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PARTIE 3. PARTICIPER À UNE DYNAMIQUE DE DEVELOPPEMENT DURABLE ET ÉCONOMIQUE DU TERRITOIRE

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INTRODUCTION

INTRODUCTION

La population de Mayotte avait son « identité architecturale », au travers de l’habitat traditionnel, mais elle s’en est défaite, pour adopter une construction en dur, au profit du tout béton, plus solide et plus sécurisant par rapport aux aléas du milieu tropical. Pourtant, les aménageurs territoriaux (SMIAM, SIM essentiellement) ont, eux, développés une solution intermédiaire qui permettait d’allier à la fois l’avantage de l’habitat écologique et celui de l’évolution socioéconomique inévitable des ménages, et plus largement, du territoire. Pour ce faire, ils ont eu recours à la brique de terre compressée (BTC) pour édifier nombre de bâtiments publics (écoles, administrations), mais également des logements sociaux et pavillonnaires privés, avant de s’essouffler. Actuellement, la dynamique lancée sur le territoire, notamment par le milieu associatif, incite à revenir à cette solution intermédiaire. Susceptible de redéfinir une nouvelle identité architecturale locale, elle apparaît, en effet, comme une conciliation entre le développement durable et l’essor économique de l’île. C’est dans cette démarche, qu’à titre personnel et professionnel, je m’inscris, malgré les difficultés qui pèsent dans l’acceptation de cette vision architecturale par la population locale.

1 – L’AMÉNAGEMENT TERRITORIAL EN HÉRITAGE : QUELLE VISION ET QUEL.S EMPLOI.S ?

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Depuis ma jeunesse, j’ai toujours baigné dans le milieu du bâtiment, en raison des responsabilités qui incombaient à mon défunt père43. Adolescent, je me revois partageant son bureau du SMIAM à Mamoudzou, durant les vacances scolaires. Cet endroit constituait pour moi un cadre serein et motivant pour dessiner, pour avoir la possibilité de toucher le monde de l'aménagement territorial, avec la construction d’établissements scolaires du 1er degré.

Cette image a constitué un leitmotiv, un repère, tout au long de mes études, une motivation. Aujourd'hui, je ressens la fierté de pouvoir être sur les traces, mêmes infimes, de la figure paternelle évoquée plus haut, sur les esquisses de ce qui a été une de ses grandes passions. Ladite passion, il a réussi à la transmettre ou à la faire naître et enraciner autour de lui, en faisant émerger au sein de notre famille, sur au moins deux générations (fils, filles, neveux, nièces, petit-fils, petite-fille), une vocation professionnelle, voire une passion pour certains d’entre eux, devenus: dessinateurs, entrepreneurs en bâtiments, apporteurs d'affaires, gestionnaires immobiliers ou rentiers, responsables urbanistiques dans l’administration.

Figure 7. Siège du SMIAM.

Figure 6.

Maisons SIM construites en BTC.

43 Je renvoie à la première partie de ce mémoire.

La transmission revêt une place essentielle dans la société traditionnelle mahoraise. Elle permet de conserver et perpétuer les traditions, les codes culturels et sociaux, les schémas de pensée, génération après génération. Dans le cas évoqué précédemment, la transmission de l’ambition paternelle fonctionne comme un héritage dont les descendants s’assurent de la survivance et de la continuité. Le propos du poète franco-chinois François CHENG dans son roman L'Eternité n'est pas de trop, paru en 200244, illustre bien le partage de ce message implicite qui lie les vivants aux disparus :

« Ce que les morts laissent aux vivants ; c'est certes un chagrin inconsolable, mais aussi un surcroît de devoir vivre, d'accomplir la part de vie dont les morts ont dû apparemment se séparer, mais qui reste intacte. »

En acceptant de reprendre le flambeau longtemps porté par la figure paternelle, j’ai, en effet, l’impression d’accomplir un devoir, celui de ne pas laisser mon territoire en l’état, d’autant qu’il y a peu d’architectes originaires de l’île, donc à même de vivre les problématiques locales de l’intérieur et d’y apporter des solutions véritablement adaptées.

J’ai également réalisé que l'architecture constituait à elle seule tout un monde, un monde à rêver, à penser, à coucher sur le papier et à faire sortir de la terre et pourquoi pas de celle de nos ancêtres où tout est à construire ou reconstruire. Mais avant cela, il faut un préalable : l’obtention de la HMONP. Cette dernière constitue effectivement l’aboutissement de la formation en architecture, impliquant et sanctionnant ainsi une maîtrise du domaine professionnel. Cela permet, d’une part, à l’architecte de produire tout en prenant la responsabilité de sa production, et d’autre part, d’être juridiquement assuré dans son métier puis protégé dans cette même production.

