Edition du jeudi 28 mars 2013

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Droits de l’Homme

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Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05 Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède Comité de rédaction :

Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Agnès Bricard, Présidente de la Fédération des Femmes Administrateurs Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Magistrat honoraire Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Chloé Grenadou, Juriste d’entreprise Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président Honoraire de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président d’Honneur du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International Publicité : Légale et judiciaire : Commerciale :

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

Constat pour l’année 2012

Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 12 812 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

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Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Racisme, antisémitisme et xénophobie en France

e rapport est une obligation fixée par la loi du 13 juillet 1990. Il rassemble des contributions variées fournies par différentes instances (ministères, société civile, universitaires) et est complété par les analyses de la CNCDH.

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Les qua quatr atre objectiffss du rapport rt de la CNCDH : 1. évaluation quantitative, la plus proche possible des réalités et des différentes manifestations du racisme, 2. analyse qualitative des phénomènes, 3. évaluation des mesures de lutte mises en oeuvre chaque année, 4. formulation des recommandations.

Le racisme dans l’opinion publique Sondage exclusif CSA / CNCDH / Service d’information du Gouvernement réalisé en face à face du 6 au 12 décembre 2012, auprès de 1029 personnes âgées de 18 ans et plus résidant en France, constitué d’après la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de ménage), après stratification par région et catégorie d’agglomération. Pour la troisième année consécutive, le sondage indique une montée de l’intolérance en France. Alors que le début des années 2000 avait été marqué par un mouvement continu de la société française vers plus de tolérance, on constate depuis 2010 que les indicateurs de racisme sont en hausse, que l’intolérance augmente. Le phénomène s’ancre dans la durée,

et cette évolution est particulièrement préoccupante. Plusieurs éléments des résultats du sondage doivent être soulignés : Augmenta Aug ntati ation touj ujours plus lus marqué quée de la méffiiance à l’égard des musul ulmans : - 55% des personnes interrogées estiment que les musulmans forment un groupe à part dans la société (+4 points par rapport à 2011 et + 11 points par rapport à 2009) - seulement 22% des personnes interrogées ont une opinion positive de la religion musulmane, c’est beaucoup moins que les opinions positives à l’égard des autres religions (44% d’opinion positive pour le catholicisme et 34% pour le judaïsme), et c’est surtout 7 points de moins qu’en 2011, - 77% des personnes interrogées pensent que le port du voile peut poser problème pour vivre en société (+ 2 points par rapport à 2011 et + 9 points par rapport à 2010), - 47% des personnes interrogées pensent que l’interdiction de montrer l’image du prophète Mahomet peut poser problème pour vivre en société (+8 points par rapport à 2011). Rejet croissant nt des étrangers, perçus de plus en plus comme des parasites, voire comme une menace : - « Il y a trop d’immigrés aujourd’hui en France » : 69% des personnes interrogées se déclarent d’accord avec cette opinion, soit une progression de 10 points par rapport à 2011 et de 22 points par rapport à 2009. - « De nombreux immigrés viennent en France uniquement pour profiter de la protection sociale » : 73% des personnes interrogées se déclarent d’accord avec cette opinion, soit une progression de 3 points par rapport à 2011 et de 9 points par rapport à 2009. -« Les travailleurs immigrés doivent être considérés ici comme chez eux puisqu'ils contribuent à l'économie française », les réponses n’avaient jamais été aussi intolérantes depuis les émeutes de 2005 : 72% des personnes interrogées sont en désaccord avec cette opinion. Constat at d’échec de l’intégrati ation et remise en caus ause de la possibilité ité d’un « viv vivre vre ensemble » vr dans la société français aise : - Une majorité des personnes interrogées (56%) considère que l’intégration fonctionne mal (dont 42% assez mal et 14% très mal), - 94% des personnes interrogées (+5 points par rapport à 2011) pensent d’ailleurs qu’il est indispensable que les étrangers qui viennent vivre en France adoptent les habitudes de vie françaises. - En outre, la responsabilité du mauvais fonctionnement de l’intégration est nettement plus imputée aux étrangers qu’à la société. Les interviewés jugent en effet à 60% que ce sont avant tout les personnes d’origine étrangère qui ne se donnent pas les moyens de s’intégrer. Ces constats sont d’autant plus inquiétants qu’ils s’inscrivent dans un contexte plus général de perception globalement négative de la société française : préoccupations économiques, sociales et sécuritaires fortes, vision très segmentée de la société. Par ailleurs, on assiste à une dangereuse banalisation des propos racistes.

