Numéro 2017 / Substance muséographique

Page 1

NUMéRO 2017/ SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

CHRONIQUES ZEN+DCO


NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

substance

la mus é ographie du M us é e basque de bayonne C r é e un crescendo sur les trois niveau x de la maison dagourette pour amener le visiteur au milieu des oeuvres consacr é es au x f ê tes et au x j eu x de la soci é t é basque en m ê me temps qu ’ il se rapproche de la lumi è re z é nithale .

Page gauche _ Le kiosque des contes : plafond formé par 10000 perles de verre de Venise de dimension et couleur différentes pour évoquer le relief accidenté du piémont pyrénéen. Page droite _ Effet de l’utilisation de film à réseau lenticulaire sur la cloison de la vitrine “ Jour au marché “.

Le bouquet de violettes sauvages posés à l’ombre de gros oignons à même du trottoir du Pont neuf face à la maison Dagourette au petit matin de ce samedi là jour de marché à Bayonne, émerge de la brume blanche montée de la Nive. Vision révélatrice des sens mélangés et in-dissociés pour introduire le musée basque. Elle sera accompagnatrice du projet ; l’oignon du sucre, l’oignon des pleurs, l’oignon de la peau craquante et de la chair tendre, la sphère qui s’effeuille, l’accouplement avec les corolles dansantes de minuscules pétales en forme d’ailes de papillon dont on sent le velours à travers les yeux et qui tendent vers nous ce visage angélique. Quelle chance d’avoir rencontré ce jour-là cette émotion ! Elle s’avère être dans le monde inconnu du projet, notre vérité, notre échelle de pompier, notre aire de repos, notre agent secret. Paul Valéry alors venu à Guethary ( pour visiter le musée basque ?) parle de substance. Il en faut pour faire de la muséographie.

Psaumes de Matin à Guéthary – Chant des coqs Bien-être – dans le seul, le frais-tiède, le bleu-noir fondant, à grosses étoiles rares et mûres Il y a un chant silencieux dans cet instant. La paix est encore massive. Trains et phares gardent leurs grondements et leurs éclats de nuit. Seul à seul. L’ennemie dort quelque part Les raisons dorment. Personne ne raisonne. Les peuples sont absents. Le Germain est sur le dos. Le Latin sur le flanc droit. Tous ceux qui sont éveillés sont esclaves ou malades. La substance blanchit. La masse divise. Il y a de célestes couleurs, et des lumières terrestres que les couleurs vont faire taire. Elles ne peuvent coexister. Il y a des sentiments et des nettetés en présence qui ne peuvent coexister – Il est temps que vienne le jour, avec son épée qui divise l’esprit de l’âme et découpe aujourd’hui dans -

(texte inachevé)

Paul Valéry, 1928, dans Cahiers, vol.2 La Pléiade p.1292

musee basque bayonne

CHRONIQUES ZEN+DCO


NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

progression

Progression Les processus de fabrication du projet sont plus intéressants que les idées. Ils produisent, dans le temps d’élaboration du projet, une organisation formelle plus sophistiquée et complexe que l’exécution d’une idée dite « instantanée ». Processus au pluriel, car ils sont multiples et à multiples facettes ; dessins, listes (classer, organiser, regrouper), adéquation aux idées, matériaux, éco-conception, interfaces avec l’enveloppe, stratégies temporelles, résolutions techniques, gestions financières, mouvements des oeuvres. Les processus génèrent des micro-histoires dans le projet, narrations dans lesquelles l’entité projet est décomposée en séquences qui vont dériver pour atteindre une forme de stabilité pouvant être remise en cause par une séquence connexe. Un équilibre instable s’instaure ; il faut savoir déambuler, naviguer et reconnaître le potentiel de ces émergences. Le volcan d’idées reste pourtant en sommeil. Dans ces mécaniques d’activation de mouvements, les trajectoires peuvent toujours être infléchies. Rares sont les lancées qui mènent par le plus court chemin, sans obstacles, du point A au point B. La valeur ajoutée est proportionnelle à l’inquiétude de celui ou celle qui attend une image immédiate. Un projet muséographique est le contraire d’un tableau achevé. Si la production d’images figées est nécessaire pour la communication du projet en cours, le polaroïd s’imprime en le ventilant, et le dévoilement est source de plaisir ou d’émerveillement avant d’être potentiellement abandonné. Les processus sont sources d’un deuil facilement accepté, à l’instar du travail en creux réalisé pour laisser place à l’appropriation publique. Le processus invente un nouveau langage qui assemble les différentes sphères muséales (concept muséologique/concept muséographique) autour du projet. Ce langage est unique et intransposable d’un projet à un autre. Forcer le trait, c’est mettre le processus en arrêt et plonger dans l’indifférence au détriment du sujet à traiter. Nous participons, grâce aux technologies de l’information, à la synthèse et à la prolifération de plusieurs histoires dans la génération du projet, enrichi d’un apport simultané de connaissances sur le projet lui-même. L’acquisition de ces connaissances, qui peuvent participer d’une révélation, est réinjectée dans l’élaboration et le développement d’autres séquences muséographiques. Abolition de hiérarchie et de toute morale quand un nouveau souffle s’impose. Souvent assimilé à la phase des études, le processus de production du projet muséographique ne s’interrompt pas aux livrables et aux documents de consultation, marqueurs d’une étape contractuelle. Il est prolongé dans son exécution matérielle. À l’instar de l’inquiétante fascination que peut susciter une opération en train d’être exécutée, le projet continue à s’écrire Progression.

