Revue #121

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Cl. LME Press

Romaine Brooks, Autoportrait à Saint Jean-de-Luz, h/t, 1914, coll. Musée francoaméricain du château de Blérancourt.

ÉDITO

Matrimoine

Par Xavier Rosan

Le mot a fait sourire. En 1913, le journaliste Gustave Téry, répondant à une consœur féministe qui osait parler, avec esprit, d’un « pégère » pour désigner un homme « méchant et acariâtre » (équivalent de la mégère), ironisait : « Pourquoi parle-t-on de patrimoine et jamais de matrimoine ? » Et de poursuivre, le finaud : « matriotisme » plutôt que « patriotisme » ? « matrouille » plutôt que « patrouille » ?… Le vocable existait pourtant depuis le Moyen Âge. On le retrouve en 1567, puis en 1595, etc., comme disposition du droit français : « Bien provenant du côté de la mère. » L’ethnologue Élie Reclus ose même déclarer : « Le “matrimoine” précède le “patrimoine”, car, explique-t-il, le matriarcat est la première civilisation de l’humanité. » C’est récemment, au xxe siècle, que tout bascule. Quand Hervé Bazin publie Le Matrimoine en 1967, la presse parle de néologisme et si le livre devient le best-seller de l’année, le terme ne fait pas florès. On connaît la suite. En popularisant le patrimoine comme bien culturel avec la création des Journées du Patrimoine en 1984, le ministère de la Culture relayait un truisme bien établi dans l’usage courant. Il a fallu attendre 2016 pour que naissent les premières Journées du Matrimoine,

en Île-de-France. Depuis, le mot qui désigne tout simplement « l’héritage des mères » s’affirme chaque jour un peu plus, tout en révélant des vérités enfouies, comme la minoration des femmes dans la toponymie des rues ou dans les représentations artistiques. À quand une « place des Grandes-Femmes » ?… Ce numéro rend hommage à quelques destins de femmes autour de la figure de la Bordelaise Rosa Bonheur, dont on célèbre le bicentenaire de la naissance. Sont également de cette revue printanière : George Sand, Hélène Richelet (élue maire de Jatxou dès 1945 et durant 25 années), Léonide Marceau, fondatrice de la villa Magnan à Biarritz, l’actrice creusoise (et un peu mégère…) Marie Colombier – sans oublier les anonymes, telles celles des mégisseries de Saint-Junien. N.B. : Nous ne remercions pas le correcteur d’orthographe automatique de notre ordinateur, dont l’intelligence artificielle accuse un certain retard sur le Dictionnaire universel des sciences morale, économique, politique et diplomatique, lequel, dès 1777, intégrait matrimoine à son corpus.

ABONNEZ-VOUS ! en p. 152 bénéficie du soutien : du CONSEIL RÉGIONAL NOUVELLE-AQUITAINE

de la DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES NOUVELLE-AQUITAINE

du CONSEIL DÉPARTEMENTAL DES LANDES, du CONSEIL DÉPARTEMENTAL DES PYRÉNÉES-ATLANTIQUES,

Inclus dans ce numéro pour tous les abonnés livrés par courrier : une affiche 28 x 40 cm de la couverture et la Lettre des abonnés.

du CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE LOT-ET-GARONNE, de la VILLE DE BORDEAUX, et du CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE LA DORDOGNE.

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DEUXSÈVRES 79 Poitiers

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Le printemps est là ! 4 couvertures

pour un même numéro !

Villa Magnan

© Melvin Israël

Bayonne

Biarritz PYRÉNÉES-

ATLANTIQUES 64

Monein

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Vallée d’Aspe As s

Port d’Andernos © Luc Chéry

Château de Boussac © DroneCreuseTourismeJT

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Rosa Bonheur

© Mairie de Bordeaux, musée des beaux-arts, cl. L. Gauthier

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SOMMAIRE

charente

32

Le logis de Forge

DESTINS de FEMMES

lot-et-garonne

George Sand, châtelaine de Guillery

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béarn

L’église Saint-Girons de Monein

102

béarn

La peau de l’ourse Cannelle

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Le port d’Andernos

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George Sand à Boussac

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Rosa Bonheur et Bordeaux

Paris Musées / Musée

42

bordeaux

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32

42

charente-maritime

Les prêtres déportés landes

Chapelet de chapelles lot-et-garonne / charente-maritime

Bernard Palissy et la céramique naturaliste haute-vienne

Les gants de Saint-Junien corrèze

Le site gallo-romain des Cars dordogne

Les moulins du Périgord noir deux-sèvres

Les mines d’argent de Melle pays basque

La Villa Magnan à Biarritz

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LES MISCELLANÉES DU FESTIN

PETIT DICTIONNAIRE NÉO-AQUITAIN

Assemblade L’assemblade est un terme gascon à peine francisé (d’assemblada) qui, malgré l’évidence a priori du sujet qu’il désigne, n’a jamais franchi les portes de l’usage courant en français. Cette foire typique des Landes se tenait une fois l’an. Une messe (toujours liée au saint de la commune), un marché (aux bestiaux principalement), des attractions populaires (jeux, combats de chiens, exhibitions d’ours), un repas, un bal réunissaient les habitants des environs. On y effectuait de belles transactions, on échangeait de la main-d’œuvre, on réglait des conflits (et, l’alcool aidant, on en créait parfois de nouveaux…), on prenait des nouvelles les uns des autres, on se divertissait. La tradition commença à se perdre vers la fin du xixe siècle. De nos jours, il ne reste plus que deux survivances de l’assemblade – inscrite au patrimoine immatériel de la France au titre des pratiques festives –, celles de la Saint-Jean à Bourricos et de la SaintMichel à Ousse-Suzan. Le terme reprend pourtant de la vigueur ces dernières années, tout en s’éloignant de sa fonction première : assemblade de la Forêt d’art contemporaine, assemblade médoquine du Parc naturel régional des landes de Gascogne, assemblades catholiques… Les nourritures spirituelles viennent en quelque sorte au secours des nourritures terrestres, malmenées par les super- et hypermarchés, les livraisons à domicile, ou plus sûrement l’extension des déserts ruraux. 4

Le Festin en image « De la scène de genre, Lizal s’aventure au seuil de la fresque historique. […] Voici de la musique, de la danse et du vin, des guirlandes, une joie qui s’accroît, des mains qui s’étreignent, des couples enlacés, une allégresse qui transforme la morne vie landaise en éden. Cette image des Landais débordant d’énergie et de santé est un démenti aux récits de voyages imprégnés des thèses médicales qui véhiculent tout au long du xixe siècle le cliché d’un peuple chétif, contaminé par la pellagre. […] Le format panoramique hisse le sujet au niveau de la « Grande peinture ». Épris du réel, Lizal nous montre le peuple landais joyeux, plein de confiance en son énergie, dans une clairière aux verdures rouillées par les débuts d’un automne mélancolique et tendre : des grappes de raisin sur les tables confirment la saison. […] Le couple qui s’enlace au premier plan, l’œillade appuyée de la jeune femme, Carmen dacquoise aguichant le spectateur, nous met de suite au cœur de l’action. Il y a là un beau morceau de mouvement et de couleur. Lizal a la chaleur, la verve, il apporte la gaîté gasconne. » Jean-Roger Soubiran, catalogue de la vente Briscadieu, Bordeaux, 2022, p. 101-104.

Alex Lizal, L’Assemblade au Pays landais, 1904, h/t, 126,5 x 322,5 cm, coll. part.

us ? Le saviez-vo

Jean-Roger Sourgen, Étang landais, 1938, h/t, 127,5 x 191,5 cm, coll. part.

La peinture landaise à l’encan Longtemps conservée au sein de l’établissement dacquois de la Caisse d’Épargne, L’Assemblade d’Alex Lizal a été adjugée le 22 janvier 2022, à la maison de ventes Briscadieu à Bordeaux, pour un prix record de 110 700 €. Les enchères se sont également envolées pour d’autres œuvres du peintre, lequel n’a pourtant pas roulé sur l’or de son vivant. Le Marché aux cruches à Dax est parti pour 87 330 € et Dans la Grande Lande (un berger sur échasse gardant ses moutons) pour 63 950 €. Son compatriote Jean-Roger Sourgen le détrône avec un Étang landais vendu 123 000 €.


LES MISCELLANÉES DU FESTIN

Destination

Limoges Il y a Limoges et Limoges. Un homme et une femme avertis en valant quatre, quelques indices de distinction éviteront des erreurs d’étourderie au moment de choisir sa prochaine destination de voyage. Est-il besoin de présenter Limoges, en France ? 28e ville la plus peuplée du pays (130 816 hab. en 2019), de tradition bouchère, le nom de la capitale des « arts du feu » se confond avec le nec plus ultra de la porcelaine. L’autre Limoges pointe en Ontario, Canada. Localité dépendant de la municipalité de La Nation, elle accueille 2 048 âmes (à 70 % francophones) en 2016. La Transcanadienne permet de gagner Ottawa ou Montréal en un rien de temps. Tout a commencé par une paroisse dressée vers 1882, quatre ans après la création d’une ligne de chemin de fer, sur le lieu-dit de South Indian (du nom du ruisseau homonyme) par des pionniers loyalistes et Canadiens français catholiques. La communauté vit de l’industrie du bois, la région étant couverte d’une dense forêt de pins rouges. L’abbé Honoré Limoges (18781955) y officie de 1913 à 1921, avant de prendre la direction de la cure de Grenville, au Québec voisin. Sa « direction des âmes fut de toute piété », lit-on

La gare de Grand Tronc, Limoges, Ontario, 1892. Porcelaine de Limoges, carte postale, vers 1900, coll. part.

dans une brochure de l’époque, ce qui explique sans doute la motivation des paroissiens à changer South Indian pour Limoges en 1929. De nos jours, la localité tire quelque renom de la présence du parc aquatique thématique « le plus grandiose au Canada ». Une cité des alpagas réjouira les réfractaires au pédiluve.