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Droits de l’Homme

Racisme, antisémitisme et xénophobie 2012 : inquiétante montée de l’intolérance egmentée, marquée par des difficultés du « vivre ensemble », traversée par des phénomènes communautaires croissants, en proie à une importante crise identitaire : la société française semble plus perméable aux phénomènes d’intolérance et de racisme. Avec toute la prudence qu’impose le maniement de chiffres dont l’interprétation demande de la nuance, on peut néanmoins s’inquiéter cette année à la fois des résultats des enquêtes quantitative et qualitative conduites par la CNCDH, et des chiffres de la violence raciste, antisémite et antimusulmane présentés par le ministère de l’Intérieur. L’année 2012 témoigne d’un retour alarmant de l’antisémitisme et confirme la montée des actes

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dirigés contre les personnes de confession musulmane. Les enquêtes de la Commission quant à elles montrent, pour la troisième année consécutive, qu’au sein de la société française la tolérance recule, que les sentiments xénophobes se diffusent, que nos concitoyens s’interrogent de plus en plus sur la possibilité d’un « vivreensemble », qu’ils croient menacé par la montée des communautarismes. Face à ces signaux inquiétants, face à des phénomènes complexes, la CNCDH cherche, à travers ce rapport, à faire preuve d’objectivité en mesurant et en analysant l’ensemble des données à sa disposition, avec tout le recul nécessaire. Elle remplit avec ce rapport une double fonction de

Internet contribue grandement à cette banalisation. Mais elle s’alimente également de l’instrumentalisation dans le discours politique de certaines thématiques (immigration, religion, laïcité), ainsi que de certains dérapages et des polémiques qui ont suivi.

Les actes et menaces à caractère raciste et antisémite Les données communiquées par le Ministère de l’Intérieur sur les actes et menaces à caractère raciste, antisémite et antimusulman marquent, une fois agrégées, une forte augmentation pour l’année 2012 : la somme des actes et menaces à caractère raciste, antisémite et antimusulman s’élève à 1.539, ce qui représente une hausse de 23%. Si l’on examine les chiffres de manière plus détaillée, on constate que les actes antisémites et antimusulmans enregistrent les plus fortes hausses : - l’antisémitisme marque une très importante progression de 58%, - les actes antimusulmans progressent de 30%, confirmant la tendance à la hausse enregistrée en 2011 (+ 34%), - le racisme et la xénophobie connaissent une relative stabilité, avec une augmentation de 2%. Racisme : +2% entre 2011 et 2012, relative stabilité ité av avec des nuances - Actes racistes -11% : 118 en 2012 (132 en 2011), - Menaces racistes +5% : 606 en 2012 (5781 en 2011), - Maghrébins = principales victimes du racisme, - Régions les plus touchées par le racisme : Ilede-France, PACA, Rhône-Alpes. Anti ntisémiti itisme : +58% entr ntre 2011 et 2012 - Actes antisémites +37% : 177 en 2012 (129 en 2011), - Menaces antisémites + 59% : 437 en 2012 (260 en 2011),

veille et de proposition, afin de faire progresser la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. La CNCDH attend du Gouvernement qu’il exprime sa détermination sans faille pour éviter que la montée des incertitudes et l’insécurité sociale qui traversent aujourd’hui notre pays ne s’accompagnent d’une augmentation des phénomènes d’intolérance et de racisme.. Elle insiste également sur la prise de conscience nécessaire de chacun sur sa responsabilité à lutter contre le racisme sous toutes ses formes, y compris sur Internet.

Source : Communiqué de presse du 21 mars 2013

- On constate l’existence de pics en mars, dans la foulée de « l’affaire Merah » et en octobre–novembre, au moment des regains de tensions entre Israël et les territoires palestiniens (intervention militaire israélienne en novembre), - Régions les plus touchées par l’antisémitisme : Ile-de-France, PACA, Rhône-Alpes. Racisme anti ntimusul ulmans : +30% entr ntre 2011 et 2012 - Actes antimusulman + 28% : 53 en 2012 (38 en 2011), - Menaces antimusulmanes +20% : 148 en 2012 (117 en 2011), - Là aussi l’affaire Merah a un impact, puisque l’on constate un pic de violence en mars / avril. Une forte augmentation est également constatée en septembre-octobre au moment de la diffusion de la vidéo du film « l’innocence du musulman » et de la parution des caricatures du prophète Mahomet dans l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, - Régions les plus touchées par les actes antimusulmans = Ile-de-France, Nord-Pas-deCalais, Rhône-Alpes. Le contexte politique de l’année - qui a favorisé l’émergence de débats, de prises de parole politiques, de polémiques interrogeant la place de l’étranger, de l’islam, du différent dans la société française actuelle (montée du Front national, polémiques sur la viande hallal ou « les pains au chocolat », etc.) – mais aussi les tragiques évènements de Toulouse en mars, ont sans doute contribué à des passages à l’acte haineux et violents. Ces constats ats inqui quiétants rappellent l’urgence de mettre en oeuvr uvre, concrètement, nt, une vérita itable straté atégie gie politi itique que en mati atière d’éducati ation et de sensibilisati ation du public sur la lutte contre les préjugés et la promotion des val val aleurs d’égal alité ité, de tolérance et d’humanité ité. Il convi nvie vient nt égal alement nt de rappeler aux personnalités politique ques leur devoir d’exemplar arité ité en la mati atière et la nécessité ité d’être

parti rticul ulièrement nt vig vigil gilante ntes qua quant nt aux aux ux discours politique ques sur l’immigration, l’intégration ou portant sur des populations particulières (musulmans, Roms, Français d’origine étrangère…). Des indicateurs insatisfaisants

