Alexeï Navalny
Avocat anticorruption, véritable star sur les réseaux sociaux, il est la bête noire du président russe, Vladimir Poutine.
Au beau milieu de l’été 2020, on a entendu parler d’un Russe empoisonné par Vladimir Poutine et on s’est demandé si nous n’étions pas plongés dans un bon vieux James Bond ou un jeu vidéo où les ennemis sont pulvérisés d’un clic. Pourtant, Alexeï Navalny n’a rien d’un agent secret qui vivrait de folles aventures en smoking et Aston Martin. Son hospitalisation à Berlin, le 22 août 2020, a fait scandale jusqu’à Paris, Londres ou Washington. Il était déjà dans le coma quand l’avion médical qui l’exfiltrait de Russie a atterri en urgence.
Empoisonné. Les examens médicaux ont révélé qu’il avait été intoxiqué par le Novitchok, un agent neurotoxique conçu à l’époque soviétique à des fins militaires. Pas de fiction, donc, mais un produit mortel et une cible : Alexeï Navalny, principal opposant politique du très autoritaire dirigeant de la Russie, Vladimir Poutine. Cet empoisonnement fait suite à plusieurs tentatives d’assassinat. Il a aussi perdu, par le passé, 80 % de sa vision à l’œil droit après avoir eu le visage aspergé par un détergent.
Ennemi numéro 1. Avocat, Alexeï Navalny est devenu l’homme à abattre depuis plus de quinze ans qu’il ne lâche pas le Kremlin d’une semelle. Ce père de deux enfants s’est imposé comme le plus grand adversaire de Poutine, malgré des menaces de mort, des arrestations et des incarcérations. Militant, il s’est d’abord fait connaître comme champion de l’anticorruption. Condamné pour escroquerie, il dénonce un coup monté par le pouvoir et continue à déranger en mettant son nez dans les affaires juteuses des politiques russes qui mélangent business et corruption.
Combatif. Provocateur et médiatique, Navalny entend bien faire du bruit. Il y a presque dix ans, il avait déclaré que le parti de Vladimir Poutine était « le parti des voleurs et des escrocs ». Dénonçant des détournements d’argent ou des élections truquées, il ose tenir tête dans un pays où les militants des droits de l’homme, les avocats et les opposants politiques risquent gros, au point d’être assassinés.
Politique. Navalny fait aussi de la politique. En 2013, il s’est présenté aux élections municipales à Moscou. Cinq ans plus tard, il annonce sa candidature à l’élection présidentielle russe avant d’être mis hors-jeu. Son arme de prédilection ? Internet et les réseaux sociaux. Dans un pays où l’on a déjà vu, en 2019, 1 373 personnes arrêtées le même jour parce qu’elles réclamaient des élections libres, l’avocat anticorruption est devenu l’un des rares hommes politiques qui réussissent à mobiliser les jeunes.
Complexe. En Europe, son nom est synonyme d’héroïsme et de courage.
Mais Alexeï Navalny est un personnage complexe : ultranationaliste, il soutient l’annexion de la Crimée en 2014, tout en admettant que cela a été fait « au mépris le plus total des règles internationales », et milite contre l’immigration en Russie. Raciste ? Navalny entretient le flou. Il a déjà osé affirmer à la télévision russe, pendant sa campagne électorale en 2013, que « 50 % des crimes graves sont commis par les migrants », mais il estime également que c’est une force de pouvoir s’adresser aussi bien aux libéraux qu’aux nationalistes. Alors, opportuniste ?
Déterminé. Sur YouTube, on l’a entendu comparer à des cafards les habitants du Caucase, une région au sud de la Russie, où vivent de nombreux musulmans. Dans d’autres vidéos, il prône le port des armes et tire sur un Tchétchène. Dans le passé, l’homme aux yeux bleu dur a été exclu de son parti pour ses positions extrémistes. Mais, plus connu à mesure que le temps passe et que les risques qu’il prend augmentent, celui qui incarne la voix dissonante du pays lisse ses propos.