Par ailleurs, sachant qu’un CAUE a été créé le 13 janvier dernier et qu’y prendre part pourrait s’avérer professionnellement formateur (espace d’échanges privilégié), utile et déterminant pour l’évolution du métier d’architecte à Mayotte, la HMONP me donnerait en outre la possibilité de relever de l’ordre des architectes qui se mettra en place prochainement, si j’en remplis bien évidemment les conditions de nomination. Enfin, au-delà de ces aspects, se dessine également un triple enjeu socioéconomique et professionnel par rapport à l’obtention de cet examen.

Il s’agit :

- d’assoir une crédibilité professionnelle, notamment auprès des partenaires actuels et à venir, en tant que Directeur d’agence et Associé ;

- d’appuyer ma vision du territoire en tant qu’architecte mahorais, à partir de la connaissance que j’ai de ce territoire et dans le but de répondre encore plus efficacement aux attentes des maîtres d’ouvrage locaux ;

- de développer, de manière plus autonome, une partie de l’agence vers la construction de maisons individuelles et les conseils (la demande est d’ailleurs là, aussi bien pour la population, que pour les collectivités publiques).

2 – OUVRIR L’AGENCE À LA POPULATION: VERS PLUS D’AUTONOMIE DANS LA PENSÉE ET LA CONCEPTION ARCHITECTURALES

Au regard des intérêts moraux que je possède désormais au sein de l’agence, j’envisage de poursuivre avec celle-ci. Cela me permettra de continuer à avoir des partenaires de qualité, de conforter mon expérience ainsi que mes compétences professionnelles et de travailler, toujours en collégialité, voire en complémentarité, sur des projets d’envergure, difficiles à obtenir en exerçant en tant que libéral.

Pour des raisons pragmatiques et stratégiques, le siège de l’agence restera pour l’heure à Mamoudzou. On notera ainsi, s’agissant du choix de cette ville :

- la facilité d’accès pour accueillir les autres associés lors de leurs séjours d’affaires sur le territoire, la proximité des partenaires et de toutes commodités ;

- la proximité de nombre de maîtres d’ouvrage dans le chef-lieu, ce qui facilite la collaboration avec ces derniers ;

- la centralisation actuelle de l’économie du territoire à cet endroit ;

- la possibilité de partager les locaux en open space et en coworking avec d’autres entreprises, ce qui permettrait de réduire le coût du loyer et

des charges, et de se constituer une clientèle commune (tissage d’un réseau professionnel croisé).

Toutefois, il conviendrait de développer un volet supplémentaire au sein de l’agence, de s’appuyer sur le potentiel de celle-ci, en l’orientant vers une clientèle privée et en y instituant une compétence sociale. L’idée serait d’accompagner les usagers sur la partie administrative de leurs projets personnels (informations et réalisation de la phase « Etudes»), jusqu’au financement de ces derniers, dans un objectif de co-construction. Il s’agirait alors de proposer la conduite d’une mission partielle de maître d’œuvre, de préférence en partenariat avec les mairies, qui manquent généralement d’architectes conseils ou de ressources suffisamment compétentes en leur sein, pour être à même de renseigner les administrés sur leurs projets de construction (concernant les demandes de permis notamment).

La mise en place de ce projet nécessitera au moins trois choses :

- un réaménagement physique de l’intérieur des locaux de l’agence à Mayotte, de manière à pouvoir accueillir les nouveaux clients dans de bonnes conditions ;

- un aménagement des plannings des architectes de l’agence (accueil des clients à prévoir par exemple une fois toutes les 2 semaines, à jour fixe);

- une étude approfondie des besoins locaux, une analyse des avantages et inconvénients à accueillir des projets et une clientèle nouveaux.

Accompagner la population dans ses projets signifie, par ailleurs, la possibilité de conseiller l’utilisation de matériaux endogènes, écologiques, tels que la BTC, pour lesquels il existe des financements locaux méconnus45 , à hauteur de 2,40 € le m2. Pour œuvrer en ce sens, je suis devenu adhérent de l’association Art.Terre Mayotte, dès mon arrivée dans l’île, en 2018.