PROGRESSION, extrait du MAGAZINE /11 FEUILLETS édité à l’occasion de l’exposition inaugurale du muée de l’Homme avec le soutien des entreprises des aménagements muséographiques . Permasteelisa Interiors, Cofely Axima, Mercier Val de Loire, SDEL, La Serrurerie de la Parette, Videlio, Boscher. Illustration réalisée à partir des plans du projet

progression

CHRONIQUES ZEN+DCO


NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

ideal musee

Musée de l’H(F)(e)omme, un processus sans fin Il faut savoir le faire comme n’importe quel autre. S’enfouir dans le labyrinthe d’idées, de signes, de dates, de références, de causes, de recherches, d’énigmes, de mensonges, de corps. Un musée subjectif du collectif. Collectif Homo sapiens, celui de notre humanité actuelle, héritière d’autres humanités sur la planète Terre. Une avec elle. “ Le collectif n’est rien que le sujet de l’individuel ”, Jacques Lacan. Nous sommes sur MON sujet. Mon cycle de composition, recomposition, décomposition, au fil des mises au point et ajustements pour se rapprocher de la substance fictive, instable, chromatique qui fera le musée. Un système de vie. Mon sujet est temps et matière pour une perméabilité omniprésente. Le temps du récit, la matière du lieu et celle des objets, le temps de la conception qui transcende les obstacles dans la nuit où la pensée gamberge vers le mirage d’un objectif : l’objectif d’un musée idéal. Mon sujet est mouvement pour dulcifier les idées jusqu’à atteindre leur porosité, leur suintement. Les flux s’y emmêlent et la muséographie est non plus la gestion de l’information, mais la création, la distinction, la singularisation, la dénomination de traces. Au départ du processus on cherche le tempo. On écrit des gammes. On répète à l’infini. Transe. Et le tracé du mouvement dans l’espace est composition, vision. Existence. L’articulation des idées est le schéma directeur, référence urbanistique, de la muséographie. Ne faire qu’un avec le lieu, avec le corps du visiteur, avec la densité visuelle et celle du sens. Idéal mystique. Dans ce galop conceptuel comme une ivresse, la vitrine-cerveau s’invente ; elle est plastique, réactive, machine, mémoire, connexion. Au théâtre, elle répondrait à la dénomination imagée et technique de cage de scène. Ici sa nouvelle appellation pour designer cette machine à communiquer qu’elle forme en unité ou assemblage avec d’autres vitrines. Les galeries du Palais de Chaillot vont accueillir la galerie de l’évolution des Homo sapiens, issus d’un buissonnement de lignées humaines que les paléoanthropologues reconstituent par bribes. Le temps long de notre temps actuel dont le futur fait débat. La continuité visuelle de l’espace qui amplifie l’effet de ces longues galeries est une métaphore architecturale et renforce le lien entre ce qui est sens et ce qui est espace. Adieu mannequins costumés et représentations du “bon sauvage”, regardons-nous de l’intérieur à travers la loupe de l’évolution ! Un parcours muséal conçu comme une baguenaude dans une stratigraphie dynamique ;

H2M Humano-muséo

DENSITÉ / MACHINE À COMMUNIQUER / ÉVOLUTION Vitrine murale : PROTOTYPE / Essai réalisé en phase Chantier Exécution Page droite _ Prototype ech 1 / 1 c/o Permasteelisa Interiors

ideal musee

CHRONIQUES ZEN+DCO


NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Ideal musée

Echantillonnage des couleurs et matières / Essai réalisé en phase Etude APD verre extra-clair, verre teinté, miroir sablé, panneau alvéolaire d’aluminium, verre imprimé, corian teinte pastel ( objet mis en regard _ Femme invisible - coll Zen+dCo) Page précédente _ Mock-up d’une grande vitrine murale / Montage réalisé en phase Chantier Exécution

Ideal musée

Echantillonnage des couleurs et matières / Essai réalisé en phase Etude APD verre sérigraphié en dégradé, feutre naturel, feutre noir ( objets mis en regard _ Coeur en porcelaine - coll Zen+dCo, Collier Miao - coll Serge Bahuchet )

CHRONIQUES ZEN+DCO


10

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Ideal musée

Maquettes et prototype / Essai réalisé en phase Chantier Exécution Page gauche _ Maquettes ech 1/ 20 des socles en corian noir du buisson des lignées humaines Page droite _ Prototype ech 1 / 1 de l’ombre de Homo Neanderthalensis réalisé en corian noir matifié

Ideal musée

CHRONIQUES ZEN+DCO

11


12

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Ideal musée

musée de l’HOMME / VITRINES ET INSTALLATION Page gauche _ Alcôve des cires anatomiques equipée d’un plafond technique pour la climatisation Page droite _ Structure en aluminium 6061-T6 réalisée par La Serrurerie de la Parette dite INFLEXION pour la présentation de 90 bustes de la collection anthropologique. Photos Véronique Mati

Ideal musée

CHRONIQUES ZEN+DCO

13


14

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Ideal musée

musée de l’HOMME / VITRINES ET INSTALLATION Page gauche _ Le long de la galerie du palais de Chaillot la respiration avec Paris est comme un jeu!xww Page droite _ Détail imbrication de la mezzanine (architectes BLP et Atelier Nebout), structure des bustes et des socles des Lignées humaines à l’entrée de la section D’ou venous-nous? Photos Véronique Mati

Ideal musée

CHRONIQUES ZEN+DCO

15


16

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

inspiration

inspiration

CHRONIQUES ZEN+DCO

V I D E O O RG A N I S M , I N T E RV I E W R E T R A N S C R I T D E P I P I L O T T I R I S T A P R O P O S D E L ’ E X P O S I T I O N E L I X I R AU M U S E U M B O J I M A N S VA N B E U N I N G E N ( a v r i l 2 0 0 9 )

In video and photography when we make reproductions we always lose colour compared to the original because we are so afraid of making white skin look sickly. That’s why colours is removed technically and now we’re used to the fact that there’s less colour in video. I merely return the colour that technology has stolen. I don’t believe that my images are more beautiful than reality. When I look at you and then close my eyes…When I take the time to look at these colours they’re more fantastic in any human being than what you may be able to reproduce in art. The same figure emerges in four works. Her name is Ewelina Guzik. She has been a kind of muse to me over the past few years. The prototype of human being. She makes an appearance in paradise. She tries to connect paradise to civilization. If there’s a naked woman in my work she represents mankind. She not only represents women. Her nakedness represents the absence of social distinctions. The absence of geography. Mankind is always masculine to me as well. But I try to ignore that on a positive way. All the works have a melancholy aspect… But that’s rather in the fringes. You sense this on a deeper level The first work is very clearly melancholic. Here a figure, which happens to be me, thinks about her parents, her life, about her doubts.

