ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL GUIDE PRATIQUE POUR UNE STRATÉGIE DURABLE
AVEC LA COLLABORATION DE
OCTOBRE 2014
ÉDITEUR RESPONSABLE Stefan
Maes, rue Ravenstein 4, 1000 Bruxelles Maes RÉDACTION Werner Lapage, Annemie Nolf, Dirk Vandendaele, Johan Van Praet NOS REMERCIEMENTS À Serge Beke, Liesbeth Broeckx, Carole Dembour, Katleen Engelen, François Gilson, Filip Lapeirre, Frédéric Motte, Christopher Turner, Geert Vancronenburg, Françoise Van De Gaer, Olivier Vanden Borre, Pascale Wauters, Peter Wuyts MISE EN PAGE ET PRÉPRESSE Landmarks IMPRESSION Graphius Group RESPONSABLE DES PUBLICATIONS Stefan
DÉPÔT LÉGAL D/0140/2014/8 Deze brochure is ook verkrijgbaar in het Nederlands This brochure is also available in English
Le contenu de cette brochure est disponible sur le site www.feb.be (Publications > Publications gratuites) Les informations contenues dans la présente brochure ont été rassemblées avec le plus grand soin possible par les experts de BDO et d’ING Belgique. Ni BDO et ING Belgique, ni la FEB ne peuvent en aucune manière être tenus pour responsables d’éventuelles informations incomplètes ou erronées contenues dans la brochure. Ni BDO et ING Belgique, ni la FEB ne peuvent en aucun cas être tenus pour responsables d’éventuels dommages directs, indirects, secondaires, économiques ou consécutifs découlant de l’utilisation des informations ou données tirées de la présente publication. Toute reproduction et/ou publication d’un extrait quelconque de cette publication, par des moyens électroniques ou autres, en ce compris les systèmes d’information automatiques, sont interdites sauf autorisation écrite préalable de l’éditeur, à l’exception de brèves citations aux fins de recension.
ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL GUIDE PRATIQUE POUR UNE STRATÉGIE DURABLE
REPOUSSER LES FRONTIÈRES Si nos pouvoirs publics veulent favoriser le développement de l’activité économique, avec toutes les répercussions positives que cela entraîne en termes de croissance et d’emploi en Belgique, ils doivent d’urgence prendre des mesures qui permettraient de renforcer la compétitivité, de renforcer l’attractivité de notre pays et d’améliorer le climat entrepreneurial. Nos entreprises doivent en effet pouvoir se battre à armes égales et affronter la concurrence sur les marchés étrangers. Cela va de soi. Au cours de la décennie écoulée, le commerce international est passé à la vitesse supérieure. Les échanges commerciaux de biens et de services se sont intensifiés. Ce n’est plus le marché national, mais le monde qui est le cadre de référence. Les entreprises qui développent des activités internationales créent une nouvelle dynamique qui permet de passer à la vitesse supérieure, que ce soit au niveau de la conception, du développement, de la production ou de la mise sur le marché des produits et services. De surcroît, il est de plus en plus difficile de réaliser seul l’ensemble de la chaîne de valeur. Des clusters spécifiques, liés à des segments d’activités particuliers et regroupant à la fois partenaires (fournisseurs) et concurrents, émergent de plus en plus souvent. S’insérer dans ces réseaux permet entre autres de bénéficier d’un vivier de talents, de coûts salariaux plus faibles et de stimuler l’innovation. Bref, l’entreprise qui veut optimiser son développement et sa croissance doit regarder au-delà des frontières et être attentive aux dimensions mondiales du business. De leur côté, les chefs d’entreprise doivent saisir les opportunités là où elles se présentent. Le commerce international n’est plus une opportunité facultative pour bon nombre d’entreprises, mais une condition irréversible pour pouvoir se développer. Dans le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui, en constante mutation, les entreprises qui veulent survivre doivent sans cesse se réinventer. Leur devise doit être : ‘Don’t wait for a miracle, make one !’.
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Il n’est cependant pas évident de se tourner vers l’étranger. La route est semée d’embûches. Parmi celles-ci, on peut citer les formalités administratives, la gestion des risques, la gestion des ressources humaines, l’accès au financement, sans négliger les différences culturelles à peine objectivables. Chaque entreprise doit définir la stratégie qui lui convient le mieux : les exportations, des investissements directs à l’étranger, la collaboration avec des partenaires ... compte tenu de la distinction fondamentale entre les échanges internationaux de produits et de services. Dans cette brochure, des experts vous guident et répondent aux nombreuses questions que se pose une entreprise qui a des ambitions internationales. Tout au long de la brochure, sept chefs d’entreprise témoignent de leur savoir-faire international et de leur expérience pratique du business international. Nous espérons qu’ils vous inspireront dans vos projets à l’étranger.
Pieter Timmermans Administrateur délégué de la FEB
Rik Vandenberghe CEO ING Belgique
Hans Wilmots CEO BDO Belgique
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AVANT-PROPOS - REPOUSSER LES FRONTIÈRES LA GLOBALISATION, MOTEUR D’INDUSTRIALISATION COMMENT S’ARTICULE CETTE BROCHURE ? CASE EVS Broadcast Equipment Interaction constante entre marché et innovation
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01 Une bonne préparation, c’est déjà la moitié du travail
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CASE Mithra Pharmaceuticals Faire correspondre le modèle belge au marché local
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02 Une structure juridique pour l’activité étrangère 1. Collaboration avec un partenaire local 1.1. Représentation locale 1.2. Joint venture Présence locale propre 2. 2.1. Collaborateur 2.2. Bureau (ou ‘branch office’) 2.3. Filiale (ou ‘subsidiary’) 3. Impact comptable et en termes de technique d’audit
03 Entreprendre à l’international : quid de l’aspect fiscal ? 1. Principes de base 2. Collaboration avec un partenaire local 3. Présence directe au niveau local 3.1. Collaborateur local 3.2. Succursale ou antenne 3.3. Filiale CASE Jan De Nul Group La connaissance livresque ne suffit pas
04 Travailleurs à l’étranger 1. Protection sociale et en droit du travail 2. Détachement de travailleurs
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3. Application de la législation locale 4. Office de sécurité sociale d’Outre-mer 5. Statut fiscal du travailleur étranger CASE La Lorraine Bakery Group Verrouiller les acquis avant de poursuivre la croissance
05 Paiements internationaux & cashmanagement 1. Espace unique de paiement en euro (SEPA) 1.1. Instruments de paiement identiques 1.2. Nouvelles opportunités 1.3. Analyse de l’architecture de paiement 1.4. Domiciliations SEPA 1.5. SEPA, évolutions récentes 2. Cashmanagement international CASE TPF Espagnols en Espagne, Brésiliens au Brésil
06 Gestion des risques à l’international 1. Le risque commercial 2. Le risque politique 3. Le risque de fabrication 4. Le risque de change 5. Le risque administratif 6. Le risque économique 7. Le risque de transport 8. Le risque juridique CASE Cartamundi L’Apple de l’industrie de la carte à jouer
07 Formes et risques du financement CASE T Ter er Beke Une expansion en ECE implique davantage qu’un simple ‘copier/coller’ INTERNET ACCROÎT LES POSSIBILITÉS D’EXPORTATION CONCLUSION BESOIN D’AIDE ET D’INFORMATION ?
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LA GLOBALISATION, MOTEUR D’INDUSTRIALISATION L’économie mondiale et le commerce international ont fortement évolué ces dernières décennies. Le glissement de la richesse est particulièrement marquant. Auparavant, celle-ci était largement concentrée entre les mains du monde industrialisé (80% du PIB mondial et 20% seulement pour les pays en croissance et en développement). On assiste aujourd’hui à un rééquilibrage en faveur de ces derniers, de l’ordre de 60%-40% respectivement (source : Fonds monétaire international, FMI). Et les prévisions montrent que cette tendance va se poursuivre dans les prochaines années. À titre d’exemple, le FMI prévoit qu’en 2018, la part de la Chine dans le PIB mondial sera quasi égale à celle de la zone euro (autour des 15% chacun), alors que l’écart vingt ans plus tôt était encore de 20% !
PART DANS LE PIB MONDIAL (EN % ; SOURCE : FMI)
Autre évolution notable : depuis 1980, le commerce mondial, qui constitue un indicateur de la globalisation de notre économie, a crû deux fois plus vite que le PIB mondial. Sur ces dix dernières années, et malgré l’année 2009 qui a subi de plein fouet l’impact de la crise financière, le commerce mondial de biens a augmenté de 184%, tandis que celui des services a connu une hausse de 171%, soit une croissance annuelle de 12,2% et 11,5% respectivement entre 2002 et 2012 (source : UNCTAD, United Nations Conference on Trade and Development).
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En 2002, les États-Unis, l’Allemagne et le Japon étaient les trois plus grands exportateurs de biens dans le monde. Une décennie plus tard, le centre de gravité s’est déplacé : la Chine s’est emparée de la première place et les pays BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) sont passés d’une part de marché de 8,4% en 2002 à 17% en 2012, tandis que les pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) connaissaient généralement un recul de leurs parts de marché à l’exportation de biens. Tout comme les exportations de biens et services, les investissements directs étrangers1 (IDE) ont également explosé. Leur stock est passé d’environ 2.000 milliards USD en 1990 à plus de 22.000 milliards en 2012. Plus de 52% des flux d’IDE vont vers des économies en développement (par exemple : Afrique du Sud, Brésil, Chine, Chili, Argentine, Mexique, Thaïlande…), 42% vers des économies développées et 6% vers des économies en transition (par exemple : Russie, Ukraine, Kazakhstan…). En 2012, les premières destinations, représentant 30% du total, étaient les États-Unis (170 milliards USD) et la Chine (120 milliards USD, en excluant Hong-Kong), suivis par le Brésil (65 milliards USD) et le RoyaumeUni (62 milliards USD). Ces flux d’investissements directs étrangers sont issus majoritairement des pays de l’Union européenne, et en particulier de l’UE-15. Individuellement, si les USA dominent toujours, on assiste depuis une dizaine d’années à une présence renforcée des économies à fort potentiel de croissance telles que la Russie, le Brésil, le Mexique, la Chine, la Turquie ou encore l’Inde. Une troisième tendance marquante de la globalisation de l’économie est le fait que la chaîne de valeur des biens et services soit devenue de plus en plus intégrée au niveau international. On parle d’ailleurs maintenant de ‘Global value chain’ : un produit/service passe par quantité de pays (et de continents) avant d’atteindre le stade fini et d’être proposé sur le marché. Chaque pays contribue à une phase du cycle de production en fonction de ses atouts. Autrement dit, chaque pays ajoute de la valeur en fonction des domaines dans lesquels il est compétitif (manufacture de biens intermédiaires, assemblage final…). 1
Les investissements directs étrangers sont des mouvements internationaux de capitaux réalisés en vue de créer, développer ou maintenir une filiale à l’étranger et/ou d’exercer le contrôle (ou une influence significative) sur la gestion d’une entreprise étrangère.
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L’internationalisation revêt une importance vitale Ces développements ont pour conséquence que la concurrence, rendue mondiale, s’est également accrue. Les entreprises, qu’elles interviennent en amont ou en aval de cette chaîne de valeur, doivent sans cesse se remettre en question, s’adapter, se développer et continuer à innover pour rester dans le coup. Et dans ce contexte, l’internationalisation des activités est devenue de plus en plus vitale pour une entreprise si elle veut rester compétitive. Ceci est confirmé par un sondage auprès des dirigeants d’entreprise belges2 : plus de 90% sont d’accord avec le fait que faire des affaires à l’étranger est d’une importance stratégique pour leur entreprise ; plus de 95% même estiment que, par rapport à il y a dix ans, il est encore plus important aujourd’hui pour une entreprise d’être active à l’international. En bref, le maintien de la compétitivité est l’une des premières motivations pour développer des activités à l’étranger. Une composante importante à cet égard est la recherche de l’efficience en termes de coûts, de la main-d’œuvre et de l’énergie par exemple. Mais la compétitivité va bien au-delà d’une structure des coûts saine. D’autres aspects sont tout aussi importants. Les entreprises doivent continuer à innover pour consolider un avantage concurrentiel. Elles doivent à cet effet pouvoir disposer notamment de main-d’œuvre qualifiée et d’institutions de recherche de pointe, ainsi que d’espaces et d’infrastructures pour pouvoir grandir. Afin de rester compétitif (ou de l’être encore plus), il est nécessaire d’optimiser le développement de l’entreprise dans une perspective globale. Ainsi, il peut être plus efficient de réaliser certaines activités ou fonctions de l’entreprise dans certaines parties du monde. On pense évidemment en premier lieu à la délocalisation ou à l’externalisation des activités intensives en main-d’œuvre dans les pays où elle est encore bon marché. Mais le prix n’est pas le seul facteur déterminant. Certaines régions du monde se profilent de plus en plus sur des activités à haute valeur ajoutée (par exemple : R&D en Inde). Des clusters spécifiques, liés à des segments d’activités particuliers et regroupant à la fois partenaires (fournisseurs) et concurrents, émergent. S’insérer dans ces réseaux permet entre autres de bénéficier d’un vivier de talents et de stimuler l’innovation. Notamment pour mieux comprendre et ensuite répondre aux demandes particulières de chaque région, puisque les goûts et préférences des consommateurs ne sont pas partout pareils.
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En mai-juin 2014, la FEB a organisé un sondage auprès des chefs d’entreprise belges. Plus de 400 réponses ont été recueillies. Parmi les entreprises répondantes, 52% occupent moins de 50 travailleurs, 27% ont entre 50 et 250 travailleurs, et 21% plus de 250 travailleurs. La répartition par secteur d’activités est la suivante : 48% dans l’industrie, 40% dans les services et 12% dans le secteur de la construction.
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Le sondage révèle que la proximité géographique de partenaires intéressants est particulièrement importante pour le secteur des services ainsi que pour des petites entreprises : près de 20% de celles-ci la considèrent comme la raison principale pour développer leurs activités à l’étranger, contre 11% pour les moyennes entreprises et seulement 4% pour les grandes entreprises. Par contre, la réduction des coûts représente une plus grande motivation à mesure que la taille de l’entreprise augmente.
Choisir les marchés porteurs Pour de nombreuses entreprises belges, la demande interne de biens et services n’est pas suffisante. Vu la relative petite taille du marché belge, une entreprise avec des ambitions de croissance doit se tourner vers l’international et apprivoiser de nouveaux marchés. Le sondage le confirme. Les deux principales raisons qui ont poussé les chefs d’entreprise à se tourner vers l’international sont d’une part, la nécessité d’explorer de nouveaux marchés (pour 52% des sondés) et d’autre part, la saturation du marché belge (16%). Cependant, les entreprises belges ciblent encore trop les pays voisins. Selon les chiffres de la Banque nationale de Belgique, les entreprises belges exportent en majeure partie vers des pays à croissance lente, et en particulier vers la zone euro, qui se caractérise par une très faible croissance (voir graphique ci-dessous). Nos principaux marchés d’exportation sont l’Allemagne, la France et les PaysBas, qui représentent plus de 45% de nos exportations. Les entreprises belges devraient donc aller voir un peu plus loin, par exemple du côté des pays BRIC, qui connaissent des taux de croissance bien plus élevés.
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CROISSANCE ÉCONOMIQUE EN 2014 (EN % ; SOURCE : PRÉVISION FMI)
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Un parcours semé d’embûches La route vers l’international est semée d’embûches. 60% des entreprises sondées estiment que de nombreux obstacles freinent toujours leur ambition internationale. Parmi ces obstacles, l’on note surtout : les formalités administratives (26%), la gestion des risques (19%), la gestion des ressources humaines (15%), l’accès au financement (12%) et les différences culturelles (12%). En étudiant d’un peu plus près les résultats du sondage, on peut épingler le fait que les formalités administratives arrivent systématiquement en tête du ‘classement’ des obstacles, quelles que soient la taille ou les activités de l’entreprise. La gestion des ressources humaines semble être un point d’attention en particulier pour les entreprises de taille moyenne. Le financement représente un obstacle d’autant plus important que la taille de l’entreprise est restreinte. Ceci n’est pas surprenant dans la mesure où les entreprises de grande taille disposent en général de plus de ressources propres et ont plus facilement accès à un financement externe. Inversement, la gestion du risque devient plus importante à mesure que la taille de l’entreprise augmente. On peut y voir sans doute un effet du volume d’activités ainsi que du nombre de marchés actifs (par exemple, en matière de risque lié aux taux de change). De nombreuses difficultés dépendent bien entendu de la manière dont une entreprise va pénétrer les marchés internationaux, soit par le biais d’exportations, soit par le biais d’investissements directs à l’étranger. Si elle choisit d’exporter ses produits, elle devra supporter des coûts fixes (tels que les coûts liés à la recherche d’un partenaire local), la réglementation en vigueur sur le marché étranger et la présence de barrières non tarifaires. Elle devra également supporter des coûts variables, principalement les coûts liés au transport et les barrières tarifaires. Par contre, si l’entreprise décide d’établir une unité de production ou une filiale à l’étranger, elle ne devra supporter ‘que’ les coûts fixes liés à l’acquisition ou la construction de celle-ci, mais ces coûts seront généralement plus élevés que dans le cas d’exportations. C’est notamment pourquoi la plupart des entreprises préfèrent tester un marché spécifique par le biais des exportations avant de déterminer leur stratégie d’entrée.
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COMMENT S’ARTICULE CETTE BROCHURE ? Les entreprises belges sont conscientes de l’importance stratégique croissante de faire des affaires non seulement avec l’étranger, mais aussi à l’étranger. Entreprendre à l’international comporte de nombreuses facettes dans des domaines divers. Cette brochure vous offre en 7 chapitres un aperçu et des points de repère dans cette matière complexe et riche en défis. Nous illustrons les principes théoriques par les exemples pratiques, des témoignages de chefs d’entreprise qui expliquent l’impact stratégique de leur processus d’internationalisation.
Le premier chapitre souligne l’importance d’une bonne préparation et connaissance du marché. En effet, le mode de gestion belge ne peut être appliqué tel quel à l’étranger. De plus, il est préférable de connaître à l’avance la réponse à certaines questions essentielles. Nous énumérons les principales d’entre elles. Un facteur déterminant de la réussite est la structure juridique choisie pour l’activité étrangère. Dans le deuxième chapitre, nous analysons les diverses possibilités depuis la collaboration avec un partenaire local jusqu’à l’investissement direct à l’étranger (collaborateur local, succursale, filiale). À chacune ses caractéristiques et ses formalités propres. Le choix de la structure juridique appropriée a également une incidence fiscale importante. Le manque de connaissance de la réglementation fiscale internationale peut coûter cher
à l’entreprise et hypothéquer les avantages liés aux activités étrangères. Le troisième chapitre commente les points d’attention et les risques, mais pointe aussi un certain nombre d’opportunités. Quelle que soit la manière d’aborder le marché étranger, les activités ne peuvent se déployer sans personnel. L’entreprise qui engage des collaborateurs à l’étranger doit respecter les règles du jeu internationales en matière de fiscalité et de droit social. Nous les présentons au chapitre 4. La protection du personnel et le climat social jouent aussi un rôle dans ce contexte. Entreprendre à l’international s’accompagne de paiements internationaux. Le chapitre 5 explique entre autres ce qu’est le SEPA (Single Euro Payments Area) qui est devenu la norme en Belgique depuis 2014. Nous vous exposons les opportunités et
atouts de ces instruments de paiement identiques. L’entreprise qui se lance sur un nouveau marché étranger atterrit sur un terrain inconnu ou moins connu et doit donc évaluer correctement les risques possibles. Le chapitre 6 décrit les risques tout en soulignant la nécessité de les maîtriser et en suggérant des solutions concrètes. Nous pointons également quelques domaines apparentés, comme le management de la réputation, la responsabilité du fait des produits, la propriété intellectuelle et les contrats internationaux. Que l’entreprise limite ses activités internationales à l’exportation pure ou qu’elle élabore effectivement une structure propre, elle aura toujours besoin d’un financement des fonds de roulement ou autres actifs. En fonction des opportunités ou risques spécifiques, il existe de nombreuses formes de financement et des solutions sur mesure. Au chapitre 7, quatre experts expliquent cette matière. Enfin, vu l’importance croissante de l’e-commerce dans les affaires (internationales), nous consacrons quelques pages à ce thème. Quelle est l’influence de l’e-commerce sur l’économie belge ? Les entreprises belges sontelles conscientes de son impact sur leur activité, leurs outils internet sont-ils adaptés à un contexte international et aux moyens de communication modernes (smartphones, tablettes…) ?
