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L’actu
from Zut Strasbourg n°47
by Zut Magazine
Jérémy Gobé, Coraïl artefact Ackroyd & Harvey, Mother & Child, 1998
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ST-ART 26 au 28 novembre Parc Expo st-art.com
ST-ART
La 25e édition de la foire européenne d’art contemporain et de design est placée sous le signe des retrouvailles pour et avec le monde de l’art contemporain. Entretien avec Patricia Houg, directrice artistique.
Peut-on parler de nouveau départ pour la foire, après l’annulation en 2020 ?
Oui et non, parce que la foire est quand même inscrite dans le territoire depuis longtemps. Après des mois de report, d’incertitudes et de difficultés, où la culture était devenue nonessentielle, on se dit qu’on essaye de repartir du bon pied et avec conviction.
Quel impact a eu la crise sur le marché de l’art ?
La crise n’a pas seulement laissé des galeristes sur le carreau, beaucoup d’artistes se sont retrouvés en déshérence. Lorsque vous ne pouvez pas acheter de matériel pour fabriquer, la réation artistique en pâtit. On peut être fier de pouvoir faire à nouveau se rencontrer le public et les collectionneurs, autour d’une création qui a été en suspens pendant des mois.
ST-ART célèbre son 25e anniversaire, qu’est-ce que cela représente ?
Cela veut déjà dire que cette foire est hors normes. C’est une belle manifestation qui a gagné ses lettres de noblesse et arrive à maturité. ST-ART peut s’enorgueillir d’avoir formé des collectionneurs et des acheteurs, et d’avoir amené l’art de façon didactique au public. Ce sera une fête de facto parce qu’on sera content de se retrouver. J’avais prévu dès 2019 de mettre en avant ces artistes qui se préoccupent du devenir de notre planète et de ce qu’on en fait en tant qu’humanité. Je crois que ce projet est encore plus d’actualité. Grâce à la Galerie de l’Estampe, on fait une exposition autour de Raymond Waydelich. C’est ainsi que nous avons prévu de fêter nos 25 ans, en mettant en avant un artiste du territoire qui n’a plus rien à prouver. (F. V.)
L’actu.
Photos Christoph de Barry
Music Non Stop
Un nouveau disquaire à Strasbourg ? Le bouche à oreille s’est rapidement transformé en traînée de poudre dans les milieux autorisés. La visite s’imposait. On arrive chez Non Stop Music, ouvert depuis le 1er septembre dans une ancienne auto-école de 25m2 à deux pas du Pont-Corbeau, la bouche en cœur voire en coin, pour s’enquérir de ce qui avait bien pu amener un tel projet. Sauf que face à 4000 33T, 9000 45T, 1500 CD, quelques livres, DVD et même des K7, on a commencé à digger. Quitte à risquer la courbature au prix d’un single de Truly Smith, ersatz de northern soul fantasmé depuis toujours, du hit de The Style Council Shout to the Top, qui fait toujours secouer les dance-floor, et d’un standard des Easybeats à 3€ pour cause de pochette éventrée. Voilà pour les emplettes du jour. À 59 ans, François Follénius, ancien directeur commercial du groupe SIAT, l’une des plus grandes scieries d’Europe localisée à Urmatt, réalise ici son vieux rêve. Ado, il répondait à l’équation Beatles-Stones par… Kraftwerk, qui lui a inspiré le nom de sa boutique composée à 98% de pièces d’occasion. Largement appréciable en ces temps où le prix du vinyle neuf connait une inflation sans précédent. Surtout pour les plus jeunes générations, avec qui il prend le temps d’échanger. « En plus, ils m’apprennent plein de trucs », concède-t-il en songeant à ajouter des bacs hip-hop dans son antre. Et tant pis pour les courbatures. (F.V.)
Music Non Stop 19, quai Saint-Nicolas Ouverture lundi au samedi – 9h à 19h
L’actu.
Le Grand Vide
À peine sorti, déjà un best-seller. La première bande dessinée de Léa Murawiec, signée chez les locales éditions 2024, est une fiction dystopique creusée jusqu’à l’effroi, qui nous rappelle par moment Black Mirror. L’histoire se passe dans un décor urbain évoquant la frénésie des villes asiatiques, où les panneaux publicitaires sont remplacés par les prénoms et noms des habitants. Car ici, le taux de popularité des êtres humains fonde leur espérance de vie. En d’autres termes, si personne ne pense à vous, c’en est fini. Aussi, tous les moyens deviennent bons pour ne pas sombrer dans l’oubli. Manel Naher a un sacré problème : son homonyme étant une pop star, sa vie est régulièrement menacée. Avec Ali, son ami, ils décident de quitter cette vi(ll)e vide de sens pour rejoindre « le grand vide », sorte d’espace non identifié et mystérieux qui semble échapper à toutes lois… Mais rattrapée par une urgence – celle de la mort –, Manel Naher va oublier tous ses principes pour accéder à l’immortalité. Le récit est fouillé et précis sans jamais s’essouffler, en équilibre entre le drame et le fantastique. Le Grand Vide nous emporte vers d’autres réflexions : le rapport à la disparition et à la solitude, le culte de soi et de l’image, en passant par la sur-information et au « tout, tout de suite ». Le dessin se plie aux mouvements de son personnage principal, devenant tantôt élastique, tantôt raide, tantôt fluide. Léa Murawiec déborde régulièrement du cadre quand la narration l’exige, quand les visages se déforment au fil des embûches. Et les larges planches où se déploie la ville sont ahurissantes. Le Grand Vide est d’une grande intelligence. Ça sent très fort le prix à Angoulême.
(C.B.)
Léa Murawiec, Le Grand Vide éditions 2024 editions2024.com