Rapport de présentation de PFE Silk walk : Broder un réseau urbain autour d’une production
sarra ben gara enseignants : Claudio secci & carole lanoix ENSA PAris-La Villette, 2017/2018
remerciements Je tiens à remercier Claudio Secci et Carole Lanoix pour leur soutien durant une période difficile ce semesre, et qui on su m’accompagner pour développer une approche et des outils de travail que je souhaite poursuivre après le diplôme . Je remercie également Celia Lebarbay pour ses précieux conseils sur le terrain durant le workshop à Varanasi, grâce auxquels j’ai acquis une méthode de travail efficace durant le temps limité du voyage.
1 preparation au travail de terrain introduction...............................................................p6 signes d’un terrain en Êvolution analyse de photographies.........................p12 glossaire.....................................................................p8
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sur le terrain : à la découverte de pratiques urbaines
retour du terrain : des enjeux au projet
le tissu au coeur du quartier...............p16 Habiter, produire, vendre Madanpura, centre ancien des tisserands...............................................................p40 du fil au sari processus de production du tissu.......p28 séparation : Des poches de production et un centre de vente.................................................p41 un réseau existant une production organisée par une trois poches de production communauté...........................................................p29 le site...........................................................................p42 Modes de production et espaces en silk walk : broder un réseau urbain évolution autour d’une production relation corps-dispositif-espace........p32 Valoriser par l’évènement : Festival de la soie..............................................................................p43 Types d’espaces investir le patrimoine existant.............P46 la maison atelier : de l’espace de la maison-atelier de demain....................p48 travail à l’espace public............................p34 l’usine urbaine de demain.............................p50 un parcours patrimonial et l’usine urbaine : émergence d’un culturel .....................................................................p52 nouveau modèle..................................................p36 regrouper pour optimiser............................p52 conclusion..................................................................p53 vers la ville-usine TENDANCE...................................................................p38 Annexes....................................................................P5
introduction Ce dossier introduit le projet et plus précisément son processus d’élaboration. L’atelier auquel j’ai participé s’organise autour de trois étapes : la phase d’analyse à distance avant le voyage en Inde, celle du worshop et enfin le retour du terrain. Cette méthode de travail sur terrain permet de mettre en place des outils d’observation et d’analyse d’un territoire, d’espaces et de pratiques tels que la vidéo, la photographie, le relevé architectural, les entretiens, afin de faire émerger les enjeux d’un terrain en changement avec un potentiel de projet. L’entrée sur le terrain se fait par celle des activités afin de donner un prisme d’observation de la ville.
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glossaire
ansari
(ou Momin Ansari) : Communauté musulmane présente principalement au nord et à l’ouest de l’Inde. Cette communauté est historiquement liée au domaine du tissage.
Chottraa: Tablette
qui se retrouve sur les seuils de rez-de-chaussée en Inde. Plus qu’un simple élément d’architecture, elle représente un seuil habité qui crée un lien entre intérieur et extérieur.
gaddidar:
Dans le domaine textile, ce mot fait référence aux vendeurs, pour la plupart très aisés.
Haveli à Bénarès (sur le site du projet)
jain: Relatif au jaïnisme, religion fondée en Inde
qui vise à délivrer l’âme de la transmigration, du passage dans un autre corps (qui implique la non-violence).
ghat:
Ensemble de marches ou de gradins qui recouvrent les rives des cours d’eau ou les berges des bassins ou tanks. Ils permettent de descendre au contact de l’eau, le plus souvent d’un fleuve sacré, par exemple le Gange à Haridwar et Bénarès. Les ghats, contrairement aux quais européens par exemple, ont une relation perpendiculaire aux cours d’eau. Ce mot peut aussi faire référence à un récipient contenant de l’eau, ou encore à la montagne.
Maharaja
; Titre qui, en Inde, désignait les rois et les empereurs.
Puja:
Rite d’offrande et d’adoration de l’hindouisme, du bouddhisme et du jaïnisme. Sa signification et son déroulement est différent dans ces trois traditions.
girhasta
: dans la filière textile, ce mot fait référence aux intermédiaires entre vendeurs et tisserands.
haveli:
rikshaw: Aussi appelé trishaw, est un véhicule
tricycle utilisé pour le transport de personnes ou de marchandises. (on appelle certains rickshaws motorisés «tuk-tuk»)
demeures, petits palais, maisons de maître en Inde, connues pour leur ornementation fine. Il s’agit presque toujours de maisons à cour.