On observe, depuis une dizaine d’années, une augmentation continue des actes à caractère raciste et antisémite, tempérée toutefois par la faiblesse des chiffres en valeur absolue. Ce constat appelle deux remarques : • L’augmentation continue de la violence raciste peut s’expliquer en partie par l’amélioration de l’outil statistique à disposition du Ministère de l’Intérieur, qui gonfle mécaniquement le nombre d’actes et de menaces recensées. • La faiblesse des chiffres en valeur absolue invite par ailleurs à s’interroger sur la qualité et la pertinence des outils statistiques, d’autant que les chiffres et la réalité vécue du racisme semblent être inversement proportionnels. Il convient donc de s’interroger sur la fiabilité des données à notre disposition (et ce même si de réels progrès ont été accomplis ces dernières années). Face à cette imperfection des outils statistiques, il est nécessaire que les Ministères de l’Intérieur et de la Justice travaillent à l’amélioration du recensement des infractions à caractère raciste, antisémite et xénophobe.

Conclusion et recommandations essentielles de la CNCDH Segmentée, marquée par des difficultés du « vivre ensemble », traversée par des phénomènes communautaires croissants, en proie à une importante crise identitaire : la société française semble plus perméable aux phénomènes d’intolérance et de racisme. Face à des signaux inquiétants, et face à des phénomènes complexes, la CNCDH cherche, à travers ce rapport, à faire preuve d’objectivité en mesurant et en analysant l’ensemble des données à sa disposition, avec la rigueur et le recul nécessaires, tentant de démêler les tendances préoccupantes des craintes infondées.

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REPÈRES

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Droits de l’Homme REPÈRES

Evolution de la violence raciste, antisémite et antimusulmane depuis 1992 Nombre total des actes et menaces recensés par année

Avec toute la prudence qu’impose l’interprétation de chiffres dont la « vérité » n’est pas toujours simple à saisir, on doit néanmoins s’inquiéter cette année à la fois des résultats des enquêtes quantitative et qualitative conduites par la CNCDH, et des chiffres de la violence raciste, antisémite et antimusulmane communiqués par le Ministère de l’Intérieur. L’année 2012 témoigne d’un retour inqui quiétant nt de l’antisémitisme et conffiirme par ailleurs l’augmentation du nombre des actes dirigés contr ntre les personnes de religion musulmane. Les enquê quêtes de la Commission montr ntrent nt que que, pour la troisième année consécutive, la tolérance recul ule au au sein de la société français aise, que les senti que ntiments nts xénophobes se difffffu usent, nt, et que nos concitoyens s’interrogent de plus en que plus sur la possibilité ité d’un « viv vivre vre-ensemble », vr qu’ils croient qu’ nt menacé par la monté ntée, réelle ou supposée des communaut auta utarismes. On continue d’observer en 2012 un racisme de protection contre une menace supposée, que cette menace soit socialement et médiatiquement construite en dehors de toute étude factuelle n’empêche pas qu’on la tienne pour acquise. La figure de « l’étranger » cristallise, dans l’imaginaire d’un certain nombre de nos concitoyens, les craintes qui fondent le sentiment d’insécurité, que celle-ci soit économique, sociale ou culturelle. Ainsi, beaucoup de Français considèrent comme avéré le lien entre immigration et sentiment d’insécurité, et pour bon nombre d’entre eux l’image de l’étranger parasite perdure. Une vigilance de tous, gouvernement d’abord, à qui s’adressent les recommandations du rapport, mais aussi acteurs de la société civile, s’impose pour éviter que la montée des incertitudes et l’insécurité sociale dans la société

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ne s’accompagnent d’une augmentation plus importante encore des manifestations d’intolérance. En guise d’introduction à ses recommandations, la CNCDH tient à souligner une fois encore que l’efficacité de la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie doit procéder d’une approche globale et intégrée, permettant d’améliorer la coordination, le renforcement et la mise en valeur des multiples initiatives déjà mises en place. Elle souhaite rappeler que l’action des pouvoirs publics contre le racisme doit se garder de tout risque d’approche communautariste, qui risquerait d’instaurer un climat délétère de « concurrence victimaire ». Si la CNCDH ne nie pas que certaines formes spécifiques de xénophobie nécessitent une attention particulière, elle considère néanmoins que ce phénomène doit être considéré dans sa globalité. Enfin, elle rappelle sa recommandation aux personnalités politiques et publiques de veiller à ne tenir aucun propos racistes, xénophobes ou stigmatisants à l’égard d’une population particulière. Elle demande au personnel politique dans son ensemble de s’engager à ne pas éveiller, par des discours discriminants ou alarmistes, des réactions d’hostilité à l’égard des populations d’origine étrangère.

