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8 e art magazine • été 2014
8e art est une publication bimestrielle des Editions Bagatelle 19, avenue de Delphes 13006 Marseille 09 81 80 63 79 Numéro ISSN : 2267-4837 Dépôt légal : Avril 2014 Directeur général : Nicolas Martin n.martin@8e-art-magazine.fr Directeur de la publication : Frédéric Guerini f.guerini@8e-art-magazine.fr
MARSEILLE-PROVENCE ART&CULTURE FREEMAGAZINE
Rédactrice en chef : Emmanuelle Gall e.gall@8e-art-magazine.fr
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# 31 Été 2014
SPÉCIAL FESTIVAL ? Par
Emmanuelle Gall, rédactrice en chef
À
l’heure où, selon la formule consacrée, nous mettons sous presse un numéro en partie consacré aux festivals de l’été, un mouvement de grève lancé par les intermittents du spectacle entraîne déjà l’annulation de nombreuses manifestations en France. Dans un tel contexte, il nous a semblé opportun de relayer la lettre ouverte au gouvernement, adressée le 16 juin dernier par des directeurs de structures culturelles marseillaises. « Nous sommes directeurs de structures, de lieux et de festivals, à Marseille. Nous vous demandons instamment de ne pas agréer l’accord Unedic du 22 mars dernier et de réouvrir des négociations sur la base des propositions du comité de suivi qui, en accord avec les coordinations des intermittents, a fait des propositions pertinentes, justes, adaptées et plus économiques pour la renégociation des annexes 8 et 10 dans le cadre des négociations sur l’assurance chômage. Nous ne reviendrons pas sur l’analyse de l’accord du 22 mars, dont nombre de décryptages et de lettres ouvertes vous ont fait état : cet accord est unanimement jugé injuste, inefficace et destructeur.Nous attirons votre attention sur le fait que cinq festivals sont à l’affiche à Marseille en ce mois de juin. Cinq festivals = 137 films, 250 séances de cinéma, 90 compagnies de danse-théâtre et groupes de musique en spectacles et concerts, 7 expositions d’art contemporain, plus de 900 artistes professionnels, auxquels il faut rajouter les actions de sensibilisation : ateliers de pratique amateur, stages professionnels, conférences... qui génèrent des centaines d’emplois permanents et intermittents, ainsi que saisonniers dans le secteur du tourisme. Un premier spectacle a été annulé dans notre ville le 13 juin dernier. Le lendemain, le festival Uzès Danse a été totalement annulé. Les menaces de grève s’intensifient de jour en jour : avec elles, le risque des annulations. Votre fin de non-recevoir engagerait votre entière responsabilité dans ces annulations dont les collectivités territoriales ne pourront assumer les conséquences financières […]. » Premiers signataires :
En couverture. La Cour d'honneur au festival d'Avignon © Christophe Raynaud de Lage - Festival d'Avignon
Alain Arnaudet, Hubert Colas et Jean-Marc Montera, Alain Fourneau, Régis Guerbois, Pierrette Monticelli et Haïm Menahem, Josette Pisani, Apolline Quintrand, Jean-Pierre Rehm, Ferdinand Richard, Emilie Robert, Christian Sebille.
SOMMAIRE
MARSEILLE-PROVENCE ART&CULTURE FREEMAGAZINE
#31 Été 2014
06
LA PHOTO
« Si la différence vous effraie… »
08
ACTUS
12
LA RENCONTRE
12
Nathalie Marteau, l’art du vagabondage 16
34
L’OEUVRE
Oiseau sculpté, MuCEM
LES EXPOS DE
L'ÉTÉ
18
32
Claude Lévêque plante la tente au Corbu
34
Le mystère Delvaux
36
Le MAC a vingt ans et puis s’en va
38
Bienvenue sur la planète Ogor
40
Le supplément d’art de Dominique Angel
42
Le Préau s’offre un best of
44
Drôle de guerre
46
Danse avec Frank Gehry
Dunk
48
Les Cézanne d’Amérique
LA BALADE
50
Art, sons et lumières au château
L’ENDROIT
La Distillerie, la fabrique de théâtre 21
22
L’ARTISTE
Frédéric Nevchehirlian, dans le rétro
L’OBJET
Les Muettes, cigales design 24
L’ALBUM
Jean-Marc Montera, What’s up 26
28
LE RESTAURANT
Arles, dans les pas de Van Gogh
4
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54
52 DOSSIER
FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
44
78
54
Le festival de Marseille, vu par Michel Kelemenis
58
Le FID, vu par Vanessa Santulo
61
Villeneuve en scène, vu par Valérie Bournet
64
Avignon, vu par Édith Amsellem
68
Les Suds, vus par Tatou
71
Jazz des Cinq Continents, vu par Raphaël Imbert
74
La Roque d’Anthéron, vu par Nathalie Négro
98
William Kentridge, artiste total
PORTFOLIO
Klimt et Vienne, un siècle d’or et de couleurs
L’ÉVÉNEMENT
92
SCÈNES
98
MUSIQUES
102
104 ENFANTS
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LA PHOTO
« SI LA DIFFÉRENCE VOUS EFFRAIE, IMAGINEZ LA CONFORMITÉ… » La campagne d’un nouveau parti ? Une parodie de la scène politique européenne ? Non, ce diptyque est l’œuvre de Laurent Garbit, auteur de la communication du 3 bis F, le centre d’art contemporain situé au sein de l’hôpital psychiatrique Montperrin à Aix-en-Provence. « C’est un lieu hors des sentiers battus et atypique. Ils acceptent que je leur propose un travail artistique et poétique, plutôt qu’une simple communication. Il n’y a pas d’autocensure », explique le photographe et plasticien. Pour illustrer le programme du premier semestre 2014, il a choisi d’interroger la permanence des identités nationales une Europe de la finance. En guise de réponse, le visage omniprésent de Mario Draghi, le président de la banque centrale européenne.
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ACTUS
ARLES
© Fondation Luma
L’EFFET BILBAO ?
© Fondation Luma
À l’heure où les caisses sont vides et où l’après-2013 a des airs de lendemains qui déchantent partout ailleurs dans la région, Arles bénéficie d’une manne providentielle dispensée par la famille Hoffmann, des mécènes suisses implantés dans la région de longue date et qui n’en sont pas à leur premier coup de pouce. Début avril, tandis que Luc Hoffmann, le père, inaugurait la fondation Van Gogh (lire page 28), Maja Hoffmann, la fille, posait la première pierre de la fondation Luma : un complexe dédié à la création contemporaine déployé sur 11 hectares dans le parc des Ateliers SNCF. Le projet pharaonique (estimé à plus de 100 millions d’euros) prévoit, outre la réhabilitation des anciens bâtiments industriels par Annabelle Selldorf, la construction d’une tour par Frank Gehry, le père du Guggenheim de Bilbao. Sur 9000 m2, le bâtiment, dont l’inauguration est prévue en 2018, accueillera des espaces de recherche, une bibliothèque, des salles d’exposition, des ateliers et des studios d’artistes. À terme, le campus devrait accueillir la maison d’édition Actes Sud ainsi que l’École Nationale Supérieure de la Photographie et ambitionne de devenir un centre culturel au rayonnement international, susceptible d’attirer un flot continu de touristes.
LES DERNIÈRES RENCONTRES DE FRANÇOIS HÉBEL On ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs ! Le rachat par Maja Hoffmann du parc des Ateliers a provoqué la colère et le départ du directeur des Rencontres d’Arles, François Hébel. Après avoir proposé, en vain, un projet alternatif de Centre Mondial de la Photographie pour le site et se disant inquiet pour l’avenir de la manifestation, ce dernier a décidé de jeter l’éponge après treize ans de direction. Un mandat au cours duquel il a réussi à décupler le public des Rencontres et à y attirer des « stars » tel Raymond Depardon, Christian Lacroix ou Martin Parr, de retour cette année. Cette dernière édition, aux allures de best of, rendra également hommage au photographe arlésien Lucien Clergue, l’un des fondateurs des Rencontres. Puis, François Hébel cédera sa place à Sam Stourdzé, qui dirige le musée de L’Élysée de Lausanne depuis 2009. Outre son passage au sein de cette grande institution dédiée à la photographie, l’homme a signé les grandes expositions Chaplin et Fellini au Jeu de Paume, à Paris.
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ACTUS
PRATIQUE
TERRE DE FESTIVALS La Régie culturelle régionale édite chaque été un guide baptisé Terre de festivals. Disponible gratuitement, en version papier (135 000 exemplaires diffusés dans 780 lieux culturels de la région, notamment les offices du tourisme), sur Internet et désormais sous la forme d’une application pour téléphone mobile, il recense, en 2014, pas moins de 1740 manifestations dans les domaines de la musique, de la danse, du théâtre, des arts du cirque et de la rue. Illustré par deux photographes fraîchement diplômés de l’École Nationale Supérieure d’Arles, Claire Cocano et Olivier Sarrazin, il est également consultable en version audio (sur le site www.crth.org) grâce à la collaboration du Centre Ressources Théâtre Handicap. www.terredefestivals.fr
LA CARTE FLUX
LE PASS MUSÉES Les musées municipaux de Marseille ont aussi leur sésame : un pass (nominatif et strictement personnel), vendu 30 € (tarif réduit : 20 €). Vendu dans dix d’entre eux (Muséum d'Histoire Naturelle, musée d'Histoire de Marseille, musée des Docks Romains, centre de la Vieille Charité, musée des Beaux-Arts, musée Cantini, musée d'Art Contemporain, musée des Arts décoratifs et musée GrobetLabadié), il permet de bénéficier pendant un an (à compter de la date d’achat) d’un accès illimité à tous les musées gérés par la ville ainsi qu’au Jardin botanique. Attention, le pass n’est valable ni pour les expositions temporaires, ni pour les musées régionaux (FRAC, Villa Méditerranée) ou nationaux (MuCEM). www.marseille.fr
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Depuis 2010, le « Flux de Marseille » réunit quelques-uns des meilleurs festivals locaux et propose, pour la somme de 45 €, une carte non nominative, donnant accès à une soirée par manifestation. Cette année, le public a le choix entre le festival Les Musiques (7-17 mai), Marseille Objectif Danse (30 mai-29 juin), le Festival de Marseille (19 juin -12 juillet), le FIDMarseille / Festival International de Cinéma (1-7 juillet), le Festival Mimi (2-6 juillet), et le Festival Jazz des Cinq Continents (17-26 juillet). En vente dans les six structures, mais aussi à L’Espace Culture et au WAAW, elle doit être présentée lors du retrait des billets, après réservation auprès de chaque festival (dans la limite des places disponibles). www.fluxdemarseille.com
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DR Le Merlan
LA RENCONTRE
NATHALIE MARTEAU, L’ART DU VAGABONDAGE Propos recueillis par Fred Kahn 12
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LA RENCONTRE
NATHALIE MARTEAU
N
athalie Marteau quitte le théâtre du Merlan qu’elle a dirigé pendant neuf ans. Cette scène nationale, située dans les quartiers nord, a été le port d’attache d’aventures artistiques ambitieuses et atypiques. À l’heure du bilan, la directrice reste convaincue que l’art est une expérience qui mérite d’être vécue... et partagée par le plus grand nombre.
Comment êtes-vous devenue directrice du Merlan ? J’ai candidaté sans rien connaître de Marseille et du sud de la France, mais j’étais nourrie par ma première expérience en tant que directrice du centre d’art et d’essai de Mont-Saint-Aignan, dans la périphérie de Rouen. Ce lieu alternatif était consacré à l’expérimentation dans le domaine du spectacle vivant, mais dans une approche profondément populaire. Cette volonté de casser la frontière entre art savant et art populaire a aussi été au cœur du projet que j’ai proposé pour le théâtre du Merlan. Comment avez-vous abordé cette ville qui vous était complètement étrangère ? Mon parcours dans le domaine du spectacle vivant se double d’une formation en sociologie et en anthropologie. Et ce bagage universitaire m’a été très utile pour percevoir les enjeux du territoire marseillais. Je me suis confrontée aux données objectives de la réalité sociale d’une des villes les plus pauvres de France et, dans le même temps, je me suis laissé guider par le feeling. J’ai beaucoup arpenté la ville, je me suis imprégnée des impressions, des sensations qu’elle me renvoyait. J’ai aussi très vite invité des artistes qui comptent
pour moi. Leur regard m’a énormément nourri. J’ai pris conscience à quel point cette ville est hétérogène. Elle est traversée de frontières symboliques, de fractures, de plis et de replis. Et comment avez-vous répondu aux défis qu’elle vous lançait ? Mon projet était axé sur la question du « corps ». Ce thème est fondamentalement pluridisciplinaire. Il transcende les barrières de la langue et il ouvre obligatoirement sur des approches transversales, des enjeux de société majeurs. À travers la programmation, nous avons pu parler du vieillissement, du sexe, de la question du genre, de l’imagerie médicale... Et de bien d’autres sujets. On évite ainsi de s’enfermer dans des postures qui ne concernent pas la plupart des gens. Quelle a été votre ligne artistique ? L’offre théâtrale est très riche à Marseille et pourtant, un large pan de la création artistique n’était pas visible. Un volet de notre mission consistait donc à inviter des artistes de première importance qui pourtant n’étaient encore jamais venus à Marseille : Alain Platel, Pina Bausch, Rodrigo Garcia, Joël Pommerat, Pippo Delbono... Mais l’enjeu consistait également à toujours favoriser l’expérimentation et l’émergence. Je suis particulièrement attentive aux formes de créations hybrides qui investissent la ville en l’envisageant comme un matériau artistique à part entière. Il est tout aussi essentiel de prendre en compte la diversité culturelle, d’intégrer des pratiques dites « populaires ». Et pour casser encore plus les a priori et les clichés sur le spectacle vivant, nous avons développé des démarches de participation artistique. Notre ambition n’était pas de mettre 8e art magazine • été 2014
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NATHALIE MARTEAU
DR Le Merlan
LA RENCONTRE
en place une école du spectateur, mais d’inviter à « éprouver ensemble », à expérimenter par l’action la chose artistique. Quand vous avez pris vos fonctions, le théâtre du Merlan était en travaux. Vous avez donc commencé par programmer hors les murs. Pourquoi avez-vous continué ce « vagabondage » dans la ville ? Le vagabondage n’était pas conjoncturel. Il répondait à une nécessité plus profonde : circuler entre les césures du territoire, entre les inégalités très fortes qui séparent les différents quartiers. Une part importante de la population est très éloignée des pratiques du spectacle vivant. Le vagabondage du Merlan consistait à aller aussi vers eux. Et puis, Marseille est une ville-port qui porte en elle la notion de voyage, de nomadisme. En neuf ans, nous avons développé de très nombreuses collaborations à travers la ville. Nous avons investi plus de cent sites et lieux avec la volonté de proposer non pas simplement un spectacle, mais un véritable moment de rencontre et d’échange artistique. N’avez-vous pas éprouvé parfois un sentiment d’impuissance face à la situation économique et sociale de la ville et face à la violence qu’elle génère ? Il me semble essentiel de confronter l’art aux problématiques urbaines et sociales. Mais ne lui demandons pas de les régler. Il ne fallait pas attendre du Merlan qu’il fasse baisser le chô14
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« IL ME SEMBLE ESSENTIEL DE CONFRONTER L’ART AUX PROBLÉMATIQUES URBAINES ET SOCIALES. MAIS NE LUI DEMANDONS PAS DE LES RÉGLER. LES ARTISTES DÉPLACENT LES PERSPECTIVES. »
mage dans les quartiers nord. Les artistes n’ont pas vocation à remplacer les politiques urbaines, économiques et sociales. Mais ils déplacent les perspectives. Et le rôle de la scène nationale était d’amener les populations à participer à ces démarches de création. Nous savons que nos projets ont profondément touché des gens très, très différents et qu’ils ont été transformés dans leur vie et dans leur pratique. Notamment beaucoup de jeunes. Aujourd’hui, 70 % du public du Merlan a moins de 35 ans. Et sur la saison 2013-2014, plus de 20 % des entrées payantes concernaient la population des quartiers nord. Ce qui est très largement au-dessus de la moyenne nationale. C’est la raison pour laquelle j’estime avoir atteint les objectifs que je m’étais fixés.
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OISEAU SCULPTÉ
© MuCEM - Yves Inchierman
L’OEUVRE
Oiseau, 1990, bois, 10,9 x 13,2 x 5.7 cm. Collections du MuCEM.
LE PETIT OISEAU EST SORTI
Vedette de l’exposition Changement de propriétaire au Centre de Conservation et de Ressources (CCR) du MuCEM, ce petit oiseau rappelle la vocation première du musée et son attachement aux arts et traditions populaires. Texte : Emmanuelle Gall
C'
est un oiseau de bois, aux ailes finement sculptées par un artisan savoyard, il y a une vingtaine d’années. Sa petite taille met en valeur le savoir-faire de son créateur, Jean-Pierre David. Ne mesurant pas plus de cinq centimètres, chaque plume sculptée se détache de ses voisines presque identiques et les ailes semblent deux délicats éventails. Aujourd’hui reproduit sur l’affiche de l’exposition Changement de propriétaire et suspendu au dessus du petit théâtre imaginé par l’architecte Patrick Bouchain, l’oiseau est « sorti de sa réserve ». Comme une cinquantaine d’autres jouets, poupées et objets réunis par le commissaire, autour de la thématique du conte et de l’histoire de l’ours Michka, qui sert de fil conducteur à l’exposition. La plupart d’entre eux sont issus de la collection du musée national des Arts et Traditions populaire (MNATP), l’ancêtre du MuCEM, fondé en 1937 par Georges Henri Rivière, à partir du fonds français du musée d’ethnographie du Trocadéro. En 2012, ces quelque 250 000 pièces ont quitté le bois de Boulogne pour rejoindre, à Marseille, les collections de l’ancien musée de l’Homme et les acquisitions propres du MuCEM depuis 2004. Sur le million d’objets, images, films et ouvrages désormais conservés au CCR ou exposés au MuCEM, rares sont finalement ceux qui ont la chance, comme cet oiseau savoyard, 16
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d’être exposés un jour. C’est sans doute la raison pour laquelle les concepteurs du musée ont souhaité rendre les réserves en partie accessibles au public. Corinne Vezzoni, l’architecte du CCR, a prévu un espace de 950 m2 pour accueillir les visiteurs et une salle d’exposition temporaire, destinée à recevoir des « cartes blanches » données à des artistes ou des personnalités du monde de la culture. Après l’exposition Présentée vivante, l’année dernière, conçue par Jean Blaise, Patricia Buck et Joy Sorman autour de l’univers du cirque, Patrick Bouchain a eu envie de raconter le voyage d’un jouet à la manière d’un conte. Une jolie manière de rendre hommage à ces animaux à roulettes, poupée de porcelaine ou de chiffon et autres jeux d’enfants… Des œuvres modestes et le plus souvent anonymes, chargées d’histoire et d’émotion.
CENTRE DE CONSERVATION ET DE RESSOURCES
1, Clovis Hugues, Marseille, 3e. 04 84 35 14 00. Entrée libre.