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CASE EVS BROADCAST EQUIPMENT
INTERACTION CONSTANTE ENTRE MARCHÉ ET INNOVATION
© EVS
La présence d’experts EVS sur place est un must pour pouvoir répondre au mieux aux exigences des chaînes de télévision. La plateforme est en effet particulièrement complexe et nécessite un long processus d’apprentissage. “Par ailleurs, une interaction constante entre marché et En 1994, lorsqu’EVS a lancé sa plateforme innovation est essentielle. Chaque chaîne, chaque marché, applique ses propres de diffusion numérique révolutionnaire normes opérationnelles et technologiques pour l’industrie télévisuelle, le marché mondial s’est imposé comme un objectif spécifiques. Il appartient dès lors à nos inévitable. En effet, “la dimension experts présents sur place de reconstituer internationale est inhérente à notre les chaînons manquants et d’alimenter notre technologie de retransmission”, explique centre d’innovation.” Et inversement. Cet le CEO CEO Joop Janssen. équilibre entre les attentes spécifiques du client et les innovations qu’EVS souhaite introduire sur le marché garantit une L’entreprise a véritablement pris son croissance constante. “C’est absolument envol à l’occasion des Jeux olympiques d’Atlanta, en 1996. “Nous transmettions indispensable, à tel point que nous avons même mis sur pied des centres d’innovation les images en direct, avec des rediffusions locaux en vue d’une meilleure adéquation instantanées, pour les toutes dernières avec le marché. De plus, cela nous permet caméras de Panasonic.” Ces JO ont de combler le manque de personnel qualifié marqué le début d’une nouvelle ère pour des fonctions très spécifiques dans télévisuelle et ont permis à l’entreprise notre région d’origine, à savoir la région belge de se faire connaître au niveau international. Un an plus liégeoise.” tard, la première filiale voyait le jour aux États-Unis. Partout dans le monde, le client bénéficie du même traitement et de la même expérience EVS. Pour maintenir cette réputation, il faut CHAÎNONS MANQUANTS que les expats puissent s’adapter à la culture Connaissances, savoirlocale. “Il est essentiel de choisir les bons faire et qualité constante constituent la force collaborateurs, car il faut jusqu’à deux ans du business avant que vous puissiez constater que cette model de adaptation n’a pas réussi. Autant de temps l’entreprise. perdu pour l’entreprise…”
Joop Janssen, CEO d’EVS Broadcast Equipment
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communication. Quelle que soit la qualité de votre produit, si vous ne communiquez pas efficacement à son sujet, vous perdrez – injustement – des clients au profit de la concurrence. Ne vous laissez pas influencer par les commentaires positifs provenant du marché (domestique) fermé, mais fiez-vous davantage au feed-back des décideurs et clients étrangers.”
INNOVATION
La plateforme d’EVS est pour le moins innovante. “Pour rester au top, la moitié de nos investissements en personnel sont consacrés à la R&D, par le biais de nos centres d’innovation propres ou de petites acquisitions.” EVS organise la vente et les services en fonction des spécificités du marché, par le biais de filiales propres ou de partenariats ou autres structures. “Masse critique, coût salarial, politique locale… constituent des facteurs de décision importants. Ainsi certains clients préfèrentils par exemple importer le matériel informatique mais organiser le support au niveau local, et ce, pour des raisons fiscales.” Tout qui veut s’assurer le succès sur le long terme doit, “dans ce contexte international évoluant sans cesse, oser prendre des risques calculés quant aux nouveaux investissements, partenariats et business models innovants.” Dernier conseil pour conclure : “Ne sous-estimez pas l’importance de la
“Il ne faut jamais considérer le succès international comme un acquis. Pour rester au top, la moitié de nos investissements en personnel sont dédiés à la R&D”
EVS Broadcast Equipment Activité : télédiffusion Marchés : sport, divertissement, actualité et médias Siège : Liège Effectif (2013) : 486 collaborateurs Étranger : plus de 95% du chiffre d’affaires Chiffre d’affaires (2013) : 129,1 millions EUR 21 filiales (dont 6 centres d’innovation) dans 14 pays à travers le monde www.evs.com
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Une bonne préparation, c’est déjà la moitié du travail
À première vue, l’internationalisation semble attrayante et très simple. Détrompez-vous, c’est une des stratégies commerciales les plus complexes, car elle a un impact sur tous les aspects de la gestion. De plus, la réussite ne dépend pas que de la connaissance des règles du jeu et des habitudes culturelles. Réfléchissez donc mûrement avant de vous lancer sur un marché étranger.
La mondialisation s’est intensifiée grâce aux évolutions technologiques (comme internet) et à l’affaiblissement des entraves commerciales (songeons par exemple à l’élargissement de l’UE à 28 États membres). Le centre de gravité du pouvoir économique s’est déplacé. La définition classique de ‘l’étranger’ ne se limite plus aujourd’hui aux pays voisins ou, par extension, à l’UE (région où les entreprises belges sont les plus actives selon le sondage de la FEB).
Depuis dix ans, les BRIC (que l’Afrique du Sud a rejoint ultérieurement) sont devenus des eldorados économiques. Depuis, les États MINT (Mexique, Indonésie, Nigéria et Turquie) enthousiasment les dirigeants politiques du monde entier, en raison surtout de leur situation géographique stratégique. Bref, avec l’émergence des BRIC et des MINT, ‘l’étranger’ est devenu littéralement une notion très large qui couvre pratiquement le ‘reste du monde’. De plus, le schéma de pensée classique qui distingue, d’une part, les ‘économies occidentales’ et, d’autre part, les ‘pays à bas salaires’ n’est plus valable. Ainsi l’Inde et la Chine connaissent des évolutions technologiques extrêmement rapides et rattrapent l’avance occidentale. Théâtre du business, ce monde redessiné crée des opportunités énormes. Le sondage de la FEB montre que quasi tous les chefs d’entreprise interrogés sont convaincus de l’importance stratégique, encore croissante, des transactions internationales. À première vue, l’internationalisation semble attrayante et très simple, mais c’est une des stratégies commerciales les plus complexes. Les affaires à l’étranger et en Belgique ont peu
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de points communs. Internet regorge de conseils aux chefs d’entreprise qui se sont mis en tête de se tourner vers l’étranger. Ceux-ci se limitent souvent aux différences culturelles et dans le domaine des affaires. Or, la réussite à l’étranger repose sur un bien plus grand nombre d’éléments que la connaissance de quelques règles protocolaires et des habitudes culturelles. BELGIQUE ≠ ÉTRANGER
Il est souvent erroné de considérer que les techniques de gestion qui réussissent en Belgique fonctionneront également à l’étranger. Dans la pratique, les entreprises sont confrontées à des réglementations locales compliquées, à des concurrents locaux forts, à des canaux de distribution complexes, à des différences culturelles et linguistiques... Ces défis – ou entraves si vous préférez – augmentent à mesure que les affaires avec l’étranger (exportation) deviennent des affaires à l’étranger (investissement direct à l’étranger). Ainsi, une entreprise belge peut limiter son activité internationale à des transactions de marchandises (par ex. livraisons à la France, exportations au Canada) organisées depuis le siège belge. 16
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Les formalitĂŠs (TVA, douane...) et les risques (lire le chapitre ‘Gestion des risques internationaux’) peuvent alors ĂŞtre gĂŠrĂŠs efďŹ cacement Ă partir de la Belgique. Mais lorsqu’elle constate que ses produits s’Êcoulent de mieux en mieux sur le marchĂŠ français et canadien, cette mĂŞme entreprise peut dĂŠcider de s’Êtablir sur place. Il va de soi que ce choix revĂŞt une tout autre dimension et a un impact beaucoup plus important sur la gestion. La stratĂŠgie menĂŠe Ă l’Êtranger doit ĂŞtre axĂŠe sur une expansion internationale qui assure Ă l’entreprise ou au groupe une croissance rentable tout en garantissant la couverture du proďŹ l de risque le plus ĂŠtendu. Ă€ cet effet, une connaissance approfondie du marchĂŠ local est essentielle. L’outil pratique ‘BDO International Business Compass’ (www.bdo-ibc.com) vous permet d’Êvaluer les opportunitĂŠs et entraves en matière d’investissement dans 174 pays sur la base de paramètres ĂŠconomiques, politiques, juridiques et socioculturels. Il est aussi possible de comparer deux pays entre eux. Consultez aussi www.ingcb.com/insights/articles/theview-a-fresh-perspective-on-connected-europe. Cette ĂŠtude dĂŠveloppe de nouvelles idĂŠes sur notre monde complexe en mutation rapide.
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Ă&#x2030;TUDE PRĂ&#x2030;ALABLE APPROFONDIE
Opter pour une prĂŠsence locale Ă lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtranger nĂŠcessite une ĂŠtude prĂŠalable approfondie. Voici une liste de questions que vous devez vous poser. Attention, elle nâ&#x20AC;&#x2122;est pas exhaustive. Quelles sont les principales considĂŠrations qui me poussent Ă investir Ă lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtranger (avantages par rapport Ă lâ&#x20AC;&#x2122;exportation/ importation) ? Quelle expĂŠrience ai-je de lâ&#x20AC;&#x2122;internationalisation ? Existe-t-il un partenaire local ? Quâ&#x20AC;&#x2122;est-ce qui dĂŠtermine mon choix de pays et quels avantages offre le pays (ou une rĂŠgion dĂŠterminĂŠe) pour mon entreprise ? Ai-je pris les bons conseils, non seulement via internet, mais aussi auprès dâ&#x20AC;&#x2122;experts habituĂŠs Ă la matière et au pays (autorisations, système juridique, ďŹ nancier, ďŹ scal, assurances, personnel, instances publiques, incitants ďŹ scaux, subventions, propriĂŠtĂŠ intellectuelleâ&#x20AC;Ś) ? Ai-je les collaborateurs (avec assez dâ&#x20AC;&#x2122;expĂŠrience, de savoir-faire et de temps) et les moyens ďŹ nanciers et techniques nĂŠcessaires pour gĂŠrer et soutenir le projet ĂŠtranger ?
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ENTREPRENDRE Ă&#x20AC; Lâ&#x20AC;&#x2122;INTERNATIONAL
FEB
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Comment vais-je structurer ma présence à l’étranger ? Vais-je opter pour un collaborateur ou un partenaire local, une succursale, une filiale, une joint venture…? Quels sont les formalités et coûts liés à la création, la gestion, la sortie éventuelle de la structure (coûts de création, capital ou autres exigences de financement, comptabilité, impôts, personnel, conseillers, liquidation...) ? Comment vais-je financer la structure (mix capital/emprunt) et comment vais-je organiser les flux d’argent (et dans quelle devise) ? Quel sera le rôle de l’investissement étranger (production, achat ou vente, distributeur, commissionnaire, agent, ‘liaison-office’, support...) ? Ai-je analysé le ‘transfer pricing’ et les aspects fiscaux liés au transfert de fonctions, de risques et de moyens vers l’étranger ?
Suis-je conscient des risques complémentaires liés aux activités internationales (risque commercial et économique, risque de change, risque de transport...) ? Comment vais-je rapatrier les fonds et les bénéfices et est-ce possible sans retenues et formalités locales ? Cette brochure examine la plupart des sujets précités afin de vous guider dans la concrétisation de vos ambitions internationales. Il n’existe pas de réponse globale ou univoque à toutes les questions, mais une bonne préparation, associée à un business plan motivé et à un suivi précis, est essentielle à la réussite de vos projets. Donc, ‘always be prepared’, car un simple faux pas peut vous couler. Faire des affaires en Chine est une autre paire de manches qu’en faire en Turquie ou aux Pays-Bas par exemple.
LES ENTREPRISES FAMILIALES ET L’ÉTRANGER Les entreprises familiales sont en général plus conservatrices, plus réticentes face au risque et plus centrées sur le contrôle que les entreprises non familiales. Plusieurs études (et le sondage de la FEB) montrent que la stratégie d’internationalisation des activités présente souvent d’autres accents dans les entreprises familiales :
1. 2. 3.
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Elles s’internationalisent prudemment (avec une plus grande crainte du risque et sur la base d’une vision à long terme) et plus près de chez elles (plutôt des pays voisins en raison de la faible distance et de la meilleure connaissance de la langue et des habitudes) ; Elles conservent leur indépendance et mettent moins de moyens à disposition (entre autres parce qu’elles sont peu disposées à partager la propriété, à renoncer au contrôle et à attirer du capital à risque) ; Elles s’internationalisent relativement lentement et plus tard (approche plus centrée sur le marché local et management ayant moins d’expérience internationale).
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CASE MITHRA PHARMACEUTICALS
FAIRE CORRESPONDRE LE MODÈLE BELGE AU MARCHÉ LOCAL
© Mithra Pharmaceuticals
“Le modèle top-down dans lequel les géants de la pharmacie imposent leur conception sur un marché étranger est définitivement dépassé”, lance François Fornieri, CEO CEO de la société liégeoise Mithra Pharmaceuticals, spécialiste de la santé féminine. Outre le produit ou le service, la stratégie de marché doit se greffer de manière innovante sur la culture et les modes de vie locaux.
Un simple exemple : dans le domaine du traitement hormonal de substitution de la ménopause (THS), la tendance en Europe est à la prescription de traitements à base d’hormones naturelles. Ces produits contiennent des hormones dérivées de la progestérone et de l’œstradiol qui sont dépourvues d’effet androgénique. Au Brésil, par contre, la tendance est à la prescription de THS légèrement androgénique.
Une subtile différence qui a toute son importance et qui doit-être prise en compte si l’on désire être entendu sur un marché que l’on appréhende. “Celui qui ne comprend pas cela ne pourra jamais réussir sur un autre marché que le sien.” Quinze ans après sa création et un parcours turbulent – avec la reprise de la structure R&D (Uteron Pharma) par l’américain Watson/ Actavis et une entrée en bourse avortée, à cause du climat économique défavorable –, ce challenger est aujourd’hui leader du marché des contraceptifs en Belgique et au Grand-duché de Luxembourg, avec plus de 43% de parts de marché. “Mais ce sont de petits marchés dans le secteur pharmaceutique. Si nous voulons éviter de disparaître tôt ou tard, l’internationalisation est la seule option”, explique Fornieri pour motiver l’expansion internationale de sa société. Mais cela ne peut se faire sans une base solide, sans ancrage local. “Nous devons être en mesure de développer, produire et commercialiser de manière innovante nos produits de niche et ne plus dépendre de producteurs qui, au gré de leurs stratégies, font varier les prix, et peuvent nous mettre en difficulté. Si nous voulons continuer à exister, nous devons progressivement maîtriser l’ensemble de nos coûts – Mithra construit un site de R&D et de production entièrement neuf à Flémalle. C’est fondamental pour moi. Je ne cherche pas l’aventure pour l’aventure. Je souhaite créer, à terme, une structure complètement intégrée capable d’affronter les nouveaux défis de ces nouveaux marchés.”
François Fornieri, CEO de Mithra Pharmaceuticals Liège
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INTÉGRER LOCALEMENT UN MODÈLE ÉPROUVÉ
Fornieri choisit les marchés étrangers en fonction de leur stabilité sociale, économique et politique. Pour lui, il est essentiel de comprendre le marché pour mieux l’appréhender. “L’important est de comprendre la mentalité locale et cela passe toujours par une phase de prospection. Nous nous rendons sur le terrain, le plus souvent dans le cadre des missions économiques. Nous rencontrons les ‘opinion leaders’, les universités, nous entrons dans les pharmacies et poussons les portes des Ministères, des hôpitaux et des cabinets médicaux afin de nous familiariser avec les us et coutumes locaux. Notre philosophie de travail, c’est avant tout notre modèle, le ‘Modèle Mithra’, basé sur les synergies collaboratives et les partenariats privés-publics. Nous travaillons notre approche corporate grâce aux collaborations avec les universités, nous travaillons à la sensibilisation des populations locales plus défavorisées aux questions de la santé féminine, nous mettons l’accent sur l’accessibilité de nos produits, nous intervenons en tant que société exportatrice citoyenne dans la vie sportive et culturelle, avec toujours ‘les femmes’ au cœur de nos préoccupations.” En résumé, Fornieri prend le temps de reproduire à l’étranger – intelligemment, en l’adaptant au marché local – le modèle éprouvé de Mithra, qui est un succès en Belgique grâce à son ancrage économique, académique et culturel fort. “Ce qui est possible au Brésil ne réussira jamais en Chine ou en Inde.”
De plus, Fornieri ne se sent pas à l’aise dans un modèle qu’il ne maîtrise pas. “Je veux être sûr de mon affaire, avoir confiance dans la faisabilité et la praticabilité du modus operandi que nous introduisons.” C’est pourquoi Fornieri choisit avec soin ses investisseurs et ses actionnaires. “Rien n’est plus contre-productif à terme que des partenaires industriels qui veulent croître trop vite et négligent dès lors des opportunités vraiment valables. C’est pourquoi je préfère m’entourer de personnes qui croient dans la valeur ajoutée du dossier et osent regarder au-delà des chiffres des analystes.”
Mithra Pharmaceuticals Activité : Pharmacie. Leader du marché belge de la contraception orale Quartier général : Liège Collaborateurs (2014) : +/- 60 Chiffre d’affaires (consolidé 2013) : 20 millions EUR Accords de distribution dans plus de 30 pays Filiales aux Pays-Bas, au Brésil, en Allemagne, en France, au Grandduché de Luxembourg Avenir : Asie du Sud-est (via Singapour) et Amérique du Sud (via le Chili) www.mithra.be
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Une structure juridique pour l’activité étrangère
Lorsqu’on se rend sur un marché étranger, il convient de choisir une structure juridique appropriée. Ce choix est souvent dicté par l’ampleur des activités, la présence de collaborateurs et (l’expérience des) conditions de travail locales. Des facteurs importants sont les coûts, le temps et les formalités nécessaires pour le lancement et la gestion de la structure étrangère.
Les conseils d’un spécialiste ne sont pas un luxe. En effet, tous les pays n’appliquent pas les mêmes concepts. Diverses restrictions peuvent s’appliquer selon la nature des activités (certaines sont simplement interdites), la région où vous développez votre activité, la forme juridique choisie (une filiale est parfois obligatoire), l’obligation d’associer des partenaires locaux au capital (des joint ventures sont parfois nécessaires), etc. Par ailleurs, il est important d’exploiter toutes les opportunités (souvent régionales) en termes de subventions, de zones de libre-échange... Dans ce chapitre, nous examinons les concepts juridiques les plus fréquents pour la structuration d’une activité à l’étranger.
1 COLLABORATION AVEC UN PARTENAIRE LOCAL La connaissance du marché local est vitale pour lancer une activité à l’étranger. La législation locale peut être extrêmement complexe (le Brésil en est un bon exemple) et la barrière linguistique peut amplifier le
problème. En cas d’expérience insuffisante, la collaboration avec un partenaire local peut faciliter le démarrage. Celui-ci a généralement un meilleur accès aux clients locaux. Sachant que les règles diffèrent d’un pays à l’autre, il est important de vérifier au préalable quelle est la forme de collaboration locale (nature des accords conclus et intensité de la collaboration) la plus indiquée.
1.1. Représentation locale Pour aborder le marché local, on peut faire appel à un représentant externe, comme un distributeur, un commissionnaire ou un agent. Il existe de nombreuses autres formes de collaboration commerciale (franchise, concession, licence…) que nous n’aborderons pas dans cette brochure ! Un distributeur agit en son nom propre et pour son propre compte vis-à-vis des clients. Les efforts de l’entreprise belge sur place en matière de marketing, livraison des marchandises, contacts avec les clients et perception des factures sont donc minimes. À l’inverse, l’agent (‘disclosed agent’) agit au nom et pour le compte de son donneur d’ordre (‘principal’). Sa tâche consiste à négocier avec le client local pour favoriser la conclusion de contrats de vente. Le client connaît donc le donneur d’ordre (d’où le terme ‘disclosed’). L’agent reçoit une commission en échange de son intervention. Les fonctions et les risques afférents à l’activité se concentrent surtout sur le donneur d’ordre. Il faut savoir que, dans de nombreux pays, les agents commerciaux sont soumis à un statut légal spécial, assorti de droits et d’obligations spécifiques.
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Enfin, il y a le commissionnaire (aussi appelé ‘undisclosed agent’), une forme intermédiaire entre le distributeur et l’agent. Sachez toutefois que certains pays ne connaissent pas ce concept (la Russie, la Turquie et la Grèce par exemple). À l’inverse de l’agent, le commissionnaire agit en son nom propre (comme un distributeur), mais pour le compte de son donneur d’ordre (comme un agent). Le client final connaît donc uniquement le commissionnaire, pas le donneur d’ordre (d’où le terme ‘undisclosed’). Les fonctions d’un commissionnaire sont plus étendues que celles d’un agent ; ainsi, il se charge de la facturation aux clients. Comme l’agent, le commissionnaire reçoit une commission en rémunération de son intervention.
en matière de marketing) et supporte des risques importants. Songeons au risque lié au stock, au risque de défaillance et au risque de change (lire le chapitre ‘Gestion des risques internationaux’).
