di­Caprio d’une gifle. Côté vie privée, la jeune femme a fait bien pire. Gamine, elle ­dépouillait son propre frère…

the red bulletin : En 2013, après la sortie du Loup de Wall Street, vous vous êtes retrouvée propulsée sur le devant de la scène du jour au lendemain. Depuis, vous avez acquis une excellente réputation d’actrice et on vous donne comme favorite pour l’Oscar avec Moi, ­Tonya de Craig Gillepsie. Quelle est votre recette du succès ? margot robbie : J’ai toujours eu de grands rêves, et j’applique un plan précis pour les réaliser. Je me prépare scrupuleusement, je n’ai pas peur du labeur, et je me dis que j’y arriverai bien d’une manière ou d’une autre. Et surtout, je ne pars jamais du principe que je sais tout. Votre secret réside donc dans l’humilité. Je suis dans l’optique ­d’apprendre en continu. Si j’entends parler d’une technique de jeu que je ne connais pas par exemple, je m’inscris illico à un workshop. La maîtrise de la technique suffit-elle pour se faire une place au soleil au royaume d’Hollywood ? Non. J’ai dû constituer ma propre équipe autour de moi. J’ai le nez creux pour les

­ ffaires. Je suis très fière a d’être l’une des plus jeunes productrices d’un deal avec un studio très important (­depuis 2017, sa boîte de production LuckyChap coopère avec Warner Bros., ndlr). D’où vous vient ce flair pour les affaires ? C’est une qualité que j’ai développée étant enfant. Dès que j’ai su parler, j’ai appris à faire des shows. Je m’entraînais à faire des tours de magie et je les présentais aux membres de ma famille qui devaient payer leur billet ! Ensuite, après les avoir bien embobinés, je les faisais payer une deuxième fois pour que je leur révèle le truc. C’est vicieux. Je volais aussi les jouets de mon frère et je les revendais dans la rue. Au début, je ne pensais pas du tout devenir comédienne. Je voulais ­travailler comme magicienne et être propriétaire d’un hôtel de luxe. Vous parliez tout à l’heure de votre soif d’apprendre. Ça se traduit comment dans votre vie privée ? Je m’essaye à toutes sortes de hobbies. Il y a deux ans, j’étais folle de trapèze acrobatique, alors j’ai pris des cours. Et comme j’adorais les tatouages, j’ai même ­tatoué mes amis. Votre prochaine activité ? Je vais me mettre à jouer du banjo. Peut-être que ça deviendra ma nouvelle passion. Vous n’avez pas peur d’apprendre à faire plein de choses n’importe comment, mais aucune vraiment bien ? On verra. Je n’étais pas mauvaise au trapèze. Par contre, pour ce qui est des tattoos… Mais ce n’est pas ça qui compte. Je fais ce qui me plaît.

c­ inéma, en ne faisant que de la qualité. Pour Moi, Tonya, vous avez dû apprendre à faire du ­patin à glace de haut niveau. J’ai collectionné les bosses, les bleus et les ampoules. Mais ça en valait la peine.

instagram.com/margotrobbie *Le film raconte l’histoire de la patineuse américaine Tonya Harding. En 1994, peu avant les Jeux de Lillehammer, elle est impliquée dans une affaire d’agression envers sa concurrente, Nancy Kerrigan. Le 21 février au cinéma.

Margot Robbie Après avoir fait tourner la tête de Leonardo DiCaprio dans Le Loup de Wall Street, elle part à la chasse à l’Oscar. L’Australienne jongle entre discipline de fer et hobbies farfelus.

« J’AI MÊME ­TATOUÉ MES AMIS »

Et si vous deviez choisir : dans quoi voudriez-vous ­exceller  ? Je veux m’affirmer durablement dans le milieu du 20

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MARY ELLEN MATTHEWS/CPI SYNDICATION

RÜDIGER STURM

Comédie, ­production, banjo… l’Australienne de 27 ans cumule les talents.

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Skateboard downhill Que faire lorsqu’on descend une route à 100 km/h sans freiner ? Savourer ! Et se donner en spectacle.

IL SURFE SUR LE BITUME

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KONSTANTIN REYER

n homme, un skate, une pente raide. Il accélère de seconde en ­seconde, 60 km/h, 70, le bruissement du vent et le grondement des roues sur ­l’asphalte se font plus forts. « À partir de 90 km/h c’est fou, tu ne sens même plus si la vitesse augmente », explique Nicola Nührig, 30 ans et skateboardeur de descente pro. À la fin de la ligne droite, le compteur de son véhicule d’accompagnement indique 120 km/h. Record personnel pour Nührig, double champion d’Autriche en descente. « La fascination exercée par ce sport réside dans l’instant. Tu n’as pas droit à l’erreur, et tu dois être extrêmement concentré. Alors, tu as l’impression de voler », dit-il. Et la partie la plus spectaculaire, le slide, n’a même pas encore commencé. Afin de prendre le virage serré de manière sûre mais sans perdre trop de vitesse, il déplace son centre de gravité, met la planche en travers, plonge et prend appui sur sa main. « C’est comme surfer sur du ­bitume », s’exalte Nührig. Sauf que sa combinaison à lui est en cuir. Instagram : @nicolanuehrig

CHRISTIAN EBERLE ABASOLO

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Nicola Nührig fait du skate ­depuis 1995 et pratique la descente depuis 2007 (champion d’Autriche en 2013 et 2016). THE RED BULLETIN


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Nicola Nührig lors d’un slide dans un virage. Les silex qu’il tient au creux des gants ajoutent un effet étincelant.

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3,5 mil

Attiser le feu

jusqu’à 3,18 millions

Pepper X

Rien n’est trop corsé pour « Smokin’ » Ed Currie, le ­créateur du Pepper X qui désintègre votre palais.

3 mil

« COMME MANGER DE LA LAVE »

2 mil

1,5 mil

Carolina Reaper

En 2013, cet ­hybride de Currie est répertorié par Guinness World Records et ­devient officiellement le piment le plus fort du monde.

1 mil

L’ÉCHELLE DE SCOVILLE Développée en 1912 par le pharmacologue américain Wilbur Scoville, cette échelle mesure la puissance des piments en Unités de Scoville (SHU). Elles indiquent la dilution nécessaire afin que la sensation de brûlure disparaisse (par exemple 2,2 millions de parts d’eau pour une part de piment). 500 000

400 000

jusqu’à 350 000

Habanero 300 000

200 000

100 000 50 000

jusqu’à 5 000

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d Currie vend du plaisir… et de la douleur. « Les gens me payent pour les faire souffrir », dit le propriétaire de la PuckerButt Pepper Company dans un clin d’œil. Pas faux. On ne compte plus les vidéos, bizarres et hilarantes, de fous dégustant ses créations de piments, dont le Carolina Reaper (la « faucheuse de la Caroline »), un des piments les plus forts au monde. Il nous révèle leur potentiel curatif et hallucinatoire. the red bulletin : Pourquoi cultiver du piment ? ed currie : Je ne voulais pas mourir. Il y a de nombreux cas de cancer et de problèmes coronariens dans ma famille. J’ai découvert que les populations qui mangent traditionnellement beaucoup de piments forts sont peu touchées par ces maladies.

Que se passe-t-il quand on mange du Carolina Reaper ? D’abord, le goût est doux. Dans les secondes qui suivent, on transpire abondamment, on produit une quantité incontrôlable de salive. Les larmes coulent, les yeux s’injectent de sang. La plupart des gens paniquent ; certains ont des hallucinations. Ça dure entre 10 et 30 minutes selon la personne. C’est dangereux ? C’est comme manger de la lave, sauf que c’est inoffensif. Ce sont les cochonneries industrielles qui sont néfastes. Le Pepper X est plus fort que le Reaper. À ce niveau-là, sent-on une différence ? Oui, car le corps s’habitue. L’explosion des sens est addictive !

puckerbuttpeppercompany.com

Ed Currie produit des piments qui mettent tout le monde K-O ­depuis 1990.

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FLORIAN OBKIRCHER

jusqu’à 2,2 millions

PUCKERBUTTPEPPERCOMPANY.COM/ED CURRIE

2,5 mil


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Danklefs décortique les baskets et en fait des pièces uniques.

Création

Avec des clients tels que LeBron et Jay Z, le customi­ sateur de sneakers Jake Danklefs envisage des modèles uniques qui font de vos pieds des œuvres d’art.

JAKE PREND SON PIED J

EMILIO ZUNIGA

NORA O’DONNELL

ake Danklefs a toujours adoré les ­sneakers. À quatre ans, à San ­Antonio, il dessinait ses propres créations d’après les baskets de son frère de 14 ans. Sa mère, artiste, encourageait sa créativité au point d’envoyer des copies de ses premiers dessins à Nike. À 18 ans, il collectionne les objets rares. « À l’époque, je n’aurais jamais payé 300 $ pour une paire de pompes, donc j’achetais le même modèle dans une autre couleur et les peignais. Voilà comment tout a commencé. » Aujourd’hui, dans son ­studio, Dank & Co., Danklefs crée des chaussures uniques

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pour une customisation coûte au minimum 500 $. Danklefs vient de finaliser une commande pour un ami qui voulait que chaque pièce représente une facette différente de San Antonio, un travail qui l’a mis dans le pétrin. « Je ne peux même pas calculer le nombre d’heures que j’ai passé dessus. Ça m’a pris deux ans. » Heureusement, son client était patient. Une fois la paire terminée, le résultat était tellement impressionnant que la ville de San Antonio a voulu inclure les chaussures dans une exposition à l’occasion du tricentenaire de la ville. Pour finir, la paire va vraisemblablement se retrouver dans un musée local. « Il s’agit plus d’une œuvre d’art que d’une paire de chaussures, explique Danklefs. Beaucoup de clients la portent une ou deux fois pour l’exhiber, puis la mettent dans leur étagère. » C’est l’excitation provoquée par l’innovation qui motive Danklefs, même pendant de longues heures : « Mon assistant et moi essayons des trucs que personne n’a jamais faits sur des chaussures, nous repoussons sans cesse les limites pour voir ce qui est possible. Nous voulons que les gens se demandent : “Mais comment font-ils ça ?” » jwdanklefs.com

en leur genre, inspirées par tout ce qui passe par la tête de ses clients, LeBron James et Jay Z. Certaines customisations sont simples, et d’autres commandes plus complexes incluent le démantèlement de la chaussure point par point afin de tout reconstituer sur un nouveau matériau (un sac Louis Vuitton par exemple). Vous voulez des Air Jordan en velours vert cornichon ? Ou des Air Yeezy pourpres avec des incrustations en serpent ? Dans son studio à San Danklefs peut tout faire, à Antonio, Danklefs en condition d’y mettre le prix. pleine customisation. Les clients fournissent les chaussures, et le prix des matériaux et de la main d’œuvre  25


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THIBAULT GACHET/RED BULL CONTENT POOL

Si Vince Reffet rate son avion, il le prend en vol. Une poignée de minutes plus tôt, il s’est élancé d’un sommet suisse à 4 158 m d’altitude.


UNE PORTE DANS LE CIEL

En rentrant, le 13 octobre dernier, dans un avion à 138 km/h par une porte de 1,58 m de large sur 1,25 m de haut, les Soul Flyers FRED FUGEN et VINCE REFFET ont réalisé le projet le plus risqué et le plus flippant de toute leur carrière. Décryptage.  Texte PATRICIA OUDIT


E

n cette fin novembre, on n’a ­jamais été aussi content qu’ils soient deux. Sur le Net, le compteur vient encore de s’affoler. On a atteint les 170 millions de vues de leur vidéo A Door in the Sky sur les réseaux*… Nous étions là, face à eux dans un canapé tout ce qu’il y a de plus cloué au sol, au pic de la déferlante médiatique. Fred Fugen venait de répondre à la BBC. Vince apprenait qu’ils a ­ llaient passer sur CNN. Les portables qui sonnent. Le buzz absolu. Alors, oui, qu’ils soient deux évitait d’interrompre le flot, de casser le rythme de cet entretien fleuve, leur faisant dire chaque détail, rappeler chaque souvenir, chacune des peurs qu’ils avaient dû taire pour continuer à faire vivre ce fabuleux délire. La paire sur terre comme en l’air nous apportait tour à tour, parfois en chœur, des anecdotes, témoignant d’une énorme complicité, l’un relançant l’autre, l’autre corrigeant l’un, et Vince versa. Les Soul Flyers ne tombent pas du ciel : stars dans le milieu du parachutisme, as du BASE, ténors de la wingsuit : Fred ­Fugen, 38 ans, est triple champion du monde de 28

chute libre (de 2003 à 2006), vainqueur des mondiaux de 2005 et 2009. Vince Reffet, 33 ans, triple champion du monde (2004, 2006, 2008), deux fois médaillé aux Mondiaux (2005, 2009). Mais qu’importe ce palmarès et une liste d’exploits longue comme un jour sans voile, ce saut était une folie, qui n’aura aucune application militaire ou scientifique. Tout au plus donnera-t-il des idées de cascades dans un James Bond ou un Mission Impossible. Un geste gratuit dans le sens le plus noble du terme, mais plein de signification pour ces Soul Flyers, chevaliers du ciel 3.0 qui, l’âme chevillée à leurs ailes, viennent de donner à l’exploit aérien ses plus belles lettres de noblesse. La vidéo vous a donné des frissons ? Rembobinons.

COCHER TOUS LES RISQUES

Quelques années plus tôt, Fred et Vince avaient bien essayé. « Mais on n’avait ni la bonne combinaison, ni le bon pilote sous la main… » Alors, en mars dernier quand, à Dubaï, Vince fait le coup du rêve à Fred, la suite apparaît logique. Vince : « J’avais rêvé que je sautais d’une montagne et que

« J’avais rêvé que je sautais d’une montagne et que je rentrais par la porte, dans l’avion… » Vince Reffet

je rentrais par la porte, dans l’avion… » Sur le moment, Fred tique, même s’il la connaît l’histoire. « On a tous les deux été élevés au mythe absolu : Patrick de ­Gayardon, le pionnier de la wingsuit moderne (cf. encadré page 70, ndlr), alors, rentrer par la porte en plein vol faisait partie de nos envies forcément… Mais là, il m’a fait flipper sur le coup. En wingsuit, on n’a pas de parachute de secours. Si on se rate, ça peut vraiment mal tourner… Mais bon, l’innovation est notre marque de fabrique ! Il fallait bien se lancer et ­réinventer ce saut légendaire. » Bien sûr, aucun des deux wingsuiteurs ne s’attend à se prendre la porte un nombre aussi

*Au moment où nous bouclons, les chiffres font état de 171 millions de vues rien que sur Facebook, sans compter les 1 041 chaînes qui ont partagé la vidéo en l’espace d’une semaine. Question audience, on rivalise là avec les grands événements sportifs, ou l’autre grand saut du siècle : le Red Bull Stratos. THE RED BULLETIN

JEREMY BERNARD/RED BULL CONTENT POOL, THIBAULT GACHET/RED BULL CONTENT POOL, MAX HAIM/RED BULL CONTENT POOL (2)

Les frères des airs : Vince (gauche) et Fred ne comptent plus les heures à évoluer dans le ciel, en parachute, en wingsuit, ou dotés des ailes de Jetman.


À près de 140 km/h, et à 800 m du sol, les Soul Flyers ont un objectif : rentrer dans le Pilatus.


C’est sans moteur ni propulsion que les Soul Flyers jouent auprès de l’avion.


