Zut Strasbourg 59

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Serti sur Vide
Joaillerie

Making of

Entre la fin de l’été et le début de l’automne, quelques secondes d’éternité. Mais aussi des heures à caler les rendez-vous, des kilos de vêtements à transporter (surtout quand on fait une fixette bottes). Et sinon, c’est comment cette saison ? Vert, rouge. Comme les dernières tomates ? Comme les dernières tomates. Je veux bien vivre là. Mais au dernier étage. 300 chevaux sous le capot. Ça tiendra la journée. Alex, tu peux coiffer Nathalie ? On cadre le figuier ? La serre tropicale est fermée. L’Aubette aussi. J’ai oublié de prendre les chapeaux de Joe ! Tu as encore tes parents ? C’est beau une ceinture de pantalon à boutonnage décalé. Ça fait déjà un an. Mes bichons, mes canards, mes mignons. Les stagiaires vont me manquer. Cette fille a la voix de Jeanne Moreau et l’allure de Clint Eastwood. C’est ta première automatique ? Interdit de porter des faux. Bon, on y est donc ? Oui, dans l’automne jusqu’au cou.

À remettre dans le contexte par @christophe_urbain

@cecilejacquot_ @globaljo

@candice.mack

@alexandrelesmesavila

@pudlarzmagda

@photo_canastra @lemaxiphotographe

Passage de l’autre côté de l’objectif pour les deux rendez-vous incontournables de chaque saison : notre série Mode et la rubrique « Strasbourg Vu Par ».

@prunedln

@nathalie.siegfried

@alain_challenger

@citiz.grandest @previewimagemaker

Texte et photos Myriam Delon

10, rue du Dôme – Strasbourg – www.jacquot-horloger.com

JACQUOT
Joaillerie

Prochaines parutions

Hors-série Racing n° 5 « Un seul amour et pour toujours » novembre 2024

Haguenau & alentours n° 19 décembre 2024

Strasbourg n° 60 décembre 2024

Zut Team

Directeur de la publication & de la rédaction

Bruno Chibane

Administration et gestion

Gwenaëlle Lecointe

Rédaction en chef Cahier La Culture

Emmanuel Dosda

Directrice artistique et rédaction en chef cahier Le Style Myriam Commot-Delon

Rédaction en chef Cahier La Table

Tatiana Geiselmann

Rédaction en chef Cahier Les Escapades et Cahier Les Métiers

Bruno Chibane

Direction artistique et graphisme

Séverine Voegeli

Chargée de projets & développement

Léonor Anstett

Commercialisation

Léonor Anstett

+33 (0)6 87 33 24 20

Bruno Chibane +33 (0)6 08 07 99 45

Émilie Ményé +33 (0)6 66 22 79 29

Philippe Schweyer +33 (0)6 66 22 79 29 ps@mediapop.fr

Anne Walter +33 (0)6 65 30 27 34

contact@chicmedias.com prenom.nom@chicmedias.com

zut-magazine.com chicmedias.com

Contributeurs

Rédacteurs

Myriam Commot-Delon, Emmanuel Dosda, Tatiana Geiselmann, Paola Guzzo, Fanny Laemmel, Caroline Lévy, JiBé Mathieu, Emma Schneider, Aurélie Vautrin, Sonia Verguet

Styliste

Myriam Commot-Delon

Stagiaires rédaction et stylisme

Lisa Canastra, Martin Van Klaveren

Photographes

Atelier Gilbert, Pascal Bastien, Teona Goreci, Valéry Guedes, William Henrion / Preview, Cécile Jacquot, Grégory Massat, Christophe Urbain, Sonia Verguet

Illustrateurs

Cyril Bonin, Fanny Delqué

Relecture

Léonor Anstett

Nicolas Querci

Retouche numérique

Emmanuel Van Hecke / Preview

Stagiaire graphisme

Daphné Flesch

Ce magazine trimestriel est édité par chicmedias 37, rue du Fossé des Treize 67000 Strasbourg +33 (0)3 67 08 20 87 chicmedias.com

Sàrl au capital de 77 057 euros

Tirage : 9 000 exemplaires

Dépôt légal : octobre 2024

SIRET : 509 169 280 00047

ISSN : 1969-0789

Chicmedias est une entreprise à mission dans l’économie sociale et solidaire

Ce magazine est entièrement conçu, réalisé et imprimé en Alsace

Impression Ott imprimeurs

Parc d’activités « Les Pins » 67319 Wasselonne Cedex

Diffusion Novéa et Zut Team

Abonnements abonnement@chicmedias.com

Crédits couverture

Réalisation Myriam Delon

Photographe Cécile Jacquot Mannequin Magda / upmodels.fr Maquillage Stéphanie / candicemack.fr

Coiffure Alexandre Lesmes / Avila

Assistant photo & pré-production William Henrion / Preview Retouches numériques Emmanuel Van Hecke / Preview

Lieu Studio photo Preview Imagemaker / preview.fr

Manteau, pantalon en satin et pull Ipsae. Bottes Chloé chez Ultima.

Édito

14 Strasbourg vu par — Nathalie Siegfried — Alain Schellenberg — Jeanne Osswald-Gouzi — Tamim Daoudi — Eric Hamel

24 La chronique

Femmes like you

Pérégrinations urbaines avec Caroline Lévy, à la rencontre de celles qui font bouger les lignes.

26 Portfolio

Atelier Gilbert (1/4) Strasbourg, dans les archives du duo de photographes.

35

La Culture

36 Rencontre

Zut, v’là Dosda… chez Olivier Chapelet

Le directeur du Théâtre actuel et public de Strasbourg (TAPS) nous reçoit dans son chalet.

40 Bande dessinée

Cyril Bonin

Le Strasbourgeois nous livre une adaptation illustrée du roman de Douglas Kennedy, La Poursuite du bonheur

44 Cinéma

Festival Augenblick

Questions à la sublimissime Sadia Robein sur la 20 e édition du festival de cinéma germanophone.

46 Musique

Gringe

Entretien avec un rappeur qui ne veut « pas passer sa vie dans le dark ».

48 Arts

La compagnie Conférence pour les Arbres À la tâche à venir se prépare au monde d’après.

50 Exposition

De l’Alsace au monde. Voyage dans les Archives de la Planète d’Albert Kahn

Rendez-vous à la Bnu pour découvrir le road trip d’un banquier visionnaire.

58 Actus

La culture en bref Théâtre, photo, illustration, littérature, festivals… les événements culturels à ne pas rater cet automne.

Le Style

66 Mode

Les classiques dans la peau.

Toujours au parfum

j’aime mon commerce, j’achète local.

80 Joaillerie

Une collab brillantissime.

82 Sur le vif

L’étiquette au masculin.

86 Lifestyle

Sept prescriptions automnales anti-blues.

91

La Table

92 Chronique

Été encapsulé

Sonia Verguet et son kit de survie pour un automne affriandant.

96 Dossier

Coûte que croûte

Notre nourriture se glisse sous la couette et ça réchauffe.

102 Recette

Croûte toujours

Légumes racines dans la terre.

105 Reportage Au charbon Journée au four et aux champs avec le chef étoilé Thierry Schwartz.

110 Adresses

Les Canailles À la carte, du nouveau. Au Millésime 50 ans et des bouteilles.

112 Actus

Les potins des popotes Nouvelles en vrac et ragots tout frais.

115

Les Escapades

116 Colroy-la-Roche La Cheneaudière

Au cœur de la vallée de la Bruche et du meilleur spa d’Europe.

120 Entretien

Le Parc animalier de Sainte-Croix Rencontre avec la 3e génération de la plus grande « start-up de l’écologie » mosellane.

125

Les Métiers

138 Arts numériques AV Extended Agence multimédia et concepteur lumière.

130 Les métiers

Émotions graphiques Floconneuse incursion dans le bureau d’une touche-à-tout.

133 Les métiers À bonne école MediaSchool : formation, enseignement et médias.

MJM : formations artistiques et graphiques. Ynov : école digitale.

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More is more

Austère, austère… Est-ce que j’ai une gueule d’austère ?

À la morosité ambiante, nous préférons la porosité constante, la luminosité accueillante. Cette période où pullulent les vaches maigres et les lâches aigres n’aura pas la peau de notre détermination. Zut à la docilité ! Fuck la sobriété ! Marre des chuteurs, on veut faire du bruit. Non aux coupes, aux baisses. Adieu tristesse. Zut aux micro-portions, aux galopins. On veut une dodue tourte vigneronne, une aubergine confite et son condiment à l’ail noir, une cruche de vin naturel et cinq tranches de pâté en croûte. Zut à l’ascétisme, oui à l’hédonisme.

Ras-le-bol des nuances de gris.

Couleur pourpre, le magazine que vous avez entre les mains est une ode à l’explosion de saveurs et de couleurs. Celles des légumes racines orange et verts cuits dans l’argile. Celles, charbonneuses, des pièces de viande cuites au feu de bois. Celles, acidulées, des crevettes en gélatine sucrée. Celles, rougeoyantes, du pantalon, pull et manteau en satin. Celles, écaillées, du mur de pellicules d’agar-agar signé Michel Blazy. Celles, flashy, pétaradantes, des clichés d’Atelier Gilbert.

Zut aime le trop, le plein, le superflu, le too much, l’indiscipline nécessaire dans ce contexte étriqué.

En vous souhaitant d’être repus, bonne lecture !

Strasbourg vu par

Ils vivent, travaillent, créent et sortent à Strasbourg. Les femmes et les hommes qui font vibrer la ville nous font découvrir leur lieu préféré.

Propos recueillis par Myriam Delon, assistée de Martin Van Kleveren

Photos Christophe Urbain

Nathalie

Siegfried

57 ans

Artiste et architecte

Vêtements personnels

Où ? 15, rue Erckmann-Chatrian

« J’ai choisi ce bâtiment de l’architecte Patrick Philippi – datant de 1976 –, d’une part, parce qu’il représente pour moi l’élégance et la modernité strasbourgeoises, et d’autre part, parce qu’avec son confrère Michel Moretti, ce sont deux personnes qui ont compté dans ma formation et ma jeunesse à Strasbourg. Ils ne sont plus là aujourd’hui et je voulais leur rendre hommage. »

Actu ?

« En tant qu’artiste, j’expose en novembre, à Strasbourg, chez Richter architectes et associés, ainsi qu’au printemps à BelleÎle-en-Mer à l’Atelier Galerie Valérie Gautier. En qualité d’artiste coloriste, on peut retrouver mon travail sur les nouveaux packagings des tablettes de chocolat Henner, et sinon je poursuis ma collaboration à Pesmes en HauteSaône avec l’agence d’architecture BQ+A. »

ZUT à qui ou à quoi ?

« Au noir et blanc évidemment ! »

@nathalie.siegfried

Alain

Schellenberg

34 ans

Gérant et associé de la boutique Blandin & Delloye

Où ? Rue Sainte-Hélène

« Je suis un enfant de cette ville, rentré il y a quatre ans avec la volonté de devenir le maître tailleur de cette ruelle nichée près de la rue des Drapiers, au cœur d’un ancien quartier d’artisans. Tout comme mes dix-huit autres associés – officiant sous la même enseigne et dans d’autres villes –, nous avons le goût des lieux confidentiels et personnalisés pour accueillir notre clientèle, que nous ne recevons que sur rendez-vous. »

Actu ?

« Le lancement de nos collections surmesure de costumes pour femmes, qui s’inspire bien évidemment du tailoring masculin. »

ZUT à qui ou à quoi ?

« Zut à ceux qui ont un dressing bien chargé mais qui n’arrivent toujours pas à trouver l’outfit parfait. »

Blandin & Delloye 10, rue Sainte-Hélène blandindelloye.com

Veste, chemise et pantalon Blandin & Delloye.

Jeanne OsswaldGouzi

44 ans

Fleuriste-plasticienne

Où ? Au Jardin botanique, devant la serre tropicale

« On oublie que les plantes sont des êtres vivants. Ce jardin symbolise pour moi la contemplation et la liberté. »

Actu ?

« Ma boutique de fleurs Ronsard a déménagé du quartier de la Krutenau à celui du Carré d’Or. Ayant repris l’activité de la fleuriste Christiane Groll – une adresse incontournable à Strasbourg –, on peut désormais me retrouver sous le nom de Maison Groll. Avec toujours le végétal,

le papier et le tissu, médiums à objets poétiques. »

ZUT à qui ou à quoi ?

« Zut au bitume ! Je suis toujours admirative d’une fleur qui pousse dans le béton de nos villes. »

Maison Groll 3, rue du Temple-Neuf 03 88 22 16 77 @maisongroll

Pull, jupe, sac et bottes Isabel Marant chez Ultima

Où ? Rue de l’Académie

« J’ai parcouru cette rue de long en large, de mon arrivée à Strasbourg pour la fin de mes études à la HEAR jusqu’à mon premier bureau qui fut pendant un temps installé au SEMIA, là où j’ai connu mes premiers clients. Avec, tout proches, la Manufacture des Tabacs et le campus de l’Université de Strasbourg, c’est un peu la Petite Venise de l’innovation. »

Actu ?

« Je viens de réaliser un travail de design autour d’outils médicaux,

un harnais dédié à l’escalade pour les handicapé·e·s et un système de sécurisation intelligent pour vélo. Également dessiné par le studio, la sortie prochaine d’une balise nomade dédiée aux coureurs professionnels pour la société RF Conception basée à Hœnheim. »

ZUT à qui ou à quoi ?

« Zut aux gens qui pensent que le design n’est que de l’esthétique »

tamimdaoudi.com

Tamim Daoudi

Dans les salles de cinéma partenaires

Du samedi 19 octobre au dimanche 3 novembre

Projections

Animations

Rencontres

Spécial 15/29 ans

Où ? Parc de Pourtalès

Directeur de l’ISEG

« J’aime venir ici écouter le temps qui passe… cette œuvre de Claudio Parmiggiani : Il bosco guarda e ascolta, unissant les êtres et les hêtres, symbolise pour moi la mémoire de l’humanité et le support de l’écriture. »

Actu ?

« J’entame une nouvelle rentrée académique à l’ISEG Strasbourg et j’en profite pour adresser mes félicitations et la bienvenue à nos nouveaux étudiants, qui,

comme les arbres ayant besoin d’humus de bonne qualité pour vivre 400 ans, vont trouver en nos murs de quoi enrichir leur futur. »

ZUT à qui ou à quoi ?

« Zut à celles et ceux qui pensent qu’un arbre doit être coupé. »

iseg.fr

Eric Hamel

femmes like you

Et si je vous embarquais avec moi dans Strasbourg ? Vous seriez les témoins de mes rencontres, de mes pérégrinations à travers la ville de jour comme de nuit. J’ai envie de sentir son poumon aussi à travers les femmes qui la font vivre, la rendent encore plus belle et plus lumineuse. Des femmes qui ont choisi de faire bouger les lignes, des héroïnes du quotidien qui osent, s’expriment par leur art, dans leur mission ou par le simple fait d’être femme. Un itinéraire garanti 100 % girl power.

Lundi 11 h 30 – Glim’ Virginie Renaud, conseillère en image 01

Pour franchir la porte du tout nouveau cocon féminin, il faut sortir du centre-ville et se diriger vers l’écoquartier Danube à l’entrée de Neudorf.

Une mini-ville dans la ville, où jardins partagés, composts collectifs, associations et petits commerces ont élu domicile. Derrière l’une des devantures, un vaste rideau laisse apparaître un espace cosy et poudré. Canapés en velours couleur parme, balançoire sur fond de création florale, coin cuisine et table à manger conviviale. Bienvenue chez Glim’ ! Non pas Glam pour glamour mais Glim’ pour glimmer, lueur en anglais. « Toutes les femmes ont cette petite lueur en elles. Parfois il suffit d’un coup de pouce pour la faire briller », explique la fondatrice de cet espace dédié aux femmes et à leur épanouissement personnel et professionnel.

C’est en s’inspirant de son parcours et de la difficulté d’apprendre à se connaître en tant que femme, que Virginie Renaud décide de lancer son projet pour (se) faire du bien. Cette quadra devenue conseillère en image sur le tard a d’abord eu une première vie dans la finance et la banque, avant de ne plus y trouver de sens. « Êtes-vous heureuse ? » lui demande un jour sa psy. La réponse la conduira à ne plus subir sa vie, qui sur le papier, remplissait avec brio toutes les injonctions que la société impose aux femmes.

« J’ai longtemps été cette personne qui ne se posait pas de questions  » confie Virginie . « J’ai tellement eu du mal à me comprendre, que j’ai eu envie d’aider les femmes à mon tour. » D’abord dans l’image et l’estime de soi, en proposant des programmes d’accompagnement personnalisés. Une façon de prendre soin de son extérieur pour soigner son intérieur et être alignée.

Formée par l’iconique Cristina Cordula et diplômée de l’ICA (Institut Coaching Alsace), elle décide d’allier mode et développement personnel dans une approche complète qui la mènera vers l’aventure Glim’. Aujourd’hui cette safe place permet de déployer des actions où l’empowerment est roi, un lieu où le partage d’expériences et la rencontre en réel provoquent souvent un effet miroir sur les participantes.

Depuis son ouverture à la rentrée, Glim’ ne désemplit pas et offre une programmation riche pour plaire à toutes. Ateliers et rencontres inspirantes, du club business aux sujets d’astrologie, naturopathie ou encore sexualité. Les femmes prennent enfin le pouvoir sur leur vie et ça fait un bien fou.

Glim’ 20, rue d’Elbe virginierenaud.fr

Mardi 9 h 30 – Bistrot des Rosiers Bérengère Pelissard et Anne-Sophie Barth, restauratrices 02

Voilà une rencontre longuement attendue et qui se savoure, comme la cuisine du Bistrot des Rosiers, qui a ouvert ses portes il y a tout juste trois mois.

À la barre (et au bar), Bérengère et Anne-Sophie alias Zozo, qui se sont déjà fait un nom dans la gastronomie strasbourgeoise. L’une, cheffe de la mémorable adresse Comptoir à manger, l’autre à la direction des Binchstub, passée aussi par Aïda.

Ce matin j’arrive au début de la mise en place dans une cuisine rutilante. Café Mokxa en main, j’assiste à un bal gracieux et agile d’une efficacité déconcertante. L’espace est petit, mais chacune y trouve sa place. Découpe de truite issue des Sources du Heimbach et qui sera accompagnée d’une sauce au cumin, une recette héritée de la grand-mère de Bérengère. En face, épluchage joyeux et lacrymal d’oignons rouges, qui viendront agrémenter une tarte feuilletée en entrée du menu déjeuner du jour.

Ce bistrot de quartier et de cœur respire la sincérité. On y sent la justesse dans les mots avec la ferme intention de faire plaisir par le bon, autant dans l’assiette que dans le verre. « C’est un endroit simple, une cuisine simple. Quand j’entends “Mhhh” à la dégustation d’un plat, je suis la plus heureuse » s’amuse la cheffe de cuisine Bérengère, appuyée par Anne-Sophie : « C’est un resto où on aurait envie d’aller, un peu comme une extension de chez nous. » C’est surtout une adresse exigeante empreinte d’humilité, portée par la volonté d’évoluer dans un environnement de travail bienveillant, loin de certaines expériences passées en restauration.

Elles ont toutes deux appris de leurs voyages et aventures, notamment Bérengère, en intégrant plusieurs grandes maisons gastronomiques en Angleterre et Australie. « J’ai tout de suite adoré l’ambiance en cuisine. L’intimité qui s’en dégage. Même si le milieu reste évidemment dysfonctionnel.  » Elle poursuit : « Aujourd’hui ce qui est important c’est de faire notre métier, à notre sauce et sans violence. »

Sa sauce à elle, c’est aussi d’explorer, tenter, et associer des saveurs pour provoquer une explosion dans l’assiette. Le bistrot s’est d’ailleurs doté d’un déshydrateur pour sublimer ses recettes. Herbes, fruits, fleurs tout y passe ! Des fleurs de carottes ont même été cueillies sur le campus universitaire voisin.

