Les rescapés du Gondwana

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LES RESCAPÉS

DU GONDWANA Une aventure scientifique au cœur du vivant

Textes

Éric Guilbert Christophe Daugeron Cyrille D’Haese Photographies

Philippe Psaïla Cyrille D’Haese Illustrations

Romane Amice





SOMMAIRE INTRODUCTION P. 9

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SUR LA PISTE DES RESCAPÉS DU GONDWANA P. 10-29

02

AU CŒUR DE LA RICHESSE BIOLOGIQUE P. 30-55 NOUVELLE-CALÉDONIE 2005

03

TRAQUEURS D’INSECTES DANS LES TSINGY P. 56-75 MADAGASCAR ET TSINGY 2007

04

MISSION AU PAYS DES KIWIS P. 76-93 NOUVELLE-ZÉLANDE 2010

05

PAYSAGES SANS LIMITES P. 94-131 PATAGONIE 2005, 2007, 2011, 2015

06

COLLECTE FRUCTUEUSE EN PAYS PONDO

07

CHASSE AUX INSECTES AU PAYS DES KANGOUROUS P. 168-195

08

FRAGMENTS DE CONNAISSANCES GONDWANIENNES

P. 132-167

PONDOLAND 2012

AUSTRALIE 2013

P. 196-215

CONCLUSION P. 216



UNE AVENTURE SCIENTIFIQUE AU CŒUR DU VIVANT

INTRODUCTION Depuis 2005, les entomologistes et naturalistes des missions Cafotrop – Rescapés du Gondwana parcourent les zones australes de la planète, année après année, à la recherche d’insectes tapis dans les sombres couverts forestiers ou perchés sur la haute canopée, entre terre et ciel. Pour y parvenir, ils utilisent les méthodes des grimpeurs d’arbres pour atteindre les houppiers et les hautes branches, sans endommager les fragiles écosystèmes que constituent le feuillage et la faune qu’ils hébergent. Là, ils espèrent découvrir des spécimens nouveaux, qui permettront de répondre aux nombreuses questions qu’ils se posent. Et en particulier celle-ci : comment la faune et la flore d’un supercontinent très ancien, appelé Gondwana par les géologues, ont-elles évolué pour aboutir à la biodiversité actuelle, influencée de plus par la lente dérive des continents issus de sa fragmentation ? C’est à cette aventure scientifique hors du commun que vous invite cet ouvrage, conçu comme un voyage à la fois dans le temps et dans l’espace. Le temps, c’est celui des ères géologiques révolues depuis des millions d’années, du temps du supercontinent gondwanien, dont les insectes débusqués en Australie, en Patagonie, en Afrique du Sud et ailleurs sont les descendants, ou « rescapés »… L’espace, c’est celui des « points chauds » de la biodiversité de l’hémisphère austral qu’explorent, depuis 2005, les missions Cafotrop – Rescapés du Gondwana. Dans ces « hotspots », la richesse des faunes et des flores, la plupart du temps endémique, est particulièrement élevée. En explorant et en dévoilant, lors de leurs missions naturalistes de terrain, l’extraordinaire variété du monde vivant, résultat d’une évolution ininterrompue depuis l’apparition de la vie il y a 3,5 milliards d’années, les membres de Cafotrop n’ont pas seulement révélé des secrets biologiques précieux pour répondre à leurs interrogations. Ils ont surtout pris conscience, année après année, de l’extrême fragilité des milieux qu’ils étudiaient, et de l’action inexorable des activités humaines sur ces écosystèmes. Et si la leçon principale des missions Cafotrop – Rescapés du Gondwana était cellelà : la transmission aux générations futures d’une planète aussi riche biologiquement et préservée que possible n’est-elle pas le principal défi qui se pose à l’humanité pour les décennies qui viennent ? Belle exploration sur la piste des Rescapés du Gondwana !

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03 TRAQUEURS D’INSECTES DANS LES TSINGY MADAGASCAR

COMPOSITION DE L’ÉQUIPE : Cyrille D’Haese, Cafotrop, CNRS Éric Guilbert, Cafotrop, MNHN Lionel Picart, Cafotrop Philippe Psaïla, Cafotrop Jaona Ranaivo, botaniste au Centre National de Recherche en Environnement de Madagascar

Daniel Razafimamonjy, mycologue au Centre National de Recherche en Environnement de Madagascar

Charlotte Razafindrakoto, entomologiste au FOFIFA (Centre National de la Recherche Appliquée au Développement Rural) de Madagascar

2005

2007

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LES RESCAPÉS DU GONDWANA

Le tingide Dicysta tristanopsidis, montre, en transparence, l’abdomen situé sous les « hémélytres », qui sont bien plus grandes que l’abdomen. On trouve cette espèce sur les lianes du genre Tristanopsis, d’où le nom de l’espèce.