« Le risque principal, c’était de se blesser, voire de s’assommer en tapant l’avion. »

MAX HAIM/RED BULL CONTENT POOL, THIBAULT GACHET/RED BULL CONTENT POOL, RED BULL CONTENT POOL

Fred Fugen

f­ racassant de fois, comme des écoliers pris en faute, châtiment corporel d’autant plus sévère qu’il se passe 3 000 m en l’air. Lors des premiers essais en juin pourtant, tout se passe bien. « Direct, on se retrouve à 5 mètres de l’avion en formation, se réjouit Vince. Aussitôt, on en parle à Yves Rossy. » Yves, le mentor, l’artisan du projet Jetman (ces ailes propulsées dignes des superhéros de comics américains), qui les aide à cocher tous les risques et à les solutionner. Fred : « On a passé beaucoup de temps sur Google E ­ arth, étudié les trajectoires avec Yves pour avoir un maximum de hauteur et une marge de sécurité suffisante pour se récupérer en cas de problème. Le risque principal, c’était de se blesser, voire de s’assommer en tapant l’avion. On avait des protections, coudières et genouillères, et Vince a rajouté des mousses autour de ses côtes. » « L’autre gros risque, énumère encore la paire, était l’ouverture intempestive du parachute. On savait que notre dos allait forcément frotter contre l’avion et que ce contact pouvait libérer l’aiguille de fermeture (une aiguille courbe de 3 cm protégée par des rabats, ndlr). » Pour parer à cette éventualité potentiellement fatale, Vince a fait appel à Colin Thompson, une référence dans la réparation de parachute. Ils remplacent les aiguilles par des joncs plastiques de 15 cm, ce qui augmente le débattement, minimisant ainsi les risques d’ouverture en cas de frottement sur l’avion. « Pour sécuriser le tout, on a rajouté une petite patte sur la poignée de l’extracteur (un mini-­parachute qui déclenche la voile, rangé dans une pochette en tissu élastique, ndlr). Cela nous a demandé un petit effort supplémentaire pour ouvrir, mais on en était conscients. »

« C’EST PSYCHOLOGIQUE... »

Ces modifications ne serviront qu’au projet, lequel prend forme dans la tête des Soul Flyers, les obsède, leur fait peur aussi. Dix fois par jour, ils pensent à ce qui reste, malgré toutes les précautions, une effrayante équation à x inconnues. Le sommet du saut désigné – ce sera celui de THE RED BULLETIN

1,58 m de large pour 1,25 m de haut, très petite porte pour très grand exploit. Pour Fred et Vince, il ne tenait que s’ils entraient l’un après l’autre. Ici, Vince ouvre le bal, à balle.

la Jungfrau en Suisse (4 158 m), qui, avec 3 200 m de dénivelé et presque 3 minutes de vol, est réputé comme le plus long au monde – les entraînements sur la base Skydive Empuriabrava en Catalogne peuvent débuter. Le Pilatus, avion léger dont la capacité de freinage importante favorise la synchronisation, est piloté par l’expert Philippe Bouvier. Et entièrement capitonné. « Gros budget scotch sur cette

mission, rigole le duo. L’intérieur a été ­totalement rembourré de matelas sur ­lesquels on a scotché d’épais tapis de mousse. Cela prenait presque trois heures à chaque fois. À chaque vol, on en rajoutait une couche, car ça se tassait ! L’impact est pourtant identique à celui que l’on a quand on saute sur un lit avec trois pas d’élan, car nous volons à la même vitesse que l’avion. Mais c’est psychologique… »   31


« Le Pilatus est juste là ! Contact ! On s’engouffre dans l’avion, et ça valide tout ! » Vince Reffet

rière et sur le côté, entre 15 à 30 m vers le bas. Résultat : on ne se jette plus aussi latéralement qu’avant, c’est plus fluide. » Bingo. « Vince rentre tout de suite dans l’avion ! Moi aussi !, raconte Fred. On a de la marge alors, on recommence. » Ce jourlà, les deux wingsuiteurs réussissent cinq entrées chacun. Le cameraman hallucine de les voir, tranquilles, leur faire coucou de leur canapé volant. Le 16 août, rebelote, deux entrées chacun. Les plieurs de voile sont au chômage technique… Le binôme prépare alors le vol montagne. Yves Rossy leur a concocté des simulations : 45 secondes pour rejoindre le glacier du sommet de la Jungfrau, 35 secondes avant le début de la fenêtre de vol, 1 minute pour rentrer dans l’avion. Fred et Vince testent ces trajectoires qui s’avéreront exactes le jour J, toujours en sautant de l’avion à Empuria. Début septembre, direction la Suisse. Après plusieurs vols 32

tests effectués depuis le sommet de la Jungfrau duquel les deux ne se sont encore jamais élancés, les trajectoires sont retravaillées en avion. « Fred est devant, je le suis vers le glacier. Je tourne la tête : le ­Pilatus est juste là ! Contact ! On s’engouffre dans l’avion, et ça valide tout ! »

PRENDRE LA PORTE, UN EXPLOIT

Assez de répétitions. Les équipes de tournage sont en place : la couche de nuages épaisse fait que le créneau sera court. Pression supplémentaire. « On monte en hélico et on fait les 200 m restant à pied. On ne fait pas les malins. Il fait – 15 °C et il y a un vent de travers sur l’arête de départ. Le temps de connecter les câbles de nos casques, il y a de la glace dessus. » Yves Rossy décide d’accélérer la procédure. Le départ est « moyen », le vol chaotique. Les turbulences chahutent les ailes au-dessus du glacier, l’avion fait des bonds. Vince rentre, mais Fred se précipite et tape violemment la carlingue. Le pire scénario vient de se produire. « Mon dos tape contre la porte, je fais deux tonneaux, mais j’arrive à me poser tranquillement dans le champ prévu. Je n’ai pas eu peur, pas eu mal. Je suis juste frustré. Mais l’important est que ça valide, à cet instant, toute la partie sécurité. » Toutefois, la pression à terre est immense : le projet, pensé à deux, doit se réussir à deux. Le 10 octobre, branle-bas de combat : les trois jours d’anticyclone requis cette fois-ci arrivent plus tôt que prévu. Mais là, tuile ultime : Vince s’est réveillé avec le coup bloqué. « Si ça c’est pas psychosomatique ! Je fais des séances d’ostéo et de massages pendant que Fred s’échauffe en sautant… » Le 13 octobre, Vince va mieux. La météo est idéale, 0 ° à 4 000 m, pas de vent. « Au premier saut, on se prend la porte tous les deux ! Dégoûtés ! Trop lents… » admet Vince. Deux heures et demi plus tard, ils remettent ça. Il est 13 h 30. Cette fois, ça rentre ! A Door in the Sky n’est plus un rêve. Et l’euphorie est totale. Vince se souvient de ce silence lourd, la veille de l’exploit. D’une concentration, et d’une connexion absolue entre les deux amis de toujours. Avec eux, l’expression prendre la porte, associée à une sanction, est devenue synonyme d’exploit.

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Patrick de Gayardon

LE PIONNIER C’est le héros des Soul Flyers, le boss de l’équipe de France de parachutisme. Un homme qui s’est jeté d’un avion pour ensuite le réintégrer en plein vol ne pouvait que faire des émules dans les familles de parachutistes dont sont ­issus Fred et Vince. Fred Fugen, alors âgé de 18 ans, se souvient : « Patrick de ­Gayardon était venu passer le week-end sur la dropzone où je sautais avec mon père, il préparait ce fameux saut... Il nous avait montré des vidéos de lui où il se prenait boîte sur boîte contre l’avion. À l’époque, ils devaient être trois dans le monde à voler en wingsuit, mais lui seul avait ce niveau. J’avais des posters de lui dans ma chambre. » PDG découvre le parachutisme à l’armée en 1978. Il a 18 ans, n’y prend aucun plaisir… Premier saut sportif toutefois deux ans plus tard. Son but : faire de la chute libre et gagner les championnats du monde de vol relatif. À ceux de 1985, il finit 2e. Viré de l’équipe de France, il essaie de développer les atterrissages rapides, fait du BASE jump, du parapente, et rencontre Alain Prieur, le cascadeur. Découvre qu’on peut donc s’éclater en dehors de la compétition… Cinq ans plus tard, il devient l’un des tous premiers skysurfeurs, sautant d’un hélico, planche de snowboard aux pieds, pour enchaîner les manœuvres. En réincarnation du Surfer d’argent, de Gayardon ne cesse d’expérimenter : ­détenteur du record du monde du plus haut saut en altitude sans oxygène (11 700 m) en 1992, porté à 12 700 m en 1995. Mais c’est dès 1994 que son nouveau concept d’ailes, souples et ­attachées au corps du parachutiste, la fameuse wingsuit, révolutionne l’univers de la glisse ­aérienne. Le 29 juillet 1997, largué d’un Pilatus, il remonte dans la cabine une minute plus tard. Cascade reprise vingt ans plus tard par les Soul Flyers. Il se tue le 13 avril 1998, à 38 ans, lors d’un saut à Hawaï, après avoir apporté une nouvelle amélioration à sa wingsuit. Patrick de Gayardon avait plus de 12 000 sauts à son actif. Remerciements à Bruno de Paramag THE RED BULLETIN

RED BULL CONTENT POOL

Fin juillet, après un mois d’entraînement, le duo teste et réussit un certain nombre d’entrées par la porte, en sautant de l’avion, avec Yves Rossy qui donne le GO en fonction des indications données par les instruments et la vue globale qu’il a de l’avion. Le 29, ils décident de fêter les vingt ans du saut de Patrick de Gayardon. Vince : « Je ne suis pas bien mentalement ce jour-là et je tape l’encadrement qui n’est alors pas entièrement protégé par de la mousse. Je n’ai pas la bonne visée, je saute en force comme un b ­ arbare, et je me prends plusieurs fois le coin... Résultat, je me fais super mal aux côtes. Fred se râte aussi ce jour-là, mais il entre par deux fois le lendemain. » Vince blessé, une pause de trois semaines est votée. « Réintégrer un avion en vol, sans ­système de sécurité, ce n’est pas naturel. Instinctivement, tu te protèges, commente Fred. On s’aperçoit qu’on roule un peu trop tôt avant de rentrer. » Reprise des hostilités le 15 août. La pause a été salutaire. « On réussit enfin à se synchroniser avec l’avion : alignés sur 6 m en ar-


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Le visionnaire À l’âge de 30 ans, RONALD DLAMINI fut le premier Sud-­ Africain noir à se voir sacré champion poids welters de MMA. Puis une méningite l’a plongé dans le coma pendant dix jours. Devenu aveugle, celui qu’on surnomme le « Black Mamba » n’a pas abandonné le ring. Le combat ne faisait que commencer. Texte TOM WARD  Photos PAUL SAMUELS

Un regard qui tue : Dlamini est une inspiration vivante dans l’univers du MMA.

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L

a nuit est tombée sur l’hippodrome ­Greyville de Durban (Afrique du Sud). À l’extérieur, les pistes désertes sont balayées par les pluies diluviennes qui s’abattent ce soir sur la métropole postée en bordure de l’océan Indien. À l’intérieur du bâtiment principal, un brouhaha de plus en plus intense se fait entendre : au moins 2 000 passionnés se pressent pour assister au tournoi Pro/Am de MMA (mixed martial arts), qui s’y déroule deux fois par mois. C’est à I­ ksaan Rahaman d’ouvrir le bal : combattant bantamweight ou poids coqs (moins de 61 kilos), il fait partie de l’équipe locale, les « Gorgeous Boyz Hardcore » (GBH). Iksaan sautille sur place, histoire de marquer son impatience. Son adversaire, sec et compact

Dlamini, héros local, se promène à Durban.

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comme lui, s’échauffe dans son coin. Puis vient l’affrontement, sous les jubilations du public. Après un début laborieux, le combat se termine finalement par une victoire par K-O pour Iksaan. Plus tard, dans les vestiaires, ce dernier confiera que cette victoire, il la doit à son entraîneur, Ronald Dlamini, le premier Sud-Africain noir à avoir inscrit son nom dans l’histoire nationale du MMA, en devenant champion welterweight ou poids welters (moins de 77 kilos). Un entraîneur qui possède une autre particularité : il y a cinq ans, Ronald Dlamini est devenu totalement aveugle. Même s’il écoute poliment le compterendu détaillé du combat, l’ancien champion de 35 ans n’en a pas vraiment besoin pour savoir comment son poulain s’est comporté : après tout, cela fait des semaines qu’il prépare Iksaan à cette rencontre, lui apprenant comment sentir chaque faiblesse, comment anticiper et éviter chaque coup, chaque réaction de son adversaire. Les deux se sont rencontrés pour la première fois lorsque Dlamini avait déjà perdu la vue. Pour Iksaan, ce mec doué d’une extraordinaire intuition, capable de sentir ce que personne ne pouvait voir, était le coach idéal. « Il sait tout faire : ­parer des coups, lancer des attaques, vous plaquer au sol et vous forcer à l’abandon. Mais surtout, il vous apprend à vous fier à autre chose qu’à vos yeux. »


Privé de la vue, ­Dlamini se fie à son instinct qui ne l’a ­jamais lâché.


Ambition aveugle

Tout en muscles et en finesse, la carrure de Dlamini ne laisse aucun doute sur son passé et son présent de combattant MMA. L’année 2012, dernière de sa carrière pro, en a aussi été l’apogée : 27 victoires pour 4 défaites (2 par K-O, 2 par blessure). Il faut dire que le Sud-Africain a dû apprendre très tôt à se battre. « Les sports de combat m’ont toujours intéressé, racontet-il d’une voix calme. Je viens d’une famille pauvre et j’étais un gosse calme et ­timide, mais aussi assez crâneur. Alors je me faisais souvent embêter par les caïds du coin. Je me battais tous les jours à la sortie de l’école. » Ce talent précoce de bagarreur, il va pouvoir l’approfondir grâce à son grand-frère, lorsque, à 11 ans, Dlamini quitte sa grand-mère pour aller vivre avec le reste de la famille dans le township de Sundumbili près de Durban, son frangin l’emmène voir un entraînement de karaté Kyokushin, une version full-contact et brutale de la discipline. C’est le déclic. Le petit Ronald veut se battre, lui aussi ! Pour le faire taire, on le met face à l’un des meilleurs karatékas du club. « Ils m’ont fait combattre une ceinture noire, dès le premier jour !, lance-t-il d’une voix qui trahit l’excitation. Mais tu vois, je m’en fichais, je n’avais rien à perdre. À partir de ce moment-là, je me suis fixé un objectif : être le meilleur. » Et le gamin des townships s’y tient. Tous les jours, il se tape 6 kilomètres pour aller à l’école, puis en fait 10 autres,

en courant, jusqu’au dojo où il s’entraîne comme un fou, avant de rentrer (en courant) chez lui. « Cinq mois plus tard, la ceinture noire du premier jour n’a rien pu me faire ! », conclut-il avec une fierté encore visible. Depuis, Dlamini ne s’est jamais arrêté. Après le karaté, il passe, à 19 ans, au kickboxing, avant de découvrir le Muay Thai. C’est finalement ce sport, dominé par les blancs, qui lui vaudra son surnom de « Black Mamba ». Dès les premiers combats, il suscite la curiosité. Son côté frimeur, sa couleur de peau et ses plaquages fulgurants finissent par séduire un public toujours plus nombreux. Un jour, alors que son adversaire tente péniblement de se relever, Dlamini se livre à quelques exercices de stretching histoire de patienter. Une désinvolture qui plaît : « Les gens criaient “Black Mamba ! Black Mamba !’’ », dit-il en riant. Quant au MMA, Dlamini y vient un peu par hasard, en dépannant un pote qui ne pouvait pas se rendre à un combat. Mais sa réputation le suit et finit par lui valoir quelques remarques racistes d’un combattant blanc assez connu dans le pays. Dlamini laisse faire... jusqu’à ce qu’un tournoi soit organisé, en 2010, pour le titre de champion national welterweight. L’occasion rêvée pour demander justice : Dlamini écrase le type et remporte ainsi le titre tant convoité. « J’avais plaqué le gars au sol, et son coach

« Sensei » Dlamini reçoit le respect de ses élèves.

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­ ’arrêtait pas de lui gueuler des conseils. n Et moi, je lui répondais : “Désolé baby, ça va pas le faire !’’ » Ce soir-là, il devint le premier Noir sud-africain à être sacré champion welterweight, et son coach, Rhyne Hassan, le premier entraîneur noir d’un champion MMA. Deux ans plus tard, alors que sa carrière est au sommet, le champion décide de quitter le monde pro du MMA. Il se dit que d’autres défis l’attendent. Et ne se doute alors pas qu’ils seront immenses... C’est à ce moment-là que les maux de tête commencent, des douleurs insupportables qui le conduisent à l’hôpital. Le diagnostic tombe : c’est une méningite, une maladie potentiellement mortelle et dont les séquelles peuvent être très lourdes. Pourtant, les médecins se veulent rassurants : il s’en sortira. Une infirmière vient le voir dans sa chambre pour lui administrer un anti-douleur.

