En arrière, toutes

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en arrière, toutes Audrey lebel

AURORE PETIT


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Mon corps, mon choix. » Les plus optimistes verront dans ce slogan le vestige d’une époque révolue et d’une bataille gagnée. Celle menée à coups de manifeste par 343 « salopes » clamant avoir avorté et s’exposant à des poursuites judiciaires. Celle de l’avocate Gisèle Halimi accompagnant au tribunal de Bobigny (93) une adolescente de 17 ans jugée pour avoir avorté après un viol. Celle de la ministre de la Santé de l’époque, Simone Veil, argumentant trois jours et deux nuits pour convaincre une Assemblée nationale presque exclusivement masculine de concéder aux femmes le droit d’interrompre leur grossesse en cas de « situation sans issue ». Le 17 janvier 1975, grâce à la ténacité de ces femmes et de milliers d’autres, la loi encadrant la dépénalisation de l’avortement est finalement adoptée en France. Sept ans après l’autorisation de la contraception, ce nouveau texte consacre la possibilité pour les femmes de choisir de donner naissance ou non, et de le faire au moment qu’elles estiment être le bon. Ce vent de liberté souffle sur toute l’Europe.

Près de soixante ans après la Russie — qui en 1920 a fait figure de pionnière —, les pays légalisent ou dépénalisent les uns après les autres l’avortement. La très catholique Italie franchit le pas trois ans après la France, en 1978. Dernière récalcitrante, l’Irlande s’y résoudra sous la pression de la rue quarante ans plus tard, en 2018. Seule Malte y reste, aujourd’hui encore, farouchement opposée. Partout ailleurs sur le Vieux Continent, ce droit, celui d’avorter sans mettre sa vie en danger, est en apparence acquis. En réalité, le ressac a déjà commencé. En 2011, la Hongrie de Viktor Orbán a fait inscrire dans la Constitution que « la vie humaine est protégée depuis la conception ». Au Portugal, en 2015, l’avortement jusque-là gratuit et libre est devenu payant et soumis à un examen psychologique. En Pologne, les avortements en cas de malformation grave du fœtus, un petit millier chaque année, sont interdits depuis janvier 2021. En Italie, les interruptions volontaires de grossesses en théorie garanties par la loi deviennent impossibles dans les faits avec plus de la moitié des gynécologues du pays — et jusqu’à 95 % dans certaines régions — brandissant leur clause de conscience. Si bien qu’au tournant des années 2020, dans certaines régions d’Europe, les « faiseuses d’anges » sont de retour tandis que celles qui le peuvent parcourent des centaines de kilomètres pour aller avorter à l’étranger. Souffrance physique, détresse psychologique, risque d’être condamnée par la justice ou d’y laisser la vie… Leur sort n’est pas plus enviable que celui des Françaises des années 1960.

FANTASME D’UN DÉCLIN MORAL Par endroits, la situation se rapproche de celle d’États américains dans lesquels, au gré du durcissement des positions conservatrices, le droit à l’avortement perd du terrain. Au Texas, une loi a interdit, en septembre 2021, l’avortement dès que des battements de cœur sont détectés, soit dans l’immense majorité des cas. Et gare à l’intrépide médecin qui désobéirait pour respecter le choix de sa patiente : la même

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loi prévoit une récompense d’au moins 10 000 dollars pour toute personne engageant des poursuites à son encontre. Cette vague n’a rien d’un mouvement naturel. Elle est le fruit d’une contre-offensive réactionnaire. Au cœur de la rhétorique des anti-IVG, le fantasme d’un « déclin moral de toute la société ». Sous les auspices du Vatican, d’églises orthodoxes ou évangélistes, ceux-ci aiment à se croire « du côté de la vie ». Dans le détail, les arguments sont plus variés : d’un soi-disant « droit du père » à la peur d’une « baisse de la natalité ». Ces discours, inaudibles il y a encore dix ans, portent leurs fruits. En 2020, 32 pays dont la Pologne ou la Biélorussie ont signé une « déclaration pour la santé de la femme et le renforcement de la famille » qui s’attaque sans détour au droit à l’IVG. Galvanisées par leurs succès, les forces conservatrices

déploient tout un arsenal de techniques de lobbying, du recours juridique à l’activisme en ligne, pour faire reculer les législations. La France n’est pas épargnée par l’influence de ces groupes de pression. En juin 2021, Emmanuel Macron déclarait dans le magazine Elle n’être « pas favorable » à la proposition de loi autorisant un allongement de douze à quatorze semaines au motif qu’un avortement dans ces délais serait un « traumatisme » pour les femmes. Un discours typique de la rhétorique anti-IVG. « La liberté de décider, on s’est battus pour la gagner, on se battra pour la garder ! » scandaient les féministes le 28 septembre 2021 à l’occasion de la Journée mondiale du droit à l’IVG. Dans le camp opposé, une internationale ultra-conservatrice fourbit ses armes pour faire du corps des femmes son champ de bataille.

Cette enquête s’inscrit dans le prolongement d’un travail mené pour l’ONG d’investigation polonaise Fundacja Reporterów.

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1. TFP-FRANCE.ORG

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1. INTERVIEW VIDÉO DE «!FAMILLE CHRÉTIENNE!».


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L’information en bande dessinée

hiver 2021-2022

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