WWW.
mucem.org
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LA FABRIQUE DE THÉÂTRE
Depuis quinze ans, l’ancienne distillerie de pastis Janot à Aubagne accueille des compagnies de spectacles vivants, amateurs et professionnelles, en création. Christophe Chave, l’un des maitres d’œuvres, et directeur artistique du lieu depuis 2005, défend la spécificité de cet espace de travail et d’expérimentation dans le processus de production des œuvres. Texte et photos : Olivier Levallois
A
u bout de la discrète rue Louis Blanc se dresse la façade de l’ancien bâtiment industriel. Passé l’austère entrée, sa fonction culturelle se précise : un bar associatif, avec son comptoir et un salon, une première salle de travail (200 m2), noire du sol au plafond, dédiée aux ateliers et aux cours (près de 150 personnes par semaine), ainsi qu’aux répétitions des créations amateurs. À l’étage, une seconde salle (400m2), tout aussi noire et dotée d’un équipement technique adapté aux besoins des compagnies en résidence. Nul décorum spectaculaire, ici. Cette sobriété rappelle que l’on se trouve d’abord dans un lieu de travail. La reconversion de ce que l’on appelait alors la salle Janot débute en 1998. La municipalité met à disposition un espace de répétition pour les compagnies aubagnaises amateurs et professionnelles. Un collectif se constitue en association pour en assurer la gestion. « Ça vivotait avec peu d’argent, peu de 18
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moyens techniques et beaucoup de bénévolat à l’époque », se souvient Christophe Chave. Entre les visées municipales et les ambitions des compagnies gérantes, l’accord n’est pas toujours évident. Cependant, des travaux en 2001 et la création d’un poste de directeur artistique en 2005 amorcent la professionnalisation du lieu. Continuant d’assurer sa charge première de soutien aux compagnies locales, La Distillerie développe un programme de résidence. Une cinquantaine de dossiers de demandes arrivent, dès lors, chaque année de toute la France, pour une dizaine de projets retenus sur des critères affirmés : « Que ce soit du cirque, du théâtre pour adulte ou pour enfant, de la musique ou de la danse, on s’intéresse tout d’abord aux écritures contemporaines. On privilégie aussi les jeunes compagnies et les jeunes créations. Il faut bien qu’il y ait des espaces favorisant l’émergence d’un vivier, préparant l’avenir des spectacles vivants, notamment en région. »
L’ENDROIT
LA DISTILLERIE
« ON PRIVILÉGIE LES JEUNES COMPAGNIES ET LES JEUNES CRÉATIONS. IL FAUT BIEN QU’IL Y AIT DES ESPACES FAVORISANT L’ÉMERGENCE D’UN VIVIER, PRÉPARANT L’AVENIR DES SPECTACLES VIVANTS, NOTAMMENT EN RÉGION. »
Le lieu reste parfois difficile à appréhender pour les instances publiques : ce n’est ni un local de répétition, ni un lieu de diffusion et de spectacle, mais un laboratoire polyvalent de création. Outre la mise à disposition du lieu et le soutien technique, les compagnies peuvent présenter des étapes de leur travail à un public constitué de spectateurs et de professionnels. La Distillerie développe dans ce sens des partenariats tel le concept des Trois scènes la fédérant au Comœdia et à l’Escale (le théâtre et la MJC de la ville). Fonctionnant principalement grâce au bénévolat, elle est dans l’attente de la création d’un second poste permanent. Dans une période où les subventions directes aux compagnies diminuent, cette structure, rare en France, permet de pallier au vide grandissant entre la création et la diffusion. Malgré la proximité avec une grande métropole, Aubagne a su montrer ces dernières années un exceptionnel dynamisme culturel, dont témoigne
son attention à La Distillerie. À l’heure du récent changement de municipalité, reste à espérer que l’investissement culturel continuera d’être interprété comme une nécessité favorisant l’avenir de la ville. En attendant, Christophe Chave imagine déjà la prochaine étape : une politique inédite de coproduction avec les compagnies en résidence.
LA DISTILLERIE
22, rue Louis Blanc, Aubagne. 04 42 70 48 48.
WWW.
distillerie.theatre-contemporain.net 8e art magazine • été 2014
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L’ARTISTE
FRÉDÉRIC NEVCHEHIRLIAN, DANS LE RÉTRO
FRÉDÉRIC NEVCHEHIRLIAN
Raconter une histoire est le seul moyen de faire quelque chose qui résiste à l’époque.
Il s’est fait connaître du grand public avec Le soleil brille pour tout le monde ?, prêtant sa voix et sa musique à la poésie de Prévert. Le slameur, musicien, rocker et poète marseillais revient, avec ses propres mots cette fois, sur disque et sur scène. Texte : Olivier Levallois • Photos : Olivier Metzger
D
e son nom d’origine arménienne ne reste, sur la pochette de l’album, qu’un simple NEVCHE, coupé en deux pour encadrer le titre : Rétroviseur. Un titre symbole, traduisant la posture philosophique qui consiste à garder un œil en arrière, tandis qu’on avance. Alors, assis à ses côtés, que voit-on dans son rétroviseur ? On le voit en professeur de français dans un collège des quartiers nord, puis en initiateur de la scène slam marseillaise dans les années 2000, et chanteur/slameur du groupe Vibrion (prix découverte du printemps de Bourges 2005). On le voit aussi en poète-rocker rimbaldien, le temps d’un premier album Monde nouveau monde ancien et, plus récemment, en chantre à succès (public et critique) de Prévert. Mais dans son rétroviseur, le quadragénaire Nevché observe surtout Frédéric, ce minot de Marseille, fils d’une mère espagnole et d’un père arménien, passant son enfance entre la cité des Olives où il grandit, Bompard et L’Estaque, où vit une partie de sa famille. Et quand il se regarde, lui, dans son rétroviseur après presque quinze ans à officier sur scène, lesté de sa récente notoriété nationale, il semble ne pas être troublé par cette position, à la fois enivrante et délicate, de tout artiste qui a rencontré un premier grand succès et avoue ne pas vivre cette reconnaissance comme un handicap majeur : « J’essaie juste d’écrire et d’être libre. Je n’oublie pas quelle a été l’énergie qui m’a amené là, qui m’a motivé à faire ça. Et puis j’ai le droit de me tromper. Ce ne sont que des chansons. Si je me plante, ce n’est pas grave. »
RÉTROVISEUR Cette jeunesse marseillaise déclinée en une dizaine de titres est le récit de rêves en devenir, de la glande entre potes dans les parkings et de sentiments inavoués. « Raconter une histoire est le seul moyen de faire quelque chose qui résiste à l’époque. » À ces instantanés d’espoirs, de colère, d’exaltation, de dépit ou de désir, la musique offre un subtil écrin pop rock électro, tout en clair-obscur. Au plus près du timbre de voix tendre, assuré, étrangement familier, on se promène dans ces souvenirs et ces pensées comme s’ils étaient un peu les nôtres. « Je n’ai pas l’impression de parler seulement de mon adolescence. Plus je suis intime et plus je pense être universel. » Internexterne, mars 2014.
Le 5 juillet, 20 h. La nuit de la parole, Place Jean Jaurès, Lambesc 04 42 17 02 96. Entrée libre. www.lambesc.fr Le 15 juillet, 19 h. Festival Contre-Courant. Ile de la Barthelasse, Avignon. 06 80 37 01 77. Entrée libre dans la limite des places disponibles (sur réservation). www.ccas-contre-courant.org 8e art magazine • été 2014
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LES MUETTES
© Karine Lanny
L’OBJET
CIGALES DESIGN
Plus de honte coupable à accueillir une cigale en vos intérieurs : la designeure Karine Lanny donne un sacré coup de jeune à cet emblème souvent kitsch de la Provence. Texte : Julie Bordenave
L
e nom de la collection pensée par Karine Lanny est déjà un clin d’œil en soi : « les Muettes », comme un pied de nez aux incessantes stridulations qui cueillent le visiteur dans les immuables boutiques de souvenirs provençaux. Car, d’argile ou de porcelaine, ces cigales-là ne craquettent pas : posées au coin d’une table ou accrochées en appliques murales, elles s’imposent par leur simple présence graphique. Leur épure géométrique évoque la légèreté de l’origami, comme la préciosité d’un bijou art déco aux multiples facettes. La gamme de couleurs décline un spectre allant de l’élégance cosy – gris, or, terre noire – à la saturation pepsy : bleu paon, rouge fluo, vert fenouil... C’est l’envie de ramener un peu d’humour dans nos intérieurs, comme d’emprunter à la symbolique ancestrale (vénérée chez les Grecs, la cigale représente l’immortalité en Feng shui !), qui a inspiré Karine Lanny. Créée en 2013, sa marque Monochromic prévoit de décliner des gammes 22
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d’objets monochromes, fabriqués dans un souci de développement durable et écoresponsable (production locale, utilisation de matériaux naturels...). Les Muettes, pour leur part, font appel au savoir-faire du céramiste marseillais Dominique Pagliai, ancien santonnier. Des établissements de goût les ont déjà adoptées : Hôtel de l’Europe à Avignon, Le Vieux Panier à Marseille... Elles sont en vente dans le grand sud, de Nice à Montpellier, en passant par Marseille, SaintRémy, Aix, L'Isle sur Sorgue, Gordes, Cassis, Avignon... Mais aussi à Paris, car les Muettes ne sont pas régionalistes.
Disponibles en deux tailles, de 35 à 45 €.
WWW.
monochromic.fr
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L’ALBUM
WHAT’S UP ?
LA BEAT GENERATION AU FÉMININ
Autour de Jean-Marc Montera, une belle équipe met en musique les poèmes méconnus de Hettie Jones, Janine Pommy Vega, Anne Waldman et Ruth Weiss.
J
Texte : Fred Kahn
ean-Marc Montera est un habitué des aventures artistiques atypiques, décalées et surtout portées par le goût de la liberté. Le guitariste et compositeur, mais aussi directeur du GRIM (Groupe de Recherche et d’Improvisation Musicales) à Marseille, enchaîne ainsi les projets avec des musiciens tout aussi indociles que lui. Dernier opus en date : What’s up ?, un double album qui fait entendre l’âme et la voix des femmes poètes de la beat generation. Tout le monde (ou presque) a entendu parler des écrits de Burroughs, Kerouac ou Ginsberg, mais très peu de monde connaît l’œuvre de leurs homologues féminins. « Ces femmes étaient des personnalités hors normes, avec une forte énergie, sensibles, compatissantes, tourmentées, inspirées, intelligentes et de caractère indépendant, avides de rencontres, de liaisons, d’échanges », note pourtant Jacqueline Starer, spécialiste de ce mouvement littéraire, dans le livret qui accompagne le disque. Elles sont restées dans l’ombre des hommes, non par manque de talent, mais parce que notre société reste profondément machiste. What’s up ? s’apparente donc à une nécessaire entreprise d’illumination poétique. Et l’esprit est bien là ! Les textes de quatre poétesses (Anne Waldman, Ruth Weiss, Janine Pommy Vega, 24
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Hettie Jones) sont « jouées » par Sophie Gonthier avec, tour à tour, chaleur, moiteur, distance, empathie, emphase et même, quand le besoin s’en fait sentir, une forte dose de venin dans la voix. Mais, le vrai secret de l’alchimie réside dans la rencontre entre les mots et la musique. Jean-Marc Montera a réuni quelques copains. Et pas des moindres. Son groupe « improvisé » est constitué de trois autres guitaristes : Lee Ranaldo (qui sévit au sein des mythiques Sonic Youth), Jean-François Pauvros et Noël Akchoté (deux grandes figures des musiques inclassables). Le batteur Ahmad Compaore, le bassiste Ernie Brooks et l’altiste Fanny Paccoud complètent le tableau. Des millions de couleurs sonores résonnent dans la tête de l’auditeur et les mots ouvrent autant d’interstices au cœur d’un quotidien beaucoup trop balisé : « In the gathering dark / Half the world is our to take » (Dans l’obscurité croissante / La moitié du monde nous reste à prendre).
WHAT’S UP ?
Femmes poètes de la Beat Generation. Radio France / Harmonia Mundi, 2013.
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LE RESTAURANT
DUNK
LE FAST-GOOD
Mimi et Antoine fêtent le premier anniversaire de Dunk : un snack gourmand, convivial, design et à leur image. Texte : Olivier Levallois • Photos : Frédéric Presles
L’ASSIETTE On vient (et on revient) au Dunk pour les bagels, ces petits pains garnis importés en Amérique du Nord par les immigrants juifs d’Europe de l’Est. Si le lieu se présente modestement comme une sandwicherie, la différence de philosophie s’affirme dès le menu. Chaque bagel sonne comme une résolution : Je te largue (thon rose, pomme verte), Je fais 100 abdos (bœuf fumé et poivré), J’appelle ma mère (saumon fumé), J’arrête de fumer (dinde et bacon)… Mais la différence se confirme surtout en bouche. Les produits frais, sélectionnés avec soin, sont sublimés par les sauces maison. Et les accompagnements (coleslaw ou cornet de frites de légumes) ne sont pas en reste. LE CHEF « Le bagel, je suis née avec et j’adore ça », déclare Mimi la Québécoise, qui a créé Dunk avec son compagnon Antoine, il y a tout juste un an. « J’ai voulu faire venir à Marseille, où j’habite depuis treize ans, quelque chose de Montréal, et aussi des trois continents où j’ai vécu, l’Europe, l’Amérique et l’Afrique. » Scénariste dans sa seconde vie, Mimi n’est pas née dans l’univers de la cuisine : « Je sais que je ne suis pas un grand chef, mais on s’est dit qu’il y avait une place à Marseille pour une cuisine de snack inédite, un fast-good privilégiant l’ultrafrais et le créatif ». Son credo culinaire : la rela26
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tion aux autres. « Je relie la nourriture aux sentiments, au plaisir et aussi au sexe », conclut-elle avec une spontanéité toute canadienne.
LE CADRE Un emplacement à une centaine de mètres du MuCEM et une terrasse très ensoleillée sont les premiers atouts du Dunk. Quant à la salle, elle prolonge l’esprit de la cuisine : simple, ouverte et chaleureuse. C’est à Antoine, architecte, que l’on doit la décoration privilégiant les matériaux nobles : vieux murs en pierre d’origine, métal, bois clairs du mobilier créé pour le lieu. La cuisine est ouverte sur la salle, et la salle sur l’extérieur. « Nous avons souhaité que cet espace soit agencé de manière à favoriser les échanges et une vraie proximité », résume Antoine.
DUNK
4, rue Saint Thomé, Marseille, 2e. 09 53 79 45 20. Bagels, à partir de 6 €. Tous les jours, de 9h à 18h.
WWW.
dunkmarseille.com
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Vincent van Gogh, Autoportrait avec pipe et chapeau de paille, 1887 (41,9 x 30,1 cm), La Maison jaune (‘La rue’), 1888 (72 x 91,5 cm), Van Gogh Museum, Amsterdam (Vincent van Gogh Foundation).
ARLES, DANS LES PAS DE VAN GOGH
Les amateurs de Van Gogh ont désormais une raison de plus de visiter Arles. Depuis le 7 avril, la fondation créée par Luc Hoffmann expose neuf toiles du peintre. Texte : Emmanuelle Gall
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our découvrir Arles dans les mêmes conditions que Vincent Van Gogh, le 20 février 1888, il faudrait attendre la prochaine neige. Venu chercher le soleil, il trouve, à sa descente du train, la ville recouverte d’un épais tapis blanc. Il s’installe à la pension Carrel, rue Cavalerie, non loin de la « Maison jaune », qui deviendra son atelier. Ces lieux, comme la plupart de ceux que Van Gogh a fréquentés pendant son séjour arlésien, ont disparu. Mais on peut, aujourd’hui encore, marcher dans ses pas en arpentant les quais du Rhône, le jardin du boulevard des Lices, les Alyscamps… L’office du tourisme propose un plan de la ville répertoriant les sites où le peintre a posé son chevalet, des arènes à l’ancien Hôtel-Dieu, où il a été amené en décembre 1888 après s’être coupé le lobe de l’oreille gauche. Il y est retourné en février suivant, avant de décider de se faire interner à Saint-Rémy en mai. La période arlésienne de Van Gogh, douloureuse, est aussi la plus fertile de sa carrière artistique. Selon l’historien d’art Ronald Pickvance, durant ces 444 jours, « il a produit près de 200 tableaux, 100 dessins et aquarelles et écrit plus de 200 lettres. » La ville n’a conservé aucune de 28
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ses œuvres et, jusque-là, les pèlerins venus sur les traces de Van Gogh devaient se contenter des plaques émaillées installées par la mairie sur les sites qu’il a peints. Inaugurée le 4 avril dernier, la fondation dédiée au peintre par le mécène Luc Hoffmann a passé un contrat avec le musée Van Gogh d’Amsterdam qui lui garantit la présence permanente d’au moins une œuvre de l’artiste. Et, pour son premier accrochage, elle en expose neuf, dont la fameuse Maison jaune. L’exposition Couleurs du Nord, couleurs du Sud revient sur l’évolution de la couleur chez Van Gogh entre ses séjours hollandais et arlésiens. Ses toiles y côtoient les œuvres de ses contemporains : école de Barbizon, impressionnistes, Courbet, Gauguin… Mais le projet de la fondation ne s’arrête pas là. Officiellement, sa mission est de « valoriser l’héritage artistique du maître hollandais tout en questionnant la résonance de son œuvre dans l’art actuel ». Un objectif hérité de l’association créée par Yolande Clergue en 1983 et dont la fondation a pris le relais en 2010. Partie du constat que Van Gogh n’avait jamais obtenu la reconnaissance qu’il méritait à Arles et qu’il était impossible d’espérer acquérir
LA BALADE
VAN GOGH À ARLES
LA FONDATION A PASSÉ UN CONTRAT AVEC LE MUSÉE VAN GOGH D’AMSTERDAM QUI LUI GARANTIT LA PRÉSENCE PERMANENTE D’AU MOINS UNE ŒUVRE DE L’ARTISTE.
la moindre toile du peintre, cette dernière s’était tournée vers les artistes contemporains et avait réussi à constituer une collection de plus de 200 peintures, sculptures, photographies, manuscrits et partitions. Autant d’hommages à Van Gogh, signés Hockney, Lichtenstein, Viallat, Combas, Butor ou Lacroix… Après vingt ans d’activité, ponctués par de belles expositions au palais Luppé, l’association était au bord de la faillite quand Luc Hoffmann a décidé de la reprendre en main et de la transformer en fondation. L’homme a obtenu de la mairie l’hôtel Léautaud de Donines, ancien siège de la banque de France, et a financé, à hauteur de 12 millions d’euros, les travaux nécessaires à sa transformation en un musée susceptible d’accueillir les tableaux les plus chers du monde. Flanquée d’un portail monumental signé « Vincent » par Bertrand Lavier, proposant deux accrochages d’art contemporain par an dans un cadre somptueux, la fondation espère attirer plus de 100 000 visiteurs par an.
FONDATION VAN GOGH
© Olivier Levallois
+
OÙ MANGER ?
Dans ses lettres à Théo, Van Gogh se plaignait régulièrement de la nourriture arlésienne. Sur ce plan, la ville a progressé et les bonnes tables ne manquent pas. Si l’artiste revenait aujourd’hui, il choisirait certainement Le Gibolin, et pas seulement pour les quelque 250 vins – exclusivement – naturels de sa cave. Sans prétention et pourtant d’une grande exigence, le menu est à la hauteur : dos de cabillaud, daurade ou rouget local, canette de Bresse ou Cochon du Mont-Ventoux, abats traditionnels… La qualité des produits y est constante et exceptionnelle. Dès leur installation en 2009, Luc Desrousseaux (aux fourneaux) et Brigitte Cazales (en salle) ont très vite imposé leur conception de la restauration. Leur carte ne promet pas la lune, mais une fois dans l’assiette, honore et renouvelle la tradition. Côté vins, on peut faire une confiance aveugle à la maîtresse de maison, qui maîtrise parfaitement sa cave sans jamais faire exploser l’addition. Un idéal d’honnêteté pas si répandu dans les villes touristiques de la région. Le Gibolin 13, rue des Porcelets, Arles. 04 88 65 43 14 Menus : 27-34 €, verre de vin : 4-7 €. Fermé dimanche et lundi.
35, rue du docteur Fanton, Arles. 04 90 93 08 08. 4-9 €.