La nuit tombe

« Je l’ai vue reculer de cinq pas, et puis tout est devenu noir, se souvient-il, et sa voix s’assombrit lorsqu’il raconte ces tristes journées de 2012. Je suis resté dix jours dans le coma. À mon réveil, j’ai paniqué : je croyais que j’étais encore sur le ring et je me suis mis à frapper tout ­autour de moi. » S’ensuit une longue période de convalescence, entouré de sa sœur ­jumelle et de ses amis du GBH. Certains ne peuvent retenir leurs larmes en voyant leur héros terrassé de douleur, incapable de s’alimenter. Avec ses 49 kilos, Dlamini n’est bientôt plus que l’ombre de luimême. Mais il n’a pas dit son dernier mot : il s’accroche, serre les dents, regagne en force, en muscles et en dextérité. Petit à petit, il prend possession de son nouveau corps, apprend à utiliser les quatre sens qui lui restent. « Lentement, j’ai retrouvé mon esprit, ma hargne : j’avais toujours dû et su faire la différence, et je devais continuer, avec ou sans mes yeux. Perdre la vue est quelque chose de terrible, mais la vie, c’est ça, c’est de la souffrance. Et il faut trouver un sens à tout ça. C’est comme si on m’avait donné cette croix parce qu’on savait que je pouvais la porter. » Dlamini va vite trouver un sens à sa nouvelle condition. Dans le centre pour aveugles qu’il fréquente, il entend les ­histoires de vols, d’attaques, voire de viols THE RED BULLETIN


Objectif du Black Mamba : entraîner des aveugles à l’auto-défense, partout dans le monde.

« La vie, c’est de la souffrance. Et il faut trouver un sens à tout ça. »


Le style full-contact du MMA lui convient parfaitement. « Dès que je touche l’adversaire, je sais ce qu’il est en train de faire. »


Corps à corps avec Iksaan Rahaman.

partie du corps une attaque est dirigée. Si c’est la tête qui est visée, par exemple, il y a de grandes chances pour que le torse de l’adversaire ne soit pas protégé. « Le premier des sens, c’est la vue, ­explique-t-il. Pour moi, maintenant, c’est difficile d’oublier quelque chose que j’ai touché. J’utilise mes autres sens à 200 % : l’odorat, l’ouïe, le toucher. Rien qu’en te touchant, je peux deviner ton poids. Sur le ring, je me concentre sur la respiration, le bruit des pas de mon adversaire, et je frappe là où il est le plus vulnérable. »

Sixième sens

dont sont victimes les handicapés visuels. Sa nouvelle mission lui apparaît clairement : concevoir un programme d’auto-défense spécialement pour eux. Il convoque alors ses amis les plus proches et leur annonce solennellement que le Black Mamba est toujours vivant, qu’il n’a pas changé, et que c’est à eux de s’adapter. Il rit, fait des blagues, pour le plus grand plaisir de l’assemblée. Le message est limpide : « C’est ce que m’ont appris les arts martiaux. Si tu perds un combat, regarde tes potes bien en face, et passe à autre chose. Les défaites, les déceptions, tout ça c’est la vie. Mais il faut savoir oublier et continuer. »

Contre-attaque

À le regarder s’entraîner tous les jours avec les autres Gorgeous Boyz de Durban comme si de rien n’était, on se dit que Dlamini est un modèle de résilience. Difficile, en effet, de déceler un quelconque indice de son handicap : il évolue avec grâce, enchaîne naturellement ­parades et attaques, évite les coups de son adversaire avec une telle aisance que cela force le respect. Hassan, son entraîneur – l’un des meilleurs combattants GBH et ami très proche – nous le confirme. « Il a accepté sa nouvelle condition. Pour lui, c’était ça ou la mort. Jamais je n’aurais imaginé voir quelqu’un d’aussi fort. Il a toujours vécu THE RED BULLETIN

« Pour eux, je suis le mec qui ne lâche rien. » à fond et c’est ce qu’il continue de faire aujourd’hui. Un jour, à l’hosto, je lui ai ­demandé ce qu’il aimerait le plus au monde. Il m’a dit qu’il voulait continuer à pouvoir s’entraîner avec nous, ses amis. C’était tout ce qu’il souhaitait. » Par une tragique coïncidence (ou ­prémonition ?), trois mois avant la maladie, lui et Dlamini avaient commencé à s’entraîner en se bandant les yeux. À l’époque, ce n’était qu’un moyen pour eux d’améliorer leurs capacités d’anticipation. Pourtant, c’est bien ce qui a permis, plus tard, à Dlamini de remonter sur le ring : il savait alors que la vue n’est qu’un sens parmi les cinq dont chacun dispose. Aujourd’hui, il sait se repérer dans l’espace et « sent » tout ce qui se passe autour de lui. Mais c’est sur le ring, lorsqu’il affronte des adversaires – voyants ou non – que sa métamorphose est la plus spectaculaire. Le MMA, dit-il, est un sport fait pour les non-voyants. « Il me suffit de toucher une fois l’adversaire pour savoir ce qu’il est en train de faire. » Il est ainsi capable de prévoir à quel moment et vers quelle

Retour dans la ferveur de l’hippodrome de Greyville. Dlamini et Hassan se frayent un chemin à travers la foule qui se presse pour le tournoi du samedi soir, organisé par une star locale des arts martiaux, Larry Vorster, que tout le monde appelle « Shihan » Larry. Lui et Dlamini se connaissent bien. « Ce mec, Dlamini, je l’adore, nous confie Vorster. Jamais il ne s’est avoué vaincu. C’était un champion sur le ring, et il continue d’être une ­inspiration pour nous tous. » Dlamini vient d’entrer dans les vestiaires pour voir son protégé, Rahaman, qui est en train de s’échauffer. Tout le monde vient le saluer, l’appelle « Sensei » (un terme japonais qui signifie « maître ») en signe de respect, lui tient le bras quand il parle. L’ancien champion écoute attentivement, donne des conseils. Pendant le match, un ami lui décrit le déroulement dans les moindres détails. « Je ne vois pas le combat, mais je le visualise. Tout est très clair dans ma tête. Et puis c’est important pour les autres de savoir que je suis là. Pour eux, je suis le mec qui ne lâche rien, qui n’abandonne jamais, alors ça leur donne de la force. » On parle alors de ses projets pour l’année 2018, beaucoup de conférences, et des cours de MMA pour non-voyants. D’abord dans son pays, puis, il l’espère, à l’international. « J’essaie de créer un monde où ­personne ne se sent à l’écart. J’aimerais apporter cette lumière d’espoir aux quatre coins de la planète, et un message : ta chance, c’est à toi de la provoquer. » Puis il se lève. Mais avant de se diriger vers la foule qui entoure le ring, ce ­samedi soir à Durban, Ronald « The Black Mamba » Dlamini se retourne et nous lance dans un sourire : « Tant qu’on ­respire, il faut essayer ! »   41


TAK E F I V E

L’athlète TANJA ERATH est devenue…

… UNE PRO DEPUIS SON SALON La coureuse cycliste allemande de 28 ans a enfourché son vélo d’appart dans son studio et a pédalé virtuellement jusqu’à décrocher un contrat de cycliste professionnelle.

2 Faire les choses autrement

J’ai adoré le concept de la Zwift ­ cademy. Normalement, pour rejoindre A une équipe pro, il faut de bons contacts dans le monde du cyclisme ou un bon CV. Avec Zwift, la sélection est méritocratique : l’équipe ne sait rien de toi, seule ta performance est prise en compte.

3 Une nouvelle réalité

Sur Zwift, on traverse des endroits qui existent réellement et on observe la progression de son avatar. Si quelqu’un d’autre est plus rapide, il te dépasse. En montée, le Home Trainer Smart te fait pédaler plus dur ; en descente le parcours est plus facile, comme en vrai. Tu t’investis autant que dans une vraie course. Tu sais que les autres avatars sont des personnes également assises sur leur vélo d’appartement. Je ne pensais pas pouvoir arriver aussi loin depuis mon salon, mais ça fonctionne.

4 Une compétition féroce Erath est la 2e ­athlète à avoir remporté la Zwift Academy.

1 Difficile à croire Je m’imaginais travailler dans un hôpital, et au final, me voilà qui parcours le monde en tant que cycliste pro ! » TANJA ERATH

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J’ai fait du triathlon pendant quinze ans, j’ai commencé à l’âge de onze ans. J’avais de l’ambition. J’avais un bon niveau, mais sans être pro, et je me concentrais sur mes études de médecine. Un jour, une amie m’a parlé de la Zwift ­Academy, une série de tests et de courses en réalité virtuelle qui peuvent déboucher sur un contrat avec l’équipe cycliste Canyon-SRAM. Et j’ai gagné ! Je m’imaginais travailler dans un hôpital, et au final, me voilà qui parcours le monde en tant que coureuse cycliste pro !

En 2017, 2 159 femmes ont rejoint la Zwift Academy. La première étape consistait à effectuer 15 entraînements en réalité virtuelle en l’espace de six semaines, et seulement 500-600 y sont arrivées. Puis 10 femmes ont été sélectionnées pour la semi-finale. J’ai vérifié la compétition sur Strava et j’ai vu que mes résultats étaient bons. Ensuite nous avons dû faire sept ­entraînements : quatre sur Zwift et trois en réalité. Les trois finalistes ont participé à un camp de formation avec CanyonSRAM à Coblence. Je n’y croyais pas.

5 Un défi virtuel bien réel

Le fait de gagner a été une expérience étrange et surprenante. Ça a changé ma vie. J’ai déménagé en Espagne, et je ne suis ni étudiante, ni médecin. En tant que cycliste pro, mon quotidien est rythmé par les entraînements, les courses et les voyages. Ce n’est plus virtuel, c’est bien réel.

Suivez Tanja Erath sur wmncycling.com Entretien RUTH MORGAN Photo  TINO POHLMANN THE RED BULLETIN



En 2017, ils ont tracé (parfois à vélo) depuis leur ville d’origine jusqu’à Milwaukee pour participer à la NACCC.

METS LE PAQUET !

À la fois marginaux et véritables athlètes d’endurance, les COURSIERS À VÉLO sont au meilleur de leur forme, même si l’ère du numérique est v ­ enue bouleverser leur métier. Chaque année, ils se rencontrent à l’occasion du championnat North American Cycle Courier Championships pour se confronter, faire la fête et partager.  Texte SETH GRUEN  Photos THOMAS CHADWICK 44



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es ventres se taisent et on entend s’élever les vivats alors que Nico Deportago-­ Cabrera arrive parmi les derniers dans le bar situé dans l’East Side de Milwaukee. Il y est accueilli par toute une bande de marginaux hirsutes plus ou moins agités. La ­plupart n’ont pas mis les pieds dans un bureau depuis des lustres. L’un d’eux porte un tee-shirt à l’effigie de Bob l’éponge et arbore une coupe mulet tout droit sortie de Boogie Nights, tandis qu’un autre a une barbe si longue que l’on se demande comment il fait pour ne pas la coincer dans les roues de son vélo. Ce ne sont là que deux types parmi les 200 réunis. Tous sont sapés super à l’aise, à l’exception de Nico Deportago-Cabrera, qui a enfilé la tenue d’un cycliste olympique. En effet, il vient de pédaler les 145 km qui ­séparent Chicago, où il vit, de Milwaukee, siège du Good City Brewing, le bar en question. « Le vélo, c’est bien plus qu’un métier, explique Cabrera. Le week-end, on fait des courses ou des balades, on va camper… Notre vie tourne autour du vélo. » Avec ses cheveux jusqu’aux épaules, son corps affûté et ses expressions (tout est 46

Livraison express : s’il vous faut un coursier à vélo pour une mission ­urgente, faites appel à Nico Deportago-Cabrera. À 33 ans, ce natif de ­Chicago est l’un des meilleurs au monde.

« trop cool ») il ressemble à un surfeur de la côte ouest. Au sein du groupe, Nico est le plus reconnaissable. Il est venu pour le North American Cycle Courier Championships (NACCC, prononcez « NAC ») qui rassemble les meilleurs coursiers à vélo du monde dans une course éreintante de plusieurs heures où les concurrents doivent combiner endurance marathonienne et excellent sens de l’orientation. Actuel tenant du titre, Nico vient également de remporter la troisième place au championnat du monde de Montréal. « Nous venons d’horizons différents et sommes tous extravagants. Ça rend l’événement très convivial, s’amuse-t-il. » Nico est rejoint par un autre cycliste, Joseph « Opie » Chapman, en bout de table. Les deux compères font signe à un gentleman qui se déplace avec une canne. Après s’être lentement avancé, il raconte : il était sur son vélo à San F ­ rancisco lorsqu’il a été heurté par une voiture qui venait de brûler un feu rouge. Résultat : sa rotule a atterri au milieu de sa cuisse. ­Demandez à n’importe quel cycliste s’il a déjà eu un accident et il éclatera de rire, aura du mal à se ­souvenir du nombre exact de fois où cela s’est produit, ou relèvera un pan de vêtement pour montrer une cicatrice. Nico a

« Nous risquons nos vies, prenons des shoots d’adrénaline et réalisons notre rêve. »

notamment été renversé par un taxi et s’est ­cassé la clavicule après une collision avec un autre coursier. « Nous risquons nos vies, prenons des shoots d’adrénaline et réalisons notre rêve », résume Opie. Internet a complètement démoli le business des coursiers à vélo. Dans les années 1990, des agences de tous types faisaient appel à eux pour transporter des documents, mais beaucoup de ces coursiers se sont aujourd’hui reconvertis dans la livraison de repas pour survivre. Cependant, certains dans le groupe sont convaincus que Jimmy John’s (une enseigne de restauration rapide aux USA) n’est pas digne d’eux. En effet, comme le signale Nico Deportago-Cabrera, « il faut aussi faire les sandwiches »… D’autres travaillent pour des sociétés de divertissement et transportent de gros chèques ou des scripts. Selon Nico, les coursiers sont « à la recherche de tout ce qui ne peut pas être envoyé par e-mail. Autrement dit, je suis moins concerné par le fait d’avoir le bon job, de gagner assez d’argent et de faire ce pour quoi je suis payé, résume Nico. Aujourd’hui, tous les gars cool qui ont fait le lycée avec moi en sont à leur troisième ou quatrième gosse, sont propriétaires, partent en vacances deux semaines chaque été et mènent une vie un peu plan-plan. On ne fait pas fortune dans ce métier, poursuit-il. Ce job, nous l’avons choisi pour la satisfaction que nous en tirons ou pour l’esprit de communauté. » Et le NACCC constitue une excellente occasion de faire la fête tous ensemble. Pendant deux jours, une course fermée dans le centre de Milwaukee amène les participants à transporter des paquets de toutes sortes et de toutes tailles. Ils doivent THE RED BULLETIN


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Premier choc : pendant le NACCC, c’est une vraie communauté d’entraide qui se dévoile. « Nous sommes tous extravagants. Cela rend l’événement très convivial », s’amuse Nico Deportago-Cabrera.

les faire tenir en équilibre sur leur vélo et négocier un parcours émaillé de collines, de virages serrés et de talus. Sans oublier d’optimiser leur itinéraire en fonction des points d’enlèvement et de livraison. Le dimanche de la finale, les meilleurs concurrents auront besoin de plus de deux heures pour terminer la course, en s’appuyant sur leur vivacité d’esprit et leur capacité à calculer les risques, deux compétences dont ils font faire preuve durant leurs journées de travail habituelles. « Il est indispensable de savoir s’imposer dans le trafic pour rester en sécurité sur son vélo. Et je pense qu’il faut être aussi un peu athlète dans l’âme, car vous devez avoir un temps de réaction très court, ajoute Nico. Vous devez être ­capable de vous sortir rapidement de n’importe quelle situation en cas de ­danger. »

Chaque édition du NACCC commence par une grande fête et une course Alleycat. Pendant cette course urbaine clandestine, les concurrents effectuent une série complète d’enlèvements et de livraisons nocturnes dans la circulation dense du vendredi soir. Les lauréats sont aussi champions pour enfreindre d’autres lois : ils calculent le trajet des voitures qui ­arrivent pour brûler les feux rouges,

« Nous avons choisi ce job pour la satisfaction que nous en tirons. »

s­ ’accrochent aux bus, empruntent des sens interdits… « J’ai découvert à quel point j’aimais parcourir la ville, se réjouit Nico. Beaucoup de gens se mettent au cyclisme avec le BMX ou le VTT, mais c’est rouler en plein milieu du trafic qui me plaît. Je suis accro. » Ce type de course tire son nom d’un groupe de cyclistes de Toronto qui s’appelait les Alleycats et organisait des courses clandestines au milieu des années 1990. En même temps, des manifestations officielles voyaient le jour dans des quartiers de New York et Berlin. Cela a donné naissance au circuit actuel de courses qui, aux dires des concurrents et malgré le manque de données, semblent approcher des trente ans. « À l’heure de l’Alleycat, nous poussons nos limites au max pour nous faufiler dans le trafic, précise Nico Deportago-Cabrera. Je dis cela en sachant pertinemment que participer à une Alleycat n’est sans doute pas un bon exemple pour les autres cyclistes. » Il a remporté l’Alleycat de l’an dernier. Mais n’a pas l’intention de concourir cette année. Son périple de 5 h 30 depuis Chicago lui a pompé beaucoup d’énergie. On tente de le faire ­changer d’avis… sans succès.