Le Festin en (bons) mots « Le régal fut fort honnête, Rien ne manquait au festin ; Mais quelqu’un troubla la fête Pendant qu’ils étaient en train. » Jean de La Fontaine, « Le rat de ville et le rat des champs », 1668

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René Kuntz, La traversée de la Vienne en face du moulin de Villars à Gouex, 1954, coll. de la mairie de Gouex.

LE NOM DES GENS

C’est exquis ! Le nom des gens peut-il s’imposer comme un argument touristique ? Nous ne savons pas grand-chose de Gouex (canton de Lussac-les-Châteaux, communauté de communes Vienne et Gartempe, département de la Vienne) et, à vrai dire, jusqu’à la découverte de son gentilé nous en ignorions l’existence (faute avouée, etc.). De fait, s’il leur arrive d’être appelés Gouexiennes et Gouexiens, les 467 résidents* de l’ancienne commune de Goia (1096) ou Goëx (1872) peuvent se prévaloir d’être fréquemment désignés comme Gouexquises et Gouexquis. Le bonheur n’est donc pas seulement dans le pré, mais aussi dans le village. Lequel, du reste, présente de nombreux atouts, comme l’a révélé l’inventaire de la commune. De peuplement ancien (la grotte du Bois-Ragot, découverte en 1968, atteste d’une présence humaine au Magdalénien), Gouex dispose ainsi, outre quelques fermes d’importance, d’un château (Les Escorcières, début xixe siècle), de l’ancienne école de filles dite Le Couvent, d’une fontaine et d’un lavoir pittoresques, et de la villa des Roseaux, actuelle mairie. C’est dans cette dernière que sont conservés quatre tableaux du militant communiste, résistant et peintre René Kunz (1904-1987), dont le talent, plus qu’exquis, mérite d’être mieux connu. Nous y veillerons. * Insee 2019.

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Le lieu du film Après avoir signé quelques films en Angleterre, dont Fantôme à vendre, le cinéaste René Clair (1898-1981) revient poser sa caméra en France pour y tourner, à partir du 15 juillet 1939, Air pur : un film sur l’enfance malheureuse dont l’action se déroule dans une colonie de vacances. Le tournage, commencé par quelques séquences dans des quartiers populaires de Paris, se poursuit début août à Argentat, en Corrèze : « Ce n’est pas un pays touristique et pourtant, c’est certainement un des plus beaux de France, commente le réalisateur. C’est un pays de verdure, de vallées, de petites rivières. Exactement ce que je voulais. » Une trentaine de titis parisiens, non professionnels, ont, pour la première fois, l’occasion de respirer l’air pur : le film devient réalité. En septembre, le tournage, transporté à Nice, est arrêté par l’ordre de mobilisation qui concerne de nombreux membres de l’équipe (dont

René Clair sur le tournage d’Air pur à Argentat, photo Kitrosser, parue dans Pour vous le 2 août 1939.

le compositeur Maurice Jaubert, tué au front en 1940), et le film, pressenti pour la 1re édition du festival de Cannes (annulée), restera inachevé. René Clair aurait pu être le pionnier du cinéma néoréaliste français.

-je ? * s i u s i u Q Une femme de tête qui fait tourner celle des hommes, tout en étant elle-même menée par le « bon bout de sa propre déraison »… Elle naît le 28 novembre 1841 à Auzances (Creuse), des amours illégitimes entre Annette Colombier et un officier carliste réfugié en Limousin, Pablo Martinez. L’enfant dédaignée se promet de devenir une femme adulée. Adolescente, elle intègre le conservatoire, qui l’honore d’un 1er prix de tragédie. En 1870, George Sand la retient pour sa pièce L’Autre, avec Sarah Bernhardt. En 1880, alors que sa carrière patine, elle part en tournée outre-Atlantique avec la grande Sarah, qui vient de fonder sa compagnie. La cohabitation entre la diva et la starlette est désastreuse : au retour, Marie publie Le Voyage de Sarah Bernhardt en Amérique, 332 pages moqueuses qui suscitent l’ire de la Divine – laquelle réplique par des Mémoires de Marie Pigeonnier et intente un procès, qu’elle gagne. Marie renchérit avec les Mémoires de Sarah Barnum.

Édouard Manet, 1880, h/t, 53 x 34 cm, coll. Burrell, Glasgow.

Mais s’en prendre à l’« Impératrice du théâtre » revient à signer son arrêt de mort professionnel. Elle se tourne vers le roman, sans succès, et décède en 1910 à Garches, oubliée de tous. Un joli portrait par Édouard Manet lui garantit néanmoins le minimum de postérité vitale. *Je suis, je suis… Marie Colombier (1844-1910).

© Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, G. Beauvarlet

LES MISCELLANÉES DU FESTIN



TOUS LES PATRIMOINES EN REVUE

© Département de la Vienne

© Brissonneau

Brèves du

Rénovons le pont Henri-IV !

fondation-patrimoine.org

Bayonne PYRÉNÉES-ATLANTIQUES

Bacchanale basque

Le musée Bonnat-Helleu de Bayonne vient d’acquérir à Drouot une grande composition de Gabriel Deluc pour la somme de 5 500 €. La toile, intitulée Bacchanale (1911), vient rejoindre les quatre autres peintures de cet artiste de l’École de Bayonne conservées au musée. Formé par Léon Bonnat à l’École nationale des Beaux-Arts, Deluc connut une carrière aussi brève que prometteuse,

Châtellerault VIENNE

Une écritoire sortie de l’ombre

Le musée Bernard d’Agesci a sorti de ses réserves un ravissant bargueño, coffret de voyage espagnol du début du xviie siècle, dans lequel on rangeait documents et petits objets précieux. La tablette, qui permet de fermer le coffre en façade, servait d’écritoire. Recouvert de velours rouge, le bargueño cache 22 tiroirs dans son décor architecturé Espagne, xviie siècle, alliage ferreux, argent, représentant le temple de Salomon, aux or, bois, soie. Fonds ancien du musée Bernard appliqués d’or et d’argent délicatement d’Agesci de Niort, inv. 2013.0.9. ciselés. Il serait entré dans les collections du musée au xixe siècle, après avoir appartenu à la comtesse de Trémoille : on en trouve la trace dans un inventaire ancien du château de Thouars. Une minutieuse restauration a été menée : dépoussiérage, collage, comblement, nettoyage électrolytique du métal… L’objet, de grande qualité, est à nouveau manipulable et son décor lisible : il a pris place dans l’exposition permanente. Musée Bernard d’Agesci T. 05 49 78 72 00

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interrompue par sa mort prématurée au champ d’honneur en 1916. La toile représente un Bacchus éméché et ventripotent, juché sur un âne et entouré, comme il se doit, d’une myriade de bacchantes gagnées par la transe de la fête dionysiaque. La peinture se souvient des grandes pages mythologicopastorales d’Albert Maignan, mais la palette claire et légèrement bleutée y retrouve la douceur du symbolisme de Pierre Puvis de Chavannes.

Niort DEUX-SÈVRES

© Musée Bernard d’Agesci

La Fondation du patrimoine a lancé une collecte pour la rénovation du pont Henri-IV, classé au titre des Monuments historiques depuis 1913. L’objectif : atteindre 200 000 € pour compléter les fonds abondés par le Département de la Vienne, la Direction régionale des affaires culturelles et la Ville. La conception de cet ouvrage d’art exceptionnel pourrait être attribuée à Philibert Delorme, grand architecte et théoricien de la Renaissance, à qui l’on doit notamment le pont du château de Chenonceau. Son originalité réside dans sa symétrie et les deux tours rondes sur sa rive gauche qu’on ne retrouve pas chez son contemporain, le Pont-Neuf de Paris. Sa sauvegarde nécessite des travaux d’étanchéité et de ventilation des sous-sols, ainsi qu’une rénovation à l’identique du tablier. Les travaux, commencés en janvier, se poursuivront jusqu’en mars 2023.

Gabriel Deluc, Bacchanale, 1911, h/t, 161 x 250 cm, Bayonne, musée Bonnat-Helleu.