La rémunération d’un distributeur est sensiblement plus élevée que celle d’un agent ou d’un commissionnaire parce qu’il est propriétaire juridique, assume plus de fonctions et de responsabilités (par ex.
1.2. Joint venture
L’avantage de travailler avec un représentant externe est qu’en dehors de la rédaction d’un contrat avec le partenaire local, l’entreprise belge ne doit en principe pas remplir de formalités d’enregistrement locales. La vente par l’intermédiaire d’un partenaire externe s’accompagne toutefois d’une perte de contrôle. Certaines choses, comme les objectifs et les conditions de livraison, peuvent être régies par le contrat, pour autant qu’elles ne soient pas en conflit avec la législation locale.
Une entreprise belge peut créer une société distincte avec un partenaire local ou acquérir une partie des actions d’une société existante. Dans ce cas, on parle de joint venture. Cette forme de collaboration est très indiquée pour une entreprise belge qui a trop peu d’expérience du pays pour pouvoir accéder à son marché. En effet, le partenaire peut ouvrir les portes de clients locaux potentiels. Une joint venture est parfois la seule manière pour les entreprises belges de s’introduire dans une société étrangère. En effet, certains pays (par ex. la Chine et l’Inde) ne permettent pas ou seulement de manière limitée qu’une entreprise étrangère entre dans une société locale. Ces restrictions sont souvent liées au secteur dans lequel la société locale est active. Le système de la joint venture est donc souvent utilisé pour un projet spécifique non récurrent à l’étranger.
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L’entreprise qui élabore une structure de placement avec un partenaire local doit tenir compte des spécificités juridiques de cette structure. Elle perd en effet une partie du contrôle. Ainsi, il est sans doute important que la maison mère belge puisse garder l’autorité exclusive pour la technologie et le savoirfaire fournis, ainsi que pour la répartition des bénéfices.
2 PRÉSENCE LOCALE PROPRE Une entreprise belge peut faire gérer ses affaires à l’étranger par un collaborateur engagé sur place, par un bureau local ou par une société.
2.1. Collaborateur L’entreprise belge peut engager un collaborateur local. La présence de celuici est idéale pour une première exploration du marché étranger. Cette personne peut également servir de canal commercial et conclure des contrats avec des clients étrangers. Vous pouvez par exemple engager un représentant commercial local. Le rôle de celui-ci est comparable à celui d’un agent commercial (‘disclosed agent’, voir plus haut) : il visite les clients et négocie les ventes possibles. La principale différence est que le représentant commercial est un travailleur et qu’il dépend donc de l’entreprise belge. Les formalités pour l’entreprise belge se limitent à un enregistrement comme employeur.
2.2. Bureau (ou ‘branch office’) L’entreprise belge peut décider d’ouvrir un bureau local. Celui-ci est le prolongement de la société mère belge et ne constitue pas une
entité juridique distincte. Commercialement, c’est donc l’entreprise belge qui opère à l’étranger. Le bureau peut (même si certains pays imposent des restrictions) déployer lui-même des activités commerciales, comme la vente, l’assemblage, etc. Mais il peut aussi se limiter à collecter des informations sur le marché ou à faire du lobbying et de la promotion. Dans ce cas, on parle d’un bureau de représentation (aussi appelé ‘bureau de liaison’ ou ‘liaison office’). Un bureau de représentation n’a pas d’activités commerciales et ne conclut donc pas de contrats avec des clients, ni ne reçoit de rémunérations pour des prestations commerciales. Les formalités juridiques locales dépendent de la mesure dans laquelle vous voulez formaliser votre présence. On parle alors de succursale formelle. À l’inverse d’une filiale locale, une succursale nécessite moins de formalités (pas d’acte constitutif, de statuts, de capital minimum libéré, etc.). La procédure d’enregistrement d’une succursale consiste essentiellement à réunir et traduire des documents officiels de l’entreprise belge qui doivent être déposés dans le pays où la succursale est établie. De plus, la maison mère belge de la succursale devra souvent appliquer les règles comptables locales, avec toutes les formalités administratives et les coûts supplémentaires que cela implique. Certaines entreprises estiment que la responsabilité illimitée qui incombe à l’entreprise belge pour les activités de la succursale est un problème. En effet, la maison mère belge sera mise à contribution par exemple si la succursale manque d’actifs ou pour éponger ses dettes
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2.3. Filiale (ou ‘subsidiary’) Si les activités étrangères comportent beaucoup de risques, il peut être utile de les confier d’emblée à une personne juridique distincte à responsabilité limitée. De cette manière, elles n’ont pas d’influence sur le résultat de la maison mère belge. Dans certains pays, il est en outre très important du point de vue commercial de s’adresser aux clients locaux au travers d’une société locale et non d’une société étrangère. Enfin, la conservation de l’autorité exclusive en matière de technologie, de savoirfaire et de secrets commerciaux constitue une motivation importante pour opter pour le système d’une filiale.
DIFFÉRENCES
En échange de sa liberté accrue, la filiale doit remplir des formalités étendues. En effet, la filiale est entièrement soumise au droit local et elle doit donc être constituée selon les prescriptions juridiques locales (e.a. forme juridique, capital minimum, exigences spécifiques éventuelles concernant la nationalité et le nombre des actionnaires et administrateurs…). Étant donné que ces prescriptions diffèrent d’un pays à l’autre, il est important de se faire conseiller par un spécialiste local. Certains entrepreneurs optent pour la création d’une entité locale (malgré les charges administratives supplémentaires qu’entraîne cette création) parce qu’elles ont directement accès aux clients locaux et peuvent construire de manière flexible le service et la gestion des clients, sans devoir faire appel à un intermédiaire, comme un représentant local.
SUCCURSALE
FILIALE
Personne juridique distincte
Non
Oui
Formalités et coûts création et fonctionnement
En général, moins de formalités et de coûts (mais des coûts de traduction)
En général, plus de formalités et de coûts
Responsabilité
Société belge responsable
En principe, limitée à l’apport de capital
Commercial
Pour la plupart des parties prenantes, reste une partie ‘étrangère’
Meilleur accès et meilleure visibilité sur les marchés locaux
Administration
Représentant légal désigné par le conseil d’administration de la société belge
Conseil d’administration ou gérant local
Capital
Pas d’exigence de capital. Compte courant avec la société mère
Exigence minimale de capital
Actionnaire
Même actionnaire que la société mère
Société belge en association obligatoire ou pas avec des actionnaires locaux
Autorisations, subsides
Accès nul ou limité
Accès plus aisé
Sortie/restructuration
Sortie plus aisée / possibilité de conversion en filiale
Procédure plus complexe
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3 IMPACT COMPTABLE ET EN TERMES DE TECHNIQUE D’AUDIT L’entreprise belge qui a une succursale formelle ou une filiale à l’étranger doit tenir une comptabilité distincte pour cette entité selon les prescriptions et dans la monnaie du pays d’établissement. La présence à l’étranger devra aussi transparaître dans la comptabilité belge. Ainsi, une filiale figurera au titre de participation dans les actifs du bilan de la société belge. En revanche, dans le cas d’une succursale, tous les revenus, coûts, actifs et passifs de celle-ci doivent être entièrement intégrés dans la comptabilité belge. Les succursales sont souvent considérées comme des entités distinctes en comptabilité (dans la comptabilité analytique) afin de permettre une bonne identification de tous les éléments. On travaille alors avec un compte courant qui enregistre les fonds dédiés à la succursale. Si vous appliquez une comptabilité distincte à l’étranger selon les règles locales, il est très probable que vous deviez la retravailler parce qu’il existe sans doute des différences dans les règles d’appréciation, la dénomination des comptes, l’unité monétaire… De plus, il est conseillé d’insérer au moins tous les six mois les soldes des comptes de la succursale dans la comptabilité centrale de la société belge. Si nécessaire, il faut faire la conversion en euro. Les opérations internes ou dettes et créances mutuelles ne doivent pas être prises en compte.
Dans certains cas, la société mère belge est obligée d’établir et de déposer des comptes annuels consolidés en plus de ses comptes statutaires. Elle doit y intégrer les résultats de sa (ses) filiale(s) étrangère(s). Cette obligation ne s’applique pas si la société belge est elle-même une filiale d’une société qui établit, fait contrôler et publie des comptes consolidés. Ou si les résultats consolidés ne dépassent pas plus d’un des critères suivants : Chiffre d’affaires (hors TVA) : 29.200.000 EUR ; Total du bilan : 14.600.000 EUR , Moyenne annuelle des effectifs : 250.
Les chefs d’entreprise optent parfois pour un bureau local pour avoir un accès direct aux clients locaux Pour le contrôle des comptes annuels d’une succursale, il ne faut habituellement pas désigner de commissaire à l’étranger. En revanche, cela peut être exigé pour une filiale. Lorsque l’activité de la succursale est relativement importante en comparaison avec l’activité exercée en Belgique, le commissaire belge demandera dans la plupart des cas un audit des chiffres de cette succursale, même si la législation locale ne l’impose pas. Le commissaire d’une société belge qui doit déposer des comptes consolidés en fera autant. Il demandera en règle générale un audit des filiales étrangères.
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Entreprendre à l’international : quid de l’aspect fiscal ?
La manière dont une entreprise structure ses activités internationales exerce un impact fiscal considérable, non seulement à l’étranger mais aussi en Belgique. Dès que l’on passe de ‘faire des affaires AVEC l’étranger’ (vendre depuis la Belgique) à ‘faire des affaires À l’étranger’ (présence et activité au niveau local), des règles plus complexes s’appliquent. Toute méconnaissance de la réglementation fiscale internationale peut coûter cher à une entreprise et hypothéquer les avantages liés aux activités exercées à l’étranger. Dans ce contexte, il est souvent indispensable de recourir à l’assistance d’un conseiller local.
1 PRINCIPES DE BASE
reposent sur le modèle de convention fiscale de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Toutefois, il n’existe pas deux conventions identiques : toutes contiennent des dispositions spécifiques. Ainsi les règles fiscales qui s’appliquent aux activités d’une entreprise belge en Allemagne sont-elles différentes de celles qui s’appliquent aux activités de cette même entreprise aux Pays-Bas. Par conséquent, il convient d’examiner chaque situation concrète sur la base des dispositions contenues dans la convention conclue avec le pays où l’activité est exercée. Toute entreprise active dans des pays avec lesquels la Belgique n’a pas conclu de convention de ce type, comme le Panama ou le Qatar, par exemple, risque en revanche de voir ses revenus doublement imposés. 2. LA NOTION FISCALE D’ÉTABLISSEMENT STABLE RENCONTRÉE DANS LES CONVENTIONS PRÉVENTIVES DE LA DOUBLE
Quelques principes de base avant de nous plonger dans l’univers fiscal de l’entreprise internationale : 1. LES CONVENTIONS PRÉVENTIVES DE LA DOUBLE IMPOSITION RÉGISSENT LES RELATIONS FISCALES INTERNATIONALES.
Elles définissent dans quel pays les revenus seront imposés et entendent avant tout (mais n’y parviennent pas toujours) éviter la double imposition. La Belgique a conclu des conventions de ce type avec quelque 90 pays (dont l’ensemble des pays européens à l’exception d’un certain nombre de paradis fiscaux, comme Jersey, Guernesey et Monaco). Sur cette liste figurent également certaines contrées plus ‘exotiques’ telles que Hong Kong et les Émirats arabes unis, qui ne prélèvent pas d’impôts ou très peu. La plupart des conventions préventives de la double imposition conclues par la Belgique
IMPOSITION CONCLUES PAR NOTRE PAYS REVÊT UNE IMPORTANCE CAPITALE.
Cette notion permet en effet de déterminer si les activités opérationnelles d’une société belge sont imposables ou non à l’étranger. Il est généralement question d’un établissement fiscal ’matériel’ (bureau) ou ‘personnel’ (représentant ou agent). Quant aux types d’activités ou de présence physique pouvant constituer un établissement stable (ou non, car il existe des exceptions), tout dépend de la situation concrète ainsi que de l’interprétation de chaque pays. Nous y reviendrons plus en détail au point 3.1, où nous présenterons également un troisième type d’établissement stable (‘établissement de services’). Souvent, les entreprises n’ont pas conscience que même en l’absence de structure internationale, leur présence à l’étranger peut être considérée comme un établissement stable ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
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imposable. Dans ce cas, les bénéfices sont imposés à l’étranger et aucune exonération n’est appliquée en Belgique. Enfin, notez que l’administration de la TVA applique également la notion d’établissement stable mais l’interprète parfois différemment de la définition adoptée pour les impôts directs. Dans le cadre de la TVA, un établissement stable requiert la présence d’un bureau dirigé par un représentant et d’où les activités commerciales sont exercées. 3. S’IL EST QUESTION D’UN ÉTABLISSEMENT STABLE À L’ÉTRANGER AU SENS DE LA CONVENTION, LES RÉSULTATS DE L’ENTREPRISE DOIVENT ÊTRE EXONÉRÉS EN BELGIQUE,
même lorsque le taux d’imposition du pays en question est nettement inférieur à celui de la Belgique (comme en Irlande ou à Chypre, où le taux est de 12,5%). La convention prévaut toujours sur la législation belge.
S’il n’est pas question d’un établissement stable à l’étranger au sens de la convention, le résultat d’exploitation de l’entreprise réalisé à l’étranger est soumis à l’impôt des sociétés en Belgique. Si l’établissement stable à l’étranger réalise des pertes, celles-ci peuvent être déduites des bénéfices belges. Attention toutefois, si cet établissement stable devient ensuite bénéficiaire, la règle de ‘recapture’ s’applique. Les pertes étrangères préalablement déduites en Belgique sont alors ajoutées à la base imposable belge dans la mesure où les pertes fiscales constituées par l’établissement lui-même sont déduites pour la détermination de sa base imposable. L’objectif de cette règle est d’éviter que les mêmes pertes ne puissent être doublement déduites.
EXEMPLE RÉSULTAT MAISON MÈRE EN BELGIQUE
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
200
200
200
200
RÉSULTAT ÉTABLISSEMENT STABLE AVEC CONVENTION (IRLANDE)
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
10
-40
50
30
RÉSULTAT FISCAL MAISON MÈRE-ÉTABLISSEMENT STABLE
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
Résultat belge
200
200
200
200
Résultat établissement stable
10
-40
50
30
210
160
250
230
Exonération bénéfice établissement stable
-10
perte
-10
-30
Base imposable en Belgique
200
160
240
200
Base imposable en Irlande
10
0
10
30
Charge fiscale Belgique (33,99%)
68
54
82
68
Charge fiscale Irlande (12,5%)
1
0
1
4
69
54
83
72
Résultat global
Charge fiscale totale
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FEB ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
4. LA RÉGLEMENTATION FISCALE, LES PROCÉDURES, DÉLAIS ET FORMALITÉS EN VIGUEUR À L’ÉTRANGER DIFFÈRENT SOUVENT
TVA influe sur le traitement TVA des transactions sortantes et entrantes ainsi que sur les formalités TVA à accomplir au niveau local.
DE CE QUI SE FAIT EN BELGIQUE, Y COMPRIS AU SEIN DE L’UE.
Par conséquent, il est possible que les logiciels et systèmes de rapportage utilisés par l’entreprise doivent être adaptés.
L’uniformisation européenne n’est pas encore une réalité L’UE tend vers une plus grande uniformité mais il existe toujours des différences importantes entre les pays. Prenons par exemple l’impôt des sociétés. Dans ce domaine, seules quelques directives ont été adoptées pour permettre le transfert de dividendes, intérêts ou redevances, par exemple, entre des sociétés d’un même groupe UE de manière quasi exonérée ou pour faciliter les restructurations intra-européennes d’un point de vue fiscal (notamment en cas de sortie). La réglementation TVA a fait l’objet d’une harmonisation plus poussée au sein de l’Union européenne. La TVA ayant trait à la fourniture de biens et services, l’entreprise belge se retrouve rapidement confrontée aux obligations TVA locales, tant lorsqu’elle fait des affaires à l’étranger qu’avec l’étranger. Ainsi, l’enregistrement TVA peut non seulement faire suite à un établissement stable ou à l’établissement d’une filiale au niveau local mais peut également être requis par l’entreposage temporaire de biens à l’étranger. Une attention particulière est requise lorsque des flux de marchandises ne correspondent pas aux flux de facturation, par exemple. Le fonctionnement de la TVA s’est en outre vu complexifier par les récentes évolutions technologiques (p.ex. e-commerce). Enfin, le type d’enregistrement
Pour ce qui est des douanes, les marchandises peuvent être négociées librement par les pays de l’UE, sans que des droits de douane doivent être payés. Pour l’importation et l’exportation de marchandises entre pays UE et non UE, les procédures de contrôle et les exigences en matière de documentation sont en revanche nettement plus strictes et des droits d’importation ou d’autres taxes de ce type sont prélevés. Plus de 140 pays du monde entier appliquent un système TVA comparable. En dehors de l’Union européenne, d’autres règles, non uniformes, peuvent également s’appliquer. Ainsi, toutes sortes de taxes indirectes (‘sales taxes’, ‘use taxes’, ‘business taxes’, ‘Goods and Services taxes’…) doivent être payées sur les transactions de biens et de services que l’entreprise belge souhaite effectuer en dehors de l’UE. Certains pays, comme les États-Unis, prélèvent ces taxes au niveau fédéral mais aussi par état et même au niveau local. Ceci implique des obligations supplémentaires, qui prennent souvent beaucoup de temps. 5. DE NOMBREUX PAYS TENTENT D’ATTIRER LES ENTREPRISES ÉTRANGÈRES CHEZ EUX AU MOYEN D’INCITANTS FISCAUX
Quelques exemples : L’Irlande (taux d’imposition de 12,5 %) est intéressante pour l’établissement d’une holding ou d’activités en lien avec la propriété intellectuelle ; Chypre (12,5 %) fait office d’intermédiaire pour les investissements en Russie ou en Europe de l’Est ; Le Luxembourg est extrêmement avantageux pour les activités de financement, de trésorerie et de R&D ; ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
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Malte abrite de nombreuses sociétés de services ; La Suisse est intéressante pour les activités de commercialisation (notamment dans le secteur alimentaire et pharmaceutique) mais aussi pour l’établissement d’une holding ou d’activités en lien avec la propriété intellectuelle ; Hong Kong (0 %/16,5 %) est souvent utilisée comme porte d’accès au marché chinois ; Les Pays-Bas se démarquent (tout comme la Belgique, d’ailleurs) dans les domaines du holding, du financement, des R&D et de la propriété intellectuelle. Étant donné la forte concurrence dans ces domaines (y compris au sein de l’UE), les pays modifient sans cesse leurs régimes. Ainsi, les pays d’Europe de l’Est appliquent généralement des taux d’imposition plus bas : 19% en Pologne et en Hongrie, 16% en Roumanie, 10% en Bulgarie, … Cela dit, la charge fiscale étrangère effective n’est pas déterminée uniquement par le taux d’imposition national des sociétés.
Malte, par exemple, applique un taux nominal de 35% mais la charge fiscale réelle ne s’élève qu’à 5%. À l’inverse, l’Allemagne affiche un taux de 15% mais si l’on ajoute à cela les impôts locaux, la charge fiscale réelle s’élève à plus de 30%. De nombreux pays (dont l’ensemble des pays BRIC mais aussi plusieurs pays d’Europe de l’Est) ont défini des ‘zones économiques spéciales’ sur leur territoire. Au sein de ces zones, une exonération d’impôts totale ou partielle s’applique (‘tax holiday’) sur une certaine période (parfois jusqu’à 10 ans) et des subsides ou d’autres avantages peuvent être octroyés. Les conditions à respecter pour pouvoir profiter de ces avantages dépendent généralement de la région, de la nature de l’investissement ou de l’activité. 6. LA DÉCISION D’ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL PART TOUJOURS D’UNE RÉFLEXION ÉCONOMIQUE/PROFESSIONNELLE PRIMANT SUR DES CONSIDÉRATIONS FISCALES.
