13è année - n° 296
14 avril 2020
www.ledireetlecrire.com Le temps du confinement, la périodicité de la LETTRE est modifiée. Sa parution sera fonction de l’actualité.
COVID-19
« L’écriture, c’est un métier,
un artisanat »
L’ « écrivain au travail », ce sont trois émissions mises en ligne sur ARTE Radio qui interrogent le métier d’écrivain.
Andrée Chedid, Face aux violettes. Tapuscrit avec corrections de l’auteure. Fonds Andrée Chedid / IMEC
Cet entretien avec Philippe Jaenada , auteur de La Serpe (prix Femina 2017), détruit le mythe d’une inspiration divine qui saisirait les auteurs au petit matin. Il rappelle que l'écriture est aussi un métier, un artisanat, un beau travail. Voir aussi notre page Émission 1 « Des livres Émission 2 sur l’écriture » Émission 3
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Le dire et l’écrire
COVID-19
« Donne du courage autour de toi et n’accepte jamais ce qui te révulse... » Wajdi Mouawad (le 12 avril 2020)
Mon cher petit garçon,
T’écrire ces quatre mots me bouleverse. Ils rendent si réel l’homme que tu es, en cet aujourd’hui qui est le tien, quand, dans celui qui est le mien, tu n’es encore qu’un enfant. Cette lettre je l’adresse donc à l’homme que tu n’es pas encore pour moi, mais que tu es devenu puisque te voilà en train de la lire. Tu l’auras trouvée sans doute par hasard sur cette clé où je consigne en secret les trésors de ton enfance. J’ignore l’âge que tu as, j’ignore ce qu’est devenu le monde, j’ignore même si ces clefs fonctionnent encore mais j’ai espoir que, la découvrant, tu trouveras un moyen de l’ouvrir. Et par la magie de l’écriture, voici que cette lettre devient la fine paroi qui nous relie, et entre l’aujourd’hui où je t’écris où tu commences à déchiffrer les phrases, où tu as peur dans le noir, où tu crois à la magie - et celui où tu me lis, chaque mot de ma lettre a gardé sa présence ; si à l’instant j’écris je t’aime, voilà qu’à ton tour, des années plus tard, tu lis je t’aime. Et que t’écrire d’autre que je t’aime, alors que nous vivons ce que nous vivons en ce confinement dont tu n’as peut-être plus qu’un vague souvenir ? Quoi dire de plus urgent que l’amour ? En ces journées étranges où rode une mort invisible et où le monde va vers son ravin, un ravin qui semble être l’héritage laissés aux gens de ta génération, un père, plus que de raison, s’inquiète pour son fils. Je te regarde. Tu dessines un escargot. Tu lèves la tête et tu me souris. « Qu’est-ce qu’il y a papa ? » Rien mon garçon. Je ne sauverai pas le monde. Mais j’ai beau ne pas le sauver, je peux du moins te désapprendre la peur. T’aider à ne pas hésiter le jour où il te faudra choisir entre avoir du courage ou avoir une ma-
chine à laver. T’apprendre surtout pourquoi il ne faudra jamais prononcer les mots de Cain et, toujours, rester le gardien de ton frère. Quitte à tout perdre. J’ignore d’où tu me lis, ni de quel temps, temps de paix ou temps de guerre, temps des humains ou temps des machines, j’espère simplement que ton présent est meilleur que le mien. Nous nous enterrons vivants en nous privant des gestes de l’ivresse : embrassades, accolades, partage et nul ne peut sécher les larmes d’un ami. Mais si ton temps est pire que celui de ton enfance, si, en ce moment où tu me lis, tu es dans la crainte à ton tour, je voudrais par cette lettre te donner un peu de ce courage dont parfois j’ai manqué et, repensant à ce que nous nous sommes si souvent racontés, tu te souviennes que c’est la bonté qui est la normalité du monde car la bonté est courageuse, la bonté est généreuse et jamais elle ne consent à être comme une embusquée, qui, à l’arrière vit grâce aux sang des autres. Nul ne peut expliquer la grandeur de ceux qui font la richesse du monde. Donne du courage autour de toi et n’accepte jamais ce qui te révulse. Quant à moi : je t’aime. Ton père t’aime. Sache cela et n’en doute jamais. Ton père.