Côté vins, la sélection est exclusivement nature et fournie en direct par les producteurs, comme Kumpf & Meyer, Kleinknecht ou encore Louis Maurer. «  Je vais chercher des références qui rassurent des clients qui ne connaissent pas les vins nature » assure Anne-Sophie, pour qui c’est aussi une façon de s’engager. « Manger, c’est presque un acte politique. Comme si on votait trois fois par jour ! On mange et on boit en faisant travailler les gens qui font ça bien. »

L’heure de déjeuner approche, on aperçoit sur le comptoir une sorte de grimoire en cuir, le livre de recettes de Reine, la grand-mère de Bérengère. Au même moment, sa mère passe la porte du bistrot, le regard doux et fier se pose sur sa fille qui s’affaire en cuisine. De l’émotion et de la transmission, les ingrédients d’une cuisine qui compte.

Bistrot des Rosiers

68, rue de Zurich

Mercredi 17 h 30 – Péniche mécanique

Cyrielle Knoepfel, humoriste 03

Je n’ai jamais aimé qu’on dise de moi que j’étais drôle ou rigolote. Pourtant ces qualificatifs ont bercé mon adolescence jusqu’à aujourd’hui. J’aime l’humour, mais davantage chez les autres femmes. Je les admire même. C’est assez questionnant et cela mériterait une investigation sur le divan !

L’humoriste que je rencontre me fait rire. Je l’ai redécouverte sur France Inter lors de sa chronique en direct de Strasbourg au printemps dernier.

Cyrielle Knoepfel a pris officiellement le virage de l’humour à 35 ans et a quitté son poste d’assistante polyvalente pour vivre la vie d’intermittence un mois avant le confinement. Un début de carrière qui commencera donc par une bonne blague ! Rapidement, Cyrielle se fait une place dans le milieu du stand-up sur la scène locale, mais aussi nationale. On la retrouve régulièrement à l’antenne de RBS et sur France 3 Alsace, pour des chroniques truculentes inspirées de son quotidien. Ce soir, elle officie en tant que MC et programmatrice des Mécaniques du rire, où elle instaure un line up paritaire à toutes les soirées stand-up. Chaque mois, ce sera autant d’humoristes hommes que femmes sur la scène de la Péniche mécanique, un point c’est tout.

Micro filaire en main et sourire contagieux, Cyrielle manie l’humour avec dextérité tout en mettant parfois les pieds dans un plat qui se savoure épicé voire piquant. Grinçante, touchante mais jamais malaisante, elle connaît aussi les moments de solitude sur scène. « Tout le monde peut faire du stand-up. Alors il faut accepter de “bider” et que ce ne soit pas la faute du public. On passe tous par là, ça fait partie de la construction » confie l’humoriste.

Sur scène, elle partage ses combats et ses engagements et s’inspire de ce qui la révolte en tant que femme célibataire, avec les injonctions qui en découlent. Normes sociales, sexisme, discrimination : « J’envoie des messages engagés dans mes spectacles et on me reproche parfois d’être de tous les combats. »

Depuis sa rencontre avec l’humour (dans le public des spectacles des Improvisateurs) jusqu’à ses performances d’aujourd’hui, Cyrielle a fait du chemin. Biberonnée à l’humour de Foresti, c’est plus dans la veine de Laura Domenge qu’elle se reconnaît aujourd’hui. Cette traqueuse assumée s’est aussi formée à Paris à l’Atelier Juliette Moltes, pour nourrir sa culture théâtrale et parfaire sa diction et sa posture. Son objectif : être davantage programmée en France. On la retrouve

chaque dimanche à 17 h sur la scène du Café Oscar, premier comedy-club de Paris ouvert il y a 30 ans, une référence qui prouve que le stand-up a de beaux jours devant lui.

Jeudi 13 h 30 – Hôtel Léonor

Hélène David, journaliste 04

Faire le portrait d’une amie n’est jamais un exercice aisé. Faire le portrait d’une amie journaliste dont on admire la plume encore moins ! Rendezvous est pris sur la terrasse du Léonor, à quelques pas du siège des Dernières Nouvelles d’Alsace, où elle travaille depuis son arrivée dans la capitale alsacienne que cette native de Metz a adoptée – l’inverse étant vrai aussi !

Je crois que je n’ai jamais côtoyé une personne qui inspire autant l’humilité. Nos entrevues régulières laissent peu de place aux compliments à son égard, alors je profite de cette chronique pour les formuler. D’ailleurs, Hélène n’est pas totalement étrangère à la création de ces portraits féminins. Le fruit d’un brainstorming constructif et de mon besoin de validation auprès d’une professionnelle de confiance, qui possède le précieux sésame : une carte de presse !

Dans le cas d’Hélène, on peut parler de vocation. Elle se rêve très tôt journaliste mais se dirige d’abord vers les grandes écoles de commerce. C’est sur les bancs de l’ESSEC à Paris (enfin, Cergy, pour être précise) qu’elle démarre sa vie étudiante en ne perdant pas de vue son objectif. Fait révélateur, elle s’intéresse rapidement aux matières plus annexes, comme l’histoire de l’art ou la sociologie des organisations. « J’ai fait l’ESSEC underground ! », s’amuse la jeune femme.

Elle choisit de faire ses stages dans les rédactions de maisons de presse, comme aux Inrocks ou au Point Étudiant, quand ses collègues de promo évoluent en finance ou marketing. Diplômée de l’école de commerce en 2008, Hélène passe au même moment les concours d’entrée des écoles de journalisme et intègre l’ESJ à Lille, pour apprendre son futur métier par la pratique : « C’est la presse écrite qui m’a séduite d’emblée. Plus spontanée que d’autres médias, où il faut davantage se mettre en scène. »

Hélène est déterminée et enchaîne les stages et CDD pour lemonde.fr, Les Échos (en tant que correspondante Alsace) et les DNA, en multipliant les missions aux quatre coins du département.

« J’ai toujours eu le goût de l’info. J’aime sortir l’info avant tout le monde, sans être une machine à scoops pour autant ! », confie la journaliste qui a rejoint les pages éco du journal en 2018. La cohérence avec son cursus universitaire saute aux yeux : « Le poste que j’occupe aujourd’hui donne du sens à mon parcours. Ça n’a jamais été un projet, mais plutôt un hasard. » Pour Hélène, le thème des entreprises est d’une richesse extraordinaire  : sujets RH, syndicats et conflits sociaux, ou la réalité des patrons. « Tout est éco et c’est passionnant ! » Depuis un an, la journaliste s’essaie à un nouvel exercice : celui de l’édito. Dans chaque papier, elle pose son regard sur un sujet où elle y met forcément un peu d’elle. Ses convictions, sa grande sensibilité et son analyse toujours juste, pour tenter d’éveiller les lecteurs à certains faits de société. Être éditorialiste et s’exposer est à contre-emploi de cette « timide contrariée » qui se soigne : « C’est un peu ma thérapie ! Ce métier est une forme de développement personnel permanent. »

Quoi de neuf chicmedias ?

01— ZUT Strasbourg, magazine trimestriel lifestyle 100% local #59

02— ZUT Haguenau et alentours / Alsace du Nord, journal trimestriel #18

03— Novo, magazine culturel trimestriel du Grand Est #74

04— 79A by ZUT, publication pour l’agence d’architecture globale K&+

05— ZUT Hors-série, Un seul amour et pour toujours #4 - Il était une foi

06— ZUT Hors-série, L’artisanat dans L’Eurométropole de Strasbourg et en Alsace #6, À livre ouvert

Dans les archives d’Atelier Gilbert 1/4

Merci Zut de nous offrir un espace sans compromis pour exprimer la force, l’amour et la tendresse qui rythment notre quotidien. Erika et Gilbert ateliergilbert.fr

L’Alsace et les prémices de l'illustration jeunesse (xix e -xx e siècles)

08.11.2417.02.25

La Culture

Sous une pluie acide

Se perdre parmi les arbres Ouvrir une porte qui Gringe Le ciné te fait de l’œil.

La Culture — Rencontre «  Normalement, le GPS vous y emmènera sans problème, mais si besoin, n’hésitez pas à me passer un petit de coup de fil… enfin s’il y a du réseau.  » Où allons-nous ? Dans la pampa du 57, chez Olivier Chapelet, directeur du Théâtre actuel et public de Strasbourg (TAPS). Un chalet au décor rustique où il peut se ressourcer et travailler, loin de l’agitation strasbourgeoise. Entretien avec vue sur les épicéas.

Nous avons pris quelques virages bien serrés et profité du paysage sylvestre avant – enfin – d’arriver à Hommert, Moselle. Olivier nous attend sur le palier de sa mignonne maisonnette et nous guide directement vers sa terrasse : « Ça m’a soufflé de découvrir hêtres, chênes, sapins et bouleaux ! C’était un rêve d’enfant – qui a grandi dans le béton et le bitume de la région parisienne – de vivre au beau milieu de la verdure de la campagne. »

Poulet basquaise pour tout le monde !

À la tête du TAPS depuis 2005 , il s’installe d’abord dans une maison d’Hellert, « avec vue sur le rocher du Dabo ». Cadre bucolique, terrain cabossé qu’il mettait sept heures à tondre, assis sur un terrible engin pétaradant pourvu de poignées de mobylette. « Ce premier contact avec la nature a été comme un objet transitionnel vers mon chalet, acquis en 2008. » Il vit en famille dans le centre-ville strasbourgeois, quai Finkmatt, mais tient à garder cette chaleureuse habitation où le néo-Alsacien (amoureux fou du Grand Est) passe ses week-ends, ses vacances, trouve l’inspiration ou organise des dîners façon team building pastoral avec son équipe d’une dizaine de personnes. La dernière fois, c’était poulet basquaise pour tout le monde.

Zut, v’là Dosda !

chez

Olivier Chapelet

« L’écriture, c’est le plus beau métier du monde, c’est faire vagabonder le lecteur. »

Prochains spectacles d’Olivier Chapelet au TAPS

6 + 7.11

Ich wàrt uf de Théo / En attendant Théo, au TAPS Scala

Texte de Pierre Kretz, mise en scène Olivier Chapelet (Compagnie OC&CO), avec Francis Freyburger

21 � 25.01

Cortex / Diptyque, au TAPS Laiterie

Textes de Mélie Néel et Catherine Monin, mise en scène Olivier Chapelet, avec Pauline Leurent et Logan Person (artistes associés)

28 � 30.04

Mes parents, au TAPS Scala

Texte de Mohamed El Khatib, mise en scène Gaëlle Axelbrun et Olivier Chapelet, avec les élèves du Conservatoire à rayonnement régional de Strasbourg, scénographie et musique d’élèves de la HEAR

taps.strasbourg.eu

D’Alcatel à Corneille

Il fait trop chaud pour allumer le poêle « fabriqué à une quinzaine de kilomètres à peine d’ici ». Dans la moiteur de l’été indien, nous entamons un petit tour du propriétaire. Il faut faire preuve de souplesse, voire de dextérité pour grimper à l’étage, par une étroite « échellescalier » casse-binette. Ce que nous prenons pour une couchette d’enfant est un héritage familial : le lit marqueté de la grand-mère d’Olivier. Posé contre cette relique ancestrale, un étui de guitare. « Je suis venu au théâtre par la chanson », affirme-t-il. « Mes textes étaient nuls, alors j’ai eu envie de m’exprimer à travers les écrits des autres. » Tchekhov, Racine, Sénèque, Ibsen ou ses fidèles Thierry Simon et Pierre Kretz. « Je me suis accompli dans l’art dramatique ! » Pourtant, le destin d’Olivier n’était pas tout tracé, étant à l’origine davantage porté sur les « comptes de résultat » que sur Oncle Vania. « J’ai suivi le cursus paternel en m’inscrivant dans une école de commerce. Lorsque j’ai travaillé pour Alcatel, on m’a envoyé au Japon. Arrivé à l’aéroport de Narita, je me suis mis à pleurer. Ça a été un déclencheur. » Il a vécu les dix-huit mois passés à Tokyo comme « un choc culturel énorme », une parfaite «  phase de transition vers le théâtre  », nous dit-il en désignant une poupée kokeshi en bois peint et l’effigie d’un comédien de théâtre nō habillé en femme, le visage peint en blanc – offerte par ses collègues à l’issue de sa mission nipponne. Il a beaucoup lu au Japon, de manière compulsive : des essais sur la scène et textes d’œuvres, classiques ou contemporaines.

Le plus beau métier du monde

De retour en France, il devient administrateur du centre dramatique de Poitiers, officie au Théâtre des Deux-Rives de Rouen, incarne des personnages en jouant quelques rôles et se lance dans la mise en scène de textes d’auteurs qu’il admire : «  L’écriture, c’est le plus beau métier du monde, c’est faire vagabonder le lecteur. » Dans sa bibliothèque, près du solide coffre transformé en vaisselier, rien que du théâtre : Notes et contre-notes d’Eugène Ionesco, Comme je le pense de JeanLouis Barrault, Ubu de Jarry, Godot de Beckett, Molière, Lagarce, Vilar, Jouvet, Vitez… Sur sa table basse, un livre d’entretiens avec Jon Fosse qu’il apprécie tout particulièrement. Il y retourne régulièrement : écrire, c’est écouter.

Dans les cinémas indépendants du Grand Est

Augenblick

20e Festival du cinéma germanophone 5—22.11.24

Le nouveau livre de Pascal Bastien vous fera rugir de plaisir !

Sortie le 8 novembre chez votre libraire et en commande sur mediapop-editions.fr

Le Strasbourgeois prolixe Cyril Bonin est parti à La Poursuite du bonheur avec une adaptation du roman de Douglas Kennedy. Sa BD est une plongée au cœur des USA de l’après-guerre sur cruel fond de maccarthysme. Sara, femme résolument libre, fait partie des figures anticonventionnelles à jeter au bûcher.

Chasse

Nous entrons chez Cyril Bonin sur un petit air de jazz. Un swing lancinant comme celui qui nous accompagne tout au long des pages d’une bande dessinée retraçant la vie chahutée de Sara, jeune et jolie femme trop moderne pour l’Amérique étriquée du lendemain de la Seconde Guerre mondiale. « La Poursuite du bonheur fait se croiser la petite et la grande Histoire. Sara est en décalage avec son époque : elle suit son instinct et ses sentiments. La conformité n’est pas pour elle. Sara tente de faire son chemin dans la vie et se trouve confrontée au modèle qui veut qu’une femme s’occupe de son foyer et fasse rôtir le gigot en attendant son mari. Mais elle a d’autres aspirations : devenir écrivaine / journaliste et être indépendante, non par esprit de contradiction ou de rébellion, mais parce que c’est son désir profond. »

L’American Way of Life : une prison dorée où Sara et son frère Eric Smythe refusent de s’enfermer. Tout comme Jack Malone dont Sara tombe éperdument amoureuse lors d’une sauterie où il s’est tapé l’incruste, à Manhattan, 1945. Le trio évolue dans l’univers des médias, de la culture. La nuit venue, il traîne dans les clubs, verre à la main, cigarette au bec. Sa liberté de pensée agace la bonne société normée qui souhaite le faire entrer de force dans les cases patriotiques. Les «  penchants  » d’Eric et son passé communiste lui seront d’ailleurs fatals : le contrôle made in America impose sa vision réactionnaire et écrase ceux qui ne l’adoptent pas. Étrange écho à l’actualité mondiale : liberté en danger, droits piétinés (IVG…), chantage à tous les étages, intimidations à répétition…

This is America

Parmi les ouvrages trônant dans l’appartement de Cyril Bonin, ancien élève de l’école des Arts décoratifs, un livre de Norman Rockwell, illustrateur célèbre pour ses scènes familiales de cocooning ou de Thanksgiving des fifties. Un

aux sorcières

La condition féminine par Cyril Bonin

« Le premier volume d’Amorostasia date de 2013, soit sept ans avant la propagation du Covid. Il y avait déjà une épidémie très contagieuse, un couvre-feu, des lieux interdits, etc. Pas de masques, mais des brassards obligatoires… pour les femmes. Mes références étaient La Peste de Camus ou Rhinocéros d’Ionesco où les gens sont atteints de rhinocérite. Mes albums ont souvent pour protagonistes des personnages féminins. Des femmes qui se trouvent en butte avec la société ou avec le regard des hommes et qui s’y opposent de manière explicite comme dans Amorostasia ou de manière discrète dans Les Dames de Kimoto… Des femmes qui finissent par prendre leur destin en main... C’est littéralement le cas dans Stella (spoiler alert) puisque l’héroïne est un personnage de fiction sorti d’un roman qui rencontre son auteur et finit par devenir l’autrice de sa propre

histoire. Cet angle “féminin” (plutôt que féministe) répond surtout à l’envie d’aborder mes récits avec une certaine sensibilité et de mettre en exergue les codes et les limites des genres dans les relations humaines. Il me semble que le féminin et le masculin correspondent sans doute à des différences de ressentis, mais aussi à des étiquettes. Des mots qui peuvent être réducteurs et stigmatisants et ont trop souvent été utilisés pour assigner les individus à une place et assurer une domination masculine. »

Amorostasia (3 tomes, Futuropolis) futuropolis.fr

Les Dames de Kimoto (adaptation de l’autrice Sawako Ariyoshi, Sarbacane) editions-sarbacane.com

Stella (Vents d’Ouest) glenat.com

archétype à plébisciter… « La Poursuite du bonheur fait référence à la Constitution américaine. Les États-Unis des années 40-50 se targuaient d’être la terre des libertés tout en mettant une énorme chape de plomb sur les citoyens. À cette époque, des réalisateurs comme Chaplin ou Capra voulaient montrer une autre Amérique. » À leurs risques et périls. Cadrage, montage… : Cyril se réfère beaucoup au cinéma, présent en filigrane dans la BD. « Pour Les Dames de Kimoto , je me suis inspiré de la caméra d’Ozu en adoptant un point de vue frontal, au ras du sol », se rappelle celui qui cite Hitchcock lorsqu’il compare le septième art à un « orgue à émotions ».

Des mots qui cheminent

Tous ses albums partent du texte, véritable colonne vertébrale de son travail. « L’adaptation est un exercice que j’aime beaucoup. Je construis systématiquement le récit en commençant par les dialogues, le point d’ancrage de toute mise en scène. Dans un second temps, il faut réduire la voilure. Le livre de Douglas Kennedy est un pavé de 700 pages

alors que ma BD n’en fait plus que 142 !  » Selon l’auteur, l’important est de savoir créer «  une ambiance, comme Orson Welles », tout en délicatesse et en couleurs qu’il se permet parfois de faire déborder des traits de contours, pour insuffler de la vie dans ses planches. « Mon style n’est pas “graphique”. Je teste des choses, mais sans expérimenter à outrance, je creuse mon sillon. C’est une démarche au long cours. Un chemin qui mènera je ne sais où… »

Cyril Bonin n’a pas d’atelier. Il travaille n’importe où. Tout le temps. Aujourd’hui, il est attablé au milieu de sa cuisine, parmi casseroles et appareils électroménagers, planchant sur un scénario original à tendance SF. « Tout est écrit et j’ai fait les cinq premières pages. » L’éditeur – Sarbacane –est déjà désigné. Reste qu’à poursuivre sur cette même lancée, ce rythme de croisière régulier qu’il s’impose. Petit à petit, il trace sa route.

La Poursuite du bonheur (éditions Philéas) lisez.com/phileas

Nov. – Déc. 24

Kae Tempest, Dorothée Munyaneza 5 – 15 nov. Inconditionnelles

Éric Feldman, Olivier Veillon 12 – 22 nov.

On ne jouait pas à la pétanque dans

Alice Laloy 20 – 29 nov.

Le

Ring de Katharsy

Laurène Marx 26 – 30 nov.

Pour

un temps sois peu

Laurène Marx 3 – 7 déc.

Je vis dans une maison qui n’existe pas

Orchestre La Sourde 13 – 20 déc. La Symphonie tombée du ciel

tns.fr

JE 05 + VE 06 DÉC 20:30

MA 10 + ME 11 DÉC 20:30

La Culture Cinéma Marlene Dietrich est la figure (forte) de cette 20 e édition du f estival de cin é ma germanophone Augenblick, plus que jamais engagé. Questions à Sadia Robein, sa directrice, dans la langue d’Eribon.

