ZAP #7 | Strasbourg vu par les étudiants de l’ENSAS

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Zone d’architecture possible Numéro — 07 Gratuit / 09.2023

hors-série

Strasbourg vu par les étudiants de l’ENSAS

École nationale supérieure d’architecture de Strasbourg


Directeur de la publication Philippe Cieren Coordination de projet Frédérique Jeanroy Remerciements à Valérie Eugène et Margot Thuilleaux

Une publication réalisée par chicmedias Rédaction en chef Sylvia Dubost Direction artistique et mise en page Mickaël Dard Textes Sylvia Dubost Illustration couverture Marie Lallemand

Ce magazine est édité par l’École nationale supérieure d’architecture de Strasbourg 6-8, boulevard du président Wilson BP1003 67068 Strasbourg cedex www.strasbourg.archi.fr Tirage : 4000 ex Dépôt légal : septembre 2023 ISSN : 2646-8336 Impression : Ott imprimeurs Diffusion : Novéa

hors-série

Strasbourg vu par les étudiants de l’ENSAS 04 20 ans d’urbanisme à Strasbourg Pour mieux appréhender les projets des étudiants, petit retour sur les évolutions récentes de la ville de Strasbourg, au fil des projets urbains, avec Éric Chenderowsky, directeur Urbanisme et territoires à la Ville et à l’Eurométropole de Strasbourg, et enseignant à l’Ensas. 08 Accompagner le mouvement de la ville. S’étendre vers l’est, rénover les grands ensembles, investir l’ouest la gare, réinventer l’A35 : Diane Chalumeau et Léhéna Lucquet, Mohammed Laïfa, Mylène Welsch, Benjamin Pra, Géraldine Bouchet, Bardia Maghsoodloo, Maxime Vaudron, Camille Dégremont. 21 De nouveaux modes de vie. Se rapprocher de l’eau, imaginer les équipements et les espaces publics comme lieux de rencontres et de partage, repenser les entrées de ville pour les mobilités douces : Aline Becker, Gabriel Herbert, Sofiya Nigmattulina, Nathan Hoh, Ivan Bitsch et Ingrid Junker, Jean Chevalier, Sébastien Dénéchaud. 34 Loger. Densifier le tissu existant, inventer des modes d’habiter partagés, dans des espaces plus végétalisés et pensés avec les habitants : Hélène Pinaud et Julien Schwartzmann, Myriam Tazi, Pauline Toenz et Anaïs Godefroy-Rieb, Astrid Brosse, Corentin Kayser, Bénédicte Rosenstiehl. 45 Produire. Rapprocher production et habitat, dans une logique vertueuse de circuits courts : Lorraine Motte, Sun Yuanduo, David Wetterwald, Alexandra Perrault. 52 Protéger et inclure. Concevoir des lieux d’accueil pour les plus fragiles, au cœur de la ville : Morgane Tirard, Magali Ndzossi, Manon Genevois, Ève Bigot-Renard. 60 Ranimer le patrimoine Offrir une nouvelle vie et de nouvelles silhouettes pour les bâtiments emblématiques : Chérine Ailas, Loïc Lacroix, Simon Oudiette.


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Un champ Cet opus hors-série de notre magazine s’inscrit dans le d’expérimentation prolongement du centenaire de l’école célébré l’an dernier. Par Philippe Cieren, directeur de l’École nationale supérieure d’architecture de Strasbourg

C’est l’histoire d’un ancrage régional qui se perpétue. Au travers de la dernière décennie et d’une trentaine de projet de fin d’étude soutenus à l’école, ce sont autant de visions actuelles d’architecte sur la métropole strasbourgeoise et ses environs, la façon d’y vivre, d’y habiter, de se déplacer. Ce foisonnement d’idées donne matière à réflexion et continue d’attester de l’ancrage territorial de l’école et de l’intérêt de poursuivre dans ce sens. Dans la mesure où les ENSA forment des acteurs de l’aménagement du cadre de vie, il est essentiel que leurs étudiants puissent être confrontés durant leurs études à la réalité de la matière qu’ils traiteront par la suite dans leurs différents métiers. À un moment clé de notre histoire où nos repères sont remis en cause, alors qu’il va falloir s’adapter et inventer de nouveaux rapports au territoire et à son usage, les architectes sont plus que jamais indispensables pour mettre en œuvre de nouveaux espaces où étudier les conditions dans lesquelles nous allons vivre. Pour cela l’environnement riche et varié de l’école constitue un véritable champ d’expérimentation Mais tout cela ne serait pas possible sans la disponibilité des services de la ville et l’encadrement des enseignants de l’école. Cette complicité à tous les niveaux est une grande richesse et les apports sont réciproques. Continuons de cette façon !


STRASBOURG VU PAR LES ÉTUDIANTS DE L’ENSAS

HISTOIRE DE L’URBANISME À STRASBOURG

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Pour mieux appréhender les projets des étudiants, petit retour sur les évolutions récentes de la ville de Strasbourg, au fil des projets urbains, avec Éric Chenderowsky, directeur Urbanisme et territoires à la Ville et à l’Eurométropole de Strasbourg, et enseignant intervenant à l’Ensas.

Hier, aujourd’hui, demain

Où en était-on du projet urbain quand vous êtes arrivé à la communauté urbaine de Strasbourg en 1999 ? On était 20 ans après la fin des trente Glorieuses et des grands ensembles. À Strasbourg, le projet urbain du centre-ville avait été marqué par la construction du Centre Commercial des Halles, la création du quartier de l’Esplanade, la patrimonialisation du centreville avec la création du secteur sauvegardé et le début de la piétonnisation. Cela nous mène à la révolution du tramway qui débute en 1989 avec l’élection de Catherine Trautmann [pour mémoire, la première ligne est inaugurée en novembre 1994, NDLR]. Le tramway devient alors la colonne vertébrale du projet urbain… Les études recommandaient un mode de transport qui structure l’urbanisation future.

L’une des questions que cela posait était le passage du centre-ville, et donc la place qu’y occupait la voiture. Catherine Trautmann a été élue sur le projet du tramway versus le VAL [métro léger de l’entreprise MATRA, NDLR] porté par Marcel Rudloff. Le VAL passait aussi sous la gare mais ressortait très loin, pour ne pas gêner la circulation. Or pour Catherine Trautmann, le tramway était un projet de société, où il était aussi question de santé, de préservation du patrimoine et donc de la place de la voiture. La construction de la première ligne s’est accompagnée de grands concours pour les places Kléber et de la gare, et d’une volonté d’équité sociale en rapprochant Hautepierre, Meinau et Illkirch du centre-ville. Les débats étaient houleux à l’époque, c’était l’affaire Dreyfuss ! Parallèlement, les quartiers, notamment Hautepierre et l’Elsau, ont été revalorisés et mieux intégrés. Il s’agissait de


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Article des Dernières Nouvelles d’Alsace du 21 décembre 1991 présentant le projet de Vittorio Gregotti pour la place de l’Étoile

1. Place de la Bourse 2. Centre administratif 3. Armement Seegmuller (Médiathèque André Malraux depuis 2008) 4. Projet reliant la place de la Bourse à Neudorf avec centre commercial, bureaux, équipements publics et logements.

donner la même qualité aux espaces publics, quel que soit le territoire. À partir des années 2000, la rénovation des grands ensembles devient le 2e pilier du projet urbain. Il y aura eu Neuhof, la Meinau, Cronenbourg, le quartier des Hirondelles et maintenant l’Elsau, le quartier des Écrivains à Schiltigheim, le quartier Libermann à Illkirch depuis 2020. Un autre quartier nous a beaucoup occupé depuis sommet de l’Otan en 2009 : celui du Port du Rhin. Il a été intégré dans le projet DeuxRives, et atteint aujourd’hui la masse critique qui lui permet d’avoir des équipements.

Deux-Rives à la fin des années 1990 –, les fronts de Neudorf et la place de l’Étoile de l’autre. Ce dernier sujet a enflammé la ville de 1991 à 1997, et on a mis dix ans pour trouver le projet. En 1991, on avait d’abord retenu celui de Vittorio Gregotti. C’était un urbanisme sur dalle, où le centre commercial était placé dans l’axe nord-sud et reliait la ville à Neudorf. Par la suite, il a été fragmenté mais le centre de la place était toujours occupé. En 1999, Roland Ries a remis le projet à plat. Le centre commercial s’est réduit, déplacé vers son site actuel, et se raccrochait mieux à l’axe Strasbourg-Kehl. On a opté pour un espace public au centre et des constructions sur les bords. Je me rappelle encore du débat sur la circulation place de l’Étoile, qui apparaissait comme un nœud inextricable. Il y a 30 ans, la circulation était LE grand sujet de débat

Quels étaient les autres sujets au début des années 1990 ? La place du Parlement européen et le grand projet urbain, c’est-à-dire l’axe StrasbourgKehl d’un côté – avec les premières implantations de l’UGC et du Jardin des


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Le site de l’écoquartier Danube en 2002, sur l’axe Strasbourg-Kehl. Au premier plan, le pont Churchill reliant le quartier de l’Esplanade à Neudorf, démoli entre 2005 et 2006. Photo : © airdiasol

public. Le temps a permis de trouver les solutions. Il faut dire que la part d’usage de la voiture a beaucoup baissé. Mais les sujets de mobilités restent très prégnants, notamment au moment de la construction de nouvelles lignes de tramway très structurantes.

20 ans. Ce qui émerge aussi, c’est la notion d’expérimentation. Sur l’axe Deux-Rives, avec des bâtiments à géothermie, à effacement énergétique, avec l’îlot bois au Port du Rhin, on est en train de fabriquer cette ville bascarbone.

