J A N V I E R 2 0 1 6
pièce montée
Quand le cinéma appelle à la gourmandise E D W A R D A U X M A I N S
D ’ A R G E N T
Tartelette à la crème et aux myrtilles Une des scènes qui m’a inspiré la tarte aux myrtilles est celle du jour où le « père » d’Edward eut l’idée de le créer. Celui-ci avait créé une machine pour faire des sablés, il en pris un en forme de cœur et l’imagina sur une machine. La base était donc un fond de pâte sablée. Ensuite, je voulais une couche de crème pour illustrer le teint pâle d’Edward et les crèmes que sa mères adoptives lui met. Et enfin une touche de noir avec les myrtilles.
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B U R T O N
Tim Burton va au cinéma comme tout le monde, mais le cinéma l’impressionne plus que n’importe qui. Et surtout le cinéma fantastique. Il se souvient de Jason et les Argonautes de Don Chaffey (1963) comme l’un des premiers films qu’il ait vus. De cette épopée mythologique, il retient surtout les effets spéciaux du légendaire Ray Harryhausen (la fameuse technique du stop-motion dont Tim Burton adulte deviendra un ardent prosélyte) qui donnent vie à un géant de pierre ou à une armée de squelettes. « J’ai toujours aimé les monstres et les films de monstres, raconte Tim Burton. J’avais le sentiment que la plupart de ces monstres étaient incompris et qu’ils avaient généralement plus de cœur et d’âme que les humains autour d’eux. [ ] Ces films ont sans doute été mes contes de fées ». À l’époque, Tim Burton manifeste un goût assez large, mais les films avec Vincent Price lui « parlent de façon particulière ». Cet immense acteur américain (un mètre quatre-vingt-treize) au port aristocratique et à l’ironie très british est devenu une « star de l’horreur ». Tim Burton trouve dans ces films d’horreur très littéraires un exutoire à ses tourments d’enfant puis d’ado solitaire et, curieusement, il y voit même des correspondances avec sa propre vie : « Je grandissais en banlieue, dans une atmosphère perçue comme normale et agréable mais que je percevais, moi, autrement et ces films m’introduisaient à certains sentiments. Je les reliais à l’endroit où je vivais. » En 1976, il a obtenu une bourse pour intégrer le California Institute of the Arts, ou « CalArts » une école fondée par les studios Disney pour repérer les dessinateurs talentueux, capables à terme de devenir les animateurs de leurs prochains films. La chance sourit à Tim Burton trois ans plus tard, alors que sa bourse s’achève et qu’il n’a bientôt plus les moyens de payer sa scolarité, son film d’animation de fin d’année, Stalk of the Celery Monster (littéralement « L’attaque du céleri monstrueux » !), attire l’attention des recruteurs de chez Disney Tim Burton a alors 21 ans et, dans la tête, des images qui ne correspondent pas vraiment à l’esthétique Disney. L’esprit maison lui déplaît «Chez Disney, on veut que vous soyez un artiste et en même temps un travailleur zombi sans personnalité.»
Le style Burton, d’un côté une plongée dans un imaginaire dont les figures seront récurrentes et souvent moins effrayantes que le monde réel, de l’autre une satire iconoclaste de la « normalité », assortie d’une tendresse communicative pour le marginal, celui qu’on juge différent. L’expérience Disney est pourtant loin d’être aussi frustrante qu’il le racontera a posteriori. Deux Jeunes cadres, Julie Hickson et Tom Wilhite, ont perçu son talent ils lui permettent donc, pour un budget de 60 000 dollars, de réaliser Vincent, saisissant film de six minutes en noir et blanc, mêlant techniques du dessin animé et du stop-motion, ici l’animation image par image d’une marionnette. Vincent raconte l’histoire de Vincent Malloy un gamin de 7 ans qui aimerait tant être Vincent Price, et s’imagine vivant des situations macabres. Le court métrage reçoit des prix dans plusieurs festivals et passe pendant deux semaines en avant-programme d’un film Disney. Burton enchaîne avec un film avec des acteurs en chair et en os, une adaptation loufoque de l’histoire d’Hansel et Gretel pour Disney Channel. La réalisation de Frankenweenie, en 1984, précise son désir pastiche savoureux et émouvant de Frankenstein de James Whale. Ces deux films contiennent déjà, en miniature, ce que sera à l’avenir, le style Burton, d’un côté une plongée dans un imaginaire dont les figures seront récurrentes de la chauve-souris au chien zombi mais jugées souvent moins effrayantes que le monde réel, de l’autre une satire iconoclaste de la « normalité », assortie d’une tendresse communicative pour le marginal, celui qu’on juge différent. Qu’il s’agisse d’un chien rapiécé et «boulonné», comme l’était, jadis, la créature jouée par Boris Karloff, ou d’un jeune homme ayant des ciseaux en guise de mains De fait, Frankenweenie est bien la matrice d’Edward aux mains d’argent.
Edward aux mains d’argent
T I M
Né le 25 août 1958 à Burbank, une banlieue de Los Angeles, Timothy William Burton confie avoir eu « les mêmes activités que les autres enfants aller au cinéma, jouer, dessiner ». Il ajoute, jouant les éternels adolescents « Ce qui est plus inhabituel, c’est de vouloir persévérer dans ces activités en grandissant. » Mais, plus loin, on apprend que « les gens ressentaient un besoin pressant de [le] laisser tout seul » et aussi qu’il avait « peu d amis, mais [qu’]il y avait suffisamment de films bizarres à voir pour se passer d’amis pendant un bon bout de temps ».Tim Burton a donc une enfance « presque » normale.