WWW.
fondation-vincentvangogh-arles.org 8e art magazine • été 2014
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© Hervé Hôte
Inauguration de l'exposition Solaris Chronicles (Les Chroniques de Solaris) à l'Atelier de Mécanique, Arles. 30
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LES EXPOS DE
L'ÉTÉ
Certes moins prestigieux et pléthorique que son prédécesseur, le cru 2014 s’annonce néanmoins intéressant. Et, alors que la biennale censée prendre la relève de l’année capitale reste à l’état de projet, où année électorale et crise aidant, les budgets sont au plus bas, le pire était à craindre. Si l’on peut observer une certaine tendance à la rétrospective et au best of, synonyme de moyens réduits, il faut aussi rappeler les gros budgets et la quantité ne sont pas la garantie de bonnes expositions. Pour preuve, l’initiative d’Audrey Koulinsky, invitant Claude Lévêque dans son appartement de la Cité radieuse ou l’exposition d’une vingtaine de clichés exceptionnels de Léon Gimpel, organisée par la Société Française de Photographie à Arles. Loin d’être exhaustive, notre sélection prend le parti de l’originalité, sans pour autant bouder les grandes institutions. Dossier réalisé par :
Julie Bordenave, Emmanuelle Gall, Fred Kahn, Olivier Levallois
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
CLAUDE LÉVÊQUE PLANTE LA TENTE AU CORBU Pendant qu’un de ses néons foudroie la pyramide du Louvre, Claude Lévêque est l’hôte de la Cellule 516 à la Cité radieuse, le temps d’une exposition intime et délicate.
Qui ? Claude Lévêque est l’un des plus grands artistes
vivants, qui a représenté la France à la Biennale de Venise en 2009 et investit le Louvre jusqu’en 2015.
Où ? La Cellule 516 est un appartement « type E descendant cuisine droite » de la Cité radieuse, que sa propriétaire, la galeriste Audrey Koulinsky, a transformé en « zone d’art habitée ».
Quoi ? Audrey Koulinsky a mis au point un proto-
cole d’exposition très original. Elle confie son appartement à un artiste pendant une semaine, à l’issue de laquelle il a carte blanche, ou presque, pour investir l’espace. Claude Lévêque a joué le jeu en choisissant de « planter la tente » dans la chambre parentale et de semer
dans les différentes pièces des œuvres intimes, rarement ou jamais montrées. Face au Corbusier, il n’a pas choisi la confrontation, mais s’interroge sur l’utopie corbuséenne : « un idéal, mais aussi un certain conditionnement ».
Comment ? L’exposition se visite sur rendez-vous
et dans le cadre d’un « séjour » de quarante-cinq minutes incompressibles. « Je pense, comme Donald Judd, que le seul moyen de comprendre les œuvres, c’est de vivre avec. Habituée à travailler dans les white cubes des galeries, j’ai eu envie de tenter une nouvelle expérience, de proposer au public de découvrir des œuvres d’art dans un contexte différent, un appartement du Corbusier qui a conservé son jus d’origine », explique Audrey Koulinsky.
ET AUSSI : Défini, fini, infini
© Studio Ora Ito & Daniel Buren
Une autre star est invitée à la Cité radieuse cet été, quelques étages plus haut, au MAMO. Après Xavier Veilhan en 2013, Daniel Buren investit le gymnase et le toit-terrasse du Corbusier, avec un projet inédit et in situ. Du 30 juin au 30 septembre. MAMO, 280, boulevard Michelet, Marseille, 8e. 01 42 46 00 09. 5 €. www. mamo.fr
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Daniel Buren Défini, Fini, Infini, travaux in situ, MaMo, Marseille, 2014
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© ADAGP Claude Lévêque. Courtesy the artist and Kamel Mennour, Paris.
Claude Lévêque, Sans titre, 1991-2014. Ligne de couverts inox suspendus par le manche à hauteur des yeux.
Claude Lévêque, Punir, 2013. Meuble en bois blanc, néon blanc, écriture Romaric Etienne. 89 x 63 x 32,5 cm.
ÊTRE PLUS FOU QUE CELUI D’EN FACE
Jusqu’au 30 août. Cellule 516, Cité radieuse, 280, boulevard Michelet, Marseille, 8e. 06 12 49 56 60. Entrée libre sur réservation.
WWW.
cellule516.com 8e art magazine • été 2014
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
LE MYSTÈRE DELVAUX
© Christian Tagliavini, courtesy Galerie esther Woerdehoff.
Le musée Cantini présente l’une des premières rétrospectives en France du Belge Paul Delvaux, peintre de l’inquiétante étrangeté.
Qui ? Paul Delvaux est, avec René Magritte, l’un des plus
grands peintres belges du XXe siècle. On résume souvent son univers à un monde peuplé de femmes au regard fixe. « Il peint des femmes nues dans des lieux qui les révèlent : gares, ruines, jardins, rues… », explique Christine Poullain, la directrice des musées de Marseille. S’exprimant peu sur son art, Paul Delvaux déclarait néanmoins être profondément inspiré par son passé : « Ces impressions resurgies de l'enfance, qui ne sont jamais des regrets, me touchent, me retiennent sans doute par leur capacité de suggestion et cet incessant mystère qui baigne tous les souvenirs ». Peu exposées en France (le Centre Georges Pompidou ne possède qu’une de ses toiles), les œuvres de l’artiste sont pour la plupart conservées au musée d’Ixelles à Bruxelles, qui cosigne l’exposition avec le musée Cantini. Il a prêté, pour l’occasion, la très grande majorité des quatre-vingt-dix tableaux et dessins exposés.
Christian Tagliavini, Série 1503, Bartolomeo, 2010
Quoi ? La carrière artistique de Paul Delvaux s’étend des années vingt aux années quatre-vingt-dix. Cette traversée du siècle est aussi une traversée de l’histoire de l’art moderne et de ses courants majeurs. Tour à tour influencé par l’impressionnisme de Cézanne, l’expressionnisme flamand, puis le surréalisme, auquel il reste attaché, Paul Delvaux conserve néanmoins une identité propre, associant une expression figurative à des visions oniriques, que l’on peut qualifier de réalisme magique.
Comment ? Pour retracer le parcours du peintre et ses obsessions, les commissaires de l’exposition, Olivier Cousinou (conservateur au musée Cantini) et Laura Neve (attachée scientifique au musée d'Ixelles) ont organisé l’exposition en six sections : la femme, l'Antiquité, les gares et les trains, les paysages, les relations intimes et les squelettes.
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ET AUSSI : Collections de portraits/portraits de collection
Exposées au milieu des portraits du XVIIIe siècle conservés au pavillon Vendôme, les photographies de Christian Tagliavini recèlent, elles aussi leur part d’étrangeté. L’artiste réalise luimême les costumes de papier et de carton, découpés au laser, qui habillent ses modèles, avant de les photographier. Baptisée 1503, en souvenir de l’année de naissance de Bronzino, peintre maniériste qu’il admire particulièrement, la série de neuf portraits qu’il a réalisée en 2010 est particulièrement troublante. Jusqu’au 12 octobre. Pavillon Vendôme, 13, rue de la Molle, Aix-en-Provence. 04 42 91 88 75. Entrée libre. www.aixenprovence.fr
© Fondation Paul Delvaux, St Idesbald, Belgique / ADAGP, Paris 2014.© photo Vincent Everarts, Bruxelles
Paul Delvaux, Le Rêve,1935, huile sur panneau, 151 x 176 cm. Collection privée en dépôt au Musée d'Ixelles, Bruxelles.
Paul Delvaux, La Table, 1946, huile sur toile, 86 x 76 cm. Collection privée en dépôt au Musée d'Ixelles, Bruxelles.
PAUL DELVAUX, LE RÊVEUR ÉVEILLÉ
Jusqu’au 21 septembre. Musée Cantini, 19, rue Grignan, Marseille, 6e. 04 91 54 77 75. 5-8 €.
WWW.
marseille.fr 8e art magazine • été 2014
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
LE MAC A VINGT ANS ET PUIS S’EN VA Le 28 mai dernier, il y avait du monde au MAC pour souffler ses vingt bougies. La fête est finie, mais l’exposition rétrospective reste. Qui ? Une foule d’artistes marseillais, de l’incontournable
César au jeune Timothée Talard, en passant par Richard Baquié, Julien Blaine, Georges Autard, Michèle Sylvander, Saverio Lucariello, Guy Limone et André Fortino. Mais aussi des stars internationales, tels Absalon, Anette Messager, Nan Goldin…
Quoi ? À l’entrée : L'Avant-Garde puis Rotozaza 1 de Jean
Tinguely : deux machines fantastiques – pour une fois – en état de marche, accompagnées d’une Nana de Niki de Saint-Phalle. Une façon de rappeler que les collections du MAC, issues en partie du musée Cantini, débutent avec le mouvement du Nouveau Réalisme. Les œuvres suivantes rendent hommage aux grandes expositions qui ont su imposer le musée sur la scène internationale : Ils collectionnent, L’Esprit Fluxus, L’Art au corps… Y figure également un rappel de la collection d’Hervé Paraponaris, Tout ce que je vous ai
volé, qui fit scandale lors de son exposition en janvier 1996. Des archives vidéo complètent le tableau : extraits de journaux télévisés, reportage de Pierre Carles et discours inaugural de Philippe Parreno prononcé par l’imitateur Yves Lecoq.
Pourquoi ? Nostalgique, l’exposition l’est doublement
quand on sait que, lors de sa campagne électorale, Jean-Claude Gaudin s’est engagé à transférer les collections du musée à la Vieille-Charité et à transformer le bâtiment en une « bibliothèque nouvelle génération ». Légué à la ville en 1992 par le docteur Rau, qui avait initialement prévu d’y accrocher sa collection personnelle, il est devenu, sous l’impulsion de Bernard Blistène et Philippe Vergne, deux figures majeures de l’art contemporain, un musée de pointe dans les années quatre-vingt-dix. Avant de perdre une partie de son dynamisme, faute de moyens.
ET AUSSI : L’œuvre photographiée : les ateliers d’artiste de Picasso à Warhol
© Clovis Prévost
À Aix, la Galerie du Conseil général accueille aussi de grandes figues de l’art moderne et contemporain. L’exposition dont le commissariat a été confié au conservateur et critique de renom Marc Donnadieu, dévoile les coulisses d’artistes mythiques (de Picasso à Tony Cragg) à travers le regard d’autres grands artistes que sont les photographes. Un privilège rare, car comme le souligne Marc Donnadieu, « si l’art est un mystère, l’atelier en est la chambre des secrets, espace dédié à la création pure où peu de personnes ont eu le droit de cité ». Jusqu’au 21 septembre. Galerie d’art du Conseil général, 21 bis, cours Mirabeau, Aix-en-Provence. 04 13 31 50 70. Entrée libre. www.galerie-art-cg13.fr
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Clovis Prévost, Joan Miro, Atelier de Palma, 1974, épreuve aux sels d’argent, 29,2 x 21,4. Collection LaM, Villeneuve d’Ascq
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© Ville de Marseille © Ville de Marseille DR
Niki De Saint Phalle, Nana assise, 1971, collection du [mac]
Nan Goldin, The Other Side, 1972-1997,
collection [mac]
LE [MAC] A VINGT ANS
Jusqu’au 26 septembre, MAC, 69, avenue de Haïfa, Marseille, 8e. 04 91 25 01 07. 3-5 €.
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
BIENVENUE SUR LA PLANÈTE OGOR Trois ans après l’ouverture de sa galerie, Didier Gourvennec Ogor réunit son équipe d’artistes le temps d’un accrochage international, audacieux et impeccable.
Qui ? Jean-Baptiste Alcaraz, Emmanuelle Antille, Gilles
Balmet, Yannis Barth, Pascal Berthoud, Aimeric Chay, Claire Dantzer, Dieter Detzner, Martine Feipel & Jean Bechameil, FRP2, Pablo de Laborde Lascaris, David Lasnier, Nøne Futbol Club, Rob de Oude, Régis Perray, Timothée Talard. Ces artistes, que l’on peut qualifier de jeunes et prometteurs, indépendamment de leurs âges respectifs, sont les « poulains » de Didier Gourvennec Ogor. À trente-huit ans, après trois ans d’activité à Marseille et une vingtaine d’expositions, le galeriste a su s’imposer dans le paysage local – et bien au-delà –, grâce à son œil et son énergie.
Quoi ? Une voiture de police littéralement retournée,
des toiles poncées, des photographies de petits, moyens ou grands formats, des ready-made, des sculptures, des installations, de l’art abstrait ou figuratif, aux influences multiples… L’écurie Ogor ne se définit en aucun cas par une identité formelle, elle est ouverte et exigeante. Et si l’on peut parler d’un « style Ogor », c’est en raison de la qualité de ses accrochages, conciliant des univers extrêmement divers. Au gré de sa sensibilité, on s’attardera devant le croissant de lune en tapis de bain, les révolversrouleaux de moquette et les pneus de bois calcinés du fantastique duo Nøne Futbol Club (primé au Salon de Montrouge 2013), ou bien le bus ensablé et les délicats dessins découpés d’un autre duo, Martine Feipel & Jean Bechameil, auquel le Pavillon de l’Arsenal consacre une exposition cet 38
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été, ou encore l’immense « Carte postale de Marseille » de FRP2. Encore un duo !
Pourquoi ? Quand Didier Gourvennec Ogor a ouvert
en 2011 sa galerie dans l’improbable rue Duverger, il citait volontiers l’exemple de son ancien patron, Yvon Lambert, s’installant dans le Marais avant l’ouverture du Centre Pompidou. Il a réussi son pari, en attirant les amateurs d’art dans un quartier toujours en chantier. Pour autant, la partie est loin d’être gagnée et, si elle convainc des collectionneurs, cette rétrospective pourrait lui permettre de voir l’avenir avec plus de sérénité.
HAPPY HOURS
Jusqu’au 2 août. Galerie Gourvennec Ogor, 7, rue Duverger, Marseille, 2e. 09 81 45 23 80. Entrée libre.
WWW.
galeriego.com
© Courtesy Galerie Gourvennec Ogor.
Nøne Futbol Club, Work n°911 : All Cars Are Beautiful (2013) et accrochage collectif au mur.
Asco, Decoy Gang War Victim, 1974, photographie couleur par Harry Gamboa, Jr., tirage monté sur aluminium, 60,96 x 91,44 cm.
ET AUSSI :
© Courtesy Harry Gamboa, Jr.
ASCO and friends, Pop-up
Deux autres group show rétrospectifs se partagent les cimaises de la Tour à la Friche La Belle de Mai. ASCO and Friends: Exiled Portraits rend hommage à un groupe d’artistes chicanos, basé à Los Angeles entre 1972 et 1987. Performeurs, photographes, cinéastes, faisant de l’espace public leur terrain de prédilection, ces artistes ont su répondre à l’exclusion qu’ils subissaient, par des provocations poétiques et des parodies des productions dominantes de l’époque. Pop-up réunit des œuvres créées par une vingtaine de créateurs ayant bénéficié du programme de résidence de l’association Astérides, initiée en 1994 par un collectif d’artistes. Jusqu’au 6 et 18 juillet. Friche La Belle de Mai, 41, rue Jobin, Marseille, 3e. 04 95 04 95 04. 2-5 €. www.lafriche.org
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
LE SUPPLÉMENT D’ART DE DOMINIQUE ANGEL Marseillais de longue date, Dominique Angel n’a pourtant que rarement l’occasion d’exposer dans sa ville d’adoption. Vidéochroniques lui offre une quasi rétrospective.
Quoi ? Un totem d’ours en peluche, un Monument à
usage domestique, des socles débordant d’objets ou de sculptures, une drôle de dame descendant un escalier, une enseigne en néon, un escalier spirituel dans la « fosse »… Depuis plus de vingt ans, l’auteur de ces œuvres, Dominique Angel, les baptise presque toutes « Pièces supplémentaires » : « Les divers aspects de mon activité artistique sont les fragments d'une œuvre unique à laquelle je travaille dorénavant. Le titre, Pièces supplémentaires, déborde le projet qu'il annonce. J'utilise divers moyens d'expression. La nature de l'art contemporain commande de faire ainsi. Je n'y peux rien. »
Qui ? À soixante-douze ans, le sculpteur, installateur,
photographe, vidéaste, performeur et écrivain Dominique Angel n’a rien perdu de sa vitalité. Sa créativité et sa productivité sont sans limites. Revisitant l’histoire de l’art, explorant les ressources des matériaux les plus divers, du verre à la tôle ondulée en passant par le néon, conjuguant la technique du ready-made avec une grande maîtrise de la sculpture, il est l’auteur d’une œuvre en constant renouvellement, pleine d’humour, réjouissante pour les sens et l’esprit.
Arnaud Maguet, Modeste hommage aux Residents, 2010, digital prints on mat paper framed edition of 5 copies, 120 cm x 80 cm.
ET AUSSI : Le psychédélisme est-il mort ou vivant ?
Créateur du label des Disques du Rotin, Arnaud Maguet nourrit une fascination pour les codes sociaux qui entourent la musique et la culture underground des années cinquante à soixante-dix. Dans sa « cabane », il expose ses œuvres, reliques et objets fétiches, scrutant avec malice le devenir du psychédélisme. Autour de lui, des complices de longue date, issus du monde de la musique (Beau Delay Orchestra, The kptmichigan Upland Band, Philippe Robert) et de l’art contemporain (Arnaud Labelle-Rojoux, Olivier Millagou), rendent hommage à Dylan, aux Residents, à Burroughs et aux situationnistes. J.B. Jusqu’au 3 août. Tour Panorama, Friche la Belle de Mai, 41, rue Jobin, Marseille, 3e. 04 95 04 95 04. 3-6 €. www.sextantetplus.org © Courtesy Sultana Paris.
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Au premier plan : Dominique Angel, Pièce supplémentaire, 2011-2013 (verre, plâtre. Collection et réalisation CIRVA, Marseille).
Au fond : Dominique Angel, Sans titre, 1986
© Dominique Angel
(tôle ondulée, pâte à papier, fer plat, fil de fer).
Dominique Angel, Pièce supplémentaire, 2014 (bois, néon, dimensions variables).
© Dominique Angel
QUAND JE VOIS CE QUE JE VOIS ET QUE J’ENTENDS CE QUE J’ENTENDS, JE SUIS BIEN CONTENT DE PENSER CE QUE JE PENSE
Jusqu’au 12 juillet. Vidéochroniques, 1, rue Lorette, Marseille, 2e. 09 60 44 25 58. Entrée libre.
WWW.
videochroniques.org 8e art magazine • été 2014
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
LE PRÉAU S’OFFRE UN BEST OF Depuis vingt-trois ans, le Préau des Accoules initie les petits (et les grands) Marseillais à l’art et la culture, sans jamais les ennuyer. Préau Méli-mélo revient sur cette aventure.
Quoi ? Il a beau faire figure de « petit dernier » dans la
grande famille des musées marseillais, cet établissement né en 1991, entièrement conçu pour les enfants, est un pionnier du genre, sans aucun doute le plus innovant et dynamique. Avec plus de quarante expositions à son actif, il s’est forgé une solide réputation en matière de muséographie et de médiation. Le tout dans un somptueux bâtiment de pierres roses, qui abritait au XVIIIe siècle l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Marseille.
Comment ? Cet été, l’équipe emmenée par Laurence
© Paolo Ventura
Rossellini a décidé de partager avec le public ses réflexions et ses pratiques de la médiation de
ET AUSSI : L’Homme à la valise
L’artiste italien Paolo Ventura, est l’acteur, le décorateur, le metteur en scène et le photographe d’un monde de carton-pâte inspiré par les récits de sa grand-mère, le cinéma ou la littérature : « Je suis très inspiré par certains auteurs italiens comme Bassani, Fenoglio, Pavese, ou par les écrivains italiens des années 1920 aux années 1960. Par les peintres de la Scuola Romana… » Il présente au Studio Fotokino une sélection de ses photographies en même temps que leurs secrets de fabrication : décors, costumes, carnets… Jusqu’au 27 juillet. Studio Fotokino, 33, allées Gambetta, Marseille, 1er. 09 81 65 26 44. Entrée libre. www.fotokino.org Paolo Ventura, photographie de la série The Automaton, 2011.
