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Ça bouchonne chez les médecins
Prendre rendez-vous chez le médecin est souvent fastidieux. Les patients s’impatientent et les médecins sont sous pression, mais existe-t-il des solutions ? Pas si sûr…
Notre secteur médical est engorgé. Il est souvent difficile de prendre un rendez-vous chez le médecin, qu’il soit généraliste ou spécialiste. Un constat qui vaut aussi bien en milieu hospitalier que dans les cabinets de proximité.
Dr Margaux Dutat, médecin généraliste à Tubize, le constate : « Il y a clairement un embouteillage, et nous ne sommes pas trop rassurés par la tendance actuelle. Il y a beaucoup de demandes et les patients sont de plus en plus exigeants. Cela nous rajoute de la pression, même si depuis la Covid, nous parvenons plus facilement à traiter certains cas à distance. » Et quand les médecins de proximité sont sous pression, c’est vers le milieu hospitalier que les patients se tournent. « Nous remarquons que notre pratique est saturée par moment, poursuit Docteur Dutat. Dans notre cabinet, les patients se tournent vers les services d’urgences s’ils n’obtiennent pas le rendez-vous qu’ils souhaitent. Les “patients” deviennent des “impatients”. Nous respectons leurs plaintes, mais en retour nous voulons qu’ils comprennent que si nous ne pouvons pas les prendre, c’est parce que nous sommes occupés avec quelqu’un d’autre. Nous ne sommes pas en train de faire la sieste ou du shopping. Nous soignons des gens. »
Se tourner vers les urgences est un phénomène nouveau pour Mme Dutat. Pour elle, ce service n’est plus utilisé à sa juste valeur. Un point de vue que le docteur Gilles Watteuw, chef du service des urgences du CHR Haute-Senne à Soignies, partage volontiers : « Je me refuse à parler de shopping médical, mais au fil des années, les urgences sont devenues un produit de consommation et leur appellation a perdu tout son sens. Souvent, on n’y vient plus pour une véritable urgence, mais pour être examiné le plus rapidement possible par un médecin. Certains patients se présentent même avec leurs propres exigences ! »
Alors, existe-t-il des solutions pour désengorger le secteur et ainsi améliorer la santé de la population ? Pour les deux praticiens, la réponse semble être non, même s’ils reconnaissent que des pistes existent, comme l’indique le docteur Watteuw : « En France, ils ont trouvé une solution qui, selon moi, a l’air viable. Il s’agit d’une structure intermédiaire. Un Centre Médical de Soins s’occupe de ce qu’on appelle entre guillemets la petite bobologie, de type entorse, plaie, coupure… Ces petites structures possèdent de petites salles adéquates qui se situent entre la médecine d’urgences et la médecine générale. Elles prennent en charge les pathologies qui ont tendance à encombrer les services d’urgences. » Seul problème : l’urgentiste doit bien constater que ces structures intermédiaires sont, elles aussi, débordées de travail.
Par ailleurs, les docteurs Dutat et Watteuw font remarquer que l’informatisation des dossiers doit encore être améliorée.
« L’informatisation facilite les choses quand tout fonctionne, indique Docteur Dutat. Cependant, si le logiciel plante, on n’a plus la possibilité de se tourner vers un dossier papier. Par ailleurs, c’est une perte de temps lors des visites à domicile, car nous devons tout retranscrire par la suite. » Le docteur Watteuw ajoute : « En termes de recherche d’informations, le Réseau Santé Wallon fonctionne très bien quand le dossier est bien complété. Nous y retrouvons les antécédents, le dernier traitement… » Les deux médecins se rejoignent également sur l’importance d’éduquer les patients pour éviter l’engorgement du secteur.
« De véritables solutions, il n’y en a pas », conclut avec fatalité le docteur Watteuw. Il faut que tous les médecins participent à une éducation de la population, ce qui, malheureusement, est plus ou moins bien accepté par les patients. »
Paiement à la prestation ou non ?
Exonération de la TVA ou non ? New Deal, oui ou non ? Et quid de la réglementation relative aux applications de santé en ligne ?
Ceux qui affirment qu’un syndicat de médecins n’est pas nécessaire aujourd’hui ne croient pas en leur propre avenir. De nombreux défis s’accumulent. C’est à chaque partie concernée de décider si et comment relever ces défis. À l’ABSyM, nous avons déjà posé certaines conditions. Vous pouvez les consulter en toute clarté sur notre nouveau site Internet.
Il faut que le respect guide notre action syndicale. « Je constate que nous devons de plus en plus prendre la défense de la profession », déclare Johan Blanckaert, président de l’ABSyM. « Il suffit de penser à la vaccination lors de la crise du coronavirus, par exemple. Mais d’autres enjeux similaires nous donnent aussi l’occasion de défendre l’activité des médecins généralistes et spécialistes. Par exemple, nous nous engageons fermement à affiner et à améliorer le New Deal pour les médecins généralistes. »
« Dans le débat social, les gens sont plutôt prompts à pointer les médecins du doigt », poursuit le président. « Nous exerçons notre métier par vocation, mais il ne faut pas exagérer non plus. Des figures publiques dénoncent les médecins qui se déconventionnent ou qui ont une pratique extra-muros. En même temps, les hôpitaux demandent aux médecins de les aider financièrement parce que le secteur va mal et que certains hôpitaux risquent de passer dans le rouge. Nous le faisons, bien sûr, mais il y a peu de transparence. Où va le produit de nos honoraires ? La demande de l’hôpital pour plus de ressources est-elle justifiée ?