© Musée d’Aquitaine

TOUS LES PATRIMOINES EN REVUE

Bordeaux GIRONDE

Les décors de la Bourse maritime de Bordeaux entrent au musée d’Aquitaine Onze panneaux retraçant l’histoire du port de Bordeaux, autrefois dans les bâtiments de l’Union maritime et portuaire (UMPB), viennent d’être achetés par le musée d’Aquitaine. Ce décor avait été conçu en 1925 pour la nouvelle Bourse maritime (pastiche néo-xviiie siècle d’un pavillon de la place de la Bourse), située place Laîné, devant l’entrepôt du même nom. La Fédération maritime du port de Bordeaux commanda à deux peintres bordelais, Pierre-Albert Bégaud (25 ans) et Pierre-Louis Cazaubon (53 ans), le soin de décorer la salle de réunion. Le thème retenu fut celui du port de Bordeaux à travers les âges. Les douze panneaux (à l’origine) s’inséraient dans les boiseries dessinées par l’architecte Raoul Jourde, constituant une frise continue qui circulait en hauteur autour de la pièce. Plus qu’une

Pierre-Albert Bégaud, Batelier à la barre, 1926, h/panneau, 60 x 180 cm. Bordeaux, musée d’Aquitaine, inv. 2021.4.3.

restitution historique, il s’agissait davantage d’une évocation sentimentale et poétique, à travers le temps et au fil de l’eau, devant la rade de Bordeaux. Embarcations et personnages sont représentés au premier plan pour situer l’époque, tandis que la silhouette de la ville s’étire paresseusement en fond de composition. Sans opposer les deux peintres – car la frise constitue un ensemble homogène –, on peut différencier les manières des deux artistes. Dans la tradition des peintres de marine, Cazaubon privilégie les ambiances atmosphériques avec des ciels fondus et vaporeux, alors qu’avec un dessin plus ferme et une composition vigoureuse, Bégaud s’attache à décrire l’animation sur les quais. Cet ensemble cohérent, qui ne sera fort heureusement pas dispersé, trouve sa raison d’être au musée d’Aquitaine.

Saint-Jean-de-Luz PAYS BASQUE

Protection d’une crèche basque Réalisée vers 1935 d’après les dessins du peintre basque espagnol Ramiro Arrue et sculptée en bois patiné par le statuaire euskarien Lucien Danglade, la crèche située dans le croisillon nord de l’église Saint-Jean-Baptiste à SaintJean-de-Luz vient d’être inscrite aux Monuments historiques – à l’exception des rois mages rajoutés ultérieurement. Ce bel ensemble, habile synthèse entre le primitivisme des imagiers du Moyen Âge et l’épure de l’Art déco, sera prochainement restauré.

Limoges HAUTE-VIENNE

Une banquette Art nouveau refait surface à Limoges

© Bruno Beziat

Le musée des Arts décoratifs de Paris l’a préemptée le 30 novembre dernier, pour la somme de 136 400 €. Relégué dans la salle de billard de l’hôtel du porcelainier limougeaud Émile Gérard, directeur de la manufacture GDA, ce Eugène Gaillard, banquette de l’antichambre du pavillon « L’Art nouveau » Bing à l’Exposition universelle de 1900, noyer, velours de soie et feutrine, 280 x 305 x 103 cm. Musée des Arts décoratifs de Paris, inv. 2021.173.1.

meuble est une pièce unique conçue par l’architecte Eugène Gaillard (18621932) pour l’antichambre du pavillon « L’Art nouveau » du marchand Siegfried Bing, à l’Exposition universelle de 1900. Échangée à l’issue de l’exposition contre un lot de porcelaine, la banquette, dont on avait perdu la trace, a été retrouvée au hasard d’un inventaire : en excellent état, elle conserve même son tissu d’origine.

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TOUS LES PATRIMOINES EN REVUE

La Couronne CHARENTE

Les ruines renaissantes de l’abbaye Notre-Dame

Témoins des évolutions de l’art gothique du xiie au xvie siècle, les ruines de

l’abbaye seront restaurées en plusieurs

a débuté en décembre 2021. Bien

qu’utilisée comme carrière de pierres

de la Révolution à son classement aux

Monuments historiques en 1804, nous

pouvons toujours admirer la majesté de ses vestiges.

L’architecte Richard Rogers, emblème de l’architecture post-moderne high-tech et surtout connu pour la coréalisation du Centre Pompidou à Paris, était aussi l’auteur du tribunal judiciaire de Bordeaux, célèbre pour ses coquilles de bois dans lesquelles se trouvent les salles d’audience. Il nous a quittés le 18 décembre 2021, à l’âge de 88 ans.

Coll. CM Morillon

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La Rochelle CHARENTE-MARITIME

L’Olympia est sauvé

Cl. N. Aujoulat/MC

a constitution du fonds de l’écrivain Jean Vautrin (décédé à Gradignan en 2015) a été signée par la commune le 26 octobre. Convoité par la Bibliothèque nationale de France, il sera finalement conservé et traité par la médiathèque de Gradignan, où un premier don d’archives est entré dès 2016. Carnets de notes, scenarii, correspondance personnelle et professionnelle, dessins seront numérisés et consultables par tous les usagers, sur place ou à distance.

sécurisation des maçonneries)

Le Buisson-de-Cadouin DORDOGNE

La grotte de Cussac en images

Représentation de cheval gravée au centre du Grand Panneau. Grotte de Cussac, Le Buisson-de-Cadouin.

Considéré comme le « Lascaux de la gravure », le site abrite des centaines de gravures paléolithiques et des dépouilles humaines vieilles de 29 000 ans, placées dans des endroits inaccessibles. Jusqu’ici, seuls les scientifiques pouvaient les contempler. Le grand public peut désormais les admirer dans le film documentaire de la Périgourdine Pauline Coste, Dames et princes de la Préhistoire (2021), grand prix du film archéologique au festival de Narbonne. Il raconte l’éveil de notre conscience, au fil du xxe siècle, à l’existence de sociétés et modes de pensée complexes dès la Préhistoire. 10

Un moment menacé, le mythique cinéma Olympia de La Rochelle, installé depuis 1913 place de Verdun (même immeuble que le non moins mythique Café de la Paix), est désormais préservé grâce à son inscription in extremis (façade comprise) aux Monument historiques intervenue le 7 décembre dernier. La restauration, qui ne concerne que la salle principale (les deux autres deviendront des appartements), avec ses beaux décors en bois et stuc représentant coquillages, anémones de mer ou un masque de Neptune, devrait aboutir à une réouverture à la fin de 2023.

Coll. part.

© Stéphane Charbeau

phases : la première (dévégétalisation,



au titre des Monuments historiques intervenues au cours du 3e trimestre 2021.

Inscriptions

d’inscription couvrant l’ensemble du site fortifié.

Les halles d’Airvault (79) Les halles ont été reconstruites en 1846, sur l’emplacement de l’ancien marché médiéval, par l’architecte PierreThéophile Segretain (1798-1864). Il s’agit d’un bâtiment néoclassique, long et étroit, entièrement ouvert sur l’extérieur par des séries d’arcades donnant une certaine monumentalité à l’édifice.

© Château de Panloy

© DD17

La minoterie à Bourg-Charente (16) L’ancien moulin à blé Haut Veillard a été remplacé par une minoterie construite en 1934 et remaniée à différentes époques. L’abbaye de Brantôme (24) Extension de la protection par inscription des parties non protégées du bâtiment monastique et du presbytère. Le château de Panloy à Port d’Envaux (17) Le château de Panloy fut reconstruit au début du xviie siècle et remanié en 1772. Couvert d’ardoise, il s’inscrit dans un plan en U, composé d’un corps de logis campé de deux ailes en décrochement formant pavillons. Le château, avec son mobilier, appartient à la même famille depuis sa construction.

Le château Saint-Denis, SauveterreSaint-Denis (47) Construit au cours du xixe siècle, le corps de logis central, à un seul niveau, couvert d’un toit de tuile mansardé, est cantonné de deux larges pavillons à deux niveaux. Les communs, incluant une orangerie, se déploient selon un plan en U.

D. R.

Le château de Montaner (64) Classée partiellement MH en 1980 (donjon et ruines de l’enceinte), inscrite partiellement en 2021, la forteresse du xive siècle construite par Gaston Fébus bénéficie désormais d’une extension

D. R.

Le Garage moderne, quartier des bassins à flot, Bordeaux (33) Le Garage moderne, rue des Étrangers, est un des derniers vestiges du passé industriel du quartier Bacalan à Bordeaux. Il s’intégrait dans la vaste zone occupée par les établissements de la Dyle, spécialisés dans les constructions métalliques (fabrication ferroviaire, navale et aéronautique). Désaffecté dans les années 1990, le bâtiment rescapé, qui a conservé son volume et sa structure interne, est occupé depuis 2003 par l’association Le Garage moderne qui en a fait un lieu culturel alternatif.

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© Nicolas Faulle

TOUS LES PATRIMOINES EN REVUE

PATRIMOINE NATUREL

Redécouvrir le ciel étoilé au Parc naturel régional de Millevaches Où sont-ils passés, les beaux ciels étoilés ? En raison de la pollution lumineuse, ils deviennent une denrée rare, particulièrement dans les zones urbanisées : près d’un tiers de la population mondiale ne peut plus admirer la Voie lactée.