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l’art vers les plus jeunes. Pour réaliser ce Méli-mélo, elle a sélectionné un florilège de ses créations (ateliers, livrets, puzzles, jeux de constructions, d'énigmes, de cartes…) et convié tous les musées marseillais à participer au projet. Le résultat est un parcours thématique offrant aux visiteurs la possibilité de se transformer en « acteurs ». Les enfants vont ainsi pouvoir jouer à l’architecte ou au sculpteur moderne, explorer des œuvres d’époques et d’origines diverses, imaginer le Marseille d’autrefois, essayer des masques et costumes venus du théâtre ou d’autres civilisations, mener des enquêtes archéologiques pour déchiffrer les messages du passé ou encore réaliser des fresques décoratives.
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© Ville de Marseille
© François Moura
Vues des expositions Arlequin, comédien et coquin (2009) et Explorer les tableaux… (2005), au Préau des Accoules.
PRÉAU MÉLI-MÉLO
Du 15 juillet au 16 août. Préau des Accoules, 29, montée des Accoules, Marseille, 2e. 04 91 91 52 06. Entrée libre.
WWW.
marseille.fr 8e art magazine • été 2014
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
DRÔLE DE GUERRE ! En marge des grandes expositions attendues, la vénérable Société Française de Photographie présente aux Rencontres d’Arles une série émouvante de Léon Gimpel.
Quoi ? En août 1915, en plein conflit mondial, le photo-
graphe Léon Gimpel tombe par hasard sur un groupe d’enfants jouant à la guerre, rue Grenetta, dans le quartier des Halles à Paris. Séduit, il leur rend visite plusieurs dimanches de suite. S’inspirant des dessins de Poulbot, il met alors en scène la troupe enfantine en réinterprétant une iconographie guerrière pleine d’humour : la capture du prisonnier, son exécution, les soins, la tranchée, la remise de médailles… Les exploits des petits héros sont publiés dans l’illustré Lecture pour tous en octobre 1915, sous le nom de « L'armée de la rue Greneta ». Une vingtaine de ces photographies sont aujourd’hui présentées à Arles.
Qui ? Si le nom de Léon Gimpel (1873-1948) est oublié
Comment ? la presse illustrée naissante, collaborant
durant trente ans à L’Illustration. Expérimentateur audacieux doublé d’un grand technicien, il est également considéré comme le précurseur de la série thématique et de la photo aérienne, allant jusqu’à modifier l’émulsion chimique des plaques commercialisées. Les autochromes, premières plaques en couleur inventées par les frères Lumières, relativement fragiles sont très rarement présentés. Ici, il s’agit de fac-similé à l’identique, recréés avec le souci de rendre la texture et la couleur particulière du procédé d’origine. À l’ère du numérique, montrer des plaques de verre est une façon de redonner poids et sens aux images.
aujourd’hui, c’est sans doute en raison de son goût pour les plaques de verre, plus difficiles à présenter que les tirages. Il fut pourtant l’un des grands photoreporters de
ET AUSSI : 40 000 monuments aux morts pour 1 350 000 morts
Suivant le protocole établi par Raymond Depardon, qui a sillonné la France pendant cinq ans, les collectivités et les particuliers ont été invités à participer à cette exposition en photographiant, à leur tour, les monuments aux morts de la Grande Guerre situés dans leurs quartiers, villages ou villes. L’image-recensement, ou comment préserver la mémoire de la mémoire ? Du 7 juillet au 21 septembre. Église des Frères prêcheurs, Quai Marx Dormoy, Arles. 04 90 96 76 06. 12 €. www.rencontres-arles.com
Raymond Depardon, Nord-Pas-de-Calais, Pas-de-Calais, Montcavrel. 44
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© Léon Gimpel, Société française de photographie (SFP)
L’aviateur Pépète vient d’abattre un Taube à coups de mitrailleuse, Paris, 19 septembre 1915. Autochrome, 9 x12 cm.
LA GUERRE DES GOSSES
Du 7 juillet au 31 août. Église des Frères prêcheurs, Quai Marx Dormoy, Arles. 04 90 96 76 06. 12 €.
WWW.
Les troupes prennent un repos bien gagné tout en savourant les sucres d’orge distribués par l’opérateur, Paris, 5 septembre 1915. Autochrome, 9 x12 cm.
rencontres-arles.com 8e art magazine • été 2014
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
DANSE AVEC FRANK GEHRY Arles, la ville des Rencontres, sera bientôt aussi celle de la fondation Luma. Les Chroniques de Solaris rendent un hommage peu banal à son architecte. Qui ? Frank Gehry a été choisi pour construire la tour de la
fondation Luma, mécénée par Maja Hoffmann : un complexe culturel de onze hectares, prévu sur le site du parc des Ateliers SNCF, dont l’inauguration est prévue en 2018. En attendant, l’Atelier de Mécanique présente une « exposition en mouvement » consacrée à l’architecte américain, réunissant les maquettes de ses principaux projets : la Loyola Law School et le Walt Disney Concert Hall de Los Angeles, les musées Guggenheim de Bilbao et Abu Dhabi, les Atlantic Yards de Brooklyn, le National Art Museum de Chine et le futur siège de Facebook à Menlo Park dans la Silicon Valley.
Quoi ? Comment qualifier l’expérience proposée par les
concepteurs de cette manifestation : les artistes Liam Gillick et Philippe Parreno associés au curateur Hans Ulrich Obrist ? Plus qu’une exposition, c’est une mise en scène ou une chorégraphie des maquettes de Frank Gehry – dépla-
cées par une équipe de médiateurs. Au gré de leur inspiration, ils modifient les combinaisons visuelles et sonores de l’ensemble. En s’allumant par intermittence, les Marquises de Philippe Parreno, suspendues au plafond, projettent un extraordinaire théâtre d’ombres dans l’immense hangar. La documentation n’a pas été négligée, mais réunie dans un espace dédié et à part.
Pourquoi ? Pour les auteurs du projet, il s’agit de
« transformer la relation habituelle entre un architecte et des artistes » et de « refléter la transversalité de Frank Gehry ainsi que ses collaborations avec des musiciens, des réalisateurs et des écrivains. » Il s’agit également, pour la fondation Luma, en phase préliminaire, de frapper les esprits en affirmant une approche originale de l’art.
ET AUSSI : Le prix Découverte
Le Décollage de Walé Asongwaka de Patrick Willocq, sélectionné pour le prix Découverte 2014. 46
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À deux pas de l’Atelier de Mécanique, L’Atelier de la Chaudronnerie accueille l’exposition des photographes sélectionnés pour le prix Découverte des Rencontres d’Arles. Cette récompense, offerte chaque été depuis 2002 par la fondation Luma, est décernée par un jury professionnel à l’un(e) des dix photographes proposés par cinq « nominateurs » internationaux. En règle générale, ces futurs grands noms de la photo méritent d’être découverts. Jusqu’au 21 septembre. Atelier de la Chaudronnerie, Parc des Ateliers, Arles. 04 90 96 76 06. 9 €. www.rencontres-arles.com
© Hervé Hôte
Un médiateur déplace une maquette de Frank Gehry.
Maquette de Frank Gehry pour les Atlantic Yards de Brooklyn.
SOLARIS CHRONICLES
Jusqu’au 26 octobre. Atelier de Mécanique, Parc des Ateliers, Arles.4-6 €.
WWW.
luma-arles.org
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
LES CÉZANNE D’AMÉRIQUE Déjà dépositaire pour quinze ans de la collection Planque, le musée Granet accueille, pendant trois mois, une cinquantaine d’œuvres acquises par le collectionneur américain Henry Pearlman.
Qui ? Henry Pearlman, fils d’immigrants russes et self-
made-man, est un entrepreneur prospère lorsqu’il acquiert en 1945 sa première toile, Vue de Céret de Chaïm Soutine, découverte dans la vitrine d’une galerie new-yorkaise. Dès lors, l’homme va développer une passion pour l’art européen et en particulier les impressionnistes et postimpressionnistes. À sa mort, en 1974, sa femme poursuit la gestion de sa collection et la confie, deux ans plus tard, au Princeton University Art Museum.
Sainte-Victoire peinte en format portrait et deux dessins. Exception faite de son attachement à Cézanne et Soutine, Pearlman a plutôt tendance à « se contenter » d’une œuvre par artiste. Mais non des moindres : Manet, Degas, Toulouse-Lautrec, Van Gogh, Gauguin, Pissaro, Modigliani, Cocteau, mais aussi Kokoschka, qu’il a rencontré et qui a peint son portrait en 1948.
Quoi ? L’exposition itinérante de la collection Pearlman
réunit une cinquantaine d’œuvres de dix-neuf artistes, dont près de la moitié de Cézanne. Soit la plus belle collection au monde d’aquarelles du peintre aixois, au nombre de seize, deux huiles dont l’unique
ET AUSSI : Expositions de collectionneurs
Cette année, les Rencontres d’Arles font la part belle aux collections privées. Le Musée départemental Arles antique expose une sélection des 4500 photographies modernes de la collection Trepat : un ensemble colossal acquis par l’industriel espagnol Josep Trepat Galceran. Au Bureau des Lices, on peut voir les panoramas chinois de l’historien et écrivain Claude Hudelot, qui a dirigé les Rencontres en 1988-1989 et affectionne particulièrement les panoramas maoïstes. Enfin, au Palais de l’Archevêché, le collectionneur américain W.M. Hunt a choisi d’évoquer sa passion pour les photographies de groupes : « elles sont amusantes et bizarres, et résonnent en moi. Ces photographies m’ont trouvé, j’aime les posséder et les partager. C’est ça, le plaisir de collectionner ». Jusqu’au 21 septembre. Musée départemental Arles antique, Bureau des Lices, Palais de l’Archevêché, Arles. 04 90 96 76 06. 5-12 €. www.rencontres-arles.com Exposition des téléphones Bell – Exposition universelle de New York, Opératrices 1-19, 1939. Par « Press Dept. 140 West St., New York City », (Avec l’aimable autorisation de Blind Pirate, New York).
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© Bruce M. White – Collection Henry et Rose Pearlman
Oskar Kokoschka, Portrait d’Henry Pearlman, 1948, huile sur toile, 101.6 x 76.2 cm.
CHEFS D’ŒUVRE DE LA COLLECTION PEARLMAN CÉZANNE ET LA MODERNITÉ
Du 12 juillet au 5 octobre. Musée Granet, Place Saint Jean de Malte, Aix-en-Provence. 04 42 52 88 32. 5-7 €.
WWW.
museegranet-aixenprovence.fr
© Bruce M. White – Collection Henry et Rose Pearlman
Paul Cézanne, Montagne Sainte-Victoire, vers 1902, huile sur toile, 83.8 x 65.1 cm.
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LES EXPOS DE L'ÉTÉ
ART, SONS ET LUMIÈRES AU CHÂTEAU
Depuis dix ans, le domaine du château d’Avignon accueille chaque été un parcours d’art contemporain. Cette année, il innove en se tournant vers la création sonore.
Où ?
Malgré son nom, dû au créateur du domaine au XVIIIe siècle, le château d’Avignon est en Camargue. Et l’homme qui lui a donné son apparence comme son intérêt actuels, s’appelle Louis Prat-Noilly. Après l’avoir achetée en 1893, le négociant marseillais décide de transformer la bastide existante en un pavillon de chasse à la pointe du progrès. Sensible au courant hygiéniste de l’époque et au fait des dernières avancées industrielles, il installe le confort moderne dans le bâtiment et fait construire une station hydraulique dans le parc.
Quoi ? Une cloche géante motorisée, des périscopes
chantant, des sculptures et installations sonores dans le parc et les dépendances, mais aussi un Schizophone
ou « casque de désorientation », un détournement de l’audioguide du château… Dans la perspective de cette manifestation, douze plasticiens et créateurs sonores ont été invités à travailler dans les différents espaces du domaine pour créer une œuvre ou adapter des pièces existantes à la particularité des lieux.
Quand ? Les 19 et 20 juillet, à l’occasion du vernissage,
le château d’Avignon s’associe avec le GMEM (Centre national de création musicale de Marseille), pour proposer un parcours sonore et un programme exclusif de concerts et de performances. Pendant le week-end, l’accès au domaine est gratuit.
ET AUSSI : Surface et bruissement
Les installations de Cléa Coudsi et Éric Herbin sont mouvantes et sonores. Elles impressionnent les oreilles et les yeux tout en mettant en branle notre imagination. Elles font aussi appel à notre mémoire individuelle et collective. Les deux jeunes artistes jouent ainsi avec de multiples matériaux (plastique, tissus, charbon, papier, disques vinyles...), mais aussi avec les mots. Bref, à l’image de la vie, beaucoup d’interprétations sont possibles. Et le sens ultime nous appartient. Jusqu’au 20 juillet. Seconde Nature, 27 bis, rue du 11 novembre, Aix-en-Provence. 04 42 64 61 01. Entrée libre. www.secondenature.org
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Cléa Coudsi & Éric Herbin, Other side break, disques vinyles, vinyle killers, dimensions variables, 2007.
© ADAGP Cassière © Arno Fabre
Pierre-Laurent Cassière, Autoportrait au Schizophone, 2006, lambda print / dibond, 55 x 73 cm, 2006.
Arno Fabre, Cloche, 2012-2013.
LE DOMAINE DES MURMURES #1
Du 19 juillet au 19 octobre. Domaine départemental du Château d’Avignon RD 570, Les Saintes-Maries-de-la-Mer. 04 13 31 94 54. 2-4 €.
WWW.
museegranet-aixenprovence.fr
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© Christophe Raynaud de Lage Festival d'Avignon
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Skö, la chambre imaginée par le collectif AVExciters pour le Vieux Panier. 8 e art magazine • été 2014
DOSSIER
FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES Dossier réalisé par
Julie Bordenave, Cédric Coppola, Emmanuelle Gall, Fred Kahn et Olivier Levallois.
De A, comme la confidentielle et marseillaise Africa fête, à V comme les incontournables Voix du Gaou… Cette année, entre le 23 juin et le 31 août, Terre de festivals, le guide édité par la Régie culturelle régionale, recense pas moins de 250 festivals, soit 1740 spectacles répartis dans 27 villes. Un record historique, dépassant même l’offre de l’année « capitale », mais qui s’inscrit dans une tradition longue et pérenne. Au point que l’été arrivant, face à l’offre pléthorique, on peut être tenté de baisser les bras, de se replier sur des valeurs sûres ou locales. Parce que les artistes sont souvent les spectateurs les mieux informés et les plus avisés, nous avons décidé de leur donner la parole et de mettre en valeur leurs coups de cœur musicaux, théâtraux ou cinématographiques. Suivons les guides !
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
Le Festivalvudepar Marseille,
Gymnaste, danseur, chorégraphe, bâtisseur… Michel Kelemenis pilote aujourd'hui KLAP, le nouvel équipement culturel dédié à l'art de la danse à Marseille. Conçue comme une amplification du projet pluriel mené par Kelemenis & cie, cette « maison pour la danse » accueille les travaux de très nombreux artistes, dans un esprit de partage avec les publics, et multiplie les occasions de se « frotter » à l’art chorégraphique. Quant à l’artiste Michel Kelemenis, il a su imposer sa signature. Les pièces qu’il crée avec sa compagnie, parce qu’elles parlent autant aux sens qu’à l’intellect, rencontrent un large succès. Il est aussi l'invité de compagnies internationales, dont très récemment les Ballets de l'Opéra national de Paris et du Grand Théâtre de Genève. Propos recueillis par Fred Kahn Portrait : JC Carbonne
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© N.Vandenbussche
MICHEL KELEMENIS
« FESTIVAL PLURIDISCIPLINAIRE, J'AIME QU'À TRAVERS LE TEMPS LA DANSE EN AIT ÉTÉ LE CŒUR BATTANT, JUSTEMENT PLACÉE AU CROISEMENT DES AUTRES DOMAINES D'EXPRESSION ARTISTIQUE. »
Que représente pour vous le Festival de Marseille ? Quelles sont, selon vous, sa raison d’être et sa singularité ? Ce festival doit s'observer à partir de Marseille, car il s'adresse essentiellement aux Marseillais. Il demeure la seule fenêtre régulière de programmation de compagnies et projets chorégraphiques de dimension internationale. Festival pluridisciplinaire, j'aime qu'à travers le temps la danse en ait été le cœur battant, justement placée au croisement des autres domaines d'expression artistique. Je me plais à voir une métaphore où l'art de la danse est, en soi, une invitation au dialogue, une ouverture à l'autre, la porte d'entrée vers un monde de profondeurs humaines dans lequel chacune et chacun, par empathie et en toute diversité, peut plonger. Depuis quand le connaissez-vous et quel est votre plus beau souvenir ? Le plus beau marqueur me reliant au festival c’est une amitié, toujours vivace, qui naquit dès la première année, en 1996.
Mais je dois surtout évoquer le « miracle » de la Vieille Charité. L'édition 1997 du festival invite avec générosité ma compagnie à fêter ses dix ans dans ce site merveilleux. Si notre création est reçue avec une franche froideur, le gala en revanche, qui rassemble des danseurs d’origines et de cultures professionnelles différentes, scelle avec le territoire une relation de fond qui éclaire encore aujourd'hui notre parcours. L’édition 2006 a donné lieu à une autre collaboration, Question de danse, qui permettait d’interroger avec le public l’acte de création. Cette manifestation, devenue depuis Questions d'artistes, a été un laboratoire du projet de KLAP. J'ajoute la fidélité à De Keersmaeker et Teshigawara, et les nombreuses émotions suscitées par des créateurs dont on aimerait voir plus souvent les œuvres à Marseille : Vandekeybus, Cherkaoui, Waltz… Je saisis l’occasion de saluer l’arrivée à la direction du Ballet National de Marseille d’Emio Greco et Pieter Shulten, que les Marseillais ont découvert durant l’édition 2008 du Festival. 8e art magazine • été 2014
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DOSSIER
LES CHOIX
DE MICHEL KELEMENIS : Vertigo Dance Company, Power of Balance (ateliers) Du 15 au 17 juin, 14h30. KLAP, Maison pour la danse, 5, avenue Rostand, Marseille, 3e. 04 91 99 02 56. Entrée libre sur réservation.
Au vu de la programmation, quels spectacles aimeriezvous voir cette année ? Pourquoi ? Au risque d'apparaître chauvin, j'assisterai en premier lieu à la soirée du Ballet de Marseille, parce qu'il s'agit d'une création mondiale. La création est le seul moyen d'amener vers Marseille des programmateurs nationaux et internationaux, au bénéfice des artistes d'ici comme du rayonnement de la ville. Mais je ne manquerai évidemment pas la fureur des Ballets C de la B et découvrirai avec beaucoup d'attente la créativité sud-africaine de William Kentridge. Une mention spéciale pour Vertigo Dance Company et son atelier Power of balance conçu pour un partage de la danse entre personnes handicapées et personnes valides. J’ai tenu à ce qu’il se déroule à KLAP. Avez-vous un autre rendez-vous estival de prédilection ? J'avoue aimer me rendre chaque année une ou deux fois au Festival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence. Je rêve d'adapter à la danse, mais ce n'est pas facile, le concept extraordinaire de l'Académie européenne de musique. Cette ouverture hors du champ de la danse me donne toujours beaucoup d'énergie. L'été dernier aura été marqué par Elektra de Richard Strauss, dernière grande mise en scène de Patrice Chéreau. Je garde précieusement le souvenir de sa simplicité lors de sa participation à Question de danse en 2008. Cette année, je ne manquerai pas de parfaire ma rencontre de spectateur avec Kentridge au travers de sa mise en scène du Voyage d'hiver de Franz Schubert.