Qu’en est-il aujourd’hui ? Aujourd’hui, le 3e pilier c’est la question du réchauffement climatique et de la ville respirable, en termes de pollution et de la place de la nature. Dans les années 90, le plan vert de l’Adeus a permis de construire une politique urbaine à partir du végétal, en articulant étroitement les projets urbains et d’espaces publics à une conception paysagère. Le Parc Naturel urbain et le plan Canopée, qui en 2020 végétalise les espaces publics, en sont des expressions. Aujourd’hui, on pense tous les projets en préservant le patrimoine végétal. En termes de fraîcheur, un arbre préservé vaut 50 arbres plantés, qui nécessitent aujourd’hui dix fois plus d’eau pour s’enraciner qu’il y a

Qu’en est-il du quartier européen, que vous mentionniez comme un enjeu important ? Il démarre son extension à partir de 1975, puis est rattrapé par le tramway et est désormais lié au quartier bancaire du Wacken grâce au projet Archipel. Une deuxième phase, Archipel 2, s’engage au nord, au sein de la ceinture verte, qui est l’une des caractéristiques de l’urbanité strasbourgeoise. Aujourd’hui, c’est un cul de sac, qui sera reconnecté à la ville par la trame verte et à Schiltigheim par deux nouvelles passerelles pour mobilités douces. On réfléchit aussi à des aménités urbaines, en faisant d’un côté appel à des promoteurs et de l’autre à des utilisateurs, comme des associations et tous


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La construction et l’extension du réseau de tramway s’accompagne d’aménagements et/ou de requalification d’espaces verts et publics, comme ici au niveau du carrefour Reuss au Neuhof, où le tramway arrive en 2007.

Le futur quartier Archipel 2 au Wacken, entre le théâtre du Maillon et la SIG Arena. Ici, vue depuis l’Île aux Sports Perspective : agence K&+

ceux qui ne trouvent jamais de place dans les projets immobiliers. Ce quartier trouvera progressivement sa forme dans la ville.

à en construire de long de la route du Rhin, où il n’y avait jusqu’alors que de grands équipements. Aujourd’hui, les questions de mobilité redeviennent centrales car la ville doit être respirable. Le vélo est à la peine, il a atteint ses limites, il y a beaucoup de zones de conflit et il faut passer à l’étape supérieure. Il y a toujours l’aménagement de la place de l’Étoile, le tramway avenue des Vosges, le trafic route du Rhin, le stationnement. On est dans une phase moins spectaculaire, et on sera peut-être amené à requestionner les projets qu’on a fait il y a 30 ans.

Comment la façon d’appréhender les projets a évolué ? Dans la période 1991-1999, il s’agissait de s’accrocher à la dynamique tramway, aux stations et aux tracés, pour concevoir les projets. À partir de 2001, Fabienne Keller et Robert Grossmann ont décidé de la poursuivre, et ce n’était alors plus un objet de débat gauche-droite. On s’est alors concentré sur la transformation des grands ensembles, avec la loi Borloo. On pouvait alors démolir et reconstruire, ce qui a permis de retrouver une vraie trame urbaine et nous a donné la possibilité de repenser les espaces publics. À partir de 2008, il fallait répondre au besoin de logements, car on avait peu construit depuis 2000. Il fallait 3000 logements par an, et il était hors de question de faire de grands ensembles. Le logement est devenu le carburant de l’urbanisme, et ça l’est encore. On a commencé

Quels seront selon vous les enjeux de demain ? Le sujet environnemental évidemment. Et aussi, quand on voit le coût du logement, on peut se demander qui va habiter en ville. Quelle place y occuperont demain les classes moyennes ?


ACCOMPAGNER LE MOUVEMENT DE LA VILLE

S’étendre vers l’est, rénover les grands ensembles, investir l’ouest de la gare, réinventer l’A35.

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STRASBOURG VU PAR LES ÉTUDIANTS DE L’ENSAS

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VERS L’EST

HABITER LE RHIN

2016

Des nouveaux quartiers verticaux au Port du Rhin

Cinq nouveaux quartiers à Strasbourg et Kehl

Diane Chalumeau & Léhéna Lucquet Laforgue Directeurs d’études : Dominique Coulon, Didier Laroche, Thomas Walter

Sachant que la population de la ville augmente chaque année de 1400 personnes, Diane Chalumeau & Léhéna Lucquet Laforgue ont imaginé un dispositif qui permettrait à Strasbourg d’accueillir 30.000 nouveaux habitants sur cinq sites. Chaque quartier est composé de modules qui s’imbriquent et culminent à 50m, pour artificialiser le moins de sol possible. Ces « méga-bâtiments urbains » de dimension extraordinaire créent de nouveaux repères dans la ville.

Bassin du commerce, derrière la capitainerie du port

Les logements s’installent dans les étages supérieurs, bénéficient tous d’une double orientation et des plus belles vues sur le port et la ville. Aux étages inférieurs, des commerces et un programme en cohérence avec le site où il s’implante : école fluviale franco-allemande, marché des productions rhénanes et auberge de jeunesse, centre de dépollution de l’eau, gare multimodale et hôtel (à Kehl), école de cinéma (Coop). Des parcelles agricoles sur les toits restituent la surface occupée au sol. Des navettes fluviales relient des quartiers entre eux et au centre-ville. Le port autonome est conservé dans son état actuel pour ne pas entraver son fonctionnement, et créer ainsi une meilleure cohabitation avec la ville.


STRASBOURG VU PAR LES ÉTUDIANTS DE L’ENSAS

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VERS L’EST

TRESSE TRANSFRONTALIÈRE

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Une continuité urbaine entre centre-ville, port du Rhin et Kehl

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1. Coop 2. La cité Loucheur 3. Écoquartiers 4. Nouveau centre urbain 5. « Agrafe urbaine » avec logements et bureaux aux extrémités, salle de sport, commerces, restaurants, musée, palais des congrès, ponts tramway et voitures superposés, passage couvert et places publiques… 6. Jardin des Deux-Rives

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Mohamed Chérif Laïfa Directrice d’études : Anne Jauréguiberry

Le projet de Mohammed Chérif Laïfa se déploie en trois séquences d’ouest en est. Des écoquartiers avec logements collectifs, sociaux et des équipements sont installés entre l’E52 et la rue du Rhin Napoléon, au niveau de la clinique Rhéna qui n’existait pas encore. Ils sont conçus autour de cours aménagées avec jardins, espaces de détente, noues pour la fraîcheur. Il s’agit de mettre en valeur les qualités architecturales du quartier du Port du Rhin, et de créer un lien avec le Jardin des Deux-

Rives et la forêt, prolongée jusqu’à s’infiltrer dans le centre. L’école est déplacée dans les éco-quartiers, un immeuble de bureaux donne une stature de centre-ville et répond à la tour de Kehl. Une « agrafe urbaine » futuriste et expérimentale relie Strasbourg et Kehl. La superposition des ponts voiture et tramway (alors en projet) crée un passage couvert comme à Paris et Bruxelles. Il intègre places minérales, végétales, squares et commerces, la gare de Kehl et des fonctions symboliques comme le siège de l’Euro-district. Cette agrafe se veut comme un lieu de rencontres entre France et Allemagne.


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Le magasin Vauban est conservé, seul le toit est supprimé. Les salles de spectacles sont installées dans la tour, l’administration du théâtre et l’école dans le bâtiment-pont blanc. Une surélévation accueille des logements.

NOUVEAUX LOCAUX POUR LE TNS 2015

Reconversion et extension du magasin Vauban Mylène Welsch Directeur d’études : François Frédéric Muller

Construit en 1936, commandé par la Seita comme stockage pour la Manufacture des Tabacs, l’imposant magasin (200m de long sur 30m de haut) comporte en réalité six bâtiments. Racheté par SFR en 2001 pour du stockage de données, il est situé dans un espace enclavé, en creux par rapport à l’avenue du Rhin et la rue du Havre. Mylène Welsch imagine ici de nouveaux locaux pour le TNS, qui regrouperaient les salles de spectacles (réparties aujourd’hui sur deux sites avec l’espace Grüber rue Jacques Kablé), l’école d’art dramatique et les ateliers de construction de décors délocalisés à Illkirch. Elle lui ajoute une salle de concert, de généreux espaces d’accueil du public ouverts sur l’extérieur, un restaurant, et

dans le reste du bâtiment un équipement sportif, des logements, des bureaux dont ceux de Croisieurope. D’une grande qualité architecturale, avec des poteaux champignons, un rythme de façade régulier et des murs en briques, le bâtiment d’origine est conservé à l’exception du toit, trop massif. La longue façade est percée par endroit pour faciliter le passage des piétons. Les salles de spectacle sont installées dans une surélévation de grande hauteur qui ferait écho aux futurs bâtiments du quartier Starlette, de l’autre côté de l’avenue du Rhin, et joue le rôle de signal. Pour rééquilibrer les volumes, les logements neufs sont eux aussi construits en surélévation sur le magasin, et un bâtiment-pont connecte la tour au nouveau parvis côté rue du Havre. Un socle avec une rampe permet l’accès des véhicules, depuis la rue vers le parking situé en sous-sol.


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VERS L’EST

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JARDIN BOTANIQUE ET CITOYEN 2016

Sensibilisation à l’écologie entre ville et forêt

Les serres sont soutenues par une forêt d’arbres en métal blanc

Benjamin Pra Directeur d’études : Pierre Vercey

« Le Jardin botanique est en mutation, explique Benjamin Pra. À la fin du XIXe siècle, c’est un lieu de recherche, de collection, de festivités mondaines et de rêves tropicaux. Les avancées de la science marquent la fin de la botanique comme discipline académique, la fin de l’étude des végétaux en tant qu’individus tandis qu’émerge une discipline nouvelle : l’écologie, science de l’interdépendance des organismes. Mais la botanique est toujours pratiquée par les amateurs, qui défendent de nouveaux rapports entre hommes et nature. Elle est désormais liée à l’action et l’engagement. » Dès lors, deux axes de transformation s’offrent aux jardins botaniques : devenir un parc urbain ou marquer un engagement plus radical pour la préservation ou la réparation du patrimoine vivant. Pour Benjamin Pra, le jardin botanique du XXIe siècle doit devenir un lieu d’appropriation des problématiques environnementales par les citoyens, « tout

en restant un lieu de science et de rêve ». Délocalisé à l’ouest du Jardin des Deux-Rives, sur une bande non-bâtie de 55ha dont une partie de réserve naturelle, il relie la ville à la forêt. Le jardin occupe évidemment la plus grande partie du site, le projet architectural se concentre au niveau de l’entrée, avenue Vitryle-François. Construite en bois, l’entrée de la Cité botanique accueille les visiteurs et laisse entrevoir le jardin depuis la rue. Ici démarre une forêt d’armatures métalliques qui soutient une verrière, tantôt ouverte tantôt fermée, et se déploie de manière organique pour accueillir les éléments du programme architectural : lieux d’exposition permanente et temporaire, une halle ouverte qui abrite végétaux l’hiver et expositions ou événements l’été, amphithéâtre, restaurant, bibliothèque, séminothèque (bibliothèque de graines) et trois serres, tropicale, aride et aquatique. Des chemins oniriques et pédagogiques nous entraînent ensuite jusqu’à la pointe sud de l’île aux Épis, face à celle du Rohrschollen.