3 – L’ASSOCIATION « ART.TERRE MAYOTTE » OU LA PROMOTION D’UNE ARCHITECTURE DURABLE

Depuis sa création en fin 200746, l’association Art. Terre Mayotte joue un rôle majeur dans la réflexion sur l’architecture à Mayotte, conformément à son objet : soutien, promotion de la filière terre crue; réflexion et actions en faveur de la promotion des ressources et des techniques de terre dans la construction à Mayotte ; et mise en place de normes de fabrication destinées à l’obtention de la certification de la BTC, faisant ainsi suite aux travaux entamés en 1998 par le 1er aménageur du territoire, la Société Immobilière de Mayotte (SIM). Art.Terre regroupe des maitres d’ouvrage, des architectes, des artisans, des ingénieurs, soit une trentaine de personnes. Les plus présentes sont Vincent LIETAR, Dominique TESSIER, Fayaduddine MAANDUI, Mustoihi MARI, Nathalie DE LORIOL etc.

Figure 8. Réalisation de maquettes avec les élèves de l'école primaire de Barakani.

46 La déclaration officielle de l’association été effectuée le 11 juillet 2008.

En tant que membre actif bénévole et siégeant au CA de l’association, j’ai pris part à des actions internes47, en intervenant lors d’une 1ère action en 2018 : celle-ci consistait à aller à la rencontre de jeunes de CM1-CM2 à l’école primaire de Barakani, dans la Commune de Ouangani. Le but était de sensibiliser le public scolaire à son environnement immédiat et de lui faire connaître l’architecture48 .

J’ai, par ailleurs, organisé et participé essentiellement, avec les co-adhérents, aux réunions permettant de répondre à un appel à programmes CEE 2017, intitulé « Programme OMBREE49. » Selon la Convention de mise en œuvre de ce dernier, signée entre l’Etat et l’ADEME, cela vise à :

« réduire les consommations d’énergie dans les bâtiments résidentiels et tertiaires par des actions de sensibilisation, d’information et de formation sur les territoires de Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion et Mayotte50.»

Les actions d’Art.Terre s’inscrivent donc pleinement dans la stratégie portée par l’Etat en matière écologique, stratégie que l’on retrouve dans le Grenelle de l’Environnement pour les DOM, le Livre Bleu qui fait la synthèse des travaux des Assises des Outre-mer et la Loi transition énergétique pour une croissance verte.

Elles se justifient d’autant plus dans le domaine de la construction et de l’habitat quand on sait aujourd’hui que « le plus gros poste de consommation électrique51 » réside dans les logements en Outre-mer. Le programme « OMBREE » rappelle que cette consommation s’élève à « environ 50%52. »

47 L’association organise également des événementiels tels que des expositions (à l’instar de celle intitulée : « Construire en terre mahoraise », présentée en 2010), ainsi que la parution d’ouvrages destinés à faire connaître davantage le matériau brique et à sensibiliser les aménageurs et la population quant à son intérêt. 48 Les images illustrant une partie des actions préalablement mentionnées se trouvent en annexe 4. 49 OMBREE est l’acronyme de : Programme inter-outremer pour des Bâtiments Résilients et Economes en Energie. Créé par l’arrêté du 3 janvier 2020 portant validation de 10 programmes dans le cadre du dispositif des certificats d’économies d’énergie, il est piloté par l’Agence Qualité Construction (AQC) et financé par Électricité de France Systèmes Énergétiques Insulaires (EDF SEI). 50 Convention de mise en œuvre du programme OMBREE, signée le 12 juin 2020 à Paris, p.2. 51 Programme OMBREE, p.4. 52 Ibid. L’objectif des pouvoirs publics, serait de parvenir à une « autonomie énergétique avec 100 % d’énergies renouvelables», d’ici 2030.53 Et dans cette stratégie, les territoires ultramarins sont considérés comme des « pionniers. » En clair, le programme « OMBREE » propose la définition, puis l’adoption d’un nouveau modèle économique et écologique qui repose sur la valorisation d’un matériau recyclable (la terre), en vue du développement durable. Dans le même temps, il s’agit pour Art.Terre de créer et développer une identité architecturale mahoraise à travers la question de ce matériau, dont la certification, obtenue en 2017, constitue une avancée significative, au même titre que la création d’une coopérative de briquetiers par l’EPFAM.

Pour répondre à l’appel à programmes « OMBREE», l’association Art.Terre a constitué un groupe projet composé de techniciens, d’architectes et d’un Bureau d’études. Le projet, intitulé « Terre d’outre-mer améliorée » (TOMA), est en cours d’élaboration. Il se fait en partenariat avec une agence d’architectes extérieure (Terreneuve), un établissement public (CEREMA), un bureau d'étude (Biobuild), un entrepreneur qui se prépare à lancer une filière « briques » en Guyane (projet d'échelle industrielle), l’idée étant de valoriser les produits biosourcés locaux.