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a course qui couvre une zone de quatre blocs sur quatre blocs dans le centre de Milwaukee est balisée par une bande jaune où il est inscrit “Try harder” (trad. bats-toi plus fort). Plusieurs concurrents, dont Opie, ont cette devise tatouée sur la cuisse en hommage à Jacob Smoller, un coursier de Boston qui adorait cette maxime. Ce dernier est mort d’une overdose en 2015, une année difficile pour la

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« Il est indispensable de savoir s’imposer dans le trafic pour rester en sécurité sur son vélo, dit Nico Deportago-Cabrera. Vous devez être capable de vous sortir rapidement de n’importe quelle situation en cas de danger. »

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Si vous perdez un paquet pendant la compétition, vous êtes immédiatement disqualifié.

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Que l’on gagne ou que l’on perde, l’important c’est de se retrouver, faire du vélo et vider quelques canettes.

« Même quand tout part en vrille pendant une course, à l’arrivée, ce n’est que du bonheur. » communauté des coursiers qui a également été touchée par le décès d’un des leurs, originaire de Chicago, à la suite d’une collision avec un bus. Des checkpoints sont placés tout au long du parcours : les concurrents doivent s’y rendre pour récupérer les paquets et les livrer. « T’en veux ? », demandent les animateurs d’un checkpoint, pointant du doigt des biscuits aux effets incertains, enquillant margarita sur margarita. Les concurrents abordent l’événement avec plus ou moins de détermination. L’un s’enverra une bière cul sec sur la ligne de départ, tandis qu’un autre sirotera tranquillement la sienne et qu’un troisième s’élancera dans la course une cigarette aux lèvres. Après une réunion de préparation pour la finale de dimanche, Nico s’extasie devant la complexité de l’édition à venir. À chaque fois, les organisateurs s’efforcent de proposer des épreuves encore plus ­difficiles. Cette année, ils n’ont clairement pas failli à la tâche : contrairement aux éditions précédentes, les manifestes ­seront collés sur les paquets. Les manifestes spécifient les points d’enlèvement ou de livraison. G ­ énéralement, les concurTHE RED BULLETIN

rents peuvent ranger ces documents dans leur sac ou leur poche. Car il est bien plus difficile de les lire sur des paquets encombrants. Le parcours de Milwaukee comporte des collines escarpées où la vitesse devient quasi incontrôlable, mais aussi des virages serrés afin de rappeler le terrain de jeu des coursiers dans les grandes villes. Ces gens aiment tout simplement vivre sur le fil du rasoir. En ce qui concerne la compétition, c’est aussi là-dessus que les cyclistes se font souvent disqualifier : ils atteignent de telles vitesses qu’ils perdent leurs paquets en route. Et si vous perdez un paquet, c’est fini. Cette année, les coursiers ont également besoin d’un outil dont ils se servent très souvent : leur smartphone. Une fois qu’un manifeste a été complété, les concurrents doivent l’envoyer aux juges par e-mail. Ce petit changement marque la fin de la journée pour Nico : en oubliant d’envoyer un manifeste aux juges par e-mail avant de s’en débarrasser, il se fait disqualifier. Il affiche une mine dépitée après la course, mais les résultats lui importent peu au final. Nico s’est porté volontaire pour présenter un dossier de candidature

au nom des coursiers de la ville de Pueblo (Mexique) en vue d’accueillir l’édition NACCC 2019. Les villes se disputent ­l’organisation de l’événement deux ans à l’avance. Ce processus est essentiel pour maintenir la tradition. Sans la mise en concurrence des villes organisatrices, les cyclistes ont le sentiment que l’enthousiasme pour leur sport et leur communauté pourrait en pâtir. Nico se d ­ irige vers une allée adjacente, s’assied sur une marche, enfouit son visage dans ses mains, parle avec animation au téléphone. Les coursiers de Pueblo sont ­incapables de se mettre d’accord sur une proposition. Et la ville de Savannah, en Géorgie, est seule en lice. Nico DeportagoCabrera revient en quatrième vitesse sur la ligne d’arrivée, où tous les coursiers sont rassemblés. Plusieurs concurrentes dansent sur le titre Die Young de Ke$ha. Il met la pression aux gars d’Indianapolis afin qu’ils fassent une proposition de dernière minute pour 2019. Ils sont partants. Nico peut respirer. « C’est facile de se laisser déborder par les impôts, le prêt de la maison, le décès d’un proche ou une dispute conjugale, ­explique-t-il. Mais il faut dépasser tout ça. Il m’est arrivé que tout parte en vrille ­pendant une course. Certaines étaient longues de 320 km… Mais on continue à pédaler, pas le choix. Et puis à l’arrivée, ce n’est que du bonheur. »   51


LE HÉROS, C’EST LE GROUPE L’Islande est fascinante : située tout près du Groenland, cette île peuplée d’elfes et de trolls abrite aussi une population pour laquelle courage et altruisme ne sont pas de vains mots. Leur plus belle illustration ? Les sauveteurs bénévoles locaux. Récit d’une journée en mer. Texte NORA O’DONNELL Photos JONAS BENDIKSEN

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Les sauveteurs-­ secouristes bénévoles ­d’Islande en plein exercice de sauvetage dans l’Atlantique nord glacé.


Les membres de la station ICE-SAR de Selfoss arrivent avec tout leur équipement.

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ur la pointe sudouest de l’île, à quelques ­encablures de Reykjavík, les promeneurs ­observent une drôle d’embarcation qui, au large de la côte, semble en difficulté. Lancé à grande vitesse, le bateau louvoie entre les vagues, puis se couche au travers du courant avant de virer de bord brusquement. Je me trouve à l’intérieur de ce ­bateau, agrippée à mon siège comme si ma vie en dépendait, pendant que, devant moi, mes deux coéquipiers ­islandais s’amusent comme des fous, les mains sur le gouvernail. J’ai l’impression d’être en plein bizutage ­marin ! Tentant de les amadouer avec humour, je les interpelle : « Vous allez me faire vomir ! » Tressautement d’épaules, qui laisse deviner un ricanement. Il faut dire qu’aujourd’hui, mes deux lascars sont en mal de houle : en cette journée grise et

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froide d ­ ’octobre, la mer est relativement calme, et l’équipage du navireécole des sauveteurs islandais doit compenser cette absence de difficultés par une conduite plus hasardeuse, histoire de simuler les conditions dans lesquelles la plupart des sauvetages en mer sont opérés. Car l’Islande n’est pas un pays de plaisance. Ici, la nature est brute et sauvage, et l’on comprend pourquoi les Islandais ont donné vie à cette Terre de feu et de glace en la peuplant d’êtres étranges et fantomatiques. Des dizaines de volcans actifs, des rivières tumultueuses, des glaciers parsemés de crevasses et de geysers, des falaises abruptes fouettées par les vagues — chaque recoin de l’île représente une source d’émerveillement pour les yeux et les sens, mais aussi un danger potentiel. Les accidents sont d’ailleurs de plus en plus fréquents depuis que ­l’Islande est devenue une destination touristique incontournable (plus de deux millions de touristes par an pour moins d’un demi-million

­ ’habitants). Or, cette île tout près d du cercle arctique, géographiquement plus proche du continent américain mais culturellement et historiquement rattachée à l’Europe, ne compte aucune armée de métier et encore moins de secouristes professionnels. C’est donc à l’Association des ­Sauveteurs Bénévoles que revient la lourde tâche de porter secours aux habitants et (surtout) aux touristes surpris par une avalanche, égarés dans le blizzard, perdus en mer ou tombés des falaises. Sans compter les opérations de sauvetage en mer des bateaux-­pêcheurs pris en difficulté. La « Icelandic Association for Search and Rescue », communément appelée ICE-SAR, est composée de presque 4 000 bénévoles, formant une petite centaine d’équipes réparties sur tout le territoire. La ICE-SAR, fondée en 1928 et qui, pour la seule année 2017, a lancé plus d’un millier d’opérations de sauvetage en mer et sur terre, ne touche aucun denier de l’État : elle est exclusivement THE RED BULLETIN


« C’est rafraîchissant ! », lance un des membres de la ICE-SAR.

L’eau frôle les 3 °C. Un sauveteur bénévole se jette dans la rivière Tungufljót.


Magnús ­Sigurdsson sécurise son frère Elias alors que ses collègues s’extraient d’une crevasse sur le glacier Sólheimajökull.

Les sauveteurs de Selfoss partent en mission 40 à 50 fois par an. 56

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f­ inancée par des dons du public et par la vente de produits dérivés (porte-clés et feux d’artifices). Un financement certes aléatoire, mais qui tient compte de la générosité islandaise, tant la reconnaissance des insulaires pour ces preux chevaliers est grande. « Notre équipe a vendu pour presque 5 800 euros de porte-clés, cette ­année », nous raconte ­Heimir ­Haraldsson (photo ci-contre, à droite), le patron d’une ­petite station près de Reykjavík et qui a aujourd’hui pour tâche de coordonner l’exercice de sauvetage en mer. À 41 ans, cet ingénieur de la ­Marine est le vétéran de l’équipe. ­Élevé au milieu des dockers et des marins dans un petit village de ­pêcheurs, il a toujours connu et respecté la rudesse de la mer. « Là d’où je viens, tout le monde bosse dans le poisson, me crie-t-il pour couvrir les bruits du moteur. C’est pas comme ceux de la capitale, ceux qui vendent du thé et des glaces, tu vois ? »

A

dolescent, Haraldsson rejoint la section jeunesse de la ICE-SAR, qu’il décrit comme une sorte de camp scout, mais en plus rude. « C’est ce qui fait la force de l’association. Dès 14 ans, tu peux rejoindre les équipes de sauvetage et t’entraîner avec eux. » Un système d’intégration exemplaire : les nouvelles recrues ne manquent pas, et la relève est ainsi toujours assurée. C’est ce que je me dis en regardant les sept autres bénévoles qui s’activent en face de moi et qui ne doivent guère avoir plus de 25 ans pour la plupart. Pour la moitié d’entre eux, cette sortie fait d’ailleurs partie de leur formation de sauveteur-secouriste en mer et sur terre : au-delà des dix-huit mois qui sont obligatoires pour opérer sur le terrain, il leur sera ensuite possible de se spécialiser. « Je n’ai pas encore choisi mon équipe, je suis nouvelle ! » avoue ­Dagbjört Jónsdóttir, seule femme à bord. La jeune architecte de 31 ans en est à sa deuxième sortie « pratique » en mer. Autour d’elle, ça discute ferme. On interroge à la ronde : qui va jouer le rôle de la victime ­désemparée tombée à l’eau ? On lui demande si ça lui plairait : la réponse est un « ouais... » un peu trop évasif pour être franc.

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Heimir Haraldsson, 41 ans, chef d’équipe de la section navigation ICE-SAR, près de Reykjavík.

On la comprend : la température de l’eau dépasse à peine les 4 °C, ce qui la rapproche plus de la glace fondue qu’autre chose. Sans combinaison étanche, impossible de survivre là-dedans plus d’une dizaine de minutes. Ces conditions extrêmes, les Islandais, et a fortiori ceux qui se trouvent avec moi à bord, les connaissent par cœur. C’est d’ailleurs ce qui a forgé leur réputation de vikings intrépides, dont la devise pourrait être : « Froid, moi ? Jamais ! » « Bah, tant qu’on a les bons vêtements, tout va bien ! », nous confirme Dagbjört. Elle-même adore le VTT, qu’elle pratique par tous les temps. La plupart de ses collègues pratiquent aussi un sport extrême : surf en eaux froides, escalade sur glace, tout est bon, pourvu que ça bouge. Entre-temps, on a choisi la victime du jour : c’est Daniel Ágústsson, jeune étudiant en photographie âgé de 20 ans qui jouera le rôle du pêcheur tombé dans l’eau. Sans broncher, le grand gaillard, qui porte la même combinaison orange que ses coéquipiers, se jette à l’eau pendant que les autres essaient de le repêcher à tour de rôle. En mer, les équipes de la ICE-SAR travaillent avec les gardes-côtes et leurs hélicoptères. Mais le rôle des premiers reste crucial, tant les interventions d’hélitreuillage sont ­aléatoires. Heimir Haraldsson le

confirme : « L’hélico peut tomber en panne ou être incapable d’effectuer une manœuvre. Bref, il y a toujours une marge incertaine, d’où l’importance de se fier aux hommes et aux femmes sur place. » Et notre jeune architecte de renchérir : « Il y a toujours un moyen d’apporter son aide. Ce sont souvent les sauveteurs les plus expérimentés qui sont envoyés en première ligne, mais tout le monde a sa place. Ceux qui restent à la station sont là pour accueillir et réconforter leurs collègues après une mission, leur apporter un soutien psychologique. » Les missions de la Search and ­Rescue Team ne concernent d’ailleurs pas seulement des opérations de sauvetage, mais aussi les campagnes de recherche. Ainsi, lorsqu’un soir de janvier 2017, la jeune Birna ­Brjánsdóttir est portée disparue, les autorités organisent la plus grande campagne de recherche de l’histoire du pays. Plus de 700 sauveteurs ­bénévoles se mettent à quadriller un périmètre de presque 7 000 km². Au bout d’une semaine, le 22 janvier, son corps est retrouvé sur une plage à 35 kilomètres au sud-est de ­Reykjavík. Neuf mois plus tard, un marin du Groenland est inculpé du meurtre de la jeune fille de 20 ans. Un cas d’homicide heureusement rare, dans ce pays qui affiche l’un des taux de criminalité les plus bas de la planète.   57


« En observant certains touristes, je me dis que le bon sens n’est pas partagé par tous. »


Mais il faut bien le reconnaître, la plupart du temps, ce sont des touristes inconscients que les bons ­Samaritains de la ICE-SAR sont amenés à secourir. Comme ces quatre jeunes Anglais qui ont fait la une des journaux en 2015 parce que leur ­périple à ski à travers l’Islande avait nécessité pas moins de trois interventions en urgence. Ou cet homme tombé dans les impressionnantes chutes d’eau de Gullfoss. La liste des incidents s’allonge chaque année. « Quand j’observe certains touristes, je me dis que le bon sens n’est pas partagé par tous, plaisante Ágúst Kjartansson, chef de station et instructeur au sein de la ICE-SAR. Le problème, c’est qu’on n’a pas les mêmes repères : nos routes nationales peuvent ressembler à de petites routes de campagne aux yeux de ­certains touristes. » C’est sans doute pour cette raison que l’année dernière, un visiteur imprudent s’est planté au beau milieu d’une route pour admirer les aurores boréales. Il faisait nuit noire. Une voiture l’a ­percuté, le tuant sur le coup. ­Kjartansson ajoute, à l’adresse des ­futurs visiteurs : « Réfléchissez bien avant de faire quelque chose, et s’il y a le moindre risque, ne le faites pas ! »

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Dagbjört Jónsdóttir et Stefán Reynisson ­s’accrochent au canot qui fend les eaux de l’océan Atlantique nord.

e lendemain, je rejoins ­Kjartansson et d’autres ­sauveteurs à la station de Selfoss. Nous nous rendons au bord de la rivière de Tungufljót, au sud de l’île. Le jeune chef d’équipe de 28 ans veut y effectuer un exercice pratique de sauvetage en eaux vives, ce que peu d’équipes savent encore faire. La rivière qui gronde à nos pieds n’invite pas vraiment pas à la baignade : rapides de classe III, violents tourbillons, rochers pointus crevant la surface... Tout cela passerait encore s’il n’y avait la température de l’eau : moins de 4 °C, encore plus froid que la veille ! « C’est sûr que ça vous réveille, nous crie Magnús Sigurdsson, un autre instructeur, dont la voix essaie de couvrir le bruit du torrent. C’est rafraîchissant ! » Un de ses collègues se marre : « Ce n’est pas un endroit pour les gens normaux, ça ! » « Oui, mais on n’est pas des gens normaux ! » plaisante un autre. Serré dans sa combinaison orange, Ágúst Kjartansson se prépare   59


« Chez nous, les héros solitaires n’existent pas. » Ágúst Kjartansson, chef de la station de Selfoss et instructeur ICE-SAR, en pleine démonstration de sauvetage.