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1. Rue du Rhin Napoléon 2. Avenue Vitry-le-François 3. Cité botanique 4. Jardin botanique 5. Jardin des Deux-Rives


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RÉNOVER LES GRANDS ENSEMBLES

RESTRUCTURATION ET DENSIFICATION DE LA CITÉ ROTTERDAM

2014

Faire évoluer un patrimoine remarquable d’après-guerre

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En gris, les bâtiments existants 1. Rue de Rotterdam 2. La nouvelle école ouverte sur le parc 3. Les nouveaux bâtiments de logements avec toitures végétalisées

Géraldine Bouchet Directeur d’études : François Frédéric Muller

Conçue par Ernest Beaudouin et achevée en 1953, la Cité Rotterdam est le premier grand ensemble français et fait figure de pionnière et d’exemple. Pour Géraldine Bouchet, « il y a une grande qualité urbaine dans ce quartier. La disposition des bâtiments, avec les plus bas proches de l’eau, garantit un ensoleillement optimal. Tous sont tournés vers l’école et créent

une cour géante. » Aujourd’hui, les logements nécessitent une rénovation thermique. Or, leur conception correspond à une autre époque : « il y a des bâtiments pour les familles, et d’autres avec des studios pour des personnes seules et souvent âgées… Aujourd’hui, on ne fait plus ça. » De plus, la demande de nouveaux logements ne cesse de croître. Géraldine Bouchet s’attache ici à restructurer ici la Cité en profondeur tout en préservant ses qualités.


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Au premier plan, les nouveaux logements promenade du Luxembourg et rue de Péronne sont placés parallèlement aux bâtiments anciens ou les prolongent, laissant se déployer le parc central.

Densification « Les bâtiments sont hauts mais le terrain vierge est grand. » Les nouveaux logements s’implantent dans le prolongement ou en parallèle des bâtiments existants, sur seulement deux niveaux pour qu’un maximum d’appartements à l’arrière aient toujours vue sur les rives et le parc. Des passerelles relient les bâtiments anciens au toit des nouveaux, « pour que ceux qui sont pénalisés puissent bénéficier ainsi de la vue ». Les terrasses des nouveaux logements sont découpées de manière aléatoire « pour ne

plus qu’on lise la répétitivité des logements. » Comme dans les anciens bâtiments, ils sont desservis par des coursives, « mais celles-ci sont désormais distantes de 2m de la façade » pour des questions d’intimité. Le projet revoit aussi le dessin du quartier : « J’ai supprimé tous les éléments postérieurs à Beaudouin, qui sont moins pertinents, comme les deux écoles. » Elles sont reconstruites là où l’architecte les avaient pensées, c’est-à-dire parallèlement aux bâtiments de logements, pour dégager un grand parc central.


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RÉNOVER LES GRANDS ENSEMBLES

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Rénovation thermique des bâtiments existants avec ajout de loggias préfabriquées en bois et panneaux brise-soleil amovibles.

Rénovation thermique « Les panneaux de béton armés préfabriqués étaient innovants mais pas très performants au niveau phonique et thermique. » On ne peut isoler par l’intérieur car cela modifierait le point de rosée (la température à laquelle la vapeur à l’intérieur du logement se transformerait en eau) et détériorerait les accroches en métal qui relient les éléments préfabriqués à la structure. Or, il est impensable de modifier les façades de Beaudouin. Solution : on décroche les éléments, on isole et on

repose. Des loggias sont ajoutées aux façades sud, augmentant les performances énergétiques et le volume de l’espace de vie. Le réaménagement des logements Là encore, il s’agit de conserver l’enveloppe mais de proposer des aménagements différents, plus en phase avec les usages contemporains. Certains logements sont fusionnés pour en faire de plus grands, et chaque étage comprend désormais plusieurs types de logements.


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TRANSFORMATION DES TOURS DE LOGEMENTS SOCIAUX DANS LE QUARTIER DE L’ELSAU

2022

Rénover plutôt que démolir

Avant-après de l’une des tours de la rue Martin Schongauer. Les façades sont augmentées de jardins d’hiver.

Bardia Maghsoodloo Directeur d’études : François Frédéric Muller

Le programme de renouvellement urbain du quartier de l’Elsau, démarré en 2019 et qui se poursuit jusqu’en 2025, prévoit notamment la démolition d’un quart des logements sociaux, considérés comme trop dégradés pour être rénovés. Ceux-ci seront reconstruits ailleurs. Conserver et améliorer plutôt que détruire et reconstruire : le projet de Bardia Maghsoodloo porte sur l’une des tours de 64 logements de la rue Martin Schoengauer, réhabilitée en reprenant les principes imaginés par les architectes Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal pour la Tour Bois-le-Prêtre à Paris (2011).

Une opération exemplaire, qui reçut l’Équerre d’argent. Les façades sont isolées par l’extérieur en apposant des jardins d’hiver entièrement vitrés, qui offrent aux logements plus de luminosité et des espaces supplémentaires. Les quatre appartements du rez-de-chaussée sont remplacés par des espaces à usage collectif, augmentant la surface de parties communes jusqu’ici exiguës et lieux de tous les trafics. Un socle avec gradins les connecte aux espaces extérieurs, pensés désormais comme des lieux de rencontre entre voisins et de jeux pour les enfants, participant à l’amélioration générale du cadre de vie.


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HABITER AU BORD DE L’A35

UNE NOUVELLE FAÇADE URBAINE

2019

Un quartier sur l’A35 à Koenigshoffen

Logements, équipements et commerces le long du boulevard urbain.

Maxime Vaudron Directeurs d’étaudes : Anne-Sophie Kehr et François Frédéric Muller

Beaucoup d’étudiants se sont penchés sur les possibilités qu’offriraient la transformation de l’A35 en boulevard urbain, un temps évoquée suite à la construction du Contournement Ouest de Strasbourg. Libérés d’un trafic routier intense et des pollutions qu’il génère, l’infrastructure routière et ses talus pourraient être urbanisés et relier enfin le centre-ville à ses quartiers périphériques, plutôt que de les séparer. Maxime Vaudron imagine un projet pour le segment entre la route des Romains et la ligne de chemin de fer,

à Koenigshoffen. L’aménagement du talus de part et d’autre de l’actuelle A35 permet de connecter le futur boulevard au niveau de la rue, située en contrebas. À l’ouest, des logements s’installent rue de l’Abbé Lemire, qui longe les jardins familiaux, les jardins de la Montagne et mène à l’arrêt de tramway Parc des Romains. La plus grande partie du projet se déploie à l’est du boulevard, sur une parcelle actuellement boisée. Des logements, une tour avec des espaces culturels, un espace sportif, des commerces s’organisent ici autour d’une place publique. Une passerelle traverse en hauteur la végétation et le cours d’eau, ouvrant de nouvelles perspectives sur la ville et le paysage.


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1. A35 2. Route des Romains 3. Rue de l’Abbé Lemire 4. Jardins de la Montagne verte 5. Jardins familiaux 6. Logements 7. Logements, équipements et commerces 8. Place publique

Une passerelle franchit le cours d’eau et offre des vues inédites sur ce site très boisé.

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LA GARE BASSE

LABORATOIRE D’UNE NOUVELLE VI(LL)E ÉCO-RESPONSABLE

2020

Un nouveau quartier à l’arrière de la gare

Camille Dégremont Directeurs d’études : François Frédéric Muller et Jérôme Villemard

Sur le même site, situé dans la ceinture verte qui entoure la ville, Camille Dégremont propose un projet qui accorde une large place à l’agriculture urbaine, et donc au lien avec le vivant. Il s’organise en quatre pôles : logements, école maternelle (dans le Bastion 14), de vastes espaces partagés pour les habitants avec cuisines, salle de sport, coworking, buanderie commune, cantine et un pôle production avec un espace de culture aéroponique (culture hors-sol), composteur

et méthaniseur, micro-ferme avec élevage, salles de transformation et d’emballage, salle d’affinage, épicerie et restauration pour la vente des productions, brasserie et stands pour accueillir des événements et donc du public. Tous ces espaces sont installées dans les halles existantes, conservées et rénovées. Elles sont augmentées de modules cubiques en bois, qui permettent d’aménager des balcons, loggias, coursives, passerelles et terrasses sur les toits. « Ce projet a donc pour ambition de proposer une nouvelle manière de vivre et de concevoir nos lieux de vie, en harmonie à la fois avec les bâtiments existants et la nature qui nous entoure. »


DE NOUVEAUX MODES DE VIE

Se rapprocher de l’eau, imaginer les équipements et les espaces publics comme lieux de rencontres et de partage, repenser les entrées de ville pour les mobilités douces.

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UNE VILLE AU BORD DE L’EAU

RENDRE L’ILL AUX STRASBOURGEOIS

2021

Bains publics intérieurs et extérieurs

Une passerelle relie les bains intérieurs de la place Grimmeissen aux trois presqu’îles où sont situés les bains extérieurs.