Les transferts de bénéfices pour raisons fiscales sans fondement économique sont à proscrire. Du reste, les transactions effectuées par l’intermédiaire de paradis fiscaux font l’objet de la plus grande méfiance de la part de l’administration fiscale (y compris en dehors de la Belgique). Dans un contexte international, il convient également de tenir compte de la réglementation en matière de ‘transfer pricing’ ou ‘prix de transfert’ (soit les prix des biens cédés, des services fournis ou des droits concédés pratiqués entre entreprises liées). Les entreprises liées doivent négocier ensemble comme s’il s’agissait de parties indépendantes. La mise en place de constructions dans le cadre desquelles les bénéfices sont transférés vers un pays doté d’un régime fiscal plus
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avantageux tandis que les fonctions exercées, les risques et les actifs investis – soit la substance économique – sont minimes dans ce pays, sera vivement contestée tant par l’administration fiscale belge que par celle du pays concerné. Les autorités fiscales du monde entier disposent de toutes sortes de règles fiscales leur permettant de lutter contre de tels transferts de bénéfices. Pour chaque transaction intragroupe – par exemple l’octroi d’un prêt, la vente de biens ou services, le partage de services – une rémunération conforme au marché (‘arm’s length’) doit être définie. En toute logique, la rémunération et les bénéfices d’un distributeur étranger (établissement stable ou société) au sein d’un groupe belge doivent augmenter à mesure que le distributeur assume plus de fonctions opérationnelles (logistique, marketing, prospection), plus de risques (risques liés au produit, risque de change, risque de crédit) ou investit davantage d’actifs (liste de clients propre, bâtiments et machines propres) dans le cadre de l’exercice de ses activités. Les prix de transfert faisant l’objet d’une attention accrue de la part des administrations fiscales belges et internationales, il est essentiel de pouvoir justifier le prix appliqué par les fonctions exercées, les risques supportés et les actifs investis. Dans cette optique, il est recommandé de réaliser des analyses comparatives par le biais de banques de données spécialisées (Amadeus, Orbis, …). La ‘Cellule prix de transfert’ belge s’est considérablement développée au cours des dernières années, de sorte qu’elle est désormais en mesure d’effectuer bien plus de contrôles qu’auparavant (quelque 250 sociétés belges ont ainsi été interrogées sur la base d’un questionnaire détaillé au cours des deux dernières années). Bien que la Belgique fasse tou-
jours exception à ce niveau, des obligations de documentation (étendues) s’appliquent dans de nombreux autres pays afin de justifier les transactions intragroupes ainsi que la conformité au marché du prix facturé. Tout qui ne respecte pas ces obligations s’expose à des amendes. Vous économiserez de la salive, du temps et de l’argent en constituant de manière proactive un dossier solide concernant vos prix de transfert. Ci-dessous, nous vous proposons une analyse concrète de divers aspects fiscaux reposant sur les concepts juridiques tels que décrits au chapitre 2.
2 COLLABORATION AVEC UN PARTENAIRE LOCAL Une entreprise belge qui ne peut ou ne souhaite pas être directement présente au niveau local (volume des opérations insuffisant, moyens et effectif insuffisants) peut faire appel à un représentant local indépendant, tel qu’un distributeur, un commissaire ou un agent. Une telle collaboration nécessite la conclusion d’accords détaillés entre les parties afin d’éviter que l’entreprise belge ne se retrouve soumise à des obligations fiscales imprévues. Le risque est en effet que le partenaire local soit considéré comme un établissement stable « personnel » de l’entreprise belge. Ceci vaut surtout dans le cas d’un agent (ou d’un commissaire, dans une moindre mesure) dépendant de l’entreprise belge aux niveaux juridique et économique et habilité à négocier et à signer des contrats, par exemple. Le partenaire externe ne peut être considéré comme un établissement stable lorsqu’il opère de manière indépendante tant au niveau économique qu’au niveau juridique ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
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(opère en son nom propre, à ses propres risques et sans intervention de l’entreprise belge), pour autant qu’il opère dans le cadre de l’exercice normal de son activité (en tant qu’intermédiaire indépendant).
3 PRÉSENCE DIRECTE AU NIVEAU LOCAL Une entreprise belge qui souhaite travailler elle-même le marché étranger peut, en fonction de la structure souhaitée, engager un collaborateur local, ouvrir une succursale ou une antenne (formelle) ou fonder une filiale.
3.1. Collaborateur local Les aspects relatifs au droit social et à la fiscalité personnelle seront abordés au chapitre 4. En marge de ces aspects, si elle décide d’engager un collaborateur local, l’entreprise se retrouvera confrontée à la même problématique qu’en cas de collaboration avec un partenaire externe. Le collaborateur local est en effet considéré comme un établissement stable ‘personnel’ lorsqu’il est habilité, par le biais d’une procuration, à négocier et à signer des contrats au nom de l’entreprise belge à l’étranger. Par conséquent, il est primordial de faire bien attention aux compétences que vous attribuez au travailleur dans le cadre de l’exercice de ses tâches quotidiennes. Il s’ensuit qu’en tant qu’entreprise belge, vous pouvez ‘orienter’ l’existence (ou non) d’un établissement stable de ce type ainsi que les conséquences fiscales qui en découlent en faisant figurer ou non cette procuration dans le contrat de travail. Mais attention, cela ne suffit pas : les faits doivent aller dans le même sens (signature sur les contrats, engagements pris, …). 34
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Dans un certain nombre de conventions préventives de la double imposition conclues par la Belgique (notamment avec l’Argentine, la Chine, Singapour, la République tchèque et le Rwanda), il est également question de la notion d’établissement stable de ‘services’. Sur la base de cette notion, des revenus peuvent être attribués à un établissement même en l’absence de toute ‘installation d’affaires’. Dans ce cas, une entreprise belge peut être considérée comme disposant d’un établissement stable à l’étranger lorsque des membres du personnel prestent des services (y compris de consultance) chez le client sur le territoire (en Chine, par exemple), pendant une durée minimale déterminée (183 jours dans la convention conclue avec la Chine). Attention : une autre particularité (plus ancienne celle-là) s’applique pour les entreprises du bâtiment réalisant des projets à l’étranger. Dans ce cas, c’est la durée du projet qui détermine si un chantier étranger est considéré ou non comme un établissement stable au niveau fiscal. Le délai s’élève en principe à un an mais peut également être plus court (6 mois en France et au Luxembourg, par exemple). Une entreprise de construction belge active moins de six mois sur un chantier en France, en Allemagne puis aux Pays-Bas ne sera ainsi imposable qu’en Belgique pour les 3 projets concernés. En revanche, si le chantier s’étale sur huit mois dans chaque pays, cela donnera lieu à un établissement stable en France, de sorte que seuls les résultats des projets allemand et néerlandais seront imposables en Belgique (l’Allemagne et les Pays-Bas appliquent en effet un délai d’un an).
3.2. Succursale ou antenne Si l’entreprise ouvre une installation d’affaires ou un bureau à l’étranger, il est question d’un établissement stable matériel dans la mesure où cet emplacement fixe est en permanence à la disposition de l’entreprise belge et est utilisé dans le cadre des activités commerciales de celle-ci. Sur le plan fiscal, le fait qu’il s’agisse d’une installation d’affaires formelle ou non ne fait aucune différence. Certains bureaux (situés dans un pays sous convention) ne sont pas considérés comme un établissement stable d’un point de vue fiscal pour autant que leurs activités se limitent à la préparation et au soutien des activités de la maison mère. Ainsi, le bureau suisse d’une entreprise belge ne constituera pas un établissement stable si celui-ci n’est utilisé que pour le stockage de marchandises, en tant que hall d’exposition, à des fins de recherche, etc. Autre exemple typique : le ‘bureau de liaison’. Ce type de bureau de représentation ne constitue pas un établissement stable imposable lorsque les activités qui y sont exercées se limitent à donner des informations concernant les produits/services de la société, sans intervenir d’aucune façon dans la vente de ces produits/services à des clients étrangers. Qu’en est-il des entreprises e-commerce ? Un site web purement informatif ne peut être qualifié d’établissement stable (la fonction de ce site est en effet de soutenir l’entreprise) mais il ne peut opérer de manière complètement indépendante, sans l’intervention de collaborateurs ou le recours à des serveurs, par exemple. Or, dans certains pays, un serveur peut être considéré comme un établissement stable lorsque : le serveur est mis à disposition de manière durable (le recours à des services d’hébergement n’est pas suffisant) ;
le serveur règle l’offre d’un service ou bien, le contrat, le paiement et la livraison (serveur intelligent). La publicité pour un service ou bien est donc insuffisante pour que le site puisse être qualifié d’établissement stable, sauf s’il s’agit là de l’activité principale de l’entreprise en question. Pour les entreprises e-commerce, il conviendra dès lors d’examiner au cas par cas s’il s’agit d’activités de support uniquement ou d’activités principales.
3.3. Filiale En cas de création d’une filiale, la situation fiscale est différente. En effet, une filiale dispose d’une personnalité juridique distincte et d’une comptabilité propre et est soumise à l’impôt des sociétés local ainsi qu’à d’autres règles fiscales éventuelles. La société doit également être dotée d’un contenu substantiel et ne pas avoir été fondée uniquement à des fins fiscales. En effet, il est tentant d’opter pour un pays appliquant une fiscalité avantageuse afin d’échapper à la pression fiscale belge particulièrement élevée. L’administration fiscale belge s’assurera (notamment sur la base d’informations fournies par ses homologues étrangers) que la société étrangère n’est pas dirigée depuis la Belgique ou que les activités de celle-ci ne sont pas exercées en Belgique. D’où l’importance de recruter des administrateurs locaux et d’organiser des assemblées générales d’actionnaires ainsi que des conseils d’administration au niveau local. Dans le pire des scénarios, les résultats de la société seront imposés en Belgique.
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COMPARAISON FISCALE
SUCCURSALE
FILIALE
Taux d’imposition étranger
Pas de différence
Pas de différence
Déduction des pertes étrangères en Belgique
Possible (mais ‘recapture’)
Pas possible
Rapatriement des bénéfices
Automatique/pas de retenue à la source
Dividendes/retenue à la source
Imposition en Belgique du résultat réalisé à l’étranger
Bénéfices de l’établissement exonérés (si convention préventive de la double imposition)
Déduction RDT dividendes perçus
Accès aux ‘incitants fiscaux’
Moins
Plus
Détermination du bénéfice
Plus compliquée (discussions)
Claire (moins de discussions)
Déduction des intérêts, redevances et management fees)
En principe non
En principe oui
‘Taxes de sortie’
Taxation de la plus-value
Optimisation possible
Prix de transfert
Conformes au marché (important)
Conformes au marché (important)
Le financement des activités de la filiale peut se faire par le biais d’un apport en capital ou d’un prêt accordé par la maison mère ou des tiers. De nombreux pays appliquent des règles dites de ‘thin capitalisation’1 pour les emprunts intragroupes. Ceci implique que lorsque la filiale ne dispose pas d’un patrimoine propre suffisant, les intérêts devant être payés sur ces emprunts risquent de ne pas pouvoir être déduits fiscalement, ou seulement en partie. Ces règles diffèrent selon les pays et peuvent être particulièrement complexes. À titre d’exemple, la Belgique applique un rapport 5/1 entre le patrimoine propre et le prêt octroyé. Certains pays refusent également de déduire les intérêts payés dans le cadre d’emprunts contractés pour acquérir des actions. Les intérêts perçus par la société belge sont normalement imposables.
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Les bénéfices de la filiale peuvent être rapatriés vers la société mère belge par le biais de dividendes. En application du système de déduction RDT (revenus définitivement taxés), 95% des dividendes perçus sont exclus lors de la détermination de la base imposable de la société mère belge. Ainsi, un dividende de 100 versé par une filiale (étrangère) sera imposé à un taux de 1,7% en Belgique (33,99% x (100-95% exonérés = 5). L’application de ce système est toutefois soumise à des conditions spécifiques. La société mère doit notamment détenir une participation de 10% au moins dans la filiale ou une participation dont la valeur d’acquisition est égale ou supérieure à 2.500.000 euros, et ce pendant une durée d’un an au moins. De plus, la filiale doit être normalement imposée (soit soumise à un taux d’imposition de 15% au moins). Ce seuil de 15% ne s’applique pas pour les sociétés
‘Thin capitalisation’ ou ‘sous-capitalisation’ signifie que la déduction des intérêts est limitée lorsque le patrimoine propre de la société (capital + réserves) est trop peu élevé au regard de certains de ses emprunts.
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établies au sein de l’UE. Par conséquent, des dividendes distribués par des filiales irlandaises ou chypriotes (12,5%) peuvent également entrer en ligne de compte pour la déduction RDT en Belgique. Lorsque la filiale établie à l’étranger verse des dividendes ou intérêts à la société mère belge, ces revenus sont souvent soumis à une retenue à la source au niveau local. Du reste, ceci vaut également pour les redevances issues de licences. Enfin, de nombreux pays (en Europe de l’Est, en Afrique mais aussi la plupart des pays BRIC) appliquent une retenue dans le cadre du paiement de rétributions pour prestations de services, comme des frais techniques ou de service. Il convient d’en tenir compte lors de la négociation du contrat et de la fixation des prix (pour un projet d’ingénierie, p.ex.). Toute retenue imprévue (allant parfois jusqu’à 30%) peut en effet venir éroder la rentabilité attendue de la transaction (a fortiori lorsque la retenue n’est pas imputable).
législation de l’État de la source. Pour les paiements s’inscrivant dans un contexte européen, la Directive mère-filiale et la Directive intérêts-redevances prévoient, sous certaines conditions, une exonération de retenue à la source pour le paiement de dividendes, d’intérêts ou de redevances entre entreprises liées. Lorsque les directives européennes ne peuvent être appliquées, il est recommandé de toujours vérifier s’il n’est pas possible d’invoquer une convention préventive de la double imposition (y compris avec des pays tiers) prévoyant une réduction ou une exonération du précompte mobilier à la source. Lorsque des intérêts et redevances sont retenus à la source dans le pays étranger, cette retenue peut être imputée sur l’impôt des sociétés belge prélevé sur ces revenus, et ce sur la base de la quotité forfaitaire d’impôt étranger (QFIE) pour les redevances et de la quotité réelle d’impôt étranger (QRIE) pour les intérêts. Toutefois, la plupart du temps, ce crédit d’impôt sera insuffisant pour éviter la double imposition apparue.
Le précompte mobilier dû, le taux et la possibilité de recourir à des exonérations ou réductions éventuelles sont régis par la
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CASE JAN DE NUL GROUP
LA CONNAISSANCE LIVRESQUE NE SUFFIT PAS Jan De Nul Group, le spécialiste des travaux de dragage, est présent chaque jour sur une quarantaine de chantiers internationaux. Cela représente près de 6.000 collaborateurs, dont environ une moitié de personnel navigant sur les 250 navires que le groupe gère. Des travailleurs qui viennent de tous les coins du monde et qui doivent se conformer aux règles locales de droit du travail dans chaque pays où ils sont occupés.
© Jan De Nul Group
“Nous devons négocier chaque projet avec les autorités et les syndicats locaux”, explique, d’expérience, l’ingénieur Yves Bosteels. Comme Area Director, il gère la région ‘Grande Océanie’, dont les principaux pays sont l’Inde et l’Australie. Dispose-t-il d’un volumineux manuel pour chaque pays ? “C’est impossible. La durée de nos projets est généralement trop courte. Si nous revenons dans un pays après cinq ans, les règles du jeu ont généralement changé.” Si le groupe a suffisamment de commandes récurrentes, il peut ouvrir un bureau local qui servira
également de camp de base pour le développement commercial. EXPLORATION
Chaque projet reste une découverte en matière de législation et de droit du travail, même lorsqu’on a beaucoup d’expérience à son actif. “Ainsi, en Australie, il est impossible de commencer des affaires sans négocier au préalable une CCT avec les syndicats au niveau de l’entreprise ou du projet. Une concertation et une préparation insuffisantes sont suicidaires parce que le jeu y est joué impitoyablement.” La règle d’or conseillée par Bosteels : informez-vous auprès de collègues entrepreneurs chevronnés qui ont une expérience locale. “Car les règles écrites ne sont pas seules à compter, les lois culturelles non écrites pèsent au moins autant. D’où l’importance de construire un réseau d’experts expérimentés. La connaissance livresque ne suffit pas.” De plus, les autorités surveillent attentivement – souvent de manière protectionniste – le respect des règles du jeu en matière de permis de travail, de flux et de transferts financiers, etc. “Depuis la crise financière, tous les pouvoirs publics recherchent des moyens supplémentaires. Dans ce contexte, ils donnent une priorité accrue à la réglementation sur le ‘transfer pricing’ (transferts financiers). Mais la définition d’un transfert financier légitime diffère d’un pays à l’autre. Il faut connaître et comprendre les nuances.”
ir. Yves Bosteels, Area Director de Jan De Nul Group
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“Construisez un réseau d’experts expérimentés. La connaissance livresque ne suffit pas” INTELLIGENCE ÉMOTIONNELLE
Enfin, ne sous-estimez pas la composante intelligence émotionnelle. Malgré une connaissance parfaite de l’activité, du contrat, du contenu technique… d’un projet, celui-ci peut échouer par manque d’intelligence émotionnelle – culturellement – correcte. “Le langage non verbal peut varier d’une culture à l’autre. Il faut apprendre à bien interpréter ces différences pour éviter de manquer des signaux qui peuvent être essentiels pour obtenir la réalisation d’un projet. Cette logique s’applique aussi au chef de chantier qui doit s’adapter au contexte local pour pouvoir mener à bien son projet, et donc le résultat financier.”
Jan De Nul Group Activité : travaux de dragage, services maritimes spécialisés pour l’industrie offshore du pétrole, du gaz et de l’énergie renouvelable, génie civil, services environnementaux et développement de friches industrielles Siège : Capellen, Luxembourg Collaborateurs (rapport annuel 2013) : 5.725 Étranger : 80% du chiffre d’affaires (32% en Europe) Chiffre d’affaires (2013) : 2,1 milliards EUR Actif dans 25 pays partout dans le monde www.jandenul.com
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Travailleurs à l’étranger
Quelle que soit la structure juridique choisie à l’étranger, aucune activité ne peut être déployée sans personnel. L’occupation de personnel constitue une composante importante dont les coûts ne sont pas le seul élément que l’entreprise doit prendre en considération. La protection du personnel et le climat social à l’étranger ont aussi un rôle important.
1 PROTECTION SOCIALE ET EN DROIT DU TRAVAIL Le climat social et la concertation peuvent différer fortement d’un pays à l’autre. Cela nous mènerait trop loin de commenter chaque situation spécifique dans cette brochure. Toutefois, il est important de tenir compte des différences, car elles influencent la politique du personnel qui doit être menée. Nous avons déjà indiqué précédemment que les règles appliquées au business ne sont pas les mêmes dans l’UE que dans les pays tiers. Ces différences ont un impact sur la politique du personnel, principalement en ce qui concerne la protection sociale et en droit du travail. Dans chaque domaine, il existe une palette d’instruments juridiques internationaux qui déterminent où sont dus les cotisations sociales et les impôts et quel droit du travail s’applique à l’emploi. Ils sont donc déterminants pour la stratégie et la politique de l’entreprise. Dès que la situation juridique du travailleur est claire, l’entreprise peut définir le paquet salarial, les avantages extralégaux, les assurances complémentaires (pour expatriés)…
En cas d’occupation de personnel à l’étranger, il importe aussi d’être attentif aux formalités d’immigration : permis de travail obligatoire ou permis de séjour. La nationalité du travailleur, le lieu d’occupation et la durée de celleci déterminent les formalités à remplir au préalable.
2 DÉTACHEMENT DE TRAVAILLEURS Lors du lancement d’une activité à l’étranger, c’est souvent la solution la plus simple (détacher) pour y envoyer temporairement ses propres travailleurs et explorer le marché local. Dans une phase ultérieure, le détachement peut aussi offrir une solution optimale (nouveaux projets, maintien d’un lien étroit entre les entreprises, formation de travailleurs…). Le travailleur détaché reste au service de l’entreprise belge, de sorte qu’il n’y a pas ou peu de formalités à accomplir à l’étranger. Ce concept permet d’éviter de devoir enregistrer comme employeur tant l’entreprise belge que l’entreprise étrangère (en création). Sécurité sociale Le grand avantage du détachement en droit social est que le travailleur peut rester soumis à la sécurité sociale belge et peut donc continuer à bénéficier de ses avantages (constitution de la pension, indemnités de maladie, allocations familiales…). Les règles qui s’appliquent au détachement dépendent du pays où le travailleur est détaché.
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Au sein de l’EEE (Espace économique européen) et en Suisse, les règles de coordination déterminent quel système de sécurité sociale est d’application. Ces règles ont pour objectif de protéger le travailleur et d’assurer que les cotisations sociales ne sont payées que dans un seul pays. C’est dans le même but que la Belgique a conclu des accords bilatéraux en matière de sécurité sociale avec des pays tiers (Algérie, Australie, BosnieHerzégovine, Canada – un accord distinct avec le Québec –, Chili, Philippines, Inde, Israël, Japon, Kosovo, Macédoine, Maroc, Saint-Marin, Monténégro, Serbie, Tunisie, Turquie, Uruguay, États-Unis, Corée du Sud et Suisse). Alors que le champ d’application des règles de coordination européennes couvre toutes les branches de la sécurité sociale, ce n’est pas toujours de cas des accords bilatéraux. Ceux-ci se limitent généralement à la détermination du système de sécurité sociale applicable et à la constitution et au paiement de pensions et d’indemnités d’invalidité. La durée maximale du détachement varie aussi. Il convient donc de bien s’informer. Lorsqu’un travailleur est détaché dans un pays qui n’a pas conclu d’accord, il faut toujours vérifier, sur la base de la législation locale, si des cotisations sociales sont dues ou pas. Une affiliation à l’Office de sécurité sociale d’Outre-mer (OSSOM) peut être utile dans ce contexte (voir point 4 ci-dessous). En cas de détachement, il est extrêmement important que le travailleur reste sous l’autorité de l’entreprise belge. Dès qu’une autorité ou une obligation de faire rapport s’applique à l’étranger, les conditions de détachement ne sont plus remplies et des cotisations sociales doivent être payées
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dans le pays d’occupation. En conséquence, vous devez enregistrer l’entreprise comme employeur.