Préserver une ressource

C’est pourquoi l’International Dark-Sky Association (IDA) a vu le jour aux ÉtatsUnis en 1988. Elle a notamment créé le label RICE, ou Réserve internationale de ciel étoilé. Situées dans des espaces publics ou privés de grande étendue, ces dernières doivent jouir d’un ciel étoilé d’une qualité exceptionnelle et qui fait l’objet d’une protection à des fins scientifiques, éducatives, culturelles ou environnementales*. L’Unesco reconnaît d’ailleurs le ciel étoilé comme patrimoine depuis 1992.

Après trois ans d’efforts pour répondre aux normes du label – rénovation et adaptation de l’éclairage public pour l’économie d’énergie, étude de la biodiversité nocturne, sensibilisation du public à l’observation de la vie nocturne –, le Parc naturel régional de Millevaches en Limousin est devenu la 4e RICE française et la 19e au monde, le 30 novembre 2021. Sa « zone cœur » d’une étendue de 194 m2, entourée d’une « zone tampon », a la particularité unique d’abriter neuf communes. On peut y observer par temps clair plus de 2 000 étoiles à l’œil nu – contre 70 à Paris et ses abords –, et la Voie lactée est bien visible.

Destination nuit noire

Le parc s’engage à réduire la pollution lumineuse sur dix ans, avec la mise en place de « trames noires » pour la circulation de la faune nocturne, rendue

vulnérable face à ses prédateurs dans les environnements éclairés. Il souhaite également devenir une destination de tourisme durable. La création de sites d’observation itinérants, appelés « sous les étoiles », encouragera la découverte scientifique. Mais il s’agit aussi de mettre en valeur la culture locale liée à la nuit, en organisant des veillées traditionnelles lors desquelles les légendes limousines seront contées en occitan. Cette médiation sera complétée par des programmes éducatifs menés avec les scolaires, et l’accueil d’un artiste contemporain en résidence durant l’année 2022 pour la réalisation d’une œuvre en rapport avec cette précieuse ressource « nuit ». Lucie Mugnier *Définition de l’IDA.

pnr-millevaches.fr darksky.org

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TOUS LES PATRIMOINES EN REVUE

Cl. L

Cl. La Colporteuse

a Colporteuse

DEUX-SÈVRES

La Colporteuse, apôtre du partage Bénévole pendant une dizaine d’années, Guillaume Miot est aujourd’hui salarié de La Colporteuse, association installée au château de Sanzay dans les Deux-Sèvres. Ce spécialiste de l’agroécologie et de la permaculture évoque les objectifs de l’association, dont la charte s’intitule « Recette du bien-vivre ensemble ». Le mythe fondateur de l’association ressemble à s’y méprendre à une vieille légende. Un jour, trois compères franchirent les remparts du château médiéval de Sanzay et y découvrirent un grimoire narrant l’histoire de Radulphe. Ce seigneur du xiiie siècle désirait faire de sa forteresse une enceinte chaleureuse où vagabonds et bourlingueurs viendraient s’abriter, se restaurer et, surtout, deviser gaiement. Le trio, séduit par cette philosophie, fit sien le mot d’ordre de ce saint patron de la vie associative : « Mon pontlevis ne sera jamais fermé » ! Pour les « colporteurs », il ne faut pas chercher à démêler le rêve de la réalité. Mais il fallait bien plus qu’un coup de baguette magique pour redorer le blason du vieil édifice qui, au fil des siècles, affronta les épreuves (assauts ennemis, incendie de 1793, ravages du temps). Inscrit au titre des Monuments historiques 14

dès 1985, il reste inoccupé des années durant. En 2007, La Colporteuse décide de l’investir pour de bon. « Le château prenait l’eau, les pierres s’éboulaient… Maçonnerie, couverture, enduits : il y avait beaucoup à faire ! » témoigne Guillaume. La bâtisse est délestée de ses atours de forteresse : à la place du pont-levis, une passerelle fixe donne accès à la cour du château, véritable agora moderne.

Renouer avec la nature…

Ce territoire onirique ravive l’imaginaire des contes de fées. Par-delà la fantaisie de la bâtisse réaménagée, c’est de l’opulente nature qu’irradie la magie. Les douves, toujours en eau, sont classées « Espace naturel sensible » par le Conseil départemental depuis 2013. Tout autour, serpente un sentier d’interprétation jalonné de panonceaux informant le promeneur sur la faune et la flore locales. L’association, qui accueille le club Connaître et Protéger la Nature, invite à découvrir la biodiversité établie dans les douves. Naturalistes en tout genre viennent régulièrement inventorier les espèces présentes ou initier les curieux. Il s’agit, par l’éveil des consciences, de recouvrer ce lien trop souvent distendu avec la nature. Depuis plus d’un an, l’association est reconnue « École de la transition écologique ». Un jardin partagé d’1 ha, où Guillaume transmet son savoir, borde l’édifice : « On y organise des animations adressées à un public divers, allant des néophytes aux plus expérimentés. » Dans la cour, une miellerie agrémentée d’un rucher-école, où collaborent apiculteurs amateurs et confirmés. Le matériel pour l’extraction du miel est mutualisé, tandis

que la cire d’abeille est transformée en savons. Le tiers-lieu parvient à s’autofinancer partiellement par la vente de miel, savons, plants, ou plus récemment de mobilier en matériaux recyclés. Dans cette logique d’économie circulaire, rien ne se perd, tout se transforme !

… et avec son semblable

Découverte et partage, telles sont les clefs de l’association. Un partenariat est établi avec le réseau Rempart, qui réunit des bénévoles internationaux sur des chantiers de restauration du patrimoine. L’association travaille en outre avec la Mission locale de Bressuire : des jeunes en réinsertion découvrent, à travers une myriade d’ateliers (apiculture, menuiserie, agroécologie, etc.), des alternatives pour l’avenir. Mattieu Bernardin, cofondateur de La Colporteuse, évoque une « association d’éducation populaire ». Certaines animations sont planifiées, mais beaucoup s’improvisent au débotté, selon les envies du moment. Les locaux peuvent également soumettre leurs idées. « Comme le château est excentré, c’est aussi à nous d’aller vers eux », explique Guillaume. Les membres de l’association remplissent leur fonction de « colporteurs » en pourfendant l’immobilisme : leurs caravanes itinérantes se rendent dans les communes adjacentes pour y essaimer des rêves. Aujourd’hui, l’association compte plus de 250 adhérents. « Ce qui a commencé comme un projet utopiste et marginal reçoit maintenant une réelle reconnaissance. » L’association espère tisser des liens toujours plus forts et plus nombreux. • Avril Gérard



ARCHITECTURE CULTE

La villa Salesse

131 boulevard de la Plage, Arcachon GIRONDE 1854 -

Aujourd’hui enchâssée dans un environnement urbain quelque peu ingrat, la villa Salesse, l’un des plus anciens vestiges de l’architecture balnéaire à Arcachon, résiste aux assauts du temps et des modes… mais pour combien de temps encore ?

Élégante, délicate et toute blanche, la villa, située sur le boulevard de la Plage, est tournée vers la mer. JeanEugène Salesse, négociant du quartier des Chartrons à Bordeaux, la fit construire en 1854, huit ans après son mariage avec Étiennette Tulèvre. Leur fille Geneviève, qui épousa le négociant bordelais Georges-Victor Calvé, en hérita avec son époux. Depuis lors, la maison est restée dans la famille.

Une habitation simple, saine et claire

Le chalet (le terme de villa sera utilisé vers 1890) offre toutes les caractéristiques d’une maison de villégiature. Cherchant à échapper à l’air vicié de la ville, il est implanté, à l’origine, sur un terrain dégagé, battu par les vents et orienté vers la mer, rompant avec un environnement urbain classique. Son lien privilégié avec la nature est renforcé par un indispensable jardin placé à l’avant, qui donne accès à la plage et s’inscrit dans la mouvance hygiéniste de l’époque : le corps de l’habitation est entouré d’un portique à colonnades périptère (sur les quatre faces de la maison), pour s’abriter du soleil ou des intempéries tout en permettant d’apprécier la vue sur le paysage. Construite de plain-pied, elle évite tout effort : c’est une maison de repos. Enfin, 136

La villa Salesse avec vue sur la mer.

de larges baies font profiter de l’air marin et un lanterneau couronnant le toit de tuiles laisse pénétrer la lumière du jour. Le chalet en pierre est donc entièrement enveloppé par une galerie couverte en bois qui en constitue l’unique décoration, se résumant à une balustrade à clairevoie, de fines colonnettes et une corniche festonnée d’une guirlande continue en bois découpé. Cette sobriété – que l’on peut qualifier de néoclassique – tranche catégoriquement avec l’exubérance, la fantaisie et la recherche de pittoresque des chalets construits plus tardivement dans la Ville d’hiver. On ne trouve ici ni volumes dissymétriques, ni riches ornements, ni plaquages de citations historicistes, ni polychromie de matériaux variés. Cette simplicité et cet équilibre des proportions allant jusqu’à l’épure relèvent

davantage d’un néo-palladianisme, qui s’impose encore dans la première moitié du xixe siècle pour les maisons de campagne. Ainsi, la symétrie du plan centré s’organise à partir d’un carré réservant une large travée centrale, axiale et traversante, aux pièces de réception, reléguant les chambres de part et d’autre. Côté sud, deux ailes basses, égales et symétriques, sont destinées à la cuisine et la buanderie. Fonctionnelle, agréable à vivre et idéalement située, la villa Salesse n’a pas manqué de séduire de riches estivants lorsqu’elle a été mise en location : le marquis de Montholon en 1901, le comte de Moussac en 1902, Mme de Castelbajac en 1920 ou des artistes comme Salvador Dalí en 19391.