To me, melancholy also means reconciliation with the imperfect. Assuming that there are many black holes in life, abysses. Assuming that there are many misunderstandings and words harbour a great danger. What’s typical of my work is that you get close to it. When you’re here, everything that is chaotic, negative, or things that scare you are faded out. A visitor becomes like a blood corpuscle which enters the various veins. When it needs fresh oxygen, it returns to the heart or to friends and it will get oxygen there. Things are exchanged and it continues on again. Elixir can be medication for the mind. Or it can impart a feeling of the museum as a hospital for the mind and the spirit. I’d like you to walk out smiling, feeling lighter. Feeling more energetic. That would be perfect.

Vorstadthirn (Suburb Brain) 3 projections onto a miniaturised model of a suburb residential area, various objects, with sound Installation view, Hayward Gallery, ‘Eyeball Massage’, London, England (Travelling Exhibition), 2011 Photo: Linda Nylind

17


18

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

verre star

Verre Star

UN LIQUIDE QUI S’IGNORE Reconnu comme un élément liquide extraordinairement visqueux, ses propriétés de solidité sont souvent remises en cause, et pourtant il est utilisé de manière structurelle ou protectrice ; une deuxième peau. C’est une enveloppe imperméable et recyclable, qui demande une grande précision de mise en oeuvre. Un verre seul est aveugle. Accompagné d’autres matériaux performants - colles, alliages, cristaux liquides -, il ouvre un spectre d’applications inattendues que nous avons exploitées dans ce projet. Un matériau dur et transparent, supportant des températures extrêmes sans subir de dilatation, il fait partie d’une filière industrielle propre, éco-responsable. D’une finition limpide et continue, il peut être gravé, imprimé, percé, sablé, augmenté. Le verre feuilleté est un assemblage de feuilles de verre et d’intercalaires de nature plastique issu d’un accident de manipulation d’Édouard Bénédictus en 1903. Intercalé d’un film en polyvinyle butyral qui lui confère de nouvelles propriétés de résistance, il devient le réceptacle de projections picturales encapsulées et protégées, tout en effaçant le référentiel recto-verso de la toile. Ses applications spécifiques au projet muséographique sont à l’image d’une synthèse issue de sa transformation en trois temps :

FUSION Occulter et protéger de la lumière naturelle en préservant la transparence. Résister aux efforts structurels dignes d’un mur porteur. Limiter les échanges d’air pour arriver à un renouvellement sur dix jours, afin de garantir un conditionnement d’air optimal dont l’effet direct est une économie d’énergie et de consommation, en respect des conditions de conservation des oeuvres. Supporter cinquante coups de hache sans éclat de matière. Douceur tactile au toucher de sa surface. Durabilité, sans altération dans le temps. Peut-on demander encore plus à cette membrane ? TREMPE Associé aux techniques de collage structurel, il est employé comme paroi porteuse et de renfort de structure, évitant l’utilisation abusive d’ossatures métalliques. Les vitrines murales peuvent atteindre ainsi quatre mètres de haut sans montant opaque visible sur le périmètre de présentation. Nous avons exploré les finitions de surface par sablage, bains d’acide, coloration dans la masse, impression sur deux faces, films et pellicules adhésives, dans un bain profond de sérendipité accompagné de multiples essais, combinaisons. Toujours à la recherche d’une profondeur et d’une variation des propriétés de surface. RECUIT Optimisation des volumes intégrés au bâtiment : 96 angles de verre pour 2400 m2 d’exposition (soit un nombre quatre fois inférieur aux utilisations standardisées de volumes de vitrines), représentant 819 m2 de surfaces verticales, 21 m2 de surfaces inclinées ou horizontales. La fluidité de l’expérience de visite ne peut pas être dissociée de celle de la lumière naturelle, dont on doit pourtant protéger les objets. Les trois alcôves pentagonales, qui replient l’épaisseur de son contenant pour envelopper les oeuvres d’une part, et le visiteur d’autre part, sont associées à la fluidité des galeries grâce aux capacités plastiques de ce matériau. Quant au visiteur, placé au centre de ces kaléidoscopes de notions, il en devient le maître assembleur. L’intrigante matérialité des surfaces enveloppantes des alcôves est l’aboutissement d’une stratification des techniques d’impression et de traitement surfaciques, dont l’effet énigmatique et sensuel évolue avec la lumière naturelle de l’espace du musée.