Recueil de données - La CNCDH recommande la réalisation d’enquêtes de victimation, pour obtenir plus d’éléments quantitatifs et qualitatifs sur la délinquance à caractère raciste. Par ailleurs, en raison des spécificités juridiques de ce type de délinquance la délinquance à caractère raciste, et du fait que cette forme de délinquance soit

l’une des rares pour lesquelles le mobile de l’infraction est pris en compte, la réalisation d’une enquête de délinquance auto déclarée pourrait permettre de mieux saisir certaines de ses spécificités. - La CNCDH invite les pouvoirs publics à promouvoir les recherches qualitatives réalisées par des chercheurs et des universitaires, mais aussi par des ONG, sur l’ampleur et la nature de la criminalité à caractère raciste, et au sein de cette criminalité la violence raciste. Ces recherches pourront se concentrer sur les caractéristiques des victimes et des agresseurs et étudier de manière critique la mise en oeuvre d’interventions de justice pénale et non pénale. - La CNCDH demande à ce que puisse lui être fourni des éléments quantitatifs et qualitatifs fiables permettant d’appréhender les phénomènes de racisme, d’antisémitisme, de xénophobie et de discriminations dans les collectivités d’Outre-mer. - La Commission demande d’affiner les données relatives aux alternatives aux poursuites, notamment s’agissant des réponses pénales apportées, ainsi que les données relatives à la prise en charge des mineurs. - Elle invite le Ministère de l’Education nationale à poursuivre les efforts de sensibilisation et d’information auprès des chefs d’établissements, afin d’améliorer le recensement des actes et menaces à caractère raciste, antisémite et xénophobe, via le logiciel SIVIS (système d'information et de vigilance sur la sécurité scolaire).

Education, formation, sensibilisation - La CNCDH rappelle l’importance de la mise en oeuvre du Programme mondial en faveur de l’éducation aux droits de l’homme, dans laquelle le ministère de l’Education nationale devrait jouer un rôle central et fait part de sa disponibilité pour participer à sa définition et à sa mise en oeuvre. - La CNCDH entend soutenir le développement d’outils pédagogiques innovants et spécifiques visant à lutter contre les préjugés et à développer la tolérance et le vivre-ensemble. La coordination d’actions pilotes initiées localement par certaines académies, la mise en place dans certains établissement d’actions pédagogiques qui réunissent chefs d’établissement, enseignants, mais aussi les associations de parents d’élèves et associations de lutte contre le racisme sont des initiatives qui permettent d’approcher la question de la lutte contre le racisme de manière globale et concrète. La CNCDH entend soutenir ces différentes initiatives développées au niveau local et invite le Ministère de l’Education nationale à les faire connaître plus largement, afin qu’elles puissent être reproduites dans un plus grand nombre d’établissements. Ces actions très concrètes, imaginées et mises en oeuvre par les enseignants, en lien avec les élèves, parfois avec l’appui d’associations, et en tenant compte du contexte spécifique d’un établissement constituent sans doute un des outils de prévention les plus efficaces. Elle recommande de s’assurer que l’ensemble des enseignants et du personnel de l’Education nationale soit suffisamment formé à

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Droits de l’Homme l’importance de l’éducation civique ainsi qu’à l’éducation à la citoyenneté. Elle suggère que soit inscrit dans les programmes de biologie en primaire et de sciences de la vie au collège et au lycée, un module sur la notion de « race » afin de montrer aux élèves que cette notion n’a aucune réalité scientifique et qu’il n’existe pas de races humaines. - Elle recommande le développement des modules de sensibilisation afin d’informer : - les victimes pour qu’elles connaissent les mécanismes de protection et de poursuites ; - les témoins d’actes de racisme, xénophobie et antisémitisme afin qu’ils prennent connaissance de la nécessité de signaler ces actes aux instances compétentes ; - les responsables (délégués du personnel, chefs d’entreprise, enseignants, …) afin qu’ils soient au fait des mesures à prendre en cas d’actes de racisme, xénophobie et antisémitisme. - Elle invite à renforcer le contrôle du CSA sur les messages délivrés par les médias