20 ans et zéro kino en trop

5 � 22.11

À Strasbourg, partout en Alsace et à Nancy, Sarreguemines et Metz festival-augenblick.fr

Augenblick, les moments forts

-> Carte blanche à Didier Eribon – La Lutte amor -> Berlin, creuset des luttes des minorités sexuelles et de genre

-> Jeune au temps du changement climatique

-> Rétrospective : Marlene Dietrich, de l’UFA aux USA

-> Welcome in Vienna. Vienne : la fuir, la reconquérir, s’y résoudre

-> Invité : Rudolf Thome

-> Invitée : Ruth Beckermann

-> Compétitions de courts et de longs métrages

Le festival Augenblick est porté par le réseau des salles indépendantes de la Région

Grand Est réunies au sein de l’association Le RECIT –Pôle régional d’éducation aux images lerecit.fr

① Shanghaï Express, de Josef von Sternberg

② Among Men – Gay in East Germany, documentaire de Ringo Rösener et Markus Stein

Comment fêter la double décennie du festival ?

L’événement se développe d’année en année, d’édition en édition, nous expérimentons, bougeons des lignes. Suite au succès du concert de KG à la Graffateria l’an passé, nous multiplions les afters avec le set de Voodoo Jürgens – alias David Öllerer, par ailleurs élu meilleur comédien en Autriche en 2024 –, Bobby Would – le plasticien Robert Pawliczek – et Iyas Al Shouli, DJ bercé par la Neue Deutsche Welle. Je désire qu’Augenblick reste au service de formes cinématographiques variées, mais soit aussi un rassemblement festif, à la fois de grande envergure et de proximité !

Outre les compétitions de courts ou longs métrages, Augenblick propose des projections autour de sujets d’actualité… Notre approche est culturelle, linguistique mais également thématique. C’est davantage le cas cette année où nous allons aborder des thèmes actuels qui secouent la société  : la lutte des minorités sexuelles et de genre, le changement climatique… Grâce à notre réseau de 46 points de projection en Alsace et Lorraine, le festival s’affirme de plus en plus comme lieu de débat. Nos focus thématiques permettent échanges et discussions.

Pourquoi Marlene Dietrich en tête d’affiche ?

Marlene Dietrich est le symbole de la résistance contre le régime nazi. Elle se bat contre la simplification idéologique. Cette année, le festival Il Cinema Ritrovato de Bologne a projeté les versions restaurées de ses films. Nous allons présenter L’Ange bleu et Shanghaï Express de Josef von Sternberg ainsi que La Scandaleuse de Berlin de Billy Wilder.

D’autres films, contemporains, font-ils écho à la montée de l’extrémisme de droite que le monde connaît aujourd’hui ?

Favoriten est, paradoxalement, le nom d’un des quartiers les plus défavorisés de Vienne. C’est également le titre du documentaire de Ruth Beckermann – une des invité·es d’honneur – où la cinéaste suit les enfants d’une classe d’école primaire, issus de familles immigrées. Elle adopte le regard de l’enseignante, animée par son métier, qui amène les jeunes dans des églises ou des mosquées, des endroits dans lesquels on prêche une parole. Ruth Beckermann donne ensuite la parole à ces petits qui ont hérité d’une situation politique léguée par les adultes.

Pourquoi une carte blanche à Didier Eribon, auteur de Retour à Reims ou de Réflexions sur la question gay ?

C’est une des nouveautés du festival : offrir un espace d’expression à une personnalité – écrivain, philosophe et sociologue dans le cas d’Eribon –hors du champ cinématographique. Il questionne la notion de transfuge de classe ou la condition gay et a choisi quatre films : Le Cercle, Deux, Great Freedom et L’Innocence. Un quatuor cinématographique et une multiplicité de points de départ à des discussions autour de la notion de « morale du minoritaire ».

20 ans : comment expliquer cette longévité ?

Le festival a été créé à Guebwiller par Claude Brasseur, exploitant homonyme du célèbre comédien. Tout est parti de cette unique salle et aujourd’hui le réseau de plus de 40 communes couvre tout le territoire. Si Augenblick dépasse les frontières du cinéma strictement germanophone, l’ancrage territorial demeure sa colonne vertébrale avec 50 000 scolaires par an qui viennent assister à des séances en compagnie de leurs professeurs d’allemand. Cette fidélité explique en grande partie le succès de l’événement.

La Culture — Musique L’Hypersensible Gringe sort un nouvel album et passe par chez nous pour diffuser son « Bad Mood » comme ses « Pensées positives ». Entretien avec un rappeur qui ne veut «  pas passer sa vie dans le dark ».

Hypersensible, c’est passer facilement du rire aux larmes ? C’est plutôt un état permanent chez moi. Constant. J’ai comme une petite éponge en moi et lorsque je l’essore, en sortent des morceaux de musique, des films, des livres…

Les dépressifs sont des hypersensibles ?

Les deux sont liés, sans doute, mais la dépression est une maladie. Ma sensibilité a fait que j’ai écouté la petite voix intérieure qui me disait : « Let’s go ! Tu dois accepter de sombrer, te noyer, pour t’en sortir. »

Hier, c’est loin

La couv de ton album est un clin d’œil à Judith décapitant Holopherne… C’est une idée commune de Lou Escobar, photographe espagnole, et moi. Ma tête coupée est une métaphore : nos êtres qu’on détache de leurs émotions. Pourquoi cette distanciation, favorisée par les réseaux sociaux ? Je pose cette question au début du disque et j’essaye d’y répondre à la fin. Nous vivons une époque d’ombres et de lumières, où résurgent les extrêmes.

Sur « Du plomb » tu dis ne plus te reconnaître dans ton propre pays… Je ne suis pas politisé, mais j’ai grandi dans les années 80 auprès d’une mère assistante sociale et d’un père qui travaillait avec Michel Rocard. En termes de progrès, la période actuelle fait bien flipper ! La thune devrait aller dans les hôpitaux ou les écoles, dans le bien commun plutôt que dans les poches des riches. On est du charbon pour la locomotive !

Ça te semble loin, Comment c’est loin ? Mes débuts, Casseurs Flowters avec Orelsan, mon adulescence… Oui, tout ça me semble bien loin. J’ai de la tendresse pour ces moments, mais pas de nostalgie. Aujourd’hui, je suis heureusement plus mature, dans mes amours ou mes engagements, notamment auprès de l’association La Maison perchée qui accompagne les jeunes adultes ayant un trouble psychique.

Il y a un rapport avec ton frère ? Oui, c’est en lien avec la schizophrénie de Thibault sur qui j’ai écrit un livre, Ensemble, on aboie en silence.

Une maison perchée : un endroit idéal pour « Couler des jours heureux » ? Le lieu rêvé ? Une île déserte ensoleillée, avec ma chérie. Et de la musique : Boys Don’t Cry de Cure. Et aussi un truc à fumer…

08.11

Au Point d’Eau d’Ostwald (concert organisé par La Laiterie) artefact.org

© Kristijonas Lučinskas

La Culture — Arts La compagnie strasbourgeoise Conférence pour les Arbres se prépare à la fin d’une ère. À la tâche à venir (celle d’enterrer le monde)  : un récit anxieux mais clairvoyant sur l’effondrement d’un modèle à réinventer… au bord du gouffre. Par

Melancholia

Après Crapalachia , adaptation du roman éponyme de Scott McClanahan où la compagnie se demandait « si on peut s’entraîner à la perte », la pièce À la tâche à venir (celle d’enterrer le monde) continue « à tenter d’expérimenter de nouvelles manières d’exister au sein d’un monde qui glisse vers sa fin ». Allons-nous à notre perte ? Tout droit dans le mur de la crise sanitaire (quel sera le prochain virus ?), politique (virage à droite toute), climatique (chaud devant !), économique (pas d’alternative au système capitaliste) ? Mécistée Rhea et Eli Bertrand (mise en scène) nous parlent de « micro-effondrements », d’un effet domino de désastres qu’on ne résoudra pas forcément, mais qu’il convient d’anticiper toutes et tous ensemble – la compagnie, constituée de personnes handicapées, trans ou queers, se veut résolument inclusive. Mécistée et Eli, d’une seule voix : « Il faut revendiquer sa vulnérabilité et se rendre à l’évidence : il n’y aura pas de miracle, de Deus ex machina . Alors, prenons-nous la main et réfléchissons à quoi nous devons dire au revoir. » Le spectacle a lieu dans une forêt, sur une scène circulaire autour de laquelle le public est assis, assistant à dialogues et gestes de trois binômes d’adelphes (Cécile Mourier et Mécistée Rhea), durant trois tableaux différents, à des époques différentes. En cercle et en musique electro jouée live, dans la pénombre percée d’un discret signal lumineux, nous allons collégialement apprendre à « digérer le deuil de ce que nous sommes en train de perdre et construire un message à passer à ceux qui viendront après ».

21 + 22.11

La Pokop, salle de spectacle Paul Collomp lapokop.fr

15.11

Le texte de la pièce (de Mécistée Rhea et Nanténé Traoré) aux éditions Gorge bleue gorgebleue.fr

La compagnie a bénéficié du dispositif d’accompagnement de l’incubateur Fluxus  fluxus-incubateur.fr

Inconditionnelles

5 – 15 nov. 2024

Kae Tempest Dorothée Munyaneza

La Culture — Exposition Il a commencé par envoyer ses «  opérateurs  » sillonner l’Alsace avant d’organiser des missions photographiques aux quatre coins du monde. La Bnu expose une partie des archives d’Albert Kahn. Par Emmanuel Dosda

Banquier visionnaire

Jusqu’au 6.01.25

Bibliothèque nationale et universitaire, dans le cadre de la programmation de l’année Strasbourg

Capitale mondiale du livre de l’UNESCO bnu.fr

Tôkyô, Epiciers à l’entrée de leur boutique, devant laquelle sont exposés des fûts de bière, de « miso », de saké et du charbon de bois, Roger Dumas, Mission : 1926-1927 Japon – Inv. A68627X, Département des Hauts-de-SeineMusée départemental Albert Kahn –Collection des Archives de la Planète

-> Al-Minyah, vendeur ambulant, Auguste Léon, Mission : 1914 Egypte – Inv. A3491, Département des Hauts-de-Seine-Musée départemental Albert Kahn –Collection des Archives de la Planète

Homme d’affaires altruiste. Financier philanthrope. Des oxymores  ? Il y a des perles rares dont fit partie Albert Kahn, né à Marmoutier en 1860. Homme discret et humble, il ne claque pas son argent dans des achats bling-bling, mais se lance dans un avant-gardiste projet : celui d’archiver le monde – costumes et coutumes – du début du xxe siècle avant que la mondialisation galopante n’efface tout. Ses missions photographiques s’arrêteront aux années 30, le krach boursier entraînant sa ruine. Il finira dans la fosse commune… Heureusement, un musée départemental dédié à la conservation de sa fantastique entreprise humaniste a récemment ouvert ses portes à Boulogne-Billancourt : u ne visite s’impose. Mais d’abord, rendez-vous à la Bnu pour le road trip De l’Alsace au monde. Voyage dans les Archives de la Planète d’Albert Kahn. Benoît Wirrmann, un des commissaires de l’exposition, évoque un « progressiste » qui œuvre

pour «  la concorde entre les peuples  ». Jérôme Schweitzer, autre responsable de cet hommage, dit de l’encyclopédiste Kahn qu’il « nous invite à la réflexion par la contemplation d’un monde disparu mais porteur de nombreuses questions pour notre époque ». Plaques autochromes, agrandissements de photographies, films tournés en France, mais aussi en Palestine, au Liban, en Inde ou en Chine… dans une magnifique scénographie sous forme de périple autour de la terre. Une belle mise en valeur de la vision « pacifiste et universaliste » d’Albert Kahn.

55 chroniques

4 entretiens (Jean-Louis Comolli, Alain Cuny, Paul Gégauff, Martin Scorsese)

157 photographies

25 illustrations

En librairie depuis le 13 septembre

260 pages — Prix 33 €

Retrouvez toutes nos parutions sur shop.chicmedias.com ainsi qu’à La Vitrine

14, rue Sainte-Hélène — Strasbourg

VRP / Vincent Roget

Au générique

Georges Bataille, Shirley Clarke, Georges Franju, Jean-Luc Godard, Alfred Hitchcock, Roy Lichtenstein, Joseph Losey, Les frères Lumière, Stéphane Mallarmé, Nanni Moretti, Saul Steinberg, Orson Welles...

De décembre 1991 à l’été 1997, la revue Limelight, créée à Strasbourg, a exploré avec impertinence les sentiers de la culture contemporaine (60 numéros). Un format à l’italienne, celui du grand écran, un look référenciel jaune et noir, entre les Cahiers et la Série noire… une volonté de s’affranchir le plus possible de l’actualité et du discours critique au profit de la diversité, des rencontres.

André S. Labarthe était une des figures les plus singulières, les plus inclassables de la critique et du cinéma français.

en bref La culture

Mode d’emploi Jusqu’au 1er juin 2025

MAMCS musees.strasbourg.eu

① Michel Blazy, Mur de pellicules (rouges), 2011-2015, Agar-agar, eau et colorant alimentaire.

Centre Pompidou, Paris, Musée national d’art moderne – Centre de création industrielle.

Photo : M. Bertola, Musées de Strasbourg © ADAGP, Paris 2024

② Claire Morel, x hab / m2, 2013, Installation murale composée de pages de dédicaces. 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine.

Photo : M. Bertola, Musées de Strasbourg © ADAGP, Paris 2024

③ Erwin Wurm, One minute sculpture Sculpture : Untitled (Double), 2002. Œuvre à protocole, technique mixte. Coll. [mac] musée d’art contemporain de Marseille.

Photo : M. Bertola, Musées de Strasbourg © ADAGP, Paris 2024.

Do it yoursef ! Les pièces expos ées au MAMCS n’ont souvent nécessité qu’un simple envoi de fichier PDF par mail. Les mots de Lawrence Weiner, les partitions de John Cage, les instructions d’Erwin Wurm, les règles du jeu dictées par Yoko Ono, les méthodologies de Kader Attia… À partir de protocoles définis, les œuvres – « résultant d’une intelligence collective », selon Anna Millers, co-commissaire – sont réalisé es et activées par les équipes techniques et les visiteurs in situ . Elles sont matérialisées physiquement par des « délégués » ou même simplement construites mentalement dans l’esprit du « spectacteur ». Bilan carbone, open source, créativité partagée, fablabs, philosophie DIY, hospitalité, poésie de l’ éphémère , recyclage, décroissance, démarche participative, questionnement du statut d’artiste… Ce glossaire hyper contemporain appara ît dès les sixties de Fluxus (voire même dès le début du xxe de Duchamp). Avec Philippe Bettinelli du Centre Pompidou, Anna Millers, conservatrice au MAMCS, « dresse un panorama historique des œuvres à protocoles. Tous les créateurs “patrimoniaux” rassemblés ici savaient déjà, hier, ce dont on aurait besoin aujourd’hui. Leurs concepts ont largement infusé. » Parmi le large corpus présenté au musée strasbourgeois, la liste de 100 œuvres d’art impossibles (2001) de Dora Garcia. Suivons le mode d’emploi. 45 - Combler un abîme. 52 - Transpirer de l’or. 79Bâtir un espace infini. 100 - Rien.

Inconditionnelles

6 → 13 novembre

Théâtre national de Strasbourg tns.fr

D’abord, il y a la rencontre de deux univers résolument modernes, engagés, militants, volcaniques. Deux figures incontestées de la culture contemporaine, Dorothée Munyaneza et Kae Tempest, artistes touche-à-tout – poésie, musique, littérature, théâtre, toujours le poing levé et les tripes à nu. Pour l’un·e comme pour l’autre, les mots et les notes résonnent à l’international depuis déjà plusieurs années. En 2020, la première s’attaque à la traduction, en français, de Hopelessly Devoted, une pièce ardente sur l’amour inconditionnel écrite par lae second e cinq ans auparavant. Aujourd’hui, la metteuse en scène rwandaise et britannique adapte sa traduction sur les planches, en ajoutant la danse au chant pour une lecture intensément vivante. Car c’est

à travers la musique que les histoires se forgent, se meuvent et se perdent dans cette pièce. C’est donc par la musique que Dorothée Munyaneza, en proche collaboration avec le compositeur Ben LaMar Gay, cherche à développer le canevas initial de l’œuvre de Kae Tempest : dans une prison pour femmes, Chess purge une longue peine pour homicide. Là, elle rencontre son âme sœur, Serena. L’amour est puissant, à faire trembler les murs, oublier le passé, rêver d’avenir. Mais quand Serena est mise en liberté conditionnelle, Chess craint de tout perdre. À contrecœur, elle participe à un cours de musique pour soigner les blessures ouvertes et le cœur qui saigne. Un moment de grâce d’une beauté rare et désarmante.

Ariodante

5 → 15 novembre

Opéra national du Rhin operanationaldurhin.eu

Par Aurélie Vautrin

Après avoir révélé au public alsacien la virtuosité du Polifemo de Nicola Porpora la saison passée, c’est désormais son grand rival à la cour de Londres qui est à l’honneur à l’OnR : Georg Friedrich Haendel. En 1735, les deux compositeurs étaient en effet de farouches adversaires ; et cet antagonisme donna lieu à la création d’œuvres mémorables – Ariodante fut d’ailleurs joué en même temps que Polifemo dans les théâtres de la ville. Tiré d ’un épisode d ’Orlando furioso, la fameuse épopée chevaleresque de l ’Arioste, Ariodante n’évoque pourtant pas la magie ou les créatures fantastiques, mais des personnages profondément humains, dont les passions flirtent avec la monstruosité. Partant de cette dimension psychologique forte, la metteuse en scène hollandaise Jetske Mijnssen fait de la cour du roi d’Écosse dépeinte dans le livret d ’Antonio Salvi une seule et même famille royale, rongée par la loi du silence, les secrets et les jalousies. Grand spécialiste de la musique baroque, Christopher Moulds dirige ce huis clos haletant, avec dans le rôle-titre la jeune mezzo-soprano française Adèle Charvet, que les spectateurs de l’OnR connaissent bien après son interprétation poignante d’Hélène Berr en 2023. Ariodante est un opéra rayonnant, empreint d’une profonde expressivité et d’une intense émotion, qui oscille entre des airs de bravoure éblouissants et des lamenti bouleversants, parmi lesquels se trouve sans doute l’un des plus beaux de Haendel, « Scherza infida ».

© Sarah Martinon

Embrasser les cendres

5 → 7 novembre

TJP (Petite scène) tjp-strasbourg.com

Une plongée dans les mémoires païennes lituaniennes, pleines de magie et de sorcellerie... Renaud Herbin, ancien directeur du TJP, revisite l’histoire de la ville de Klaipėda à l’invitation du seul théâtre de marionnettes professionnel de l’ouest de la Lituanie. Avec la complicité de la dramaturge lituanienne Lina Laura Švedaitė, il a co écrit une micro-fresque panoramique et universelle faite de récits disparates. Cette terre connectée aux croyances populaires et païennes a connu le nazisme, l’occupation russe et le régime soviétique. Il existe un mythe selon lequel il ne restait officiellement à Klaipėda, après la Seconde Guerre mondiale, qu’un seul citoyen. « L’image de ce seul être humain au milieu des ruines est puissante et semble incarner un motif récurrent de notre histoire contemporaine », explique Renaud Herbin. «  Comment renaître de ses cendres après la défaite, après la fin ? » Sur scène, deux acteurs manipulent 18 marionnettes à fils. « Grâce à sa puissance évocatrice et

métaphorique, la marionnette est un bon moyen pour aborder les histoires des humains, leurs déchirements et leurs jeux de pouvoir », affirme l’auteur qui n’hésite pas à convoquer l’humour ou l’absurde dans cette pièce. Pour le public ce sera l’occasion de porter l’attention sur ce pan de l’histoire européenne en se questionnant sur son héritage

Spectacle en lituanien surtitré en français et en anglais, recommandé à partir de 10 ans. Dans le cadre de la saison de la Lituanie en France 2024.

GRAINS ②

Compagnie Simon Feltz 5 → 6 décembre

POLE-SUD

pole-sud.fr

Par Fanny Laemmel

Toutes

les nuits tu restais là ①

Jusqu’au 22 décembre

La Filature de Mulhouse lafilature.org

Olivier Metzger nous manque. C’était un photographe brillant. Une personne douce. Un collaborateur en or. Un compagnon de route… Diplômé de l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles il y a tout juste vingt ans, Olivier nous a quittés il y a deux ans, laissant derrière lui une trop courte mais belle carrière. Les pages de Zut, bien sûr, mais aussi celles de Libé, Le Monde, Télérama, Elle ou encore du New York Times. Au sujet de ses clichés, on parle de dramaturgie, de climat lynchéen (le maestro adorait ses photographies), d’ambiances curieuses, de jeux de lumière baroques… Toutes les nuits, Olivier restait là. Il captait les lueurs dans le noir. Comme un chasseur d’étoiles.

