3 minute read
Société
from Zut Strasbourg n°48
by Zut Magazine
70 La tribu.
Par Caroline Lévy Photos Jésus s.Baptista
Advertisement
Michaël, 32 ans
Moniteur guide de pêche
« Je suis issu d’une famille de pêcheurs, j’ai commencé à quatre ans dans le HautRhin, avant de m’installer à Strasbourg. Ici, c’est une pêche de proximité qui permet de se réapproprier les milieux aquatiques. On trouve quasiment tous les poissons dans l’Ill, le Rhin et les canaux : brochet, perche, sandre, silure et l’aspe qui devenu l’emblème du street fishing local.Le poisson est un partenaire de jeu, mais il a plus de valeur dans l’eau que dans mon assiette. Prélever un poisson du milieu, c’est faire le choix qu’il y en ait un de moins, alors que la population aquatique est déjà très réduite en France. »
Pêcher pour prendre son temps ?
« On retrouve cette liberté au bord de l’eau, dont on a été coupé à cause des restrictions liées à la crise sanitaire. On prend le temps d’apprécier le moment. La pêche me permet de me recentrer et de me reconnecter à la nature.
wow-fishing.fr
Prendre son temps, ressentir sa ville au fil de l’eau qui l’entoure, comprendre son rythme, sa couleur, de la population qui l’habite aux déchets qui la polluent. Depuis plusieurs décennies, la pêche urbaine à Strasbourg séduit des pratiquants toujours plus jeunes, amoureux de nature et respectueux de l’écosystème local. Le street fishing est devenu un plaisir sportif qu’ils érigent en art du geste, avec élégance et éthique. Pour la plupart d’entre eux, ils ont fait du no-kill une philosophie. Pêcher et relâcher à l’eau le poisson dans les meilleures conditions, leurré mais pas abîmé, pour peut-être recroiser sa route. Leur objectif est la touche, qu’importe le temps de la prise. Balade au bord de l’Ill avec ces pêcheurs itinérants qui font de la pêche un art de vivre, en symbiose avec la nature en plein cœur de la cité. « Ma première fascination pour le monde aquatique, qui m’a ensuite mené à la pêche, remonte à l’âge de six ans. Ce qui est merveilleux à Strasbourg, c’est qu’on ne sait pas à l’avance ce qu’on va pêcher. C’est la loterie ! La beauté de la pêche, c’est sa complexité mais aussi la rencontre avec les autres. J’ai sociabilisé avec des gens avec qui je ne sociabiliserais pas habituellement. Ce sont tes potes qui vont t’apprendre à pêcher alors qu’avant c’était plutôt ton père. »
Pêcher pour prendre son temps ?
« J’aime l’aspect canalisateur de la pêche. Il permet de ne pas faire de bêtises, à un âge où on en fait beaucoup ! Mais ça me permet surtout de marquer un break après une journée agitée. »
Son spot fétiche
« Tout le coin des Halles jusqu’à Gallia, pour la diversité des espèces mais aussi parce que c’est ici que je fais le plus de touches ! »
Nassim, 17 ans
Lycéen
« J’ai commencé à pêcher il y a deux ans en regardant une vidéo sur Youtube ! Et puis je suis tombé sur une canne qui traînait dans la cave, je suis allé acheter des asticots et je me suis lancé ! Depuis, j’en ai converti certains mais j’ai surtout rencontré des copains au bord de l’eau. Je pratique le no-kill, mon objectif est de retrouver un poisson que j’ai déjà relâché. Ça ne m’est pas encore arrivé mais j’ai bon espoir. »
Pêcher pour prendre son temps ?
« Moi, ça m’apporte un certain bienêtre. Je peux passer des heures voire des journées pour une prise. Et parfois je ne touche rien mais j’essaie de comprendre la technique en observant la couleur de l’eau et sa température. »
Le spot fétiche
« J’adore pêcher aux Docks Malraux au pied de Rivétoile. Je viens environ tous les deux jours seul ou avec des copains, mais un peu moins en hiver… »
Le silence va plus vite à reculons, trois fois, le silence va plus vite à reculons, trois fois. Je répète : le silence va plus vite à reculons, trois fois.
Jean Cocteau, Orphée