Le travailleur doit toujours bénéficier de la meilleure protection Droit du travail Il est moins facile de déterminer le droit du travail qui s’applique à l’occupation à l’étranger. Les parties sont libres de leur choix à condition de respecter certaines normes minimales dans le pays d’occupation temporaire. En cas de détachement, on choisit généralement d’appliquer le droit du travail belge. Cela ne pose aucun problème pour autant que l’on respecte les instruments internationaux. Ainsi dans l’UE, il faut en tout cas tenir compte des dispositions ‘d’ordre public’ et des ‘dispositions contraignantes’. Autrement dit, cela signifie que le travailleur doit toujours bénéficier de la meilleure protection et qu’on ne peut déroger à certaines conditions de travail minimales.
3 APPLICATION DE LA LÉGISLATION LOCALE Lorsque vous engagez des travailleurs locaux, il va de soi que vous devez appliquer la législation locale. Cela vaut évidemment pour le paiement des cotisations sociales, mais cela aura aussi un impact sur le droit du travail applicable. En cas d’occupation de travailleurs locaux, il faut généralement appliquer le droit du travail du pays d’occupation. Des dérogations ne sont accordées que dans des cas exceptionnels.
De même, lorsqu’un travailleur belge est transféré (temporairement ou pas), il faut respecter la législation locale. Comme employeur, vous pouvez opter pour le droit du travail belge, mais vous devrez toujours respecter certaines conditions de travail minimales du pays d’occupation.
4 OFFICE DE SÉCURITÉ SOCIALE D’OUTRE-MER1 L’Office de sécurité sociale d’Outre-mer (OSSOM) est à la disposition des travailleurs occupés en dehors de l’Espace économique européen (EEE) et de la Suisse. Le travailleur doit avoir la nationalité d’un des pays de l’EEE2 ou être au service d’une entreprise qui a son siège social en Belgique. Lorsque le travailleur est occupé en dehors de l’EEE et de la Suisse, l’affiliation à l’OSSOM peut remédier au manque de protection sociale. Le travailleur conserve en outre un point d’attache avec le système de sécurité sociale belge, ce qui facilite sa réintégration en cas de retour en Belgique. Le régime de l’OSSOM prévoit une assurance de base (pension, maladie et invalidité) qui peut être complétée par une assurance soins de santé, une assurance accidents du travail et une assurance accidents de la vie privée.
5 STATUT FISCAL DU TRAVAILLEUR ÉTRANGER Sur le plan fiscal, on distingue les travailleurs engagés directement sur le marché local (c’està-dire à l’étranger) et les travailleurs belges qui sont occupés non seulement en Belgique, mais aussi à l’étranger. Les travailleurs engagés à l’étranger sont toujours soumis à l’impôt de ce pays conformément à la législation locale. L’entreprise doit donc se faire enregistrer comme employeur à l’étranger pour respecter ses obligations locales. Les résidents belges sont en principe imposables en Belgique sur leurs revenus perçus dans le monde entier, mais lorsqu’ils travaillent à l’étranger, ils peuvent aussi y être soumis à l’impôt. On risque donc de rencontrer un problème de double imposition. Pour l’éviter, on peut invoquer les conventions préventives de la double imposition, conclues par la Belgique. Ces conventions déterminent quel pays est compétent pour percevoir l’impôt. Sur la base de la règle des 183 jours, le travailleur reste imposable dans l’État de résidence lorsqu’il passe moins de 183 jours dans l’État de travail, que la rémunération n’est pas payée par un employeur étranger et qu’elle n’est pas à charge d’un établissement stable à l’étranger. Ces trois conditions sont cumulatives. > suite p. 46
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À partir du 1er janvier 2015, l’OSSOM intégrera une nouvelle institution, l’Office des régimes particuliers de sécurité sociale (ORPSS). Ce dernier prendra en charge à cette date la sécurité sociale d’Outre-mer . Les pays de l’EEE sont les 28 États membres de l’Union européenne, ainsi que l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège.
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CASE LA LORRAINE BAKERY GROUP
VERROUILLER LES ACQUIS AVANT DE POURSUIVRE LA CROISSANCE
© La Lorraine Bakery Group
L’expansion internationale n’est un véritable succès que lorsque l’étranger est devenu un nouveau marché intérieur. Telle est la vision de Guido Vanherpe, CEO CE O de La Lorraine Bakery Group (LLBG). (LLBG). La plus grande boulangerie industrielle du pays est en bonne voie pour devenir également leader du marché en Europe centrale et de l’Est.
“Quand nous avons obtenu un bon résultat, nous devons immédiatement le bétonner de sorte à ne plus perdre cet avantage”. Guido Vanherpe explique en ces termes la stratégie du groupe familial. “Nous ne passons à l’étape suivante que quand cela est garanti. Pour notre internationalisation, nous procédons de la même manière.” En tant que pionnier du pain surgelé précuit, le groupe est littéralement parvenu à repousser ses frontières. Il y a 20 ans, les pays d’Europe centrale et de l’Est étaient quasiment
inexplorés, suffisamment proches de l’Europe occidentale et constituaient de véritables débouchés pour le pain. Après avoir solidement développé nos exportations, nous avons acquis à la fin des années ’90 notre propre usine de production en République tchèque. “Grâce à cet ancrage, nous avons ensuite développé nos exportations vers les pays voisins, comme la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie. Nous avons par la suite appliqué cette même stratégie au départ de la Pologne et, depuis 2011, de la Roumanie, ce qui nous a permis d’exporter plus loin, jusqu’en Turquie ou en Russie.” INTÉGRATION VERTICALE
Sur ses nouveaux marchés, LLBG n’a pas grand-chose à craindre de nouveaux concurrents internationaux, mais la pression des acteurs locaux s’intensifie. “Pour ne pas perdre notre avance, nous avons à présent accéléré nos investissements dans des unités de production ultraperformantes et dans des plateformes logistiques entièrement automatisées. Le groupe entend également développer son intégration verticale en agrandissant sa division ‘Store concepts’, dont Panos est la marque la plus connue. Cela avons donc beaucoup de pain sur la planche pour les trois à cinq prochaines années.”
Guido Vanherpe, CEO de La Lorraine Bakery Group
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“Rien ne demande plus de temps et de patience que la mise en place de l’organisation humaine” Par le passé, La Lorraine a tenté de s’établir en Asie et aux États-Unis, mais elle en est revenue. “Ces marchés étaient trop éloignés et, à cette époque, nous n’avions pas assez de prise sur nos processus et le personnel. En Europe, ces seuils sont moins élevés.”
En règle générale, LLBG emploie des travailleurs locaux. “C’est d’ailleurs notre principal défi”, souligne Guido Vanherpe. “Rien ne demande plus de temps et de patience que la mise en place de l’organisation humaine, la compréhension de la culture locale et l’adhésion du management local à une culture d’entreprise unique. Cela requiert du management et du coaching sur le plan tant des affaires que personnel.” Il faut également évaluer correctement les risques (cours de change, stabilité politique, présence de talent, …), surtout pour ce qui est du business model international de LLBG et investir dans un système uniforme et transparent de services partagés (informatique, finances, ressources humaines, …).
La Lorraine Bakery Group Activité : alimentation – boulangerie industrielle Marchés : frais, surgelé, ‘Store Concepts’ et meunerie Quartier général : Ninove Collaborateurs (2013) : 2.600 Etranger : 1/3 du chiffre d’affaires Chiffre d’affaires (objectif 2013) : 566 millions EUR Vente dans 25 pays (dont 10 via propres filiales de vente/joint ventures) 10 usines de production, dont 3 en Europe centrale et de l’Est: en République tchèque, en Pologne et une joint venture en Roumanie www.llbg.com
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La règle des 183 jours joue un rôle en cas de détachement d’un travailleur belge à l’étranger. Dans la pratique, la majorité des travailleurs figurent sur le livre de paie d’une entreprise étrangère ou les coûts salariaux sont répercutés ou mis à charge de l’établissement stable étranger de l’entreprise belge. Dans ce cas, le revenu professionnel du travailleur est imposable dans l’État de travail (quelle que soit la durée de sa présence). En cas d’emploi international, et plus particulièrement d’occupation simultanée en Belgique et dans un ou plusieurs autres pays, l’employeur peut appliquer un ‘salary split’. Dans ce cas, l’employeur ventile le revenu professionnel imposable entre les différents pays, de sorte que chaque partie est imposée séparément à un taux qui est normalement inférieur au taux qui serait appliqué au salaire complet dans son propre pays. L’employeur évite ainsi que le travailleur échoue dans une tranche d’imposition supérieure. Dans certains cas, il est également possible de bénéficier de régimes fiscaux avantageux prévus spécifiquement pour les cadres étrangers.
Toutefois, les revenus professionnels étrangers exonérés en Belgique en vertu d’une convention sont pris en compte pour fixer le taux d’imposition belge qui est appliqué aux autres revenus imposables (c’est ce qu’on appelle l’exonération avec réserve de progressivité). S’il n’existe pas de convention préventive de la double imposition et que les revenus professionnels du résident belge ont été imposés dans l’État de travail, une réduction (jusqu’à 50%) de l’impôt belge dû sur les revenus professionnels étrangers est accordée. SOURCES - Avis CNC 172-1 ‘Intégration des comptes d’une succursale étrangère’ - BNB (Département informations micro-économiques) ‘Établissement et dépôt des comptes consolidés et du rapport de gestion consolidé’ - Syllabus IEC ‘Impôt des non-résidents’ (présentation du samedi 9 novembre 2013) - Kluwer – Oriëntatie 2012/3 ‘De handelsvertegenwoordiger anno 2012’ à partir de la page 66 - Biblo dossier fiscaliteit 24, Uitgeverij Biblo, Kalmthout (séminaire Biblo, 9 novembre 1994), ‘fiscaliteit over de grens’.
RÉCAPITULATIF SÉCURITÉ SOCIALE DÉTACHEMENT État de résidence
DROIT DU TRAVAIL
FISCALITÉ
Libre choix (dans la pratique : État de résidence avec une attention pour les normes minimales locales)
État de travail, sauf si la règle des 183 jours est remplie
LOCAL
Local
Local
Local
‘SALARY SPLIT’
Dépend de l’État de résidence, de la répartition temporelle et des employeurs juridiques
Libre choix (dans la pratique : État de résidence avec une attention pour les normes minimales locales)
Principe d’occupation internationale. Taxation en Belgique (État de résidence) et à l’étranger
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Paiements internationaux & cashmanagement
Jusque récemment, les paiements internationaux étaient un ensemble complexe de procédures et d’accords entre pays et banques. La Belgique est un des premiers pays d’Europe à avoir achevé le passage à l’Espace unique de paiement en euro (SEPA). Un pas important dans le sens de l’harmonisation et de la simplification des paiements européens. En outre, l’entrepreneur dispose aujourd’hui d’un nombre croissant de possibilités pour optimaliser son cashmanagement international.
désormais d’instruments de paiement identiques. Ils peuvent ainsi, dans la zone SEPA, exécuter leurs paiements et leurs domiciliations de manière uniforme et simple. Le mode d’exécution ne diffère donc plus, quel que soit le pays où sont effectués les paiements ou les encaissements. Désormais, seuls les paiements SEPA existent dans la zone SEPA et les frontières ne constituent plus des obstacles aux paiements. À l’intérieur de cet espace, un paiement transfrontalier en euro est aussi rapide, aussi sûr et est traité aux mêmes conditions qu’un paiement national. Depuis le 1er avril 2014, les virements et domiciliations non conformes à la norme SEPA ne peuvent plus être exécutés en Belgique.
1.2. Nouvelles opportunités
1 ESPACE UNIQUE DE PAIEMENT EN EURO (SEPA) À la demande de la Commission européenne, les banques ont créé un espace unique de paiement européen. Les standards de paiement sont uniformisés dans cet espace (ex. utilisation du format uniformisé du numéro de compte). Ce projet de grande envergure a débuté en janvier 2005 pour s’achever le 1er février 2014 pour les pays dont la monnaie nationale est l’euro. Finalement, la période transitoire a été prolongée jusqu’au 1er août 2014, mais la Belgique, élève exemplaire, a limité cette période au 1er avril 2014. Depuis cette date, tous les paiements effectués sur des comptes belges sont conformes aux nouvelles normes SEPA.
1.1. Instruments de paiement identiques Les consommateurs, les pouvoirs publics, les commerçants et les entreprises disposent 48
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Outre l’exécution transparente et uniforme, le SEPA offre d’autres atouts. Les clients peuvent rationaliser et simplifier leur chaîne de paiement parce que le SEPA utilise un format unique pour tous les types de paiements. De plus, ils peuvent limiter le nombre de comptes, centraliser les activités de paiement dans un seul pays et améliorer et simplifier leurs procédures internes. Il est également plus facile de comparer les tarifs des produits de paiement, avec toutes les opportunités que cela apporte (voir plus loin).
1.3. Analyse de l’architecture de paiement Le SEPA offre de nombreuses opportunités aux entreprises. Il est possible d’exécuter au départ d’un seul compte dans la zone SEPA des domiciliations (direct debits) et des paiements (credit transfers) vers les 33 pays du SEPA. De plus, ces transactions sont considérées et exécutées de la même manière qu’un paiement national.
L’instauration du SEPA est donc l’occasion idéale pour examiner l’architecture de paiement de votre entreprise. Autrefois, de nombreuses entreprises ouvraient des comptes dans différents pays pour permettre à leurs clients de payer leurs factures sur un compte local. On évitait ainsi des transactions transfrontalières ‘onéreuses’. Grâce au SEPA, il est désormais efficace en termes de coûts de fermer ces comptes étrangers et de travailler avec un seul compte centralisé. Cela permet également de limiter la charge administrative et d’utiliser moins de systèmes bancaires électroniques. Un avantage spécifique à la Belgique est que les paiements SEPA sont gratuits dans notre pays. On constate que de plus en plus d’entreprises internationales en profitent et centralisent leurs paiements et leurs encaissements chez nous. C’est une économie considérable et les moyens sont disponibles plus rapidement. En combinaison avec une meilleure planification des paiements sortants, on réalise ainsi un ‘cash forecasting’ plus précis, ce qui permet à certaines entreprises de réduire leur dépendance vis-à-vis des banques.
1.4. Domiciliations SEPA À côté des virements, les domiciliations sont le deuxième pilier du SEPA. Il est désormais possible d’exécuter des domiciliations transfrontalières à l’intérieur de la zone SEPA. Le créancier peut donc utiliser les domiciliations comme moyen de paiement de ses ventes à l’étranger. Il existe deux scénarios : le schéma ‘Core’ (standard) et le schéma b2b. Le grand avantage de la domiciliation SEPA est que le créancier tient les ficelles en main pour la perception de la créance. Il décide en effet
quand il débite le compte du client et quand ses factures lui sont payées. C’est évidemment positif pour ses fonds de roulement. De plus, l’entreprise doit investir moins de temps dans le suivi des factures et elle est plus vite informée de toute anomalie dans les liquidités de son débiteur. Ainsi, le créancier reçoit dans les cinq jours ouvrables un avis de nonexécution de l’encaissement par manque de provision sur le compte de son client. L’entrepreneur doit toutefois tenir compte du fait qu’un ‘direct debit’ peut être révoqué (jusqu’à un délai de huit semaines ; autrefois, ce délai était de quatre jours en Belgique).
SEPA en bref Infrastructure de paiement simplifiée
Harmonisation des paiements dans 33 pays (SEPA Credit Transfers, SEPA Direct Debits) Le numéro de compte devient le numéro IBAN Le BIC (Business Identification Code) est exigé Un seul format de paiement : ISO20022 XML Pour toute information : www.ingsepa.com
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Sans mandat signé valable, ce délai peut même aller jusqu’à treize mois. Toutefois dans les transactions b2b, l’entrepreneur est protégé et il n’y a pas de période de ‘refund’. L’introduction du SEPA a non seulement modifié la durée du délai de révocation, mais aussi le mandat de gestion. C’est désormais le créancier ou l’entreprise qui est responsable de la gestion et plus la banque.
1.5. SEPA, évolutions récentes En complément de tous les avantages du SEPA, les banques prennent des initiatives pour renforcer encore les atouts de l’espace de paiement harmonisé. Citons par exemple :
1. des délais ‘cut-off’ plus courts (échéance
2. CASHMANAGEMENT INTERNATIONAL On a vu que le SEPA offre déjà de nombreuses possibilités aux entreprises qui ont des ramifications internationales pour centraliser la gestion de leurs paiements et de leurs liquidités, du moins dans la zone euro. Le SEPA n’est toutefois pas la solution universelle. Dans la zone euro ou en dehors, les entreprises souhaitent pouvoir centraliser les opérations de débit et de crédit de leurs différentes filiales locales à leur siège. De cette manière, elles peuvent utiliser les liquidités excédentaires d’un pays pour compenser les déficits dans un autre pays. Quelques explications sur une solution possible : le ‘Cross-Border Cash Balancing’.
ultime pour la remise d’un paiement) ;
2. le recours aux ‘payments/collections on behalf of’ (POBO et COBO) offre de nombreuses possibilités pour centraliser davantage votre cashmanagement et réduire le nombre de comptes bancaires. Il va de soi qu’un logiciel ERP ou comptable performant est nécessaire à la réussite d’un projet de centralisation ; 3. le recours accru aux ‘category purposes’ (ex. INTC intercompany, SALA (salaires)…) permet une réconciliation comptable plus efficace et un reporting plus performant.
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Le SEPA n’est pas la solution universelle Le ‘Cross Border Cash Balancing’ implique que les paiements sont initiés et gérés automatiquement par la banque, au nom du client, par-delà les frontières et donc entre ses différents comptes locaux. Ces opérations sont exécutées entre un compte ‘maître’ – ou compte centralisé – et différents comptes locaux participants. Le client peut déterminer lui-même si un montant doit rester disponible sur les comptes participants après l’exécution des paiements ou pas. C’est pourquoi on parle de ‘Cross Border Target Cash Balancing’.
Toutefois, dans la plupart des cas, le montant cible est nul. Cela signifie que les comptes participants sont totalement liquidés au profit du compte maître. Le résultat est que les liquidités disponibles sur les comptes participants sont transférées au compte maître. En centralisant ces liquidités, le chef d’entreprise peut optimaliser ses intérêts (payer moins ou recevoir plus) et il a une meilleure perception et un meilleur contrôle de la situation quotidienne des liquidités de son entreprise. Il peut également mieux tirer parti des opportunités de placements à court terme ou d’avances à court terme.
Ajoutons que des solutions de centralisation sont aussi possibles entre plusieurs banques. On parle alors de ‘Multi Bank Funding and Sweeping’. Dans ce cas, l’entreprise peut liquider des comptes auprès d’autres banques en faveur de son compte centralisé auprès de sa banque principale.
En ce qui concerne le timing, la centralisation entre les comptes se fait traditionnellement à la fin de la journée bancaire. On parle alors de ‘End of Day Cash Balancing’. L’entreprise peut aussi décider de centraliser ses fonds plus tôt dans la journée. On parle alors de ‘Intraday Cash Balancing’. Cette centralisation anticipée sur le compte maître permet au client d’encore utiliser ces fonds le jour même. Les entreprises doivent avoir conscience que le ‘Cash Balancing’ implique l’échange effectif de liquidités entre différentes sociétés appartenant à un même groupe. Ces échanges sont qualifiés de ‘prêts intragroupe’. Il est donc extrêmement important que l’entreprise dispose d’une bonne application pour gérer tout cela. De manière générale, les produits de ‘Cash Balancing’ sont surtout utiles pour les entreprises qui ont un chiffre d’affaires élevé et une trésorerie entièrement centralisée.
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CASE TPF
ESPAGNOLS EN ESPAGNE, BRÉSILIENS AU BRÉSIL Le respect mutuel et le management local sont deux facteurs critiques du succès de la stratégie d’acquisition mondiale de TPF. TP F. 15 ans à peine après ses premiers pas timides à l’étranger, le spécialiste et consultant belge de l’engineering a des filiales dans 35 pays répartis sur quatre continents.