Aline Becker Directeurs d’études : Dominique Coulon, Thomas Walter et Didier Laroche

De tous les bains de rivière ouverts à Strasbourg au XIXe siècle, dans le cadre d’une politique hygiéniste, il n’en subsiste plus un seul. À la Petite-France, qui en comptait plusieurs, l’eau est aujourd’hui dédiée à la navigation touristique. Par ailleurs, la ville manque « de structures aquatiques, permettant de se rafraîchir l’été, de nager, de se détendre et de se laver. » Aujourd’hui, seuls les Bains

municipaux rassemblent encore toutes ces fonctions. Aline Becker imagine ainsi des bains intérieurs et extérieurs. Les premiers sont installés Place Grimmeissen, utilisée aujourd’hui comme parking et intègrent des douches publiques. Peu ouverts sur l’extérieur, sauf quelques découpes sur le paysage, ces bains sont pensés « comme un cocon » dont le volume s’inscrit dans le tissu urbain. Le parcours des usagers se termine sur le toit, par un bain froid avec vue. La place quant à elle s’ouvre désormais sur l’eau après démolition d’une maison,


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1. Bains intérieurs 2. Passerelle 3. Brasserie 4. Bains extérieurs 5. Douches et cabines 6. Location bateaux et saunas

et une passerelle la relie aux trois presqu’îles. Les bains extérieurs sont placés de part et d’autre du square des Moulins, où les canaux accessibles pour la baignade sont fermés à la navigation. L’entrepôt public du square Louise Weiss est transformé en brasserie, et les seules nouvelles constructions du site sont une extension du parking de l’Hôtel Régent qui accueille douches et cabines, ainsi qu’une structure flottante avec points de location de bateaux et saunas. Le projet renoue avec une tradition strasbourgeoise oubliée. Vue intérieure des bains place Grimmeissen.


STRASBOURG VU PAR LES ÉTUDIANTS DE L’ENSAS

UNE VILLE AU BORD DE L’EAU

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DÉRIVE À L’ÉTANG GERIG 2018

Transformation d’une ancienne gravière à Ostwald 1. Étang Gerig 2. Ostwald 3. L’Ill 4. A35 5. Plaine des bouchers 6. Parking relais 7. Centre culturel et sportif 8. Passerelle

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Gabriel Herbert Directeur d’études : Dominique Coulon

« Beaucoup de gravières sont des zones délaissées, constate Gabriel Herbert, accueillant des activités sociales et économiques hétéroclites », mais aussi des dépôts de déchets, des espèces envahissantes. « Un autre avenir est possible pour ces espaces, qui abritent des espèces parfois rares ou menacées. »

Le site Avec une surface de 47,4ha, l’étang Gerig à Ostwald est le plus grand plan d’eau des environs de Strasbourg. Enserré par l’Ill et l’autoroute A35, il n’est accessible que par Ostwald, pas par la Plaine des Bouchers dont il est pourtant proche. Il est entouré d’une forêt assez dense, sauf au niveau de l’ancien site d’extraction où le sol est stérile. L’étang est très fréquenté à la belle saison.


025 Le programme De vastes espaces publics aménagés pour la baignade et la déambulation, un bâtiment accueillant des espaces d’exposition dédiés à ce milieu singulier, « pour apprendre au public à respecter ces espaces naturels », un restaurant, un café, des sanitaires pour les baigneurs et un équipement sportif accueillant les habitants en toute saison.

La façade avant semble flotter sur l’étang. Le toit est dédié aux sports urbains et à l’observation du paysage.

Le bâtiment Il s’implante sur la partie stérile du site et est accessible par une longue passerelle piétons-vélos reliée à deux parkingsrelais, l’un côté Ostwald, l’autre côté Plaine des Bouchers, au-delà de l’autoroute que la passerelle enjambe. De ce côté, celle-ci est accessible par la piste cyclable qui longe de canal et rejoint le centre-ville de Strasbourg. De 250x50m, le centre culturel et sportif abrite aussi une bibliothèque, une piscine et est surmonté d’un toit-terrasse pour les sports urbains, où l’on peut également s’assoir pour observer le paysage.


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UNE VILLE AU BORD DE L’EAU

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LE PORT DE PLAISANCE DU CANAL DU RHÔNE AU RHIN 2017

Une architecture légère entre ville et nature

Sofiya Nigmattulina Directeurs d’études : Dominique Coulon et Thomas Walter Formation professionnelle continue

Entourée de canaux et de rivières, Strasbourg ne dispose que de peu de lieux d’accueil pour les plaisanciers, alors que cette pratique est un plein développement. Sofiya Nigmattulina imagine donc un port au bord de canal du Rhône au Rhin, le long de la

rue des Imprimeurs. Un site choisi parce que les îles Weiler et Stella accueillent déjà des clubs d’aviron, de canotage et de canoé. Accessibles seulement aux bateaux, très arborées et un peu sauvages, elles restent cependant inconnues des Strasbourgeois qui ne pratiquent pas ces activités. Cette forte présence de l’eau et de zones vertes confère beaucoup de qualités au site, par ailleurs fragmenté par les ponts de la voie ferrée, de l’autoroute et la rue de la Montagne verte,


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et difficile d’accès alors qu’il est à 5 minutes à vol d’oiseau de la Petite France. Sophie construit d’abord deux passerelles légères à l’impact minimal, qui le relient au quartier Gare d’un côté et la plaine des Bouchers de l’autre. L’équipement répond à tous les besoins techniques des plaisanciers, accueille aussi un office de tourisme, un restaurant, une cafétéria et des hébergements. L’architecture est légère, « dans l’esprit d’un parc urbain », avec une forêt

de poteaux en lamellé-collé et des volumes simples en métal. Ceux-ci sont surélevés puisque la zone inondable, et précédés de terrasses flottantes. Sur l’île Weiler, des parcours dans les arbres renforcent le lien entre ville et nature.


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ESPACES PUBLICS

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UNE PLACE PEUT EN CACHER UNE AUTRE 2013

Équipement sportif et lieu de rencontre place d’Austerlitz

La place se soulève pour offrir des espaces de jeux en extérieur et en intérieur.

Nathan Hoh Directeur d’études : Étienne Falk

Le projet de Nathan Hoh s’appuie sur son mémoire, rédigé l’année précédente, qui portait sur le sentiment d’insécurité en ville et l’idée qu’il est généré par « le fait de ne pas connaître des autres. » Fréquentant les terrains de basket de la Citadelle au confluent des quartiers du Neudorf et de l’Esplanade, les sports de rue et leurs équipements ouverts,

lui apparaissent comme un vecteur de mixité et de sociabilité intéressant. Il cherche quel lieu à Strasbourg pourrait accueillir un tel espace de rencontre. Son choix se porte sur la place d’Austerlitz, que l’on traverse autant qu’on s’installe aux terrasses des cafés. À l’époque, elle vient d’être refaite, avec notamment cette « bosse » où jouent les enfants. « On pourrait faire plus, investir dans un espace vraiment public, qui rassemble et incite à la curiosité. Le sport auto-organisé et le jeu sont presque totalement absents du quartier, alors que


La place basse offre un espace de sociabilité en toute saison.

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Coupe du projet avec place haute, place basse et parking souterrain.

ce sont des sources d’interactions fortes. » S’appuyant sur les flux observés au centre et les terrasses aux abords, sur les hauteurs que nécessitent les activités qu’il y imagine (comme le basket), Nathan Hoh soulève le sol de la place pour créer une colline, une topographie qui n’existe pas en ville et se prête aussi bien aux jeux d’hiver que d’été. Par un système de poteaux métalliques qui soutient le sol, il dédouble ainsi l’espace avec une place haute et une place basse. Celle-ci peut dès lors se pratiquer toute l’année, sans

rupture des possibilités de rencontre au gré des saisons. Elle forme un abri, qui peut aussi accueillir des événements, un marché, des brocantes, une patinoire l’hiver où la place haute offre des pentes aux jeux de glisse (s’il y a de la neige…). Elle offre aussi un panorama, des altérités et des imprévus à observer pour les passants et les clients des terrasses. Pour Nathan Hoh, c’est « une infrastructure sociale. »


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ESPACES PUBLICS

SOLS D’ÉCHANGES. DES FLUX À L’ÉNERGIE URBAINE 2013

Réinventer la place de Haguenau

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Plusieurs niveaux de sols séparent les modes de transport. Les parcours sont émaillés de places publiques, commerces, cafés et équipements.

Ivan Bitsch et Ingrid Junker Directrices d’études : Cristiana Mazzoni et Anne Jauréguiberry

D’une surface de 25 ha, routes comprises, la place de Haguenau est l’une des trois articulations qui desservent la ville. Pour Ivan Bitsch et Ingrid Junker, elle est à la fois « simple et complexe, misérable et riche, absolument nécessaire et totalement dénigrée, efficace et subie, paysagère et négligée, vide et occupée, moderne et dépassée, métropolitaine et locale ». Elle possède beaucoup d’avantages – place ouverte, présence de la ceinture verte, point de vue sur cathédrale, la Maison du bâtiment comme signal, une situation entre la Neustadt et Schiltigheim, le Wacken et le Marché gare, la gare et les institutions européennes – et de nombreux inconvénients – rupture, talus, nombreuses zones inaccessibles pour piétons et cyclistes, difficultés de franchissement, nuisances sonores, visuelles, olfactives, un square fréquenté faute de mieux. En résumé : « L’expression de trou noir urbain est plus appropriée que la dénomination de place.» Ivan Bitsch et Ingrid Junker s’appuient sur ces contradictions, sur le complexe immobilier alors en projet et la future ligne de tramway pour transformer cet espace. Il s’agit de « respecter le quotidien du quartier tout

en réfléchissant à son rayonnement métropolitain. L’enjeu est de permettre aux individus de s’arrêter sans perturber la fluidité du trafic. D’orchestrer le mouvement et de scénariser les parcours, afin de favoriser la cohabitation des rythmes. Retrouver et recréer des liaisons, piétonnes, cyclistes, tram pour instaurer un dialogue, un équilibre avec les véhicules motorisés. » Et de faire de cette place une destination et un lien entre Schiltigheim et la Neustadt. Ils créent alors plusieurs niveaux de sol séparant les modes de transport, les voitures passant sous la rue haute, accessible par une rampe aux piétons et cyclistes. Les parcours sont émaillés de plusieurs places publiques, percées pour laisser passer la végétation, autour desquelles s’organise un programme « enrichissant la vie de quartier » : centre culturel, auberge de jeunesse, salle de sport, bureaux, commerces, café… L’empreinte au sol des bâtiments est déterminée par les flux piétons et cyclistes, leur hauteur de certains répond à celle de la Maison du bâtiment et signale l’entrée de la ville, tandis que le canal est rendu accessible et ses abords retravaillés. Pour Ivan Bitsch et Ingrid Junker, il s’agit de redonner à cette place consacrée au flux « une énergie urbaine », de transformer un lieu de passage « en lieu de partage ».