Festival Format(s)

4 octobre → 17 novembre

Shadok, Palais universitaire, La Chaufferie, BNU, Garage Coop… formats-festival.org centralvapeur.org

Par Emmanuel Dosda

Troisième édition de FORMAT(S), festival de design graphique ayant lieu un peu partout à Strasbourg. Sculptures numériques, affiches récentes de la collection de Chaumont, beaux livres suisses (un gage de qualité), multiples d’artistes… Ateliers de risographie ou d’impression et d’expérimentation, tables rondes, expositions, conférences… Selon l’équipe de FORMAT(S), « le festival met en valeur les designers locaux, nationaux et européens »

La première année, l’équipe a confié sa communication graphique à Hugo Feist (Horstaxe) et Maxime Pintadu (Cercle studio), puis au collectif dijonnais L’Atelier Tout va bien. « Cette année, nous souhaitions mettre en valeur le studio bâlois Tristesse » qui porte mal son nom : couleurs franches, typos qui claquent, clins d’œil fendards …

Le point d’orgue : le salon graphique au Garage Coop avec les ouvrages des éditions 205, B42 ou Poem.

Simon Feltz continue son étude des interactions entre langage et corporalité. Pour GRAINS , il se concentre sur un moment spécifique : la première rencontre charnelle. « Il y a un phénomène commun à tout le monde, qui se produit quand on a une première interaction avec quelqu’un : on va utiliser des mots, pour draguer en phase de séduction par exemple, et à mesure que le rapprochement des corps va se faire, cela va créer des bugs, des silences dans la communication verbale », explique le chorégraphe. La parole diminue alors jusqu’à quasiment disparaître. Dans la pièce, cela se traduit par des corps qui se frôlent, s’enlacent, s’embrassent. Les tableaux sont sensuels, érotiques même, la pièce est d’ailleurs recommandée aux plus de 16 ans. Mais la voix ne disparaît pas pour autant, et le sextet de danseurs, équipés de micros, s’exprime autant par le corps que par les sons : râles, cris, mots doux. Simon Feltz a passé cinq ans comme interprète au Ballet de l’Opéra de Lyon et a collaboré avec de nombreux chorégraphes. Ses inspirations : William Forsythe, « parti de l’académisme pour amener ses pièces vers quelque chose de très contemporain  », Maud Le Pladec pour son rapport à la musique et sa façon d’élaborer une partition, ou encore Maguy Marin, qui demande « de l’ultra précision dans les gestes du quotidien ». Son ambition à lui avec cette pièce : « Tendre un miroir au public pour montrer qu’on est pareil. »

Dirty Rains

Jusqu’au 23 février

CEAAC

ceaac.org

Le duo show Marianne Marić / Endre Tót s’imposait pour Alice Motard, directrice du CEAAC et commissaire de l’exposition Dirty Rains . L’artiste alsacienne (née en 1982) et le senior hongrois (né en 1937) questionne l’espace public, ce qu’on peut y faire et y dire. Ce qui y est proscrit. « Pour Marić, il est le lieu de la représentation. Pour Tót, il est le lieu de l’expression. » Leur terrain de jeu commun ? Budapest. Celui d’hier (depuis les seventies) et celui d’aujourd’hui. Dans l’exposition, dialoguent photos de Endre Tót brandissant des pancartes qui revendiquent le fait d’ être « joyeux » et les « Femmes fontaines » de Marianne Marić, la série de rideaux de pluie faits de « //// » de Tót et les clichés volés de dames au bain de Marić. Pour celle-ci, les thermes de Budapest sont « des hauts lieux politiques où l’on peut parler secrètement ». Dirty Rains : un échange « fluide » entre deux générations d’artistes.

Marianne Marić, Easter Dance, Budapest, 2023. © Adagp, Paris, 2024.

Jazzdor

8 → 22 novembre

Strasbourg (divers lieux), Bischwiller (MAC) ou Offenbourg (Reithalle)

Par Emmanuel Dosda

Marc Ribot, Avishai Cohen, Loco Cello & Biréli Lagrène, Joachim Kühn… Pour sa dernière programmation, Philippe Ochem, directeur de Jazzdor, a mis les petits plats dans les grands. La curiosité space de cette édition ? Le trio guitare/trompette/batterie La Main au Planétarium.

Archifoto

→ 10 novembre

La Chambre

Par Emmanuel Dosda

Dans le cadre des Journées de l’architecture, La Chambre expose des clichés mettant en lumière l’« architecture en chantier », thématique de la nouvelle édition des JA (jusqu’au 31 octobre). Les lauréats cette année ? Cyrus Cornut, Céline Clanet ou Timo Jacobi. Coup de cœur pour Cyrille Lallement et pour les murs, les marquages au sol et autres délimitations de chantier d’Elli Lotz.

Ida Nielsen et ses Funkbots

18 + 19 novembre

Cheval Blanc de Schiltigheim

Par Martin Van Klaveren

Schiltigheim met le funk à l’honneur avec Ida Nielsen, ex-bassiste de Prince, et ses Funkbots. À l ’horizon couleur pourpre, un concert explosif de groove et beats robotiques, un remède imparable contre la morosité, une invitation à danser jusqu’ à l ’ épuisement sous le slap de la basse.

10 jours avec Milo Rau

21 novembre → 1er décembre

Le Maillon

Par Emmanuel Dosda

Spectacles, rencontres, projections ( Le Nouvel Évangile), lectures (extraits de Vers un réalisme global ), brunch... Le Maillon convie les spectateurs à passer une dizaine de jours en compagnie du metteur en scène suisse Milo Rau. L’occasion de vivre la révolte paysanne brésilienne, sévèrement réprimée par l’État, avec Antigone in the Amazon. Ou de revisiter le mythe meurtrier des Medea’s Children.

Oratorio pour Billie

26 → 30 novembre

TAPS Laiterie

Par Lisa Canastra

Pourquoi une personne choisit-elle l’exil ?

La pièce Oratorio pour Billie d’Amaury

Ballet et Julien Liard, réunit deux actrices, un acteur et un batteur. Les quatre interprètes sont les messagers, les narrateurs qui reconstituent l’histoire de Billie sur un cargo. Voyageuse clandestine, elle se croyait délivrée jusqu’ à ce qu’elle découvre que la misère l’accompagne à bord.

Carte Blanche à Rodolphe Burger

28 novembre

Salle du Cercle à Bischheim

Par Martin Van Klaveren

Rodolphe Burger et Julien Perraudeau revisitent l’album Radioactivity de Kraftwerk avec des sons saturés et synthétiques. Ce même soir dédié aux covers, Sarah Murcia et Fanny de Chaillé réinterprèteront Transformer de Lou Reed en version minimaliste. Deux hommages musicaux inédits.

ST-ART

29 novembre → 1er décembre

Parc des expositions de Strasbourg st-art.com

« La foire d’art contemporain avait initialement débuté avec l’art verrier », nous confie Carole Schaller, responsable commerciale de l’événement. «  Nous avons eu envie de revenir à ce matériau qui, je pense, a toujours un attrait pour les collectionneurs et les novices.  » À cette occasion, le musée Lalique et le Centre international d’art verrier de Meisenthal seront présents avec des créations de leurs collections. On pourra y voir des rééditions d’œuvres imaginées par René Lalique et quelques collabs, notamment avec Zaha Hadid. Les arts du feu seront aussi à l’honneur du côté des galeristes avec Christine Colon qui présentera l’artiste Lise Gonthier et Mhaata qui exposera le Belge Bernard Tirtiaux. La Belgique est d’ailleurs le pays invité cette année, avec entre autres la Guy Pieters Gallery, fidèle de ST-ART. À noter, la présence de l’Espace Constantin Chariot dont la galerie vient d’ouvrir en Belgique. La foire comptera une soixantaine de galeries.

Les super actus

October Tone Parties

24 → 26 octobre

Péniche mécanique et Molodoï

Par Emmanuel Dosda

Le meilleur label strasbourgeois du monde fait la fête trois jours durant, avec des artistes maison – BBCC, Tioklu, KG, Amor Blitz – et des figures de l’international underground : les dingos de Marteaux Collective, les troubles La Houle ou les « carpenterriens » Zombie Zombie.

→ Conseils en décoration, architecture d'intérieur,

ARCHITECTURE INTÉRIEURE coordination des travaux. restaurants, commerces et lieux publics.

→ Décoration et agencement de bureaux, hôtels,

SHOWROOM

(Sur rendez-vous toute la semaine)

7A, rue du Relais Postal à Benfeld 09 81 19 87 49 | 06 49 82 91 34 www.lamaisonliegeon.com

Le Style

L’Aura atemporelle En touchant le vermillon Diamant en poche Sept fois à terre.

ÉPIDERME

RÉALISATION MYRIAM DELON PHOTOGRAPHE CÉCILE JACQUOT

CLASSIQUE

On ne va pas se le cacher, revenir aux fondamentaux est de saison.

Chemise et pantalon Liviana Conti , manchette Angela Caputi , le tout
chez Revenge Hom. Chaussettes blanches Uniqlo. Chaussettes rouges COS Mocassins Saint Laurent chez Ultima.
Sac, mini robe Triomphe en jersey de laine et bottes caoutchouc Celine chez Ultima. Chaussettes Uniqlo
Chemise, pantalon et écharpe en laine XXL Ipsae. Bottes Chloé chez Ultima.
Pull et jupe longue en lainage côtelé
Liviana Conti chez Revenge Hom et deux sacs pochettes en cuir et reptile Revenge Hom
Pull sans manches et chemise MM6
chez Ultima. Bonnet en cuir Globaljo
Manteau, pantalon en satin et pull Ipsae Bottes Chloé chez Ultima.
Trench, pull, jupe plissée et bottes caoutchouc Burberry chez Ultima.
Chaise Saya Arper chez decoburo.
Trench Burberry chez Ultima. Broche crabe en or jaune pavé de diamants et pendentif transformable en broche, en laque noire et or jaune pavé de diamants Jacquot Joaillerie
Gilet sans manches et pantalon en maille jacquard Siyu chez Marbre. Chaise Saya Arper chez decoburo.

Coiffure

Assistants

Assistant

Post-production

Mannequin Magda / upmodels.fr
Maquillage Stéphanie / École Candice Mack
Alexandre Lesmes / Avila
Lisa Canastra + Martin Van Klaveren
photo William Henrion / Preview
Emmanuel Van Hecke / Preview
Lieu Studio photo Preview Imagemaker
Veste en coton huilé Barbour et casquette Paul Smith chez Marbre.
Sac Consuelo Il Bisonte chez Marbre. Collier en perles Keshis, bracelet rivière de diamants et boucles d’oreilles Givre en or jaune et perles baroques Eric Humbert

Âme de diamant

Entre Strasbourg et Milan est né un joyau, fruit d’une collaboration unique entre la joaillerie Jacquot et la maison Buccellati.

Pleins feux sur une pièce de haute joaillerie parée d’un diamant d’une grande pureté et des techniques d’ennoblissement les plus rares. En ligne de mire, un diamant faisant partie des 2 % des gemmes les plus pures au monde, acquis en 2021 par la joaillerie Jacquot puis proposé à la maison milanaise : « Il fallait l’audace de mettre en stock une telle pierre et de convaincre Buccellati de collaborer avec nous. » Au final, quatre dessins leur furent présentés, dont celui d’un pendentif s’inscrivant dans leur iconique collection « Tulle » : « Une pièce si puissante et expressive, avec ce jeu de matité et de brillance si propre à Buccellati, que faire ce choix fut d’emblée pour nous une évidence. » Puis c’est entre les mains des artisans Buccellati, héritiers des techniques ancestrales et du savoir-faire de la Renaissance, qu’un travail d’une minutie extrême a débuté, perçant à la main de fines feuilles d’or sur lesquelles le motif de dentelle fut ensuite tracé pour obtenir le plus petit et le plus exquis des motifs. L’écrin de rêve pour ce diamant taille poire révélant un feu optimal, catalyseur de toutes les attentions. Une pièce remarquable, qui n’est pas sans évoquer un autre chef-d’œuvre, situé à quelques pas de la joaillerie Jacquot : la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg et sa sublime robe de dentelle en grès rose, ce « prodige du gigantesque et du délicat » comme l’écrivit Victor Hugo.

Jacquot – 10, rue du Dôme jacquot-horloger.com

Ipsae - 35, quai des Bateliers - Strasbourg - 03 88 52 13 55

Boutique

Mode radar

Revisite Cette saison, chez Tagliatore, le duffle-coat s’est lifté en manteau chic et minimaliste, gardant tout de même deux marqueurs forts de son identité originelle : ses boutons brandebourgs et son drap de laine protecteur, à choisir en noir ou à carreaux.

Revenge Hom – 4, rue du Fossé-des-Tailleurs revenge-hom.com

Chuncky Exit les sneakers, le statement du moment c’est ce moc Prada ou rien. Avec une semelle épaisse pour rehausser l’allure.

Ultima Homme – 16, rue de la Mésange ultimamode.com

À cœur

Fraîchement inaugurée, « La Designer Galerie » des Galeries Lafayette dessine avec assurance l’allure contemporaine, donnant à son étage masculin des airs de capitale. À la clé ? Du Ami (photo), Courrèges, CP Company, Isabel Marant, Jacquemus, JW Anderson, Lemaire, MM6, Officine Générale, Sporty & Rich et le label sud-coréen Wooyoungmi. Trendy et mixte.

Galeries Lafayette - 34, rue du 22 Novembre galerieslafayette.com

Une nouvelle histoire…

Closed

Seven For All Mankind

Lis Lareida

Paul Smith

Alberto Biani

Herno

Gran Sasso

Barbour

Rosso

Pierre Louis Mascia

Plaidoyer Pour transporter vos avocats ou autres gros légumes, ce tote bag unisexe A.P.C. à carreaux gris et beige en laine et matière recyclée effet cuir.

apc.fr

Starification La chaussette est à son apogée, dans des mocassins ou avec des slingbacks. C’est aussi l’incontournable des frimas revenus, mais de préférence une paire tricotée dans les Vosges ! Le détail mode aimant aussi la proximité. bleuforet.fr

Front row Le tailleur ne fait-il pas partie des pièces les plus désirables du vestiaire féminin ? Une évidence pour Alain Schellenberg, responsable du showroom strasbourgeois Blandin & Delloye, prescripteur d’un tailoring masculin sur mesure mais abordable, construit autour d’une maîtrise avancée du patronage et des meilleurs drapiers italiens et anglais. Trois années de recherches ont été nécessaires pour s’adapter à la morphologie féminine ; en résulte des déclinaisons infinies de matières et couleurs, des hauteurs de taille de pantalons, de basse à mi-haute, tout comme les coupes des vestes… et l’attitude.

Blandin & Delloye - 10, rue Sainte-Hélène 09 77 52 49 81 / Uniquement sur rendez-vous. blandindelloye.com

Sept préludes automnaux

Cultivons

la sérendipité Avec leurs formes architecturées à fort pouvoir émotionnel, les contenants écrins de la collection Cabane de Thomas Roger magnifient l’art de la chute. Le bois utilisé n’est jamais « contrarié », chaque planche manufacturée, issue de ressourceries et de menuiseries alsaciennes, est travaillée de sorte à révéler la richesse de ce matériau vivant et la « personnalité » de l’arbre. Puis fendue, burinée, lissée, poncée et cirée selon des techniques artisanales, chaque

L’arrière-saison nous susurre : « Entourez-vous de ces objets sensitifs et bien faits, quand les portes se referment et que l’été s’effeuille. » Et le b.a.-ba du décor sera posé.

planche s’accorde ensuite à une autre dans une imbrication aléatoire. À découvrir, ses autres collections, toutes à la croisée de l’objet d’art, du design, de l’artisanat et du territoire où elles sont conçues. -> Panier collection Cabane, pièce unique (17 x 28 x H 26 cm), bois chêne, châtaignier, manche hêtre, chevilles bambou et bouleau, cire de Carnauba. E-shop : thomasroger-shop.com — thomas-roger.com

Planons soyeux Il y a ce qui nous relie et nous soutient. À l’instar des tissus mous qui entourent les différents organes du corps humain et du dernier album des Tindersticks Soft Tissue, avec sa pochette de laine aussi feutrée que la voix enveloppante de l’élégant Stuart A. Staples. À écouter en boucle.

Album Soft Tissue, Tindersticks, City Slang

Dialoguons avec le brut Esther Kiner, céramiste française installée à Bâle, est fascinée par l’architecture brutaliste et les espaces alpins. Ses pièces en témoignent, comme ce chandelier en grès rouge de bourgogne, recouvert d’engobe à base de kaolin et d'oxydes métalliques, façonné dans la masse selon une technique intuitive prônant le lâcher-prise. À retrouver du 7 au 11 novembre à Strasbourg, dans le cadre du salon Résonance(s) sur le stand de l’IEAC, l’Institut Européen des Arts Céramiques de Guebwiller.

kiner-ceramics.com

Adoptons l’hyperbowl Ce bol conique en grès artisanal du céramiste mulhousien Giom Von Birgitta est le contenant idéal pour vos veggie bowls, rainbow bowls, detox bowls et tous les méga bowls réconfortants à venir.

E-shop : giomvonbirgitta.com

Méditons sur l’odeur du monde Plonger dans l’univers Mad et Len et frôler l’addiction pour les senteurs brutes de leurs bougies en cire végétale ou celles de leurs pots-pourris lovés dans des pots en acier noirci par le feu.

Galerie Fou du Roi – 4, rue du Faisan – fouduroi.eu

Célébrons le choc Pour fêter ses 10 ans, la chocolaterie Henner Frères lance sa galerie de tablettes maison : des carreaux de chocolat – redéfinis de tailles aléatoires rappelant la géométrie du tissu Kelsch – aux étuis illustrés par douze artistes de la région (en photo Anne-Sophie Tschiegg), tout est à croquer.

Henner Frères – 55, rue Boecklin – 03 88 66 41 21

E-shop : henner-freres.fr

Soyons (d)eco-friendly Avec sa nouvelle coque en PaperShell, un biomatériau révolutionnaire, l’incontournable chaise Catifa Carta de l’éditeur italien Arper nous bluffe avec son assise entièrement recyclée et recyclable. L’occasion pour le showroom decoburo, distributeur de la marque ainsi que de l’iconique système suisse USM Haller (lui-même engagé dans le développement de produits recyclables), de témoigner de son engagement pour une production respectueuse de l’environnement, en organisant cet automne des rencontres sous le signe du développement durable. Destinés aux architectes, décorateurs et designers, ces échanges se dérouleront lors de petits déjeuners ou de pauses apéritives en présence de représentants des deux maisons. -> Rencontres Arper & USM Haller, les 13, 14 et 15 novembre chez decoburo de 9 h à 11 h et de 17 h à 19 h le mercredi et le jeudi, ainsi que de 9 h à 11 h le vendredi. Sur inscription uniquement, par téléphone ou par mail : deborah.klintz@decoburo.com decoburo – 13, rue du Vieux-Marché-aux-Vins – 03 88 68 54 36

Chaise Catifa Carta (2001), Collection Extension 2024 , design Lievore Altherr Molina chez decoburo.

Mar. → Sam. 10H / 19H uniquement sur RDV

La Table

Souvenir de crevettes pailletées Au coin du feu

Se caparaçonner Pot de terre en éclats.

La Table — Chronique C’est fini l’été ? Oh oui, et pas qu’un peu. Alors pour ramener un peu de son soleil, ravivons nos souvenirs, plongeons dans nos mémoires et émerveillons-nous devant nos trésors de vacances précieusement conservés.

Été encapsulé

En anglais, on appelle les «  natures mortes  », « still life ». Tout le contraire de la traduction littérale des mots français : chez les Anglo-Saxons rien de mort, mais la vie, toujours, encore ! Alors nous aussi restons inspirés et joyeux en faisant des natures vivantes. Valorisons notre alimentation dans toute sa diversité et pas seulement gustative. Chargée d’ émotions et de riches complexités (formelles, odorantes, magiques même), fêtons la vie à travers elle et encapsulons le tout pour s’en souvenir longtemps !