ARCHITECTURE(S)

Les Dalí à la villa Salesse

Dès l’entrée de la France en guerre, en 1939, Salvador Dalí et sa « muse » Gala quittent Paris, cherchant un nouveau lieu d’exil. Dans son roman autobiographique, La Vie secrète de Salvador Dalí (1947), il explique comment leur choix s’est porté sur Arcachon : « J’interrogeais la carte pour ma campagne d’hiver, essayant de combiner un lieu éloigné d’une invasion possible et mon désir de bien manger. Je mis finalement le doigt sur un des points nostalgiques de la cuisine française : Bordeaux. Les Allemands y arriveraient en dernier, au cas, qui me paraissait improbable, où ils seraient les vainqueurs. De plus, Bordeaux signifie les bons vins, le civet de lièvre, le foie de canard aux raisins, le canard aux oranges et les huîtres d’Arcachon. Arcachon ! je venais de trouver l’endroit exact, à quelques kilomètres de Bordeaux. »

Gala et Salvador Dalí, Leonor Fini et André Pieyre de Mandiargues devant la villa Salesse, vers 1940.

Aussi, en raison de son caractère architectural pionnier et de sa rareté (donc de sa préciosité), ainsi que par la fréquentation de ses hôtes illustres, ce beau lieu patrimonial que constitue la villa Salesse mériterait certainement une inscription à l’inventaire des Monuments historiques.

Le couple loua à Henri Calvet la villa du 131 boulevard de la Plage, du 2 septembre 1939 au 21 juin 1940. Ce long séjour de dix mois sur le Bassin fut égayé par la présence d’autres amis artistes qui avaient également fui la capitale et fréquentèrent la villa Salesse. Ainsi Coco Chanel – avec qui Dalí travaillait pour le ballet de La Bacchanale2 – venait-elle en voisine avec Marcel Duchamp, lequel passa son été 1940 à jouer aux échecs avec Samuel Beckett. Quelques jours plus tôt, le peintre avait écrit à « la grande Mademoiselle » ses impressions arcachonnaises dans un délire surréaliste : « Tous les soirs, les moustaches de Nietzsche décoiffent comme un immonde ballet, traînent avec le vent du Bassin d’Arcachon, le long du boulevard de la Plage, elles agrippent toutes les sauterelles de mon enfance, tous les noyaux de raisins, tous les os des melons3… » De la villa voisine Charlotte, venaient André Pieyre de Mandiargues et sa compagne d’alors, la peintre Leonor Fini, qui avait l’avantage de posséder une voiture lui permettant de convier les Dalí à des virées gastronomiques dans les meilleurs restaurants de Bordeaux, tels Le Chapon fin ou le Château Trompette. Dalí lance des invitations à ses amis,

dont Paul Éluard, à qui il écrit dès 1939 : « Nous venons de louer une grande villa, si vous venez avec Nusch [la compagne d’Éluard, Maria Benz], je suis sûr que vous y serez comme un poisson dans l’eau. Venez, venez ! Signé Ton petit Paris4. » Désormais familiers de la villa Salesse, les Dalí pensent y revenir, comme l’indique une lettre non datée mais dans laquelle le peintre montre qu’il a ses habitudes et quelques exigences : « Cher Monsieur Calvet, nous sommes en Espagne chez mon père, en attendant un bateau commode pour aller aux ÉtatsUnis pour mon exposition de peinture ; comme on risque encore [d’attendre] longtemps, il est très probable que nous retournerons encore au 131 boulevard de la Plage pour passer quelque temps, car il nous faudra aussi aller à Paris pour résoudre plusieurs questions [relatives] à notre appartement làbas. Je vous serais très reconnaissant si vous pouviez dire à Jénie [?] qu’elle déballe l’envoi de la caisse de tableaux, aussitôt que le trafic ferroviaire offrira toutes les garanties pour le transport de ceux-ci. Aussi, je vous prie de lui dire que tout soit en très bon ordre et très propre, car si nous venons, mon père nous accompagnera et dans ce cas, je voudrais que la maison se trouve dans les meilleures conditions5. » Au cours de son séjour girondin, Salvador Dalí réalisa plusieurs tableaux importants dont un énigmatique portait de Shirley Temple, dévorant, telle une sphinge famélique, des ossements sur une plage à marée basse.• Dominique Dussol 1. Cf. M. Boyer, M.-C. Rouxel, 2015, p. 65. 2. Ballet de Léonide Massine et Salvador Dalí, sur un extrait du premier acte de Tannhäuser de Richard Wagner. 3. Lettre de Dalí à Coco Chanel, Arcachon, v. janv. 1939, présentée à l’Hôtel Drouot à Paris en nov. 2007. 4. Lettre de Dalí à Paul Éluard, accompagnée d’un dessin sur lequel figure peut-être la villa Salesse, 1939, mise aux enchères à Paris en 2018. 5. Lettre de Dalí à Henri Calvet, non datée, coll. part.

À lire . Isabelle Dotte, Architectures balnéaires à Arcachon, La Geste, 2021 ; « Arcachon aux origines du balnéaire », le festin, n° 110, p. 189-190. . Michel Boyer et Marie-Christine Rouxel, Villas d’Arcachon, un siècle d’histoires, La Geste, 2015, p. 64-65.

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ARCHITECTURE CONTEMPORAINE

Cambo-les-Bains PAYS BASQUE

Elondare Inaki Noblia

Sur les hauteurs de Cambo-lesBains, l’architecte Inaki Noblia sculpte un abri dont la rusticité organique résonne avec le site. L’observation de nos villes mène bien souvent à s’interroger sur les possibilités de bâtir à l’écart des pratiques constructives dominantes. Entre le poids de la réglementation et le déterminisme productif, l’espace de manœuvre de l’architecte semble étroit. Il existe pourtant, appelant à lui un éventail de prescriptions : matériau biosourcé, réemploi, recyclage, économie. C’est aussi l’idée d’une architecture dont la résonance avec le site est telle qu’elle ne pourrait être érigée ailleurs. Au Pays basque, l’architecte Inaki Noblia a inventé une économie circulaire autour de ses projets qui, loin d’être 138

anecdotiques, sont l’esquisse d’un autre monde bâti. Sur la colline de la Bergerie à Camboles-Bains, il a enraciné un belvédère qui, initialement, ne devait être qu’un simple refuge pour l’observation des ruches. Glissé en aval du sommet, auquel il laisse la primeur, l’édicule sillonne dans la futaie en déroulant un squelette de bois dont chacune des pièces fut dessinée, ciselée et assemblée par l’architecte et ses collaborateurs dans leur agencehangar. Avec des essences de bois choisies en fonction des réserves des scieries locales (chêne, acacia, mélèze, peuplier, sapin non traités), cet abri privé de lignes droites compose un paysage dans le paysage qui enveloppe le visiteur et le connecte au site. Dans le présent débat sur la transition socioécologique, ce projet met en avant un nouveau mode de pensée selon lequel la ressource de l’architecture est à la fois matérielle (disponibilités locales), contextuelle, éthique et symbolique (la relation de l’architecture et, à travers elle, de l’homme, au monde vivant et au paysage).

www.inakinoblia.com Commanditaire : Conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques

1er prix régional de la Construction bois 2020


ARCHITECTURE(S)

Archiac CHARENTE-MARITIME

Chai du Domaine de Fontanière ATELIERURAL ARCHITECTURES Le nouveau chai du Domaine de Fontanière réhabilite un matériau : le pisé, qui, omniprésent dans l’histoire de l’architecture depuis l’Antiquité, témoigne d’un geste bâtisseur justifié par la nécessité d’utiliser les ressources naturelles localement disponibles. Actuel objet de recherches appliquées (citons le laboratoire CRAterre de l’École nationale supérieure d’architecture de Grenoble) et de publications (Jean Dethier, Habiter la terre), la terre crue sort de l’oubli en France pour rejoindre les préoccupations de l’écoconstruction. Au sein de l'agence Atelierural Architectures, installée à Saint-Sauvant, Pascal Wilke en défend l’usage, lui qui fit une partie de son cursus à l’ENSA de Grenoble et voyagea en Inde et au Burkina Faso. Après dix ans d’exercice, ce chai de stockage d’eau-de-vie est sa première œuvre en terre, qui exprime un engagement collectif : celui de l’architecte (et son équipe), du maître d’ouvrage qui refuse la pierre et le bois (les deux autres

propositions de l’architecte) et des artisans venus exceptionnellement d’Isère. Ainsi réalisé malgré l’absence de filière terre en Charente-Maritime, le chai est une œuvre pionnière (le pisé était jusque-là réservé au stockage du vin), qui conjugue créativité alternative et performances thermiques. Près d’un étang, le plan quadrangulaire est couvert d’une toiture monopente en tuile inspirée des architectures traditionnelles charentaises et repose sur une charpente métallique. L’édifice dévoile un soubassement maçonné associé à une coque intérieure de béton, qu’imposent les normes de sécurité et le passage des engins de transport. L’épais parement en

pisé (40 cm) est réalisé avec la terre rouge d’une carrière proche d’Albi, mélangée, sur le chantier, à des sables et graviers gris, pour aboutir à une formulation idéale, élastique et pérenne. La matière est versée entre deux banches par couches compressées successives. Construire en terre signifie que le territoire géographique est la ressource principale du projet. Si le recours au local ne représente pas l’alpha et l’oméga de l’architecture, il permet toutefois de dépasser le système productiviste qui conditionne le bâti pour renouer avec d’autres héritages culturels. À l’aune des préoccupations environnementales, réside là une autre forme de progrès. www.atelierural.com Maître d’ouvrage : GFA de Fontanière Livraison : 2019

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L’écho des CAUE

Les Conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement défendent le patrimoine architectural et paysager de Nouvelle-Aquitaine.