William Kentridge, Ubu and the truth Commission Du 28 au 30 juin, 21h. Théâtre Joliette-Minoterie, 2, place Henri Verneuil, Marseille, 2e. 04 91 99 02 50. 10-20 €. KVS & les ballets C de la B Les 30 juin et 1er juillet, 21h. Grand Studio du BNM, 20, boulevard Gabès, Marseille, 8e. 04 91 32 72 72. 10-20 €. Ballet national de Marseille Le 8 juillet, 21h. Le Silo, 35, quai du Lazaret , Marseille, 2e. 04 91 90 00 00. 10-31 €. ET AUSSI... Le Festival international d'art lyrique d’Aix-en-Provence Du 5 juin au 24 juillet www.festival-aix.com William Kentridge, Winterreise Les 4, 6 et 12 juillet, 17h et les 8, 15 et 17, 20h. Conservatoire Darius Milhaud,380 avenue Mozart. Aix-en-Provence. 08 20 92 29 23. 15-120 €.
FESTIVAL DE MARSEILLE – DANSE ET ARTS MULTIPLES, 19E ÉDITION
Du 19 juin au 12 juillet
WWW.
festivaldemarseille.com
Scannez pour accéder au site 56
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
LevuFID, par
© FID Marseille
VANESSA SANTULLO Marseillaise d’adoption depuis treize ans, Vanessa Santullo est photographe et vidéaste. Ses œuvres interrogent la construction de l’identité, entre affirmation de l’individu et appartenance collective. Elle entretient avec le Festival International de Cinéma de Marseille une relation qui est à la fois celle d’une ancienne élève de Jean-Pierre Rehm (son directeur) à l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles, d’une spectatrice curieuse et d’une artiste questionnant l’image documentaire. « L’image me permet avant tout d’analyser ce que je vois. Mon approche mêle ainsi une subjectivité à une observation proche de la sociologie », explique-t-elle.
Propos recueillis par Olivier Levallois Portrait : Marie Maurel de Maille
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« ON DÉCOUVRE DES FILMS QU’IL EST TRÈS DIFFICILE DE VOIR PAR AILLEURS, QUI PARLENT DE L’ÉTAT DU MONDE À CE MOMENT-LÀ. C’EST AUSSI L’OCCASION DE FAIRE UN CONSTAT DE L’ÉTAT DE LA CRÉATION INTERNATIONALE. »
Que représente pour vous le FID ? Quelles sont, selon vous, sa raison d’être et sa singularité ? Pour moi le FID est ce rendez-vous au début de l’été, où l’on découvre des films qu’il est très difficile de voir par ailleurs, qui parlent de l’état du monde à ce moment-là. Je pense par exemple à Demande à ton ombre de l’algérien Lamine AmmarKhodja (prix du meilleur film au FID 2012), diffusé lors du printemps arabe. C’est aussi l’occasion de faire un constat de l’état de la création internationale, avec des formes cinématographiques souvent originales et expérimentales. Les œuvres venant de toute la planète, on découvre des façons d’observer le monde, d’en parler très différentes de celles dont on a l’habitude. État du monde et état du cinéma en même temps, donc. Et puis, c’est aussi un espace de débat, de rencontres. Ce qui était encore ces dernières années assez rare à Marseille. Des auteurs, des réalisateurs se déplacent pour venir parler de leur travail. L’année dernière Caroline Champetier, directrice de la photo (Godard, Rivette, Truffaut, Téchiné, Doillon…) est venue pour parler de son métier. Ce sont des moments rares. Depuis quand le connaissez-vous ? À partir de 2003, quand Jean-Pierre Rehm est arrivé comme
programmateur. J’aimais beaucoup le FID de ces années là, parce qu’il y avait davantage de programmateurs de l’extérieur. Et puis, c’était une manifestation plus confidentielle aussi. On avait le sentiment d’être privilégiés. Cela dit, il me semble important que le festival évolue. Il avait déjà commencé à intégrer plus de fictions dans la programmation des Écrans parallèles. Mais depuis 2010, il s’est ouvert à toutes les formes du cinéma et plus seulement au documentaire. « Tous les grands films de fiction tendent au documentaire, comme tous les grands documentaires tendent à la fiction », a dit Godard. Jean-Pierre Rehm défend cette idée. Aujourd’hui c’est un festival dont la qualité est reconnue dans le monde entier, à l’instar du festival de Rotterdam. Et c’est très bien pour Marseille. En terme d’image, d’économie, de culture, un grand festival attractif apporte une plus value dont la ville a besoin. Quel est votre plus beau souvenir ? Un de mes plus beaux souvenirs, c’est la projection en 2003 du documentaire The révolution will not be televised, réalisé par Kim Bartley et Donnacha O'Briain. Il raconte l’aventure d’une équipe de tournage hollandaise au Venezuela qui s’est retrouvée, accidentellement au beau milieu d’un coup d’État 8e art magazine • été 2014
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DOSSIER
LES CHOIX
DE VANESSA SANTULLO :
contre le président Chávez, enlevé pendant 48 heures par ses opposants. La phrase de Godard a pris tout son sens : un documentaire que l’on vit comme une fiction. Il était projeté dans la grande salle de la Criée, un dimanche après-midi. À la fin tout le monde s’est levé et a applaudi. Il y a aussi un autre grand souvenir dans un tout autre genre. Le film Numéro Zéro que Jean Eustache a réalisé en 1971, où il questionne sa grand-mère sur sa vie. Une merveille. Tout le monde est sorti de la séance plein d’allégresse. En tant que spectatrice, j’ai rarement des enthousiasmes collectifs. C’est donc ceux qui me marquent le plus. Des films avec lesquels tu vis ensuite pendant plusieurs mois, qui te mettent le cerveau en ébullition. Au vu de la programmation, à quelles projections aimeriezvous assister cette année ? Pourquoi ? Une rétrospective Marguerite Duras est prévue pour le centenaire de sa naissance. Pour Marguerite Duras, le cinéma passe avant tout par le texte, le film précédant parfois le livre. Dans ses récits cinématographiques, elle explore le décalage entre l'image, le texte et le son. Aussi, sa façon unique de travailler et de placer la voix off m'interpelle. Il y a aussi des réalisateurs, dont la démarche me semble proche de la mienne, mêlant fiction et documentaires, dans des formats très différents d’une œuvre à l’autre. Comme Marie Voignier, qui s’intéresse à la notion de territoires et dont j’ai vu le film Hinterland, en 2009, sur un nouveau complexe de vacances en Allemagne, construit sur le site d’une ancienne base militaire. Cette année, elle présente Tourisme international, autour d’une visite touristique en Corée du Nord. J’aimerais aussi voir Mercuriales, le premier long métrage de fiction de Virgil Vergnier qui est passé à Cannes. J’ai déjà vu son Commissariat, un documentaire dans la veine de Raymond Depardon. Avez-vous un autre rendez-vous estival de prédilection ? J’en évoquerais un plus confidentiel que j’aime beaucoup qui est Actoral. C’est un peu la même démarche que le FID, avec
Programmation Duras Du 2 au 7 juillet. MuCEM et Le Miroir, esplanade du J4 et 2, rue de la Charité, Marseille, 2e. 04 95 04 44 90. 5-6 €. Tourisme internationale de Marie Voignier Le 5 juillet, 14h30. MuCEM Le 6 juillet, 17h45. Les Variétés, 37, rue Vincent Scotto, Marseille, 1er. 04 95 04 44 90. 5-6 €. Mercuriales de Virgil Vergnier Le 3 juillet, 20h15. MuCEM Le 5 juillet, 12h00. MuCEM 04 95 04 44 90. 5-6 €. ET AUSSI... Actoral. 14 Du 24 septembre au 11 octobre Marseille 04 91 37 30 27 www.actoral.org
une volonté de proposer des choses hors-normes et hors circuit. Et puis c’est un festival pas cher, avec des formes courtes. Aussi, je peux les accompagner dans leur prise de risque. Sur les grands festivals où les places sont souvent chères, on a tendance à être moins curieux, à choisir des artistes ou des formes déjà identifiées. L’équipe d’Actoral défriche et a l’audace de promouvoir des formes innovantes, dans l’écriture, la performance, la réflexion sur le corps dans l’espace par rapport au texte. On nous invite à nous confronter à quelque chose de l’ordre de l’avant-garde, tout comme au FID.
FIDMARSEILLE, 25E ÉDITION
Du 1er au 7 juillet
WWW.
fidmarseille.org
Scannez pour accéder au site 60
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
Villeneuvevu paren Scène,
VALÉRIE BOURNET Fondée en 2007, dans la lignée du Cartoun Sardines Théâtre, l’Agence de Voyages Imaginaires perpétue l’esprit du théâtre de troupe, pour peaufiner sur les routes ses reprises de classiques assaisonnés de parfums d’ailleurs : une résurrection des Atrides en Grèce, Antigone au Burkina Faso, Tristan et Yseult dans les forêts écossaises, El Cid ! sous le soleil de l’Espagne et du Maroc... La compagnie estaquéenne se sent comme un poisson dans l’eau sous les chapiteaux colorés de Villeneuve en Scène. Dédié au spectacle itinérant, le festival s’installe chaque été dans la verdoyante Plaine de l’Abbaye, en marge du tumulte d’Avignon. Évocation avec Valérie Bournet, qui dirige avec Philippe Car l’Agence de Voyages Imaginaires. Propos recueillis par Julie Bordenave Portrait : Elian Bachini
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DOSSIER
« ICI, NOUS POUVONS GARDER NOTRE IDENTITÉ. CHAQUE COMPAGNIE A LE BONHEUR D’AMÉNAGER SON PROPRE ESPACE, POUR FAIRE VOYAGER LE SPECTATEUR. »
Que représente pour vous le festival Villeneuve en Scène ? Quelles sont, selon vous, sa raison d’être et sa singularité ? Nous défendons l’engagement du théâtre de troupe. Même dans les salles, nous parons les lieux qui nous invitent à nos couleurs : expositions dans les halls des théâtres, banquet musical à l’issue des représentations... C’est cette liberté que nous avons retrouvée à Villeneuve en Scène : nous pouvons y garder notre identité. Chaque compagnie accueillie ici a le bonheur d’aménager son propre espace, pour faire voyager le spectateur ; en marge des parades, des files d’attente et de l’effervescence d’Avignon, il est ici dans un espace de respiration et de verdure. À Villeneuve, chaque compagnie déploie son univers, certains chapiteaux peuvent être verts à pois roses, nous misons pour notre part sur les étoiles rouges ! Tous les membres de l’équipe sont mobilisés, nous recrutons aussi des bénévoles pour nous accompagner faire des parades en ville, et faire venir le public depuis l’autre côté du Rhône. Il faut remercier Frédéric Poty, directeur du festival, et toute son équipe, qui se battent depuis des années pour 62
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que ce lieu existe et puisse accueillir de nombreux rêves différents. Leur esprit de résistance est salutaire ! Depuis quand le connaissez-vous et quel est votre plus beau souvenir ? Nous faisons Avignon depuis trente ans (avec Cartoun Sardines auparavant, NDLR), et nous avons décidé de sortir de la ville depuis une quinzaine d’années, car les conditions de jeu ne nous correspondaient plus. Nous avons d’abord été parmi les premières compagnies à migrer sur l’île de la Barthelasse, puis nous avons découvert Villeneuve en Scène en 2007. Nous connaissions Frédéric Poty du temps où il dirigeait sa propre compagnie, et nous allons désormais à son festival tous les deux ou trois ans. Mon plus beau souvenir, c’est celui du rayonnement qui entoure l’événement : le rapport à la nuit et à l’extérieur fait naître un temps de partage avec le public qui outrepasse le cadre de la représentation. On s’achemine durant toute la journée vers le moment où l’on accueille les spectateurs à la nuit tombée, quand les cha-
© Soyons flou
LES CHOIX
DE VALÉRIE BOURNET :
piteaux commencent à s’illuminer à la lueur des guirlandes... Des moments poignants ont lieu avant et après le spectacle, on rejoint les spectateurs quand on sort de scène, et on peut discuter avec eux sous les étoiles jusqu'au bout de la nuit, autour d’un repas et d’une chanson. Sur le site, la vie quotidienne se mêle au monde du spectacle, nos caravanes trônent à quelques mètres du chapiteau. Un vrai univers forain se déploie, avec les cigales en toile de fond... C’est fabuleux. Au vu de la programmation, quels spectacles aimeriezvous voir cette année ? Pourquoi ? J’irais sans hésiter voir Duo Bonito, le spectacle des Nouveaux nez. J’aime beaucoup l’esprit de cette troupe dirigée par Alain Reynaud, ce sont des chercheurs pointus et décalés. Le duo est formé de Raquel Esteve Mora et Nicolas Bernard, des clowns extraordinaires, sublimes sur scène, chaque spectacle est l’occasion de retrouver leurs personnages. Et aussi L’Idéal Club, le cabaret des 26 000 Couverts : cette compagnie est sur la route depuis longtemps, ils ont fait de belles choses, de grosses mises en scène. Je ne connais pas cette proposition, mais j’aurais la curiosité d’aller voir...
L’Idéal Club Du 7 au 23 juillet, 21h30. Le Verger, Plaine de l’Abbaye, Villeneuve lez Avignon. 04 32 75 15 95. 13-19 €. Duo Bonito : chansons à risques Du 3 au 23 juillet, 22h. Le Bosquet, Plaine de l’Abbaye, Villeneuve lez Avignon. 04 32 75 15 95. 8-16 €. ET AUSSI... Chalon dans la rue, 28e édition. Du 23 au 27 juillet, Chalon-sur-Saône. 03 85 90 94 70. www.chalondanslarue.com Musicalarue, 25e édition. Du 14 au 16 août, Luxey. 05 58 08 05 14. 29-33 €. www.musicalarue.com
Avez-vous un autre rendez-vous estival de prédilection ? Fin juillet, Chalon dans la rue à Chalon-sur-Saône, rendez-vous incontournable des arts de la rue. Mi-août, Musicalarue à Luxey, qui mêle musique et arts de la rue, dans les Landes. C’est un très chouette festival, qui permet de faire de belles découvertes musicales dans une ambiance intimiste, de se balader dans la nature en journée, et de se retrouver dehors sous les étoiles le soir... Un rendez-vous parfait en amoureux !
VILLENEUVE EN SCÈNE
Du 3 au 23 juillet
WWW.
villeneuve-en-scene.com
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
Avignon, vu par
En mai dernier, ses Liaisons dangereuses sur terrain multisports enflammaient le SMUC comme les stades des lycées Artaud et Saint-Charles. Programmée par la scène nationale du Merlan, la première mise en scène de la comédienne marseillaise Édith Amsellem ne manque ni de souffle ni d’humour. Décalée et féministe, elle réconcilie le théâtre de rue et la tragédie classique, joint la performance à la philosophie… Forte de son succès, Édith Amsellem travaille déjà à sa nouvelle création : une adaptation d’Yvonne, princesse de Bourgogne, la première pièce de Gombrowicz, pour les châteaux-toboggans des cours d’écoles maternelles. Son goût pour les espaces atypiques ne l’empêche pas d’être une spectatrice assidue du Festival d’Avignon. Propos recueillis par Emmanuelle Gall Portrait : Francis Ruggirello
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© Christophe Reynaud de Lage - Festival d'Avignon
ÉDITH AMSELLEM
« DEPUIS JEAN VILAR, CHAQUE NOUVEAU DIRECTEUR S’EST APPROPRIÉ LE FESTIVAL ET EN A FAIT SON PROJET. CETTE ANNÉE, AVEC L’ARRIVÉE D’OLIVIER PY, UNE NOUVELLE ÈRE COMMENCE…»
Que représente pour vous le Festival d’Avignon ? Quelles sont, selon vous, sa raison d’être et sa singularité ? C’est d’abord le plus grand festival international de théâtre en France, qui permet de voir ce qui se fait ailleurs et qui a peu de chance de passer par Marseille. Et, pour une fois, c’est aussi l’occasion de voir des spectacles avant les Parisiens ! En tant que comédienne et metteure en scène, je le vis d’abord comme un rendez-vous professionnel, réunissant tous les pros du spectacle vivant. Je suis plus intéressée par le In que par le Off : son foisonnement excessif me fait peur et je n’y vais que pour y voir jouer des amis. La singularité d’Avignon réside aussi dans le fait que, depuis Jean Vilar, chaque nouveau directeur s’est approprié le festival et en a fait son projet. Cette année, avec l’arrivée d’Olivier Py, une nouvelle ère commence… Depuis quand le connaissez-vous et quel est votre plus beau souvenir ? Depuis toujours. Le festival avait vingt-quatre ans quand je
suis née, il a toujours fait partie de mon paysage et j'imagine qu'il me survivra ! Même si aujourd’hui la conjoncture est particulièrement inquiétante, à cause de la réduction des budgets de la culture, mais aussi et surtout du projet de réforme du statut des intermittents du spectacle. Si cette réforme passe le 1er juillet, nous (intermittents) serons encore plus précaires que nous le sommes aujourd'hui. Nos revenus et nos indemnités chômage vont encore baisser ! Pour revenir à Avignon, j’y ai une foule de souvenirs. Le premier qui me vient à l’esprit n’est pas le plus beau, c’est la plus grande claque ! Il s’agit de Conte d'amour de Markus Öhrn, en 2012, un spectacle performatif et radical autour de l’affaire Josef Fritzl. Le spectacle durait plus de trois heures et plaçait le spectateur dans une position de voyeurisme à la limite du supportable. J’ai adoré qu’un spectacle m’entraîne à cet endroit. Ce n’était pas confortable, mais je ne vais pas au théâtre pour me détendre. Plus jeune, j’ai aussi vu Maria Casarès. Je ne me souviens plus de la pièce, un classique, mais d’elle, de cette comédienne portant l’histoire du théâtre dans son corps et sa voix. 8e art magazine • été 2014
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DOSSIER
LES CHOIX
D'ÉDITH AMSELLEM : Hypérion Du 8 au 16 juillet, 18h. Théâtre Benoît XII, 12, rue des Teinturiers, Avignon. 04 90 14 14 14. 10-28 €.
Au vu de la programmation, quels spectacles aimeriezvous voir cette année ? Pourquoi ? Je pense aller voir Intérieur, mis en scène par Claude Regy. L’homme a quatre-vingt-onze ans et un parcours exceptionnel. Jusqu’ici, je n’ai pu voir ses spectacles qu’en vidéo. J’ai également envie de voir comment Marie-José Malis mettra en scène Hypérion. Son Pirandello, On ne sait comment, reste gravé dans ma mémoire de spectatrice et j'aime sa façon de parler du théâtre, de défendre l’idée du théâtre pour tous. Quand elle a pris la tête du Théâtre de la Commune à Aubervilliers, elle a eu cette phrase très belle : « Je crois à l’idée de l’égalité de tous devant la beauté ». Je suis aussi tentée par Le Mariage de Maria Braun, mis en scène par Thomas Ostermeier, car je suis curieuse de voir ce qu'il va faire de Fassbinder, et Matter de Julie Nioche. On m’a beaucoup parlé de cette chorégraphe et son sujet – le corps féminin – m’inspire.
Intérieur Du 15 au 27 juillet, 18h. Salle de Montfavet, Rue Félicien Florent, pôle technologique Agroparc, Avignon. 04 90 14 14 14. 10-28 €. Matter Du 20 au 27 juillet, 18h. Théâtre Benoît XII, 12, rue des Teinturiers, Avignon. 04 90 14 14 14. 10-28 €. Le Mariage de Maria Braun Du 23 au 27 juillet, 22h. Cour du lycée Saint-Joseph, 62, rue des Lices, Avignon. 04 90 14 14 14. 10-28 €.