Saraswati
: Déesse hindoue du savoir et des arts, plus particulièrement de la musique, 8
Sarasvatī est à l’origine la personnification de la rivière sacrée du même nom.
sari
: longue pièce d’étoffe, c’est un vêtement traditionnel porté par des millions de femmes d’Asie du Sud (principalement en Inde, au Népal, au Bangladesh, au Sri Lanka au Pakistan, et en Iran.) dont l’origine remonterait vers 100 av. J.-C., en Inde. C’est une des rares habitudes vestimentaires à avoir été conservée par le temps. Le sari est une large bande de tissu d’environ 1,20 m de large sur 7 m de long. Sa technique de drapé varie selon les régions, les castes, les activités, les religions, etc. Le sari se porte sur un jupon et un corsage serré laissant le ventre nu. Il est fait d’une pièce, et il n’était habituellement porté que par les femmes mariées.
weaver
: mot angllais qualifiant les tisserands traditionnels en Inde.
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1. PrĂŠparation au travail de terrain
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Avant le workshop, chacun des étudiants a analysé un ghat pour faciliter l’approche du site une fois sur place. Le ghat que j’ai étudié se trouve au sud de Bénarès : le Shri Nishadraj Ghat. Il s’agit d’un ghat populaire, habité par une caste de pêcheurs et bateliers, les Nishad. Il se situe entre des grandes propriétés : un ancien palais de Maharaja, au Panchakot ghat au nord et un temple Jain au sud.
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signes d’un terrain en évolution analyse de photographies
Activités du ghat au coeur du tissu
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Les dessins effectués avant le voyage, d’après photographies permettent déjà d’obtenir quelques informations sur la population : le temple indique la présence d’une communauté hindou, tandis que la mosquée montre celle d’une présence musulmane. Par ailleurs, la façade montre les deux grandes propriétés, avec entre elles, un tissu populaire morcelé.
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Des populations qui forment un ghat
1990
2016
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Constructions en façade qui évoluent Zone bâtie concernée par les changements
2006
2017
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2. sur le terrain : Ă la decouverte de pratiques urbaines le tissu au coeur du quartier
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Brodeur en rez-de chaussée
Ce que j’ai trouvé marquant lors de l’arrivée sur le terrain est la présence importante de lieux de production de tissu, en rez-de-chaussée notamment. On y trouve ainsi la majorité des étapes de fabrication d’un tissu, ou du sari.
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Tisserand traditionnel
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Teinturiers
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7m
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Impression de motifs sur saris
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Brodeur de badges
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Broderie mĂŠcanique
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du fil au sari processus de production du tissu
Teinture Couture des bords
Impression de motifs
Tissage (main ou machine)
Broderie Ă la machine
Vente
Polissage et vapeur
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Broderie Ă la main
un réseau existant une production organisée par une communauté Comme évoqué précédemment, on trouve, dans ce site les diverses étapes de production d’un tissu. Les espaces de l’activité manuelle s’organisent autour de « respirations » du tissu urbain (places) créant des poches de travail (voir plan ci-après). Néanmoins, la fabrication de ces saris ne se fait pas par une logique de proximité, mais par une hiérarchie de communauté. En effet, la filière du tissu appartient majoritairement à la communauté musulmane. En Inde, par mimétisme du systéme hindou, les musulmans se distinguent par castes. Les familles travaillant dans le textile sont des Ansari. Cette caste se stratifie également suivant le
métier : les tisserands sont les «weavers», les plus pauvres et marginalisés car dépendent des «gaddidars», vendeurs ou des «girhastas» (intermédiaires). Les gaddidars sont ceux qui ont le plus de pouvoir et de moyens : ce sont eux qui font travailler les tisserands en leur passant des commandes. Les «independant weavers» ou tisserands indépendants sont très rares compte tenu de leur place dans la société. Aujourd’hui, les tisserands ou intermédiaires qui disposent de plus de moyens se procurent des machines afin de se libérer des gaddidars.
MADANPURA POCHES DE PRODUCTION
Commande
Propriétaire de magasin Tissage Teinture
Packaging
«Pollissage»
Broderie
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Exemple d’une poche de travail
Répareur de cerfs-volants
Vue de la place
On y trouve des ateliers en rezde-chaussée (ici, des tisserands et brodeurs traditionnels, et une broderie mécanique), un magasin de tissu et des marchands ambulants à l’extérieur, et un point d’eau. 30
Dans ces poches de production, on trouve des grandes maisons ou havelis inexploitĂŠes, prĂŠsentant un fort potentiel. 10m 31
Modes de production et espaces en évolution relation corps-dispositif-espace
Teinture
Broderie à la main
Impression de motifs
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Broderie é la machine
Le travail de relevés a permis de montrer que d’une part, les espaces de travail sont adaptés aux positions du corps et aux dispositifs de production (relation d’homotétie), et que d’autre part, on adapte les espaces existants pour y insérer les nouvelles machines (ci-dessus, une broderie mécanique).