Écouter la lettre lue par Augustin Trapenard
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Le dire et l’écrire
COVID-19
« Effets secondaires » Grand Corps Malade (le 10 avril 2020) Avec l'aide du compositeur Mosimann et de son ami et producteur Rachid Kallouche, Fabien Marsaud, alias Grand Corps Malade, vient de sortir le titre « Effets secondaires ». Une chanson en hommage à deux hôpitaux, de Mantes-la-Jolie et de Saint-Denis. Loin de se cantonner au seul virus qui touche le monde entier, Grand Corps Malade alerte aussi sur tous les autres grands maux actuels, de l'état de la planète à la cause des migrants.
En ces temps confinés on s'est posés un peu Loin des courses effrénées on a ouvert les yeux Sur cette époque troublée, ça fait du bien parfois Se remettre à penser même si c'est pas par choix Alors entre les cris d'enfants et le travail scolaire Entre les masque et les gants, entre peur et colère Voyant les dirigeants flipper dans leur confuse gestion En ces temps confinés, on se pose des questions Et maintenant… Et si ce virus avait beaucoup d'autres vertus Que celle de s'attaquer à nos poumons vulnérables S'il essayait aussi de nous rendre la vue Sur nos modes de vie devenus préjudiciables Si on doit sauver nos vies en restant bien chez soi On laisse enfin la terre récupérer ce qu'on lui a pris La nature fait sa loi en reprenant ses droits Se vengeant de notre arrogance et de notre mépris Et est-ce un hasard si ce virus immonde N'attaque pas les plus jeunes, n'atteint pas les enfants Il s'en prend aux adultes responsables de ce monde Il condamne nos dérives et épargne les innocents Ce monde des adultes est devenu si fébrile L'ordre établi a explosé en éclats Les terriens se rappellent qu'ils sont humains et fragiles Et se sentent peut-être l'heure de remettre tout à plat Et si ce virus avait beaucoup d'autres pouvoirs Que celui de s'attaquer à notre respiration S'il essayait aussi de nous rendre la mémoire Sur les valeurs oubliées derrière nos ambitions
On se découvre soudain semblables, solidaires Tous dans le même bateau pour affronter le virus C'était un peu moins le cas pour combattre la misère On était moins unis pour accueillir l'Aquarius Et si ce virus avait le don énorme de rappeler ce qui nous est vraiment essentiel Les voyages, les sorties, l'argent ne sont plus la norme Et de nos fenêtres on réapprend à regarder le ciel On a du temps pour la famille, on ralenti le travail Et même avec l'extérieur on renforce les liens On réinvente nos rituels, pleins d'idées, de trouvailles Et chaque jour on prend des nouvelles de nos anciens Et si ce virus nous montrait qui sont les vrais héros Ceux qui trimaient déjà dans nos pensées lointaines Ce n'est que maintenant qu'ils font la une des journaux Pendant que le CAC 40 est en quarantaine Bien avant le Corona l'hôpital suffoquait Il toussait la misère et la saturation
Ecouter
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Le dire et l’écrire
COVID-19
« Effets secondaires »
(suite)
Nos dirigeants découvrent qu'il y a lieu d'être inquiets Maintenant qu'il y a la queue en réanimation On reconnaît tout à coup ceux qui nous aident à vivre Quand l'état asphyxie tous nos services publics Ceux qui nettoient les rues, qui transportent et qui livrent On redécouvre les transparents de la république Et maintenant… Alors quand ce virus partira comme il est venu Que restera-t-il de tous ses effets secondaires Qu'est-ce qu'on aura gagné avec tout ce qu'on a perdu Est-ce que nos morts auront eu un destin salutaire Et maintenant… … Et maintenant… Et maintenant… Et maintenant…
Document imprimable
Les poèmes de Catherine Malard
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Le dire et l’écrire
COVID-19
Faire face pendant le confinement Toutes les « Lettres d’intérieur » lues, sur France Inter, par Augustin Trapenard La petite histoire de Gwen la bretonne (un court métrage
inédit d’Agnès Varda) (ICI)
Déjà plus de 30 textes gratuits Lire les numéros parus
Anna Seghers, une écriture en résistance (France Culture
2012) (ICI) #fenêtresurlautre (Photo, vidéo et poésie, laissez libre
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Michel Kikoïne) (ICI) "La Fin de l’homme rouge" de Svetlana Alexievitch
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Consultations poétiques par téléphone (Théâtre de la Ville
«journal de confinement»
- Paris ) (ICI)
A envoyer à cette adresse :
apablog@yahoo.fr
Le journal des non–confinés (mises à jour au 14/04/2020) (ICI)
Colloque de Montréal Prévu en mai 2020, il est reporté, cause COVID-19, en mai 2021
Pour lire les textes :
http://apablog1.canalblog.com/
Le journal sonore de Wajdi Mouawad Ouvert dès mardi 17 mars, il vous donne rendezvous du lundi au vendredi à 11 heures pour un épisode sonore inédit de son journal de confinement.