Avez-vous un autre rendez-vous estival de prédilection ? Mon festival préféré, c’est Scènes de rue à Mulhouse. J’aime sa programmation très exigeante dans l’espace public. Nous y avons présenté Les Liaisons dangereuses en 2012 et je trouve que Frédéric Rémy, son directeur, sait prendre des risques, mais aussi accompagner les artistes d’une manière rare et précieuse. Par ailleurs, je ne rate jamais la Biennale de Venise, dont la prochaine édition aura lieu en 2015. C’est une manifestation très nourrissante et c’est à Venise !
ET AUSSI... Festival Scènes de rue Du 17 au 20 juillet, Mulhouse. 03 69 77 77 50. Entrée libre sur réservation. www.scenesderue.mulhouse.fr
FESTIVAL D’AVIGNON, 68E ÉDITION.
Du 4 au 27 juillet
WWW.
festival-avignon.com
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
Les Suds vu par
L’an dernier, lors d’un concert organisé dans le cadre de MarseilleProvence 2013, Moussu T e lei jovents clôturait le festival Les Suds, Sur un air de Trenet, en reprenant les titres du fou chantant, en occitan. Langue mise à l’honneur dans chacun des sept albums du combo, qui se plaît à proposer depuis près de dix ans une musique vivante, qui respire le sud et le soleil. Et s’ils ne sont pas à l’affiche du cru 2014 arlésien – pour les voir, il faudra se rendre au off d’Avignon –, le leader Tatou, également voix du Massilia Sound System, garde un œil averti sur ce rendez-vous majeur de l’été.
Propos recueillis par Cédric Coppola Portrait : Christine Cornillet
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© Florent Gardin
TATOU
« CONTRAIREMENT À D’AUTRES, CE FESTIVAL N’EST PAS DEVENU UN GHETTO CULTUREL. »
Vous avez joué l’an dernier au festival Les Suds à Arles, quelles sont pour vous sa raison d’être et sa singularité ? Le plus important, à mes yeux, c’est que ce festival se passe dans notre région, à côté de chez nous. Cela peut paraître simpliste, mais il est important d’avoir des événements de cette envergure qui occupent le terrain et tirent parti de ses spécificités. En tout cas, plus il y a de manifestations qui sont organisées sur le territoire, plus cela m’intéresse. Les Suds ont la particularité d’accueillir des têtes d’affiche, certes, mais aussi des découvertes, et mettent à l’honneur différents styles de musiques. Autre atout, ne pas s’adresser uniquement aux visiteurs extérieurs. L’objectif, il me semble, est également de mettre en valeur la ville et ses habitants. Ce concept me parle beaucoup. Cela se ressent moins dans d’autres festivals d’été ? À Arles, les concerts se déroulent dans plusieurs lieux, souvent publics, que les gens ont l’habitude de fréquenter. Il peut s’agir de monuments, d’endroits très architecturaux,
de petites rues… Il y a également beaucoup de propositions en journée, ce qui induit qu’il n’y a pas que les noctambules qui peuvent en profiter. Même si je ne vais pas citer de nom, beaucoup de festivals de la même ampleur sont devenus des ghettos culturels, ils favorisent la consommation et le côté tape à l’œil. Je pense sincèrement que pour « Les Suds », ça n’est pas le cas, donc j’adhère. Depuis combien de temps connaissez-vous le festival et quels en sont vos meilleurs souvenirs ? Oh ! Je connais le festival depuis longtemps. Quand exactement, je ne sais plus… Je n’ai pas de souvenir de spectateur à proprement parler puisque je n’y suis jamais allé en tant que tel. Les raisons sont multiples : d’une part j’habite La Ciotat, et Arles, c’est un peu à l’opposé sur le territoire ! Ensuite, avec le groupe Moussu T e lei jovents, l’été, c’est le moment justement où on tourne, où on travaille le plus. Je n’ai donc pas le temps d’aller me divertir. En tant qu’artiste, j’’en garde par contre un beau souvenir de scène. Ce genre 8e art magazine • été 2014
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DOSSIER
LES CHOIX DE TATOU :
Calexico et DakhaBrakha Le 16 juillet, 21h30. Théâtre antique, Rue du cloître, Arles. 04 90 96 06 27. 23,80-36,90 €.
d’initiative permet par exemple des croisements, comme l’an dernier avec les Phocéens du Cor de la Plana. Ensemble, nous avons rendu hommage à Charles Trenet. Est-ce important, justement aussi bien pour les artistes que pour les organisateurs, de se tourner parfois vers le patrimoine musical ? Sur ce projet, le concept était d’essayer de décrypter la machine Trenet. Mais oui, c’est important. D’ailleurs au festival d’Avignon, on va jouer cette année un programme autour des opérettes marseillaises de Sarvil et Scotto. Il ne s’agira pas forcément de remuer le passé, mais d’interpréter des œuvres qui m’ont inspiré pour devenir artiste. Il y a une filiation et je ce qui est dit est universel. Vous savez, malgré leur appellation, ces « opérettes marseillaises » avaient été créées pour séduire le public parisien. Là encore, il s’agit de décloisonner. En parlant de langue occitane, on verra notamment Dupain. Dans d’autres registres, il y a aussi des locaux comme Dj Oil, Ahamada Smis… Ce sont des amis, des copains et on s’est tous rendu service à un moment où à un autre, il m’est donc difficile d’en conseiller un plutôt qu’un autre aux spectateurs. Je ne peux les inviter qu’à être curieux ! De ce que j’ai vu, de la programmation il y a Johnny Clegg, Calexico… Mais j’ai un petit coup de cœur pour Susheela Raman, dont le son mé-
Johnny Clegg et Mahotella Queens Le 17 juillet, 21h30. Théâtre antique, Rue du cloître, Arles. 04 90 96 06 27. 23,80-36,90 €. Susheela Raman et Esperanza Fernandez Le 19 juillet, 21h30. Théâtre antique, Rue du cloître, Arles. 04 90 96 06 27. 23,80-36,90 €.
lange le rock et les musiques indiennes. Elle a aussi de jolies balades dans son répertoire. Elle était passée par Marseille, au festival Babel Med. En concert, il y aura aussi le Chilien Chucho Valdès, le Jamaïcain Winston Mcanuff, passés il n’y a pas si longtemps par le festival Jazz des Cinq Continents… Il ne faut pas se leurrer, la musique est avant tout un marché et les tourneurs essaient de caser le plus possible leurs poulains. Donc oui, on voit souvent des têtes revenir, voire enchainer des scènes proches géographiquement la même année. Les déplacements, surtout en ce qui concerne les étrangers, sont chers et niveau production, il faut amortir au maximum. L’artiste, lui, va jouer où il y a de la demande, c’est son métier.
LES SUDS À ARLES, 19E ÉDITION
Du 14 au 20 juillet
WWW.
suds-arles.com
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
Jazz des Cinq Continents, vu par
RAPHAËL IMBERT Pour Raphaël Imbert, le jazz n’est pas un genre musical, mais un état d’esprit qui lui permet de transcender toutes les frontières. Son plus grand coup d’éclat ? Avoir composé un album en rapprochant Bach et Coltrane, deux monstres sacrés qu’a priori tout oppose. Mais on l’a aussi vu improviser avec Archie Shepp, Napoleon Maddox, figure du rap de Cincinnati, ou encore des musiciens de l’Ircam, véritable institution pour les musiques savantes. Bref, il aime voyager sur tous les continents musicaux.
Propos recueillis par Fred Kahn Portrait : Solene Person
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« CE FESTIVAL FAIT CONFIANCE À LA DÉCOUVERTE, ET, FAIT RARISSIME POUR NE PAS DIRE UNIQUE DANS CE GENRE D'ÉVÉNEMENT ESTIVAL, AUX ARTISTES LOCAUX. »
Que représente pour vous le festival Jazz des Cinq Continents ? Quelles sont, selon vous, sa raison d’être et sa singularité ?Sous la houlette de Bernard Souroque et d'une équipe formidable, c’est un vrai festival marseillais, donc international ! Même si l'expression peut paraître galvaudée, c'est, de prime abord, un festival « grand public ». Il présente des stars qui, ne l'oublions pas, fidélisent aussi un public nombreux et diversifié. Mais, c'est aussi un festival qui fait confiance à la découverte, et, fait rarissime pour ne pas dire unique dans ce genre d'événement estival, aux artistes locaux. Chaque année les musiciens marseillais sont parties prenantes du festival, qui devient ainsi une vitrine pour un public qui peut les découvrir. Pour ma part, le festival m'a très souvent fait confiance, depuis le début, et il y a désormais une vraie empathie entre l'équipe et ma compagnie, la Cie Nine Spirit. Christophe Leloil ouvre le festival cette année, Marion Rampal a joué avec Manu Katché (et Archie Shepp). Donc, en prenant le pouls du jazz marseillais et en le confrontant à l'actualité musicale internationale, le 72
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festival Jazz des Cinq Continents est un événement totalement marseillais et ouvert. Ajoutons à cela que c'est aussi un festival de passionnés qui s'intéressent aux à-côtés de la musique, avec un travail pédagogique formidable de l'Alcazar BMVR notamment. Depuis quand le connaissez-vous et quel est votre plus beau souvenir ?Depuis le début, depuis que Robert Luccioni, élu passionné de jazz et contrebassiste émérite, a imaginé que Marseille devait avoir un festival de jazz à la dimension de la ville. Mes premiers spectacles ont été accueillis dans le cadre très porteur du palais Longchamp, et j'ai même joué devant 6000 personnes pour l'ouverture en 2012, et pour l'ouverture de MP 2013 au Silo ! Déjà, en soi, ce sont des souvenirs inoubliables, jusqu'à l'été dernier où j'ai joué avec l'Attica Blues Big Band d'Archie Shepp. Mais, en dehors de mes prestations, le plus beau souvenir reste pour moi la première venue du quartet désormais légendaire de Wayne Shorter, il y a sans doute près de dix ans ! La musique n'était pas facile, ce fut une véritable surprise pour
© Valentine Kieffer
DOSSIER
LES CHOIX
DE RAPHAËL IMBERT : le public, et pour moi une claque artistique incroyable ! Face aux interrogations de certains, j'avais dit : « vous verrez, ce concert sera un des moments forts du jazz à Marseille, et on en reparlera très longtemps ». Quelques mois après, Wayne Shorter publiait une partie de ce concert dans le disque fondateur de ce groupe, qui est devenu un symbole du jazz contemporain. Marseille était rentrée dans l'histoire, grâce à ce concert ! Au vu de la programmation, quels concerts aimeriezvous écouter ? Pourquoi ?Au risque de faire un peu nostalgique et obsessionnel, le concert en duo Hancock-Shorter est immanquable. Le disque qu'ils ont publié, il y a plus d'une décennie, est un chef-d’œuvre, et ils surpassent très souvent leur statut de stars inatteignables par une complicité humaine ludique. Je suis heureux aussi qu'il y ait une soirée blues. C'est souvent le parent pauvre des festivals, ou des soirées prétextes pour faire un peu plus « rock ». J'ai vu, il y a longtemps, Lucky Peterson qui m'avait beaucoup impressionné, j'espère que ce sera de nouveau le cas. Et puis, j'ai entendu dire que Christophe Leloil et Marion Rampal seront présents d'une manière ou d'une autre, et ça, c'est génial ! Avez-vous un autre rendez-vous estival de prédilection ?Pour le jazz, sans hésitation, le Charlie Jazz Festival à Vitrolles ! A priori, c'est une autre ambiance, mais c'est aussi un festival de passionnés, dans un lieu magique. C'est un événement résolument tourné vers la recherche et la découverte, mais là aussi, ils font confiance aux artistes locaux en leur donnant une place de choix et l'occasion de créer sans entraves. Et le public suit, là aussi ! Ces deux festivals, très différents sur le papier, sont pour moi les fers de lance de la dynamique jazz provençale durant la période estivale, mais qui restent actifs, surtout à Vitrolles avec la magnifique saison au Moulin à Jazz, durant le reste de l'année. Vous savez ce qu'il vous reste à faire, donc !
Christophe Leloil, New Quartet Line4 Le 17 juillet, 21h. Esplanade du J4, Marseille, 2e. 04 95 09 32 57. Entrée libre. Wayne Shorter & Herbie Hancock Le 22 juillet, 21h. Jardins du palais Longchamp, Place Henri Dunant, Marseille, 4e. 04 95 09 32 57. 35-40 €. Lucky Peterson Le 26 juillet, 21h. Jardins du palais Longchamp, Place Henri Dunant, Marseille, 4e. 04 95 09 32 57. 40 €. ET AUSSI : Charlie Jazz Festival, 17e édition Du 4 au 6 juillet. Domaine de Fontblanche, Vitrolles. 04 42 79 63 60. 17-22 €. www.charliejazzfestival.com
FESTIVAL JAZZ DES CINQ CONTINENTS, 15E ÉDITION.
Du 17 au 26 juillet
WWW.
festival-jazz-cinq-continents.com
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DOSSIER FESTIVALS :
LE CHOIX DES ARTISTES
La Roque d’Anthéron, vu par
Spectatrice de la première heure du festival de la Roque d’Anthéron, la pianiste marseillaise Nathalie Négro est régulièrement programmée par le Festival de Marseille. Cette année, elle y présentera l’opéra slam 80 000 000 de vues (lire p. 91) et un duo avec le percussionniste Ahmad Compaoré. Deux propositions originales, à l’image de son parcours. Après une formation classique, la pianiste marseillaise n’a cessé d’explorer d’autres voies que celles que lui réservait, a priori, le Conservatoire. Depuis 2003, avec sa structure de production PIANOANDCO, elle multiplie les rencontres, les croisements des genres et des disciplines. Propos recueillis par Emmanuelle Gall Portrait : Agnes Mellon
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© Denijs De Winter
NATHALIE NÉGRO
« LA ROQUE D’ANTHÉRON, C’EST LA MUSIQUE ET LA NATURE À L’UNISSON. C’EST L’ÉTÉ, LE SON DES CIGALES, UNE PETITE BRISE QUI SOUFFLE SUR CE CADRE MAGIQUE ET SENSUEL… »
Que représente pour vous le festival de La Roque d’Anthéron ? Quelles sont, selon vous, sa raison d’être et sa singularité ? La Roque, c’est LA référence pianistique ! Pour la jeune pianiste que j’étais lorsque j’ai commencé à y aller, c’était LE rêve ! Dès sa création, en 1980, les plus grands pianistes du monde sont venus y jouer. Pour moi, La Roque, c’est la musique et la nature à l’unisson. C’est l’été, le son des cigales, une petite brise qui souffle sur ce cadre magique et sensuel… Même si ce festival très classique s’est tourné un peu vers le jazz, je trouve quand même dommage qu’il n’y ait pas plus de création contemporaine, ce qui permettrait un programme plus féminin au niveau de la composition… En revanche il a permis à de nombreux jeunes pianistes de faire leurs armes. Depuis quand le connaissez-vous et quel est votre plus beau souvenir ? Les débuts du festival étaient formidables, avec un côté ar-
tisanal : on voyait les pianos arriver sur des tracteurs, un tourbillon de bénévoles heureux… J’en garde de très bons souvenirs, je pense à Catherine Collard, disparue hélas trop tôt, jouant Schumann dans les années quatre-vingtdix, Zoltan Kocsis, Murray Perahia, Maria Jao Pires, je me souviens aussi de Brigitte Engerer, Martha Argerich, Grigory Sokolov… L’année dernière, alors que je travaillais mon piano chez une amie dans un petit village des Alpes, un homme est venu me voir, les yeux pleins de larmes. Il était le fils du gardien du château de Florans et avait passé son enfance à entendre répéter les musiciens. Ma musique l’avait replongé dans cette ambiance merveilleuse. Au vu de la programmation, quels concerts aimeriezvous écouter cette année ? Pourquoi ? En regardant le programme de cette année, je ne peux m’empêcher de constater qu’il y a encore très peu de femmes parmi les compositeurs joués et les interprètes invités, sans parler des chefs d’orchestre ! Je suis très attentive 8e art magazine • été 2014
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DOSSIER
LES CHOIX
DE NATHALIE NÉGRO : à cette question, car je considère qu’à notre époque, il n’est plus possible d’ignorer les femmes. Quand on pense que seuls 15 % des solistes instrumentaux programmés dans les festivals sont des femmes, c’est vraiment injuste… Il y a encore beaucoup de travail aussi dans ce domaine. Cela dit, j’irai certainement écouter Yaron Herman Project le 21 juillet, puis Sokolov au Grand Théâtre de Provence et Bruce Brubaker jouant Philip Glass à Silvacane. Trois répertoires complètement différents qui correspondent à mon éclectisme musical. Avez-vous un autre rendez-vous estival de prédilection ? La France est véritablement une terre de festivals et aujourd’hui, ma sympathie va de plus en plus vers les petits festivals qui vont à la rencontre du public et défrichent de nouveaux territoires. Comme beaucoup d’autres musiciens, j’aime beaucoup jouer dans des endroits insolites, toucher des publics différents. Dans le passé, j’ai organisé pendant plusieurs années un festival dans les Hautes-Alpes baptisé Les Festivales, fondé sur ces principes. Je pense spontanément à deux festivals. D’abord Architectures contemporaines, dont j’ai été la marraine cette année. C’est un festival universitaire de jeunes créations artistiques, dirigé par Christine Esclapez, à la croisée de la musique, de la danse, de la vidéo…, un festival de jeunes qui met l’accent sur les rencontres et la transmission. Je pense aussi au festival de Chaillol, dans le Champsaur, qui se développe d’une belle façon, grâce à l’engagement de son directeur artistique, Michaël Dian. Résidences d’artistes, créations, répertoires classique, traditionnels…, il y a là un vrai travail sur le territoire, dans des petites communes, les musiciens vont jouer chez les gens. Enfin, je ne manquerai surtout pas le festival Jazz des Cinq Continents.
Yaron Herman Project Le 21 juillet, 21h30. Parc du château de Florans, La Roque d’Anthéron 04 42 50 51 15. 31-53 €. Grigory Sokolov Le 31 juillet, 21h. GTP, 380, avenue Max Juvénal, Aix-en-Provence 04 42 50 51 15. 31-53 €. Bruce Brubaker Le 4 août, 18h30. Cloître de l'Abbaye de Silvacane, La Roque d'Anthéron 04 42 50 51 15. 30 €. ET AUSSI : Festival de Chaillol, 18e édition Du 17 juillet au 12 août, Saint-Michel de Chaillol et environs. 04 92 50 13 90. 8-16 €. www.festivaldechaillol.com
FESTIVAL INTERNATIONAL DE PIANO DE LA ROQUE D'ANTHÉRON, 34E ÉDITION.