La filière mahoraise est en train d’être relancée mais le combat est encore loin d’être gagné. Diverses raisons expliquent ma prudence sur ce sujet :

- il demeure un décalage entre le discours idéologique sur la relance de la filière BTC et l’implication véritable des acteurs du bâtiment, au sein même de l’association : on voit ici les limites du bénévolat. Et malgré la présence régulière de stagiaires, il y aurait donc nécessité à créer des postes permanents dans cette structure pour compenser l’indisponibilité des professionnels bénévoles ;

- la SIM, jadis promotrice et utilisatrice de la BTC jusqu’à la fin des années 90, se livre à la démolition progressive de son parc immobilier. Or, ce dernier est constitué majoritairement de briques. L’objectif de la SIM est d’ériger des bâtiments d’une plus grande capacité d’accueil, de satisfaire les besoins en logement de la population mais aussi de privilégier désormais les constructions en béton ;

53 Ibid.

- la brique est devenue un matériau plus onéreux (1,45 € la pièce) que les autres matériaux. Cependant, des aides ont été mises en place par EDM pour compenser ce coût élevé : les constructions en BTC font donc l’objet d’un soutien financier, comme souligné plus haut, mais les MOA et les ménages hésitent encore à y recourir, soit par méconnaissance de l’information relative à l’aide susceptible d’être accordée, soit par désintérêt du matériau ;

- la diminution du nombre d’artisans locaux à Mayotte (on en compte 4-5 contre 17-19 dans les années 80-90) : il y a donc nécessité à en former de nouveaux. En cela, la coopérative de l’EPFAM peut aider. De même, l’édification prochaine du lycée des métiers du bâtiment à Longoni devrait pouvoir remédier à cette carence en briquetiers. En parallèle, il conviendrait d’augmenter le nombre de briquèteries, dans le but de croître la production ultérieure de briques, ce qui contribuera à relancer l’économie locale. Mais cela nécessite des investisseurs. D’ores et déjà, les majors du territoire (Colas, IBS…) se préparent économiquement pour l’industrialisation prochaine de la filière, en acquérant notamment du matériel essentiel à une fabrique de briques. C’est donc bien une filière d’avenir qui est en train de se structurer et qui nécessite des moyens.

4 – PERSPECTIVES ÉCONOMIQUES À MAYOTTE ET DANS LA RÉGION : UNE OPPORTUNITÉ POUR LES ARCHITECTES

Avec le recrutement, à l’agence de Mayotte, d’un directeur des travaux qui viendra en appui aux 2 architectes DE présents et qui effectuera un suivi des projets attribués dans le cadre de marchés publics, L’ATELIER se prépare à s’inscrire dans les échéances économiques en cours de constitution. Il s’agira de répondre à des appels d’offre de plus en plus importants financièrement, dont les projets auront un impact fort sur le développement urbain du territoire, et de nouer des partenariats nouveaux, en particulier sur le marché du travail africain, dans le but de répondre à des appels d’offre internationaux. L'ATELIER a d'ailleurs recruté une volontaire internationale en entreprise (VIE), Céline POIX, installée à l'agence de Maurice, pour pousuivre sa prospection à l'international. L’agence possède, en effet, tous les atouts pour voir sa candidature retenue lors d’un certain nombre de marchés à venir avec :

- sa spécialisation en architecture bioclimatique - sa méthodologie de co-conception des projets - son équipe de multi professionnels en architecture et ingénierie technique, toujours en cours de renforcement - sa crédibilité montante - sa connaissance accrue du terrain local et son projet de partir prospecter le potentiel économique de la région du Mozambique.

S’agissant du cadre d’intervention et des opportunités économiques qui se profilent, il faut noter que depuis 2015, le Département de Mayotte est devenu un facilitateur dans l’essor des entreprises territoriales. Ainsi, il a orienté sa politique économique en mettant en place des dispositifs d’aides et d’accompagnement en direction des entreprises :

- d’abord, par la mise en place d’un nouvel « écosystème 54» à Mamoudzou, qui, je le rappelle, est la ville d’implantation de l’agence.