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ÉQUIPEMENTS

UN PONT POUR LA CITÉ DE L’ILL

2019

Un nouvel équipement pour désenclaver le quartier

Jean Chevalier Directeur d’études : Olivier Gahinet

Enclavé entre l‘Ill et le canal du Muhlwasser, le grand ensemble de la Cité de l’Ill apparaît comme une impasse au bout de la plus cossue Robertsau. Comme beaucoup de quartiers populaires, il souffre d’un manque d’équipement qui engendre une inégalité d’accès aux services publics et contribue au manque d’attractivité du quartier. Jean Chevalier imagine ici une bibliothèquecentre culturel dans un bâtiment pont qui enjambe l’Ill et rejoint l’arrêt de tramway de l’autre côté. Doublé d’une passerelle, on peut le traverser par l’extérieur ou par l’intérieur suivant les horaires, créant ainsi de nouvelles opportunités d’accès à la culture. Un jardin sur le toit sensibilise à l’environnement naturel rhénan, et fait de la situation géographique du quartier non plus une difficulté, mais une singularité et un atout La destruction des garages en bande que nécessite cette nouvelle construction est compensée par la construction d’un parking silo Cet équipement d’envergure permet ainsi d’ouvrir le quartier, le rendant plus accessible et plus attractif, pour ses habitants et le reste de la ville. Le bâtiment-pont enjambe la rivière pour relier les quartiers et offrir un nouveau rapport à la nature environnante.


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Logements et espaces partagés place Grimmeissen. À droite, la rue des Dentelles.

LET’S CO ! LES LIEUX DU TOUT PARTAGE

2014

De nouveaux espaces pour de nouveaux usages Sébastien Denéchaud Directrice d’études : Anne Jauréguiberry

Le projet de Sébastien Denéchaud part du constat que notre société réclame de plus en plus de faire ensemble et d’initiative citoyenne. Un mode de vie [co] – co-habiter, co-llaborer, co-utiliser, se co-déplacer – où l’on partage de plus en plus de transports, d’espaces dans les logements ou autour, d’objets. Quels espaces la ville peut-être offrir à ces nouveaux usages ? Sébastien Denéchaud les imagine place Grimeissen, au cœur de la Petite France. Un site central qui possède peu de qualités, beaucoup de murs aveugles et sert de parking. À l’époque (2014), la création

d’un jardin partagé par les habitants marque leur volonté de le transformer. S’appuyant sur le tracé des rues existantes, Sébastien Denéchaud investit toute la surface de la place par un programme [co] d’espaces à partager, fermés ou ouverts, de plain-pied : organothèque (bibliothèque d’objets), commerce, marché couvert, espaces de troc, de loisir, de travail, jardin potager, serre, cuisine, chambre d’amis… Au nord et au sud, il installe des étages de logements aux surfaces rationnalisés. « Ce programme fabrique une politique de la ville différente, une nouvelle économie et de nouveaux liens sociaux. » [ Depuis 2016, place Grimeissen est investie tous les mois de décembre par le Marché OFF, vitrine de l’économie sociale et solidaire. ]


LOGER

Densifier le tissu existant, inventer des modes d’habiter partagés, dans des espaces plus végétalisés et pensés avec les habitants.

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SLOW LIFE

LOGER

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2014

Habiter les pieds dans l’eau à la Petite France

Des logements sur deux des trois presqu’îles de la Petite France. Celle du square Louise Weiss est conservée en l’état.

Hélène Pinaud et Julien Schwartzmann Directeur d’études : Dominique Laburte

En bref Sur ces deux langues de terre sur l’Ill, les 76 logements, du T1 au T5, créent une densité supérieure à celle du tissu alentour (148 logements par hectare contre 120). Installés dans de petits bâtiments de deux étages maximum, à l’échelle du bâti existant dans le quartier pour plus d’harmonie, ils s’accompagnent de services et commerces (café, boutique, halte-garderie, coiffeur…) et forment un morceau de ville. À l’extérieur Balcons, jardins d’hiver et terrasses sur les toits multiplient les

possibilités d’accès à l’extérieur. Celui-ci est structuré par le rapport à l’eau. Des pontons permettent l’accès direct aux bâtiments, une promenade le long de chaque presqu’île ainsi qu’une passerelle multiplient les points de vue pour les habitants et les passants. Entre les bâtiments, des jardins sont dévolus à des usages privés et publics. Ils augmentent la surface habitable et permettent à la lumière naturelle d’éclairer toutes les parties des bâtiments. À l’intérieur Les logements ont été dessinés avec précision, avec des meubles sur-mesure et des fenêtres placées pour découper des vues sur le quartier, augmentant encore la porosité avec l’extérieur.


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LOGER

UNE PARENTHÈSE URBAINE 2012

Un éco-quartier et des équipements sur l’île du Wacken Myriam Tazi Directeur d’études : Dominik Neidlinger

À côté du quartier européen et du quartier d’affaires, encore en projet à l’époque, l’île du Wacken est « une poche urbaine à l’arrière-cour de la ville ». Elle accueille quelques équipements sportifs éparpillés mais n’est pas encore l’Île aux sports d’aujourd’hui. Faisant partie de la ceinture verte de Strasbourg, son grand « potentiel paysager » devient une part importante du projet de Myriam Tazi : un quartier résidentiel qui fasse le lien entre ceux de la Robertsau et de l’Orangerie, tout en créant une « vitrine » sur l’axe majeur de circulation. Il s’agit d’abord d’englober les pièces existantes et disparates. Les équipements sportifs sont regroupés, une nouvelle salle omnisport entre en dialogue avec les bâtiments du quartier européens, un centre d’art contemporain y « injecte de la culture » (l’espace Apollonia s’installera à proximité en 2015). L’éco-quartier s’établit le long de deux pénétrantes vertes, à distance des équipements et dans une parenthèse de verdure. Il comprend des maisons bi-famille, du logement collectif et semi-collectif dans des bâtiments en bandes et des îlots ouverts. Des espaces partagés offrent un mode de vie plus collectif : cours, coursives, jardins, places, salles de fêtes commune, locaux à vélos, cabanes de stockage, ateliers de bricolage. Des commerces s’installent le long du boulevard, et la nouvelle station de tramway s’accompagne d’un bâtiment public à caractère associatif et d’un parking relais.

Une zone demi-sauvage est conservée à l’arrière, où une promenade aboutit sur une plage verte, zone de baignade naturelle avec aire de pique-nique et possibilité de cinéma en plein air le soir.

Plan masse de l’île du Wacken, avant et après


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MÉTISSER COLLECTIF ET INDIVIDUEL 2012

Un parking accueille des logements à Neudorf

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1. Route du Polygone 2. Rue des Carmes 3. Rue de Geipolsheim Les garages en cœur d’îlot sont détruits pour laisser place à des logements.

Anaïs Godefroy-Rieb & Pauline Toenz Directeur d’études : Thierry Rey

Où ? 8400 m2 dans l’îlot Polygone, occupés par des garages souvent inutilisés. Quoi ? 8800m2 pour 70 logements + 5830m2 d’espaces extérieurs + 1100m2 de services partagés (crèche, buanderie, atelier et garage vélo, salon et kitchenette commune, parking souterrain) + 300m2 de services sur rue ouverts au public (commerce, restaurant) Le projet Habiter, ce n’est « pas seulement d’occuper un certain nombre de m2, mais se définir en fonction d’un tissu de relations sociales ». Dès lors, comme « être ensemble, séparément, chez soi, avec les autres ». Sans

Différentes typologies de logements se combinent à chaque étage. Ils sont desservis par des coursives donnant sur la cour intérieure.

doute inspirées par Éco-logis, premier immeuble de logement en auto-promotion de Strasbourg, alors tout juste construit à Neudorf et qui comporte beaucoup d’espaces mutualisés, Anaïs Godefroy-Rieb et Pauline Toenz reconquièrent ce cœur d’îlot minéral en mettant l‘accent sur les rapports de voisinages. Chaque étage comprend tous les types de logement, du studio au T5, en simplex ou en duplex, « assemblés par une combinatoire spécifique », et des espaces communs. La cour intérieure rappelle les places de villages, les terrasses partagées, les coursives et le potager collectif offrent autant de rencontres possibles et de seuils entre la rue et chez soi.


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LOGER

ARCHITECTURE DE L’ORDINAIRE

2018

Des logements et un restaurant au Neuhof

Astrid Brosse Directeur d’études : Étienne Falk

Quoi ? Le thème du projet, c’est « la banalité du quotidien ». Astrid Brosse adopte ici « une posture à l’opposé de l’architecture spectaculaire : une architecture de la petite histoire, teintée d’humilité et de modestie ». Comment y injecter un peu d’extraordinaire, ou simplement faciliter les tâches domestiques, comme « étendre une lessive, ranger les courses, une poussette, engager une conversation au bas de l’immeuble » ? Par de petits gestes, une fenêtre bien placée qui permet de garder l’œil sur les enfants, un évier suffisamment profond pour y remplir le seau du ménage, des espaces et des rangements adaptés à chaque moment et situation familiale.