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Types d’espaces la maison atelier : de l’espace de travail à l’espace public Le modèle initial d’espace de production de tissus est une maison à cour, avec un atelier en rez-de-chaussée sur rue et des logements aux étages, avec un toit permettant d’accueillir l’une des activités familiales. Suite au découpage parcellaire dû aux successions, les maisonsateliers aujourd’hui n’ont plus de cour et s’étendent verticalement. Ces modèles offrent tous deux une qualité dans leur relation à l’espace public, que j’ai trouvée très intéressante.
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Perméabilité intérieur-extérieur : la chottraa comme transition
RUE
2m
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Types d’espaces l’usine urbaine : émergence d’un nouveau modèle
On voit apparaître aujourd’hui un nouveau type de construction, avec des plateaux contenant des machines. Ces usines urbaines n’accueillent plus de logements au-dessus : elles sont monofonctionnelles et se ferment totalement sur l’extérieur. Ce modèle est en essor puisqu’il est économiquement plus intéressant car il permet de produire plus vite pour moins cher, bien que la qualité des produits soit très mauvaise comparée au travail manuel. Ce changement provoque un bouleversement dans la filière textile, deuxième secteur d’emploi de l’économie indienne. De nombreux artisans perdent ainsi leur emploi pour devenir chauffeurs de rikshaw entre autres. Cette perte de travail s’accompagne ainsi de la disparition d’un savoirfaire fin.
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Quelques données : Tissage 1 sari à la main : 5 à 10 jours 10 saris à la machine : 1 jour Broderie 1 sari à la main = 5 jours 20 saris à la machine = 1 jour Prix : Banarsi sari à la main: de 5000 à 15000 Roupies (100/200 €) Sari à la machine : 500 Roupies (6 €) 1machine = 40 personnes
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vers la ville-usine TENDANCE
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L’essor de l’usine urbaine, avec comme effets la disparition progressive du travail manuel, soulève des enjeux importants : le devenir des places de travail (qui se transforment progressivement en garages par exemple), celui des artisans et de leurs savoir-faire ainsi que de la place de l’usine urbaine et de sa relation avec la ville. Comment valoriser une activité manuelle fine ouverte sur l’espace public? Quels outils et compétences l’architecte doit-il mettre en oeuvre dans ce but? Lien vers la vidéo d’introduction : https://youtu.be/HSSJxW16B7Y
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3. Retour du terrain : des enjeux au projet Habiter, produire, vendre Madanpura, centre ancien des tisserands
An 990
Tisserands
18e siècle
Depuis l’an 500, les Ansaris se sont installés à Madanpura. Avec l’arrivée du chemin de fer, quelques quartiers de tisserands se développent au nord. Ils quittent plus tard ces quartiers pour en rejoindre des nouveaux situés près des grandes routes et du centre de Madanpura.
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An 1140
Aujourd’hui
Routes Chemin de fer Hydrographie
habiter, produire, vendre séparation : Des poches de production et un centre de vente
Aujourd’hui
Lieux de production Lieux de vente
Alors que l’on produisait, habitait et vendait au même endroit, on distingue aujourd’hui une séparation entre les lieux de production et lieux de vente. Madanpura demeure un centre névralgique de vente, et emblême des tisserands, tandis que de nouvelles poches de travail se créent autour.
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trois poches de production le site
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Le site se trouve à environ 1.5 km au sud de Madanpura. et à l’ouest du Shri Nishadraj ghat. Il y a trois poches de travail, regroupant plusieurs activités manuelles en majorité, avec des espaces de production mécaniques autour ainsi que des friches. Comme évoqué précédemment, on note diverses étapes de la production de tissu, ainsi qu’une école de couture pour femmes et divers tailleurs et espaces de vente. En outre, chacune de ces « respirations » offre des maisons ou havelis inexploitées. Le projet s’inscrit en trois temps et échelles, que j’aborderai sommairement ici : - La respiration : festival de la soie - Le métier et ses espaces : la maison-atelier et l’usine urbaine - Promenade : vers un parcours 42
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Maisons inexploitées Lieux de production mécanique Lieux de vente Lieux de production manuelle Qualité sonore (+ au -) Friches
silk walk, un projet a trois échelles
« Respiration » : vers une cour publique
Cheminement : vers une promenade urbaine
Métiers et espaces : l’usine urbaine et la maison-atelier
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silk walk : broder un réseau urbain autour d’une production Valoriser par l’évènement : Festival de la soie
Cette première étape permet de valoriser le travail manuel en le montrant sur l’espace public, en l’occurrence les places en se greffant à la puja de Saraswati. Il s’agit d’une fête vouée à une divinité religieuse, ici à la déesse des arts et du savoir, à l’occasion de laquelle se font des processions dans les rues. Sur les places
seront organisés des ateliers extérieurs avec les artisans. Ce festival permet également de créer de nouvelles pratiques urbaines autour de l’activité.