© TPF
En 2000, TPF a créé sa première filiale au Portugal. “Le marché belge était saturé. La diversification par l’internationalisation était la seule option pour pérenniser notre croissance”, explique le fondateur et CEO Thomas Spitaels moteur de l’expansion de TPF. “Si l’on n’évolue pas, on se marginalise. Nous sommes actifs dans un marché en cours de consolidation où la concurrence ne cesse d’augmenter.
En nous internationalisant, nous différencions notre savoir-faire tant horizontalement que verticalement. Grâce à des activités complémentaires, nous développons des connaissances qui nous permettent de faire fructifier notre cœur de métier. Deux avantages concurrentiels non négligeables.” ACQUISITIONS LOCALES
Depuis sa création en 1991, le groupe a doublé son chiffre d’affaires tous les trois ans. En Belgique, TPF est le troisième plus gros consultant. Spitaels ne recherche pas la croissance pour la croissance. Il veille à ce qu’aucune acquisition ne menace l’équilibre financier du groupe. “Nous évitons ainsi de devoir payer des dividendes trop élevés et nous pouvons renforcer nos fonds propres. Cela nous permet de réagir vite et de manière adéquate lorsqu’un marché ne suit plus.” TPF fait de préférence le choix stratégique d’acquisitions locales ; rares sont les opérations entièrement nouvelles. L’expérience montre que l’intégration d’entreprises locales offre la meilleure chance de pouvoir jouer vite un rôle significatif sur le marché local. “À condition de traiter les entrepreneurs locaux avec respect et comme des égaux. Nous nous efforçons de garder ces collaborateurs le plus longtemps possible. En effet, ils connaissent le marché local avec ses pièges et ses sensibilités mieux que quiconque. L’essentiel est de ne pas nous poser comme les Belges qui savent
Thomas Spitaels, fondateur et CEO de TPF
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comment il faut faire, mais de nous centrer sur les valeurs et les normes communes. Bref, d’être Espagnols en Espagne, Brésiliens au Brésil, etc.”
“En nous internationalisant, nous différencions notre savoir-faire tant horizontalement que verticalement” AUTONOMIE FORTE
Cet ancrage local donne au management local une autonomie forte. “Si notre filiale portugaise détecte une opportunité en Angola, qu’est-ce qui empêche le siège belge de refuser ? La filiale ne reçoit certes pas carte blanche, mais bien la confiance et quelques directives stratégiques.
Ce modèle de coopération renforce la relation et, à terme, certainement aussi le business. Les chiffres ne nous contredisent en tout cas pas.”
TPF Activité : Engineering et consulting (construction, infrastructure/ transport, eau/énergie) Quartier général : Forest Collaborateurs (2014): 3.750 Chiffre d’affaires (pronostic 2014) : 250 millions EUR Actif dans 51 pays, filiales dans 35 www.tpf.eu
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Gestion des risques à l’international
Comment se prémunir ? Les échanges commerciaux avec l’étranger stimulent le développement de votre entreprise. Mais cela ne se fait pas sans risque : la situation géopolitique actuelle, les récentes crises bancaires et économiques peuvent freiner cette expansion. Dans ce chapitre, nous analysons les risques les plus courants et la manière dont vous pouvez vous en protéger.
Vous souhaitez explorer de nouveaux marchés et avez identifié quelques pays prometteurs situés dans les marchés émergents, comme la Turquie, l’Inde ou le Brésil. Les premiers contacts sont positifs. Mais comment procéder ? La situation politique du pays ciblé est probablement plus instable que celle de la plupart des pays développés. La première chose est de bien identifier les risques et ensuite de les maîtriser, car pour la plupart d’entre eux, des solutions adaptées existent.
1 LE RISQUE COMMERCIAL Que faire contre un débiteur qui ne paie pas pour cause d’insolvabilité ou parce qu’il refuse ou conteste la marchandise? Il s’agit ici de risque commercial et le dommage peut être considérable. Un autre exemple : la hausse des prix des matières premières a poussé certains acheteurs à annuler leur contrat unilatéralement, pour placer leur commande là où les prix sont plus bas.
Exiger un acompte ; Demander, comme exportateur, une garantie de paiement ou une lettre de crédit stand-by. Elle est délivrée par la banque de l’acheteur. Cette banque s’engage à payer l’exportateur à sa première demande, sans condition ; Exiger l’ouverture d’un crédit documentaire. En émettant un crédit documentaire, la banque de l’importateur s’engage de manière irrévocable au paiement, pour autant que les documents soient conformes aux dispositions du crédit documentaire ou stand-by. Elle devient ainsi le débiteur principal ; Conclure une assurance-crédit. Les assureurscrédit tant publics que privés couvrent le risque commercial sur débiteurs publics et privés selon leurs modalités propres. Le pourcentage de couverture varie en fonction du débiteur et un délai de carence est à prévoir ; Prévoir une clause de réserve de propriété. Cette clause permet au vendeur de rester propriétaire des marchandises tant qu’elles ne sont pas payées. En cas de non-paiement, il peut reprendre les marchandises. Toutefois, la protection offerte par cette clause dépend de la législation du pays de l’acheteur. La plupart des pays acceptent le principe de la réserve de propriété simple, qui accorde au vendeur le droit de récupérer ses biens si l’acheteur reste en défaut de paiement. Dans plusieurs pays, la réserve de propriété ne peut toutefois être invoquée en cas de faillite. Il convient de connaître au préalable la législation en vigueur dans le pays de votre acheteur ; Faire appel aux services de Commercial Finance de votre institution financière. Ils vous assistent dans la gestion de vos factures clients et des paiements clients en attente et vous assurent contre le risque d’insolvabilité. ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
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Comment se prémunir ?
2 LE RISQUE POLITIQUE Il existe une multitude de risques politiques : la force majeure en raison de faits politiques tels que la guerre, la révolution, la grève, la dégradation de la situation politique d’un pays. Les catastrophes naturelles telles que des inondations, tremblements de terre, cyclones, etc. Ce que l’on appelle en jargon ‘le fait du prince’ ou ‘Acts of God’, soit une décision arbitraire des autorités, découlant généralement de tensions diplomatiques et qui empêche le déroulement rapide des transactions commerciales (par ex. un embargo, le retrait de licences d’importation ou d’exportation, etc.). Enfin, le risque de transfert est un risque politique : il peut arriver que votre partenaire soit solvable et qu’il soit en mesure d’effectuer le paiement en monnaie locale, mais que la banque centrale de son pays ne mette aucune devise à sa disposition en raison d’une pénurie.
Exiger l’ouverture d’un crédit documentaire confirmé par votre banque. Dans ce cas, votre banque s’engage irrévocablement – avec la banque émettrice – à payer le montant du crédit contre remise des documents exigés. Elle couvre le risque commercial de la banque qui ouvre le crédit ainsi que le risque politique du pays et la défaillance de cette banque ; Exiger l’ouverture d’une lettre de crédit stand-by confirmée par votre banque (voir plus haut); Demander à votre banque une garantie de paiement (soumise aux ‘Uniform Rules for Demand Guarantees’) en contrepartie d’une garantie du banquier de votre acheteur ; Conclure une assurance-crédit.
MANAGEMENT DE LA RÉPUTATION La valeur d’une entreprise repose sur trois éléments : sa valeur comptable, la valeur de sa marque/de son actionnariat et … sa réputation. La force de la réputation dépend du degré de correspondance entre les paroles et les actes. Celui qui ne dit pas ce qu’il fait et inversement compromet sa réputation et donc aussi son activité. Comment votre entreprise est-elle perçue dans le pays où vous opérez ? C’est la définition de la réputation. Plus cette perception est positive, mieux cela vaut pour la confiance et donc pour votre activité. En effet, lorsqu’on opère à l’étranger, il faut se soumettre aux règles, habitudes, normes et valeurs locales. Heureusement, il existe de nombreux accords et règlements internationaux auxquels l’entreprise peut se référer pour élaborer un code d’entreprise responsable. Songeons à des thèmes comme le travail des enfants, la sécurité environnementale, les conditions de travail, la protection sociale, la corruption, la qualité du produit ou du service… dans lesquels de nombreuses entreprises européennes s’illustrent. Tous ces thèmes impliquent un risque pour votre réputation lorsque les normes et valeurs locales s’opposent à celles de votre pays d’origine. L’entreprise qui opte pour la norme ‘la plus haute’ (par exemple appliquer les normes environnementales strictes du pays d’origine dans un pays où il n’existe pratiquement pas de normes) risque de compromettre sa position concurrentielle sur ce marché local étranger. Inversement, l’entreprise qui déroge trop aux normes et valeurs nationales à l’étranger risque d’entacher sa réputation sur son marché domestique. L’essentiel est de trouver un équilibre entre limite supérieure et inférieure. Sachez enfin que le risque de préjudice porté à la réputation a fortement augmenté du fait de la croissance exponentielle des moyens de communication. Une bonne compréhension des risques est donc essentielle pour un bon management de la réputation.
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Comment se prémunir ?
3 LE RISQUE DE FABRICATION Votre client pourrait résilier unilatéralement votre contrat. Par exemple, pour des raisons politiques ou commerciales et cela entre la passation de la commande et la livraison ou le moment du premier paiement, alors que vous avez déjà engagé des fonds dans l’achat des matières premières, la fabrication ou dans le traitement des marchandises. Ce risque est d’autant plus grand si le produit en question peut difficilement être revendu ainsi que pour des contrats de construction et d’installation à l’étranger.
Exiger une avance couvrant au minimum vos achats de matières premières ; Demander une garantie de paiement (soumise aux ‘Uniform Rules for Demand Guarantees’) ou une lettre de crédit stand-by ; Exiger l’ouverture d’un crédit documentaire. En effet, bien que le crédit documentaire soit avant tout un instrument de paiement, l’ouverture d’un crédit peut également porter sur l’ensemble de la période de fabrication. Il est recommandé d’ouvrir le crédit documentaire suffisamment tôt, et, en tous cas, avant le début de la production ; Conclure une assurance-crédit pour ‘risque de fabrication’.
RESPONSABILITÉ DU FAIT DES PRODUITS Chaque entreprise est responsable de ses produits, y compris à l’étranger. Les producteurs et fournisseurs de voitures, médicaments, aliments et jouets sont particulièrement sensibles aux actions de rappel et à l’attention médiatique négative qui y est liée. Mais la responsabilité du fait des produits touche toutes les entreprises, partout. Les risques (et les plaintes correspondantes) sont particulièrement forts aux États-Unis et au Canada, mais le rôle de la responsabilité du fait des produits ne cesse de se développer en Europe aussi. Dans l’UE, elle est régie par une directive (85/374/CEE) que tous les États membres ont transposée dans leur législation nationale. Pour les produits de consommation, chaque entreprise de la chaîne peut être interpellée, pour les produits industriels, seul le fabricant peut l’être. La responsabilité finale incombe toujours au fabricant. L’importateur des marchandises dans l’UE est également considéré comme fabricant. La notion de responsabilité du fait des produits vise la responsabilité objective pour le dommage résultant d’un défaut du produit. La personne lésée doit pouvoir prouver l’existence du dommage ; le défaut du produit ; le lien de cause à effet entre le défaut et le dommage. La personne lésée ne doit donc pas prouver la négligence ou la faute du producteur. Même un label CE n’exclut pas qu’un produit soit considéré comme déficient dans un cas concret. Le label CE prouve que le produit répond à des exigences européennes spécifiques en matière de sécurité, santé et environnement, mais il n’est pas une marque de qualité. En tant que producteur (ou autre partie dans la chaîne de production), vous pouvez réduire sensiblement le risque : en mettant sur le marché un produit aussi bon et sûr que possible ; en accompagnant le produit des instructions et avertissements nécessaires (de préférence dans la langue du marché visé) ; en assurant la chaîne de production de manière optimale ; en faisant intervenir la filiale locale comme entité juridique la mieux à même d’identifier le risque dans le pays concerné.
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4 LE RISQUE DE CHANGE Qu’en est-il des fluctuations de devises défavorables ? Les principaux risques liés aux transactions avec des clients établis par exemple dans les marchés émergents sont liés à la détention de créances dans une monnaie étrangère, alors que vos activités de production se font dans votre devise de base.
Risque de matières premières et risque politique Outre les risques financiers, d’autres facteurs, moins prévisibles, peuvent avoir une forte
influence sur les taux de change. Lorsqu’un pays est très dépendant du prix de l’une ou l’autre matière première, les modifications abruptes de ce prix peuvent avoir des conséquences pour la devise de ce pays. Ainsi, l’économie russe dépend très fort des prix du pétrole et du gaz. Lorsque ces prix s’écroulent pour l’une ou l’autre raison, cela peut aussi affaiblir le rouble. De même, le cours du peso chilien est étroitement lié au prix du cuivre. Si le prix du cuivre chute, le peso s’effondre. S’agissant du risque politique, personne n’avait prévu que la situation en Ukraine se dégraderait à ce point. Cette évolution affecte les entreprises tant en Ukraine qu’en Russie
PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE Si l’on veut éviter que des concurrents ne copient les actifs immatériels ou intellectuels (les prestations, produits ou services innovants, créatifs, comme la conception de produits, de logiciels, l’invention, le nom d’une marque, le logo, etc.) de l’entreprise, il est préférable de se protéger. L’entrepreneur qui omet de le faire risque un préjudice pour son image, la réputation de ses produits/services … mais surtout que d’autres tirent un profit économique des investissements qu’il a faits dans sa propriété intellectuelle. En fonction du degré d’innovation ou de l’originalité du produit ou du service, il faudra une protection plus ou moins forte. Ce droit de propriété intellectuelle garantit une forme de monopole temporaire et exclusif. Il permet à l’entrepreneur de récupérer ses investissements et d’engranger des recettes grâce au succès de ses créations. De plus, l’entreprise peut céder ses droits en licence ou les vendre à des tiers. Enfin, les droits de propriété intellectuelle garantissent une position juridique solide à laquelle le titulaire peut se raccrocher en cas de contrefaçon ou d’autres pratiques déloyales. Cela vaut donc toujours la peine de vérifier l’intérêt – du point de vue économique, stratégique, industriel, concurrentiel ou culturel – de demander une protection. Cela peut se faire de trois manières. 1. Via le droit d’auteur. Celui-ci naît de la création en soi et ne nécessite pas de dépôt préalable. 2. Via la protection de la marque. Une marque (le dessin ou le symbole que le titulaire de la marque appose sur ses produits ou services) peut être protégée à l’intérieur d’un territoire géographique déterminé (national, Benelux, Europe, pays spécifiques). 3. Via un brevet. Un brevet empêche un tiers de fabriquer, commercialiser, importer, stocker ou appliquer votre invention ou innovation. En fonction du territoire ou des pays où vous voulez protéger votre invention, vous pouvez choisir parmi les types suivants : brevet national, international, européen et, prochainement, unitaire. Vous pouvez faire valoir vos droits et les faire gérer par des organisations spécialisées. La protection coûte de l’argent. Il convient donc à chaque fois de bien peser l’utilité et la valeur de la protection envisagée par rapport aux avantages qu’elle apporte. Plus d’information sur : www.economie.fgov.be/fr/entreprises/propriete_intellectuelle
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Comment se prémunir contre les fluctuations des devises ? Il existe deux possibilités : Utiliser des contrats à terme sur devises (aussi appelés contrats à terme FX). Grâce à cette solution, vous pouvez conserver un taux fixe, ce qui rend les choses prévisibles à 100%. En revanche, vous ne pouvez pas profiter d’une éventuelle appréciation du taux de change ; Ou utiliser des structures optionnelles pour contenir les risques. Une de ces possibilités consiste à maintenir la devise dans un ‘tunnel’ dans lequel elle bénéficie d’un niveau de risque gérable. Cette solution permet en outre de profiter de l’appréciation de la devise.
Coûts ou profits ? Le choix entre les contrats à terme FX et les structures optionnelles dépend de la manière dont l’entreprise envisage les centres de trésorerie. Soit, elle les considère comme des centres de coûts (et dans ce cas l’exposition de l’entreprise doit être entièrement couverte), soit elle les considère comme des centres de profits. Dans ce dernier cas, ces centres doivent suivre les marchés plus attentivement et maximaliser le profit à un niveau de risque acceptable. Cela nécessite évidemment des solutions sur mesure.
GESTION DES CONTRATS Entreprendre à l’international, c’est bien plus compliqué que de conclure un contrat avec une autre partie dans son propre pays. Ainsi, que faire en cas de discussions sur la qualité de machines polonaises achetées ou lorsqu’un acheteur chinois affirme que le matériel fourni ne correspond pas à ses attentes ? En tant qu’entreprise belge, vous souhaiteriez évidemment que le droit belge soit d’application. Mais, est-ce bien correct dans un contexte international ? La réponse est claire : généralement non, car bon nombre de transactions (internationales) sont régies par la Convention de Vienne sur la vente1. Nombreux sont les entrepreneurs qui l’ignorent. Pourtant, cette convention uniformise les principes juridiques du contrat de vente transfrontalier. Elle s’applique à la vente interprofessionnelle internationale de marchandises, pour autant que les pays où sont établis l’acheteur et le vendeur y aient adhéré. Cette convention ne s’applique donc pas à la vente de biens immeubles, aux transactions avec des consommateurs et à la prestation de services. Aujourd’hui, 78 pays ont ratifié la convention, dont la Belgique et la plupart des pays occidentaux et européens, mais aussi les États-Unis, la Chine, la Fédération de Russie et le Japon. Les principaux nonsignataires sont : le Royaume-Uni, l’Inde, l’Afrique du Sud, Hong-Kong et Taïwan. La convention crée un système juridique propre à part entière et contient des dispositions sur les obligations des parties, la manière de gérer les manquements contractuels, la responsabilité, le dédommagement ... Ces dispositions pouvant fortement diverger du système juridique belge, l’application de la convention engendre régulièrement d’autres résultats – parfois en faveur et parfois en défaveur de l’entreprise belge – que si le droit belge avait été d’application. Il est cependant possible d’exclure contractuellement l’application de (tout ou partie de) la convention. Il faut néanmoins savoir que le fait de déclarer applicable le droit d’un pays donné n’exclut pas la convention. Le fait de déclarer par exemple le droit belge applicable peut même rendre la convention applicable, précisément parce que la Belgique y adhère. Pour ne prendre aucun risque, il convient donc d’insérer dans le contrat commercial une clause spéciale excluant spécifiquement la convention. 1
Convention des Nations unies conclue à Vienne le 11 avril 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises
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5 LE RISQUE ADMINISTRATIF
6 LE RISQUE ÉCONOMIQUE
Ce risque est difficile à couvrir, car il découle d’obligations administratives liées aux autorisations d’importation et d’exportation, aux réglementations douanières, etc.
Le prix de revient de vos marchandises pourrait augmenter entre la date de signature du contrat et la livraison des marchandises. La marge bénéficiaire est alors plus petite ou – dans le pire des cas – elle disparaît complètement. Les deux éléments principaux qui influencent le prix des marchandises sont les salaires (essentiellement dans les pays qui connaissent une inflation très forte) et les prix des matières premières sur les marchés mondiaux. Le prix du baril de pétrole est un bon exemple. Ce risque est d’autant plus grand si l’exécution du contrat s’étend sur une longue période.
Prenons l’exemple de la Turquie : quelles sont les exigences administratives à remplir pour exporter vos marchandises en Turquie ? Votre entreprise doit-elle obtenir une autorisation et cela suffit-il ?
Comment se couvrir et se prémunir ? Les chambres de commerce, ambassades et autres organismes officiels peuvent vous aider à identifier et respecter ces exigences. La ‘Market Access Database’ de la Commission européenne informe les sociétés exportant au départ de l’Union européenne des modalités d’importation de la plupart des marchés mondiaux.
Chaque mode de transport comporte ses propres risques Comment se prémunir ? Exiger l’ouverture d’un crédit documentaire : les quantités, les prix unitaires et le prix total de la marchandise sont des mentions qui figurent dans un crédit documentaire. Le prix de la marchandise est donc déterminé lors de l’ouverture de ce crédit documentaire; Prévoir une clause de révision des prix dans le contrat. En vertu de cette clause, le prix de vente peut être adapté en fonction des fluctuations du prix. Ceci signifie que l’exportateur répercute entièrement ou partiellement le risque sur l’acheteur. L’insertion d’une telle clause dans le contrat doit naturellement faire l’objet de négociations entre les deux parties.
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7 LE RISQUE DE TRANSPORT Toute transaction de marchandises avec l’étranger implique un transport. Et à chaque moyen de transport, ses risques spécifiques. Les marchandises peuvent être endommagées ou totalement perdues, non seulement pendant le transport, mais aussi à l’entreposage ou au chargement. Examinons le transport routier : des accidents graves impliquant des camions sont à déplorer quasi quotidiennement. Nombreux sont les exportateurs qui considèrent, à tort, que leur marchandise est automatiquement assurée par le transporteur. En Europe, on utilise beaucoup le CMR (Contrat de Transport International de Marchandises par Route). Un CMR n’est cependant qu’une assurance en responsabilité civile, pas une assurance transport.