CAUE de la Creuse

Le schéma départemental du tourisme est le cadre d’action destiné à traduire et mettre en œuvre la politique touristique pour les années à venir. Afin d’élaborer le prochain schéma, Creuse Tourisme a organisé des réunions de concertation avec l’ensemble des acteurs touristiques du département. Le CAUE de la Creuse a ainsi animé un atelier autour du cadre de vie local. Après avoir confronté l’image véhiculée, celle d’une campagne idéale, à la réalité du terrain parfois contradictoire, ont été évoqués les leviers mobilisables pour préserver et valoriser ce cadre de vie au bénéfice du tourisme. caue23.fr

CAUE des Deux-Sèvres

Dans le cadre du label Villes et villages fleuris, le CAUE 79 et le Département ont proposé à l’automne 2021 des conférences « Richesse(s) de nos bourgs ». L’objectif était de faciliter la prise de conscience des élus sur les qualités de leurs bourgs, qui évoluent dans un contexte rural en mutation. Sandra Benhamo, paysagiste, Valérie Jousseaume, géographe et Franck Buffeteau, urbaniste, sont intervenus sur la poésie des aménagements ruraux, les mutations sociales, le désir de campagne, la diversité et l’unité des territoires deux-sévriens.

Tulle CORRÈZE

De la « Manu » à la « Fac » Une ambitieuse opération d’aménagement a été entreprise dans la ville-préfecture de Tulle : un campus universitaire est créé sur le site emblématique de la manufacture d’armement. L’établissement industriel, situé dans le quartier de Souilhac, a façonné la ville pendant quatre siècles. Érigés en 1777 sur les ordres du roi Louis XVI, ses bâtiments s’installent dans les moulins de Souilhac, Fès et Reygnac situés le long de la Céronne. L’emplacement est stratégique car l’eau de la rivière offre l’énergie nécessaire au bon fonctionnement des machines. L’acier sert à fabriquer les fusils, le bois est utilisé pour les crosses et le granite pour les meubles. L’entreprise corrézienne bénéficie progressivement de bâtiments propres qui lui assurent un meilleur rendement. Pendant la Première Guerre mondiale, le site emploie jusqu’à 47 000 ouvriers. Il connaît son apogée dans l’entredeux-guerres. Son activité génère, en 1940, la construction d’une trentaine de baraquements dans la cité ouvrière de Virevialle. Encore actif au début de la guerre froide, il ferme définitivement en 1990. 140

caue79.fr Vue aérienne de la manufacture, entre 1979 et 1984.

En 2017, l’agglomération a pour ambition de donner un nouveau souffle à ce lieu chargé d’histoire. L’objectif de la programmation urbaine consiste à réinvestir le site afin de mettre en place une synergie entre les mondes de l’économie, de la formation et de l’enseignement supérieur. En créant un véritable tiers-lieu, il s’agit d’ouvrir le quartier sans faire table rase du passé. La conservation du patrimoine, la réhabilitation d’un lieu de mémoire, la rénovation énergétique et l’intégration de constructions neuves sont autant de sujets abordés. Les projets structurent dorénavant le lieu dans une diversité de formes et de typologies bâties. En 2020, Tulle a donné vie à un quartier ouvert, habité et traversé par son histoire. • CAUE 19 caue19.fr

CAUE des Pyrénées-Atlantiques

Un projet de valorisation du col du Soulor, entre sobriété et identités, est en cours de réflexion. Le col du Soulor symbolise à lui seul la rencontre entre la nature et les hommes, qu’elle soit dans l’effort, le travail ou le loisir. Perçu comme une halte sur la route thermale, ce site pastoral vivant souffre de maux essentiellement liés à la surfréquentation estivale. Pour y remédier, le futur projet de valorisation, forgé sur la coopération des acteurs institutionnels et sur la concertation avec les usagers, soutenu par les CAUE 64 et 65, mettra à l’honneur des concepts forts : celui de « front de montagne », de « cicatrisation paysagère » et de scénographie dédiée à l’identité, l’histoire du lieu et des habitants de la vallée de l’Ouzoum et du Val d’Azun. Maîtrise d’ouvrage : Communauté de

communes du Pays de Nay & Communauté de communes Pyrénées Vallées des Gaves. Maîtrise d’œuvre : groupement EMF

(mandataire), D’une ville à l’autre, IDEIA. caue64.fr



Si, de son vivant, Rosa Bonheur eut quelques déceptions avec Bordeaux, sa ville natale, cette dernière se rattrape en proposant une grande rétrospective à l’occasion du bicentenaire de l’artiste peintre et sculptrice animalière. Vingtcinq ans après l’exposition pionnière de 1997, le musée des beaux-arts apporte un éclairage nouveau, à la lumière de documents inédits et de réflexions sociétales en prise avec notre époque – notamment sur la place des femmes dans l’art et leur émancipation. Rassemblant près de 200 œuvres – peintures, études et esquisses (récemment découvertes au château de By), sculptures, photographies et documents –, l’exposition bénéficie de partenariats avec le château-musée Rosa Bonheur de Thomery, le musée des Peintres de Barbizon ou des prêts

Rosa Bonheur, La Foulaison du blé en Camargue, 1864-1899, h/t, 313 x 651 cm, Bordeaux, musée des beaux-arts.

de collections publiques ou privées européennes et américaines. Voilà de quoi redonner son rang à cette personnalité, plus célèbre outreAtlantique que dans son landerneau natal. Présentée à la galerie des beaux-arts et dans l’aile nord du musée, l’exposition se déroule du 18 mai au 18 septembre,

avant d’être présentée au musée d’Orsay, à l’automne. « Rosa Bonheur (1822-1899) » Du 18 mai au 18 septembre 2022 Galerie et musée des beaux-arts de Bordeaux musba-bordeaux.fr T. 05 56 10 20 56

© Association Pollen. All rights reserved

Rosa Bonheur, retour au bercail

© Musée des beaux-arts de Bordeaux, cl. F. Deval

Bordeaux GIRONDE

Biron DORDOGNE Vincent Bersars, Lou Lébérou Meets The Snake of Death, 2008.

Depuis 2002, le Fonds départemental d’art contemporain (FDAC) de la Dordogne constitue une collection destinée à soutenir et mettre en valeur le travail d’artistes locaux. La grande exposition rétrospective de 2022 revient sur l’ensemble de ses acquisitions. Les 97 œuvres sont réparties entre sept chapitres qui dressent le panorama de la création contemporaine périgourdine, mettant en exergue les préoccupations communes d’artistes aux modes d’expression très divers : conscience et violence ; vanité ; corps et âmes ; paysages habités et temps urbains ; paysages et voyages, reflets de l’âme ; s’abstraire du réel immédiat ; l’artiste en préhistorien, et nouvelles peintures d’histoire et de mythologie. « États d’âmes. Dix ans d’acquisitions du Fonds départemental d’art contemporain » Jusqu’au 6 juin 2022 Château de Biron chateau-biron.fr T. 05 53 63 13 39 142

Moolinex et Laetitia Raphael-Leygues, Le Plan, 2021.

Monflanquin LOT-ET-GARONNE

Pas de plan B

© FDAC photo B. Dupuy

Supplément d’âme au FDAC

Voilà 30 ans que l’association Pollen organise ses résidences d’artistes au cœur de la petite bastide de Monflanquin. En cette date anniversaire, elle a offert à la commune une œuvre inaugurée en décembre dernier, place Yves-Belségur. Né d’une collaboration entre le plasticien Moolinex (en résidence en 2018) et la mosaïste pennoise Laetitia Raphael-Leygues, Le Plan représente la ritournelle infernale du métro-boulotdodo. Chaque tesselle est le pixel d’un jeu vidéo macabre dénonçant la cadence capitalistique. Structure plane aux lignes orthogonales (clin d’œil à l’architecture de la bastide), qui scelle l’absence de point de fuite. Pour dédramatiser, il reste, heureusement, l’humour noir. Association Pollen pollen-monflanquin.com T. 05 53 36 54 37


© RMN-Grand Palais / T. Le Mage © Succession Picasso 2022

La Rochelle CHARENTE-MARITIME

Pour cette exposition-dossier qui questionne l’évolution physique du littoral de part et d’autre de l’Atlantique, le musée du Nouveau Monde et le musée des beaux-arts posent un regard croisé sur les œuvres de leurs collections. Du xviiie au xxe siècle, les travaux de peintres charentais et vendéens sont juxtaposés à ceux de cartographes des Antilles et de la Nouvelle-France, relevées à la faveur d’installations militaires européennes. Ces visions de territoires toujours mouvants sont confrontées aux données scientifiques les plus récentes et aux évidentes évolutions que les changements climatiques, la montée des eaux et l’érosion du littoral apporteront à ces espaces conquis et transformés de longue date par l’homme, au fil de ses activités (récolte du sel, ostréiculture, commerce, tourisme…). Comment faire preuve de résilience face au monde de demain ? C’est tout l’enjeu de cette exposition.