Maquettes d’étude du pacours
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Schéma d’acquisition des friches
Schéma d’acquisition des maisons abandonnées
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silk walk : broder un rÊseau urbain autour d’une production Investir le patrimoine existant
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silk walk : broder un réseau urbain autour d’une production La maison atelier de demain Imaginer la maison-atelier de demain revient à se quesionner sur la nature des espaces dont chacune des activités de production du tissu ont besoin, ainsi que la logique de cette chaîne de poduction. Par ailleurs, il est important de préserver les qualités spatiales, urbaines et sociales qu’offrent déjà les maisons-ateliers d’aujourd’hui. Ainsi, le type de maison-atelier que j’imagine offre une chottraa qui permet une relation entre la rue et les brodeurs, et offre un espace habité pour les artisans et les passants. De même, ces maisons ont des cours qui amènent la lumiére dans les espaces jusqu’au rez-de-chaussée dont la hauteur est plus importante que les autres étages.
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Figure de principe d’aÊration des espaces de teinturerie
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silk walk : broder un réseau urbain autour d’une production L’usine urbaine de demain De la même manière que pour la maison-atelier, il s’agit ici d’allier les opérations aux espaces appropriés. Les rez-de-chaussées sont réservés à la production manuelle, en relation avec l’espace public, permettant ainsi d’allier deux modes de production qui font désormais partie de marchés distincts : un marché de production fine et de qualité d’une part, et un marché de production de masse abordable d’autre part. Enfin, contraiement aux usines urbaines en construction aujourd’hui, ces bâtiments offrent des logements pour les ouvriers et leurs familles.
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silk walk : broder un réseau urbain autour d’une production un parcours patrimonial et culturel
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La seconde étape consiste à acquérir et ouvrir, les maisons inexploitées pour pouvoir accueillir des designers et étudiants qui seront mis en relation avec les artisans. Les places participant aux festivals seront connectées pour créer une dynamique urbaine autour d’un parcours patrimonial passant par les poches, et menant au centre Madanpura. L’une des étapes suivantes consiste à imaginer
les maisons-ateliers de demain, ainsi que les usines urbaines futures, dans leurs relations à la ville notamment, en les plaçant sur l’axe principal de ce parcours et en privilégiant les activités manuelles ouvertes dans les rezde-chaussées, pour préserver leurs qualités urbaines. Par ailleurs, les poches seront un point de regroupement d’activités manuelles, pour optimiser la production et renforcer leur place dans un nouveau marché de qualité.
Regrouper pour optimiser
Nouveaux réseaux
Création d’un nouveau réseau autour des artisans pour les insérer dans un nouveau marché. L’une des aptitudes de l’architecte, aprés avoir identifié des enjeux et éléments qui font urbanité, consiste à inventer des dispositifs afin de réunir les acteurs, discuter, et accompagner les artisans et leurs besoins.
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-
m Co
Proprié-
Conclusion En somme, cette approche du projet urbain et architectural m’a permis d’acquérir une méthode de travail que je souhaite poursuivre dans la vie professionnelle : être sur le terrain et au plus près des acteurs, observer, analyser, développer des dispositifs adéquats pour identifier des enjeux, tout en ayant le recul nécessaire pour analyser ces éléments et faire émerger un projet et une stratégie adaptés à un contexte donné.
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Annexes
Communautés présentes sur le site Hindous Musulmans
Usages des bâtiments Plan de situation dans la ville
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SchĂŠma des acteurs
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references KUMAR Nita, « The Artisans of Banaras Popular Culture and Identity, 1880-1986 », Princeton University Press, 1988 KRAUTHAUSEN Celia, KRONECK Jakob et MILDENBRGER Valeska, Transformation processes in the saree weaving industry in Madanpura, Varanasi in « Making a living in Varanasi - Social place and socioeconomic space », , édité par SCHÜTTE Stefan, KREUTZMANN Hermann, Institute of Geographical Science, Freie Universität Berlin, 2015.
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