Pause

En hommage à l’artiste polonais Grzegorz Przyborek et à son exposition Toucher le silence actuellement visible au Centre photographique de Marseille (oui je vous donne des tips pour être au plus près du soleil, encore un petit peu ! ), je vous invite à figer votre table estivale. Le cliché de lui que je préfère consiste en ce set de table, ce bol, ce croissant, cette cuillère… en élévation. Il y arrive grâce à un petit bricolage accessible

à tous (regardez sur le net). Sa magie, son génie fabriquent avec rien un calme absolu et cette scène banale – immortalisée en noir et blanc –, on pourrait la regarder un mois entier.

Nous aussi, mettons la food en pause pour la voir autrement : elle en a marre de finir découpée, cuite à la vapeur, frite ou brûlée (parce que vous n’ êtes pas attentif), puis mâchée ! Regardons les herbes comestibles, les fruits et les légumes avant tout pour ce qu’ils sont : des trésors de la nature, basta.

Cet artichaut pour une fois vous n’allez pas le manger. Ce légume, si comestible soit-il, appartient avant tout – et ne vous en déplaise – à la nature, et non à votre frigo ! Vous allez donc le laisser fleurir dans un vase (même pas besoin d’eau). Il est une plante que vous allez observer pour son incroyable dessin et pour son « foin » violet qui, si vous avez de la chance, va peut-être en sortir un matin (cela arrive quand l’artichaut devient sec, patience). Ensuite, il retournera à la terre, quand vous l’aurez décidé.

On critique parfois les installations culinaires, pointant du doigt qu’elles jouent avec la nourriture, parfois même – à tort –qu’elles la gâchent. En tant que designers, nous sommes toujours attendus au tournant. On se doit d’ être écolo car on produit, donc on pollue. Mais figurezvous que les aliments non transformés sont le matériau le plus écologique que j’aie trouvé. La designer culinaire Marije Vogelzang dit même « I design shit » et elle a raison, puisque les créations culinaires passant par notre tube digestif seront automatiquement du compost, contrairement au design d’objet !

Boissons olympiques même hors Jeux.

� Souvenirs de vacances préservés : serviette en papier du Café Slavia de Prague, fourchette en plastique des frites mangées avec un ami, bonbon de verre polonais et glace-bonbon offerte par son amoureux.

Manger de la liesse

Remettre de la vie dans un été qui commençait mal, c’est ce qu’a réussi à faire la direction artistique des Jeux olympiques à l’occasion de la cérémonie d’ouverture. Elle a donné à voir les minorités, elle a représenté tous les Françaises et Français, elle a réveillé une nation qui avait mal depuis quelque temps, à cause d’un certain monsieur M. Elle a raconté le pays dans une joie too much qui a bonifié notre été.

Alors justement, si nous reproduisions à table les moments qui nous ont le plus plu, encore et encore ? Comme ce souvenir de nourriture de la mer. Même sans en avoir dégusté cet été, rien que de voir ces crevettes éblouissantes de soleil me parachute dans un sentiment d’allégresse. Réalisées avec un moule en métal acheté à la brocante du samedi quartier de la Nouvelle Douane, ces bonbons gélifiés me réchauffent la peau et mettent instantanément des vagues dans mes oreilles.

Recette

① Faire cuire 10 minutes des fraises coupées en deux avec du sucre et de l’agar-agar.

② Filtrer et mettre en moule.

③ Laisser prendre, démouler, manger, sentir le sable entre ses doigts de pied.

Be kind, rewind

On reproduit les bons souvenirs comme les bonnes recettes et on fabrique des perceptions merveilleuses à base de rien. Voir le beau là où il n’est a priori pas, demande un effort. Certains designers nous y aident. Anne Charlotte Blanchot encapsule dans des formes de pierres précieuses des sirops. De liquides ils deviennent solides. D’informes ils deviennent gracieux. La menthe se fait émeraude, la fraise rubis, la violette améthyste. Le geste de les mettre dans son verre se fait délicat, l’observation de leur dissolution lente un émerveillement. Même s’il s’agit là d’un aliment on ne peut plus banal, ce sirop solidifié remplace en cuisine la bouteille Monin par un sachet de pierres précieuses, et rend le moment d’aromatiser son eau magique.

Heureusement, encapsuler les plaisirs simples est à la portée de tous, pas besoin d’ être designer. Pour visualiser encore longtemps juillet et août 2024, vous pouvez mettre sous vide vos petits trésors estivaux : une nourriture de la mémoire, qui ne filera pas trop vite et qui rendra l’automne euphorique.

� Bonbons gélifiés en forme de crevettes.

La Table — Dossier Oui, nous c’est décidé, en cette rentrée on a envie de s’encroûter. Dans de l’argile, du sel, du foin, dans une croûte dure à casser pour un automne à l’étouffée, ou sous forme de tourtes et pâtés, pour un dernier casse-croûte au grand air. La croûte en fait il y a mille façons de la décliner (en cuisine comme en dictons), on peut la faire fleurir, la frotter, la laver. Bref, le sujet est si vaste qu’il méritait bien un dossier.

Coûte que croûte

Casser la croûte

Ce n’est pas accroupis sur une nappe vichy au pied d’un grand platane que l’on va casser la croûte, mais bien sur notre table, devant nos invités. Casser la croûte au sens premier du terme, briser la coque (qu’elle soit de sel, de pain ou d’argile) qui entoure ce poulet mis à cuire il y a quelques heures et que vous vous apprêtez à servir au dîner. Effet « waouh » garanti. « L’avantage de la cuisson en croûte c’est que si vous surcuisez un peu votre viande ou votre poisson, que vous laissez votre plat plus longtemps que prévu dans le four, ça reste quand même juteux à l’intérieur », rassure Éric Westermann, le chef du Buerehiesel, le restaurant gastronomique du parc de l’Orangerie à Strasbourg. Lui aime bien préparer des plats en croûte lorsqu’il reçoit des amis chez lui, « comme ça on peut prendre l’apéro tranquillement et laisser le plat dans le four. Il ne bougera pas ».

Les poulets dans le plat...

Sa « poulette entière cuite comme un baeckeoffe », un des plats signatures de l’établissement depuis plus de 40 ans, fonctionne sur le même principe. Agrémentée de citrons confits, d’artichauts et de romarin en été, de truffes, de poireaux et de pommes de terre en hiver, la volaille est déposée dans un grand plat à baeckeoffe, qui est ensuite lutté. « L’intérêt d’étanchéifier la terrine, c’est qu’elle conserve toute l’humidité à l’intérieur », précise le chef, « et surtout ça concentre les saveurs ». Lorsque les serveurs descellent le plat en salle et ouvrent le couvercle, les odeurs s’échappent en volutes et embaument toute la pièce. «  Souvent ça amène d’autres clients sur les tables voisines à vouloir commander la même chose. »

… et les mains dans l’argile

Autre cuisson en croûte, qui intrigue les clients : celle en argile. En modelant sur mesure un réceptacle dans lequel vont cuire les aliments, on peut varier à l’infini les recettes. Une méthode qui se prête particulièrement à la cuisson des poissons,

Croûtes terrestres

Croûte d’argile

→ Compter 2 kg d’argile pour un poulet ou un poisson entier.

→ Étaler l’argile avec les doigts oula placer entre deux morceaux de film alimentaire et l’étaler au rouleau. Vous pouvez directement placer votre préparation sur l’argile ou intercaler une feuille de papier sulfurisé.

Où en trouver ?

→ Dans les magasins de fourniture pour beaux-arts ou chez les potiers (ils sont légion à Strasbourg, vous n’aurez pas de mal à en trouver).

Croûte de foin

→ Compter une grosse poignée de foin pour 500 g de farine, 150 g de sel et 100 g d’eau.

→ Comme pour l’argile, il suffit d’étaler la pâte et de poser la viande ou le poisson au centre, puis de recouvrir d’un deuxième rectangle et de bien sceller les bords.

Où en trouver ?

→ Dans les animaleries (privilégiez du foin bio) ou directement auprès des paysans (à Niedernai, la ferme Fritsch vend des bottes de foin d’excellente qualité).

« mais il faut qu’ils soient assez charnus, comme la lotte, le Saint-Pierre ou le turbot », précise Éric Westermann. Cela fonctionne aussi pour les légumes racines, qui cuisent à l’étouffée, sans matière grasse et restent bien fondants.

Grain de sel et botte de foin

Le céleri-rave, la betterave ou les gros navets blancs se plairont aussi dans une croûte de sel, « qui aura l’avantage d’absorber leur surplus d’humidité ». Pour amalgamer les cristaux, il suffit de les mélanger à du blanc d’œuf, qui va servir de liant et permettre de modeler la croûte directement sur la peau des légumes (ou des fruits, ça

marche par exemple extrêmement bien avec un ananas !). Pour ce qui est des viandes et poissons, mieux vaut opter pour de la pâte à sel, selon Éric Westermann, car avec le sel pur, les préparations risquent d’être bien trop salées (les légumes, eux, peuvent s’éplucher, ce qui permet d’ôter l’excédent). « L’avantage en plus, c’est qu’on peut rajouter des épices dans la pâte, pour parfumer la préparation. » Ou du foin, comme le fait Philippe Laruelle, chef d’une auberge familiale dans les Vosges et référent du Collège culinaire de France, dont la recette de filet de truite en croûte de foin et crème de raifort nous a définitivement donné envie de casser la croûte à table.

Besoin d’inspiration pour savoir comment dresser vos croûtes à table ? Allez regarder la Table of Stones créée cet été par l’artiste brésilien Caique Tizzi à l’occasion du festival d’art contemporain de Bad Gastein, en Autriche, Sommer frische Kunst. Son installation culinaire est visible sur son compte Instagram @caiquetizzi, sur sa publication du 18 septembre.

Duel de pâtés

Naegel

→ Pour un pâté en croûte traditionnel, parfaitement exécuté. Disponible en deux tailles : la « ficelle » pour l’apéro, le pâté en tranches à la coupe pour une entrée. 9, rue des Orfèvres

Boucherie Spiesser

→ Plus rustique, avec des gros morceaux de viande et des variations selon les saisons (pâté au veau, à la volaille, au foie gras, aux tomates, etc.).

Les mercredis et vendredis sur le marché de la place Broglie. Les jeudis et samedis sur le marché de la Robertsau.

Éric Westermann, le chef du Buerehiesel à Strasbourg, prend bien soin de luter son plat à baeckeoffe pour cuire sa poulette entière à l’étouffée.

En avant tourtes

Si les Lyonnais ont la fâcheuse tendance à en revendiquer la paternité (et à lui ôter sa particule), le pâté en croûte est en réalité une spécialité alsacienne. Enfin... pas tout à fait. « Aucune région française ne l’a inventé, c’est une tradition de longue date des cuisiniers et des pâtissiers », peut-on lire dans L’art et la table, livre de référence sur l’histoire de la gastronomie et des pratiques culinaires, signé Patrick Rambourg. Son origine remonte au Moyen Âge. À l’époque, la croûte ne se mangeait pas (comme nos croûtes à casser à lire p.97 et p.98) et servait uniquement à cuire et conserver la viande au retour de la chasse. À la Renaissance, les pâtissiers inventent les pâtes feuilletée et brisée, la croûte devient comestible et le pâté un trésor culinaire aux mille possibilités.

La reine des pâtés

Le traditionnel alsacien contient du porc, des oignons, du vin blanc et de la pâte brisée. Simple sur le papier, plus complexe dans les faits. « Le secret d’un pâté en croûte réussi, c’est d’obtenir trois niveaux de cuisson et de texture différents, qu’il y ait un dégradé », explique Anne

Sigrist, huitième génération de bouchères-charcutières à Schleithal et couronnée cette année de la médaille d’or du meilleur pâté en croûte d’Alsace. « L’intérieur doit être moelleux, à la limite du cuit, la couche intermédiaire un peu plus prise pour garantir la tenue, et l’extérieur croustillant. » Dans sa boucherie du nord de l’Alsace, où travaillent une dizaine d’employés, la préparation du pâté est un travail d’équipe. « Il y en a un qui s’occupe de confectionner la pâte, un autre de parer la viande, retirer les nerfs et les aponévroses, puis il y a le montage, la cuisson et le coulage de la gelée. » Entre chaque étape, des temps de pause incompressibles, pour ne pas que la pâte se rétracte à la cuisson ou que les jus de viande coagulent avant de verser la gelée.

Le roi des tourtes

Si Anne Sigrist opte pour une pâte brisée au beurre, plus croustillante mais plus friable, Pierre Naegel, à la tête de l’échoppe de pâtissier-traiteur du même nom dans le Carré d’Or de Strasbourg, préfère lui le saindoux. « C’est avec ça que la faisait mon grand-père, qui a ouvert la boutique en 1927 », justifie le plus que dynamique pâtissier, à la bonhommie contagieuse. Lorsqu’il a commencé à travailler aux côtés de son père, qui venait d’hériter du commerce, lui aussi pensait que troquer la graisse de porc

La fameuse tourte Naegel

La Table — Dossier

pour le beurre rendrait son pâté plus noble. « Il était juste plus friable », se souvient le septuagénaire en rigolant. Le saindoux est donc resté et c’est aussi lui qui donne sa tenue à la pâte de sa célèbre tourte vigneronne, un des best-sellers de la maison. «  Pour le dessus en revanche, j’utilise des chutes de pâte feuilletée, pour avoir un côté plus brillant et plus gourmand. » Pour que ces deux types de croûtes ressortent – comme leur nom l’exige – bien croustillantes, les tourtes sont ensuite mises à cuire dans un four traditionnel à sol, 250 degrés en bas, 230 en haut, surtout pas de chaleur tournante.

C’est pas de la tourte !

Au-delà de la pâte, le secret des tourtes Naegel réside aussi dans leur farce, à base de viande de porc et de veau, d’oignons, de persil et de pain. L’ingrédient qui fait la différence surtout c’est le mélange d’épices inventé par le grand-père et dont la liste est inscrite sur un petit carnet rouge, précieusement gardé dans un coffre-fort. Pour que la viande – qui contrairement à celle du pâté en croûte n’est pas marinée – reste tendre, un appareil à flan est ajouté à mi-cuisson par la cheminée. « Quand on verse l’appareil, on dirait un cœur qui bat », image Marylène Naegel, la cogérante de la boutique. Une ultime étape qui a aussi valeur de test, car si la pâte de la tourte a mal été scellée, alors le cœur tremblotant va venir mouiller l’extérieur et la préparation va perdre son craquant. Tout un art.

Vieilles croûtes

En québécois, « avoir des croûtes à manger » signifie qu’on doit encore acquérir de l’expérience, de la maturité, qu’on doit se bonifier. Une expression on ne peut plus à propos pour le fromage, parce que pour lui sans croûte, pas d’affinage. Et généralement pas de goût ! « Si vous enlevez la croûte des fromages à pâte fleurie, c’est un véritable massacre », expliquait récemment le célèbre fromager suisse Luisier Affineur sur son compte Instagram. C’est pourtant ce que faisait le père de Luc Ségaux, le directeur général de la fromagerie Tourrette, la plus célèbre de Strasbourg, dont on peut retrouver les produits à la Cloche à fromage. «  J’ai mal été éduqué  », concède en souriant celui qui est depuis devenu un spécialiste.

Lavage de croûte

« La croûte, c’est la couche protectrice du fromage, celle qui va empêcher les mauvaises bactéries de rentrer et permettre de garder les bonnes à l’intérieur. » Dans les caves d’affinage de son entreprise implantée au Marché Gare, les croûtes de fromage sont donc scrutées de près, car ce sont

les 450

de 160

Lorsque les fromages sont laissés suffisamment longtemps dans des caves d’affinage à la riche flore bactérienne, des cérons vont se développer et grignoter la croûte.

Dans
m2 de caves de la fromagerie Tourrette, ce sont plus
variétés de fromages qui sont affinées par Luc Ségaux et son équipe.

elles qui permettent de juger de l’état de santé du produit. Certaines reçoivent des soins particuliers, comme celles de l’époisses, qui sont brossées tous les deux jours au pinceau avec du marc de Bourgogne. « Si on ne la lave pas assez souvent, la croûte va sécher et on n’aura plus du tout le même goût ou la même texture. » C’est aussi le cas du munster, frotté à la saumure. « C’est ça qui va nourrir les bactéries et permettre à la flore de se développer », confirme Virginie Haxaire, directrice commerciale de la fromagerie éponyme, la seule en Alsace à fabriquer du munster. « Au début la croûte va avoir un petit duvet blanc, puis elle va devenir jaune pâle, jaune citron, légèrement orangée et enfin bien orange. » Selon l’origine du lait la teinte va différer, un vrai pantone de couleurs représentatif de la diversité des pâturages vosgiens.

Datation du fromage À l’inverse des fromages à croûte lavée, certains sont intentionnellement privés d’humidité. C’est le cas de ceux recouverts de foin ou d’herbe au moment de l’affinage. « Ça va étouffer le fromage, qui va s’affiner plus rapidement tout en restant très doux et crémeux à l’intérieur  », explique Luc Ségaux. Pour les fromages à pâte pressée, comme le beaufort ou le comté, là la croûte est laissée à l’air libre pour qu’elle puisse s’assécher. Les plus vieux d’entre eux sont même intentionnellement oubliés en cave, sans brossage. « Sur le comté avec le temps des cérons vont se développer, ce sont des acariens qui vont grignoter la croûte et aérer le fromage. » Ce sont eux qui donnent aux comtés de 18 ou 24 mois ce léger goût de noisette. « Globalement la croûte c’est vraiment ce qui va permettre de dater un fromage », résume le spécialiste. Autrement dit de savoir distinguer les jeunes des vieilles croûtes.

Finir

en bouchée

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Si vous êtes un Alsacien pur jus, alors pour vous le mot croûte renvoie inévitablement à cette spécialité culinaire que l’on retrouve dans toute bonne winstub : les bouchées à la reine ou subbebäschtettle. Une recette vieille de 300 ans et honorée depuis 20 par un concours régional annuel. Le gagnant cette année : le jeune Lucas Grandgeorge, qui officie au restaurant tenu son père, le Velleda situé au col du Donon. Parmi les critères du jury : le

moelleux et les saveurs de la garniture — notée sur 30 points — mais surtout la réussite de la croûte, la pièce de pâte feuilletée dans laquelle la sauce est versée, évaluée sur 40 points. Pour que la croûte soit de belle hauteur et surtout croustillante, la plupart des chefs optent pour une pâte feuilletée inversée. Si vous préférez l’acheter en boulangerie, pensez à la réchauffer 30 minutes dans un four éteint préalablement chauffé à 150 degrés, pour lui redonner une texture craquante.

Croûte toujours

Par Tatiana Geiselmann / Photo Valéry Guedes

Un livre entier consacré à la cuisson en croûte et signé d’un ancien élève de l’école hôtelière de Strasbourg : que demander de mieux pour conclure ce dossier spécial ? L’ouvrage de 160 pages de Thomas Feller confirme, grâce à ses 70 recettes originales et adaptées à toutes les saisons, que la croûte permet aussi bien d’enrober la viande, le poisson, les légumes que les fruits. Outre une petite sélection de pâtés en croûte et de tourtes, vous y découvrirez des idées de cuisson en croûte de pain, d’herbes, de sel, et même de sable et d’argile. Seul bémol : le livre n’est plus édité par Marabout, mais on vous fait confiance pour en dénicher un exemplaire d’occasion sur un site de vente en ligne.

LÉGUMES RACINES DANS

LA TERRE

Pour 6 pers.

Préparation 20 min

Cuisson 2 h Repos 15 min

Ingrédients

Pour les légumes

— 2 kg d’argile*

— 700 g de carottes

— 500 g de pommes de terre Amandine

— 350 g de navets

— 2 panais

— 2 betteraves de couleurs différentes

— 1 petit céleri-rave

— 6 gousses d’ail

— 4 feuilles de laurier

— 2 branches de thym

— 2 branches de romarin

— 4 c. à s. d’huile d’olive

Pour la sauce

— 2 c. à s. d’huile d’olive

— 500 g de cottage cheese, de ricotta ou de brousse

— 1 oignon nouveau

— 1 botte de ciboulette

* Vous pouvez acheter de l’argile dans les magasins de loisirs créatifs ou directement chez les potiers, par exemple de Soufflenheim.