8 LE RISQUE JURIDIQUE Le risque juridique résulte de contrats soumis à une législation/jurisprudence étrangère. En cas de litige, vous allez au-devant d’une lutte juridique longue et difficile, dont l’issue reste incertaine. Il se présente surtout, mais pas uniquement, en dehors de l’Union européenne. La Chambre de commerce internationale à Paris (‘ICC International Chamber of Commerce’) joue un rôle de leader dans l’élaboration des règles du commerce international et dans la diffusion de bonnes pratiques.
Comment se prémunir ? Conclure une assurance-transport marchandise auprès d’une compagnie d’assurance spécialisée; Consulter les règles Incoterms©. Elles précisent le sens d’une série de termes commerciaux, chacun désigné par trois lettres qui reflètent la pratique suivie par les entreprises. Les règles Incoterms indiquent essentiellement les tâches, frais et risques afférents à la livraison de marchandises par les vendeurs aux acheteurs. En d’autres termes : qui supporte le coût du fret, qui assure la marchandise, de quel / vers quel endroit géographique, à quel moment dans la phase d’exportation le risque est-il transféré du vendeur à l’acheteur ?
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CASE CARTAMUNDI
L’APPLE DE L’INDUSTRIE DE LA CARTE À JOUER Au moment de l’interview, le groupe Cartamundi annonçait la reprise de ‘France Cartes’, qui devient ainsi numéro cinq de ses usines de production en Europe. L’acquisition de cet acteur local est le résultat de longues années d’apd’approches prudentes et de construction de relations et elle est caractéristique de la stratégie d’expansion internationale du producteur de cartes à jouer le plus renommé au monde.
© Cartamundi
La différentiation est un des moteurs possibles de la croissance. Une autre possibilité consiste à exceller dans une niche pour y acquérir une solide position de leader du marché. Le nom Cartamundi est éloquent. “Après 25 ans d’expansion à l’exportation, nous nous consacrons depuis un quart de siècle à la présence locale”, déclare Chris Van Doorslaer, CEO de Cartamundi depuis plus de 17 ans. De cette manière, le groupe garantit des délais de livraison courts et fiables.
“C’est un facteur critique dans notre activité qui se nourrit surtout par des campagnes ciblées et des actions de marketing des clients. C’est d’ailleurs notre principal atout face au grand pays de la carte à jouer qu’est la Chine. Celle-ci ne peut assurer un service rapide en dehors de l’Asie tout en préservant son efficacité en termes de coûts. Nous le pouvons par contre, grâce à notre présence locale sur quatre continents.” UNE PARTICULARITÉ BELGE
Cartamundi a créé sa première usine de production il y a des années aux USA. L’opération de lancement avait été fortement sous-estimée. “C’est pourquoi nous cherchons désormais des partenaires locaux, des personnes qui parlent la même langue – au sens le plus large du terme – et partagent notre savoir-faire et nos valeurs : entrepreneuriat, collaboration et implication. Il faut du temps pour trouver le bon partenaire, jusqu’à sept ans par exemple avant de pouvoir nous lancer au Japon.” Les sensibilités culturelles et historiques peuvent miner un partenariat. Ainsi, les SudAméricains lusophones et hispanophones ne peuvent se sentir. “Nous nous en rendons compte aujourd’hui avec une reprise réalisée au Mexique par nos collègues brésiliens.” Ces sensibilités expliquent aussi pourquoi Cartamundi n’est pas (encore) présent en Chine. “Après toutes ces années, nous ne sentons pas encore assez leur culture fondamentale du yin et du yang pour oser lancer une activité. Je peux raconter des
Chris Van Doorslaer, CEO de Cartamundi Group
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histoires abracadabrantes sur la manière dont leur attitude (en affaires) se heurte à nos certitudes occidentales.”
“La modestie des Belges est un atout fort” Toutefois, selon Van Doorslaer, les Belges ont la caractéristique d’être modestes et respectueux. “Ils sont multiculturels par nature – nous parlons trois langues, mais pas le belge – et sont pétris de neutralité. C’est très bien perçu à l’étranger, à l’inverse de l’attitude plus menaçante des Américains par exemple.” L’EURO FORT EST UN HANDICAP
Les obstacles à la croissance internationale se situent à différents niveaux. “Ainsi, la pression fiscale forte que nous connaissons en Belgique réduit les moyens disponibles.” Au niveau européen, on peut déplorer l’éparpillement. “Une véritable union juridique et fiscale faciliterait
considérablement les échanges dans l’UE. Mais c’est surtout l’euro fort qui nous défavorise. À l’inverse de toutes les autres banques centrales (nationales), la Banque centrale européenne ne peut soutenir l’économie européenne (elle ne peut que juguler l’inflation). Mais cet euro fort anéantit la compétitivité mondiale de nos entreprises.”
Cartamundi Activité : industrie de la carte à jouer Siège : Turnhout Collaborateurs (2013) : 1.350 Étranger : 98% du chiffre d’affaires, dont +50% en dehors de l’Europe Chiffre d’affaires (2013) : 152 millions EUR 24 filiales (dont 10 usines de production) en Asie, en Europe et en Amérique www.cartamundi.com
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Formes et risques du ďŹ nancement
Que l’entreprise limite ses activités internationales à l’exportation pure ou qu’elle développe effectivement ses propres filiales sur place, elle aura toujours besoin d’un financement de ses fonds de roulement ou autres actifs. En fonction des opportunités ou risques spécifiques, il existe de nombreuses formes de financement et des formules sur mesure peuvent être élaborées. Explications autour d’une table ronde avec quatre experts.
Kristof Luycx Senior Project & Export Finance Manager (ING Structured Finance)
Eric Bastin Corporate Finance Manager (BDO)
Jan Wolfcarius Head Event Finance Belux (ING Commercial Banking)
Sebastien D’Hondt Head of Corporate Clients Belux (ING Commercial Banking)
Il existe autant de modes de financement que de manière de faire des affaires à l’étranger. Citons le financement des exportations, la fourniture de fonds de roulement, les crédits d’investissement… Kristof Luycx (KL) : “Dès qu’un fabricant commence la production de ses marchandises, cela lui coûte de l’argent. Or, les revenus de l’exportation de ces produits peuvent se faire attendre. Le financement des exportations permet de sortir de cette impasse. Il s’agit du financement à moyen terme de l’exportation de biens d’investissement et de services, comme des machines et leurs pièces, des travaux de construction, des travaux de dragage et du matériel roulant lourd. Concrètement, la banque accorde un crédit à long terme à l’acheteur étranger pour qu’il puisse payer immédiatement et complètement l’exportateur belge au moment de la livraison des biens ou des services. Le premier avantage important est que l’exportateur belge a la certitude d’obtenir le paiement de ses exportations. En effet, sa banque assume le risque de non-paiement et accorde un délai de paiement à l’acheteur étranger. De plus, l’exportateur peut ainsi offrir d’emblée à l’acheteur étranger, en plus de ses connaissances techniques et de son expertise, une proposition de financement – ce qui est un avantage concurrentiel non négligeable. Enfin, les effets sur les fonds de roulement sont limités puisque le financement des exportations n’a pas d’impact sur les lignes de crédit existantes de l’exportateur. Le crédit accordé est un accord bilatéral entre la banque et l’importateur. Cette solution a également une valeur ajoutée pour un importateur issu d’un marché moins mûr : outre l’étalement des remboursements, il peut bénéficier auprès de la banque belge d’un financement à des taux plus intéressants que s’il avait dû emprunter sur les marchés locaux. Quelques exemples
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concrets : le financement de travaux de dragage dans un port africain, l’exportation de matériel roulant lourd ou la livraison de turbines pour une centrale hydraulique.” De nombreuses exportations sont destinées à des pays moins stables en dehors de l’OCDE. Comment une banque gère-t-elle des risques comme un coup d’État ou un gel soudain des devises KL : “La banque et l’exportateur concluent pour chaque transaction un contrat avec un assureur exportation comme le Ducroire, qui couvre 95 à 98% du risque. Étant donné que le Ducroire est en mesure de bien évaluer les risques politiques et commerciaux et de les assumer pour l’exportateur, l’entreprise peut se permettre de faire des transactions avec des pays où les choses seraient plus difficiles sans cela.” Eric Bastin (EB) : “Notre petite économie ouverte est très dépendante des exportations ; c’est pourquoi son expansion internationale est fortement soutenue par les autorités régionales et fédérales. Les entreprises connaissent mal les instruments de financement du Ducroire, de Finexpo ou de Sofinex. Or, ils offrent des solutions pour accorder directement un crédit à des filiales dans des pays où les banques elles-mêmes ne sont pas présentes ou le sont moins.” Jan Wolfcarius (JW) : “Le financement des exportations est un oiseau rare parmi les mécanismes de financement. Les entreprises belges l’utilisent comme un financement des clients étrangers (couvert par le Ducroire) pour soutenir les exportations belges. Elles ne l’utilisent pas pour développer leurs établissements étrangers comme tels. Ceci étant dit, un entrepreneur belge peut aussi utiliser la technique du financement des exportations 66
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pour financer ses propres importations. Ainsi, la firme Sarens fait produire ses grues de chantier par un fabricant allemand. Dans ce cas, la banque a ouvert une facilité de crédit à l’exportation (couverte par l’assureurcrédit allemand Euler Hermes), basée sur le contrat d’exportation du fournisseur allemand à la firme belge Sarens. De cette manière, Sarens obtient pour sa part d’importants crédits d’investissement complémentaires à long terme. C’est la preuve qu’il est possible de faire du travail sur mesure grâce à des solutions créatives.” Le financement des exportations a manifestement le vent en poupe ? KL : “Les marchés européens classiques croissent moins vite aujourd’hui et les exportateurs belges cherchent des opportunités dans les marchés émergents – moins mûrs – où de nombreux projets d’investissement sont en cours et où des marges importantes sont possibles. Grâce à la technique du financement des exportations, ils consolident leur position concurrentielle dans la lutte pour l’attribution des marchés.”
Le financement des exportations concilie les intérêts opposés de l’exportateur et de l’importateur Kristof Luycx
JW : “Les concurrents étrangers font exactement la même chose. Un concurrent chinois est simplement couvert par les banques (d’État) chinoises. Nous devons donc offrir les mêmes armes aux entreprises belges.”
D. g. à. dr. : Kristof Luycx, Sebastien D’Hondt, Eric Bastin et Jan Wolfcarius.
EB : “C’est la raison pour laquelle il est tellement important qu’une entreprise qui a des ambitions internationales choisisse un conseiller financier et une banque qui a une expérience spécifique et un réseau international bien développé de spécialistes. Il serait dommage de manquer des opportunités parce que le banquier local – si bien intentionné soit-il – n’est pas en mesure de défendre vos intérêts à l’étranger en connaissance de cause. C’est pourquoi il est important de s’adresser à une banque ou à un conseiller dès le début du processus de décision d’un projet à l’étranger. Plus vite ils sont au courant, mieux ils peuvent dispenser des conseils sur la meilleure structure, le contrat et les ‘petits caractères’. Après la signature du contrat, il est souvent trop tard.”
prise reçoit directement des liquidités (une avance sur le montant des factures à recevoir) qui peuvent être utilisées comme fond de roulement. L’entrepreneur peut ainsi financer sa croissance sans prêt bancaire et sans endettement. Autres formules dérivées : le factoring international plus complexe (portefeuilles de factures dans plusieurs pays réunis dans un seul contrat) et le récent ‘reverse’ factoring (‘supply chain finance’). Dans ce dernier, la banque préfinance les factures sortantes de l’entreprise. Le factoring offre quatre grands avantages pour les entreprises : 1) la diversification du financement ; 2) la dépendance moindre visà-vis du cashflow au profit du portefeuille de factures ; 3) le financement croît avec le chiffre d’affaires et 4) les factures peuvent rester en dehors du bilan.”
Une autre possibilité de financement pour l’entreprise est le financement de ses fonds de roulement.
EB : “Il va de soi que le volume des créances commerciales doit être suffisant (au moins quelque millions d’euros, pour un volume significatif de factures) pour que le factoring offre des avantages suffisants pour les deux parties. L’introduction du factoring demande aussi une adaptation des procédures internes et de l’organisation des services administratifs.”
Sebastien D’Hondt (SD) : “En termes bancaires, on parle de factoring ou ‘commercial finance’. Dans le factoring, l’entreprise vend ses factures ou créances commerciales à l’institution financière. En échange d’une ristourne sur le montant des factures, l’entre-
> suite p. 70 ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
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CASE TER BEKE
UNE EXPANSION EN ECE IMPLIQUE DAVANTAGE QU’UN SIMPLE ‘COPIER/COLLER’
© Ter Beke
Ter Beke SA SA, un groupe belge actif dans la production et la distribution de produits frais à travers l’Europe occidentale, ouvrira en septembre 2014 un nouveau site de production dans le sud de la Pologne, lequel fera partie intégrante de sa nouvelle co-entreprise, dont le but sera de commercialiser ses produits en Europe centrale et de l’Est (ECE). Le nouveau site approvisionnera les différents pays de l’ECE. Cette expansion permettra à l’entreprise cotée sur Euronext de réaliser son ambition de devenir un acteur réellement continental.
À la recherche d’opportunités de croissance en dehors de ses marchés traditionnels d’Europe occidentale, cette expansion en ECE s’est logiquement imposée au groupe. “La région ECE connaît depuis quelque temps une évolution rapide mais jusqu’ici, les
consommateurs n’étaient pas prêts. Ils étaient concentrés sur d’autres types de produits”, explique le CFO de Ter Beke, René Stevens. “Les tendances actuelles nous semblent plus favorables et nous pensons que le marché devrait bientôt décoller”. SOUTIEN LOCAL
Ter Beke a commencé par s’entretenir avec ses partenaires de co-entreprise, déjà actifs dans la région, et leur a proposé de combiner leurs forces afin de partager les risques et d’éviter une surcapacité sur ce nouveau marché. L’entreprise a ensuite étudié les différents marchés de l’ECE. Il en est ressorti que ces marchés se situaient à différents stades de croissance et n’étaient pas tous prêts pour les produits de Ter Beke. La Pologne, la République tchèque, la Hongrie et la Slovaquie ont été retenues, ces pays présentant les tendances et habitudes de consommation requises. Par ailleurs, les compétences techniques y sont également plus accessibles, de même que les matériaux, le savoir-faire et les connaissances industrielles. Finalement, l’entreprise a opté pour une zone économique en développement située dans le sud de la Pologne, celle-ci offrant d’excellents services d’utilité publique, essentiels au bon fonctionnement du site. Tout aussi importants, les conseils proactifs dispensés par les autorités locales, lesquelles n’ont pas ménagé leurs efforts pour leur montrer ce qu’ils devaient faire et les aider à comprendre la réglementation locale.
René Stevens, CFO de Ter Beke
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niveau local, pour autant que cela ne nuise pas à la qualité de nos produits”.
“Ces conseils dont nous avons bénéficié sur place nous ont été d’une très grande aide”, raconte René Stevens. “Même après avoir fait des recherches et comparé les différents endroits, vous avez besoin de ce soutien et de ces connaissances locales. La région ECE n’est pas une réplique exacte de l’Europe occidentale et vous ne pouvez vous contenter de faire un copier/ coller de votre business model. Vous serez confronté à de nombreuses différences ainsi qu’à un processus d’apprentissage difficile, même si le marché présente des tendances favorables”. DES FOURNISSEURS CONNUS ET FIABLES
Pour commencer, le nouveau site sera approvisionné par des entreprises d’Europe occidentale. “Dès que nous serons opérationnels, nous nous approvisionnerons au niveau local, mais nous ne voulons pas débarquer là-bas en partant du principe que nous y trouverons la même chose qu’ici”, explique René Stevens. “Nous avons pris le parti de faire appel à des fournisseurs que nous connaissons et que nous savons fiables. Par la suite, nous rechercherons bien entendu des possibilités d’approvisionnement au
Le financement de la création de la Pasta Food Company en tant que nouveau site représentait un défi de taille pour l’entreprise. “Financer ce qui est en fait une nouvelle entreprise, n’enregistrant encore aucune vente, présente un certain nombre de risques”, confirme René Stevens. “Notre banque nous a proposé de diviser en deux la partie financement : un crédit à long terme pour couvrir la phase de lancement, octroyé par la succursale belge de la banque, et un emprunt à court terme, octroyé par la succursale polonaise, essentiellement utilisé pour le fonds de roulement”.
Ter Beke Activités : groupe belge actif dans la production et la distribution de produits frais dont les deux activités principales sont : la charcuterie et les plats cuisinés Siège : Waarschoot Chiffre d’affaires (2013) : 407 millions EUR Effectif (2013) : environ 1.700 collaborateurs Présence mondiale : sept filiales en Belgique et aux Pays-Bas ; nouvelle co-entreprise Pasta Food Company en Pologne www.terbeke.be
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JW : “Au coût financier (la marge de la société de factoring) s’ajoute le coût administratif sous-jacent, par exemple pour le reporting mensuel et le suivi. Il faut donc bien évaluer le ‘total cost of ownership’ avant d’opter pour le factoring.”
Les risques de change jouent moins en cas de financement local Sebastien D’Hondt Nous n’avons pas encore parlé du financement standard par excellence : le crédit d’investissement. JW : “Les crédits d’investissement servent au financement à moyen et long terme d’un actif immobilisé, sans dépasser le délai d’amortissement de l’investissement. Les caractéristiques changent à peine pour un crédit d’investissement à la société mère ou à une filiale étrangère.” L’entreprise a le choix : soit elle opte pour un financement centralisé au niveau du siège principal et accorde un prêt interne à la filiale, soit elle opte pour un prêt à l’étranger auprès d’une banque locale. EB : “Le choix dépend de la maturité du réseau étranger de l’institution financière et de la santé (financière) et de la force de la filiale étrangère de l’entreprise. Le coût du crédit lui-même joue aussi un rôle déterminant. Le financement en Belgique est parmi les moins coûteux d’Europe, les taux appliqués dans les pays non européens peuvent être trois à cinq fois plus élevés. Enfin, le choix doit être en accord avec la stratégie financière du groupe.”
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JW : “Des formes intermédiaires sont évidemment aussi possibles. Si le banquier du pays d’origine trouve la solvabilité de la filiale locale insuffisante, le financement peut encore être accordé par le banquier local qui couvre le crédit au moyen d’une garantie de la société mère.” SD : “Nos statistiques montrent que la majorité des grandes entreprises optent pour un financement centralisé en raison des avantages précités en termes de stratégie et de coûts. Mais il ne faut pas oublier le risque de change et l’impact de l’instabilité éventuelle du marché. En effet, les marchés émergents ne sont pas toujours très stables et cela a certainement un effet sur les risques et les coûts des financements à long terme.”
Il faut bien évaluer le ‘total cost of ownership’ avant d’opter pour le factoring comme mode de financement Jan Wolfcarius EB : “En raison de ces risques, les banques préfèrent aussi souvent le financement centralisé (de proximité) plutôt que le prêt à de lointaines filiales établies sur des marchés qu’elles peuvent moins bien évaluer et maîtriser.”
JW : “De nombreux grands groupes internationaux optent aussi pour le financement centralisé – à l’exception du financement des fonds de roulement – pour éviter que les sociétés opérationnelles ne soient soumises à une trop forte pression de financement externe. De plus, si les filiales ont des crédits trop importants, cela peut affecter l’appréciation du risque de la société mère. Un prêt à la société mère qui génère peu de cashflow elle-même (le cashflow est la source de remboursement des crédits) pourrait alors être subordonné par rapport aux prêts aux filiales locales. Grâce au financement centralisé, le risque de financement externe se situe au niveau de la société mère, les filiales n’ont pas de créanciers bancaires et le prêteur bénéficie d’un niveau de risque moindre. L’entreprise peut ainsi maximaliser les crédits qu’elle obtient, et ce dans des conditions optimales.” Revenons sur le risque de change. SD : “Les risques de change jouent moins en cas de financement local. En revanche, en cas de financement centralisé, l’euro fort est un facteur de risque. Si une entreprise se finance en euro et encaisse ses revenus en lire turque, ses crédits génèrent un surcoût énorme. La divergence croissante entre l’euro et la plupart des autres monnaies engendre un grand coût d’opportunité dans les comptes de résultat des entreprises. Comment résoudre ce dilemme ? Un financement local entraîne généralement un taux de base (sensiblement) plus élevé et un spread (ou marge) augmenté en supplément du taux de base (à cause de l’instabilité possible du marché), mais il réduit le risque de fluctuations de change. C’est exactement l’inverse pour un financement centralisé. Mais l’entreprise peut se couvrir contre ce risque grâce à différents mécanismes, comme un swap de devise.”