Où ? Dans une dent creuse à Neuhof-village, à l’extrêmité sud de la route d’Altenheim, où l’on trouve déjà église, école, boulangerie, bureau de poste, PMU, banque et supérette. Pour qui ? Le quartier est habité par une forte proportions de ménages à très bas revenus, compte beaucoup de familles monoparentales et de familles nombreuses. Astrid Brosse dédie une partie des logements aux premières, avec équipements d’entraide, équipements en commun et restaurant associatif, l’autre aux familles nombreuses. Pour plus de mixité, des appartements sont conçus pour des colocations et/ou « des ménages complexes » (deux familles et/ou plusieurs personnes isolées), d’autres pour des familles nucléaires. Les maisons en bande accueillent plusieurs types de familles, et la Maisonnette abrite les retrouvailles entre

33 logements et un ensemble d’équipements s’insèrent dans une dent creuse rue d’Altenheim.


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1. L’un des jardins communs. Les appartements pour familles nombreuses ou ceux destinés à l’hébergement ponctuel ont des jardins privatifs.

2. L’immeuble pour familles monoparentales abrite 13 appartements, dont 4 partagent une même cuisine. Au rez-de-chaussée, salle de réunion, salle de jeux et buanderie commune.

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parents et enfants placés. Tous les bâtiments reprennent les volumes de ceux qui existent déjà aux alentours pour une intégration harmonieuse et apaisée dans le quartier. Une attention aux usages Le local vélo comprend atelier et sanitaire, pour éviter de remonter dans les logements pendant les jeux. Un lieu commun, disposé comme une garderie avec salle de change, permet aux enfants de jouer ensemble. La laverie attenante permet d’y faire sa lessive en surveillant sa progéniture. Les appartements destinés aux familles nombreuses comprennent de très grands rangements, un grand cellier et une laverie, un petit salon mais une grande salle à manger. Toutes les chambres des colocations ont la même taille, et les logements accueillant les ménages « atypiques » offrent la possibilité d’intégrer atelier ou mezzanine, suivant les besoins. 1


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LOGER

L’HÔPITAL LYAUTEY : UN PARC HABITÉ 2021

Reconversion d’un ancien hôpital militaire en lieu de vie citadine

Corentin Kayser Directeurs d’études : Michel Spitz, Claire Karsenty et Thierry Rey

Caserne à origine, puis hôpital militaire, fermé en 1996 et vidé de toute occupation en 2008, l’hôpital Lyautey occupe un vaste site en plein cœur de Neudorf. « Il est à la croisée des flux et des populations, à proximité du tram, du bus, de pistes cyclables, et de deux axes routiers très fréquentés. Il forme un nœud entre des parties de ville hétéroclites, des barres de logements sociaux, le quartier Polygone, le dépôt de CTS, le cimetière et quelques maisons individuelles : une

série de micro-cités aux architectures différentes, qui marquent l’isolement des habitants.» Au sud de la parcelle se trouvent trois ensembles de logements collectifs. « L’architecture existante est rythmée et ordonnée, avec une grande hauteur sous plafond. » Le site est en grande partie arboré et végétalisé au centre, et contraste avec la densité de la ville autour. Le projet Il mêle rénovation et constructions neuves : réhabilitation des bâtiments en logements aidés provisoires pour familles en difficulté (en lien avec les flux migratoires dans le quartier), médiathèque dans l’ancien Mess des officiers, maison citoyenne des


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associations, marché couvert dans le hall de stockage pour les véhicules, logements sociaux, collectifs ou intermédiaires, jardins partagés, équipements sportifs… Les bâtiments existants font également l’objet d’une rénovation thermique. Le mur d’enceinte est supprimé pour une meilleure connexion avec le reste du quartier, et le stationnement limité aux limites de la parcelle. Les trois barres de logements sont démolies pour laisser place à des maisons urbaines avec jardins, ainsi que certains bâtiments moins nobles pour permettre un réaménagement du grand parc central, au cœur du projet.

1. Avenue du Neuhof 2. Dépôt CTS 3. Quartier du Polygone 4. Entrée principale du site 5. De nouveaux bâtiments de logements remplacent les barres.

Le site s’inscrit désormais dans une trame verte


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LOGER

UN LIEU À SOI

2022

Remédier au morcellement du Neuhof avec un projet inclusif et solidaire

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Bénédicte Rosenstiehl Directeurs d’études : Anne Jauréguiberry et Antoine Barjon

Où ? De l’école du Ziegelwasser à l’aérodrome du Polygone en passant par l’hôpital Lyautey, qui est le cœur du projet. En résumé Un quartier repensé et harmonisé dans une approche écologique et égalitaire. La démarche « Je voulais penser un projet de manière féministe. Le féminisme n’est pas seulement l’égalité femme-homme, il repense toutes

les formes de domination, y compris de l’homme sur la planète. » Il s’agit donc de penser un quartier respectueux des humains et de la nature, plus harmonieux dans son dessin et la vie qu’il propose. Le projet s’appuie sur des entretiens avec des associations et des habitants du quartier, qui ont notamment formulé « la nécessité de lier certains espaces, de casser les murs d’enceinte de l’hôpital ou d’avoir des bas d’immeubles vivants ». « De manière générale, j’ai surtout retravaillé les espaces et les équipements publics, car ils peuvent être un vrai facteur de changement. »


1. Aménagement de la cour de l’école du Ziegelwasser 2. Restructuration de l’hôpital Lyautey 3. Quartier du Polygone 4. Aménagement de l’école maternelle et du parc Ariane Icare et de l’école Guynemer 5. L’aérodrome du Polygone pourrait devenir un parc urbain

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Une proposition pour l’hôpital Lyautey

Dans le détail À l’ouest, la cour de l’École Ziegelwasser est retravaillée avec terrain de badminton ou de volley (et pas seulement de foot), amphithéâtre, sols perméabilisés pour donner aux élèves la possibilité de planter. La place devant la salle des fêtes du Manège est en partie déminéralisée pour permettre l’agriculture urbaine, et se prolonge par un marché couvert qui peut accueillir des événements et devient un vrai lieu de rencontres. À Lyautey, le projet prendra forme au fur et à mesure des années et du travail avec les acteurs du quartier. Pour l’exercice du

diplôme, Bénédicte Rosenstiehl dessine ici une possibilité. Les bâtiments restaurés accueillent une Maison de solidarité avec des colocations pour femmes seules, une autre pour les personnes queer et les réfugiés, deux bâtiments agricoles pour des associations du quartier, des logements pour les familles à la rue… Les murs d’enceinte sautent sauf là où les personnes les plus fragiles ont besoin d’intimité. Les trottoirs sont élargis de part et d’autre de l’avenue du Neuhof, pour les personnes à mobilité réduite, et un parking silo construit à l’entrée du quartier.


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LOGER

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Sur le site de l’hôpital Lyautey, la Maison de solidarité accueille des colocations pour femmes seules, avec de larges espaces partagés.

À l’est, les interventions sur les écoles Guynemer et Ariane Icare sont similaires à celle de l’école Ziegelwasser. Elles sont reliées au parc Ariane Icare, peu utilisé et transformé en terrain d’exploration. La rue centrale est piétonnisée. Elle ajoute des possibilités d’agriculture urbaine sur le site de l’aérodrome du Polygone, qu’elle considère comme obsolète et qui pourrait devenir un grand parc urbain pour tous les Strasbourgeois. « Je ne suis pas intervenue sur le quartier du Polygone car il

présente des problématiques particulières, et je n’ai pas pu en discuter avec l’association Lupovino [association en lien avec les familles du voyages sédentarisées dans le quartier, NDLR]. » Horizon 2050, car le dialogue avec les habitants et les acteurs du quartier est au cœur de la démarche, qui avance donc par étapes.


PRODUIRE

Rapprocher production et habitat, dans une logique vertueuse de circuits courts.

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PRODUIRE

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CENTRE D’AGRICULTURE URBAINE 2012

Cultures maraîchères sur les fronts de Neudorf

Lorraine Motte Directeur d’études : Pierre Vercey

Quoi ? Une vitrine de l’agriculture urbaine avec des espaces de production en serres verticales et en extérieur + centre de documentation, une salle de conférences, un espace d’expositions et des ateliers pour diffuser les connaissances sur le sujet. Le site Une dent creuse (aujourd’hui construite) de 3500m2 à l’intersection de l’avenue du Rhin et de la rue du Landsberg, dans un quartier alors en pleine transfor-

mation. Orientée nord-sud, elle bénéficie de lumière naturelle toute la journée. Autour, le bâti dense et haut permet de faire monter les serres jusqu’à 30m sans dominer le quartier. Le bâtiment Les espaces de culture reposent sur une base technique qui accueille aussi des espaces pour le tri et le compost, la mise en bocaux et la congélation des surplus. La structure est en acier, à l’exception des volumes de circulation en béton. En saison, les terrasses cultivées, pensées comme des vagues plantées ou des champs urbains, sont accessibles depuis la rue.


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LE SYSTÈME DIGESTIF DE STRASBOURG 2020

Envisager la transformation de l’espace urbain par un réseau alimentaire alternatif

Sun Yuanduo Directrices d’études : Andreea Grigorovschi et Anne Jauréguiberry — Double diplôme CAUP Tongji

Il devient urgent de revoir nos modes de production et de distribution des denrées, notamment en privilégiant les circuits courts et des transports plus rationnalisés. Sun Yuanduo transforme ainsi l’ensemble du réseau alimentaire de la ville en repensant la logistique, la production et la consommation des produits agricoles. Ce nouveau système

s’organise autour de six points dans la ville, qui combinent arrivée et distribution des denrées provenant des campagnes alentour, lieux de production urbains, espaces de vente et de consommation et/compostage et recyclage. Reliés par un réseau tram-vélo, ces points deviennent des moteurs de projets urbains, par la transformation des espaces publics, l’installation de commerces ou d’équipements.