VERRE STAR, extrait du MAGAZINE /11 FEUILLETS édité à l’occasion de l’exposition inaugurale du muée de l’Homme avec le soutien des entreprises des aménagements muséographiques . Permasteelisa Interiors, Cofely Axima, Mercier Val de Loire, SDEL, La Serrurerie de la Parette, Videlio, Boscher. Illustration réalisée à partir des fichiers d’impression sur les différents volume de verres

VERRE STAR

CHRONIQUES ZEN+DCO

19


20

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

VERRE STAR

VERRES IMPRIMES et SERIGRAPHIES Page gauche _ Prototype d’impression sérigraphique à partir d’un dessin au charbon pour utilisation et déclinaison sur verre pour les vitrines du musée de l’Homme Page droite _ Vue extérieure d’un pan de l’alcôve du musée de l’Homme consacrée aux objets de dévotion et rituels funéraires période néolithique Photo Véronique Mati

VERRE STAR

CHRONIQUES ZEN+DCO

21


22

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

PERCEPTION TOTALE

Musée des Confluences Espèces la maille du vivant ou l’espérance d’une totale perception

Une exposition comme une intériorisation, visionnaire pour que la pensée la perçoive, la mémoire la fixe et l’intelligence en comprenne le sens au milieu du corps du musée, dans le “Nuage” de l’architecte. Voilà le programme que nous confie alors en 2007 l’équipe du futur musée des Confluences guidée par Michel Coté. Comme nous l’avons entendu. L’ouïe est le premier sens via lequel tout projet rentre en contraction : sa mise en corps. Entendre pour voir... J’attrape les femmes par l’oreille dit Serge Gainsbourg. Début du XXIème siècle...Quel chant possible entre humains et non-humains ? Philippe Descola donne ses cours au Collège de France, Les formes du paysage, dit que la nature est une invention de l’Occident, publie Par delà nature et culture et influence notre fiction spatiale. L’entité (ou récit muséographique) morale, publique, politique, se coiffe de la notion d’écosystème dans notre escarcelle. Écosystème muséo issu de l’assemblage d’idées et leurs liaisons dynamiques, de l’adaptation du contenu muséologique, du renouvellement de perspectives sur elles-mêmes et dans le réel, de l’avènement d’une perception constante de l’expansion de la pensée et d’une transcription d’un état de fragilité, voire d’instabilité pour éloigner la rigidité perçue parfois mortuaire des objets. Le travail muséomorphique réifie le lien dans leur dissémination ou celle des idées autour d’eux pour que l’ensemble soit intelligible au delà de la complexité apparente des juxtapositions. La fiction muséographique doit être vivante et en y injectant une intensité spatiale sa perception est totale. Presque fantomatique comme dans un flux de désir. Avec la maille, structure de fils tissés sur cadres triangulaires métalliques reliés par des nœuds multidirectionnels, notre système de traces tridimensionnelles en dessine le champ. Espace, temps et information sont les jambes de force de ces tracés qui virevoltent dans le lieu. Fiction spatiale et réalité technique, fiction visuelle et réalité du trompe l’œil, fiction d’échanges et réalité physique de séparation, le trajet des fils construit “l’itinéraire au fur et à mesure de sa progression”(in Tim Ingold, Une brève histoire des lignes, Zones Sensibles, 2011-2013) et le souvenir. L’enjeu d’une pareille forme muséographique est de marquer la bascule muséale de l’ancien Muséum de Lyon et de créer un lieu de perception totale pour faire exister, dans cette parcelle de l’édifice de CoopHimelb(l)au le nouveau concept du musée des Confluences, au croisement des savoirs et des connaissances. Une manière aussi de rajouter une ligne au développement des théories scientifiques et de la connaissance ; *Mystique, le sensationnel des Cabinets de Curiosités, XVIe-XVIIIe siècle Systématique, collections du XIXe siècle Contextuelle, les dioramas, fin XIXe-début XXe siècle Didactique, les années 1980 Scénographique, images 3D des années 1990 Multimédia-TIC, mondes expérimentaux du 21e siècle ICI : Tr a n s m é d i a t i q u e ou le muséomorphisme de Z e n + d C o O f f i c e D e s i g n *Source Bertron Schwarz Frey in « designing exhibitions-ausstellungen entwerfen », Birkhäuser, Basel

PERCEPTION TOTALE

CHRONIQUES ZEN+DCO

23


24

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

PERCEPTION TOTALE

Musée des Confluences Niveau Exposition permanente Salle 22 Exposition E S P è C E S, L A M A I L L E D U V I VA N T Page précédente _ Vue sur la vitrine des Oiseaux repartis en clades Page gauche _ Vue sur la vitrine des papillons et des coléoptères Page droite _ Vue sur l’installation des mammifères Architecte du bâtiment du musée des Confluences : Coop Himmelb(l)au, Wolf Prix

PERCEPTION TOTALE

CHRONIQUES ZEN+DCO

25


26

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

PERCEPTION TOTALE

Musée des Confluences Niveau Exposition permanente Salle 22 Exposition E S P è C E S, L A M A I L L E D U V I VA N T Page gauche _ Vue sur le socle de la Famille Antilopes Page droite _ Vue sur la sculpture du B u i s s o n d u V i v a n t

PERCEPTION TOTALE

CHRONIQUES CHRONIQUES ZEN+DCO ZEN+DCO

L E B U I S S O N D U V I VA N T e s t u n e i n s t a l l a t i o n , o b j e t e t s é q u e n c e s i n t e r a c t i v e s m u l t i m é d i a , c o n ç u e p o u r l’exposition selon des schémas phylogénétiques et la modélisation réalisée par Samba Soussoukko

d ’ a p r é s l ’ o u v r a g e s c i e n t i f i q u e “ Classification phylogénétique du vivant “ d e G. L e c o i n t r e e t H . L e G u y a d e r. L a s c u l p t u r e d e 2 6 0 c m d ’ e n v e r g u r e r é a l i s é e p a r Pa s c a l Jo s s e , a t e l i e r A D E S S c o u r o n n e u n é c r a n e n f o r m e d e cône tronqué sur lequel les visiteurs peuvent identifier par traçag e à par tir des trois branches principales ( l e s B a c t é r i e s, l e s A r c h é e s e t l e s E u c a r y o t e s ) l e s p r o c e s s u s d e l ’ é v o l u t i o n d u v i v a n t e t l e u r c l a s s i f i c a t i o n .