Du 18 juillet au 17 août
WWW.
festival-piano.com
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PORTFOLIO
KLIMT ET VIENNE, UN SIÈCLE D’OR ET DE COULEURS Texte : Emmanuelle Gall
Photos : Culturespaces / Gianfranco Iannuzzi. Carrières de Lumières 2014
D
euxième site le plus visité en 2013 (derrière le MuCEM), les Carrières de Lumières ont su conquérir un large public. Et pour cause, dès l’éclairage des parois de calcaire de l’ancienne carrière, puis l’apparition des premières images (diffusées sur une surface de 7000 m2 par une centaine de vidéoprojecteurs), la magie opère – et dure quarante-cinq minutes. Le temps de déambuler à loisir dans les galeries, littéralement immergé dans le son et la couleur. Après Van Gogh et Gauguin en 2012 puis les impressionnistes l’année dernière, le nouveau spectacle des Carrières, réalisé par Gianfranco Iannuzzi, rend hommage à un autre monument de la modernité : Gustav Klimt. Le voyage, en sept étapes, débute au Kunsthistoriches Museum de Vienne où, jeune homme, il réalisa des fresques néoclassiques en compagnie de son maître Hans Makart. Puis, on suit l’artiste au fil de sa carrière : fondateur de la Sécession en 1897, peintre de la Frise Beethoven, de la nature ou des femmes. Sa quête d’un art total, embrassant l’architecture et les arts décoratifs, se prête à merveille au dispositif des Carrières de Lumières. On passe avec bonheur des fresques immenses à des détails ou motifs, répétés à l’infini, sur les partitions de Wagner, Beethoven ou Mahler. L’univers réjouissant de Friedensreich Hundertwasser (1928-2000) conclut magistralement le spectacle, après une séquence consacrée à l’univers plus tourmenté d’Egon Schiele, le premier disciple de Klimt.
LES CARRIÈRES DE LUMIÈRES
Jusqu’au 4 janvier 2015. Carrières de Lumières, Route de Maillane, Les Baux-de-Provence. 04 90 54 55 56. 8-10 €.
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carrieres-lumieres.com 78
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L’ÉVÈNEMENT
WILLIAM KENTRIDGE, ARTISTE TOTAL Le talent de William Kentridge est suffisamment vaste et protéiforme pour que ses participations aux deux grands événements estivaux de la région, les festivals d’Aix et de Marseille, se suivent sans se ressembler. Texte : Fred Kahn • Photos : William Kentridge
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illiam Kentridge est tout à la fois auteur de fi lms d’animation, sculpteur, vidéaste, metteur en scène de théâtre et d’opéra. Mais quel que soit le médium utilisé, jamais il ne se disperse. Il vise à l’essentiel et l’engagement est toujours total, aussi esthétique que politique. Ce fi ls d’avocat blanc est né, en 1955, à Johannesburg, dans une Afrique du Sud qui pratiquait l’apartheid. Et il a vite choisi son camp : celui de l’égalité entre les êtres. Dès ses premiers fi lms d'animation, composés de dessins au fusain, il a dénoncé les systèmes politiques arbitraires et broyeurs d’humanité. Le style inimitable de ces œuvres de jeunesse lui a rapidement ouvert toutes les frontières. Et, pendant que sa notoriété grandissait, il élargissait toujours plus ses modes d’expression. Sa
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pratique artistique peut donc être interprétée comme un manifeste pour la liberté. Mais la générosité du propos ne suffit pas, seule la puissance de l’imaginaire rend le message aussi universel. Sans le rendre simpliste. Car, dans son exploration acharnée des méandres de nos identités déchirées, Kentridge refuse tout manichéisme. A ce titre, Ubu and the truth Commission, présenté par le Festival de Marseille, est sans doute l’une des œuvres les plus emblématiques de l’artiste. Elle a été créée en 1997 et sa reprise aujourd’hui répond à la même urgence : « atteindre le langage de vérité », seul moyen pour « totalement changer la nature du système ». Sur scène, des acteurs et des marionnettes explorent les limites de la politique de réconciliation nationale initiée par Nelson Mandela, en Afrique du Sud,
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"LE PERSONNAGE ABJECT INVENTÉ PAR ALFRED JARRY DEVIENT LE SYMBOLE DE L’IMPOSSIBLE OUBLI DES CRIMES COMMIS PAR LES BOURREAUX." à la fin des années 1990. Le personnage abject inventé par Alfred Jarry devient le symbole de l’impossible oubli des crimes commis par les bourreaux. La fiction, grâce à une double distance historique et narrative, nous permet de sentir l’étroite promiscuité entre le compromis politique, indispensable pour éviter la guerre, et la compromission qui, elle, est inacceptable. Dans le prolongement de ce spectacle, nous pourrons découvrir, à l’Alhambra, une série de fi lms d’animation de William Kentridge. Mais, l’artiste sud-africain est également programmé dans le prestigieux festival d’art lyrique d’Aix. Il a, en effet, créé l’univers visuel qui servira d’écrin à l’interprétation du Voyage d’hiver (Winterreise), le célébrissime cycle de lieder de Schubert. Ces mélodies hypnotiques et glaçantes seront interprétées par le pianiste Markus Hinterhäuser et par l’éminent maître du Lied, le baryton Matthias Goerne. Le dialogue entre les images en mouvement et la musique en apesanteur s’annonce subtil, passionné, et, bien sûr, émouvant.
Ubu and the truth Commission Du 28 au 30 juin, 21h. Théâtre Joliette-Minoterie, 2, place Henri Verneuil, Marseille, 2e. 04 91 99 02 50. 10-20 €. Soirée William Kentridge, Le 22 juin, 21h. Alhambra 2, rue du Cinéma, Marseille, 16e. 04 91 99 00 20. 5€. www.festivaldemarseille.com Winterreise Les 4, 6 et 12 juillet, 17h et les 8, 15 et 17, 20h. Conservatoire Darius Milhaud, 380 avenue Mozart. Aix-en-Provence. 08 20 92 29 23. 15-120 €. www.festival-aix.com
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SCÈNES
© Sakae Oguma
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SABURO TESHIGAWARA « L’harmonie est quelque chose qui n’est ni fixe ni stable. C’est une situation d’équilibre, en constante transformation. Elle n’est jamais achevée – elle demande une lutte avec ses propres doutes ». Pour Saburo Teshigawara, chaque mouvement est potentiellement un geste de danse. Tout n’est qu’une question de désir, d’intention et d’intensité. Et de fait, ce chorégraphe japonais arrive à transformer les déplacements les plus anodins en une expérience sensorielle inoubliable. Sa puissance artistique est telle que certains le considèrent comme un mythe vivant. Pourtant, son approche ne relève en rien de la magie. Au contraire, les pièces de ce grand maitre de la danse contemporaine semblent portées par une forme d’évidence qui les rend très accessibles. Sa formation de mime et de danseur classique explique sans doute l’attention extrême qu’il accorde au corps et il n’a de cesse d’explorer les potentialités infinies de ce véhicule de nos
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émotions. Dans sa jeunesse, Saburo Teshigawara s’est aussi frotté aux arts plastiques et il signe la scénographie, la lumière et les costumes de toutes ses pièces. L’expérience esthétique proposée est donc totale. Cet été, il se produit pour la troisième fois dans le cadre du Festival de Marseille. La pièce présentée, Mirror and music, a vocation à nous faire découvrir des univers invisibles à l’œil nu. En jouant avec la lumière et les sons, les corps des danseurs émettent des vibrations qui deviennent quasi palpables. Ils nous donnent ainsi accès à des territoires jusque-là inconnus. F.K. Les 26 et 27 juin, 21 h. Le Silo, 35, quai du Lazaret, Marseille, 2e. 04 91 99 02 50. 10-35 €. www.festivaldemarseille.com
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SCÈNES
© Carole Pelletti
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SOULEYMANE LADJI KONÉ Régulier dans le soutien qu’il apporte aux jeunes danseurs africains, le Ballet Peljocaj accueille en résidence l’artiste Souleymane Ladji Koné depuis le mois d’avril. Le chorégraphe, danseur et interprète burkinabé a d’abord abordé la danse de manière autodidacte à travers la culture hip-hop et le break dance ; il a ensuite suivi la formation d’Irène Tassembédo à l’École de Danse internationale de Ouagadougou, ce qui lui a ouvert les portes de la danse traditionnelle africaine et contemporaine et l’a amené à créer une première pièce remarquée en 2011, Mâa Labyrinthe. À l’issue de sa résidence au Pavillon Noir, l’artiste présentera sa toute dernière création Lego de l’ego, une réflexion sur la nature humaine en forme de solo, et rencontrera le public à l’issue de la représentation. E.J.
CHEMINONS ENSEMBLE Parcours urbains, déambulations en cité, balades culturelles… Le projet Cheminons ensemble, initié par la chorégraphe Geneviève Sorin, se plaît à aller à la rencontre du public, dans des endroits souvent inattendus. Son programme estival est particulièrement éclectique. Le 15 juin, dans le quartier de Jas de Bouffan, à Aix, l’artiste s’associe à Raphaël Imbert, le temps d’un impromptu atelier musical, histoire d’interroger le rapport entre la musique et le mouvement. Par la
Le 17 juin, 19 h. Pavillon Noir, 530, avenue Mozart, Aix-en-Provence. 04 42 93 48 14. Entrée libre. www.preljocaj.org
suite, elle propose un parcours sur la thématique de l’espace public des quartiers nord de Marseille, du côté de Frais Vallon (le 18 juin), avant d’aller faire jouer son Hep Garçon !, une création pour duos de danseurs au milieu de la foule, à la Friche Belle de Mai (les 28 et 29 juin). Le spectacle sera ensuite repris dans un tout autre cadre, à Malpassé (le 7 juillet). C.C.
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Les 15,18, 28 et 29 juin, le 7 juillet. Divers lieux, Aix-en-Provence et Marseille. 04 91 55 01 45. Entrée libre. www.facebook.com/compagnieGenevieveSorin
ENTREMETS-ENTREMOTS
© Cordula Tremi
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Toujours à la recherche de passerelles esthétiques, le théâtre Nono nous convie à un singulier dîner-spectacle, où rien ne distingue les hôtes-acteurs de leurs invitésspectateurs. Dans une mise en scène de Serge Noyelle et autour d’un texte de Marion Coutris, le temps du repas devient le lieu de la dramaturgie, où les conventions de la scène se mélangent à celles de la table. Les convives dégustent un ensemble de neuf
plats réalisés par différents chefs marseillais complices, qui se succèdent aux fourneaux chaque soir. Une savoureuse expérience de théâtre gastronomique ! E.J. Du 12 au 28 juin, les jeudis, vendredis et samedis, 20h45. Théâtre Nono, 35, Traverse de Carthage, Marseille, 8e. 04 91 75 64 59. 70 €. www.theatre-nono.com
© Agnès Mellon © Didier D Daarwin
FANTÔME, UN LÉGER ROULEMENT ET SUR LA PEAU TENDUE QU'EST NOTRE TYMPAN Nous sommes dans l’épaisseur de la musique, en son cœur. Une symphonie de matières organiques, de voix, de souffles, de soupirs, de murmures, de silence, de tempête... Elle pénètre nos oreilles, mais nous ressentons aussi toutes ces vibrations avec nos yeux. Car le voyage inventé par Benjamin Dupé s’avère être autant sonore que visuel. En effet, ce compositeur de musique contemporaine ne donne pas de concert, il propose des formes de représentations beaucoup plus riches et complexes. De véritables spectacles. Sa dernière œuvre (créée en 2012 dans le cadre du festival Les Musiques du Gmem) donne chair à une histoire de fantômes. Tout au long du parcours, des indices nous aident à comprendre que nous empruntons avec nos sens le chemin suivi par Orphée. Sa quête pour arracher Eurydice de l’enfer était vouée à l’échec. Peut-être parce qu’il n’a pas eu assez confiance dans le pouvoir de la musique ? F.K. Du 25 juin au 5 juillet, 18h, 20h, 14h30. Salle du Bois de L’Aune, 1 bis, place Victor Schœlcher, Aix-en-Provence. 04 42 93 85 40. Entrée libre sur réservation. www.agglo-paysdaix.fr
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SCÈNES © Cie Soeurs Goudron
© Clementine Crochet
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DAMES DE FRANCE
80 000 000 DE VUES Lorsqu’elle a découvert la célèbre vidéo postée sur Internet par la jeune Asmaa Mahfouz, appelant les Égyptiens à se rendre place Tahrir, Nathalie Négro a été frappée, au-delà de la portée politique de son message, par la musicalité de sa voix. Elle avait enfin trouvé le sujet de l’opéra slam dont elle rêvait : un spectacle à la croisée de ces deux univers pourtant si différents, et dont la femme – si mal traitée dans la tradition musicale – serait l’héroïne. Se souvenant de L’Assemblée des femmes d’Aristophane, elle a commandé le livret à Eli Commins et la
Chaque mois de juillet à Port-SantLouis, les Mercredis du Port combinent l’esprit sardinade à une programmation arts de la rue pensée par le Citron Jaune, Centre national des arts de la rue. Cette année, le coup d’envoi sera donné le 9 juillet avec Dames de France. Fortes d’un bagout rôdé à l’école de la rue, les irrévérencieuses Soeurs Goudron moquent dans ce nouveau spectacle les diktats de beauté imposés aux femmes et les dérives de la télé-réalité. Pris à partie, le public est appelé à élire la miss de son choix, dans l’improbable panel qui s’offre à lui... J.B.
partition au compositeur Alexandros Markéas. 80 000 000 de vues est un spectacle total, qui met en scène, autour de la soprano Gaëlle Méchaly, un trio de musiciens (dont Nathalie Négro au piano), un chœur de slameuses marseillaises emmené par Camille Case, auteur de sa propre partition, et un chœur « virtuel » d’internautes interprété par des chanteurs de l’Opéra junior de Montpellier, dans un décor créé par le collectif des Chevreaux suprématistes, remarquable installation vidéo. E.G.
Le 9 juillet, 19h. Port de plaisance, Port-Saint-Louis-du-Rhône. 04 42 48 40 04. Entrée libre sur réservation. www.lecitronjaune.com
Les 5 et 6 juillet, 21h. Théâtre Joliette-Minoterie,2, place Henri Verneuil, Marseille, 2e. 04 91 99 02 50. 10-20 €. www.festivaldemarseille.com
SI TU ME CROISES
© Cie pOst ScriPtum
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Une chorégraphie à trois personnages, pour deux espaces. Au sol, un cercle, le territoire de l’homme, et dans les airs, celui des deux femmes encordées qui virevoltent, se croisent, sont tirées, poussées, bloquées un instant par l’homme. Entre élans personnels et tentation d’harmonie collective, entre besoin de s’ancrer, et désirs d’élévation, entre être avec et être tout court, les danseurs de Si tu me croises cherchent, se cherchent, expérimentent sans cesse de nouvelles com-
binaisons relationnelles. Car quoi que dise la science, en matière de sentiments, 3 n’est pas égale à 1+1+1 ni à 2+ 1, ni à (1+1)+1. Démonstration aérienne par la compagnie pOst ScriPtum. O.L. Le 18 juillet, 18 h. Festival Les Estivales, Cour du gymnase, Le Puy-Sainte-Réparade. 06 03 44 63 02. Entrée libre. www.compagnie-postscriptum.fr
DR © Didier D Daarwin
DON JUAN DE MOLIÈRE Depuis 2010, la Compagnie de la Flibuste profite des beaux jours pour faire respirer théâtre et spectateurs en extérieur. Ainsi sa tournée Jardins&Châteaux, invite à redécouvrir dans les bois et jardins des châteaux, Le songe d’une nuit d’été de William Shakespeare et Alice aux pays des merveilles de Lewis Carroll. Cette fois, il s’agit de la plus révolutionnaire, la plus ambiguë et certainement la plus moderne des œuvres de Molière. La mise en scène de Clément de Dadelsen, mêlant danse et chant s’avère soucieuse de traduire l’esprit baroque, où le burlesque fraie avec le macabre, la folle vitalité avec la morbidité. Les costumes du Studio Théâtre d’Asnières à la fois funèbres et enchanteurs s’inscrivent dans ce parti-pris. Quant au décor… Ce n’est pas la première fois que les carrières prêtent leur majesté à une œuvre d’art, puisque Cocteau, émerveillé par la beauté des lieux, est venu y tourner son Testament d’Orphée en 1959. Aussi, il n’y a qu’à imaginer la scène finale de Don Juan, avec la statue du commandeur surgissant d’entre les solennels piliers de calcaire, emportant, outre-tombe, le licencieux héros, pour ressentir d’avance quelques frissons. O.L Le 18 juillet, 21 h. Carrières de Lumières, Route de Maillane, Les Baux de Provence. 06.60.74.12.60. 15-25 €. www.compagnielaflibuste.com
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MUSIQUES
FESTIVAL MIMI DR
Le festival est ce qu’il est convenu d’appeler un « défricheur ». En effet, l’association AMI, organisatrice de cet événement atypique, déniche chaque année des pépites musicales que les grands canaux commerciaux et industriels ignorent. L’édition 2014 ne déroge pas à cette volonté de n’obéir à aucune règle. Elle débute à l’U.percut, un lieu marseillais qui porte bien son nom. On nous promet une « Nuit des langues pendantes » avec deux groupes du cru (Post Coïtum et Sugarcraft) aux sonorités très crues. La seconde soirée, à la friche La Belle de Mai, croisera le jazz surnaturel mâtiné d’influences diwân (musique traditionnelle algérienne) de Camel Zekris et le folk-blues aérien de Josephine Foster. Puis, trois nuits durant, Mimi accostera sur l’île du Frioul. Le voyage en bateau, à la nuit tombée, suivi d’une petite balade vers l’Hôpital Caroline, où se déroulent les concerts, s’apparente déjà à un festin pour les sens. Et, bien sûr, la programmation ne
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fera que renforcer le dépaysement. Le 4 juillet, nous serons confrontés à des sonorités insoumises (Zeid Hamdan et Mariam Saleh, Dakha Brakha) venues du Liban, d’Égypte et d’Ukraine. Le lendemain, après le groove électronique déjanté de Nicolas Cante, place à une légende new-yorkaise : le groupe Suicide de Martin Rev et Alan Vega. Un synthé, une boite à rythmes et une voix hypnotique. Rarement l’enfer aura paru aussi paradisiaque. Quant à la dernière nuit, elle devrait tenir, ou du rêve éveillé, ou du cauchemar assumé, notamment grâce à l’attelage improbable réunissant Richard Pinhas (pionnier de la musique électronique en France) et Étienne Jaumet (tour à tour jazzman déviant et disciple technoïde de Sun Ra). Inouï, non ? F.K. Du 2 au 6 juillet, 21 h. Friche La Belle de Mai, îles du Frioul et U.percut, Marseille. 04 95 04 95 50. 5-25 €. www.amicentre.biz
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LA FEMME Passé à Marseille lors de l’année capitale, pendant l’évènement « This is not music » dédié aux musiques actuelles, le combo hype La Femme, véritable ovni de la chanson française par son style à la fois pop, rock et spleen, aux multiples influences, s’apprête à enflammer l’après-midi du 20 juin sur l’Esplanade du J4 dans le cadre du festival Believe in Marseille. La formation, récompensée par la victoire de la musique « Révélation de l’année », et dont les membres sont originaires de Paris, Marseille, Biarritz et la Bretagne, laissera ensuite la scène au groupe de Rock progressif MGMT, dont les tubes Kids, Time to pretend et Electric feel, devraient justement électriser le public phocéen. Le lendemain, pour la fête de la musique, ce sera au tour d’une figure de la techno, l’Étasunien Jeff Mills, d’officier en tête d’affiche. Ben Ufo, Moodymann et Mathew Jonson, autres spécialistes de l’électro, iront aussi de leur set, dans ce cadre idyllique, entre ciel et mer, au pied du MuCEM. C.C. Les 20 et 21 juin, 16h. Esplanade du J4, Quai du Port, Marseille, 2e. 35 - 41 €. www.believeinmarseille.com
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MUSIQUES
© Przemek Wozny
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LA TRAVIATA
Surnommé le « maitre enchanteur de l’oud », Anouar Brahem n’a eu de cesse, en presque cinquante ans de pratique, de sortir ce luth oriental millénaire de ses ornières. Ainsi, dans une démarche proche du Libanais Rabih Abou-Khalil, il mêle les musiques ancestrales et contemporaines, la tradition et l’improvisation, la world music et le jazz, l’orient et l’occident. Depuis plus d’un an et à l’occasion de la dix-septième édition du Charlie jazz Festival, il se produit avec son quartet réunissant un clarinettiste basse allemand de formation classique féru de Jazz et de musique
de l’Est (Klaus Gesing), un bassiste suédois nourri à la musique cubaine et adepte de flamenco (Bjorn Meyer) et un percussionniste libanais à la prolifique carrière internationale (Khaled Yassine). Le résultat donne un jazz épuré aux couleurs orientales, délivrant de sinueuses et envoutantes mélodies. Une musicalité au plus près de la sonorité des instruments, débarrassée de tout maniérisme, fidèle à la philosophie de son mythique label ECM (Keith Jarett, Chick Corea, Arvo Pärt…) et à sa devise : « le plus beau son après le silence ».