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PRODUIRE

RECONQUÊTE DE L’OUEST DE LA GARE DE STRASBOURG 2021

Vers l’autonomie alimentaire

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1.Espaces de production avec serres en aquaponie surélevées 2. Espaces de vente et de consommation 3. Espace recherche 4. Espace coworking

David Wetterwald Directeur d’études : Michel Spitz Formation professionnelle continue

Dans les bâtiments délaissés à l’arrière de la gare, David Wetterwald installe des lieux de production agricole en circuit-court ainsi que des espaces de rencontre et de partage des savoirs. Un programme qui « correspond au mouvement de la société », développé à partir des recommandations de l’Adeus (l’agence d’urbanisme de Strasbourg et du

Rhin supérieur) et de la politique de la ville de Strasbourg, qui encouragent l’agriculture urbaine et l’augmentation de l’autonomie alimentaire. Les hangars métalliques sans grand intérêt architectural sont alors déconstruits (les matériaux seront réemployés ailleurs), ceux datant de l’époque de la Neustadt sont rénovés pour préserver l’identité du site. Leur structure permet d’installer des sites de production en aquaponie : un écosystème miniature où l’engrais des cultures est fourni par les déjections des poissons, nourris


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La passerelle accueillant les espaces de vente et de restauration traverse les hangars anciens et les accroche au glacis à l’arrière du site.

Les bâtiments réhabilités accueillent des cultures en aquaponie.

en grande partie par les déchets végétaux broyés. Les plantes quant à elles purifient l’eau, qui reste donc en circuit fermé. Ce mode de culture occupe une surface au sol minimale et permet ici de nourrir 400 foyers. Le programme architectural comporte quatre entités : Les espaces de production dont la surélévation permet d’imaginer un restaurant au rez-de-chaussée. Des lieux de vente et de consommation installés dans des halles et une passerelle qui raccroche le site au glacis et fonctionne

comme une rue intérieure avec des stands de cuisine du monde. Des laboratoires de formation sur l’aquaponie. Un coworking pour usagers de la gare. Les espaces logistiques sont placés le long de la voie ferrée, dans la partie la plus bruyante. L’entrée du site se fait sous la passerelle, via un large parvis, qui mène à un parc aménagé. « Le projet de Reconquête de l’Ouest de la gare se place dans un cycle vertueux d’autonomie alimentaire, en permettant de se reconnecter à la nature. »


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PRODUIRE

LA ZONE D’ACTIVITÉS PÉRIPHÉRIQUE FORLEN

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2020

Quel avenir pour des secteurs obsolètes ?

Le site, à la lisière de la ville et des terres agricoles

Alexandra Perrault Directeurs d’études : François Frédéric Muller et Jérôme Villemard

Construite dans les années 1970 au bord de l’A35, la zone d’activités Forlen marque la lisière ville-campagne à l’ouest de Strasbourg. Le site est occupé majoritairement par des entrepôts, des entreprises de réparations, quelques habitations ainsi qu’une petite ferme et un centre équestre. Il se caractérise, comme toutes ces zones, par l’étalement et l’absence

Le site, à la lisière de la ville et des terres agricoles

de cohérence entre les bâtiments. « Je suis partie du principe que certaines de ces activités vont perdurer, d’autres seront rendus obsolètes par les nouveaux modes de consommations.» En s’appuyant sur l’idée de nature pénétrant la ville et lui donnant sa structure, Alexandra Perrault projette ici un véritable quartier où se tissent ville/agriculture/espaces naturels. « Les terres agricoles jusque-là considérées comme simples réserves foncières sont mises en valeur par une promenade en lisière. La voirie est densifiée et hiérarchisée afin d’organiser le quartier. Il est maintenant divisé en îlots piétons et verts. » Les


En blanc, les bâtiments existants En brun, les bâtiments ajoutés 051 1. Serre polyvalente 2. Exemple de stockage et habitat avec structure bois porteuse, grenier et panneaux solaires 3. Exemple de densification avec construction de logements et surélévations 4. Transformation de la gare de Graffenstaden avec ajout de fret

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Exemple de densification. Les logements sont installés dans des constructions neuves et des surélévations. En gris, les bâtiments existants.

entrepôts existants sont conservés et en partie surélevés avec de nouvelles fonctions pour diminuer l’emprise au sol. Les greniers des nouveaux logements sont destinés au stockage agricole, isolant les étages inférieurs lors des fortes chaleurs. Les formes et matériaux sont ceux des greniers traditionnels de la région. Toutes les toitures sont aménagées de panneaux solaires photovoltaïques et de systèmes de récupération d’eau de pluie. La gare de Graffenstaden, à moins de 10 min de la Gare Centrale, est réhabilitée et intègre une gare de fret. Les champs gagnent du terrain, et on

gagne à la fois en surface agricole et en bâti. « Le projet vise à transformer Forlen, jusqu’alors une zone d’activités vorace en énergie et émettrice de polluants, en un quartier plus autonome et producteur de ressources.»


PROTÉGER ET INCLURE

Concevoir des lieux d’accueil pour les plus fragiles, au cœur de la ville.

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VIVRE COMME À LA MAISON

2017

Un foyer de l’enfance à la Petite France

Le projet s’installe sur le quai Woerthel, aujourd’hui utilisé comme parking.

Morgane Tirard Directeur d’études : Étienne Falk

« Pourquoi les sites d’accueil pour enfants sont-ils toujours si éloignés du centre-ville ? Et pourquoi est-il si difficile de ne pas séparer les fratries, même si loi stipule le contraire ? Comment faire vivre ces enfants comme à la maison, au centreville de Strasbourg ? » Morgane Tirard installe un foyer quai Woerthel à la petite France, utilisé comme parking. Un site « calme, apaisant et attrayant, en relation avec l’eau, des rues majoritairement piétonnes et des bâtiments de 20m maximum.» Le foyer pourrait accueillir 20 enfants de leur naissance à leurs 21 ans, et est conçu comme une vraie maison avec cuisine, salon,

chambres individuelles ou doubles, salle de jeu, salle de projection, bibliothèque, piscine, terrain de basket, balcon, terrasse commune, toiture aménagée, jardin. Ces espaces permettent aux enfants d’inviter leurs amis comme ils le feraient dans une vraie maison, et des appartements peuvent héberger ponctuellement les parents. Les espaces semipublics, privés et partagés sont clairement séparés. Les hauteurs et épaisseurs des volumes reprennent celles des bâtiments du quartier. Accolée à l’eau, sa façade avant est alignée avec celle de la Maison des ponts couverts, espace de rencontre parents-enfants à l’avant de la presqu’île centrale, devant le square des Moulins.


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LA GREFFE ARCHITECTURALE POUR ACCOMPAGNER L’INSERTION DES JEUNES PRÉCAIRES 2019

Le logement temporaire comme opportunité de rencontres

Le site du projet, entre la rue du 22 Novembre et la rue Sainte-Hélène. Côté rue Sainte-Hélène, le bâtiment très délabré est détruit et remplacé par une greffe en bois.


La greffe rue Sainte-Hèlène. À l’arrière, le bâtiment haut donne sur la rue du 22 novembre.

Magali Ndzossi Directeur d’études : François Frédéric Muller

Le site Le 3, rue Sainte-Hélène, au cœur de la ville mais au calme. Le bâtiment existant, inexploité et inexploitable, est supprimé. Celui-ci est relié à un autre bâtiment situé à l’arrière, au 30 rue du 22 Novembre (magasin Boulanger et logements) ; ce dernier est donc intégré au projet, ainsi que son arrière-cour. En tout, 3000m2 de surface utile sur sept étages avec une emprise au sol de 387 m2. Le projet : un lieu d’accueil temporaire pour jeunes adultes précaires, où tous les espaces sont pensés comme moyen d’une insertion professionnelle et sociale : logements, ateliers de travail (sérigraphie, menuiserie…), espaces de vente et cafétéria accessibles aux habitants du quartier, de même que la garderie. Différents types de logements ont été pensés en fonction des profils : chambres avec cuisine collective, logement équipé, colocation, logement avec enfants. Côté rue Sainte-Hélène, une greffe en bois accueille différents éléments du programme. Elle peut aisément évoluer en fonction des besoins. Le bâtiment rue du 22 Novembre est très peu modifié dans les étages recevant les logements. Il est creusé aux niveaux inférieurs pour mettre au jour une série d’arcades désormais visibles depuis la cour intérieure.

Des modules en bois permettent de modifier aisément les espaces intérieurs en fonction des besoins.


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TROISIÈME LIEU ACTEUR DE RÉINSERTION 2017

La réinsertion sociale en cœur de ville

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1. Quai Kellerman 2. Rue Marbach 3. Rue du Noyer Une bibliothèque et une maison de transition remplacent l’ancien parking à l’arrière du Printemps.

Manon Genevois Directeur d’études : Dominique Coulon

Où ? Quai Kellerman, à l’arrière du Printemps, au niveau de l’ancien parking (aujourd’hui Primark). Quoi ? 4500m2 pour un tiers lieu et une maison de transition. Le but de ce projet est « d’interroger la notion d’enfermement/liberté ainsi que celle de la réinsertion en milieu urbain à travers un pro-

gramme centré autour d’une maison de transition pour femmes judiciarisées », une alternative à la prison largement développée au Canada. « Sa position centrale permet aux femmes de renouer avec la ville et de trouver plus facilement du travail. » Ce projet associe des logements pour des femmes en liberté surveillée à un tiers-lieu, espace de travail, de loisirs et de vie citoyenne accessible à tous les habitants. Celui dernier permet de proposer un nouveau type de lieu dans un centre-ville essentiellement commer-


Vue depuis le quai de Paris. Le tiers lieu donne sur l’eau, les logements sur la rue Marbach, perpendiculaire au quai Kellermann.

cial, en intégrant salle d’exposition, cafétéria, ateliers de travail, de création. Au cœur du bâtiment, la médiathèque fait le lien avec la maison de transition et des emplois pourraient y être réservés aux résidentes. L’accès de la maison de transition se fait par la rue Marbach à l’arrière, plus calme et discrète. Elle comprend des chambres individuelles (dont six pouvant accueillir des enfants) et des espaces partagés, pour « ne pas recréer la logique carcérale ». Regroupées par deux ou trois, elles disposent d’une laverie commune,

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d’une cuisine, d’espaces salons et d’une serre, ainsi que d’espaces administratifs. Un espace événementiel au dernier étage est accessible par le tiers-lieu et la maison de transition Des cubes de 10x10m structurent les espaces et permettent de faire entrer la lumière à tous les niveaux, le point le plus bas étant situé à l’angle de la rue du Noyer et du quai.


