Cours 2

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Histoire et cinéma CIN-2111 Lundi 16h à 19h Chargé de cours Rémy Besson



Extrait 1: ouverture du film Le nom de la rose (Jean-Jacques Annaud, 1986)

Extrait 2: ouverture du film Perceval le gallois (Éric Rohmer, 1978)


Comment catégoriser ces deux films? Adaptation Film historique (comédie/drame) « L’usage veut que l’on réserve l’étiquette « film historique » aux films qui mettent en scène, dans leur contexte historique, des personnages historiques réels, ordinaires ou célèbres. »

Film en costumes Connotation négative car jugée trop restrictive.

Fiction patrimoniale Films portant sur des sujets qui appartiennent à la mémoire collective et dont le rôle est d’inscrire quelque chose du passé (comme un temps révolu) dans notre présent (dimension souvent idéalisée et nostalgique). Ils le font avec une « esthétique muséale » visant à faire « authentique ».

Film d’époque Fiction patrimoniale, mais qui porte sur une période considérée comme ancienne.


Le Nom de la rose)d’Umberto Eco est un roman datant de 1980 (trad. en 1982).




On pourrait reprendre la même structure que la semaine dernière

Contextualisation Le Moyen Age, une catégorie à questionner


On pourrait reprendre la même structure que la semaine dernière Le chercheur peut effectuer un relevé des erreurs factuelles

un rapport d’expertise


On pourrait reprendre la même structure que la semaine dernière

Il y a eu quelques bévues, notamment une vierge baroque du XVIIIe siècle qui est restée en plein milieu de deux ou trois plans et qui choque un peu pour cette reconstitution du XIVe siècle.

Michel Pastoureau, loc. cit. Un rapport d’expertise


On pourrait reprendre la même structure que la semaine dernière Un rapport d’expertise Cette fidélité à la lettre de Chrétien et à la culture de son temps ne va pas sans contradiction. En faisant jouer ses personnages dans un studio elliptique (…) c’est à une époque plus tardive que celle de l’écriture du Comte du Graal que l’on fait allusion. Quant aux repères figuratifs, là non plus la chronologie n’est pas rigoureusement respectée. Giovanna Angeli « Perceval le Gallois d’Éric Rohmer et ses sources »


On pourrait reprendre la même structure que la semaine dernière Sur les paysans, par ex., nous n’étions pas du tout d’accord, nous signalions qu’ils n’étaient pas si malheureux que cela dans cette Italie du nord au XIVe siècle et il y a un misérabilisme épouvantable mis en scène dans le film, montrant des paysans comme des animaux dans la boue, ce qui n’est pas du tout cela, cette légende d’un MA noir met en rage l’historien. Michel Pastoureau, loc. cit. Un rapport d’autorité


On pourrait reprendre la même structure que la semaine dernière Le chercheur peut réinscrire le film dans l’histoire des représentations - Filmographie du réalisateur - Traitement visuel de cette bataille - Manières de donner à voir un combat au cinéma etc. Dunkerque est, par ex., une représentation plus immersive/ tactique que stratégique de la bataille


Le chercheur peut réinscrire le film dans l’histoire des représentations Mythification/ démythification

Cf. Conférence de Xavier Kawa-Topor au Forum des images sur Perceval [en ligne: tc 17:40 à 19:20].


Documentaire d’Éric Rohmer, 1964

Réinscrire dans la filmographie

Marquise d’O, 1976.


La question d’aujourd’hui est un peu différente:

Représenter la réalité ou l’imaginaire? Représenter ce qui s’est passé ou ce qui s’est pensé?


Le Dimanche de Bouvines, le livre … mais pas le film.

Lire: Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984/3 n° 30, p. 81-85.


Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984, vol. 3, n° 30, p. 81-85.


Volonté de représenter ce qui s’est passé

Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984, vol. 3, n° 30, p. 81-85.


Faire avec des traces discontinues

Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984, vol. 3, n° 30, p. 81-85.


La question des décors

Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984, vol. 3, n° 30, p. 81-85.


La question des gestes

Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984, vol. 3, n° 30, p. 81-85.


La question du verbe

Georges Duby, « L'historien devant le cinéma », Le Débat, 1984, vol. 3, n° 30, p. 81-85.


Si on ne s’y refuse pas… comment faire? Annaud s’est entouré de toutes les garanties de sérieux historique. Une véritable armada de conseillers spécialisés, certains notoires dans leur spécialité, se trouve créditée au générique: pour l’histoire (Jacques Le Goff), pour les manuscrits (François Avril), pour l’architecture (JeanClaude Bonne), pour l’héraldique (Michel Pastoureau) (…) François Amy de la Bretèque, Le Moyen Âge au cinéma, Paris, Belin, 2015.