Du 17 au 21 juin, 20h, le 22 juin, 14h30. Opéra de Marseille, 20, rue Beauvau, Marseille, 1er. 04 91 55 11 10. 13-78€. www.opera.marseille.fr
© Christian Dresse
ANOUAR BRAHEM QUARTET
Renée Auphan, que les mélomanes marseillais connaissent bien puisqu’elle fut, de 2002 à 2008, directrice de l’opéra, s’attaque à La Traviata de Verdi. Elle ne prétend pas proposer une lecture révolutionnaire de cette célébrissime œuvre, au contraire, elle entend rester le plus fidèle possible à « l’atmosphère, l’esprit et l’élégance qui en font le prix ». Mais quel que soit le parti pris de mise en scène, le succès dépend fortement de la soprano qui a la lourde tâche d’interpréter le personnage de Violetta. Suzana Markova (les 17, 19 et 21 juin) et Mihaela Marcu (les 18, 20 et 22 juin) prendront, tour à tour, le rôle. La première a déjà illuminé, cet hiver, la scène de l’Opéra de Marseille dans Lucia di Lammermoor. Franchira-t-elle avec la même aisance ce nouvel obstacle ? F.K.
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Le 5 juillet, 21h45. Domaine de Fontblanche, Allée des artiste, Vitrolles. 04 42 79 63 60. 17-25 €. www.charliejazzfestival.com
MOBB DEEP
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Albert « Prodigy » Johnson et Kejuan « Havoc » Muchita, binôme plus connu sous le nom de code Mobb Deep, ressort du Queens après de huit ans de silence, le temps d’une tournée mondiale qui se devait de passer par Marseille. Considérés comme des piliers du hip-hop, les quadragénaires fêteront leur vingt ans de collaboration avec un concert articulé autour de leur double album sorti en avril, The Infamous Mobb Deep, à la fois consti-
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tué de nouveaux titres et d’inédits enregistrés en 1994, date à laquelle sortait leur « Shook ones part II », morceau considéré par de nombreux observateurs comme un chef-d’œuvre du rap. C.C. Le 23 juin, 19h. Espace Julien, 39, Cours Julien, Marseille, 6e. 04 91 24 34 10. 29,90 €. www.espace-julien.com
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VITROLLES SUN FESTIVAL Sous le soleil de Vitrolles, grâce à une flopée de musiciens venus de tous les horizons, la mi-juillet s’annonce « caliente », avec l’espoir de retrouver ambiance de la regrettée Fête du Panier. L’édition 2014 est animée par le désir de « faire briller toutes les cultures du monde », en plus de mélanger les générations et de faire découvrir quelques lieux incontournables de la ville. Parrain de ce cru, Papet J, une des figures du Massilia Sound System et reggae man à l’accent prononcé, ira donc de son apéro du soleil, le 19, en compagnie d’artistes tels que Ntjam Rosie (Pays-Bas), Ken Boothe (Jamaïque), Abstraxion (Royaume-Uni) et ses confrères marseillais DJ Ève Dahan et Superfunk. Une variété de styles et de couleurs qui bercera la semaine, avec un programme dense et danse qui n’oubliera pas les enfants (le mercredi 16), ou d’accueillir (le 18) la chanteuse Ayo, sorte de Ben Harper au féminin, ou encore de proposer deux journées gratuites (les 17 et 19, pour la clôture), histoire de renforcer la convivialité et le côté fiesta populaire. C.C. Du 16 au 20 juillet. Domaine de Fontblanche, Allée des Artistes, Vitrolles. Entrée libre-10 €. Vitrolles-sunfestival.com
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MUSIQUES
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© Robert Ascroft
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FESTIVAL DE MARTIGUES
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Jeff Beck est une véritable légende du rock et, pourtant, on ne l’écoutera jamais sur Radio Nostalgie. Sans doute parce que sa musique est trop indomptable pour finir en tube. Il est moins connu qu’Eric Clapton ou Jimmy Page, mais sa dextérité et son feeling sont tout aussi hallucinants. Espérons qu’il n’a pas été trop abimé par les outrages du temps. À vérifier sur la scène du festival Jazz des Cinq Continents qui se plaît ainsi, chaque année, à programmer de grands anciens. Pour cette édition 2014, nous aurons aussi droit à la présence du pianiste « aux deux mains droites » Ahmad Jamal (né en 1930 !), mais surtout à une rencontre au sommet entre Herbie
Hancock et Wayne Shorter. Là, on entre carrément dans une autre dimension. Herbie Hancock est peut-être celui qui a le mieux réussi la jonction entre le jazz et le funk. Quant à Wayne Shorter, il était déjà là, l’année dernière pour fêter ses quatre-vingts ans. Et avec son sens du groove et du cool inimitable, il avait ajouté plein d’étoiles dans le ciel du Palais Longchamp. Face à de tels ancêtres, Jacky Terrason et Stephane Belmondo, qui taquinent les cinquante ans, font figure de gamins. Mais au fond, tous ces artistes ne cessent de se renouveler et de se ressourcer dans une jubilation proche de celle de l’enfance. F.K.
Du 17 au 26 juillet. Jardins du palais Longchamp, Boulevard Philippon, Marseille, 4e. 04 95 09 32 57. De 29 à 40 €. www.festival-jazz-cinq-continents.com
Après avoir fêté son quart de siècle l’année dernière, le Festival de Martigues a choisi de bousculer ses habitudes. Il installera pour la première fois son village au jardin de Ferrières et proposera diverses animations, dont un bal, dans le quartier de Jonquières, durant ces huit jours de festivités. Des changements qui n’excluent pas le traditionnel programme de concerts sur la scène flottante du canal Saint Sebastien, dans l’église de La Madeleine, sur les places et dans les rues alentour. À l’affiche, des artistes venus des cinq continents (Chine, Côte d'Ivoire, Chili, USA, Georgie, Micronésie…), mais aussi de Provence (Moussu T e Lei Jovents, Lo cor de la Plana) et de Corse (I Muvrini). Cette édition a également prévu de rendre hommage au poète Frédéric Mistral, à l’occasion du centenaire de sa mort. O.L. Du 20 au 28 juillet. Divers lieux, Martigues. 04 42 49 48 48. 0-35 €. www.festival-martigues.fr
LES ESCALES DU CARGO © Jean-Louis Fernadez
Pour sa dixième édition, le festival piloté par le Cargo de Nuit investit le théâtre antique d’Arles pendant quatre jours. Fort de l’album Sadnecessary, le duo Milky chance sera chargé d’animer la première soirée avec un mélange de reggae folk et d’électro, alors que le lendemain, ce sera au tour d’Asaf Avidan de chanter dans un style épuré afin de mettre sa voix en valeur. Le 24, Bertrand Cantat, débarrassé de ses noirs désirs et désormais accompagné du bassiste Pascal
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Humbert, proposera son projet « Détroit », inscrit dans une lignée sombre et rock. Et à en croire les précédents concerts, les anciens succès du chanteur de « Tostaky » à « Le Vent l’emportera » devraient être également de la partie. C.C. Du 22 au 25 juillet, 21h. Théâtre antique,Rue du Cloitre, Arles. 04 90 49 55 59. 25-43 €. www.escales-cargo.com
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ENFANTS
© Marc Ferraud
© F. Bassemayoussse
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HORTUS
SOUS LA MER, UN MONDE Présenté sous la forme d’un jeu de l’oie en 63 cases, le parcours d’exposition imaginé par le critique et réalisateur Alain Bergala dresse un portrait de la Méditerranée dans tous ses états. Introduite comme une devinette, chaque étape aborde une question scientifique, écologique, historique ou artistique relative à la Méditerranée. Et l’on voyage ainsi des fonds marins en 3 D à la mer filmée par les cinéastes, en passant par la grotte Cosquer, une balade en compagnie des thons ou des baleines… Une manière pour Alain Bergala de mon-
trer « l’extraordinaire complexité et la richesse de ce monde, des interactions qui en régissent l’évolution, les dangers qui la guettent et les solutions à mettre en œuvre pour en sauvegarder les espèces et les ressources ». À voir l’enthousiasme des enfants pilotant un sous-marin virtuel ou participant aux ateliers (sur réservation), le pari est réussi. Plus de la moitié des « cases » ont été adaptées au jeune public et une douzaine d’entre elles s’adressent, via Arthur le mérou, aux moins de sept ans. E.G.
Jusqu’au 31 août. Villa Méditerranée,Esplanade du J4, Marseille, 2e. 04 95 09 42 52. Entrée libre.www.villa-mediterranee.org
César, le chaland Arles Rhône 3… Le « musée bleu » a plus d’un titre de gloire. Moins célèbre, mais plus ludique, son parc, baptisé Hortus, initie depuis 2007 les enfants à l’art des jardins autant qu’à la culture et aux jeux antiques. Situé à proximité du site où l’on a mis au jour les ruines d’un hippodrome, cet espace de 6700 m2 s’inspire du jardin de Pline le Jeune. Autour d’une piste-pelouse centrale, sont répartis une vingtaine de petits jardins thématiques. La bonne idée, c’est d’avoir alterné les espaces ludiques et les pauses culturelles. Muni d’une valise de jetons et de fiches prêtées par le musée, on peut ainsi (ré)apprendre à jouer aux osselets, à la marelle (version morpion) ou aux latroncules, l’ancêtre des dames et des échecs… E.G. Tous les jours, sauf mardi. Musée départemental Arles antique, Presqu'île du cirque romain, Arles. 04 13 31 51 03. Entrée libre. www.arles-antique.cg13.fr
L’ODYSSÉE DES ENFANTS © Corinne Ceroni
La compagnie Débrid’Arts est engagée depuis dix ans dans un long périple, une Odyssée des enfants, qui réunit des gamins de milieux et de pays différents. La nouvelle étape de cette aventure au long cours mélange aussi les générations et met en présence des enfants et des seniors d'Aix-en-Provence avec des femmes et des enfants de Marrakech. Accompagnés par Judith Arsenault et son équipe d’artistes professionnels,
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ces « amateurs » ont créé un cabaret à la fois théâtral et musical sur le thème de la famille. L’auteur, Jean Cagnard, a participé à la mise en mots poétiques d’un spectacle qui fabrique lien... Et fait du bien. F.K. Le 13 juin, 19h30, le 14, 14h30. Salle du Bois de L’Aune, 1 bis, place Victor Schœlcher, Aix-en-Provence. 04 42 93 85 40. Entrée libre sur réservation. www.agglo-paysdaix.fr
© Cie Kartoffeln
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INITIATION AU CIRQUE
Autonomie, motricité, coordination, entraide : les vertus de la pratique du cirque sont nombreuses pour les enfants. Durant les vacances estivales, le Centre International des Arts en Mouvement leur propose deux semaines de stage de pratique amateur. Sous chapiteau, les pédagogues issus du Centre National de Châlons-en-Champagne, de l’Académie Fratellini ou encore des écoles de Bruxelles ou Pékin, dispenseront une initiation (1h quotidienne pour les 4/6 ans, 2h30 pour les 7/14 ans) au trapèze, jonglage, acrobatie, fil, trampoline et tissu, assortie d’une sensibilisation à la diversité du cirque contemporain. Le dossier d’inscription est disponible sur le site internet du CIAM. J.B.
CARESSEZ LE POTAGER
les trois créations théâtrales confiées aux compagnies Kartoffeln, Hélas !… et Après la pluie seront éclairées grâce un programme de production d’énergie renouvelable (éoliennes, panneaux solaires et vélos-dynamos) installé sur place. « Caressez le potager », c’est aussi des conférences, des concerts, des contes, une programmation cinéma de la Pépinière d’images, des petits plats bio et des surprises quotidiennes, « le cul dans l’herbe et la tête dans les étoiles ». E.G.
© R. Oggiano
Comme chaque année depuis dix ans, l’arrivée des grandes vacances coïncide avec celle du festival familial « Caressez le potager » au parc de la Mirabelle. Pendant trois jours, la manifestation gratuite et écologique propose une foule d’activités et de spectacles pour tous. Aux traditionnels ateliers artistiques, scientifiques (en partenariat avec le Muséum d’histoire naturelle) ou de jardinage bio, s’ajoute cette année des initiations à la biodanza (ou « danse de la vie ») et à l’énergie douce. De même,
Du 7 au 18 juillet. CIAM, La Molière, 4181, route de Galice, Aix-enProvence. 09 83 60 34 51. 65-160 €. www.artsenmouvement.fr
© Archivio Associazione Figli d’Arte Cuticchio
Du 9 au 11 juillet. Parc de la Mirabelle, Avenue Boulaya d’Arnaud, Marseille, 12e. 04 91 42 20 50. Entrée libre. www.caressezlepotager.net
LA PARADE DE MARIONNETTES L’univers des marionnettes investit durant trois jours les différents espaces du MuCEM. Qu’elles soient à fils, à gaines, à tringles, à marottes, ou d’ombres, elles attendent les enfants de 5 à 10 ans et leurs parents, pour des spectacles, des animations et des ateliers présentés par d’extravagants « diseurs de programme ». Sont prévus : une visite guidée de la collection dans les petites salles du fort SaintJean, un Manipuloparc dans la cour de la Commande, un atelier collectif de conception, des
spectacles improvisés dans le Casletet et des représentations de compagnies prestigieuses, telles Figli d’Arte Cuticchio, héritière d’une tradition sicilienne du XIXe siècle. Il paraît même que Guignol, Arlequin, Polichinelle et quelques autres célébrités seront présents. O.L. Du 12 au 14 juillet. MuCEM, 1, esplanade du J4, Marseille, 2e. 04 84 35 13 13. Entrée libre. www.mucem.org
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LES
ADRESSES MARSEILLAISES
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RESTAURANT
L’INSOLITE
Un lieu, une exception à découvrir absolument ! Niché au fond d’une allée à 50 m de la préfecture, une terrasse sur les toits les pieds dans la pelouse vous attend pour déguster nos pizzas au feu de bois, une cuisine gourmande et colorée. • Le mercredi, soirée voyance ou karaoké. • Le jeudi, soirée illusionniste ou soirée humour. • Le vendredi soirée concerts en live. • Possibilité de privatiser le lieu.
5 rue d’Italie 13006 Marseille Infos & Réservation 04 91 43 91 51 Facebook : resto.linsolite 8e art magazine • été 2014
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RESTAURANT
VILLA ROCCA
A la Villa Rocca vous dégusterez de délicieux plats de produits frais aux teintes italiennes : supions, pizzas ou encore aubergines à la parmesane, et les desserts "maison" concoctés par les chefs Franck Lagziel et Pierro. Le tout, dans une ambiance chaleureuse et un décor raffiné. Sans oublier l'agréable terrasse, parfaite pour les repas estivaux. Infos & Réservation 04 91 22 61 59
20, rue François-Rocca • 13008 Marseille
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BISTROT NEW-YORKAIS
LA TABLE DU 8ÈME
Nouvelle adresse en vogue à Marseille : Thierry Zerdoun et Gilles, avec leur chaleureuse équipe, vous accueillent du lundi au samedi, midi et soir, dans un lieu moderne façon bistrot autour d’une carte composée exclusivement de produits frais. On y dégustera viandes et pizzas au feu de bois, que ce soit sous le patio ou dans une ambiance new-yorkaise en salle. Infos & Réservation 04 91 82 68 38 • www.latabledu8eme.com
16, Av. de Mazargues • 13008 Marseille • latableduhuitieme@orange.fr • zerdoun.thierry@wanadoo.fr
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RESTAURANT
IL TOPOLINO
Il Topolino est un de ces restaurants marseillais qu’on aime garder comme un secret. Parce qu’il ose rester authentique, fidèle à des valeurs gastronomiques ancrés dans la latinité marseillaise, tout en surfant sur tout ce qui fait un air du temps. Il est animé par son patron David qui aime l’échange, qui aime recevoir, et qui a su faire de son restaurant un rendez-vous amical, où l’on croise autant que dans le coeur de Marseille celles et ceux qui «font» la ville. Infos & Réservation 04 91 75 93 97
59 Chemin Argile, 13010 Marseille
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© Francis Amiand
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HÔTEL RESTAURANT
MAMA SHELTER
Plus qu’un endroit où dormir, le Mama Shelter est un centre de vie, un lieu où l’on se rassemble autour d’un « Live » de musique ou d’un plat à partager sur les tables d’hôtes. Une cuisine simple, conçue par les chefs Alain Senderens et Jérôme Banctel en hommage à la cuisine moderne de la Méditérranée. Au menu, Burrata fougasse aux olives, Beignets de Calamars, Cabillaud en croute de café poids gourmands goma sésame, grand baba de la Mama..pour le plaisir de tous ! Pour les aficionados de l’apéritif une dégustation s’impose au bar à anis : Une Boukha, un Raki, un Pastis, un Gambetta avec de la Poutargue coupée finement sont, entre autres, le moyen d’échapper un instant à la tourmente de la vie moderne afin de prendre le temps de ne rien faire tout simplement. Et après le repas, le ton est donné très vite avec un baby-foot de 4 mètres de long pour jouer à 8 ou 16, près de la scène « Live » et ses instruments de musique suspendus dans le vide. Mama loves you! Réservation restaurant 04 84 35 21 00 ou sur mamashelter.com
64 Rue de la Loubière 13006 Marseille
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RESTAURANT • BAR • RÉCEPTION
LE COMPTOIR MARSEILLAIS
Installé sur la Corniche avec vue sur la mer de la terrasse ou de la salle. Enrichit du savoir-faire du chef de renom, Bruno Cordesse, le restaurant vous propose une cuisine bourgeoise, des vins à choisir dans une magnifique cave en verre. Le week-end, coquillages et brunchs viennent compléter notre carte. Un nouvel espace pour vos apéritifs ou digestifs, sur une terrasse bâchée, chauffée avec des tables hautes et des amuses bouches maison. Pour un long ou court instant, pour les grands et les petits budgets. Le Comptoir Marseillais, Un lieu, une Atmosphère !!! Infos & Réservation 04 91 32 92 54 • www.lecomptoirmarseillais.com
5, Promenade Georges Pompidou • 13008 Marseille
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RESTAURANT -PLAGE PRIVÉE
L’ACAPULCO
Cette plage privée bien connue des estivants des Lecques à Saint Cyr est réputée pour son cadre de rêve et sa cuisine de produits frais ! Depuis 1963, on vient tous «chez Nono» pour commencer l’été, le prolonger, et même plus... Élue plus belle plage de l’année 2010-2011, L’Acapulco vous accueille tous les jours du 15 avril au 15 octobre. Infos & Réservation 06 09 51 64 30
Les Lecques
RESTAURANT
LE BOUCHON PROVENÇAL
C’est dans un lieu totalement rénové où s’entremêlent modernité et tradition que vous pourrez venir découvrir la carte du Bouchon provençal pour des saveurs teintées de notre douce Provence. S’attabler au Bouchon «nouvelle version», c’est adhérer a l’idée qu’il est possible d’associer création, goût et décontraction ! Le Bouchon c’est un prix, c’est du goût, c’est un mode de vie, un concept... La promesse qu’une autre cuisine est possible.
6 place aux huiles - 13001 Marseille Infos & Réservation : 04 91 33 44 92
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