Cet écosystème vise la confortation des porteurs de projets et chefs d’entreprises locaux (Chambres consulaires, Boutique de Gestion des Entreprises, Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire, et acteurs d’accompagnement des entreprises). De même, des infrastructures, telles que la Technopôle de Mayotte55, la Maison du Port, le Complexe multi lab ou encore la Maison des clusters, sont prévues pour stimuler la croissance des entreprises qui ont répondu/vont répondre aux marchés en cours ou à venir, ainsi que l’innovation et la Recherche et le Développement. L’objectif consiste à faire monter ces entreprises en compétitivité et leur faire acquérir de la valeur ajoutée ;

- ensuite, par tout un rééquilibrage économique territorial qui est envisagé en lien avec les communes et les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), et en vue de la création prochaine de zones d’activités économiques (ZAE), au Nord (à Dzoumogné, village de la commune de Bandraboua), au Centre (à Combani, village de la commune de Tsingoni) et au Sud (à Chirongui).

54 Il s’agit de la Maison de l’entreprise, située à Mamoudzou. 55 Le bâtiment de la Technopôle est déjà en cours de réalisation.

Cette programmation d’infrastructures coïncidera avec la deuxième programmation des fonds européens régionaux FEDER-FSE et INTERREG, mais aussi avec la dernière année de mise en œuvre du Contrat de convergence et de transformation, dont l’achèvement est prévu en 202256 .

Parallèlement à l’installation d’une politique économique ciblée, le Département institue également une politique de coopération régionale où il s’agit d’inscrire le territoire dans une dynamique d’intégration régionale, tant dans la zone indianocéanique que dans la région du Canal de Mozambique (et même plus largement en Afrique de l’Est).

Pour parvenir à cette intégration, il encourage les entreprises locales à innover et investir de nouveaux marchés dans les zones indiquées, en les accompagnant et en leur offrant des moyens en vue de leur implantation régionale ou de l’instauration d’échanges partenariaux entre les acteurs des territoires concernés.

C’est le sens de la création de l’Agence de Développement et d’Innovation de Mayotte (ADIM) et de la Plateforme d’Initiative Mayotte (PIM)57, deux dispositifs au service des entreprises locales (en particulier des TPE et des PME), dont les missions sont de dynamiser et consolider l’offre de services existante en faveur de l’entrepreneuriat. Les conditions économiques locales qui permettront aux entreprises territoriales de prendre leur essor sont donc créées et se poursuivront probablement, au moins dans les 10 ans à venir, voire plus.

À cette intégration régionale s’ajoutent les perspectives de développement qui seront générées par la dynamisation de la région du Mozambique : en effet, avec la réalisation du projet gazier58 par l’entreprise française Total et le géant pétrolier américain Exxon et/ou ENI, les acteurs économiques mahorais envisagent de potentielles retombées sur le territoire.

56 Au vu des enjeux socioéconomiques et culturels du territoire et du retard pris dans la concrétisation des projets déroulés dans ce Contrat, il y aura nécessairement reconduite de celui-ci, même de manière partielle. 57 L’ADIM a été mise en place 2017 et constitue une émanation juridique du Département. Quant à la PIM, créée en 2016, elle relève du réseau Initiative France. 58 L’opérationnalité du projet est prévue à l’horizon 2024 et le projet en lui-même est chiffré à 25 Mds de dollars. Dans ce scénario, Mayotte, en raison de sa proximité géographique avec les côtes mozambicaines, pourrait servir de base arrière pour les pétroliers dont les occupants seront à loger, aux côtés du Kenya et de la Tanzanie. L’immobilier sera alors un secteur en pleine expansion et Mayotte devra être en capacité de présenter une offre de services viable et opérationnelle, en particulier dans ce secteur.

Selon l'Etude sur l'hébergement marchand mahorais (phase 1)59, il faudrait une offre en hébergement de 60 à 80 chambres par semaine au commencement de l'année 2022 pour pouvoir accueillir le personnel de l'exploitation offshore, sachant que cette offre demeure insuffisante car elle ne tient pas compte encore de l'accueil des sous-traitants. Pour l’heure, il n’est pas encore possible d’évaluer financièrement cette offre, L’ATELIER étant tributaire des marchés que les maîtres d’ouvrage et les porteurs de projets individuels présenteront. Cela étant, l’agence possède probablement une trésorerie et une rentabilité suffisantes pour répondre à ces marchés.

La dynamique économique du territoire mahorais est donc bel et bien lancée, tant par les pouvoirs publics que par les milieux associatifs et entrepreunariaux, les uns intervenant sur la mise en place des conditions réglementaires et les moyens financiers permettant de la porter, les autres étant motrices dans la réflexion locale et régionale sur la filière BTC, ce qui participe d’une démarche de construction identitaire.

Figure 9.

Photographie du programme de logements sociaux, Trévani Mix, de la SIM, réalisé en BTC.

59 Il s'agit ici de l'Etude sur l'hébergement marchand mahorais (phase 1), mandatée par l'ADIM.

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