Assistance (juridique)
L’ABSyM s’engage pour les médecins généralistes, les médecins spécialistes et les médecins en formation. La façon de procéder de l’organisation est à chaque fois le fruit d’une démarche ascendante. « Nous partons de la base. Un membre est confronté à un problème ? Une assistance
(juridique) solide est alors fournie. « Il peut également s’agir de questions très banales », explique M. Blanckaert, « car il y a de fortes chances qu’un autre médecin soit tôt ou tard confronté à la même situation. »
Les modalités de soutien du syndicat sont très vastes. « Il nous incombe de défendre les intérêts des médecins. Et nous ne ménageons pas nos peines pour le faire ». Les non-membres profitent aussi indirectement de notre action. Mais, souligne le président, « les membres bénéficient d’avantages particuliers. Un plus grand nombre de membres donne plus de poids à l’organisation. C’est essentiel pour pouvoir peser sur la sphère politique ».
L’organisation campe sur ses positions quand c’est nécessaire et va de l’avant pour permettre des ajustements et des améliorations quand c’est possible. « Nous sommes favorables au progrès au sein de notre profession. La révolution des applications de soins de santé en ligne, comme les dispositifs portables, est passionnante. »
Un nouveau site web !
Les positions de l’organisation sont on ne peut plus claires. Elles ont récemment été explicitées en détail sur le nouveau site web. Vous pouvez également y consulter les réalisations de l’ABSyM. Pour rappel, lors des discussions concernant la protection du secret médical et l’élaboration du nouveau statut des MSF, l’ABSyM était présente à la table des négociations. Le syndicat des médecins a également été étroitement impliqué dans le maintien du paiement à la prestation et de l’exonération de la TVA.
« Nous invitons tout le monde à jeter un coup d’œil à notre tout nouveau site web ( absym-bvas.be/fr ). Il donne un aperçu clair de nos engagements et met en évidence les grands défis à venir. Les autres parties prenantes sont également invitées à prendre connaissance de nos positions ». En un clic devenez membre de l’ABSyM !
Les élections syndicales approchent. En tant que plus grand syndicat de médecins du pays, l’ABSyM invite tous les médecins généralistes et spécialistes à voter. Il est d’ailleurs possible de voter sans être membre.
« La santé n’est pas une idéologie. Ce n’est pas non plus une économie. Les gens confondent parfois les deux. C’est surtout le cas des politiciens qui ont des visées à court terme. En tant que syndicat, il est essentiel que nous défendions la santé et le bien-être. Nous devons continuer à enfoncer le clou pour éviter que le gouvernement, aveuglé par une posture idéologique, ne prenne des décisions importantes susceptibles de gravement impacter notre système de santé. »
Vous pourrez voter pour les élections syndicales entre le 6 et le 26 juin.
L’équivalence de diplôme Une des idées pour solutionner la pénurie d’infirmiers en Belgique serait de recruter dans d’autres pays. La Turquie et la France (3 ans d’études) regorgent de talents en soins infirmiers. Cependant, l’équivalence des diplômes pose problème. Il serait donc intéressant de dispenser aux candidats les heures de formations qu’ils n’ont pas eues en Belgique. Une mesure qui n’a malheureusement pas encore vu le jour.
Bien que la pandémie soit derrière nous, le secteur infirmier peine encore à s’en remettre. De nouvelles mesures de fond doivent voir le jour, et ce dès la formation des nouveaux infirmiers.
La guerre des talents
Comme dans tous secteurs en pénurie, la guerre des talents fait rage. Les institutions ont bien compris qu’elles devaient rivaliser d’ingéniosité pour attirer les jeunes. Et parfois, cela peut même déraper et occasionner une perte d’éthique. Selon les experts, il n’est ainsi pas rare de constater des débauchages de personnes déjà en fonction dans d’autres institutions.
S’il y a bien un secteur qui a subi de plein fouet la pandémie de Covid-19, c’est le secteur infirmier. Les infirmiers et infirmières ont encore du mal à s’en remettre. La pression sur le métier est toujours bel et bien présente. « Après deux années de crise, il y a une véritable fuite généralisée de la profession », explique Adrien Dufour, directeur général de la Clinique Saint-Luc à Bouge. « Le marché de l’emploi ne parvient pas à compenser les pertes, car l’offre est bien inférieure à la demande ». Candice De Windt, l’ambassadrice des soins de santé, annonçait ainsi fin 2022 qu’il manquait pas moins de 25.000 à 30.000 infirmièr.e.s en Belgique.
La pression se fait sentir au sein des services hospitaliers, mais également dans les maisons de repos et les maisons