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Le dire et l’écrire
COVID-19
« Même chacun chez soi, la musique continue à nous réunir » Au Québec, avec « Les gens de mon pays » La distanciation sociale et le confinement liés à la COVID-19 n’ont pas empêché Gilles Vigneault et l’Orchestre Métropolitain de Montréal de collaborer pour offrir une toute nouvelle version musicale de la célèbre chanson Les gens de mon pays.
En Italie, avec « Va, pensiero » (le « Chœur des esclaves ») Ce passage de l’opéra NABUCCO de Giuseppe Verdi a été, au 19è siècle, avant l’unification italienne et au temps de l’occupation autrichienne, l’hymne officieux des Italiens. (chanté ici par l’International Opera Choir confiné à Rome)
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Le dire et l’écrire
Des livres
Étés anglais La saga des Cazalet, tome I
Elizabeth Jane Howard
Virginia Emmanuelle Favier Dans le lourd manoir aux sombres boiseries, Miss Jan s’apprête à devenir Virginia. Mais naître fille, à l’époque victorienne, c’est n’avoir pour horizon que le mariage. Virginia Woolf dérogera à toutes les règles. Elle fera œuvre de ses élans brisés et de son âpre mélancolie. La prose formidablement évocatrice d’Emmanuelle Favier, l’autrice du Courage qu’il faut aux rivières, fait de cette biographie subjective un récit vibrant, fiévreux, hypnotique.
Juillet 1937. À Home Place, au coeur du Sussex, jardiniers, femmes de chambre et cuisinière sont sur le pont. La Duche orchestre le ballet des domestiques avant l'arrivée de ses trois fils, Hugh, Edward et Rupert Cazalet, en chemin depuis Londres avec épouses, enfants et gouvernantes. Où dormira Clary, adolescente mal dans sa peau en plein conflit avec sa belle-mère ? Quelle robe portera Villy, ancienne ballerine désormais mère au foyer ? Polly, terrorisée à l'idée qu'une guerre éclate, s'entendra-t -elle avec sa cousine Louise qui rêve de devenir actrice ? Rachel, la seule fille de la Duche, trouvera -t-elle un moment pour ouvrir la précieuse lettre de son amie Sid ? Non-dits, chamailleries, profonds chagrins... Aux préoccupations des adultes font écho les inquiétudes des enfants, et à la résilience des femmes, qu'elles soient épouses, fillettes ou domestiques, répond la toute-puissance - ou l'impuissance - des hommes. L'été regorge d'incertitudes mais, sans l'ombre d'un doute, une nouvelle guerre approche : entre pique-niques sur la plage et soirées auprès du gramophone, il faudra inventorier lits de camp et masques à gaz.
Virginia avant Woolf Un article paru sur le site « On la lu »
Virginia, l’intime primordial Un article paru sur le site « ActuaLitté »
Étés enfouis Un article paru sur le site « En attendant Nadeau » La série télévisée de la BBC (en Anglais)
Une pandémie virale tue les neuf dixièmes de l’humanité ...
L’année du lion Deon Meyer Ils ont tué mon père. Je les aurai. Après la Fièvre qui a décimé les neuf dixièmes de la race humaine, mon père, Willem Storm, a fondé Amanzi, une nouvelle colonie, et l’a menée du chaos à l’ordre, de l’obscurité à la lumière, de la famine à l’abondance. Je suis Nico Storm, formé par Domingo à l’art de tuer. Je détestais mon père et je le vénérais. Ils l’ont abattu à Witput, dans notre beau Karoo, en bordure de l’ombre effacée d’un cercle d’irrigation. Je vais trouver ses tueurs et je le vengerai. Ce qui suit est mon histoire.
Vidéo de présentation par l’auteur (Librairie Mollat)
Une sélection de livres sur les épidémies