Emploi et logement - La CNCDH recommande que soient systématisées les formations à destination des personnes en charge des ressources humaines, des personnels des agences d’intérim et de recrutement, ainsi que des agents des Pôles emplois et des missions locales, afin de leur indiquer la marche à suivre face aux demandes discriminatoires de certaines entreprises, et notamment l’obligation de signaler les discriminations dont ils ont connaissance. - Elle invite à durcir les sanctions à l’encontre des entreprises condamnées pour discrimination ou pour comportements racistes : - interdiction de postuler à des marchés publics pendant un certain temps ; - amende plus importante, dont une partie consacrée au financement de projets de lutte contre les discriminations. - La CNCDH recommande que les professionnels de l’immobilier (agences immobilières, agents des offices HLM…) soient mieux formés afin de savoir comment réagir face aux demandes discriminatoires de certains propriétaires.

Police, sécurité, libertés publiques Pour juguler la montée des actes antimusulmans, constatée depuis deux ans, et pour prévenir les attaques contre les sites musulmans, la CNCDH recommande que le plan de sécurisation des sites juifs lancé en 2002 par le ministère de l’Intérieur soit étendu aux sites musulmans. - Afin d’éliminer toutes les formes de profilage racial, elle recommande au Ministère de l’Intérieur d’expérimenter, dans plusieurs types de territoires, la mise en place d’une attestation nominative de contrôle. Le Ministère de l’Intérieur doit par ailleurs veiller à ce que les forces de l’ordre soient particulièrement respectueuses du code de procédure pénale et de la déontologie de la police nationale. Il convient donc de lutter contre les « contrôles au faciès » par un renforcement de la formation

et de la sensibilisation, mais aussi par la sanction. Les auteurs de contrôles abusifs doivent être sanctionnés conformément à la loi. - La CNCDH demande la réalisation d’un véritable bilan complet de l’action des Commissions pour la promotion de l’égalité des chances (COPEC) afin de procéder à d’é ventuels ajustements pour améliorer leur efficacité. - La CNCDH souhaite que l’Inspection générale de l’administration porte une attention particulière sur d’é ventuelles pratiques discriminatoires, lors de ses contrôles des services en charge de la délivrance des titres de séjour, de la naturalisation, et de la délivrance des visas.

Internet - La CNCDH réitère sa recommandation relative à la création d’un observatoire du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie sur Internet. - Elle souhaite que la responsabilité des hébergeurs de sites et des fournisseurs d’accès Internet soit engagée dans les cas où des propos racistes, xénophobes ou antisémites sont proférés sur les sites. - Par ailleurs, la CNCDH encourage l’action du Ministère des Affaires Etrangères pour la ratification la plus large possible de la Convention contre la cybercriminalité du Conseil de l’Europe.

Modification des textes - La CNCDH invite, une fois encore, le Gouvernement à ratifier le Protocole n°12 à la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme et des libertés (CEDH) qui interdit de manière générale toute forme de discrimination. Ce protocole réaffirme l’interdiction générale de discrimination. Au contraire de l’interdiction de discrimination accessoire de l’article 14 de la CEDH, qui interdit seulement les discriminations en relation avec la jouissance d’un droit ou d’une liberté reconnu(e) par la Convention et les Protocoles additionnels, elle n’a pas de limite quant à son domaine d’application, et présente donc un caractère plus protecteur pour l’individu. - La CNDH demande que soient harmonisés à un an les délais de prescription de toute infraction de presse à caractère raciste et antisémite. En effet, en 2004, aux termes de la loi Perben 2, le délai de prescription des expressions publiques racistes et antisémites était étendu de trois mois à un an. Néanmoins, cette avancée notable, tant pour la défense des victimes que dans le travail des associations antiracistes, a laissé pour compte le délit d’apologie de crimes de guerre, de génocides ou de crimes contre l’humanité et toutes les contraventions racistes de presse (provocation, injure, diffamation non publiques). De plus sur Internet, pour que le délai de prescription soit d’un an, le caractère public de l’infraction doit être démontré. Dans un souci de cohérence et d'efficacité, la CNCDH demande donc une harmonisation générale du régime juridique de prescription des propos racistes.