à l’exercice. Avec sa longue barbe brune et son physique trapu mais très athlétique, on l’imagine tout à fait en héros d’une saga viking, tirant un drakkar du XIIIe siècle à la seule force de ses bras. Une fois rentré dans l’eau glaciale, Kjartansson essaie de remonter les rapides en s’aidant des poches d’eau creusées dans la roche. Il parvient à atteindre ses coéquipiers, qui l’attrapent fermement pour le tirer hors de l’eau. Puis c’est au tour des autres d’effectuer l’exercice, plusieurs fois d’affilé. L’ambiance est sereine, on n’entend aucune plainte. Tout de même, à la fin de la journée, alors que tout le monde range son matériel, un des gars s’éloigne discrètement pour aller vomir (d’épuisement). Là encore, aucune remarque de ses camarades. En les interrogeant sur la raison principale qui les pousse 60

à devenir sauveteurs bénévoles, tous me diront la même chose : le sentiment d’appartenir à une grande famille. Et la grande famille islandaise, ce n’est pas un mythe : c’est ce que je ­remarque un plus tard alors que nous sommes attablés ensemble. Ils me racontent qu’en Islande, tout le monde a un ou plusieurs ancêtres en commun. Ce qui, sur une île qui est restée coupée du monde pendant si longtemps et compte à peine 330 000 habitants, est finalement assez logique. Les ­Islandais ont même une application spéciale « anti-inceste » (une sorte de Bottin intelligent), qui te permet de vérifier si la personne de ton choix n’a pas un bagage génétique trop proche du tien avant de passer à l’acte. Son slogan ? Imparable ! « Saute sur l’appli avant de sauter dans le lit ! »

Ce sentiment d’appartenance prend tout son sens en cas de gros problèmes : pour les Islandais, rien de plus normal que de s’entraider, comme les membres d’une petite communauté le ferait pour sauver un des leurs. Après le repas, les frères Magnús et Elias Sigurdsson partent vers le glacier de Sólheimajökull pour un exercice de sauvetage en crevasse. Comme beaucoup de leurs collègues, ils ont déjà une bonne expérience des techniques de sauvetage en haute montagne. Depuis deux ans, le glacier est accessible directement par la route, ce qui a conduit à un nombre toujours plus important de touristes, et donc d’accidents potentiels. Regroupés au bord d’une crevasse, Magnús et Elias se laissent glisser le long d’une corde. Une fois tout en bas, Magnús attrape son THE RED BULLETIN


frère, qui joue le rôle de la victime, l’attache au harnais de sécurité et donne le signal aux collègues restés en haut de les remonter tous les deux. Visiblement, l’exercice plaît ­tellement à tout ce petit monde que notre photographe doit gentiment les rappeler à l’ordre et les sommer de rester sérieux pour la photo. En moyenne, les bénévoles de la station de Selfoss prennent part à une petite cinquantaine de missions par an. S’ils sont appelés lorsqu’ils sont sur leur lieu de travail, pas de problème : leurs employeurs se montrent très compréhensifs. Il faut dire qu’en Islande, les sauveteurs de la ICE-SAR jouissent d’un grand ­respect, surtout quand on connaît les conditions extrêmes dans lesquelles ils opèrent.

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ne histoire parmi tant d’autres : le 26 décembre 2015 à une heure du matin, l’équipe de Selfoss reçoit un appel d’urgence : un homme qui vient de perdre son travail s’est jeté dans une rivière toute proche. Elias, Magnús et ­Kjartansson se mettent en route avec d’autres collègues. Dehors, le thermomètre affiche − 12 °C. Toutes les forces de la région sur le coup : ­policiers, pompiers, gardes-côtes... Durant 48 heures, nos trois hommes fouilleront sans relâche les zones de

Casque, gilet, cordes, harnais : les bénévoles préservent leur matos, toujours à portée de main.

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la rivière qui ne sont pas complètement gelées, notamment autour des conduits d’évacuation. Assis dans un café près de l’hôpital universitaire, où il travaille comme programmateur, Kjartansson se remémore cette nuit glaciale avec beaucoup d’amertume. « Ce n’était vraiment pas marrant. On naviguait sur la rivière et les éclaboussures gelaient instantanément sur nos combinaisons. Il faisait nuit noire, on ne distinguait rien, même avec nos frontales et des lampes-torches. » L’homme ne fut ­jamais retrouvé. En entendant cette histoire, je ­demande à Kjartansson s’il lui arrive parfois de regretter sa décision, compte tenu du fait que les bénévoles ne reçoivent aucun salaire pour leurs missions. La réponse fuse, catégorique. « Non ! On aide parce qu’on peut le faire, et parce qu’on est prêt à le faire. Quand je pars en mission, j’oublie tout le reste, pour être le plus efficace possible. Parfois, c’est dur émotionnellement parlant, surtout quand la fatigue gagne, mais ça fait partie du lot. » Et la petite décharge d’adrénaline qu’on ressent quand on vient de sauver la vie d’une personne ? Kjartansson se rappelle alors un incident survenu il y a quelques semaines : lui et son équipe étaient réunis à la station, lorsqu’ils ont été appelés en mission, pour un type qui avait sauté d’un pont. Tout est allé très vite. « On a lancé le canot sur la rivière, et on est partis chercher le gars. Quand on l’a aperçu, j’ai sauté dans l’eau pour lui ouvrir les voies respiratoires. » Neuf minutes à peine se sont écoulées depuis le coup de fil : les hommes de Selfoss ramènent alors la victime sur la berge, où il reçoit les premiers soins. Peu de temps après, les gardes-côtes arrivent en hélicoptère et évacuent l’homme vers l’hôpital le plus proche. Cette anecdote pourrait le gonfler de fierté, mais pour Kjartansson, hors de question de pavoiser. « ­Jamais je n’y serais arrivé tout seul : je ne suis qu’un maillon de la chaîne. Tout s’est bien passé parce que chacun d’entre nous a su jouer son rôle : mettre le canot à l’eau, procurer les premiers secours, préparer l’intervention des gardes-côtes... Chez nous, les héros solitaires n’existent pas. Le héros, c’est le groupe. »

icesar.com   61


Énergie négative : peur et regrets n’effraient pas Elan Gale, 34 ans.

Accepte tes limites… Tu es bon. Tu n’es pas une merde. Mais tu n’es pas si génial que ça. » ELAN GALE

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TA K E F I V E

Le producteur ELAN GALE fait…

… L’ÉLOGE DE LA PENSÉE ­NÉGATIVE

Créateur du show TV américain The Bachelor, il p ­ artage la ­sagesse de son livre, You’re Not That Great, et ­parodie les guides de développement personnel.

1 La positivité est une maladie

Dans mon boulot, je parle avec beaucoup de gens, et j’ai remarqué que plus quelqu’un me raconte à quel point il se débrouille bien, plus il est mauvais en réalité. Alors que ceux qui travaillent dur tendent à être bourrés de doutes. La positivité est comme un hamac géant dont il est impossible de sortir. Elle rend complaisant. Tu pourrais me dire : « Quel mal y-at-il à être heureux ? » Ne mélange pas tout ! La positivité n’est qu’un raccourci vers le bonheur. Donc au lieu de choisir d’être positif, tu dois être autocritique et travailler sur toi afin d’être réellement heureux.

en force grâce à 2 Tuceuxgagnes qui doutent de toi

Tu te rappelles lorsque tu rentrais à la maison avec un dessin ? Tes parents t’ont sûrement applaudi et fixé ton gribouillis au frigo au lieu de le brûler. Soyons clairs, ce sont eux qui ont fait de toi le monstre égocentrique que tu es aujourd’hui. Tu veux être loué pour qui tu es déjà, et tu ne te soucies pas de savoir si les compliments sont sincères. La chose la plus inspirante qui me soit jamais arrivée a été lorsque mon père a déclaré que je ne serai pas capable de trouver du boulot dans le divertissement. Pendant des mois, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit et j’ai fait tout ce que j’ai pu pour lui prouver qu’il avait tort.

3 Tire parti de tes regrets

Oui, le regret, cette chose que tout le monde te dit de ne pas avoir, est probablement ton outil le plus vital. Si tu n’as pas de regrets, tu ne penses pas avoir fait d’erreurs. Et si tu ne fais pas d’erreurs, tu ne peux pas corriger ton comportement. THE RED BULLETIN

C’est un sujet récurrent dans ma carrière. Je travaille à plusieurs projets en même temps afin d’avoir toujours à me réinvestir émotionnellement. Je fais ça car j’étais un enfant paresseux, et je n’ai pas fini mes études, ce que je regrette terriblement. C’est le principal moteur de ma vie.

pas peur de toucher le 4 N’aie fond

Mon ami James Gunn (réalisateur des films Les Gardiens de la Galaxie, ndlr) m’a dit un jour que l’émotion la plus importante pour son succès pro était le désespoir. C’est comme trouver une issue dans une situation où tu n’as pas d’options. Le désespoir s’accompagne de peur, et la peur est un motivateur extraordinaire. Il ne m’est jamais arrivé de ne pas ressentir de peur à l’approche d’une échéance. Or une échéance est littéralement la fin de tes possibilités de faire des choix, ce qui permet de puiser à fond dans son potentiel créatif.

5 Tu n’es pas si génial que ça

Tu es convaincu qu’il est important de t’aimer toi-même ? Et que l’amourpropre est source de confiance en soi ? C’est faux. Accepte et admets tes limites. Ne te préoccupe pas de te sentir bien, sois bien ! Malgré tout le renforcement positif dont tu as profité dans ta vie, je suis sûr qu’il y a une petite voix au fond qui sait que tu ne t’aimes pas tant que ça. Enfin, tu es bon. Tu n’es pas une merde. Mais tu n’es pas si génial que ça.

twitter.com/theyearofelan Entretien FLORIAN OBKIRCHER Photo CATIE LAFFOON   63


Maître historique du son électro-pop, ­Depeche Mode n’est jamais à la masse.


Plus le temps de se dépêcher ANTON CORBIJN

Quelques années se sont écoulées depuis le moment où le chanteur Dave Gahan aurait pu mener DEPECHE MODE au bord du gouffre suite à ses problèmes de drogue. Mais le groupe a su s’adapter. À quelques semaines de se produire en France, ses leaders racontent ce qu’ils ont abandonné en cours de route, notamment la nostalgie des succès passés et un style de vie débridé, dont il leur a fallu se détacher pour rester frais. Texte BENJAMÍN ACOSTA

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S

’il y a quelque chose qui caractérise Depeche Mode, c’est sa capacité à rester d’actualité et à ­louvoyer entre heures sombres et moments de gloire. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si son dernier album s’appelle Spirit. Le quatorzième depuis Speak and Spell sorti en 1981, avec lequel ils se lancent tête la première dans le chaos et l’agonie auxquels l’humanité doit faire face de plusieurs fronts. Les Anglais précisent qu’ils mettent l’accent sur le ressenti « ici et maintenant » – aussi bien dans le domaine collectif qu’au niveau personnel – pour renouveler leurs idées. Pour eux, « il ne s’agit pas seulement de se pencher sur les nouvelles technologies des équipements et techniques d’enregistrement audio et vidéo. Il s’agit de ressentir intensément le présent, de vivre chaque minute de telle manière qu’on reste axé sur soimême. Cela implique aussi de rester sensibles à ce qui nous arrive en tant qu’êtres humains », observe Martin Gore. Le claviériste et chanteur est également le compositeur principal d’un groupe qui a réussi à vendre pas moins de 120 millions de disques au cours de sa trajectoire. Tout a commencé comme une simple diversion en compagnie de ses amis Dave Gahan et Andrew Fletcher, alors âgés d’une vingtaine d’années, à ­Basildon (Angleterre). Naturellement, personne n’imaginait à ce moment-là qu’ils deviendraient un groupe de musique électro aussi important. « Quand tu es dans le monde de l’art, tu te trouves au milieu de forces qui t’attirent d’une façon très puissante. Ce n’est pas quelque chose d’exclusif à la musique, car il s’agit de créativité, de générer quelque chose reposant sur ce que tu crois et sens toi-même. Certaines fois, cela peut être douloureux, et d’autres fois particulièrement plaisant parce que tu partages aussi bien des peines que des joies. Et paradoxalement, le côté sombre offre une source d’inspiration intéressante. D’où

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l’équilibre à trouver pour ­rester à flot, souligne Gahan, le chanteur du groupe qui est aussi « danseur par nature », comme l’a souligné Fletcher à plusieurs reprises. « C’est une question mentale constante, parallèle au fait de garder la forme physique, poursuit l’artiste né en 1962. Tout cela peut être revêtu de ce que l’on connaît sous le nom de célébrité, qui n’est autre chose qu’un phénomène médiatique. Et cet élément peut te détruire s’il te fait croire que tu as tout réussi. Avec le public, c’est différent car il reste attentif à ce que tu fais en termes musicaux, au-delà des questions personnelles. Tomber dans l’erreur de se sentir célèbre peut finir par intimider et ces peurs entraînent un déséquilibre, un blocage fulminant. » Lorsque Depeche Mode commençait à émerger grâce à ses chansons entraînantes exclusivement créées avec des synthétiseurs et des boîtes à rythmes, plus d’une multinationale a voulu les produire. Mais le groupe a préféré rejoindre le label indépendant Mute Records pour se démarquer de toute orientation commerciale et suivre les règles du jeu qu’il s’était lui-même fixées. « Dans les années quatrevingt, il y avait une grande pression pour passer à la radio. On a joué les rebelles parce qu’on voulait surtout continuer à s’amuser sans la prétention d’écrire des chansons qui auraient eu l’obligation de devenir des tubes », déclare Gore en référence à Black Celebration (1986), un disque très personnel et, d’une certaine manière, incompris, tout comme l’album suivant, Music for the Masses (1987), grâce auxquels ils se sont fait connaître en dehors du Royaume-Uni. Poussés par cette inertie naturelle, ils ont continué jusqu’à la décennie suivante pour voir s’ouvrir plus de portes qu’ils n’espéraient lorsqu’ils ont sorti Violator (1990), un opus qui comprend les désormais cultes Personal Jesus et Enjoy the Silence. C’est à ce moment-là que la reconnaissance mondiale leur tombe dessus par surprise. S’ensuit une période de hauts et de bas liée aux dépendances de son

Depuis sa naissance en 1980, le groupe a su rester attractif et actuel grâce à sa c­ apacité à évoluer et à se surpasser.