27 27


28

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

hommage au photographe daniel Boudinet

hommage au photographe daniel Boudinet

CHRONIQUES ZEN+DCO

“ce qui a été une seule fois”

Roland Barthes

TEXTE

E l v i r e P E R E G O, « B O U D I N E T DA N I E L - ( 1 9 45 - 1 9 9 0 ) » Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 21 avril 2015 U R L : h t t p : / / w w w. u n i v e r s a l i s. f r / e n c y c l o p e d i e / d a n i e l - b o u d i n e t /

BOUDINET DANIEL (1945-1990) C’est un Polaroid énigmatique de Daniel Boudinet qui ouvrait l’ouvrage de Roland Barthes sur la photographie, La Chambre claire (1980) : « La photographie – ma photographie –, écrivait Barthes, est sans culture : lorsqu’elle est douloureuse, rien, en elle, ne peut transformer le chagrin en deuil. » Aussi, l’exposition conçue par la galeriste Viviane Esders, Daniel Boudinet-Roland Barthes, présentée dans le cadre des dix ans du Mois de la photo, dédié à la mémoire du philosophe, apparaissait-elle, sans aucune préméditation, comme le premier hommage posthume et donnait à l’ensemble de la biennale une certaine gravité. Dès 1977, Barthes présentait, dans un texte paru dans une livraison de la revue Créatis, l’œuvre de Daniel Boudinet : « C’est une ligne de crête entre deux abîmes : celui du naturalisme et de l’esthétisme [...]. Une sorte d’invitation silencieuse à [...] philosopher. » Classique par la forme, tour à tour paysagiste, photographe d’architecture, portraitiste, à l’aise dans la couleur comme dans le noir et blanc, Daniel Boudinet est un photographe de la vie intérieure, ou plutôt, serait-on tenté de dire, d’un qui-vive intérieur. D’une campagne en Alsace ou d’un paysage en Italie – les jardins de Bomarzo, par exemple –, il sut tirer des images symboliques de la « vraie vie », où l’être est brutalement rendu à l’existence végétale des signes, au lent apprentissage de la solitude et de la nature, des éléments et des hommes. Dans son travail intitulé Bagdad-sur-Seine, guetteur vigilant à l’affût du détail qui cerne l’indicible, Boudinet s’était attaché à voir autrement la banalité des rues de Paris et de ses façades – ville imaginaire, théâtre vide où se déchaînent les sortilèges de l’Orient. À mesure que se poursuivait l’œuvre, le style s’épurait. Dans Portrait pour un cinématographe (1983), l’artiste s’essaie à la représentation de comédiens, vedettes, metteurs en scène ; Peter Brook, Maurice Pialat, André Téchiné, Dalio, Dirk Bogarde, Joseph Losey, Éric Rohmer, Wim Wenders […]

E x p o s i t i o n U n C a n a l , d e s C a n a u x , C o n c i e r g e r i e , Pa r i s, 1 9 8 8 . P h o t o g r a p h i e d e D a n i e l B o u d i n e t

Sous l’impulsion de Philippe Duboÿ, architecte et historien, Daniel Boudinet est commandité par le Centre des Monuments nationaux (ex CNMHS) pour être le photographe de la mise en scéne de l’exposition. La silhouette qui figure sur la prise de vue est Zette Cazalas qui est venue ce jour là converser avec Daniel sur les angles possibles.

29


30

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Kaoliniquement vôtre

Kaoliniquement vôtre ! La cartographie de la vitrine CONQUE du musée national de la porcelaine Adrien Dubouché à Limoges

Kaoliniquement vôtre

CHRONIQUES ZEN+DCO

31


32

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Hypnotique visite A la visite de la manufacture Royal Limoges (ex GDA, ex manufacture royale créée par Colbert), de nouveaux mots apparaissent de nouveaux contours aussi, des contrastes, des atmosphéres humides et douces. Voyage quasi initiatique dans l’univers de la fabrication de nos objets si familiers de porcelaine durant lequel va s’imprimer un chant polyphonique de l’industrie et de l’artiste, de la sensualité et des machines qu’il faudra faire écouter au visiteur.

Kaoliniquement vôtre

Voir une coulée de L’importance du porcelaine. moule. Au milieu de l’usine une laitance diaphane, humide, ténue, glisse comme un train sur ces rails. Immédiat renvoi à l’écoulement (des flux, des idées, des objets, des regards), au temps (du parcours, de l’élaboration du projet) à l’obsession de la transformation . Comme si nous n’allions pas d’objets en objets par saccades mais qu’un fil continu devait nous tenir en haleine, dans un long mouvement ininterrompu.

L’invention d’une nouvelle forme de vitrine, ce matin-là d’hiver, germera tranquillement pour n’éclore que quelques années plus tard dans l’évocation de corps des femmes dansants. Car sous la grande hauteur de la verrière intérieure des salles, la porcelaine faite à limoges faut bien une salle de bal! Des empreintes aux moules, une itinérance pour donner la sensation d’une mobilité (et virtuosité) dans l’espace.

Kaoliniquement vôtre

Devant le doreur à sa table... Comment faire dans un musée pour ne pas effacer mais retrouver les mains ?

C A R T O G R A P H I E D E L A V I T R I N E - C O N Q U E D U M U S é e A drien D ubouch é : I mmersion dans l ’ univers de la porcelaine gr â ce à une V I S I T E de la manu facture R oyal L imoges

1 - Salle de séchage des porcelaines / 2 - Coulée ou laitance extraite du malaxage de la pate à porcelaine / 3 - Démoulage des pièces / 4 - établi de doreur Cinq vues sur les salles réservées au Limoges dont celle du Grand buire, manufacture Jouhanneaud et Dubois 1855, et vitrine Conque en arrière plan Page droite _ développé coque extérieure Vitrine Conque , continuation du calepinage parquet .