DEUX STRATÉGIES DE PONTE CHEZ LES TINGIDAE Dicysta tristanopsidis, qui réalise une ponte groupée, et Nobarnus picarti, « adepte » de la ponte dispersée, illustrent deux stratégies distinctes apparues au cours de l’évolution. Dans la première stratégie, une fois l’accouplement réalisé (en haut), les œufs sont pondus de manière dispersée (au milieu) et la femelle, qui ne possède pas d’hémélytres hypertrophiées, abandonne la ponte sitôt celle-ci terminée. Pour la seconde stratégie, la femelle pond les œufs en groupe et protège la ponte au moyen de ses hémélytres hypertrophiées (en bas). Les deux stratégies visent à minimiser la prédation selon deux voies distinctes. Dans la première, la dispersion des œufs maximise les chances que quelques-uns ne soient pas repérés par des prédateurs, et survivent. Dans le cas de la ponte concentrée, la stratégie est celle du « tout ou rien » : soit tous les œufs survivent si la ponte n’est pas victime d’un prédateur, soit tous sont détruits et consommés. La stratégie des pontes groupées est dite « dérivée », contrairement à la ponte dispersée qui est dite « ancestrale ». La première est donc apparue plus tardivement que la seconde au fil de l’évolution, et constitue une nouveauté, relative bien sûr, chez les tingides.

Dans le cas de la ponte groupée, c’est la femelle, ou l’une des femelles qui protège la ponte qui est exposée aux prédateurs. Elle augmente ainsi les chances de survie de la ponte. Tous les cas de comportements de ponte ne sont pas documentés, mais l’hypothèse de l’évolution des comportements est déduite des liens de parenté entre espèces.

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1. Un criquet noir découvert lors de la mission au Pondoland.

2. À Beacon Hill, la mission a découvert dans la forêt ce magnifique représentant de la famille des Zygenidae, un papillon de nuit qui reste actif durant la journée.

3. Cette cétoine de l'espèce Pachnoda sinuata est assez commune en Afrique du Sud. Elle peut atteindre 2,5 cm de long. La larve se développe dans des pelotes composites de détritus. Cette espèce est floricole

et on la trouve aussi dans les fruits très mûrs et les roses dont elle extrait le jus.

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ESCALE FRUCTUEUSE À MTENTU

Forte de cette belle trouvaille, et des nombreux spécimens collectés par tous ses membres, la mission quitte le 22 novembre la station de Mkambati pour se diriger plus au nord. À quelques heures de marche de la station se trouve l’embouchure du fleuve Mtentu, que nous devons traverser pour atteindre, sur l’autre rive, une auberge rustique mais confortable qui sera notre quartier général pour explorer des parcelles de forêt galerie aux alentours. La traversée se fait en canoë. Pas question de mettre un pied dans l’eau, car les requins apprécient particulièrement les estuaires ! Parvenus sur l’autre rive, l’endroit paraît à peine habité, avec très peu de cases. Et pourtant… Le deuxième soir, un groupe de villageois vient à notre rencontre, dont des hommes vêtus de costumes traditionnels. En forme de bienvenue, ils nous honorent d’une danse guerrière, qui rappelle la lutte contre l’envahisseur anglais, accompagnée du son du tambour et de la

chorale des femmes. Les quelques jours d’exploration passés à Mtentu nous permettent de visiter plusieurs parcelles forestières, essentiellement des forêts galerie sur pentes. Ces dernières sont douces, heureusement, ce qui nous permet d’équiper plusieurs arbres de bonne taille, une vingtaine de mètres de hauteur environ. Sur les branches et dans la canopée, les récoltes d’insectes sont bonnes. Éric a le plaisir de débusquer un tingide particulier, de l’espèce Plesionoma capenieri. Peu abondamment récoltée en général par les entomologistes, cette espèce, que l’on croyait donc rare, se trouve en réalité en abondance dans les arbres, dans lesquels les entomologistes ne grimpaient pas par le passé. Il « suffisait » donc aux chercheurs de grimper dans les houppiers et la canopée, aidés en cela par les techniques d’accès à la cime au moyen de cordes, pour réaliser une moisson beaucoup plus satisfaisante !

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UNE AVENTURE SCIENTIFIQUE AU CŒUR DU VIVANT

4. Une chrysomèle de la famille des Chrysomelidae. C’est un « brouteur » de feuilles que l’on trouve en abondance dans la canopée.

5. Les scarabées récoltés par Olivier, comme ces cétoines, sont rangés et stockés sur des couches pour le transport. Une patte de chaque spécimen est prélevée et plongée dans de l'alcool en vue du séquençage de son ADN. Sur cette

couche, plusieurs spécimens de Chondrorrhina trivittata ont été rangés. Pages suivantes - Sur les bords de la rivière Mtentu, les villageois accueillent la mission avec une danse guerrière, accompagnée du

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chant des femmes et d'un tambour, en guise de bienvenue. Le thème de la danse rappelle le conflit avec les Anglais pendant la colonisation de l’Afrique du Sud.

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