Préparation

Pour les légumes

— Préchauffer le four à 180 °C et éplucher tous les légumes.

— Couper les carottes, les pommes de terre, les navets, les betteraves, les panais, les oignons et le céleri en quartiers de taille identique. Détailler l’ail en deux morceaux.

— Dans un grand plat à gratin, mettre le thym, le laurier, le romarin et l’ail. Poser par-dessus les légumes et assaisonner. Ajouter l’huile d’olive et 5 cl d’eau. Couvrir d’une feuille de papier sulfurisé dépassant du plat.

— Placer le bloc d’argile entre deux feuilles de papier sulfurisé et l’étaler sur 0,5 cm d’épaisseur. Disposer la feuille d’argile sur les légumes et la découper d’une taille légèrement supérieure au plat.

— Enfourner pour 2 heures. Éteindre le four et laisser reposer 15 minutes.

Pour la sauce

— Émincer finement l’oignon nouveau et la ciboulette. Mélanger avec le fromage, l’huile d’olive et assaisonner. Réserver au réfrigérateur.

Pour servir

— Sortir le plat du four et le disposer devant vos convives. À l’aide d’un ustensile lourd (un marteau ou une grosse louche), casser la croûte d’un coup sec. En s’aidant du papier sulfurisé, la débarrasser et servir les légumes avec la sauce au fromage et à la ciboulette.

En croûte, Thomas Feller, éditions Marabout, 160 pages, 19,90€

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La Table — Reportage Troquant les Doc’ pour les bottes, le chef étoilé Thierry Schwartz, à la tête depuis plus de 20 ans du restaurant éponyme à Obernai, nous a emmenés à la découverte de son univers culinaire naturaliste, entre cueillette dans les champs et cuisson au feu de bois.

Au charbon

En toute logique, c’est autour d’un petit noir qu’a commencé notre journée en compagnie de Thierry Schwartz. Un café doux, légèrement acidulé, parfaitement au goût de Christophe, le

photographe qui m’accompagne ; un poil trop subtil pour moi, qui aime les kawas très corsés. « C’est un café que Mokxa torréfie spécialement pour nous », précise le chef impeccablement coiffé, en s’attablant à nos côtés dans un recoin de son historique winstub d’Obernai. Installée en bordure des remparts, cette maison à colombages de 1589 a gardé un cachet rustique et chaleureux, avec ses belles tables en bois « fabriquées par mon père » et cette cheminée en briques et en cuivre, qui servira plus tard à braiser une partie de notre déjeuner.

Pour l’instant, l’heure est aux croissants, tout juste sortis des fours de la boulangerie attenante au restaurant. « Nous utilisons des farines locales et de l’eau redynamisée », glisse le chef de sa voix grave, « avec des temps de pousse de 16 à 24 heures ». Une ode à la patience, qui semble bien coller au rythme de vie du restaurant. Nous qui nous attendions à voir le chef s’affairer de toutes parts, sommes agréablement surpris par le calme qui règne dans la bâtisse. « Vous avez de la chanc e », nous soufflera un peu plus tard son second, François Hubscher, dans un sourire, « moi, d’habitude, je ne le vois qu’en coup de vent, il a toujours mille choses à gérer ».

Retour aux sources

Proposant de nous resservir un café, Thierry Schwartz prend pourtant le temps, de nous parler de cette potière, qui modèle pour lui une nouvelle ligne de vaisselle, ou de ce coutelier, qui a sélectionné des essences d’arbres fruitiers locaux pour tailler les couverts du restaurant. Pour celui que beaucoup décrivent comme un précurseur de la naturalité, l’attachement au terroir n’est pas un vain mot. Il se retrouve aussi bien dans, qu’autour des assiettes. Seule entorse à l’Alsace : ces dizaines de bouteilles de chartreuse, dont certaines aux étiquettes passablement défraîchies, témoignent des huit années passées par le chef aux commandes d’un restaurant d’altitude de Megève.

Le tintement des casseroles derrière les portes battantes de la cuisine et le jour qui commence à traverser les vitres dépolies de la salle à manger, nous obligent à sortir de notre torpeur. Il est 8 heures, il est temps de prendre la clef des champs. J’ai oublié d’emporter des bottes et de prévenir Christophe, qui n’est donc pas mieux équipé. Heureusement, ici, chacun est habitué à partir récolter une partie des légumes directement chez le paysan, et on nous dégote rapidement deux paires à peu près à notre pied. « Nous ne passons jamais commande aux agriculteurs, on élabore les menus en fonction de ce qu’ils nous apportent », explique le chef en nous conduisant à sa voiture. Tous les deux jours les plats changent, s’adaptant aux contraintes du monde paysan.

À la ville comme aux champs

Sur le trajet, Thierry Schwartz nous parle de ses parents, qui travaillaient dans le bâtiment, du soutien qu’ils lui ont apporté, comprenant qu’il « était meilleur en cuisine qu’en dessin d’architecture », de son grand-père et de « la gnôle des fruits de son verger », de sa femme Pauline, qui gère la décoration du restaurant, « une Strasbourgeoise, très urbaine, qui ne veut désormais plus quitter

« Nous ne passons jamais commande aux agriculteurs, on élabore les menus en fonction de ce qu’ils nous apportent. »

Obernai », et puis de son fils, Oscar, à qui il ne prédisait pas une carrière dans la gastronomie, et qui vient d’enchaîner un premier poste à la maison Troisgros, un second au triplement étoilé Clos des Sens, et désormais à la Grenouillère, chez Alexandre Gauthier.

Sortant des cagettes de son coffre et un couteau de sa poche, Thierry Schwartz arpente tranquillement les allées de courgettes devant lesquelles nous sommes garés et cueille tous les trois à quatre pieds des fleurs encore ouvertes. L’agriculteur n’est pas présent, mais le chef est ici comme à la maison et lui enverra en fin de semaine le détail de sa récolte. « Vous savez qu’il existe des fleurs mâles et des fleurs femelles ? », nous lance-t-il d’un air malicieux, comme pour vérifier que nous ne sommes pas (nous aussi) des urbains déconnectés de la nature. Ouf, oui, on sait, le test est validé ! Un rapide tour dans la serre pour ramasser une poignée de menthe et quelques fleurs de tournesol, et nous voilà repartis direction Obernai.

Étoile verte, livre rouge

En arrivant, Thierry Schwartz doit monter au bureau. « Vous êtes sûrs que vous voulez m’accompagner ? Ce n’est pas très intéressant, je dois juste imprimer les menus. » Car c’est aussi ça la vie de chef étoilé à la tête d’une équipe de seulement sept personnes, gérer la paperasserie. Le haut de la maison est resté dans son jus, tapisserie fleurie et buffets de bois sombre saturant visuellement l’espace. En face du bureau, un alignement de livres à la couverture rouge attire notre regard : la collection complète du guide Michelin. « Non, il me manque quatre exemplaires, les premiers des années 1900. » Celui de 2004, où son nom apparaît pour la première fois dans la section Alsace, est en revanche bien présent, de même que 2023 pour sa première étoile verte. Une distinction évidente, pour celui qui ne travaille qu’avec des producteurs du coin (50 kilomètres maximum), privilégie le bio et la biodynamie, cuisine fruits et légumes dans leur intégralité et s’est vu décorer en 2015 de l’Ordre du Mérite agricole.

Preuve de son attachement aux trésors potagers, Thierry Schwartz nous conduit au cellier, une pièce d’à peine 4 mètres carrés où s’entassent des centaines de bocaux, des anciens pots en grès, des jarres et un séchoir. Un capharnaüm poétique regorgeant de feuilles et champignons séchés, de sodas maison fermentés, de pickles de légumes.

« Au printemps et en été, toute l’équipe part en forêt cueillir des fleurs, feu illes et fruits sauvages.  » Certaines préparations patientent plusieurs années en saumure avant d’atteindre la saveur escomptée et d’être dressées sur les tables (sans nappes ! une hérésie dans la haute gastronomie) du restaurant, comme ces fraises vertes goût olive, une des spécialités de la maison et un de nos coups de cœur.

Une carte du vivant

Jouxtant l’atelier de fermentation, la cave à vin dégage elle aussi une atmosphère hors du temps. Des milliers de bouteilles y sont amoncelées, du vin d’Alsace et d’ailleurs, principalement en nature, 1 700 références au total, ce qui en fait

« la plus grande cave de vins naturels d’Europe » se

félicite Thierry Schwartz, qui a très tôt tissé des liens avec les vignerons du vivant. Certains habitués du restaurant lui passent d’ailleurs directement commande, comme auprès d’un caviste, et c’est le cas de ce Normand qui vient d’arriver dans la cour. L’occasion parfaite pour Thierry Schwartz de s’éclipser et de nous laisser entre les mains de sa femme, Pauline, qui nous conduit dans la salle à manger. Lui va aller nouer son tablier et peaufiner le menu en cuisine, passant régulièrement en salle vérifier les braises du feu de cheminée ou s’enquérir de savoir si les plats nous ont plu.

C’est un oui sans conteste ! Dans l’assiette comme dans le verre, nous avons tout adoré, l’omble chevalier de fontaine, la verdure potagère et son crumble d’épluchures, l’addictif pain brioché à la fleur de sel, l’incroyable aubergine confite et son condiment à l’ail noir. Le seul bol que nous avons délaissé, c’est ce beurre extra-frais baratté sous nos yeux, dont la saveur aigre nous a rappelé que nous étions peut-être encore des urbains trop habitués au goût du lait pasteurisé.

Les Canailles

52, rue de Zurich

@lescanailles_strasbourg

Les Canailles

Derrière les portes du 52 rue de Zurich, les fidèles savent ce qu’ils viennent chercher : une ambiance de bistrot, à la fois bon enfant et raffinée, et des plats d’une grande justesse, avec des produits bien sourcés. Si le cadre est resté inchangé depuis l’ouverture du restaurant il y a huit ans, de nouveaux visages s’affairent depuis cet été dans la cuisine de ce cocon de 33 couverts aux murs blancs et bleus. « On voulait une nouvelle vie, une continuité et de la jeunesse », explique Frédéric Mastelli, gérant du restaurant et l’une des premières canailles à l’origine de cette adresse de quartier. Secondé par son responsable de salle, Théo Journée, l’ancien ingénieur en travaux publics a enchaîné les essais culinaires jusqu’à cette soirée de juin 2024, où ses papilles ont été conquises par le magret de canard concocté par Thomas Vucong. Chef prodige de seulement 21 ans, aux fourneaux depuis ses 14, le jeune cuisinier a appris le métier au sein de restaurants étoilés, à l’Auberge au Bœuf à Sessenheim, puis au 1741 à Strasbourg, avant de quitter le navire, las du « manque de reconnaissance »

Bistronomie revisitée

Avec Frédéric Mastelli, l’alchimie a été immédiate et la jeunesse a eu carte blanche. Théo Journée s’occupe du choix des vins, tous français ; Thomas Vucong imagine une carte à son image, pleine de peps et de vitalité. Ceviche de saumon et marinade asiatique, filets de maquereaux sauce choron… Les classiques revisités de la bistronomie française côtoient de nouvelles propositions aux influences étrangères, le tout entièrement fait maison et dans une gamme de prix plus que raisonnable (19 € pour un duo entrée-plat ou plat-dessert le midi ; 22 € pour le trio). Une formule « plus moderne » mais qui reste dans l’ADN des Canailles, « chic mais décontracté », à l’image de ses clients : ici, politiques et médecins déjeunent aux côtés d’habitants et de commerçants du quartier, et cette mixité, Frédéric Mastelli y tient.

Arrivé cet été, le chef Thomas Vucon (à gauche) apporte un vent de fraîcheur aux Canailles. Théo Journée (à droite) s’occupe du service en salle.

Au Millésime

7, rue du Temple-Neuf, à Strasbourg  4, rue Transversale B, à Vendenheim aumillesime.com

Au Millésime

Pas étonnant que le réalisateur Philippe Claudel ait choisi de tourner certaines scènes de son film Tous les soleils Au Millésime. Entrer chez ce caviste mythique du centre de Strasbourg, c’est mettre un pied dans un royaume de passionnés, désormais sous la houlette d’Emmanuel Maire.

Il y a 27 ans, ce sommelier et œnologue de formation est venu livrer ici du vin pour le compte d’un producteur. Il n’est jamais reparti. « Ce n’était pas prévu, mais peu à peu les clés du camion m’ont été confiées », sourit celui qui s’apprête à reprendre la direction de l’entreprise.

Pieuvre à cinq bras

Quand la première enseigne a vu le jour avenue de la Marseillaise en 1975, c’était l’une des trois seules caves de la ville. Cinquante ans et quelques déménagements plus tard, la petite structure est devenue une pieuvre à cinq bras, avec un site internet, deux boutiques physiques, une agence qui approvisionne les restaurants alentour et une autre qui s’occupe de l’export de vin à l’étranger (notamment en Suisse et au Japon). « Chez nous,

on trouve de tout et en quantité, des spiritueux, des vins français et d’autres provenant de pays frontaliers », résume Emmanuel Maire .

Service old school

Ce qui fait la force du caviste, surtout, c’est son équipe : des professionnels amoureux de leur métier « qui passent leurs vacances à goûter des vins et visiter des domaines ». Tous sont là depuis des années, ont appris à créer un lien avec les clients. Attachés aux traditions, ils chargent eux-même le coffre de ceux qui viennent faire leurs courses à la boutique de Vendenheim, plus grande et complémentaire de celle de Strasbourg. « On est un peu rétro dans le service, c’est notre identité », avoue volontiers Emmanuel Maire, « mais nous avançons aussi avec notre temps ». Sur les questions écologiques par exemple, avec l’achat de voitures électriques et l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit du magasin de Vendenheim. Prochain défi du magasin : montrer à une clientèle plus jeune et disposant d’un petit budget que l’on peut s’acheter une bonne bouteille sans se ruiner.

Emmanuel Maire dans la boutique Au Millésime de Vendenheim, inaugurée en 2008.

À L’AGENDA

02.11 ---> 03.11

Salon Brut(es)

La foire incontournable des amoureux de vin nature revient pour une 6e édition à Mulhouse, dans la grande halle de Motoco. Au programme : plus de 90 vignerons venus de l’Est (Alsace, Jura, Lorraine, Allemagne, Suisse, Autriche, Slovénie, Géorgie…), mais aussi des producteurs de cidres, sakés, bières sauvages et fermentations sans alcool.

11, rue des Brodeuses, à Mulhouse

11.10 + 22.11 + 13.12

La Dînée du Port du Rhin

À la fois expérience artistique et culinaire, La Dînée est une soirée surprise réunissant 40 convives autour d’un repas végétarien.

Au cours du dîner, les invités sont plongés dans l’univers de trois artistes locaux et votent pour leur projet préféré, qui sera financé par les bénéfices du repas. Du micromécénat en mangeant !

La Dînée se déroule dans des lieux surprises, dévoilés la veille du RDV. Réservation obligatoire sur HelloAsso 30 € / pers.

23 / 24 / 29 / 30.10 à 18h30 + 2.11 à 14h + 9.11 à 10h

Initiation au design culinaire

Pourquoi la baguette est-elle longue et le steak haché oval ? Pourquoi dit-on « carré de chocolat » alors qu’ il s’agit de rectangles ? C’est pour répondre à toutes ces questions et beaucoup d ’autres queSonia Verguet, dont vous retrouvez la chronique dans chaque numéro de Zut, organise cet automne des initiations au design culinaire. Des ateliers pour enfants sont aussi prévus.

@soniaverguet

Réservation obligatoire sur weezevent 35 € / pers.

Les potins des popotes

LIBRAIRIE CULINAIRE

Du pain sur la planche

« Se cailler les miches », « Long comme un jour sans pain », « Être au pai n sec ».

Les expressions autour du pain sont légion, tout comme les souvenirs qui s’y rattachent. Donnant carte blanche à 101 chefs, cuisiniers, pâtissiers, mais aussi écrivains, historiens, religieux, sportifs, politiques et artistes, les sœurs Debbasch ont réuni les deux dans ce petit livret qui alterne entre jeux de langue et joie des papilles. Une parution poétique et sans aucune image, à laquelle ont notamment participé l’Alsacien Guy Krenzer, le chef de la Maison Lenôtre, le pâtissier Pascal Hainigue, de l’Auberge de l’Ill à Illhaeusern ou encore Christine Ferber, la célèbre confiturière colmarienne.

Les 101 mots du pain à l’usage de tous, sous la direction d’Anne et Caroline Debbasch, Éditions Archibooks, 208 pages, 12,90 €

Black au beurre

LES RAGOTS

DU MARCHÉ

Pâtissier de cristal

Après dix ans d’office à la Villa René Lalique – dont il fut le pâtissier en chef dès l’ouverture en 2015 – Nicolas Multon cède sa place à son second, Jonathan Bunel. S’il quitte l’ établissement doublement étoilé de Wingen-sur-Moder, c’est pour revenir à Strasbourg, où il souhaite «  écrire sa propre histoire » et ouvrir une pâtisserie. Le lieu a déjà été choisi : ce sera rue du Vieux- Marché-aux-Poissons et l’inauguration est prévue pour avril 2025. On a hâte de tester !

Après Marseille cuisine le monde, l’autrice et documentariste Vérane Frédiani revient avec un nouvel ouvrage, mêlant portraits, interviews, reportages et recettes autour de la cuisine africaine subsaharienne en France. Parcourant l’Hexagone, de Rouen à Strasbourg et de Montpellier à Paris, elle est allée demander aux cheffes et chefs afro-européens comment leurs origines influencent leur cuisine, le poids des traditions, la force de leur culture. Parmi ses interlocuteurs : Gilles Dolatabadi, le patron du Jabiru Café de la Krutenau.

L’Afrique cuisine en France, Vérane Frédiani, Éditions de La Martinière, 272 pages, 29,90 €

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Restauration / Bar

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Les Escapades

Cols et dévalées Magie par-devers vous Loups et pandas Font rêver.

Les Escapades Colroy-la-Roche Au cœur de la vallée de la Bruche, l’histoire de la Cheneaudière s’apparente à un voyage, avec ses cols et ses dévalées. Une aventure humaine faite de vision et d’audace, de courage, de résilience et de volonté. Une histoire à l’issue heureuse dont les chapitres continuent à s’écrire, jour après jour.

La Cheneaudière • Hôtel spa 5* 3, rue du Vieux-Moulin à Colroy-la-Roche cheneaudiere.com

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Tout a commencé en 1974. Dans un temps fort lointain où les codes de l’hôtellerie-restauration n’avaient pas encore opéré leur mue, où le management était immuable et vertical, où internet et les réseaux sociaux n’étaient pas entrés dans nos vies. Dans ce hier si proche, le grand-père de Nicolas Decker crée une maison familiale qu’il gère avec brio. Au point d’accéder, dès l’ouverture, au très select guide Relais & Châteaux. «  L’art de vivre à la française faisait rêver. Les voyageurs fortunés du monde se promenaient guide en main  », explique Nicolas Decker. Ainsi, la Cheneaudière, son restaurant étoilé, son espace bien-être pourvu d’une piscine couverte, d’un jacuzzi et d’un modeste sauna, amène à Colroyla-Roche des visiteurs venus du Japon, de Russie ou d’Amérique. « En ce temps-là, mon grand-père chassait avec Bernard Tapie et madame de Gaulle passait ses vacances à la Cheneaudière ! »

Une gestion patriarcale rattrapée par de nouvelles habitudes de consommer le voyage vont peu à peu essouffler ce modèle. Au point que l’établissement sera en difficulté dans les années 2000.