CHRONIQUES ZEN+DCO

33


34

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Kaoliniquement vôtre

Kaoliniquement vôtre

CHRONIQUES ZEN+DCO

V I T R I N E - C O N Q U E D U M U S é e A drien D ubouch é P O U R L E S S A L L E S P O R C E L A I N E D E L I M O G E S

Chantier de mise en place d’une vitrine Conque dans la salle consacrée à l’histoire de la porcelaine issue des manufactures de Limoges Page gauche_ Vitrine vue de face avec les portes en verre plié fermées pendant le chantier d’installation.

35


36

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Kaoliniquement vôtre

Kaoliniquement vôtre

CHRONIQUES ZEN+DCO

V I T R I N E - C O N Q U E D U M U S é e A drien D ubouch é P O U R L E S S A L L E S P O R C E L A I N E D E L I M O G E S

Vue d’ensemble de la salle consacrée à l’histoire de la porcelaine issue des manufactures de Limoges Page gauche_ Intégration des piéces de collection en cours de montage Architecte projet Boris Podrecca

37


38

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

Vue d’ensemble des trois partie

méthodologie

méthodologie

CHRONIQUES ZEN+DCO

Muséo-densité

M ettre en place des outils qui j usti f ient par la raison ce que dicte

l ’ intuition

La muséographie, élaboration de la forme du musée, et par extension celui de l’exposition permanente, ne fait pas l’objet d’un travail scientifique comme le discours muséologique, qui fonde le programme appuyé sur des objets et des idées ou recherches. Elle n’a pas de modèle défini car ainsi qu’a pu l’écrire Stanislas Adotevi « le musée en soi ne veut rien dire. Ce n’est qu’une action à accomplir… ». Hors modèle (du moins pour les espaces d’interprétation contemporains), et dans la colision de deux forces plus ou moins contradictoires, celle architecturale et graphique qui suit un processus d’élaboration selon un schéma linéaire et celle du discours qui est plutôt soumis à schéma concentrique, l’élaboration muséographique doit coopérer avec les différentes sphères principales, le programme scientifique global, le programme muséologique réparti en éléments, le programme de médiation (contenu scientifi que et didactique) de chaque élément, le programme de maintenance et de conservation, le programme d’ergonomie de visite. De cette dualité indissociable ressort une transformation cyclique qui aboutit à une mutation de chacune des deux forces. Inclinés vers la non-production d’un « lieu de concentration magique », nous avons mis en place une sémiologie graphique tridimensionnelle, afin que ce flux itératif de transformation soit orienté par des arguments rationnels dont l’impact spatial afférent au programme et à son corollaire, l’espace dédié au public, est le principal thème.

une A ssurance , vie !

Et pour faire évoluer les nouvelles formes car soumises à d’incessantes transformations, la représentation graphique tridimensionnelle ou outil de muséo-densité procure une spatialisation visuelle du programme scientifique et donc trouve un lieu aux formes et aux discours, permet de schématiser et simplifier sans réduire le contenu scientifique, intégre les différentes composantes de médiation, et croisé avec une nomenclature adaptée sert de base de données pour l’ensemble des moyens de médiation. Cette méthode d’approche du contenu, testée sur les des aménagement de la Galerie permanente du musée de l’Homme s’est montrée trés opérationnelle pour la faisabilité et le suivi du projet.

MUSEO DENSITE, extrait du MAGAZINE /11 FEUILLETS édité à l’occasion de l’exposition inaugurale du muée de l’Homme avec le soutien des entreprises des aménagements muséographiques . Permasteelisa Interiors, Cofely Axima, Mercier Val de Loire, SDEL, La Serrurerie de la Parette, Videlio, Boscher. Illustration réalisée à partir des plans du projet

39


40

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

portes d’ivoire et de corne

portes d’ivoire et de corne

CHRONIQUES ZEN+DCO

MuCEM Fort Saint Jean Le temps des loisirs TEXTE

ZEEV GOURARIER

/

ZETTE CAZALAS

Il était une fois un Fort, très vieux, antique… Il se souvenait des débuts de cette ville, cette ville antique, la plus vieille de France. Il a vu arriver les trirèmes. Il se souvenait du chant des rameurs, saouls du vin de Falerne, affamés de plaisirs, de combats. « Mes plus beaux souvenirs sont d’une autre planète où les bouchers vendaient de l’homme à la criée » ( Léo Ferré ) Il se souvient d’une autre année qui était l’aube d’un jour de gloire, l’arrivée du Consul, en sa galère chargée des Pourpres du Liban. Mais le temps passe et repart. Voilà qu’arrivent les pèlerins portant la bonne parole depuis le Levant. Ils construisent des églises, St Victor, la Majore. Et arrive l’Ordre de Malte qui construit la grande église du Fort St Jean. Pendant des siècles et encore aujourd’hui le Fort résonne de leurs prières, du son des cloches appelant à Laudes, à none et à Vêpres. Et le temps passe encore. Voilà que maintenant les soldats habitent le Fort. Ils construisent des tours, des mâchicoulis. Ils creusent dans la montagne une grande allée de pierres pour monter leurs canons. Et le temps passe. Et les gens de la ville ne voient plus que murs de pierre derrière lesquels s’étiole le passé militaire. Le Fort Saint Jean s’est endormi. Aujourd’hui il rêve. Il rêve des fêtes d’antan, des fêtes de toujours. « Le rêve est une seconde vie. Je n’ai pu percer sans frémir ces portes d’ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible.» ( Gérard de Nerval ) Un peuple de fantoches, de saltimbanques et de santons, se révèle à la lumière des féeries. Au fond les « curioseadas » épousent un continent inconnu. Accourez ! N’hésitez pas, poussez les portes du Fort Saint Jean ! Le grand battant de bronze de la Chapelle, les petites portes en bois de la Galerie des Officiers, celle de la maquette du magicien Berger. Et demain après le rêve, il y aura autre chose.