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« Le moment où tu t’accroches au succès peut te conduire à une situation extrême. » Dave Gahan

GETTY IMAGES

l­ eader, qu’il finit par surmonter. On connaît la suite, jusqu’à ce que le groupe ­parvienne à la stabilité sans laquelle il n’aurait pu continuer à se réinventer du point de vue musical et à faire des tournées marathoniennes. the red bulletin : Où réside la motivation pour continuer à faire de la ­musique  ? THE RED BULLETIN

martin gore : Pour moi, elle consiste en une série d’envies et de besoins. Comme le dit le proverbe, « ta biographie est ta biologie », je suis d’avis que faire des chansons implique un désir que rien n’éclipse. Voire plus, il se maintient à ­partir de ce que l’on recherche et met en jeu pour se sentir bien. Dans notre cas, on pourrait dire que notre biographie est notre discographie. Même si nous n’avons pas vécu à la lettre tout ce dont nous ­parlons dans nos chansons, il s’agit toutefois d’expériences proches. En fin de compte, ce sont des sujets qui nous touchent et, en même temps, qui nous provoquent.   67


dave gahan : C’est curieux aussi quand on pense que c’est quelque chose de proche au fait de partager ce qu’on est, ce qu’on pense, ce qu’on ressent. Une ­opinion personnelle est un acte égoïste, mais dans l’art, cet égoïsme apparent se dédouble pour devenir autre chose. La musique nous a aidé à réfléchir sur nousmêmes, sur ce qui nous entoure, le monde où nous vivons et une évolution étrange

qui présente de nouvelles formes de coexistence. Elle se transforme aussi en une invitation à une réflexion collective et, en même temps, une interprétation personnelle. C’est un exercice dans lequel nous voulons aussi que le rythme et la mélodie ne cessent de nous surprendre. Nous cherchons un discours esthétique qui repose sur la forme interprétative et sur le fond du message. Il n’y a pas seule-

« Il n’y avait pas cette envie de devenir célèbres. Nous avons pris les choses naturellement, guidés par la curiosité. » Dave Gahan

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ment quelque chose à dire, il y a aussi une façon de le faire qui nous attire et que nous considérons comme un élément qui nous identifie. La créativité fonctionne mieux sans limites, mais la vie ne fonctionne pas nécessairement ainsi… dave : Les limites sont nécessaires d’une manière ou d’une autre. Je crois que même le processus de création a besoin de discipline. La différence, c’est que c’est à nous de délimiter cet espace. La liberté est très importante pour créer, mais en même temps, on a une chanson à terminer, un disque à produire, une tournée à faire… Il y a eu des moments d’éparpillement et de manque de concentration qui nous ont donné de grandes leçons, mais maintenant, on sait tous comment fonc-

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tionnent le mieux les choses pour parvenir au résultat qu’on souhaite vraiment. martin : Les années quatre-vingt-dix ont été agitées précisément parce que des ­situations nouvelles que nous n’avons pas su comment gérer en totalité se sont présentées. Le contrôle d’un groupe requiert un consensus dans tous les domaines. Il ne suffit pas d’être d’accord sur l’esthétique sonore, il y a de nombreux autres éléments derrière qui sont très délicats, à commencer par l’état émotionnel de chacun d’entre nous. C’est là que se trouvent, à mon avis, les limites les plus importantes qu’il faut conserver pour continuer en tant qu’équipe. Considérez-vous que, à l’époque, le groupe se soit laissé entraîner par la précipitation ?

Depeche Mode sera en concert en France cet été, notamment au festival breton des Vieilles Charrues.

dave : Si je compare la façon dont je vois la vie aujourd’hui et celle dont je la ressentais il y a quelques années, il y a une énorme différence. Avant, je vivais comme le font la plupart des gens à l’heure actuelle, dans la précipitation. Cela ne veut pas dire que, maintenant, je perds tout avec un calme olympien, mais simplement je comprends que le fait de tenter de vivre à cent à l’heure, dans le stress permanent et toutes ces conneries n’a pas de sens. On nous vend l’idée de tout consommer, de maintenir une vitesse infernale pour être constamment à jour et ne pas rester en marge. En marge de quoi ? Simplement en marge de nous-mêmes, et c’est là la gravité de la question. C’est quand tu te rends compte qu’il est impossible de remplir le vide intérieur dans une course obsessionnelle à la consommation qu’apparaît l’occasion de penser un peu mieux aux choses.
 Est-ce qu’il a été difficile de trouver la voie pour parvenir à rester en forme dans tous les aspects ? dave : Le temps apporte des réponses dans la mesure où l’on reconnaît les ­succès et les échecs. Les victoires peuvent être dangereuses si elles sont surestimées et les chutes très précieuses si elles sont ramenées à leur juste dimension. Je ne sais pas si cela a réellement été difficile en termes généraux parce que, ce qui est intéressant en fin de compte, c’est la ­façon dont on perçoit le présent. Il est ­indéniable que la vie peut se simplifier si on se concentre sur ce qui en vaut ­réellement la peine. Le moment où tu t’accroches au succès peut te mener à une situation extrême. Le « succès » est ­relatif et personnel, mais il est souvent ­associé aux paramètres d’un statut qui peut fausser l’image de ce que nous sommes vraiment. Le concept de rockstar est très dangereux quand le style de vie frôle les limites des excès. Il n’existe pas un manuel pour savoir comment gérer la situation, seulement des alertes en cours de route.

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Laisser tout cela derrière soi fait partie du renouvellement constant auquel le groupe est parvenu… martin : Je suppose que cela fait partie du processus naturel de la vie. Quand on dit que la seule chose qui est sûre dans la vie, c’est la mort, on pourrait aussi penser que ce qui est sûr, c’est l’intention de se renouveler comme élément d’un processus inévitable. Le fait de vieillir a ses bons côtés : cela permet de se réinventer, d’appréhender mieux les choses et de ­profiter ainsi de ce que l’on a. THE RED BULLETIN

Vous avez dit à plusieurs reprises que, au début, votre groupe n’était pas un projet ambitieux… martin : Je n’aime pas le terme « ambition ». Il ne mène pas à quelque chose de positif. En réalité, nous avions un rêve comme n’importe quelle entreprise que tu fondes avec des amis. Les attentes étaient presque inexistantes. dave : Je crois qu’il n’y avait pas cette envie de devenir célèbres ou quelque chose de ce style. Nous avons pris les choses d’une façon naturelle, guidés par la curiosité. Lorsque cette curiosité a pris une forme plus intense, elle est devenue l’un de nos principaux moteurs. De plus, dans ces moments-là, la naïveté évite de sentir une certaine forme de frustration. Au contraire, tout n’est que surprise. Et la surprise fut de taille : un succès planétaire. Comment avez-vous réussi à vous défaire des gloires passées ? martin : Je le vois comme ce coin de notre maison où on conserve quelques reconnaissances. Ces médailles, elles font partie du passé. Lorsque l’on compose un album comme Spirit, on cherche inconsciemment à éviter de se répéter. D’ailleurs, on aime bien donner un nouveau souffle à nos vieux classiques quand on les interprète en direct. Il faut se moderniser de multiples façons pour éviter de piétiner dans le domaine créatif. On aime bien ces espaces entre disques et tournées où il n’y a rien d’autre que nos vies personnelles. On déconnecte les uns des autres pour se reconnecter ensuite, comme si on repartait presque de zéro. Ces laps de silence intensifient les rencontres et structurent la nouvelle plateforme de lancement. Comment équilibrer la balance quand vous n’êtes pas en tournée ? dave : Quand on termine une tournée, le vide que produit l’absence de public est intense. L’énergie qu’on reçoit en tant qu’artiste est unique. C’est un véritable privilège de pouvoir vivre ces instants. Au début, j’avais du mal à m’habituer mais maintenant c’est différent. L’atmosphère familiale aide non seulement à le compenser mais, en outre, elle contribue à ce bilan nécessaire pour passer à une nouvelle étape. Cette diversification d’ambiances, de réalités et de cohabitations est indispensable. Je ressens un énorme plaisir lorsque je suis sur scène et que je vois que les gens sont contents. C’est comme si je faisais une sélection des meilleures sensations pour les rapporter chez moi, comme le souvenir le plus précieux.

depechemode.com   69


Awolnation se produit live au studio Supersense, antre viennois des délices techniques surannés.

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#sansfiltre

AWOLNATION place l’authenticité un cran au-dessus de la perfection. Voilà pourquoi les stars de Sail ont saisi l’opportunité de produire un disque à enregistrement direct, en une unique prise. Entretien ALEX LISETZ  Photos JORK WEISMANN


qui transparaît dans sa voix. « L’important pour lui, ce n’était pas que chaque note soit parfaitement posée ni jouée, au contraire. » Plus tard, avec Awolnation, il arrache dans la douleur des textes pétris de sincérité du plus profond de ses tripes, « car je voulais toucher mes fans comme mes idoles me touchaient ». Mais jusqu’où Aaron Bruno pourrait-il réellement aller dans sa quête du vrai ? Plus que deux jours avant l’heure de vérité.

SAPHIR ET ACÉTATE

Des instants d’éternité dans un ­studio hors du temps.

A

aron Bruno, frontman et chanteur du groupe de rock électro américain Awolnation, se tient pieds nus sur une scène minuscule et ne redoute qu’une chose : que la sonnerie d’un portable ­retentisse. Face à lui, une salle remplie de fans. En cet instant, Aaron pourrait penser aux 79 semaines pendant lesquelles son titre phare Sail caracolait au sommet des hits parades. Ou à son jogging matinal dans les collines de Malibu. Ou encore au ­regard amoureux de sa femme. Mais non. Il pense à tout ce qui pourrait aller de ­travers. Lorsque l’ingénieur du son donne le signal convenu, le guitariste à ses côtés démarre. Aaron s’empare du micro, commence à chanter. L’enjeu est grand.

EN QUÊTE DE VRAI

Deux jours plus tôt, on le retrouve au dernier étage de l’hôtel 25hours à Vienne (Autriche). Aaron est le Californien le plus anti-californien qui soit. Il n’est pas 72

fan de banalités. Mais aujourd’hui, il n’en finit plus de parler, surtout de son nouvel ­album avec Awolnation : Here Come The Runts. « Je voulais me livrer entièrement, sans fard, exactement comme je suis », souligne-t-il lors de chaque interview. Les journalistes ont l’habitude, ils hochent poliment la tête. Cette volonté de faire « un album authentique, personnel », ils l’ont entendue de la bouche de bon nombre de pop stars. À la différence près que lui est très sérieux. « Je suis à la recherche de choses vraies car autour de nous, tout est factice. Les emballages sont trompeurs. Ça vaut pour les aliments que nous consommons, pour les relations que nous entretenons, pour la musique que nous écoutons… pour tout. » Aaron Bruno a un féroce appétit d’authenticité depuis qu’il a la faculté de formuler une pensée. Ado, il est fasciné par le mouvement straight edge : s’essayer à tous les excès, sans toucher ni aux drogues, ni à l’alcool. Ce qui l’attire dans la scène punk rock, c’est cette énergie brute, hirsute et débraillée. Il admire le songwriter Jeff Buckley pour l’émotion pure

Le lendemain matin, à heure où les rockstars vont se coucher, le bus de tournée de Awolnation débarque au point de rendezvous. Ses membres s’en extraient au compte-goutte. Aaron Bruno est au ­taquet, impatient de découvrir le studio viennois dont il a déjà entendu tant de bien. Les connaisseurs sont dithyrambiques à son sujet : Supersense est un lieu incomparable, à la fois café, boutique, ­cabinet de curiosité, et surtout La Mecque du disque à enregistrement direct et autres fantaisies pour les nostalgiques. On peut notamment y réaliser des tirages Polaroid au format maximal (51×61cm) grâce au plus gros appareil photo argentique à développement instantané au monde. On peut aussi y enregistrer un disque vinyle avec du matériel d’époque, (original 1960s), certainement l’un des plus précieux et des mieux restaurés qui existent. Des artistes de renom (Kandace Springs, Gregory Porter, Die Fantastischen Vier…) ont déjà bénéficié de cette opportunité exceptionnelle. C’est LA ­raison pour laquelle Aaron Bruno a ­entrepris ce long voyage depuis L.A. Florian « Doc » Kaps, fondateur et proprio de Supersense, a fait de son local une institution dont la réputation s’est étendue d’un bout à l’autre de l’Europe. Il ­gratifie Aaron d’une formation éclair à la technique d’enregistrement analogique. « Chaque son que les micros vont capter sera transféré depuis la table de mixage directement dans cette machine à graver. » Tandis qu’il s’exprime, il tapote ­affectueusement un appareil de collection vieux de presque soixante ans, étrange dispositif à mi-chemin entre machine à ­laver et machine à remonter le temps. « Ici, en haut, un burin en saphir grave la vibration acoustique directement dans la couche de laque qui recouvre le disque d’aluminium, lequel servira de matrice. C’est ainsi qu’on fabrique un 33 tours de deux fois douze minutes. On ne peut ni THE RED BULLETIN


Au lycée, Aaron Bruno (39 ans) avait l’habitude de s’éclipser sans prendre congé, ce qui lui a valu le surnom AWOL (pour absent without official leave).

THE RED BULLETIN

« Je suis à la recherche de choses vraies car autour de nous, tout est factice. »   73


Le groupe formé en 2009 comprend aujourd’hui ­Aaron Bruno (chant), Isaac Carpenter (batterie et percus), Marc Walloch (basse et guitare rythmique), Zach Irons (guitare solo) et D ­ aniel Saslow (keyboards).

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« Nous admirons la perfection, mais c’est l’imperfection qui nous touche et nous permet d’accéder à l’émotionnel. » THE RED BULLETIN


arrêter l’enregistrement, ni le recommencer, ni rien modifier ensuite. Que tu chantes faux ou qu’un portable se mette à sonner pendant le concert, tout sera gravé. » Aaron approuve d’un signe de tête. « C’est compris, mon gars. » Il s’approche très près de la fameuse machine, fait courir ses doigts sur sa surface. Ses chansons prendront l’odeur de l’acétate, sa voix la forme d’un sillon, et son énergie se diffusera dans une couche de laque noire.

EVA MÜHLBACHER

DIMENSION ÉMOTIONNELLE

Aaron, lui demande-t-on, expliquez-nous pourquoi vous voulez à tout prix, en 2017, faire un enregistrement avec les moyens techniques de 1960 ? « La technique analogique te force à quitter ta zone de confort. Quand tu mixes un vinyle en live, tu te montres sans filtre. Il n’y a pas de place pour les ruses ou les artifices. » Mais enregistrer en analogique est plus contraignant et démodé, rétorque-t-on. « On ne devrait pas toujours choisir la ­facilité ni le chemin le plus court, nous contredit-il. Bien sûr, un enregistrement en digital a des milliers d’avantages. Mais comment établir une relation d’affect avec des données numériques ? J’ai un LP de musique de Noël très abîmé de John Denver (1943-1997, ndlr) à la maison. Ou même mon exemplaire du légendaire ­album de Dire Straits, Brothers In Arms (1985, ndlr). Il est tellement rayé qu’on ne peut quasiment plus l’écouter. Ces ­vinyles ont été de véritables compagnons de route pour moi. » Touché. Et si quelque chose allait vraiment trop de travers, vous pourriez toujours jeter la rondelle à la poubelle pour en refaire une nouvelle, pas vrai ? Ses yeux délavés s’assombrissent. « Certainement pas. Nous voulons nous montrer tels que nous sommes, même avec nos défauts. Il m’importe plus d’être sincère et authentique que parfait. » Et il nous raconte l’histoire de son tube planétaire Sail (2011) qui, après Radioactive (2012) d’Imagine ­Dragons, est la chanson à être restée le plus longtemps dans le top 100 des ­Billboard charts depuis les débuts de l’industrie musicale. « Je me suis échauffé la voix en vingt minutes, on a enregistré chaque piste en une prise. J’aimais beaucoup l’énergie sauvage qui se dégageait du morceau. » Ce n’est qu’après la sortie du single qu’il réalise que l’enregistrement est loin d’être parfait. « Certains passages chantés sont vraiment plats, et les percus ne sont pas dans le rythme du d ­ ébut à la THE RED BULLETIN

fin. » Malgré ces imperfections, Sail s’est pourtant vendu à plus de dix millions d’exemplaires. Ou peut-être grâce à elles ? « Je crois que nous admirons la perfection, mais que c’est l’imperfection qui nous touche et qui nous permet d’accéder à une dimension émotionnelle. C’est pourquoi nous devrions plus souvent nous montrer sous notre vrai jour, en faisant la lumière sur nos aspérités. »

LES NERFS À VIF

Seulement tous autant que nous sommes, nous répugnons à jouer la transparence. Voilà pourquoi deux heures avant le spectacle live, tout le monde dans le studio est nerveux. Lukas Obwaller, le responsable du mixage, reprend les étapes une par une : mettre la machine en route, placer la pointe de l’aiguille dans le sillon à g ­ raver,

Fabriquer un vinyle à la mode des sixties Les enregistrements digitaux sont devenus le procédé standard depuis deux ­générations dans l’industrie musicale, car c’est un modèle plus économique, plus e­ fficace et plus facile à retravailler. Les chansons sont mixées et remastérisées en studio après enregistrement, les données sont comprimées et numérisées, et permettent de gagner beaucoup de place au moment de les stocker. Les disques à enregistrement direct sont fabriqués à l’aide d’une machine qui va graver un sillon complexe en spirale dans la rondelle à l’aide d’une pointe en saphir (ou en diamant, plus résistant). Pendant la gravure, une buse à vide aspire le copeau découpé par le burin. Puis l’aiguille du tourne-disque traduit les ondulations du sillon dans la membrane de l’enceinte qui se met à vibrer. Le concert live de Awolnation a aussi été enregistré sur bande magnétique. Dans les jours qui suivirent, 77 disques vinyles ont été fabriqués à la main. Les commandes se font directement ici : supersense.com/mastercuts

donner le signal au groupe pour démarrer, garder un œil sur les instruments. Eric Stenman, le producteur, dispose des postit sur la table de mixage. Il a profité du soundcheck pour noter à quel moment supprimer l’écho et quand pousser quel bouton. Son plus gros souci : si le groupe déborde de même dix secondes par rapport au plan, la rondelle à graver risque de s’arrêter de tourner au milieu d’une mesure. Ce qui serait loin d’être élégant. Tous finissent par se détendre. La ­détox digitale, Awolnation connaît. Aaron Bruno a composé leur deuxième opus dans un chalet, sans connexion internet. Leur titre actuel, Passion, ils l’ont enregistré – tout comme le reste de l’album d’ailleurs – avec la guitare Gibson, un modèle original des années 1950, sur laquelle ­Aaron grattait ses premiers accords.