« Je n’ai pas grandi dans cet univers, reconnaît Nicolas Decker, sinon pendant les vacances… » Mais doué pour les chiffres, armé d’une formation scientifique, le jeune homme est néanmoins habité par une envie d’entreprendre. Au point de déposer, en cachette de sa famille, une offre de rachat de l’établissement ! « La Cheneaudière était à vendre. Je leur ai annoncé dans la même phrase : tout va bien, nous avons un acheteur ; cet acheteur, c’est moi ! »

Meilleur spa d’hôtel d’Europe

« Je suis tombé amoureux du potentiel de l’établissement et de son environnement » reconnaît le propriétaire- dirigeant. Avec Jean-René Grau, aujourd’hui directeur de l’établissement, les deux hommes vont tout mettre en œuvre pour redonner du lustre à la maison. « Il a fallu retrouver la confiance de tout le monde. Se montrer créatif, disruptif même, à un moment où le mot n’était pas encore sur toutes les lèvres… » Très vite, un projet de spa hors norme voit le jour. « On nous a traités de fous ! » Et pour cause : 2 000 mètres carrés parfaitement intégrés à la nature environnante, son sauna sur pilotis, sa piscine à débordement, intérieure et extérieure, son bassin au sel d’Epsom et ses trois suites de soins privatives, sans même parler de sa ligne de cosmétiques maison, tout cela pour seulement… trente-huit chambres à l’époque ! « Peu importait le fait que nous nous trouvions dans un petit village, nos visiteurs voulaient vivre cette expérience ! » Un pari réussi au point de se voir décerner, en 2014, le prix Villégiature du meilleur spa d’hôtel en Europe !

Depuis, les améliorations apportées au spa, tant au niveau de l’expérience que de l’esthétique, ont été constantes. Jusqu’à atteindre aujourd’hui 2 500 mètres carrés sur trois niveaux, alors que la prochaine extension est d’ores et déjà programmée. « Nous sommes devenus ce que les spécialistes appellent dans leur jargon, une destination spa. » Et bien que le nombre d’accès soit limité afin que les clients de l’hôtel trouvent calme et sérénité, la Cheneaudière propose aussi des accès « day spa » en journée, matinée ou soirée, ainsi que des créneaux baptisés « bulles dernière minute », accompagnés d’un buffet adapté au moment de la visite. Instants gourmands particulièrement appréciés, permettant de conjuguer le luxe en mode détente.

Top suites à succès « Ce premier palier de la reconquête nous a permis d’enclencher un cercle vertueux et de viser la montée en gamme », poursuit Nicolas Decker, dont l’établissement passe de trois étoiles à quatre, puis cinq en 2017. Une ascension soutenue par des investissements constants et un soin particulier apporté à chaque détail. Ainsi, les désormais quarante-cinq chambres de la Cheneaudière bénéficient-elles toutes d’une décoration soignée, à l’instar des célèbres « Top suites » dont la première, inaugurée en 2014, a rapidement été suivie de deux autres, tant le succès a surpris jusqu’à ses initiateurs. Les raisons de cet engouement ? Espace, décoration millimétrée et terrasse panoramique équipée d’un bain bouillonnant ne sont là que des pistes… Mais qu’elle soit « panoramique » ou moins perchée, à la Cheneaudière, aucune chambre n’est en reste question confort : literie haut de gamme, meubles sur mesure, télés

Les Escapades Colroy-la-Roche

miroirs ou escamotables pour dégager la vue, moquette duveteuse, pour certaines en cachemire, salles de bain hyper spacieuses, toilettes japonaises et coins coiffeuses à chaque fois que les dimensions de la chambre le permettent, tout a été soigneusement pensé avec l’architecte d’intérieur. Attenante à l’hôtel, la Villa François, ancienne maison de famille, regroupe quant à elle cinq suites toutes communicantes permettant d’accueillir, au besoin, jusqu’à quinze personnes sur 300 mètres carrés.

« Tout cela n’est pas nécessairement visible au premier coup d’œil, mais cette attention au détail, c’est toute notre vie ! Pour monter en gamme, il faut que les prestations suivent. Ainsi prêtons-nous une attention toute particulière aux matériaux, à la domotique, au design… » Une rigueur qui s’applique jusqu’au parking, avec une largeur de place inégalée et pas moins de treize bornes de recharge de 11 et 22 kW.

« Mais sans la qualité du service, le détail n’est rien ! » tient toutefois à préciser Nicolas Decker. « Tous les clients ne prêteront pas attention à un fauteuil de designer suédois ou à la forme étudiée d’un couteau à beurre. Un accueil prévenant et non feint, lui, est perceptible par tout le monde ! » Pour atteindre cet ultime palier d’exigence, le dirigeant de la Cheneaudière veille tout particulièrement, depuis son arrivée, à la qualité de vie au travail. « L’empathie ne se force pas. Il faut attirer des gens compétents et leur donner envie de sourire. »

À la Cheneaudière, pas une année sans projet. L’établissement qui compte de nombreux espaces de restauration à la décoration et à l’atmosphère variées selon la météo ou l’heure du jour – ainsi des boiseries et des plafonds végétalisés, de l’immense terrasse du salon Calixte donnant sur la forêt environnante, du cosy-bar avec ses cheminées à vapeur et son billard – vise là aussi une marche supplémentaire. L’hôtel de Colroy-la-Roche accueille deux restaurants ouverts en soirée, l’un dit « gourmand », l’autre « gastronomique », placés sous la houlette du jeune chef colmarien Jean-Paul Acker, au parcours déjà bien fourni. Chef et dirigeants ne cachent pas leur ambition de reconquérir une étoile au guide Michelin. Nicolas Decker l’assure :

« Quelques travaux sont à prévoir dans le restaurant gastronomique. » Un havre de trente couverts dont l’atmosphère à la fois chic et intime saute pourtant déjà aux yeux.

Atmosphère luxueuse, mais décontractée

«  Aujourd’hui, notre clientèle est à 70 % française. Beaucoup nous découvrent par le biais d’un coffret cadeau, signe que l’établissement a plu, puisqu’on n’hésite pas à l’offrir » aime à rappeler le propriétaire.

« La moyenne d’âge de nos visiteurs a aussi tendance à rajeunir » se réjouit de son côté Jean-René Grau. « Et même si nos clients fortunés retrouvent à la Cheneaudière tous les codes du luxe, d’autres, moins habitués à ce type de standing, n’hésitent pas à casser leur tirelire pour s’offrir une nuit dans une Top suite. Ils ne sont pas décontenancés par l’atmosphère certes luxueuse, mais décontractée. » À noter d’ailleurs que l’établissement accueille de nombreuses demandes en mariage. Au point d’avoir imaginé, pour suivre un mouvement qu’ils n’ont pas initié, des scénarios dédiés dans certaines chambres, voire prochainement un site internet. Sur quelques tables du restaurant gourmand, un dispositif secret, que le convive peut actionner via un bouton discret, permet d’escamoter un petit objet… de la taille d’un écrin à bijou ! Pour penser à ce genre de détail, Nicolas Decker et Jean-René Grau le savent : il faut certes un peu d’imagination et l’appui d’une bonne équipe. Mais surtout, savoir écouter ses clients.

Nicolas Decker (propriétaire-dirigeant) et Jean-René Grau (directeur)

DÉGUSTATIONS – RENCONTRES – PROMOTIONS

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OUVERT
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Le Parc animalier de Sainte-Croix l’a vu naître et grandir. Depuis septembre 2023, Lucas Singer est directeur adjoint du parc fondé par son grandpère et dirigé par son père. En cette rentrée, il évoque son parcours, les chantiers en cours et les projets à venir pour le premier parc de faune européenne en France, véritable lieu de conservation et d’éducation à la biodiversité dans tous ses aspects qui accueille chaque année quelque 350 000 amoureux de la nature.

Vous représentez la troisième génération de Singer qui s’occupe du Parc animalier de Sainte-Croix. Quels sont les premiers souvenirs que vous gardez de ce lieu ?

C’est difficile de choisir un premier souvenir quand on est né quelque part. Je suis strasbourgeois, mais depuis tout jeune, j’ai passé mes week-ends et mes vacances au parc. J’y ai travaillé chaque été en tant qu’animalier, mais aussi à la plonge, à la restauration, à la boutique... Énormément de souvenirs se sont construits avec les équipes du parc, dont certains membres sont encore là aujourd’hui. Ce qui m’a marqué également, c’est l’évolution de la faune et de la flore. Au début des années 2000, il y avait déjà des étangs, mais on arrivait encore à voir tout autour. Depuis, la végétation a tellement poussé que ce n’est plus possible. C’est impressionnant. On observe un véritable retour de la nature sur le site.

Était-ce une évidence pour vous de prendre la relève familiale ?

Pas du tout. Je n’avais pas pour objectif de travailler au Parc animalier de Sainte-Croix, même si je n’étais pas fermé à l’idée. Au départ, je me dirigeais vers l’entreprenariat. J’ai lancé plusieurs projets, notamment dans l’e-sport. Il y a quatre ans, nous avons eu l’idée avec mon collègue Hugo de monter le projet de la Ferme des Vents, un projet de ferme agroécologique qui se veut innovant et inspirant, pour remettre la biodiversité et le sauvage au cœur de l’humain et de l’agriculture. On a travaillé sur la problématique en commençant par une phase de recherche, d’apprentissage, d’analyse du terrain… Ce projet m’a beaucoup lié à Sainte-Croix, en me faisant comprendre que sur les questions d’agriculture, de biodiversité, de climat, il y avait encore beaucoup de choses à faire ici.

Votre père Laurent évoquait la volonté de faire évoluer le parc vers une « start-up de l’écologie ». Quels sont les grands axes de ce projet ?

Le Parc animalier de Sainte-Croix a toujours été une sorte de « start-up de l’écologie ». Au départ, il s’agissait de terres agricoles converties en parc animalier qui accueille aujourd’hui plusieurs centaines de milliers de visiteurs par an. Respecter la nature tout en étant ouvert à un tourisme de masse nécessite de trouver le bon équilibre. Depuis plus de quarante ans que le parc existe, on a développé notre connaissance des étangs, des forêts, des prairies, des espèces qu’on héberge. La conservation ne se résume pas à la réintroduction d’espèces. Il faut déjà se demander pourquoi ces espèces ont disparu. Globalement, c’est pour deux raisons : soit parce qu’on a fait disparaître leur milieu naturel, soit parce que la présence humaine est trop importante pour pouvoir cohabiter. Si on n’a pas une vision à 360 degrés de la conservation, ça ne

OBJECTIF : FAIRE AGIR

Parc animalier de Sainte-Croix

Route de Sainte-Croix à Rhodes 03 87 03 92 05 parcsaintecroix.com

et remontées, ce qui permet de les déplacer. C’est un bâtiment éco-construit qui va pouvoir accueillir du public. On parle de la Maison d’Yvonne, mais ce que les gens ignorent, c’est que 90 % des bâtiments installés sur le parc sont issus de la « récup ». On a la chance d’avoir les prestataires pour pouvoir le faire.

Hormis l’aspect sauvegarde du patrimoine, quelle sera la fonction de la Maison d’Yvonne ?

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peut pas marcher. Nous sommes « une start-up de l’écologie » car on parle de préservation mais aussi de reconstruction des milieux naturels. Comment renaturer l’agriculture, nos forêts, nos jardins, à différentes échelles. Comment réussir à concilier vie humaine et nature. Ce sont toutes ces questions que nous nous efforçons d’appréhender.

Vous vous êtes lancé dans la reconstruction d’une maison traditionnelle mosellane qui fera office de porte d’entrée à la nouvelle Ferme de Gérald. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce chantier spectacle ?

La Maison d’Yvonne est un projet de conservation d’une bâtisse traditionnelle mosellane vieille de 300 ans qui a été démontée pièce par pièce à Mittersheim avant d’être remontée au parc, dans les règles de l’art et avec les techniques d’antan, mêlées aux technologies d’aujourd’hui. Les maisons lorraines à pans de bois ont cette spécificité de pouvoir être démontées

L’objectif est que dès 2025, elle serve à abriter l’École de la Nature de Sainte-Croix. On y trouvera des salles de classe qui accueilleront tous les types de public : scolaires, entreprises, familles… pour former, instruire, et aller plus loin dans les domaines liés à la biodiversité et à la conservation. Évidemment, tout le parc est déjà d’une certaine manière une « école de la nature », puisque nos équipes y forment chaque année 25 000 scolaires sur le terrain, mais la Maison d’Yvonne sera le lieu emblématique pour parler de la démarche de Sainte-Croix et de nos actions qui dépassent celles d’un parc animalier. Ce qui est important pour nous, c’est d’avoir un programme pédagogique réfléchi et qui fasse sens. Nous travaillons avec deux médiatrices scientifiques qui ont mis en place un programme ayant des objectifs de résultats. Par exemple, les élèves qui jusqu’ici ne venaient qu’une journée pourront revenir toute une semaine, à l’image d’une classe verte, pour approfondir les sujets, tandis que les entreprises qui voudront se former à une thématique, telle que le climat par exemple, pourront venir deux, trois jours et être « éduquées » sur les pratiques responsables. Le but étant d’apporter aux gens le bénéfice du « savoir » et de l’expertise de Sainte-Croix. Construite en 1723, la Maison d’Yvonne servira également à parler des pratiques de nos ancêtres qui avaient un impact carbone plus bas que le nôtre, mais aussi du fait qu’il y avait une diversité incroyable dans leurs jardins, qu’ils produisaient leur propre nourriture. Il y a beaucoup de choses à apprendre de leur mode de vie et de leur façon de cohabiter avec la nature.

La nouvelle Ferme de Gérald, trois fois plus grande que l’ancienne, projette d’être un véritable lieu de pédagogie. Offrir une ferme vivante de cette envergure aux visiteurs, est-ce une sorte d’hommage à votre grand-père agriculteur ?

Les Escapades Entretien

À mon sens, l’hommage à Gérald ne se limite pas à la ferme, mais à toute la thématique de l’agriculture, à la continuité de ses missions. Là où la Ferme des Vents est une ferme pilote où l’on va aller chercher de nouvelles solutions, la Ferme de Gérald sera un vrai lieu de sensibilisation du grand public aux notions de transition agricole. Avant même de créer le parc, Gérald était un véritable militant qui a fait beaucoup de choses pour l’agriculture. Chaque zone du parc transmet des messages à plusieurs niveaux. Sur la thématique de l’agriculture, par exemple, on va faire comprendre des notions simples aux enfants tel que le rôle d’une racine, ou ce qui fait qu’un sol est sec ou non, et comment cela influe sur les cultures, puis on va aller plus loin pour les adultes, sur les origines de l’agriculture, sur les différents modèles existants. On est toujours dans le « positif ». Il y a beaucoup de solutions qui existent, il faut juste les faire connaître. C’est notre rôle de les mettre en lumière.

Autre nouveauté au Parc animalier, une volière de 650 m2 a été installée sur l’île et l’étang des Cormorans, en milieu naturel.

C’est une première en France.

C’est un parfait exemple de notre vision à 360 degrés de la conservation. On ne se contente pas d’accueillir un couple de pygargues, on va réfléchir à comment dessiner un milieu plus favorable à l’espèce, en étudiant comment ils font pour nicher, en suivant grâce à des balises leurs trajets « au naturel », en analysant leurs comportements. À Sainte-Croix, tous les projets se font collectivement. Dans le cas que je viens de citer, c’est le parc des Aigles du Léman, porté par un passionné du pygargue, qui a lancé ce projet. Il s’est aperçu que l’homme avait pris toute la place en France, laissant très peu d’endroits au pygargue pour se poser, d’autant plus que c’est un animal très farouche. Ainsi, dans la technique d’élevage et de relâcher, il faut faire en sorte que le pygargue s’habitue à l’humain, non pas pour que celui-ci puisse le caresser, mais pour que l’oiseau tolère sa présence. C’est toujours une réflexion globale, un suivi scienti fique de l’espèce dans son milieu naturel... Au parc, nous ne menons pas une conservation « zoologique », mais de « naturalistes ». Et c’est pour cela aussi qu’on a la chance de pouvoir s’entourer de multiples partenaires dans chacune de nos actions. Nous travaillons notamment avec le Conservatoire d’espèces naturelles sur la renaturation de nos étangs, ou avec la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) qui a référencé plus

de 225 espèces sauvages sur le parc. Le pygargue se réinstalle en France et l’objectif principal du programme est d’avoir 80 individus relâchés dans le milieu naturel d’ici 2030.

L’univers de Néo a été étendu avec un nouveau parcours d’aventures de 6 000 m2 . Quel rôle le petit explorateur occupe-t-il pour le parc ?

Tous les sujets dont je vous parle sont à mon sens passionnants, mais il faut se rendre à l’évidence : les loups et les pandas roux font davantage rêver que le pygargue ou les 220 autres espèces sauvages présentes sur le parc, même si j’aimerais qu’un jour plus de gens se rendent compte de la richesse que cela représente. Si nous voulons

Nous ne menons pas une conservation « zoologique », mais de « naturalistes ».

continuer à émerveiller nos visiteurs, nous sommes obligés de dynamiser le parc chaque année en proposant des nouveautés. Pour autant, nous ne sommes pas des « collectionneurs » d’animaux, chaque espèce fait sens dans notre programme, donc nous n’allons pas adopter un ours polaire ou un tigre pour continuer à attirer le public, mais chercher à nous réinventer sans arrêt. Aujourd’hui, les gens adorent le sentier des cabanes, les pirogues, le parcours pieds nus. Ce sont des attractions qui datent de 2010 et nous voulions, avec ce nouveau parcours, renforcer ce côté ludique qui plaît beaucoup. D’un point de vue pédagogique, Néo est un gamin mosellan de 10 ans qui est notre ambassadeur de la biodiversité. Il ramène de ses voyages des découvertes et expériences à partager. Au parc, on accueille des espèces issues de la biodiversité mondiale pour parler de sujets plus larges que ceux de nos écosystèmes et territoires. Dans les prochains temps, nous voulons « rafraîchir » ce personnage et le mettre en avant. Il va notamment ramener les pratiques « low tech » de ses voyages, c’est-à-dire

les technologies utiles, accessibles et durables, le plus souvent inventées dans des pays en voie de développement. Aussi, cet hiver, Néo sera au cœur d’un spectacle son et lumière dans lequel il partira à la recherche de l’hiver à travers un parcours de 1,5 kilomètre. Décliné en seize ateliers féériques et éco-conçus, on y parlera de biodiversité et de climat, des raisons de la disparition de l’hiver et des façons de le ramener.

Depuis sa création, le parc sensibilise ses visiteurs au respect que l’on doit aux animaux et à la nature. Aujourd’hui, vous souhaitez engager davantage le public dans l’action.

Nous allons faire ce qu’on a toujours fait, mais en déplaçant les curseurs. Mon grand-père n’était pas « écolo » – personne n’était écolo dans les années 1960 –, mais dans la forêt, un trajet qui nous prenait cinq minutes lui prenait une heure, parce qu’il ne pouvait pas s’empêcher de regarder la petite bête, l’oiseau… Il est tombé amoureux de l’observation de la nature et il a toujours expliqué avoir créé le parc de Sainte-Croix avec l’espoir que les gens, en voyant les cervidés et les oiseaux qui se seront réinstallés ici, s’émerveilleraient et que tout irait mieux. C’était génial comme vision ! Mais pour le grand public, cela ne suffit pas, il faut aller plus loin, être dans le « faire agir ». Concrètement, on continuera la sensibilisation aux animaux, mais ce n’est pas parce qu’on apprend à faire la différence entre un daim et un cerf qu’on agit pour la nature. Ce qu’on veut faire, c’est pousser les gens vers des actions concrètes. En travaillant en partenariat avec les associations et des médiatrices scientifiques, on veut être plus militants, construire un discours efficace et d’actualité, donner les clés de compréhension au public et l’inciter à agir. Ça peut être par un don financier, mais c’est beaucoup plus large que ça. Cela peut passer par la signature d’une pétition, l’incitation à refleurir les balcons en ville pour « nourrir son abeille », ou l’installation d’une mare si on vit à la campagne... Nous allons créer une communauté d’ambassadeurs qui sera initiée en septembre et qui accueillera tous les gens qui veulent se lancer des défis concrets. Nous allons utiliser notre visibilité et servir de relais entre le grand public et les associations avec lesquelles nous travaillons et qui ont besoin de recruter du monde pour des actions précises. Jusqu’à aujourd’hui, nous avons été bons sur la sensibilisation du public pendant la visite du parc. Désormais, nous voulons travailler sur l’après, avoir de l’impact, afin que ce qui a été appris au parc soit appliqué et concrétisé par la suite.