Haut gauche _ Vue du Fort Saint Jean depuis la mer Haut droite _ Vue sur un volet de la salle du Cirque depuis la place d’armes Centre _ Vue intérieure du couloir des Illusions dans la Galerie basse des Officiers L ’ I N V E N T I O N D E S L O I S I R S Droite _ Vue extérieure de la Galerie basse des Officiers sur la coque miroir de la salle R O B E R T E U G è N E - H O U D I N

41


42

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

portes d’ivoire et de corne

L E T E M P S D E S L O I S I R S, M u C E M F O R T S A I N T- J E A N

Photo prise pendant la performance du Théatre du Centaure, Centaure Camille et son frison face à l’évocation sculptée de l’écuyère Sabine Rancy, Juin 2013 Vue intérieure de la vitrine des Saltimbanques dans l’une des salles voutées du batiment de la Place d’Armes

portes d’ivoire et de corne

CHRONIQUES ZEN+DCO

L E T E M P S D E S L O I S I R S, M u C E M F O R T S A I N T- J E A N Vue intérieure de la vitrine I N V E N T I O N D U C I R Q U E dans la Galerie basse des Officiers composée de sculptures retraçant

les débuts du cirque ; le cheval ailé du théâtre royal équestre d’Astley, un éléphant et sa chabraque, les pirouettes du clown Auriol

43


44

portes d’ivoire et de corne

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

portes d’ivoire et de corne

CHRONIQUES ZEN+DCO

P Poussin

ulcino, Polsinelli, Policinella, Pollicinielo, Pullucenala...

“Ossacoscia e pella pella, “Oscuisse et peau peau Comme ça est Polichinelle… Et je viens d’Avellino, Et voici pour vous ce petit concert. Maestro musique !... “

ó vì iloco a Pulicenella... E ne vengo da Avellino, E a vuie stu cuncertino.

Maestro musica!...” da La canzone di Zeza*

La chanson de Zeza, histoire d’un mariage controversé avec une fin heureuse, est un opéra bouffe populaire chanté et improvisé pendant le Carnaval dans les rues et places de Naples entre 1500-1600.

“Pubbreco rispettabile

“Honorable Public le rideau est tombé sans faire plus de palabres je me présente à vous ; et si ces oreilles entendent un beau et gratifiant son, (applaudissements du public) Amis, nous aurons gagné : Ainsi vient le pardon ! “

fernuto avimmo nuje Senza fa tante chiacchere i’ mi presento a vvuje ; e ssì sti rrecchie sentono nu bello e grato suono : (applausi del pubblico) Amici, avimmo vinto :

E chiuso lu perduono! “ Amiello Balzano**

** Aniello Balzano : acteur napolitain XIX siècle

L E T E M P S D E S L O I S I R S, M u C E M F O R T S A I N T- J E A N E x traits choisis et traduction

C laudia C astelletto

Vue de la vitrine de Polichinelle, salle des marionnettes dans le bâtiment jouxtant l’allée du Cavalier de la Rade

45


46

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

portes d’ivoire et de corne

L’universal circus Pir’ouette

L E T E M P S D E S L O I S I R S, M u C E M F O R T S A I N T- J E A N

Haut (x3)_ Photos prises pendant le montage de l’ UNIVERSAL CIRCUS PIR’OUETTE Bas_Vue de détail de l’ UNIVERSAL CIRCUS PIR’OUETTE : la parade des saltimbanques Page droite_ Vue intérieure de la vitrine des Saltimbanques dans l’une des salles voutées du batiment de la Place d’Armes, détail sur une sculpture réalisée Pages suivantes_ Vue de l’installation de la collection du théatre des marionnettes à fil et photo détail sur Pierrot inanimé

portes d’ivoire et de corne

CHRONIQUES ZEN+DCO

47


48

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

portes d’ivoire et de corne

portes d’ivoire et de corne

“ Ils ont fabriqué un théâtre de marionnettes qui est vraiment quelque chose d’étonnant. Décors, changements à vue, perspectives, palais, forêts, clair de lune et coucher de soleil transparents, c’est réellement très joli et plein d’effets très heureux. Ils ont une vingtaine de personnages, et à eux deux ils font parler et gesticuler tout ce monde de guignols de la façon la plus divertissante. ” George Sand à Augustine de Bertholdi, décembre 1848,

ARISTOPHANE Mais où donc me conduis-tu, Mercure ? MERCURE Dans l’avenir, mon cher Aristophane ! ARISTOPHANE Les dieux le connaissent et le révèlent quelquefois; mais... MERCURE Mais, au lieu d un oracle embrouillé je t’accorde la vision des choses futures, et t’y voilà transporté, comme tu le serais si, du passé, je te jetais dans le présent. ARISTOPHANE C’est fort aimable à toi, Mercure; mais où sommes-nous ici ? Dieux immortels ! quel changement dans Athènes ! MERCURE Nous ne sommes point chez les Athéniens ; nous sommes chez un peuple qui passe pour l’héritier de leur gaieté. ARISTOPHANE Oh ! alors, je vais bien les faire rire, ces nouveaux Athéniens ! MERCURE Détrompe-toi, ils t’ont dépassé de beaucoup, et ne te demanderont que ta sagesse, qui est de tous les temps. ARISTOPHANE En quel temps sommes-nous donc, selon toi ? MERCURE A plus de vingt-deux siècles du jour où tu crois vivre. ARISTOPHANE Est-ce à dire que la postérité conserve la fraîcheur de ma gloire ? MERCURE Non pas sans restriction, mais autant que tu le mérites. ARISTOPHANE Et que venons-nous faire en ce lieu, qui a quelque ressemblance avec un théâtre ? MERCURE Tu vas assister à la représentation de quelques parties de ta dernière pièce. Plutus, extrait du prologue, Théâtre de Nohant, Georges Sand, 1864

CHRONIQUES ZEN+DCO

49


50

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

portes d’ivoire et de corne

portes d’ivoire et de corne

Curioseada « Le paysage, en lévitant, nos corps, naissant, se découvrent dans le lieu: oeuvre commune du voyant et du vigneron qui, depuis mille ans, ici, prépare le vu, paradis entre deux fleuves. »

Michel Serres

Depuis mille ans, prépare le vu…Une curioseada est une unité de présentation muséographique « fouineuse ». Elle est mobile, technologique, transformable, intégrée, réactive. Fiche technique : structure en acier autoportante, paroi de verre 11,40 m (h) x 7,5 m (L), trois niveaux de coursives accessibles desservies par un escalier en colimaçon intérieur, gril technique, centrale de traitement d’air

& 185 objets des collections du MuCEM choisis pour illustrer les différents âges de la vie ; les temps extraordinaires des fêtes initiatiques et des rites de passage.