D’ap. Pablo Picasso, Nature morte, 1923, lithographie d’après la peinture du Kunstmuseum de Winterbur 50,4 x 59,2 cm. Musée national Picasso Paris.

© FRAC Poitou-Charentes

Atlantique et outreAtlantique, le littoral mouvant

Bordeaux GIRONDE

Nadira Husain, Performative Body – Embodied Performances (Red), 2018, collection FRAC PoitouCharentes.

Angoulême CHARENTE

Modernes Pénélope

La nouvelle exposition du FRAC PoitouCharentes à Angoulême invite à découvrir des pièces fraîchement intégrées à sa collection. Les Paradoxales, tel est le nom qu’arborent ces dix-sept créatrices féministes européennes, unies par une ambition commune : détricoter l’histoire. Les arts « féminins » qui y sont invoqués (couture, broderie, tricot ou encore aquarelle) incitent le spectateur à questionner son rapport au corps et aux normes genrées. Ces minutieux « ouvrages de dames » débordent du cadre domestique pour investir tapageusement la scène politique. Ainsi détourné, l’ornement ne vise plus l’embellissement mais la subversion. Le collectif Škart, entre autres, invite des brodeuses serbes à user de leur art pour pointer du doigt les affres du capitalisme. Tout comme la bien-aimée d’Ulysse, ces Pénélope modernes font de leurs créations le symbole d’une lutte contre le patriarcat. Le fil rouge de cette exposition, c’est celui de la sororité.

« Paysages atlantiques, et demain ? » Jusqu’au 1er mai 2022 Musée du Nouveau Monde T. 05 46 41 46 50

Ernest Chevalier, Marais salants, vers 1910, h/t, 89 x 117 cm, La Rochelle, musée d’OrbignyBernon.

© Max Roy

« Paradoxales » Jusqu’au 3 octobre 2022 FRAC Poitou-Charentes, site d’Angoulême frac-poitou-charentes.org T. 05 45 92 87 01

La Cité du vin convie Picasso à sa table

À la faveur de quelque 80 toiles, dessins, gravures et céramiques, l’exposition met en lumière les relations symboliques ou formelles que l’artiste a entretenues avec le vin et les alcools populaires. Le parcours, jalonné de cinq séquences chrono-thématiques, puise à l’intarissable creuset d’inventivité de sa production pour distinguer ce qui tient du motif de ce qui relève du sujet. L’expérience cubiste montre que Picasso pense l’objet plus qu’il ne le voit et les natures mortes de cette période mettent en scène des équivalences plastiques au spectacle du réel. Pour exprimer la verticalité dans la composition, tel aplat sera nommé « bouteille », tandis que trois griffures incurvées tiendront le rôle du « verre ». La peinture nous rappelle ici qu’elle est un condensé de la raison et de la condition humaines, posé là simplement sur une table de bistrot. Mais qu’importe le flacon puisqu’avec Picasso, l’ivresse est créatrice et trouve son expression dans l’aventure de la forme réinventée, revisitant au passage les mythes fondateurs de l’art occidental, de Bacchus et ses fêtes orgiaques – prétexte à des entrelacs de figures exacerbés – aux scènes christiques de partage et de sacrifice, contenues à elles seules dans la symbolique coupe de vin échangée. Au final, c’est bien à une fête de l’esprit et du regard que la Cité du Vin nous invite, agapes chorales puisqu’aux œuvres de Picasso répondent en chemin celles de quelques artistes invités. « Picasso, l’effervescence des formes » Du 15 avril au 28 août 2022 Cité du Vin laciteduvin.com T. 05 56 16 20 20 143


Littérature Sciences humaines

Pyrénées. État des lieux Jean-François Soulet (dir.), éd. Cairn, 630 p., 45 €

Une somme sur les sommets : c’est l’ambition de ce livre rigoureux, dense et technique, digne successeur de l’ouvrage-maître de François Taillefer paru en 1974. Cet état des lieux de différentes sciences, appliquées au versant français des Pyrénées et à son piémont, associe les études de spécialistes de domaines variés – aménagement des territoires, archéologie, patrimoine, géologie, histoire de l’art, littérature, linguistique… – afin de révéler un visage pyrénéen en constante évolution. L’objectif : montrer la nécessité d’une réflexion face aux enjeux de demain pour ce territoire qui ne se transforme plus qu’à l’échelle des temps géologiques, mais mute désormais à vitesse humaine.

Bélhazar

Jérôme Chantreau, éd. Phébus, 320 p., 19 € Cela se passe en Bretagne. C’est écrit à Bidart, par le narrateur qui est aussi l’auteur. Lequel a tout perdu : foyer, maison, métier – et apprend à vivre sans. Sans Bélhazar. À distance, avec d’incessants allers-retours dans la géographie et dans le temps. L’histoire de ce gamin de 18 ans, promise à de beaux lendemains, s’interrompt brutalement. Suicide ou accident, voire bavure policière, on ne saura pas, l’affaire est classée sans suite. Mais le mystère de cette mort renvoie à celui de la vie de cet adolescent à l’intelligence et à la sensibilité hors normes. Le fait divers se métamorphose en tragédie, en mythe ou parabole, comme l’enfant de La Mort de Jésus de J. M. Coetzee, paru la même année et auquel ce récit fait irrésistiblement penser. XR

Histoire

Ces Bordelais qui ont fait l’Histoire

Isabelle de Montvert-Chaussy, Le Papillon Rouge éditeur, 264 p., 19,90 € À travers 50 brèves histoires s’exhale le parfum du Bordeaux des illustres, qu’ils soient écrivains, musiciens, aventuriers, scientifiques ou artisans… Ce récit au ton direct et libre, quoique documenté, mène le lecteur à la rencontre des grands noms bordelais – Montesquieu, ToulouseLautrec, Philippine de Rotschild… – et d’autres encore, moins connus, moins cités, tels que Max Linder ou les frères Reclus, qui n’ont pourtant pas manqué de laisser leur empreinte dans l’histoire de la ville. Une ode à ces nombreux génies ainsi qu’au pouvoir merveilleux du récit qui, à travers le temps, nous hisse sur les épaules des géants.

Photographie

Sous les pins, la lumière éditions Contrejour, 96 p., 30 €

Exposition du 22 mars au 23 avril 2022 Galerie d’art de l’Atrium culture à Dax

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Pour l’écrivain Jean-Paul Kauffmann, installé lui aussi dans les Landes, c’est un « homme qui parle aux pins » et qui sait combien cette forêt landaise, capable de rambleurs, de lumières soudaines, de clartés insondables, est consolante. Cet homme qui s’entretient avec les pins, c’est Bertrand Bouët-Willaumez, autrefois photographe à Paris, qui vit désormais, depuis 2005, à Onesse-Laharie, au cœur du plus grand massif forestier d’Europe. Au fil des ans, il a su aiguiser son regard sur cet environnement singulier que les voyageurs pressés trouvent à tort monotone. D’un lieu à l’autre, il a inventé – comprenez découvert – des paysages que ses tirages ont habilement transformés en songes impressionnistes. Ce long travail d’exploration offre des moments de grâce que ce beau livre, servi par la plume de Jean-Paul Kauffmann, restitue parfaitement. SAi



Culture

Sciences humaines

Patrimoine

Résonances. Danièle Martinez et la Base sous-marine, 2000-2015, Bordeaux

Les petites villes et le monde agricole

Les Paysages du Cognac

« Préciser l’influence évidente de l’urbain sur le rural, du national sur le local, par le truchement des petites villes et de leurs représentants », tel est le projet de cette étude ambitieuse, la première à analyser le lien, souvent méprisé, entre petites villes et campagnes – ces territoires agricoles essentiels – et leur intégration dans un plus vaste ensemble. Un essai qui, nonobstant la longue opposition entre rural et urbain, étudie les campagnes et les villes comme un tout, fait de chevauchements et d’interpénétrations sociales, économiques et historiques, pour redonner sa juste valeur au rôle des petites agglomérations françaises du xixe siècle.