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FOLI·E·S

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2022

Micro-structures pour une ville hospitalière et inclusive

Ève Bigot-Renard Directeurs d’études : Mathieu Mercuriali et Antoine Barjon

« Comment faire une place dans la ville aux personnes exclues ? » Le projet s’appuie sur la notion d’hospitalité, « qui recouvre trois dimensions : secourir, accueillir, appartenir », et sur un constat : la centralisation et réduction des points d’eau publics, le manque de toilettes et leur fermeture à 20h qui touche particulièrement les femmes sans-abri. Ève Bigot-Renard place à des endroits stratégiques du territoire des structures polyvalentes, qui s’adressent d’abord aux personnes en situation d’urgence, « toujours exclues de la planification urbaine ». Ils sont d’abord destinés à répondre aux besoins de première nécessité mais offrent aussi lieux de répit, d’accueil et de sociabilisation. D’autres sont destinées aux personnes en danger immédiat suite à une agression et/ou ayant besoin d’un accueil et d’une écoute. D’autres encore à tous les habitants, les invitant à

une pause. Reprenant le principe des Folies, micro-constructions pour des réceptions conçues par Bernard Tschumi pour le parc de La Villette à Paris, elles sont réparties selon un maillage plus ou moins resserré suivant les fonctions, repérables à leur couleur. Les Foli·e·s à l’échelle de kiosque Tous les kilomètres, elles proposent des toilettes (roses) ou sanitaires publics (oranges) non genrés, gratuits et accessibles, associé à un commerce ou un lieu d’information. Les Maisons de solidarité (bleues) Tous les 6km, plus vastes, elles abritent espaces de travail, salle de consommation ou chambre d’urgence, associés là aussi à un commerce solidaire ou un lieu d’information qui crée de l’animation. Suivant le lieu où elles s’implantent, les Folies peuvent intégrer un mur ruban qui redessine l’espace public et peut être utilisé pour l’expression libre. Le mobilier urbain (jaune) Tous les 500m, il vient ponctuer la ville et intègre systématiquement de l’éclairage pour plus de confort.


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Offrir une nouvelle vie et de nouvelles silhouettes à des bâtiments emblématiques.

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TRANSFORMATION DE L’ACTUELLE TOUR DE CHIMIE 2016

Une nouvelle résidence étudiante

Chérine Ailas Directeurs d’études : François Frédéric Muller, Anne-Sophie Kehr et Patrick Weber

Achevée en 1963, la tour de chimie marque l’entrée du campus de l’Esplanade. Avec ses 73m et ses 16 étages, elle est le 2e bâtiment le plus haut de la ville après la Cathédrale. Reliée à deux bâtiments abritant laboratoires et amphithéâtres, situés le long de la rue Blaise Pascal et du boulevard de la Victoire, elle est inoccupée depuis 2015, ne répondant plus aux normes de sécurité des activités de recherche. Chérine Ailas y installe des logements pour les étudiants, avec à chaque étage une cuisine et une salle à manger communes, ainsi qu’un jardin d’hiver largement ouvert qui devient une terrasse protégée en été. Les appartements pour une ou plusieurs personnes sont répartis selon des plans type pour étages pairs et impairs. « De grandes baies vitrées du sol au plafond viennent dilater et laisser filer l’espace au lieu de le contenir. » Les deux derniers étages, avec salle de sport et salle de détente, deviennent publics et offrent une vue unique sur la ville. L’espace extérieur côté sud est aménagé avec un jardin et un parvis. Le sol est creusé pour accroître le sentiment de verticalité. L’entrée se fait sous le niveau de la rue par un espace vitré qui semble détacher la tour du sol.

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L’OBSERVATOIRE ASTRONOMIQUE ET SON PARC 2013

Un ensemble plus lisible et accessible

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1. Jardin botanique 2. Grande coupole avec lunette astronomique 3. Galeries couvertes 4. Nouvel espace d’exposition 5. Bâtiment méridien ancien

Loïc Lacroix Directeur d’études : Patrick Weber

Inauguré en 1880 à l’extrémité est du jardin botanique, l’Observatoire astronomique vient terminer la composition urbaine qui débute avec le Palais impérial (place de la République). Il comprend cinq

6. Nouveau pôle recherche 7. Nouveau forum 8. Nouveau pôle enseignement 9. Parvis sur la rue de l’Observatoire 10. Jardin de l’Observatoire

bâtiments, dont la coupole avec la lunette astronomique, installés dans le jardin, ainsi que des galeries couvertes. Différentes extensions sont réalisées au fil du temps pour pallier le manque d’espaces nécessaires aux travaux de recherche, à l’enseignement et à l’accueil du public. L’une d’elles, accolée au bâtiment méridien, rend le jardin de l’Observatoire, côté boulevard de la Victoire, inaccessible depuis le jardin botanique.


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S’appuyant sur des entretiens avec les utilisateurs du lieu, toujours trop à l’étroit, Loïc Lacroix reconfigure le site. Il supprime les extensions, y compris celle qui coupe le jardin, pour rendre à l’ensemble sa composition d’origine. Le bâtiment méridien du planétarium est restauré et se voit adjoint un bâtiment miroir qui augmente l’espace d’exposition. Trois nouveaux pavillons accueillent les fonctions

de ceux qui ont été supprimés, ainsi que celles qui manquent encore. Sur deux niveaux, ils se distinguent par leurs matériaux, et des jeux de débordements et de retraits. Installés le long de la rue de l’Observatoire, ils sont reliés entre eux et au jardin botanique par 25ha d’espaces publics supplémentaires. En haut : Le jardin botanique et le jardin de l’Observatoire sont reliés par le parvis et des passages à l’intérieur du site. En bas : Les nouveaux bâtiments depuis la rue de l’Observatoire.


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Dans la nef, l’espace des synesthésies, où les habitants visualisent leur ville idéale.

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L’ARCHE DES SYNESTHÉSIES

2014

Se réapproprier un patrimoine muséifié

Simon Oudiette Directeur d’études : Georges Heintz

D’où vient l’idée de ce projet de diplôme ? D’un long processus, et de cinq ans d’études. J’ai fait ma première année de master à Sidney, et j’ai trouvé leur gestion du patrimoine intéressante, plus libre. En France, nous sommes très conservateurs. À Strasbourg, j’habitais à côté de la cathédrale, et je me suis toujours demandé comment sortir le centre historique du patrimoine et du tourisme. Avec mon projet de diplôme, j’avais envie de questionner les évidences, de poser des questions sans forcément proposer de solutions. Comment se réapproprier un bâtiment qui, avec le déclin des pratiques religieuses, est aujourd’hui un musée ? C’est une approche théorique, une proposition urbaine, un scénario. L’aspect architectural est presque secondaire, mais le contexte du diplôme fait qu’il est central. Cela n’a pas parlé à certaines personnes du jury… Après avoir retravaillé le projet, j’ai été lauréat du concours d3 Unbuilt Visions l’année suivante. Pourquoi l’arche des synesthésies ? Je suis parti des études que j’avais faites pour mon mémoire [Simon Oudiette y interroge les modèles de gestion du patrimoine culturel historique

apparus en France dès le XIXe siècle. S’appuyant sur des écrits théoriques libéraux et anarchistes du XXe siècle, il explore ce qui signifierait pour eux la non-planification, où le décideur ne serait pas la ville ou l’État mais les habitants, NDLR]. J’ai essayé de trouver une manière de passer au réel, à travers cette grille qui s’étend sur cette ville. Une synesthésie est le fait de relier deux sens qui ne vont pas ensemble, ici, ce qu’on voit et ce qu’on ressent face à la ville.

La matrice se développe à partir de la cathédrale, dans des structures ressemblant à des échafaudages. De grandes « boîtes » contiennent les archives de toutes les activités qui s’y déroulent.


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D’où vient cette idée de structure, et qu’y trouve-t-on ? Je suis parti des échafaudages qui entouraient la cathédrale quand j’y habitais. Il y avait entre les deux quelque chose de symbiotique, comme s’ils permettaient à la cathédrale de se développer. Je les ai étirés au maximum, et ces échafaudages fluides sont devenus une matrice que les habitants investissent en fonction de leurs besoins. Cela permet de démuséifier, de recréer du lien entre la ville et ses monuments. Historiquement, la cathédrale abritait une école, des hôpitaux, beaucoup de fonctions différentes.

Que trouve-t-on à l’intérieur de la cathédrale ? On y trouve les archives, où l’on recueille l’intégralité de ce qui se passe dans cette matrice qui ne cesse d’évoluer. Il y a aussi un espace pour les synesthésies, où les habitants visualisent leurs envies de changement, leur représentation de la ville idéale, qui se manifestent par une évolution de la grille dans une interaction fusionnelle. C’est le cœur de la matrice.


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architecture architektur transformation

22.09 ,31.10 2023 Alsace – Baden-Württemberg – Basel www.m-ea.eu


Hors-série — Strasbourg vu par les étudiants de l’ENSAS Ce hors-série du magazine ZAP présente une série de projets dessinés par les étudiants de l’Ensas pour la ville de Strasbourg. Libérés de certaines contraintes mais pas de la réalité du terrain ni de l’époque, ils imaginent des bâtiments, des quartiers, des espaces publics, des usages. Et dessinent un futur pour la ville, qui pourrait bien nous inspirer.

Zap / Zone d’architecture possible, magazine de l’École nationale supérieure d’architecture de Strasbourg


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