LA BATTERIE REND L'ÂME

À 20 h 37, Aaron fait son entrée sur la scène, murmurant à ses gars : « Tout ce qu’on a à faire, c’est nous faire plaisir. » Et voilà Aaron qui commence à gamberger. Il passe en revue tout ce à quoi il ne voulait pas penser. Les micros défectueux. Les trous de mémoire. Les intros foirées. Puis se jette à l’eau. Les accords de 7 Sticks of Dynamite r­ ésonnent. Le groupe donne tout dès le ­départ, le chanteur trouve ses marques. Le public partage son enthousiasme, seul le flow fait encore défaut. Il enchaîne avec Passion. Toutes les mains se lèvent. Aaron négocie les passages complexes avec brio. Voilà déjà douze minutes gravées à jamais. Après une pause, l’enregistrement de la deuxième face démarre. Et l’incident tant redouté a lieu pendant ­l’intro de ­Hollow Moon : la pédale de la batterie rend l’âme, alors que le saphir poursuit son incision méticuleuse, le groupe reprend depuis le début. Mais cela n’a pas d’importance. Au contraire. L’embardée ironique resserre les liens entre le groupe et son public. C’était le déclic qui manquait à Aaron. Il reprend de manière très détachée. Et continue avec Sail. La version qu’il livre, très énergique, est telle qu’on ne l’a jamais entendue avant. Et aussi très intime, au plus près de lui et de ses émotions, et du public également. L’enregistrement touche à sa fin. La pression qui pesait sur les Awolnation et sur les techniciens deux heures plus tôt semble incongrue. Il suffisait d’être s­ incère, pas parfait.

Analog in Vienna est disponible en VoD sur redbull.tv ; awolnationmusic.com   75


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guide Voir. Avoir. Faire.

Anton Sintsov lors de la Coupe du Monde UCI XCO à Lenzerheide (Suisse) le 9 juillet 2017.

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Le spectacle le plus attendu des fans de VTT revient. En plus des courses à couper le souffle, la nouvelle saison de la Coupe du Monde vous livre des surprises inédites dès le départ. Plus sur Red Bull TV.

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Voir. Schurter en route vers la victoire à Vallnord, Andorre, juillet 2017.

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Schurter suit ­Stéphane Tempier (FRA) à Val di Sole (Italie), août 2017.

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Relie le booster (source des ­stimuli) à la combinaison.

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CÂBLAGE ­I NTÉGRÉ

Le short est relié au haut via des fiches d’alimentation.

­ANTELOPE. APP

LAVAGE MAIN

Le coton est traité antibactérien, donc évitez la ­machine à laver.

Le cœur et le cerveau : source électrique des électrodes et générateur des stimuli. Batterie : jusqu’à 4 h d’autonomie.

COMBINAISON EMS, IDÉALE POUR :

Connectée au Booster via Bluetooth, une appli smartphone permet de choisir différents modes d’entraînement.

Désormais, la stimulation ­musculaire électrique se porte pour un training plus efficace.

Le concept de la combinaison à stimulation électrique est en général associé à la physiothérapie que l’on pratique suite à une blessure sportive ou à une opération. Mises sous ­tension, des électrodes collées sur la peau contractent et ­relaxent les muscles comme le fait le cerveau lorsqu’il ordonne au corps de

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CALFGUARDS

Les électrodes intégrées dans ces manchons à compression couvrent bien les muscles du ­mollet. Détente, vitesse et esthétique garanties.

Prix conseillé : 1 399 €, info.antelope.club

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KURT KEINRATH & MICHAEL ZECHANY

EN FORME AVEC LA COMBI EMS

courir par exemple. Pour produire un effet multiplicateur, la combinaison ANTELOPE. SUIT associe stimulation bioélectrique et ­stimulation électrique externe. Et comme le corps est ­capable d’apprendre, plus ­l’entraînement est régulier et intensif plus les ­muscles s’adaptent aux nouveaux stimuli. C’est là le principe de tout entraînement. Le tissu de l’ANTELOPE.SUIT intègre seize électrodes (abdomen, pectoraux, trapèze, dos, bras, quadriceps, ischios, fessiers) ­alimentées en stimuli par le booster – batterie et contrôleur – et gérées via une appli smartphone. L’entraînement est ainsi plus performant y compris pour les sportifs confirmés avec en prime un mode régénération ­anti-courbatures.

WERNER JESSNER

course, fitness, yoga



GUI D E

Avoir.

montres

ULYSSE NARDIN MARINE ­TORPILLEUR MILITARY

Nouvelle vague

Inspirée des montres à gousset des capitaines de marine du XIXe, cette ode à l’histoire met un cap audacieux vers l’avenir avec son échappement en silicium recouvert de diamant et un balancier dans sa coque. ulysse-nardin.com

Face  : classique intemporelle. Pile : en mode rétro futur.

DU SILICIUM AU CŒUR DE L’OUVRAGE Le progrès humain se mesure à la maîtrise des matériaux à travers les âges : pierre, bronze, fer. Et silicium. Ses propriétés ­ semi-conductrices et le fait qu’il puisse être transformé en cristaux purs le rendent idéal pour la fabrication des micropuces depuis les années 60. Le silicium s’adapte à des technologies antérieures à lui, et maintient ainsi l’équilibre oscillant au cœur d’une montre mécanique. Moins magnétique, plus résistant à la corrosion et aux chocs que l’acier ou le nickel et sans frottement, il ne nécessite pas de lubrification additive. De quoi tenir quelques siècles.

BAUME & MERCIER CLIFTON BAUMATIC

Le ressort de l’attention Maison fondée en 1830 par deux frères aux Bois, un village suisse proche du massif du Jura, Baume & Mercier se targue d’une bonne ­réputation quant aux mécanismes simples et fiables de ses gardetemps. La Clifton Baumatic ne fait pas exception, sauf que sa fiabilité provient d’une merveille complexe et brevetée : le spiral TwinSpir. La technologie embarquée est appelée ainsi car elle est faite de deux bobines de silicium étroitement liées selon un angle opposé, améliorant ses propriétés isothermes et élastiques, et en conservant le mouvement de l’aiguille avec précision pendant cinq jours. La prouesse est telle que l’horloger a créé un fond transparent pour pouvoir ­l’apprécier sans compter. baume-et-mercier.com

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TUDOR HERITAGE BLACK BAY CHRONO

Mélange de genres Combinant design du sport auto et de la plongée, cette montre mixe les matériaux : son boîtier en acier abrite un spiral en Silinvar, un silicium résistant à la température, co-développé par la maison mère Rolex. tudorwatch.com

ZENITH DEFY EL PRIMERO 21

Saut en avant

Cette montre en titane possède deux échappements en silicium : l’un pour l’heure, l’autre pour le chronomètre. Chaque seconde est marquée par un balayage complet, alimenté par un spiral composite de nanotubes de carbone breveté. zenith-watches.com

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DAVID GETAZ

POP IN THE CITY RAID URBAIN Féminin Prenez une ville européenne, rassemblez-y 500 femmes intrépides pour un événement pas comme les autres où les défis à relever se multiplient : vous obtiendrez Pop In the City, un raid urbain 100% féminin pas comme les autres. 8 heures de course, 30 challenges disséminées dans la ville : du sport, de l’art, de la culture, de l’extrême... Le but pour les participantes ? Réaliser un maximum de challenges en un minimum de temps. Quelques exemples de challenges ? S’élancer en tyrolienne depuis l’Atomium à Bruxelles, dévaler une piste de ski en maillot de bain et graffer une cabine de télésiège, descendre en rappel une tour médiévale de 70m à Bologne... Et même tricoter avec des femmes de marins à Lisbonne !

Infos et prochaines dates sur le raid sur : popinthecity.com

DAVID GETAZ


GUI D E

Faire. « Regardez-moi dans les yeux... » OK, lesquels !?

L’ENCRE RÈGNE

Avec le Mondial du Tatouage, Paris s’est imposée comme la capitale mondiale de cet art sur supports vivants.

Le plus grand événement de tatouage au monde

420 84

artistes tatoueurs de 40 nationalités seront ­présents, disposant chacun d’un stand personnalisé pour accueillir des candidats au tatouage qui auront pris rendez-vous à l’avance, ou qui décideront de se faire tatouer à l’instinct, sur place. Encrer au Mondial, c’est être un artiste de très grand talent, issu d’une sélection rigoureuse. L’élite mondiale vient y exercer chaque année.

20 000

m² de surface, un espace de folie sur le site de la Grande Halle de la Villette. Ce qui fait du Mondial du Tatouage le plus important événement de ­tatouage de la planète. Un rendez-vous porté par le célèbre tatoueur français Tin-Tin et devenu ­incontournable. Visité par 35 000 personnes lors de son édition 2017, il devrait cette année ­encore exploser les records d’affluence.

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tatouage

DE L’ART !

Pour Tin-Tin, fondateur du Mondial et du Syndicat National des Artistes Tatoueurs, le tattoo est bien un art.

La Villette envahie : une véritable ville dédiée au tatouage.

Mondial du Tatouage (du 9 au 11 mars 2018)

S

urtout présent dans les milieux alternatifs par le passé, le tatouage est désormais une chose entendue, populaire : votre grand-mère, votre patron, tout le monde – ou presque – est tatoué ! Des tatouages, il y en a des millions, et autant de raisons de se faire encrer à vie. Depuis 1999, un événement ­réunit ses passionnés comme les curieux, ceux dont le corps est quasi intégralement décoré d’encre, comme ceux qui ne se feront j­ amais tatouer. Fondé par le ­tatoueur iconique Tin-Tin, le Mondial du Tatouage propose

ANTHONY DUBOIS PH CAMY

Du son qui pique Côté concerts. L’équipe du Mondial étant pote avec pas mal de groupes de rock et metal (sur notre photo : Madball, présents en 2017), la programmation des concerts est réputée burnée. Cette année, Betraying the Martyrs, Mass ­Hysteria, Black Moth, Graveyard et The Red Goes Black régalent vos oreilles.

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chaque année la possibilité de se faire tatouer auprès de 420 artistes, de participer à un concours de tatouage, de visiter des expos (l’artiste Shawn B ­ arber cette année) ou de participer à des conférences. On se tient aussi à la page des dernières évolutions en matière de matériel de tatouage pro quand on n’assiste pas à un concert musclé (voir ci-dessous). Dans une ambiance conviviale, le Mondial du ­Tatouage honore ceux qui font vivre le tatouage, et ceux qui s’y intéressent. Tatoués ou non !

Un sacré jury : Luke Atkinson, Filip Leu, Tin-Tin, Bill Salmon et Kari Barba.

Les seigneurs du tatouage (ils jugeront le concours de l’édition 2018) Icône du quartier de Pigalle, Tin-Tin est le tatoueur le plus populaire au monde. Depuis 2003, il préside le SNAT (Syndicat National des Artistes Tatoueurs), dont les principaux objectifs sont notamment de permettre aux tatoueurs de s’exprimer dans les meilleures conditions d’hygiène et de bénéficier (enfin) d’un statut d’artiste mérité.

Pour ce motif, des heures de travail et de ­précision ont été nécessaires. À défaut de se faire encrer, on peut observer des autorités à l’ouvrage.

Grande Halle de la Villette, Paris ; mondialdutatouage.com

Pour désigner les meilleurs tatoueurs, Tin-Tin s’entoure d’un jury d’exception : Filip Leu (Suisse), Bill Salmon (USA), Luke Atkinson (Allemagne) et Kari Barba (USA), des références qui ont effectivement élevé le tattoo au rang d’art. Se voir décerner un prix par ce jury revient en quelque sorte à être adoubé par les seigneurs du tatouage (jury complété cette année par le célèbre Mark Mahoney).

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GUI D E

Faire.

mars

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au 11 mars

QUAND LE NORD PREND LE GUIDON

La 39e édition du salon de la moto de Pecquencourt (Nord) réserve encore le meilleur pour les fans de moto. Vieilles bécanes, cascades, brocante de pièces détachées (enfin de retour le dimanche matin), concerts… il y en a pour tous les passionnés. Et surtout les démos des meilleurs pilotes de FMX comme Tom Pagès ou Clinton Moore. Frissons assurés. Pecquencourt ; mc-pecquencourt.com

mars Verticale de la tour Eiffel

À ski ou en snow, l’objectif, c’est en bas, vite. Sur quatre étapes en mars (Isola 2000 le 3, Luchon-Superbagnères le 17, Les Orres le 24, Les 2 Alpes le 31), vous êtes convié au départ avec 299 autres participants. Au sommet, on court, on chausse ses planches et on se jette dans la pente. À l’arrivée, grosse fiesta ! Pyrénées, Hautes-Alpes, Alpes ; redbull.com/toutschuss

Le défi est à la hauteur du site : grimper les 1 665 marches des trois étages de la tour Eiffel en un minimum de temps. Les 129 participants (femmes et hommes) s’élanceront en début de soirée toutes les 20 secondes ou toutes les minutes. Record à battre : 7’48’’77, établi en 2016 par le Polonais Lobodzinski. À couper le souffle. Paris ; verticaletoureiffel.fr

1

15

au 18 mars EcoTrail Paris Depuis 2008, il attire toujours plus de passionnés du sport nature. En banlieue parisienne, les parcours offrent plus de 90 % de sentiers. À côté des courses de 18, 30 et 45 km, le trail de 80 km reste le défi ­ultime. On s’élance de SaintQuentin-en-Yvelines, à l’ouest de Paris, pour terminer au premier étage de la tour Eiffel. Île-de-France ; traildeparis.com

er

au 18 mars Une saine obsession

Avec une vingtaine de sites, le festival ­nantais Hip OPsession voit la culture hiphop en grand. Au milieu d’une grosse prog’ (rencontres, projections, workshops, etc.) et d’artistes comme le Belge Roméo Elvis ou le duo AllttA (20syl & Mr. J. Medeiros), on trouvera dès l’ouverture le battle de break avec la présence de Hong 10, Wing et Ronnie ou le battle Juste Debout avec la danseuse ­japonaise Kyoka en juge. Nantes ; hipopsession.com

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FLAVIEN DUHAMEL, CLACK-DAVID GALLARD

3 15 au 31 mars Red Bull Tout Schuss


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GUI D E ACTIVE STYLE

DEHORS COMME CHEZ SOI L’humain est l’une des rares espèces à ne pas disposer de pelage ou d’une peau épaisse. Une vulnérabilité surmontée grâce à des vêtements et des accessoires permettant de vivre, d’évoluer et de dompter les environnements où nous nous aventurons.