Agenda

ORDRE DES EXPERTS-COMPTABLES RÉGION PARIS ILE-DE-FRANCE Salon des comités d’entreprise ELUCEO Les 3 et 4 avril 2013 Stade de France Loge numéro 140 93216 SAINT-DENIS LA PLAINE Renseignements : Sylva Bilez Tél. 01 55 04 31 27 sbilez@oec-paris.fr

2013-240

INSTITUT DES AVOCATS CONSEILS FISCAUX

« Fiscalité du patrimoine : actualité législative et jurisprudentielle » Conférence le 4 avril 2013 Maison du Barreau 2, rue de Harlay 75001 PARIS Renseignements : 01 42 60 10 18 iacf@wanadoo.fr

2013-241

ASSOCIATION FRANÇAISE DES PRATICIENS DU DROIT COLLABORATIF

Le droit collaboratif : défendre autrement Colloque annuel le 5 avril 2013 Maison du Barreau 2, rue de Harlay 75001 PARIS Renseignements : contact@droit-collaboratif.org www.droit-collaboratif.org 2013-242

SCIENCES PI - SCIENCES PO

Propriété intellectuelle et développement : état des lieux et perspectives Conférence le 12 avril 2013 Sciences Po - Ceri 56, rue Jacob 75006 Paris Renseignements : 01 42 96 21 01 info@expert-mcth.fr

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CLUB BANQUE

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Les Annonces de la Seine - jeudi 28 mars 2013 - numéro 21

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Tribune

Quelques réflexions hétérodoxes sur la Cour Européenne des Droits de l’Homme Les récentes décisions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme ainsi que la parution de l’ouvrage de Jean-Paul Costa « La Cour Européenne des Droits de l'Homme : des juges pour la liberté » donnent à l’allocution de Jerry Sainte-Rose, le 6 juillet 2012 à la Cour de cassation lors de la remise de mélanges en son honneur par le Professeur François Terré (voir les Annonces de la Seine du 16 juillet 2012), une importance particulière. Elle est d’autant plus intéressante, que l’auteur, un prestigieux juriste, lettré, humaniste, dont les mélanges en son honneur en sont le témoignage, ne partage pas à l’égard de la Cour Européenne les opinions généralement exprimées. Nous lui donnons la parole. Jean-René Tancrède Statuant au nom de l’humanité, ce Juge dont les arrêts prennent des accents sacerdotaux entend imposer ses principes à l’ensemble des populations concernées sans avoir égard aux spécificités nationales. Aussi la Cour européenne censure-t-elle abondamment : sur le millier de décisions qu’elle a rendues en 2011 on dénombre 85 % de condamnations pour violation d’au moins un article de la Convention.

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Jerry Sainte-Rose

insi que l’enseignait l’éminent comparatiste René David : « Le droit est en rapport étroit avec toutes les données de la vie sociale, il ne saurait être compris sans la connaissance de la société qu’il gouverne et dans l’ignorance des manières de se conduire, de penser et de sentir des membres de cette société ». On sait qu’au lendemain des horreurs de la seconde guerre mondiale et de l’expansion d’un système totalitaire venu de l’Est, la sauvegarde des droits de l’homme a été confiée, avec un certain angélisme, par les Etats membres du Conseil de l’Europe à un organe juridictionnel considéré comme moins à craindre qu’une émanation de l’exécutif ou du législatif. Mais à partir d’une Convention conçue comme un dénominateur commun par ses signataires et rédigée en termes passe-partout, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a élaboré une jurisprudence aussi foisonnante et évolutive qu’incontrôlable ; fondée sur des principes malléables à l’infini comme la prééminence du droit et le procès équitable, cette jurisprudence est devenue la source d’un droit autonome, détaché des contraintes inhérentes à tout corps social déterminé, un droit « sans pays, ni histoire » pour citer le doyen Carbonnier ; un droit qui se définit par sa généralité comme par son abstraction toujours accrues et repose en fin de compte sur la vision d’un juge, véritable démiurge placé au -dessus de tous les autres et enjoignant à la société de se conformer à un bien absolu dont lui seul aurait la clé.

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Selon Montesquieu qui était aussi magistrat : « C’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites ». Certes, la Cour européenne concède à chaque Etat une « marge d’appréciation » mais il ne s’agit que d’une marge qu’ elle contrôle étroitement et elle ne s’interroge guère sur ses limites. Si le mécanisme qui a été mis en place a fait progresser l’égalité des droits et les droits de la défense, il se caractérise aussi par l’exaltation des prérogatives individuelles au détriment du droit objectif porteur des institutions et - comme l’observait à juste titre le procureur général Burgelin- ébranle nos traditions les plus assises. En effet, naguère norme incontestable, la loi nationale, même jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, même reçue et appliquée par la Cour de cassation ou le Conseil d’Etat peut être censurée a posteriori par la jurisprudence européenne. C’est ainsi que les lois de validation ont été déclarées contraires à la Convention par la Cour de Strasbourg qui a toujours trouvé insuffisamment « impérieux » les motifs d’intérêt général invoqués par le législateur. Mais en quoi cette Cour est- elle mieux placée que nos élus pour apprécier l’intérêt général ? Le Parlement est en tout cas rabaissé et nos cours suprêmes réduites à l’état de juridictions subalternes. L’instrumentalisation de la jurisprudence européenne permet, il est vrai, au juge judicaire de valoriser sa propre jurisprudence en la faisant prévaloir sur les textes qui la contredisent : c’est ainsi que le dispositif « anti- Perruche » inclus dans une loi votée il y a dix ans a été neutralisé puis son application différée avec pour conséquence le maintien entre les justiciables d’inégalités d’autant plus choquantes que la loi est désormais appliquée par la justice administrative. En définitive, la primauté reconnue aux normes européennes sur les normes nationales est source de complexification du droit et d’insécurité juridique voire de cacophonie ; elle