Les paysages s’ouvrent et se ferment, comme nos corps qui les regardent, dirait-on en paraphrasant Georges DidiHuberman. Cet ouvrage inaugural de la série « L'Atlas des paysages » entend montrer que les 6 crus de l’AOC Cognac sont un subtil mélange de vignes, d’hommes et de femmes, et de leurs histoires entremêlées. Ce livre rassemble des textes variés : histoire, géologie, écologie, architecture…, des cartes, des images d’archives et des photographies, ainsi que quelques exercices de style plus personnels, pour saisir la poésie et le savoir-faire de ces traditions culturelles inscrites dans la terre, vivantes dans les corps et visibles dans les paysages.

collectif, Michel PétuaudLétang (dir.), Aéditions, 156 p., 24 € Hommage posthume à Danièle Martinez, cet ouvrage collectif mêle avec audace sa biographie et son œuvre, tissant le fond et la forme de son parcours dans un brocard de papier, finement ciselé par les mots de Pascale Dewambrechies, rehaussé de photographies de sa jeunesse et de son travail titanesque pour faire sortir la Base sous-marine des eaux de l’oubli. Résonances, écho sublime et sublimé d’une vie consacrée au soin de l’art, reconstitue la vision de celle qui a, 15 années durant, redonné un destin à un lieu jadis mal aimé, aujourd’hui baigné dans la lumière des plus grands peintres de l’Histoire.

Corinne Marache, Presses universitaires de Rennes, 386 p., 26 €

Archéologie

François Daleau. Fondateur de l’archéologie préhistorique Marc Groenen, éd. Jérôme Millon, 170 p., 28 €

François Daleau (1845-1927), archéologue et ethnographe autodidacte, habitait Bourgsur-Gironde où il possédait d’importants vignobles. On lui doit surtout la découverte, en 1881, de la grotte de Pair-non-Pair à Prignac-et-Marcamps et des figurations rupestres du Gravettien qu’elle recelait. Collectionneur impénitent et éclectique, il rassembla ses trésors dans le Chalet de l’Abbaye, sa propre demeure, à Bourg-sur-Gironde où se pressèrent tant de savants et de passionnés pour admirer le « Musée Daleau ». L’ouvrage de Marc Groenen est une pierre mémorielle qui replace la vie et l’œuvre de François Daleau dans le contexte général de l’historiographie de la préhistoire paléolithique et son apport à cette discipline alors encore balbutiante. Alain Beyneix Paru également :

Carnets d’excursions (1869-1925), François Daleau, éd. Jérôme Millon, 730 p., 42 € 146

Gilles Bernard et Michel Guillard (dir.), coll. « Inventaire », Yvelineédition, 274 p., 45 €



© Flora Valette - Ville de Saint-Sever

Cl. Victortsu

Fin de la restauration centennale de Saint-Sever

Forêt de charpentes

La « talle à teurtous » sacrée arbre de l’année Le « châtaignier de tous » de Cellessur-Belles s’est démarqué parmi plus de 200 arbres inscrits au concours organisé par le magazine Terre Sauvage, l’Office national des forêts, l’association A.R.B.R.E.S. et la Ligue de protection des oiseaux. Cet arbre légendaire, dans le tronc duquel on peut se lover, est un marqueur du paysage de la campagne melloise. Une belle mise en valeur du patrimoine naturel lot-et-garonnais !

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© Émilie Dubrul

© Thomas Bonnaud / D. R.

Voilà bientôt trois ans, le 15 avril 2019, que les flammes réduisaient à néant la « forêt », l’ossature en bois vieille de huit siècles de Notre-Dame de Paris. À SaintPardoux-l’Ortigier, en Corrèze, la scierie Dambo et Frères prend (bénévolement) part au projet de rénovation de la cathédrale. Des chênes centenaires, abattus dans l’Allier, ont été débités en poutres de 8 à 9 m de long. Mission faramineuse !

Le retour annoncé du Rembrandt au Mas-d’Agenais En 1804, la famille Duffour fait don à la collégiale Saint-Vincent d’un tableau représentant un Christ en croix. L’œuvre est identifiée, signature et date (1631) à l’appui, comme un authentique Rembrandt. Mais en 2016, on décèle un défaut dans la vitrine de sécurité et la toile est transférée dans les salles du trésor de la cathédrale Saint-André à Bordeaux. Le 4 janvier dernier, une nouvelle vitrine blindée et des caméras de surveillance ont été installées au Masd’Agenais en vue de son retour. Reste à tester l’hygrométrie et la température du caisson, et le Rembrandt devrait retrouver son toit.

L’église de l’abbaye bénédictine de Saint-Sever a achevé sa cure de jouvence après 6 ans de travaux ! Vitraux, peintures, sculptures ont retrouvé de leur éclat. Classée au titre des Monuments historiques et inscrite à l’Unesco, l’abbatiale du xie siècle possède notamment un ensemble remarquable de chapiteaux romans et néo-romans, les derniers datant de la restauration du xixe siècle. Depuis novembre, on peut à nouveau les admirer.

Disparition de Gérard Sendrey Gérard Sendrey s’est éteint le 22 janvier 2022, à l’âge de 94 ans. Parallèlement à sa carrière administrative, notamment à la mairie de Bègles dont il fut le secrétaire général, il a été un artiste profondément sincère. Guidé par ses propres impulsions, il a créé un monde à part, à la fois libre et arachnéen, loin de tout mimétisme culturel. Dès 1989, il fut l’inventeur, avec l’appui du maire de l’époque, Noël Mamère, du très singulier site de la Création franche à Bègles, 1er musée d’art brut en France. Derrière le sourire malicieux de Gérard Sendrey se cachait un être déterminé, intensément à l’écoute des autres.



JOUONS UN PEU Le Faussaire maladroit

En recopiant ce plat attribué à l’entourage de Bernard Palissy, le faussaire a commis 7 erreurs. À vous de les retrouver. Plat aux serpents, céramique émaillée, 43 x 57 cm, Agen, musée des beaux-arts. Cl. Alban Gilbert

ASSOCIATION LE FESTIN Bertrand Sacaze (président) Stéphane Taurand (président d'honneur) Yolande Magni (trésorière) Bertrand Charneau (secrétaire) DIRECTEUR DE LA PUBLICATION ET DIRECTEUR ÉDITORIAL Xavier Rosan 05 56 69 72 46 contact@mail.lefestin.net RESPONSABLE ADMINISTRATION ET COMPTABILITÉ Olga Sokolovitch 05 57 10 58 66 olga.sokolovitch@mail.lefestin.net DIRECTRICE DES PROJETS Amélie Daraignez 05 57 10 58 65 amelie.daraignez@mail.lefestin.net RÉDACTEURS EN CHEF Dominique Dussol Xavier Rosan 05 56 69 72 46 dominique.dussol@mail.lefestin.net SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DE RÉDACTION Mado de La Quintinie 05 57 10 58 63 redaction@mail.lefestin.net ASSISTANTE DE RÉDACTION Lucie Mugnier 05 57 10 58 64 redaction2@mail.lefestin.net ASSISTANT ÉDITORIAL Théo Dartenset 05 24 73 16 60 editions@mail.lefestin.net STAGIAIRE RÉDACTION Avril Gérard CORRECTEUR Florian Berrouet ----DIRECTEUR ARTISTIQUE Franck Tallon 05 56 86 81 23 contact@francktallon.com GRAPHISTES Franck Tallon Emmanuelle March Isabelle Minbielle PHOTOGRAVURE Christelle et François Veaux ----DIRECTRICE COMMERCIALE Estelle Fromy 05 57 10 58 67 diffusion2@mail.lefestin.net COMMERCIALE Mélanie Coutinho 05 57 10 58 67 diffusion@mail.lefestin.net ASSISTANTE COMMERCIALE Karima Ganouri 05 56 69 72 46 CHARGÉE DES RELATIONS PUBLIQUES ET COMMERCIALES Julie Brochard 05 57 10 58 60 julie.brochard@mail.lefestin.net CHARGÉE DE COMMUNICATION Clara Le Goff communication@mail.lefestin.net CHARGÉ DE DISTRIBUTION Jordy Pirot distribution@mail.lefestin.net CHARGÉE DES PUBLICITÉS Isabelle Helbling 06 73 20 40 82 publicites@mail.lefestin.net GRAPHISTE ÉDITIONS Véronique Schiltz 05 24 73 16 60 graphiste@mail.lefestin.net ----FONDATEURS Olivier Schiltz, Xavier Rosan

Ce plat ovale avec des reptiles moulés dans la tradition naturaliste des « rustiques figulines » est attribué à un suiveur de Bernard Palissy (voir p. 88) Sur un fond de terre claire rocailleuse, animé de feuillages (scolopendre, chêne, laurier), évoluent dans ou autour d’un point d’eau deux serpents, l’un lové, l’autre ondulant, deux lézards, une grenouille, une chenille, une écrevisse, des poissons et coquillages. Retrouvez la solution sur www.lefestin.net !

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Association type loi 1901 176, rue Achard / Bât. F1 - 33300 Bordeaux T. 05 56 69 72 46 - Fax 05 56 36 12 71 e-mail : contact@mail.lefestin.net site : www.lefestin.net

----ISSN : 1143-676 X / ISBN : 978-2-36062-297-9 Commission paritaire : 0421 G 81803 Imprimé sur papier couché mat 115 g / m2 par l’imprimerie Laplante (Mérignac) Dépôt légal : mars 2022

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