Une certaine conception de l’histoire Mettre en scène un début du XIVe siècle le plus fidèle possible à la reconstitution historique par rapport au savoir historique de notre temps: il voulait que tout soit bien comme on pense que c’était, les paysages, les bâtiments, les costumes, les rituels, etc. [Il] voulait savoir si au réfectoire par ex., les moines bénédictins ou cisterciens avaient le capuchon sur la tête ou la tête découverte (…) ou comment on s’assied à table, comment on se rencontre, comment on se dit bonjour et au revoir, quel type de geste l’on fait (…) Michel Pastoureau, loc. cit.


Une certaine conception de l’histoire

… qui n’est pas partagée par les historiens Pastoureau explique « le résultat m’a semblé à l’écran un peu lourd comme reconstitution, d’autant que nos savoirs ne sont nullement des certitudes: dans dix, vingt ou cinquante ans, ce que nous croyons en matière simplement de bâtiment, d’ameublement ou de costume sera complété ou corrigé; chaque savoir n’est qu’un état dans l’histoire évolutive des savoir. Michel Pastoureau, loc. cit. Lien avec la semaine dernière : L’histoire, entendue comme écriture portant sur le passé, est aussi une représentation.


Une certaine conception de l’histoire

… qui n’est pas partagée par les historiens

Annaud avait cette idée, que je ne partageais pas et que, je crois, Jacques Le Goff ne partageais pas non plus, de mettre en scène un début du XIVe siècle le plus fidèle possible à la reconstitution historique par rapport au savoir historique de notre temps: il voulait que tout soit bien comme on pense que c’était, les paysages, les bâtiments, les costumes, les rituels, etc. C’était un souci presque positiviste et il n’y avait absolument rien de cette distanciation qui préoccupait Rohmer. Michel Pastoureau, loc. cit.


Distanciation ?

Dans le refus d’une représentation réaliste Dans la mise en scène du dispositif de représentation Dans la diction des personnages Etc.


Distanciation ?

Il m’a parlé de l’effort de distanciation qu’il voulait faire et je me souviens que [ça] m’avait bien plu cette idée de ne pas mettre en scène un MA très fidèle dans sa reconstitution historique mais de donner l’idée de cette reconstitution. Michel Pastoureau, loc. cit.


Distanciation ? … ou représentation d’autre chose? Respecter l’esprit du texte médiéval (conserver la versification en modernisant le langage) Mise en scène comme au théâtre médiéval - Acteur est un récitant et un personnage (rôle de la musique et de l’oralité). Mise en espace picturale (question du temps et des gestes) et architecturale (quart d’abside des églises romanes) Refus de la perspective et des proportions


Partant de l’idée que ceux-ci sont toujours stylisés dans l’art médiéval, Rohmer imagine un système global pour la gestuelle. Par exemple, on pourra voir surtout le jeu de la mère de Perceval ou celui de certains membres du Chœur : coudes serrées, mains légèrement tendues, en supination, mains sur la poitrine, gestes de grief ou de désespoir. Cela crée un jeu non naturaliste, stylisé, censé « redonner au geste cette grâce enfantine qu’il a sur les miniatures des XIIe et XIIIe siècles ».

Corneliu Dragomirescu, « Le Cinéma à l’épreuve des représentations médiévales : l’enluminure et le théâtre : Perceval le Gallois, d'Éric Rohmer et Henry V, de Laurence Olivier », Babel, 15, 2007 [En ligne]. La citation dans le texte est de Rohmer.


Refus de la profondeur de champ

Le chevalier fait la taille de l’arbre


Représenter les représentations médiévales (pas forcément à celles contemporaines du texte) Cette fidélité à la lettre de Chrétien et à la culture de son temps ne va pas sans contradiction. En faisant jouer ses personnages dans un studio elliptique (…) c’est à une époque plus tardive que celle de l’écriture du Comte du Graal que l’on fait allusion. Quant aux repères figuratifs, là non plus la chronologie n’est pas rigoureusement respectée. Giovanna Angeli « Perceval le Gallois d’Éric Rohmer et ses sources »


Pour conclure: un film historique? Françoise Zammour explique que toute l’opération consiste, chez Rohmer, à « déplacer le référent cinématographique du médiéval au réel de la représentation médiévale du monde ». Pour le dire autrement, le référent est moins la période Moyen Age que les représentations contemporaines à cette période. Si on revient à des questions de catégorisation, je vous propose donc de considérer Perceval comme un “film historique”. Au terme de ce cours, on est, en effet, amené à modifier un peu la définition de l’histoire qui est adoptée afin de considérer non pas seulement ce qui s’est passé, mais aussi ce qui s’est pensé (imaginé, dessiné, chanté, etc.)


Film historique: une drôle de conception de l’histoire

Adaptation Film historique « L’usage veut que l’on réserve l’étiquette « film historique » aux films qui mettent en scène, dans leur contexte historique, des personnages historiques réels, ordinaires ou célèbres. »

Film en costumes Film d’époque Fiction patrimoniale


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