est aussi de nature à réveiller la crainte ancestrale des responsables politiques à l’égard du gouvernement des juges. La coutume, fait culturel, n’est pas visée par l’article 55 de la Constitution ; pourtant autant, elle n’a pas échappé à l’emprise de la Cour européenne. Tout en reconnaissant que les avocats généraux à la Cour de cassation sont indépendants impartiaux et objectifs, au nom des apparences dont elle est également juge, la Cour européenne les a assimilés à des parties au procès, ce qu’ils ne sont pas et n’ont jamais été. Malgré tout, il a été mis fin à une pratique biséculaire de dialogue permanent et de travail en commun entre magistrats du siège et du parquet général qui avait été instaurée dans l’intérêt bien compris des justiciables comme l’ont reconnu les avocats aux Conseils. Lorsque l’avis de l’avocat général s’accordait avec celui exprimé dans le rapport, il rendait plus sûre la décision à prendre ; dans le cas contraire, il suscitait le débat nécessaire. Et son intervention conférait une certaine transparence à la justice. Les commissaires du gouvernement du Conseil d’Etat ont été également pris pour cible. Un répit a pu être trouvé dans leur nouvelle dénomination et quelques ajustements ne remettant pas en question l’essentiel de leurs fonctions. Voici ce que déclarait à ce sujet le vice-président du Conseil d’Etat à une délégation de la Cour européenne : « Il va de soi que le rapporteur public qui travaillerait seul et donc « à l’aveugle », dans l’ignorance du projet d’arrêt, n’apporterait rien d’utile à la juridiction, à la qualité de la décision, aux parties et même au public ». Espérons que la solution de compromis qui a été trouvée ne sera pas remise en cause à son tour. J’ai noté avec intérêt que le président en exercice de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe avait fait la remarque suivante : « la Cour n’a pas d’avocats généraux, ce qui nuit à l’élaboration d’une doctrine publique claire ». Enfin, la Cour européenne a récemment jugé que les membres du parquet n’étaient pas représentatifs de l’autorité judiciaire au sens de l’article 5 de la Convention qui, bien entendu, n’en donne aucune définition. Cette fois, c’est à la Constitution que l’oracle de Strasbourg s’attaque de manière frontale puisque, dans son Titre VIII, elle dispose que l’autorité judiciaire comprend les magistrats du siège et ceux du parquet, les uns et les autres étant gardiens de la liberté individuelle.

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Tribune Le ministère public est une création originale du droit judiciaire français, je dirais même du génie français qui remonte au Moyen Age et a été imitée dans de nombreux pays ; ses membres sont des magistrats à part entière depuis le 14eme siècle. L’unité du corps s’est renforcée du fait que le recrutement et la formation des magistrats sont identiques, qu’ils sont soumis à la même déontologie et que nombre d’entre eux, au cours de leur carrière, exercent alternativement des fonctions au siège et au parquet, ce qui a été mon cas. Je le dis comme je le pense : il n’y a pas à mes yeux de différence dans les qualités qui doivent être celles d’un magistrat qu’il soit juge ou parquetier. Je ne serais pas revenu au parquet si j’avais eu le sentiment que ma liberté de pensée et ma liberté de parole pourraient être entravées. Contrairement à ce que semble croire la Cour européenne, les procureurs de la République sont au service de la société et non du gouvernement à qui il appartient cependant de définir les grands axes de la politique pénale dont il est comptable devant la nation. Les procureurs ne sont pas non plus de simples agents de poursuites ; juges de l’opportunité de celles-ci , ils sont présents à tous les stades de la procédure pénale : de l’interpellation au

jugement (ils saisissent les tribunaux des faits qu’ils qualifient après les avoir vérifiés à l’issue d’un enquête contradictoire menée sous leur direction et requièrent, aux termes de la loi, ce qu’ils estiment convenable au bien de la justice). Et leur mission va bien au-delà car elle est de veiller à l’application des lois et au respect de l’ordre public, de défendre l’intérêt général et celui des victimes. Avec le contrôle de la garde à vue, ils sont même les premiers défenseurs de la liberté individuelle. Les garanties statutaires dont ils bénéficient ne sont pas inférieures à celles accordées aux juges administratifs soumis au statut de la fonction publique. Il n’est pas évident que de nouvelles garanties puissent dissiper les préventions manifestées à leur égard et qui ne peuvent qu’affaiblir leur action. Cui bono comme disaient les romains, dans quel intérêt ? Faut-il nous laisser imposer un modèle de justice qui n’a jamais été le nôtre alors surtout qu’il s’agit d’une fonction essentiellement régalienne ? Fidèle à ses orientations, la Cour européenne a condamné à deux reprises le Royaume Uni pour avoir refusé le droit de vote aux personnes détenues. Les autorités politiques de ce pays ont