Où se situe la limite critique ? SD : “Il n’existe pas de règle générale. L’entreprise doit analyser et faire des choix avec ses partenaires financiers cas par cas, monnaie par monnaie et marché par marché.” Une entreprise qui a des ambitions internationales ne doit-elle pas d’abord investir ses fonds propres avant de recourir au financement ? EB : “C’est exact ! Ce n’est pas parce qu’une entreprise se tourne vers l’étranger que les banques doivent automatiquement ouvrir le robinet du crédit. Lorsqu’une entreprise a fait ses preuves sur le marché national, elle peut déployer des activités à l’étranger d’abord grâce à ses propres réserves, éventuellement complétées en private equity. La banque n’est alors qu’un financier complémentaire. Cette stratégie favorise énormément la confiance de la banque.”
Ce n’est pas parce qu’une entreprise se tourne vers l’étranger que les banques doivent automatiquement ouvrir le robinet du crédit Eric Bastin
KL : “C’est la raison pour laquelle il est tellement important d’associer très vite les partenaires financiers au projet. De cette manière, l’entreprise peut constituer un dossier solide et elle ne place pas la banque devant des faits accomplis (c’est-à-dire moins attrayants) parce qu’elle a déjà entrepris à l’étranger des démarches qui ont atteint un point de non-retour. La probabilité est d’ailleurs grande que votre dossier ne soit pas le premier dossier que la banque défend dans ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
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ce pays. Sa connaissance et sa maîtrise du marché local peuvent être précieuses.” Qu’est-ce qui fait un bon dossier de financement ? JW : “J’identifie quatre dimensions. Premièrement, le risque propre au business. Quel risque comporte l’activité de l’entreprise et quelle est sa position par rapport à ses concurrents et clients ? Ensuite, le risque financier. Quelle est l’ampleur de l’apport propre et comment s’inscrit la demande de crédit dans l’endettement existant de la société ? Troisièmement, le risque de management. Quelle est l’expérience de l’équipe et dans quelle mesure est-elle capable d’identifier et de suivre correctement tous les risques ? Enfin, il y a le risque structurel. À quel niveau la demande de crédit est-elle faite et quels risques entraîne-t-elle ? Et quelles garanties permettent de couvrir ces risques ?” EB : “Lorsqu’un client veut créer une filiale, je lui demande toujours d’abord qui assure le suivi du projet. Il est possible d’engager un nouveau CEO, mais dans quelle mesure connaît-on cette personne et lui fait-on confiance ? Le CEO de la société mère peut assumer cette tâche, mais souvent il sousestime la charge de travail d’un tel projet. Et il dispose de moins de temps pour ses tâches actuelles. De nombreuses entreprises oublient d’organiser efficacement leur base pour pouvoir gérer avec succès un projet étranger d’envergure. Je conseiller d’engager un manager intérimaire pour gérer les activités nationales afin que le CEO ou le CFO qui portera le projet étranger pendant une courte période puisse se consacrer à 100% à cette tâche.”
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Pour conclure, un sondage réalisé par la FEB auprès de quelques centaines d’entreprises montre que 12% d’entre elles estiment que le financement constitue un des principaux obstacles à leur expansion internationale. Observe-t-on un resserrement du crédit ? SD : “L’entreprise qui prépare et argumente un dossier solide et crédible et associe dès le début les experts financiers au projet rencontrera peu de difficultés. J’en mettrais ma main au feu. On compte à peine moins de demandes de crédit aujourd’hui qu’avant la crise. Les banques sont donc certainement encore disposées à accorder des prêts aux entreprises.” EB : “Qu’est-ce qui a changé fondamentalement depuis 2007-2008 ? Certaines banques se sont totalement restructurées et se sont repliées sur leur marché national. Ces banques peuvent parfois se montrer plus réticentes face à de grands dossiers complexes de crédit international. Par ailleurs, les entreprises repoussent leurs frontières vers des marchés émergents plus risqués, très éloignés des marchés européens bien connus. Aujourd’hui, un dossier pour la Pologne ne rencontrera pas d’opposition ou moins qu’avant. En revanche, c’est une autre paire de manches pour un dossier pour le Brésil ou la Chine, les nouveaux eldorados de nos entreprises.”
Nos remerciements à Filip Masschelein, Head Structured Finance (ING Belgique), pour sa précieuse contribution.
INTERNET ACCROÎT LES POSSIBILITÉS D’EXPORTA D’EXPORT ATION étranger . Pour vous donner une idée de l’oppor5
L’internet et, en particulier, l’e-commerce offrent aux entreprises des opportunités uniques pour trouver de nouveaux clients. Le world wide web génère des possibilités d’exportation qui étaient impensables ou irréalisables jusque récemment. 8,6 milliards EUR. C’est la contribution estimée de l’internet à l’économie belge en 2015, soit 4,6% du PIB belge1. Cette progression est principalement due à l’impulsion de l’e-commerce belge, qui représentait un chiffre d’affaires de près de 2 milliards EUR en 2013, en croissance de 26% par rapport à 20122. D’après une recherche récente3, les e-commerçants belges sont d’avis qu’une plus grande partie de leurs ventes proviendra à l’avenir d’autres pays européens. Cette même étude prévoit que le marché de l’e-commerce (représenté par les 6 plus grands marchés e-commerce actuels4) va quintupler d’ici 2020, passant de 25 milliards EUR en 2013 à 130 milliards en 2020. Malgré cette tendance positive, la majorité des entreprises belges ne parviennent pas toujours à capturer le potentiel grandissant du canal e-commerce. Un exemple lié au secteur du retail : 77% des clicks issus de référencement payant Google AdWords ciblés sur des ménages belges ont pour destination un site d’e-commerce
tunité manquée : le volume de clicks générés vers des sites hollandais par des campagnes AdWords ciblées uniquement sur la Belgique est supérieur au volume de clicks issus de toutes les campagnes AdWords ‘belges’ dans le monde. Outre le manque de temps et l’absence d’infrastructures logistiques adaptées, trois facteurs principaux peuvent expliquer le retard de l’e-commerce belge par rapport à nos voisins : 1. Plus de la moitié des entreprises belges n’ont pas de site internet Un chiffre inquiétant pour la compétitivité des entreprises belges quand on sait que près de 80% des PME bataves disposent d’un site web en 2014. Or, aujourd’hui, une absence sur la toile signifie que vous êtes tout simplement invisibles aux yeux du nombre grandissant de clients qui recherchent vos produits ou services sur le web. 2. Les entrepreneurs belges sous-estiment l’importance d’un site web multilingue Parmi l’autre moitié des sociétés belges disposant bel et bien d’un site internet, deux tiers sont toujours unilingues. Vu l’accélération du phénomène de globalisation, il est primordial pour les sociétés souhaitant promouvoir leurs biens et services en dehors de leur pays d’origine d’offrir un site en plusieurs langues. À titre d’exemple, le tableau ci-dessous illustre la disponibilité de langues étrangères sur les 50 sites internet les plus importants du secteur retail dans 4 pays limitrophes.
LANGUES WEB SITE
PAYS-BAS
ALLEMAGNE
FRANCE
ROYAUME-UNI
#1
35 % allemand
48 % anglais
38 % anglais
36 % allemand
#2
31 % français
46 % français
34 % italien
34 % français
#3
27 % anglais
46 % néerlandais
34 % espagnol
24 % espagnol
#4
10 % italien
40 % polonais
32 % allemand
14 % italien
#5
8 % espagnol
34 % italien
24 % néerlandais
12 % chinois
Source : Top 50 e-Retailers by Country, Website checks September 2013, OC&C analysis. 1
BCG Report ‘Economy.be at the crossroads’, Avril 2011. BeCommerce, “L’e-commerce en plein essor en Belgique”, 22 mars 2014. The internalization of Ecommerce, 2014 edition, OC&C Strategy Consultant. 4 USA, Royaume-Uni, Allemagne, France, Pays scandinaves et Pays-Bas. 5 Internal data Google Belgium, 2013. 2 3
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3. À peine un quart des sites web belges sont adaptés aux appareils mobiles Mi-2014 près de 20% des pages web furent consultées par des Belges au travers de smartphones ou tablettes6. Même constat chez Google, avec 26% de recherches sur Google.be en 2014 générées sur des appareils mobiles (ce chiffre dépasse même les 35% dans le secteur de l’horeca). Malgré l’explosion de l’usage des smartphones et autres tablettes en Belgique et leur démocratisation généralisée, à peine 20% des sites internet belges permettent une consultation aisée au départ d’un appareil mobile7. Dans ce monde en constante connectivité, les consommateurs s’attendent à trouver facilement l’information qu’ils souhaitent, où qu’ils se trouvent et sur n’importe quel écran. Une récente étude de Google montre que 61% des utilisateurs abandonnent un site internet au profit d’un site concurrent si sa navigation via un appareil mobile n’est pas facile. Dans les faits, 67% des consommateurs sont plus enclins à acheter en ligne si le site concerné est ‘mobile-friendly’8. Un avenir prometteur Si force est de reconnaître que le marché belge tarde à capitaliser sur l’opportunité digitale, il est important de rappeler que notre société n’en est qu’au début de cette nouvelle révolution. Dès lors, les entreprises belges sont toujours en me% RECHERCHES SUR GOOGLE.BE SECTEURS Vêtements Arts & divertissements Beauté & Soins du corps Restaurants & bars Finances Alimentation Soins de santé
% DESKTOP 70 % 74 % 68 % 67 % 84 % 70 % 73 %
CONSEIL
l’Export Business Map de Google regroupe des statistiques utiles sur la population, le comportement de recherche, l’utilisation du téléphone mobile et les médias sociaux de % SMARTPHONE % TABLETTE douze marchés d’exportation 14 % 16 % importants pour la Belgique. Cette 14 % 12 % application peut être téléchargée 18 % 15 % sur www.google.be/ads/global/ 17 % 16 %
Jardinage 73 % Internet & télécoms 73 % Occasions & cadeaux 73 % Immobilier 76 % Sports & Fitness 69 % Voyages & tourisme 72 % Automobiles 74 % Total 74 % Source : Internal Data Google, June 2014. 74
sure de renforcer leur compétitivité au travers du canal digital et de l’e-commerce en particulier. À condition qu’elles tiennent compte des meilleures pratiques. La partie ‘Pratiques du marché et protection des consommateurs’ du nouveau Code belge de droit économique, qui est entrée en vigueur le 31 mai 2014 contient de nouvelles règles que chaque commerçant en ligne belge doit respecter. Vous trouverez plus d’information à ce sujet sur www.economie.fgov.be/fr/consommateurs/ Pratiques_commerce/. Au final, le consommateur belge n’attend pas pour profiter pleinement de cette transformation digitale. Pensez comment vous-même avez utilisé l’internet pour planifier vos vacances, trouver votre chemin ou le magasin le plus proche. Vos clients et prospects font de même dans le monde entier et sont sur le web. À titre d’exemple : la Belgique a connu en 2013 la plus grande croissance en Europe en termes de temps consacré à l’internet, soit 2 heures de plus qu’en 2012 pour un total de 22,4 heures par mois9. Quand on sait que les Britanniques consomment internet pendant près de 40 heures par mois, les entrepreneurs belges peuvent se réjouir de l’immense potentiel encore inassouvi que représente le digital.
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comScore Device Essentials, June 2014, Belgium – Share of browser based page views. 7 Internal data Google Belgium, 2013. 8 http://think.withgoogle.com/ mobileplanet. 9 comScore MMX, All sectors, December 2013, Europe 15+.
CONCLUSION Faire des affaires à l’international est une carte jouable pour un nombre croissant d’entreprises, en particulier grâce aux avancées technologiques, dont l’e-commerce. De plus, ‘l’étranger’ ne se limite plus aux pays voisins ou, par extension, à l’UE. L’émergence – et l’attractivité économique – des BRIC et, plus récemment, des MINT élargit le champ d’action au ‘reste du monde’. Cette nouvelle plate-forme globale crée d’énormes opportunités d’affaires. Un sondage de la FEB révèle d’ailleurs que la majorité des CEO estime qu’entreprendre à l’international revêt une importance stratégique pour la croissance et la survie de leur entreprise. Toutefois, les entreprises familiales sont plus réticentes (face au risque), de sorte que leur expansion internationale est plus lente et plus centrée sur les pays limitrophes.
Le travail sur mesure augmente les chances de réussite Si l’internationalisation semble à première vue simple et attrayante, il n’en reste pas moins que c’est une des stratégies commerciales les plus complexes. Il n’existe pas de solution universelle pour le développement de vos activités à l’étranger. Ainsi ‘faire des affaires avec l’étranger’, en se limitant à l’exportation, est moins complexe que ‘faire des affaires à l’étranger’, ce qui implique des investissements directs sur place. Quelle que soit la stratégie choisie, chaque entreprise ou chaque secteur est soumis à des règles spécifiques qui sont souvent déterminées par l’ampleur des activités, la disponibilité de collaborateurs qualifiés et de moyens (financiers) et les conditions concrètes du marché. Face aux multiples règles, il existe une panoplie de solutions qui peuvent être adaptées à vos objectifs.
Il va de soi que le succès de vos projets internationaux dépend d’une connaissance approfondie de la législation spécifique locale, des usages et des formalités. En effet, ce qui s’applique en Belgique ne peut être repris tel quel sur le marché étranger, même pas dans l’Union européenne. Le soutien et l’intervention de conseillers et d’organisations habitués à la législation locale sont souvent d’une importance critique pour la réussite de vos projets. Ne perdez en outre jamais de vue les répercussions possibles de votre expansion internationale sur vos activités nationales. Dans cette brochure, nous structurons les principaux aspects importants dans une stratégie internationale : la fiscalité, la structure juridique, le cadre de droit social, le financement, l’analyse ou l’estimation des risques… Pour vous aider dans la préparation, nous vous fournissons une liste de questions très concrètes. Vos réponses vous permettront de préciser la faisabilité de vos projets ou ambitions et de mieux vous armer contre les risques potentiels de l’entreprise. Des témoignages issus de la pratique rendent la ‘théorie’ tangible. Ils inspirent aussi bien le chef d’entreprise qui fait ses premiers pas sur le marché international que l’entrepreneur plus expérimenté. Quoi qu’il en soit, faire des affaires à l’international est une quête qui peut être enrichie par des conseils pratiques et l’échange d’expériences à tous les niveaux. Grâce à cette brochure pratique, nous voulons vous aider à repousser les frontières de votre activité entrepreneuriale et à aiguiser votre savoir-faire international. Bonne chance !
ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
FEB
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BESOIN D’AIDE ET D’INFORMATION ? Vous trouverez ici une série d’institutions et d’organisations (liste non exhaustive) auxquelles vous pouvez vous adresser pour recevoir aide et information pour insuffler de l’oxygène à vos projets d’expansion à l’international.
BRUSSELS INVEST & EXPORT
AGENCE WALLONNE À L’EXPORTATION ET AUX
SERVICE DU COMMERCE EXTÉRIEUR
INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS (AWEX)
ET DES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS
Promotion du commerce extérieur et soutien pratique et financier aux entrepreneurs qui ont des ambitions internationales.
DU SERVICE PUBLIC RÉGIONAL DE BRUXELLES
La promotion et l’accompagnement des entreprises exportatrices bruxelloises.
Avenue Louise 500, bte 4 1050 Bruxelles + 32 (0)2 800 40 00 www.invest-export.irisnet.be
Place Sainctelette 2 1080 Bruxelles + 32 (0)2 421 82 11 mail@awex.be www.awex.be
MINISTÈRE DE LA RÉGION
AGENCE POUR LE COMMERCE EXTÉRIEUR
DE BRUXELLES-CAPITALE
(ACE)
ADMINISTRATION DE L’ÉCONOMIE
Soutient les trois Régions et les autorités fédérales dans la promotion du commerce extérieur, notamment par l’organisation de missions économiques.
ET DE L’EMPLOI
Offre cinq mesures d’aide aux indépendants, micro-, petites et moyennes entreprises bruxelloises qui cherchent et veulent développer des marchés à l’étranger.
Boulevard du Jardin Botanique 20 1035 Bruxelles + 32 (0)2 800 34 04 expa.eco@gob.irisnet.be www.werk-economie-emploi.irisnet.be (aller vers primes et subsides/PME ou indépendant/exporter) FLANDERS INVESTMENT & TRADE (FIT)
Stimule la croissance des entreprises internationales qui entreprennent durablement.
Avenue Albert II 37 1030 Bruxelles + 32 (0)2 504 87 11 info@fitagency.be www.flandersinvestmentandtrade.be Il existe un bureau d’information spécifique dans chaque province flamande. 76
FEB ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
Rue Montoyer 3 1000 Bruxelles + 32 (0)2 206 35 11 info@abh-ace.be www.abh-ace.be ICC BELGIUM
Défend les intérêts des entreprises dans le commerce international, élabore des règles commerciales reconnues dans le monde entier et se préoccupe de problèmes comme la contrefaçon et la protection de la propriété intellectuelle.
Rue des Sols 8 1000 Bruxelles + 32 (0)2 515 08 44 info@iccwbo.be www.iccbelgium.be
INTERNATIONAL BUSINESS INSTITUTE
AGORIA BUSINESS DEVELOPMENT CLUBS
Organise une formation ciblée sur l’entreprise
Agoria International Business soutient les
internationale et ambitionne de devenir le centre
entreprises technologiques belges dans la
de compétence du commerce international.
promotion et la prospection internationales.
c/o ICC Belgium Rue des Sols 8 1000 Bruxelles + 32 (0)2 515 08 44 ibi@iccbelgium.be www.iccbelgium.be/ibi
Sept business development clubs agissant sur des marchés spécifiques identifient les projets intéressants partout dans le monde et mettent leurs membres en contact avec les décideurs concernés. Grâce à la business intelligence sur mesure, au réseautage de haut niveau et aux missions commerciales entrantes et sortantes,
ENTERPRISE EUROPE NETWORK (BELGIQUE)
Agoria ouvre à ses membres des opportunités
Ce réseau a notamment pour objectif d’aider les
commerciales qualitatives.
entreprises, et plus spécifiquement les PME, à
www.agoria.be (aller vers Business Development > International Business)
accéder à de nouveaux marchés à l’étranger.
Square Frère-Orban 10 1049 Bruxelles +32 (0)2 295 00 11 thd@enterprise-europe-network.ec.europa.eu www.enterprise-europe-network.ec.europa.eu
FEVIA FOOD.BE
Grâce au concept ‘Food.be. Small country. Great Food’, Fevia, la Fédération de l’industrie alimentaire, veut valoriser la qualité de l’alimentation belge et en stimuler l’exportation.
EUGO
Les points forts de l’alimentation belge sont
Vous souhaitez créer une entreprise ou livrer
indéniables, mais souvent méconnus. La Belgique
temporairement des services transfrontaliers
jouit d’une image forte pour ses bières et son
dans l’UE/EEE (les 28 États membres de l’UE
chocolat, mais l’ensemble du secteur alimentaire
plus l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège) ?
peut tirer parti d’une image renforcée, surtout
Vous pouvez vous adresser à un guichet unique
dans les marchés émergents.
du réseau EUGO. Ils vous aident à effectuer vos
www.food.be
démarches administratives en ligne.
http://ec.europa.eu/internal_market/eu-go/ index_fr.htm
ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL
FEB
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ENTREPRENDRE À L’INTERNATIONAL Faire des affaires à l’international est une carte jouable pour un nombre croissant d’entreprises, en particulier grâce aux avancées technologiques, dont l’e-commerce. De plus, ‘l’étranger’ ne se limite plus aux pays voisins ou, par extension, à l’UE. La nouvelle plate-forme, d’envergure mondiale, crée d’énormes opportunités d’affaires. Si l’internationalisation semble à première vue simple et attrayante, il n’en reste pas moins que c’est une des stratégies commerciales les plus complexes. Quelle que soit la stratégie choisie, chaque entreprise ou chaque secteur est soumis à des règles spécifiques qui sont souvent déterminées par l’ampleur des activités, la disponibilité de collaborateurs qualifiés et de moyens (financiers) et les conditions concrètes du marché. Face aux multiples règles, il existe une panoplie de solutions qui peuvent être adaptées à vos objectifs. Dans cette brochure, rédigée par les experts de BDO et d’ING, nous abordons de manière intelligible les principaux aspects importants dans une stratégie internationale : la fiscalité, la structure juridique, le cadre de droit social, le financement, la gestion des risques… Des témoignages issus de la pratique rendent la ‘théorie’ tangible. Grâce à ce guide pratique, nous voulons vous aider à repousser les frontières de votre activité entrepreneuriale et à aiguiser votre savoir-faire international !
La Fédération des entreprises de Belgique est le porte-parole d’une cinquantaine de fédérations professionnelles sectorielles, qui représentent au total plus de 50.000 entreprises, dont 41.000 PME. A ce titre, la FEB est la plus grande organisation interprofessionnelle de notre pays et sa représentativité peut être évaluée à 80% de l’emploi dans le secteur privé. www.feb.be