Lucas Singer, directeur adjoint du Parc animalier de Sainte-Croix

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Les Métiers

Féérie devanture Superhéros éclairés L’éducation, ce tout Faire danser les ours.

Les Métiers — Arts numériques Rencontre avec les acteurs du patrimoine vivant AV Extended, qui en près de 15 ans ont réussi à s’imposer parmi les leaders du mapping. Mêlant arts numériques, culture et architecture, l’entreprise basée à Strasbourg poursuit son rayonnement en France et à l’international, avec notamment l’ouverture d’un centre d’art numérique. Show devant.

Monumental

Les Ateliers éclairés tournent au ralenti ce matin-là. Le café coule à flots pour tenter de réveiller la joyeuse équipe du tiers-lieu installé à la Coop, qui a veillé tard cette nuit. La nuit, ce précieux passage dans l’obscurité, indispensable au travail d’AV Extended et témoin des plus spectaculaires réalisations dans le monde, à commencer par Strasbourg où l’aventure a démarré.

Archi beau

En réalité c’est à Orléans, sur les bancs du lycée, que l’histoire s’écrit entre Jérémie Bellot et Josselin Fouché, deux des trois associés réunis des années plus tard à la fac de la capitale alsacienne. L’un se spécialise en cinéma et architecture et l’autre en multimédia. De leur complémentarité et de l’envie d’expérimenter de nouvelles matières artistiques ensemble, naîtra AV Lab en 2010, une association réunissant la crème des architectes et artistes locaux tout juste sortis des Arts déco. Ce vivier créatif niché dans un immeuble de la rue des Frères devient rapidement un lieu d’expérimentation autour du VJing et du vidéo-mapping, en développant des expériences immersives autour du son et de la lumière. Dans le même temps, viendra une première collaboration avec L’Ososphère, événement strasbourgeois longtemps fantasmé par le duo et devenu l’une des références en matière d’arts numériques et musique électro, le tout ouvert sur la ville. À travers sa proposition artistique pluridisciplinaire, ce festival pensé par Thierry Danet questionne la place de la culture dans la fabrique de la ville et dans l’espace urbain. Une philosophie que partage l’artiste et architecte Jérémie Bellot, bercé par le cinéma de Fritz Lang et son visionnaire Metropolis. Ses moteurs, valoriser les sites patrimoniaux et réinventer l’existant : « Je me suis vite rendu compte que l’architecture traditionnelle et conventionnelle n’était pas pour moi ! J’aime l’architecture qui raconte l’histoire d’un lieu, du décor à l’ornemental » confie-t-il.

De Strasbourg à Petra

Avant d’exporter leur savoir-faire, Strasbourg s’impose comme un terrain de jeu artistique exploratoire, où se succèdent les opportunités. L’entreprise se développe, déménage et se diversifie en ajoutant la scénographie comme nouvelle corde à son arc. Un hypercube tridimensionnel créé dans le cadre de la Nuit des Cathédrales, sera son premier projet marquant inspiré du Corpus Hypercubus de Dalí. L’agence multimédia conceptualise et fabrique également une sculpture géante, sous forme d’œuvre manifeste.

Democracy Is An Illusion? sera installée au cœur de l’hémicycle du Conseil de l’Europe, tout en y associant performances visuelles et sonores. La mue s’opère, AV se structure, grandit et réunit désormais un collectif d’artistes, architectes, développeurs, sound designers et experts en modélisation 3D et motion design.

Pendant plusieurs années, les façades de monuments emblématiques de la ville vont s’animer et faire briller les yeux des Strasbourgeois. Le palais Rohan, l’Aubette, le barrage Vauban, la Laiterie, le palais du Rhin et la consécration avec la cathédrale de Strasbourg, lors des spectacles d’été orchestrés par l’agence événementielle Passe Muraille.

On ne compte plus le nombre de créations mapping projetées sur des sites patrimoniaux d’exception aux quatre coins du monde, à l’instar du Petra Light Festival en Jordanie ou du projet Iris sur la cathédrale Saint-Jean de Lyon qui vaudra à AV Extended le Trophée des Lumières en 2021. « Notre travail c’est de jouer avec la perception du réel, en faisant vivre un bâtiment et sa façade. On s’inscrit en quelque sorte dans la lignée des arts optiques et cinétiques, où l’on crée un espace-temps associé à un son » précise Jérémie. « Un vidéo-mapping architectural, c’est des mois de modélisation. Mais le but, c’est que personne ne comprenne comment c’est fait ! »

Josselin Fouché et Jérémie Bellot, cofondateurs d’AV Extended

C’est dans cette expérimentation inépuisable, et animé par une soif frénétique de proposer des projets toujours plus fous, que Jérémie Bellot s’associe au DJ Michael Canitrot pour faire danser les monuments ! Une direction artistique pensée à quatre mains, alliant musique électro, arts numériques et patrimoine, qui voit le jour en 2019 sous le nom de Monumental Tour et inaugurée au palais Rohan à Strasbourg. L’abbaye du mont Saint-Michel, la tour Eiffel, le Palazzo Ducale à Gênes ou l’hôtel de ville de Lisbonne ont depuis été le théâtre de ces shows grandioses.

La vie de château

L’« étendue » du projet AV (extended en anglais) rassemble aujourd’hui 20 salariés répartis dans deux studios : à Strasbourg au sein des Ateliers éclairés, et à Beaugency dans le Centre-Val de Loire, où a été inauguré un centre d’art numérique en 2021. Ce château situé entre Orléans et Blois est un ancien musée, dont Jérémie Bellot et sa compagne Anne-Sophie Acomat, architecte spécialisée en patrimoine et troisième associée, font l’acquisition en 2020 en pleine crise sanitaire. En seulement un an, le site ouvre ses portes sur 2 500 m 2 (dont 1 500 d’exposition). Le château de Beaugency accueille environ 20 000 visiteurs par an, avec un objectif à terme de 30 000.

Comment réinventer le parcours visiteur et créer du lien entre le patrimoine et la nouvelle génération ? C’est le défi que tente de relever AV Extended sur les territoires, à travers la valorisation de l’existant : «  On essaie d’imaginer les lieux de diffusion de demain. Ma conviction c’est que le public n’ira plus dans les salles de spectacle classiques. Quand on va d’un Zénith à un autre, il ne se passe pas grand-chose, alors que dans un lieu patrimonial, tout change ! » confie le cofondateur. Avec un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros depuis trois ans, l’agence multimédia et concepteur lumière vise les 3 millions en 2025. C’est d’ailleurs grâce à une levée de fonds d’1,5 million d’euros en 2023, que l’entreprise a pu se doter de vidéoprojecteurs haute puissance et ainsi intégrer toute la chaîne de production et conserver son autonomie sur les réalisations. Comme à Nancy sur la place Stanislas, où depuis trois ans, l’événement estival La Belle Saison offre au public un mapping vidéo 270 degrés, l’une des surfaces de projection les plus importantes d’Europe. «  Le seul endroit où il est aujourd’hui impossible de projeter, c’est sur la lune ! » s’amuse Jérémie. Mais avec ces superhéros éclairés, rien n’est impossible.

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— Graphisme Sensible, léger, délicat… L’art et la créativité d’Isabelle

Lentz sont à l’image du nom qu’elle a donné à sa petite entreprise, Flocon de Plume. En tant que « créatrice d’élégances visuelles », elle jongle entre la photographie, l’illustration, le design graphique et la décoration, tout en s’imprégnant de l’univers de ses clients pour le restituer à travers des créations sur mesure.

Émotions graphiques

Passionnée de dessin depuis son plus jeune âge, Isabelle Lentz a mis son imagination au service du graphisme et de la décoration. Son amour pour la photographie a surgi plus tard, lorsqu’un appareil Coolpix lui est tombé dans les mains à l’âge de 25 ans. C’est cette pluralité d’approches artistiques qui lui permet d’embrasser pleinement la fantaisie dont elle fait preuve avec Flocon de Plume. « À travers le design graphique, l’illustration, la photographie et la décoration, j’exploite toute ma palette de talents, offrant ainsi à mes clients une explosion de couleurs et d’émotions. »

Sublimer l’instant

« J’ai plusieurs cordes à mon art », déclare Isabelle Lentz au sujet de ses multiples casquettes, qu’elle met à profit dans des créations étonnantes et originales. Des cartes d’anniversaire pour les enfants à un shooting photo pour mettre en vedette les grand-mères, elle surprend par son inventivité sans bornes, toujours dans l’optique de créer des souvenirs inoubliables pour les particuliers. « Collectionner les instants fugaces, les épingler comme des petits trésors, les transformer en souvenirs éternels », telle est sa ligne directrice. Une importance conférée à l’émotion et à la poésie qu’elle exprime aussi dans ses projets à destination des professionnels, à l’image de l’identité visuelle tout en équilibre qu’elle a créée pour une entreprise de conseil, fruit de l’accompagnement sur mesure qu’elle tient à offrir à ses clients.

La poésie dans un objet Jamais à court d’inspiration, Isabelle Lentz amène Flocon de Plume vers des projets de décoration d’espaces et de conception d’objets inspirés « de vos goûts, de votre histoire, de votre mode de vie pour créer votre “chez-vous” en toute harmonie ». D’ailleurs, elle travaille en ce moment à la création de fleurs en papier personnalisées et réalisées avec ses propres illustrations, pour produire des objets uniques qui feront écho à la sensibilité de chacun.

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Vente à la ferme - Asperges d’Alsace

Vente à la ferme

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À bonne école

Communication, graphisme, animation 3D, cybersécurité... Où vont les créatifs et les passionnés du digital pour se professionnaliser ? Tour d’horizon de trois écoles strasbourgeoises qui forment aux métiers de demain, chacune à leur façon mais avec la même ambition : amener chaque talent vers la plus belle carrière.

Par Caroline Lévy et Paola Guzzo
Illustration Fanny Delqué pour Zut

Objectif journaliste !

Voilà maintenant plus de dix ans que l’Institut européen de journalisme (IEJ) s’est installé à Strasbourg, sur le campus MediaSchool aux Docks Malraux. Bénéficiant de studios ultra pros et d’équipements dernier cri, les élèves sont en totale immersion et seront opérationnels dès la fin de leur cursus. Rencontre avec Emmanuel Guingand, sympathique et dynamique directeur à la tête du campus depuis quatre ans.

tout est tourné vers la professionnalisation et nous sommes les seuls dans le Grand Est à proposer un tel cadre.

Avec des professionnels des médias, donc ?

Exclusivement ! Nos intervenants sont tous issus du monde des médias et encouragent nos étudiants à pratiquer sur le terrain et en studio. C’est d’ailleurs un grand reporter de France Télévisions, Jacques Rigaud, qui officie en tant que coordinateur pédagogique de l’école. Un peu comme un prof principal ! Nos professionnels travaillent chez NRJ, Nostalgie, Arte, BFM Alsace, Stras TV, les DNA, ou encore France 3.

Comment voyez-vous les journalistes de demain ?

Vous êtes arrivé pour diriger ce campus à une période compliquée, quelles ont été vos premières actions ?

J’ai intégré MediaSchool le 3 septembre 2020, en pleine période de crise sanitaire. L’école traversait aussi une période difficile et de deuil après la disparition de Luc Buckenmeyer, l’ancien directeur. Il a fallu conserver son héritage, réinventer et reconstruire. À cette époque, avec les restrictions liées au Covid, j’ai tout de suite testé différentes configurations pour faciliter l’enseignement à distance pour les 400 élèves du campus. Un vrai challenge. J’ai parfois fait des erreurs, mais on apprend !

Quelles sont les caractéristiques de l’IEJ par rapport à d’autres formations en journalisme ?

Il n’y a pas de rivalité avec les autres formations, nous proposons une approche différente de celle du CUEJ par exemple. L’IEJ forme de futurs « techniciens » du journalisme. Un cursus qui s’étend désormais sur quatre ans pour les nouvelles promotions, avec un titre RNCP (répertoire national des certifications professionnelles, ndlr) à la clé. D’autre part nos programmes favorisent la polyvalence. À Strasbourg par exemple, les élèves ne se spécialisent pas dans un média en particulier. Ils doivent être aussi à l’aise avec la presse écrite, la radio, la télévision ou le web ; et savoir ma îtriser tous les outils. Les stages et l’alternance permettent aussi des immersions professionnelles. À l’IEJ,

Les nouvelles générations sont en train de construire le journalisme de demain, on les accompagne et c’est à elles de transmettre par la suite. J’imagine les journalistes se tourner vers des spécialisations thématiques. Ils seront plus agiles et compétents sur tous les formats, presse écrite, digital et audiovisuel, mais experts sur un seul sujet. Nous les formons dans ce sens. Ils devront également renforcer les contrôles et vérifier les sources de l’information. Un de nos combats.

Paroles d’étudiant·es

On a croisé le chemin de Martin et Lisa, deux étudiants en Bachelor 2 à l’IEJ qui ont réalisé leur stage de fin de première année chez Chicmedias.

L’occasion de les interroger sur leur cursus et leurs motivations.

Qu’est-ce-qui vous a motivés à choisir la voie du journalisme ?

Martin J’ai été éduqué à l’info. Je lis Le Monde et écoute France Info. J’avais envie de faire des reportages sur le terrain et d’être au cœur de l’action.

Lisa Le journaliste voit ce que les gens ne peuvent pas voir. Il retranscrit et partage. Et c’est ce que j’aime dans le métier.

Pourquoi avoir choisi l’IEJ ?

M. J’ai été en fac d’histoire avant d’arriver à l’IEJ. J’ai vite compris que j’avais besoin de faire des études vivantes et tournées vers le présent. L’école est accessible sans licence, ce qui m’a décidé.

L. J’avais besoin de me confronter à des profs qui sont des professionnels du terrain et c’est le cas ici.

Après cette première année, que pouvez-vous en dire ?

M. En seulement un an, on a déjà pu découvrir presque toutes les façons de faire des reportages. C’est assez dingue.

L. Ici il faut savoir tout faire et c’est ce que j’aime.

Comment imaginez-vous votre métier demain ?

M. et L. Le journaliste devra évoluer avec un régulateur qui authentifiera les informations, à l’heure de l’IA générative et de l’explosion des fake news. Un journalisme qualifié qui vit avec son temps.

iej.eu/strasbourg

Imaginer l’intimité

Rencontre avec l’architecte d’intérieur Alice Delpeyroux, cheffe de projet de l’atelier 3DA et coordinatrice du parcours architecture d’intérieur à la MJM

Graphic Design.

Le calme qui règne à l’Atelier 3DA est seulement troublé par le craquement du parquet. Dans un décor épuré, deux alternantes et une collaboratrice complètent l’équipe de l’agence créée il y a cinq ans par Alice Delpeyroux, une jeune femme de 32 ans au parcours déjà riche. Diplômée de l’école d’architecture de Bordeaux, elle parfait sa formation au Québec, à La Cambre à Bruxelles, puis à Paris avant de s’installer à Strasbourg. Parmi ses plus beaux défis, les bureaux de la rédaction de Beaux Arts Magazine et son magistral escalier intérieur, imaginé en 2019 en collaboration avec Atelier Parisien. Même esprit entre le bois et le blanc pour la boutique de l’opticien Nicolas Schott à Haguenau, son dernier projet. Ces expériences, Alice Delpeyroux s’en nourrit depuis trois ans pour former les étudiants en architecture d’intérieur de la MJM, avec l’objectif de leur apprendre à « développer une capacité de réflexion, oser adopter une posture qui leur ressemble ». En plus des cours de soutien qu’elle donne aux personnes en reconversion professionnelle, elle accompagne chaque année 80 élèves, des deuxième année pour leur cours de « scénographie et maquette », et des troisième année en « conception projet »

Apprendre la profession dans la rigueur et la bienveillance

Chaque trimestre, ces derniers réalisent un projet individuel suivi par Alice Delpeyroux. « L’architecture d’intérieur, c’est beaucoup de philosophie et de psychanalyse parce qu’on rentre dans l’intimité des gens », résume la coordinatrice de la formation à la MJM. « Mon rôle c’est que la créativité des élèves ne soit pas aux dépens de l’usage et que la réglementation ne soit pas au x dépens de la créativité », c’est de trouver un équilibre, à une époque régie par les réseaux sociaux et marquée par le changement climatique. Les architectes d’intérieur de demain devront être «  responsables  », généreux mais aussi «  rigoureux  », et pour ça, il faut de la bienveillance. De la maison de sa grand-mère dont on se rappelle l’odeur, au rêve de créer un restaurant dans une église millénaire, rien n’est impossible quand on n’a pas peur d’essayer encore et encore. Quand Alice Delpeyroux « ressent une émotion en regardant les croquis  », et qu’elle aimerait «  voir ce projet exister », c’est gagné.

MJM Graphic Design

5, rue Fritz-Kiener à Strasbourg atelier3da.com

Paola Guzzo / Photo Pascal Bastien

L’innovante

Du haut de ses 35 ans, Anastasia Feuerstein a déjà eu plusieurs vies. Son dernier challenge : coordonner l’ouverture de Strasbourg Ynov Campus qui vient de faire sa première rentrée. Elle est aux manettes de cette école audacieuse qui forme aux métiers du numérique de demain. Portrait.

En plein cœur de l’Esplanade, à deux pas de l’université, c’est un tout nouveau campus qui vient d’ouvrir ses portes, Ynov Strasbourg, seule antenne du Grand Est. Cette école spécialisée dans les métiers du digital et du numérique vient de fêter ses 10 ans et comptabilise déjà 14 écoles réparties sur toute la France et même une formation en ligne !

Ici, le mobilier est flambant neuf et les équipements fraîchement installés, la pétillante directrice nous accueille pour parler de son « bébé » qui voit enfin le jour après un an de travail acharné. « Il a fallu trouver des locaux et recruter toute l’équipe pédagogique. Quatre-vingts personnes au total, ce n’est pas rien !  » précise Anastasia tout sourire.

Dix salariés et 70 intervenants pour être exacte, qui enseignent dans des filières aussi variées que l’audiovisuel, le digital design, la cybersécurité, l’informatique, l’architecture d’intérieur ou encore la 3D et les jeux vidéo. Sans oublier le marketing et la communication digitale.

Anastasia baigne dans l’univers de l’éducation depuis déjà quelque temps, puisqu’elle a dirigé plusieurs écoles privées à Genève et Strasbourg. Cette globe-trotteuse qui a fait ses études entre Paris, Milan et Birmingham a tout de l’aventurière qui n’a pas froid aux yeux et sait transformer une situation délicate en opportunité. Une expérience qu’elle vivra notamment en Thaïlande, en ouvrant une agence événementielle artistique ! Agile et fine analyste des besoins de son environnement, la trentenaire met désormais ses talents au service d’Ynov.

« On a besoin de comprendre notre écosystème, de nouer des partenariats avec les collectivités et les entreprises locales pour co-construire ensemble et comprendre les besoins du territoire. 60 % des métiers et des postes à pourvoir dans cinq ans n’existent pas encore ! Avec Ynov on veut être des catalyseurs de talents, comme première chaîne de valeur. »

Une ambition qui se construit aux côtés des étudiants eux-mêmes en leur permettant d’être les premiers bâtisseurs de leur avenir, plus éthique, plus inclusif et plus numérique.

Strasbourg Ynov Campus 16, rue de Leicester ynov.com

Photo : Steve Josch

UNE COLLECTION DE HORS-SÉRIES SUR LE RACING

Prochaine parution « Les amoureux du RCSA » → Décembre 2024

Un seul amour et pour toujours #4

Racing : Il était une foi

Sortie : hiver 2023 204 pages – 22€

Heures fastes, heures sombres, chemins de croix, renaissances : le Racing Club de Strasbourg, c’est une histoire qui s’écrit, se chante, se raconte, au-delà du seul ballon rond. Une histoire de foi : celle des amoureux et amoureuses, forces vives et sportives, supporters et supportrices d’un club plus que centenaire, incarnation de l’âme, de la passion et de la ferveur populaire d’une ville et d’une région charnières dans l’Europe de l’humanisme et de la paix.

Un seul amour et pour toujours #3

Racing :

Sortie : hiver

Un seul amour et pour toujours #2

Racing : une passion sans limites

Sortie : hiver 2021 204 pages - 22€

Un seul amour et pour toujours #1 11 couvertures au choix

Sortie : été 2020 436 pages - 37€ (au lieu de 47€)

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