Virée rétro Les skateboards ont bien changé depuis que les Z-Boys en ont révolutionné la pratique dans les années 70 en y introduisant des tricks de surf. Le Mexico Bandito Cruiser 28 pouces de D Street et ses sept couches d’érable rappelle la forme originale en obus, tout en intégrant des éléments modernes tels que l’astucieux kicktail, et des roues souples à 80A. dstreetlongboards.com

Le temps de briller Alliant résistance et style, la montre Formex Element vous accompagne dans tous vos défis. Sa lunette en céramique noire est quasi inrayable, et son boîtier robuste antichoc. Étanche jusqu’à 100 m. formexwatch.com/fr/

Prendre pied Dans les années 1970, Fila s’impose dans le sport grâce au soutien ­d’illustres champions tels que le tennisman Björn Borg. Le look rétro de la basket Riot 2.0 F Low dotée d’une technologie de pointe comme sa bande de roulement Flex-groove, évoque les débuts de la marque. fila.com

Classique On ne doit pas l’invention du polo au sport équestre mais à un champion de tennis français, René Lacoste, qui l’a introduit à l’US Open en 1926. Ralph Lauren l’adopte ensuite pour sa gamme Polo. Mais quelle que soit l’occasion de le porter, ce classique en coton de Timezone édition combine parfaitement confort et fonctionnalité. timezone.de

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ACTIVE STYLE

Style inusable Les héros naissent dans les coins les plus hostiles de la planète. Au tournant du XXe siècle, Sir Ernest Shackleton devient l’une des figures phares de l’âge héroïque de l’exploration en Antarctique. Cet environnement froid et impitoyable inspire les vêtements qui portent son nom. Testée en Antarctique par − 20 °C, la veste Shackleton Endurance ­assure être plus chaude, plus résistante et plus ­imperméable que toute autre veste. La vie de Shackleton s’est arrêtée à l’âge de 47 ans mais sa veste vous protégera encore de longues années. shackletoncompany.com


ÉQUIPEMENT / OUTDOOR

CLASSE EN SAC Un bon design de sac à dos privilégie l’aspect fonctionnel avant l’esthétique. Robustes et ­légers à la fois, ces modèles de marques reconnues incarnent ce principe. Pesant tout au plus 1 kilo chacun, ils ­relèvent tous le défi d’offrir des rangements faciles d’accès – skis, bâtons de randonnée et autres poches à eau – et veillent à ne pas ralentir votre progression, tout en vous donnant fière allure lors de vos ascensions de falaises ou de montagnes. Seul hic, vous y rencontrerez peu de gens pour les admirer. SALOMON EVASION 25 salomon.com/fr/ MCKINLEY CRXSS 7 intersport.fr OSPREY Exos 48 ospreyeurope.com MAMMUT Trion Light mammut.com

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GU I D E ÉQUIPEMENT / OUTDOOR

ZIPPEZ-LA Face aux éléments, ces vestes pour hommes seront vos ­meilleurs amis.

BILLABONG Veste réversible Tradewinds : ­légère, respirante, et imperméable. eu.billabong.com

Le tout-terrain JACK WOLFSKIN La doudoune Neon Down est coupe-vent et étanche. jack-wolfskin.fr

Lorsqu’on s’aventure hors des sentiers battus, mieux vaut avoir une voiture qui tient la route. Il en va de même avec le téléphone. Jusqu’ici, Land Rover évoquait plus le rallye trail que les sonneries. Plus pour ­longtemps avec le lancement d’un smartphone conçu pour l’aventure, le Land Rover Explore, un nom qu’on associera bientôt avec batterie longue durée, écran et boîtier antichocs, et résistance à l’eau et aux températures extrêmes. Enfin, sa fonction GPS vous ramènera toujours au bercail, que vos expéditions vous ­entraînent au bout du monde ou au centre commercial. landrover.com

Voyager dans le temps Les chaussures hommes Merrell ­ ilderness AC+ allient la nostalgie du W ­design classique et les avantages de la technologie moderne. Si leur look se veut années 80, le confort de ces chaussures montantes en cuir est dernier cri : coussin d’air au talon, Mesh respirant et embout pare-pierre en caoutchouc maintiennent vos pieds solidement au présent. merrell.com

HENRI DUVILLARD La veste Homme Sunset est en ­matériau léger, fonctionnel et à s­ échage rapide. henri-duvillard.com

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GUI D E ÉQUIPEMENT / OUTDOOR

Toile de fond Presque aussi vieille que la civilisation humaine, la toile était déjà utilisée par les Chinois il y a plus de 3 000 ans. Fabriqué à l’origine à base de chanvre, ce tissu polyvalent est aujourd’hui souvent composé de coton, c’est le cas de ce sac à dos DC Crestline 23 litres, compagnon idéal du nomade. Sa sangle de ­fermeture ­extérieure et ses lanières de compression latérales stabilisent vos effets et votre ordinateur lors de vos escapades à pied, à vélo ou en skate. dcshoes.fr

ADOPTEZ-LES Ces vestes pour femmes allient la protection à l’élégance.

UNDER ARMOUR Blouson Printed Run avec ­protection ajustable. underarmour.fr

HENRI DUVILLARD Veste avec fausse fourrure Toubkal et isolation Primaloft. henri-duvillard.com

Lorsqu’il est question de montres mécaniques, on se réfère souvent à leur délicat mouvement, mais ici, les entrailles en silicium de cette Kronaby Apex, made in Suède, sont dédiées à l’exploit sportif. Connectée à votre smartphone, son affichage analogique adopte l’heure ­locale lors de vos voyages, elle dispose d’un podomètre et vous incite à bouger en cas de sédentarité prolongée. Enfin, l’appli smartphone la localise si vous la perdez de vue. kronaby.com

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HUMMEL Veste Sirius All-Weather ­respirante et étanche. hummel.net

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CHRIS BRINLEE

Temps et mouvement


ÉQUIPEMENT / OUTDOOR

L’effet équitable Les vêtements Cotopaxi nous protègent des ­éléments mais aussi les éléments de nous, en ­recyclant des matériaux comme le taffetas polyester qui sert à confectionner ce Teca Windbreaker ­résistant. eu.cotopaxi.com


GUI D E ACTIVE STYLE / PLAGE

Gros bonnet

Une belle journée de plage ne se limite pas à un bain de soleil en dégustant une glace. Avec un bonnet Buff Amby Snow-Cru et un cache-cou LComber, profitez de la côte toute l’année. buffwear.com

Souriez, vous êtes filmé

La bonne combinaison Le partenaire idéal pour affronter les océans les plus froids et les plus extrêmes du globe. La combinaison à capuche Norrøna unstad 6/5 ne prémunit pas totalement contre les morsures d’une eau glacée, mais rend l’expérience bien plus agréable. Parmi les nombreuses innovations, on appréciera les petits rebords sur les épaules ralentissant la pénétration de l’eau, et les coutures liquides renforçant l’étanchéité tout en vous gardant au chaud. De plus, différents matériaux sont utilisés pour assurer souplesse et protection maximale sur les zones sensibles. norrona.com

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Courez en slip Souvent, les shorts d’athlétisme pêchent par leur doublure intérieure inconfortable. Le Saxx Kinetic Run 5" résout le problème en intégrant un sous-vêtement de la marque en tissu microperforé extensible avec des soutiens BallPark Pouch garantis sans friction. saxxunderwear.com

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ANTTON MIETTINEN, MAX HOFSTÄTTER (2), JANE STOCKDALE

La Hirec Lynx 730 est une caméra tout-terrain. ­Embarquez-la partout sans crainte même sur la plage de sable humide – elle filmera toutes vos aventures y compris les plus folles. Sa télécommande d’une portée de 20 mètres la déclenchera à tout moment. Le Wifi intégré diffuse les images en live sur le smartphone d’où vous pourrez modifier les paramètres grâce à une appli dédiée. La vidéo 4K filme 30 images par seconde. Son boîtier robuste est étanche jusqu’à 30 mètres. hirecworld.com


ACTIVE STYLE / CYC LISM E

LE STYLE EN SELLE Pro du vélo ou cycliste du dimanche, le style rétro taillé dans un matériau technique boostera vos virées. En partant du haut dans le sens des aiguilles d’une montre : maillot Castelli Aero Race W Jersey FZ (castelli-cycling.com) avec tissu Velocity à l’avant et un maillage 3D à l’arrière pour ventilation optimale ; maillot Chapeau ­Madeleine Thermal Jersey pour femmes (chapeau.cc) avec doublure polaire pour tenir chaud ; maillot Souplesse Aero de ­Rapha pour femmes (rapha.cc) testé en soufflerie : ses manches texturées coupent le flux d’air et réduisent la traînée ; maillot Loeffler Jersey Life FZ (loeffler-shop. at) : il est isolant et sèche vite, ses bandes réfléchissantes assurent une bonne visibilité ; maillot hommes en laine mérinos ­Alphonsine de Café du Cycliste (cafeducycliste.com) avec panneaux avant coupevent ; enfin, le Polo Jersey Long-Sleeve en laine mérinos est respirant et anti-odeur (rapha.cc).

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Autour du monde.

THE RED BULLETIN WORLDWIDE

MEXIQUE DEPECHE MODE

Accepter le challenge, changer de voie ou poursuivre coûte que coûte : les exploits tiennent du talent et de la performance physique, mais ne seraient rien sans une force mentale à toute épreuve.

Comment relever haut la main les défis que la vie te lance ? Réponses avec Gahan & Gore, leaders d’un groupe mythique.

The Red Bulletin en E-Paper sur redbulletin.com

NEXT-LEVEL FITNESS DON’T TRAIN HARDER. TRAIN SMARTER.

Here, five world-class athletes share workout secrets and mental tips to help you get stronger, faster and leaner—and otherwise crush it this summer. Words WILL COCKRELL

Pro rugby star Carlin Isles shows off his explosive power with this modified push-up.

Photography MIKO LIM

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ÉTATS-UNIS GUIDE FITNESS Plus vite, plus fort, plus remonté. Cinq athlètes de classe mondiale partagent le détail de leurs entraînements quotidiens.

THIBAULT GACHET/RED BULL CONTENT POOL

Si Vince Reffet rate son avion, il le prend en vol. Une poignée de minutes plus tôt, il s’est élancé d’un sommet suisse à 4 158 m d’altitude.

UNE PORTE DANS LE CIEL

En rentrant, le 13 octobre dernier, dans un avion à 138 km/h par une porte de 1,58 m de large sur 1,25 m de haut, les Soul Flyers FRED FUGEN et VINCE REFFET ont réalisé le projet le plus risqué et le plus flippant de toute leur carrière. Décryptage. Texte PATRICIA OUDIT

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FRANCE A DOOR IN THE SKY Les Soul Flyers réalisent une prouesse unique en entrant dans un avion en plein vol.

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« C’EST L’IMPERFECTION QUI NOUS TOUCHE. » AUTRICHE AWOLNATION Les rockeurs américains ont façonné un disque à enregistrement direct, dans un studio old school.

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mars

MENTIONS LÉGALES Aiming high: Lake’s personal best stands at 1.96m – the height she jumped in Birmingham last July at Team GB’s trials for the World Championships

RAISING THE

BAR MORGAN LAKE became the first British woman ever to reach an Olympic high-jump final, thanks to a rare combination of physical power and sporting passion. Now, the 20-year-old athlete is honing her mental muscle to reach even headier heights in a season that could make hers a household name Words PAUL WILSON

Photography ALEXIS CHABALA

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ROYAUME-UNI MORGAN LAKE Entre saut en hauteur et études de ­psycho, l’Anglaise explique en quoi le training mental permet de s’élever.

SUISSE MARKUS KELLER L’étoile montante de halfpipe (un titre de champion du monde à son actif) a rompu avec ce qu’il savait faire le mieux. Dans la neige profonde du Japon, il nous raconte pourquoi il a eu raison.

FRANCE

Rédacteur en chef Alexander Macheck THE RED BULLETIN France, ISSN 2225-4722 Country Editor Pierre-Henri Camy Country Coordinator Christine Vitel Country Project ­Management Youri Cviklinski, youri@redbull.com Contributions, traductions, révision Étienne Bonamy, Frédéric ­Fortas, Susanne ­Fortas, Suzanne Kříženecký, Audrey Plaza, Claire S ­ chieffer, ­Gwendolyn de Vries Abonnements Prix : 18 €, 12 numéros/an, getredbulletin.com Siège de la rédaction 29 rue Cardinet, 75017 Paris, +33 (0)1 40 13 57 00 Impression Prinovis Ltd. & Co. KG, 90471 Nuremberg Publicité PROFIL, 134 bis rue du Point du jour 92100 Boulogne, +33 (0)1 46 94 84 24, Thierry Rémond : tremond@profil-1830.com Elisabeth Sirand-Girouard : egirouard@profil-1830.com Les journalistes de la SAS L’Équipe n’ont pas pris part à la réalisation de The Red Bulletin. La SAS L’Équipe n’est pas ­responsable des textes, photos, ­illustrations et dessins qui engagent la seule responsabilité des auteurs.

Rédacteur en chef adjoint Andreas Rottenschlager Directeur créatif Erik Turek Directeurs artistiques Kasimir Reimann (DC adjoint), Miles English Directeur photos Fritz Schuster Directeur photos adjoint Rudi Übelhör Responsable de la production Marion Lukas-Wildmann Managing Editor Ulrich Corazza Rédaction Stefan Wagner (Chef de service), Christian Eberle-Abasolo, Arek Piatek Maquette Marco Arcangeli, Marion Bernert-Thomann, Martina de Carvalho-Hutter, Kevin Goll, Carita Najewitz Booking photos Marion Batty, Susie Forman, Ellen Haas, Eva Kerschbaum, Tahira Mirza Directeur commercial Franz Renkin Emplacements publicitaires Andrea Tamás-Loprais Solutions créatives Eva Locker (Dir.), Martina Maier, Verena Schörkhuber, Edith Zöchling-Marchart Management par pays & Marketing Sara Varming (Dir.), Magdalena Bonecker, Kristina Hummel Maquette marketing Peter Knehtl (Dir.), Simone Fischer, Alexandra Hundsdorfer Production Wolfgang Stecher (Dir.), Walter O. Sádaba, Friedrich Indich, Michael Menitz (Digital) Lithographie Clemens Ragotzky (Dir.), Claudia Heis, Nenad Isailovi c,̀ Maximilian Kment, Josef Mühlbacher Office Management Kristina Krizmanic Informatique Michael Thaler

DAS ZIEL IM GRIFF

Abonnements et distribution Peter Schiffer (Dir.), Klaus Pleninger (Distribution), Nicole Glaser (Distribution), Yoldaş Yarar (Abonnements)

ALEXANDER MEGOS ist einer der besten Kletterer der Welt. Warum? Weil er auf jeder Route seine 10 Prinzipien des Erfolgs befolgt.

FRANK KRETSCHMANN/RED BULL CONTENT POOL

Text BEN KRISCHKE

Alexander Megos, 24, Ausnahmekletterer: „Scheitern beginnt in dem Moment, in dem du dein Ziel unterschätzt.“

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ALLEMAGNE ALEX MEGOS L’alpiniste allemand nous révèle ses dix règles d’or pour s’assurer le succès, valables aussi bien sur un tracé d’escalade qu’au bureau.

THE RED BULLETIN

Siège de la rédaction Heinrich-Collin-Straße 1, A-1140 Wien Téléphone +43 (0)1 90221-28800, Fax +43 (0)1 90221-28809 Web www.redbulletin.com Direction générale Red Bull Media House GmbH, Oberst-Lepperdinger-Straße 11–15, A-5071 Wals bei Salzburg, FN 297115i, Landesgericht Salzburg, ATU63611700 Directeur de la publication Andreas Kornhofer Directeurs généraux Dietrich Mateschitz, Gerrit Meier, Dietmar Otti, Christopher Reindl

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Le plein d’action.

3 h 45. Alors que la station est endormie, ­Valentin Delluc, speed rider de 25 ans, réalise une ­première mondiale en volant de nuit dans un environnement de haute montagne hostile. Un projet ambitieux et poétique, dans lequel il dévale une ligne vertigineuse sur le glacier des Bossons, éclairé par la pleine lune et un ruban de LED fixé à sa voile… Vidéo sur win.gs/moonline

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« De nuit, tout est différent, on se sent seul, tout petit. » La performance durera 4’20 min, sur 2 350 m de dénivelé, une durée de vol rare en speed riding, mix incroyable de ski et de parapente.

THE RED BULLETIN n° 75 sortira le 17 mars 2018

STÉPHANE CANDÉ

Chamonix, France

makes you fly

THE RED BULLETIN


* hors du commun / Red Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658

RENCONTRE INTERNATIONALE DE DANSES HIP HOP

ÉTAPE FINALE DISPONIBLE DÈS LE 4 MARS SUR REDBULL.TV

*



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