L E T E M P S D E S L O I S I R S, M u C E M F O R T S A I N T- J E A N

Vue de la vitrine de la Chapelle consacrée aux temps extraordinaires et fêtes iniatiques ; baptême, circoncision, mariage, barmitsva, enterrement de vie de garcon, rentrée des classes, mort, fiancialles, remise de diplômes, communion...,illustrés par les objets de la collection du MuCEM et prêts du musée Benaki d’Athènes (lit nuptial et baptistère) et du musée du quai Branly (robe de mariée tunisienne).

CHRONIQUES ZEN+DCO

51


52

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

nouveau musee, nouvelle ville

nouveau musee, nouvelle ville

CHRONIQUES ZEN+DCO

Musée national d’Archéologie et des Sciences de la Terre

Il ne suffit pas d’un tas de maisons pour faire une ville Il faut des visages et des cerises Des hirondelles bleues et des danseuses frêles Un écran et des images qui racontent des histoires Il n’est de ruines qu’un ciel mâché par des nuages Une avenue et des aigles peints sur les arbres Des pierres et des statues qui traquent la lumière Et un cirque qui perd ses musiciens Des orfèvres retiennent le printemps dans des mains en cristal Sur le sol des empreintes d’un temps sans cruauté Une nappe et des syllabes déposées par le jus d’une grenade C’est le soleil qui s’ennuie et des hommes qui boivent Une ville est une énigme leurrée par les miroirs Des jardins de papier et des sources d’eau sans âme Seules les femmes romantiques le savent Elles s’habillent de lumière et de songe Métallique et hautaine, La ville secoue sa mémoire En tombe des livres et des sarcasmes, des rumeurs et des rires Et nous la traversons comme si nous étions éternels. UNE MÉDINE, UNE CANOPÉ, UNE RÉSONANCE AU SITE

VUE SUR LA PLACE

1

Tahar Ben Jelloun

La salle des bronzes, formant pavillon en porte à faux au dessus sur la salle «arts et archéologie islamiques» est un carré de 9m de côté. Les ouvertures en sol offrent des vues sur la suite historique du parcours sur les arts et sont utiliséés comme comme des piéces de collection.

Vue du projet du MNAST, architecte AWM Architecture Abdelouahed Mountassir, dans la vallée du Bouregreg à Rabat.

53


54

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

MATIERES

matieres

CHRONIQUES ZEN+DCO

Un lieu...Et s’impose un rythme, une onde vibratoire. La matière est alors utilisée comme une pulpe de la réalité.

Fo r e t d e C h i z é , i n t r o d u c t i o n à l a v i s i t e d u Z O O R A M A

Page gauche _ Haut _ Vue de détail du mur Forêt réalisé en lés de feutre sculptés : papillons et arbres Page gauche _ Milieu _ Vue sur la salle immersive sonore réalisé en vannerie Page gauche _ Bas (de gauche à droite) _ Vue de la forêt, vue sur la boutique du ZOO Page droite _ Vue de détail du mur Forêt réalisé en lés de feutre sculptés : bison et végétation

Musée des Confluences Niveau Exposition permanente Salle 22 Exposition E S P è C E S, L A M A I L L E D U V I VA N T Page précédente _ Vue sur la vitrine des Oiseaux repartis en clades Page gauche _ Vue sur le socle de la Famille Antilopes Page droite _ Vue sur l’installation des mammifères

55


56

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

MATIERES

MATIERES

AG E N C E D E M A N N E Q U I N, PA R I S

Page gauche _ Détail des luminaires le long de la cloison courbe Page droite _ Transformation d’un appartement haussmanien en agence de mannequin

CHRONIQUES ZEN+DCO

57


58

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

T h e a t r e d e M a r i o n n e t t e a u Fo r t S a i n t - J e a n / M u C E M

Vue intérieure en cours de montage

MATIERES

MATIERES

Ouvrage Str ucture des bustes de la collection anthropologique du musée de l’Homme

Maquette ech 1 / 10 Photo Véronique Mati

CHRONIQUES ZEN+DCO

59


60

NUMéRO 2017/1 SUBSTANCE MUSéOGRAPHIQUE

muséographe, muséographie,

muséographique, terme employé dès 1764 pour évoquer l’art d’exposer qui se décline ci-après ; / a r c h i t e c t u r a l ”ou construire le monde utopique où objets et visiteurs se rencontrent “(Jean Davallon) / s c é n o g r a p h i q u e , dérivé de l’art de la perspective appliqué à la scène théâtrale / g r a p h i q u e , construit et esthétise le texte et la parole / p l a s t i q u e d’un environnement issu de la narration / d i g i t a l et représentation virtuelle de l’acte de construire / u r b a i n ou la ville comme lieu idéal d’un acte événementiel, culturel, touristique, social.

zendco.blogspot.com twitter twitter.com/zendco site www.zendco.com contact zendco@gmail.com téléphone+33 (0)1 4277 2277 Zen+dCoOfficedesign blog

siret 408 511 301 00025 RCS PARIS 97B 1389


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.