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Notre spécialiste en pensions de réparation vous en dit plus
« Vous êtes involontairement victime d'un accident de service entraînant des lésions corporelles et les misères commencent alors ! » Il s'agit d'une rengaine souvent entendue parmi les militaires. Heureusement, le syndicat militaire ACMP-CGPM dispose de plusieurs spécialistes qui peuvent vous aider dans cette procédure très spécifi que des "pensions de réparation". Un de nos experts les plus aguerris dans ce domaine est Fritz Gallein. Nous lui donnons la parole pour l'occasion.
Qu’est-ce qu’une pension de réparation ?
Tout militaire qui a subi un dommage corporel ou mental indépendant de sa volonté, pendant et par le service, peut avoir droit à une indemnisation. La Défense ne connaît pas les notions "accidents du travail" ou "maladies professionnelles". Le personnel militaire peut, afi n d'obtenir une éventuelle indemnisation, entamer une procédure auprès de la Commission des Pensions de Réparation.
Cela s'applique-t-il également, par exemple, lorsqu'un militaire serait exposé au coronavirus dans le cadre de ses activités professionnelles ?
Les militaires qui, par exemple, sont employés à l’Hôpital militaire et courent un risque nettement accru d'être infectés par le virus, peuvent en effet bénéfi cier d'une pension de réparation. En fait, la DG H&WB a récemment publié une note à ce sujet.
Obtient-on automatiquement ce type d'indemnisation lorsqu’on est victime ?
Non, sauf si vous avez un chef qui fera tout pour vous aider. Et quand bien même, dans la plupart des cas, c'est la victime militaire elle-même qui doit prendre l'initiative. Il n'y a pas de délais pour l'introduction d'une demande d'indemnisation, mais il est préférable d'entamer la procédure le plus tôt possible afi n d'éviter d'éventuelles pertes fi nancières. Si la demande est envoyée plus de trois mois après les faits, tout éventuel paiement d'indemnisation ne remontera qu'au premier jour du mois de l’introduction valable de la demande. La demande doit reprendre exactement la même dénomination que la lésion qui fi gure sur le Mod 150 ou sur les autres documents médicaux.
Lorsque vous devez prendre vous-même l'initiative, cela signifi e-t-il aussi que vous devez prouver que votre lésion est le résultat d'un accident de service ?
Exactement ! Souvent, cela ne facilite pas la procédure. La charge de la preuve incombe en effet au demandeur. À part le rapport médical (Mod 150) qui est en fait indispensable, tout peut être utilisé comme preuve. Les déclarations de témoins, les certifi cats médicaux, le programme de l'unité, un ordre écrit de la mission, un PV... Attention, pour être valables, tous les documents doivent être signés avec le texte exact : "J’affi rme sur l'honneur que cette déclaration est sincère et complète."
Vous frappez à la porte du syndicat et introduisez votre demande. Que se passe-t-il alors ?
Après vérification de la demande par le Service Fédéral des Pensions (SFDP), le dossier est
transmis à l’Offi ce Médico-Légal (OML). Le requérant sera invité par ce service à passer une expertise médicale. Le médecin-expert de l’OML examine vos lésions physiques et/ou psychiques. Il vérifi e l’origine des lésions et si elles sont effectivement liées aux faits invoqués. Il fi xe un pourcentage d'invalidité à l'aide du Barème Offi ciel Belge des Invalidités (BOBI). Une échelle temporaire de taux dégressifs (échelle dégressive d’invalidité) peut également être établie, par exemple, le jour de l'accident, invalidité à 100% ; 2 semaines à 20% pour terminer avec une invalidité résiduelle de 2%. L’OML proposera également les pourcentages imputables aux facteurs étrangers (FE) à déduire.
Et si vous n'êtes pas d'accord avec l'expertise ? À qui faut-il alors s’adresser ?
Après l'expertise médicale, votre dossier sera transféré à la Commission des Pensions de Réparation (CPR). Après avoir reçu le rapport de l’OML, cette commission transmet sa proposition au candidat et l'invite à être présent durant une de ses séances. La présence n'est pas obligatoire, mais comme la Commission prendra de toute façon une décision à ce moment-là, il vaut mieux être présent ou se faire représenter. Et même si la Commission des Pensions de Réparation ne peut pas modifi er le pourcentage d'invalidité fi xé par l’OML, elle peut, sous réserve d'une argumentation suffi sante, soit renvoyer le dossier à l’OML pour réexamen, soit ajuster le pourcentage dus aux facteurs étrangers.
Il existe également de nombreux malentendus auprès des militaires sur cette procédure compliquée. Y a-t-il des détails intéressants ou des "trucs et astuces" que vous pouvez partager avec nos lecteurs ?
Absolument. En voici quelques-uns : - Par exemple, les dommages matériels et moraux ne peuvent pas être ‘récupérés’ par la Commission des Pensions Réparation. La pension de réparation porte sur une compensation forfaitaire couvrant tout.
- En outre, il faut au moins une invalidité de 10% pour obtenir une indemnité, à savoir une pension de réparation.
- Presque toutes les invalidités qui étaient ou deviennent ‘indemnisables’ sont automatiquement revues après cinq ans. Si l'invalidité est toujours présente ou, qui sait, s'est même aggravée, la pension de réparation est accordée à vie.
- Dès que l’invalidité totale est ‘indemnisable’ et dépasse 10 %, le pourcentage est arrondi au multiple de 5 immédiatement supérieur.
- S'il existe plusieurs lésions pour lesquelles une invalidité a été accordée, il ne suffi t pas de faire une simple addition pour atteindre un pourcentage total. Par exemple : 3 invalidités à 10%, 6% et 5% ne sont pas égales à 21% (arrondis à 25%) mais : 10% + 5,4% (6% de 100% - 10%) + 4,43% (5% de 100% - 10% - 5,4%) = 19,83% (arrondis à 20%).
- Pour fi xer le pourcentage, l’OML se fonde sur les documents médicaux, l'expertise de(s) lésion(s) du requérant et ce que ce dernier déclare au(x) médecin(s). Parfois, le requérant parle trop, comme s'il était chez le médecin généraliste, donnant ainsi au médecin de l’OML des arguments pour prendre en compte (trop) de facteurs étrangers ou même pour ne pas retenir le lien de causalité ! Il est préférable que le requérant s’en tienne uniquement aux informations sur sa(ses) lésion(s) et l'incident/l’accident à la base de la demande. Pensez à cette sagesse militaire bien connue : tout ce que vous dites peut également être utilisé contre vous.
Pensez-vous que les militaires sont généralement suffi samment informés à ce sujet ?
Tous les militaires qui connaissent l'existence de la procédure de la pension de réparation, devraient informer leurs collègues, en particulier les chefs sur le terrain, tels que les commandants de compagnie et les adjudants d'unité.
La CGPM, pour sa part, publie régulièrement un article à ce sujet dans La Sentinelle et tous les délégués peuvent être contactés à tout moment pour obtenir plus d'explications et éventuellement aider à constituer un dossier.
Merci pour ces sages paroles, Fritz. Et si nos militaires font appel à vous, nous savons qu'ils fi niront entre de bonnes mains.