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professionnelle, accidents du travail ou autre
Quelle reconnaissance pour l’atteinte par la Covid19 chez les soignants : maladie professionnelle, accidents du travail ou autre?
HADDAR Mustapha, OUAAZ Meriem, FRAGA Seid, FERNANE Malika, KORICHI Saied.
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Réponse
Cadre juridique national
La loi 83-13 du 2 juillet 1983 relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles (1);
Article63: « Sont considérées comme maladies professionnelles, les intoxications, infections et affections présumées d’origine professionnelle particulière ». Article64: « La liste des maladies présumées d’origine professionnelle probable ainsi que la liste des travaux susceptibles de les engendrer et la durée d’exposition aux risques professionnels à ces travaux seront fixées par voie réglementaire ». Article68: « En vue de l’extension et de la révision des tableaux, ainsi que de la prévention, il est fait obligation, à tout médecin, de déclarer toute maladie ayant à son avis un caractère professionnel ». Article6: « Est considéré comme accident du travail, tout accident ayant entrainé une lésion corporelle, imputable à une cause soudaine extérieure et survenu dans le cadre de la relation de travail ».
L’arrêté interministériel du 5mai 1996 fixant la liste des maladies présumées professionnelles (2);
L’arrêté interministériel du 8mai 2002 introduisant la dysphonie chez les enseignants dans la liste des tableaux de maladies professionnelles au titre du tableau85 (3);
La correspondance no309/MSPRH/SG du 21 avril 2003 relative à la prise en charge de la protection des personnels soignants lors de l’épidémie du SRAS stipulant (4) : • L’exposition au virus du SRAS doit être enregistrée par le service de médecine du travail sur le registre des accidents du travail et le registre des activités quotidiennes. «En cas d’apparition du SRAS chez le personnel exposé, celui-ci doit être immédiatement déclaré comme accident du travail à la caisse nationale des assurances sociales».
Dans la situation actuelle, en l’absence d’un tableau de maladie professionnelle dédié à la Covid-19 qui pourrait harmoniser les pratiques sur le plan de la prise en charge médico-légale des soignants qui en sont victimes. Trois attitudes, à notre connaissance, sont adoptées par les services de médecine du travail :
Déclaration au titre des maladies à caractère professionnel; Déclaration au titre des accidents du travail; Prescription d’un arrêt de travail au titre de l’assurance maladie.
Il faut préciser que l’indemnité journalière versée par les assurances sociales est de 100% du salaire en cas de maladie professionnelle ou d’accident du travail et de 50% lorsqu’il s’agit d’un arrêt de maladie pour les 15premiers jours de l’incapacité temporaire (100% à compter du 16ejour ou à compter du 1erjour en cas d’hospitalisation ou de maladie de longue durée) (1). La reconnaissance en maladie professionnelle ou en accident du travail permet la prise en charge d’éventuelles séquelles imputables à la Covid-19.
Avis des auteurs
• Dans l’immédiat, la proposition est de faire réactiver, pour la Covid-19, les dispositions exceptionnelles contenues dans la correspondance no309/MSPRH/SG du 21 avril 2003 relative à la prise en charge de la protection des personnels soignants lors de l’épidémie du SRAS [4). Cette disposition, prise de façon ponctuelle pour un évènement donné, ne saurait être transposable, sur le plan du droit, à la situation actuelle même si les similitudes sont fortes (le cas de jurisprudence ne saurait être évoqué dans ce cas précis). • À court terme, la commission nationale des maladies professionnelles (Article66 de la loi 83 -13 du 2 juillet 1983) (1) devrait se réunir pour statuer sur le dossier de la reconnaissance en maladie professionnelle de l’infection des soignants par le Covid 19.
Cette procédure accélérée a été appliquée dans le contexte particulier de la reconnaissance en maladie professionnelle de la dysphonie chez le personnel enseignant, et ce par la création d’un nouveau tableau dédié à la dysphonie d’origine professionnelle (tableau no85) (4).
L’intégration des infections liées au COVID19 dans la liste des maladies professionnelles répond mieux aux critères scientifiques et à la définition légale de la maladie professionnelle.
La procédure de reconnaissance pourrait se faire selon 02 modalités techniques:
• Élargir le tableau de maladie professionnelle numéro75 intitulé: Maladies professionnelles contractées par le personnel de santé et introduire dans la colonne «désignation des maladies, les infections dues au Covid19»;
•Créer un nouveau tableau spécifique aux infections liées au Covid19 en fixant une liste des métiers pouvant provoquer cette infection. Dans ce cas de figure, en dehors des soignants, il faudrait ouvrir le débat sur le périmètre des bénéficiaires de ce nouveau tableau de maladie professionnelle.
•Sur le moyen terme, il faudrait envisager de mettre en place un système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles qui viendrait compléter le système de reconnaissance par les tableaux, actuellement en vigueur, selon des modalités à définir sur le plan réglementaire. Ce système permettrait, en situation exceptionnelle, de faire reconnaitre comme maladie professionnelle, des affections médicales liées au travail non inscrites à un tableau de maladie professionnelle.
Dans l’attente de ces mesures, la recommandation est de mettre en place au niveau des services de médecine du travail des registres où seront enregistrés tous les cas «d’accidents d’exposition» ou d’infections liées au Covid 19, pour assurer la traçabilité de l’information, réunir les preuves de la contamination des soignants et éventuellement les produire en cas de nécessité.
Le médecin du travail a deux alternatives: • soit délivrer un certificat médical descriptif initial d’accident du travail en considérant l’exposition et/ou la contamination comme accident lié au travail; • ou délivrer un certificat médical descriptif de maladie à caractère professionnel. Dans le cas de l’accident du travail, l’organisme de sécurité sociale, territorialement compétent, est l’institution habilitée à statuer sur le caractère accidentel de l’évènement en se basant sur le dossier de la victime, constitué entre autres, du certificat médical descriptif initial délivré par le médecin et de la déclaration de l’employeur. À ce titre, il est utile de rappeler les dispositions suivantes de la loi 83-13 du 2 juillet 1983 relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles (1). Art. 15. — L’obligation faite à l’employeur de souscrire une déclaration s’impose, même si l’accident n’a pas entrainé d’incapacité de travail ou ne parait pas être imputable au travail. Dans ce dernier cas, l’employeur fait assortir sa déclaration de réserves. Art. 16. — Lorsque l’organisme de sécurité sociale est en possession des éléments du dossier et, notamment, de la déclaration d’accident, il doit se prononcer sur le caractère professionnel de l’accident dans un délai de vingt (20) jours. Art. 17. — En cas de contestation du caractère professionnel de l’accident par l’organisme de sécurité sociale, celui-ci doit notifier sa décision à la victime ou à ses ayants droit dans un délai de vingt (20) jours, à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de l’accident par quelque moyen que ce soit.
Références
1.Loi n°83-13 du 2 juillet 1983 relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, p.1210, JO n 28 du 05 Juil. 1983. 2.Arrêté interministériel du 5mai 1996 fixant la liste des maladies présumées professionnelles. 3.Arrêté interministériel du 8mai 2002 introduisant la dysphonie chez les enseignants dans la liste des tableaux de maladies professionnelles au titre du tableau85. 4.Correspondance no309/MSPRH/SG du 21 avril 2003 relative à la prise en charge de la protection des personnels soignants lors de l’épidémie du SRAS.