manifesté leur irritation de voir désavouer une règle ancienne et proposé il y a quelques mois que cette juridiction qui se mêle un peu de tout et s’en trouve en conséquence submergée par un flot de recours, se consacre enfin aux véritables violations des droits de l’homme. La difficulté est de mettre d’accord les 47 Etats signataires pour renégocier la Convention dans des limites plus modestes. Il y avait sans doute des raisons de brider ou de tempérer les souverainetés nationales et la France ne pouvait se tenir à l’écart du concert européen. Mais la question se pose de savoir si l’on n’a pas été trop loin dans l’abandon de la souveraineté en la transférant même pour partie à une sorte de conseil de conscience détaché des réalités et qui n’encourt aucun type de responsabilité démocratique. Avons-nous si peu confiance en nous-même qu’il faille chercher la légitimité au dehors ? Nous voilà déjà sous curatelle ; prenons garde qu’elle ne se transforme en tutelle. Jerry Sainte-Rose, Avocat Général Honoraire à la Cour de cassation Ancien Conseiller d’Etat 2013-245

Vie du droit

Ministère de la Justice

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Politique pénale et d’action publique - Hôtel de Bourvallais - 27 mars 2013

a Garde des Sceaux, Ministre de la justice, a présenté un projet de loi relatif aux attributions du Garde des Sceaux et des magistrats du Ministère public en matière de politique pénale et d’action publique. Conformément aux engagements pris par le Président de la République pendant la campagne de l’élection présidentielle, ce projet de loi vise à empêcher toute ingérence de l’exécutif dans le déroulement des procédures pénales, afin de ne pas laisser la place au soupçon qui mine la confiance des citoyens dans l’institution judiciaire. Il inscrit dans le code de procédure pénale la prohibition pour le ministre de la justice d’adresser aux magistrats du parquet des instructions dans des affaires

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individuelles. Il confie, en outre, au garde des sceaux la responsabilité de conduire la politique pénale déterminée par le Gouvernement et d’en préciser, par instructions générales, les grandes orientations pour assurer sa cohérence et son efficacité. Les relations entre la chancellerie, les procureurs généraux et les procureurs de la République sont ainsi clairement définies : le garde des sceaux a la responsabilité d’animer la politique pénale ; les parquets ont le plein exercice de l’action publique, et ce dans le respect des dispositions de l’article 5 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, selon lesquelles les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs

chefs hiérarchiques et sous l'autorité du garde des sceaux. Il s’agit d’une rupture majeure avec la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité qui avait renforcé le pouvoir hiérarchique du garde des sceaux en maintenant les instructions individuelles et en étendant ses prérogatives à la conduite de l’action publique, jusqu’alors réservée aux seuls magistrats du parquet. Avec le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature qui offre aux magistrats du parquet des garanties similaires à celles des magistrats du siège, ce texte contribue au renforcement de l’indépendance de la justice. Source : communiqué du 27 mars 2013

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Rentrée solennelle

Tribunal de Grande Instance de Chartres 18 janvier 2013 A l’initiative de la Présidente Françoise Barbier-Chassaing, l’Audience Solennelle de Rentrée du Tribunal de Grande Instance dde Chartres a été placée, ce 18 janvier 2013, sous le signe « d’une politique de juridiction et d’arrondissement judiciaire », l’occasion pour cette magistrate, installée dans ses nouvelles fonctions le 7 septembre 2012 (Les Annonces de la Seine du 3 décembre 2012 page 9), de fixer un « objectif de performance » afin que la justice soit rendue « dans des délais raisonnables en s’assurant du respect du contradictoire et dde l’impartialité ». Quant au Procureur de la République Patrice Ollivier-Maurel, également installé le 7 septembre 2012 à Chartres, il s’est fixé quatre priorités pour relever les défis qui permettront de « rendre une justice de qualité, à l’écoute du citoyen et dans des délais rraisonnables » : prendre en considération les victimes qui doivent être, tout autant que les auteurs d’infraction, au cœur de nos préoccupations, s contrôler l’e xécution et l’aménagement des peines, lutter contre les violences faites aux femmes et mettre en œuvre la Zone de Sécurité Prioritaire. Nous leur souhaitons pleine réussite dans la poursuite de la modernisation de leur juridiction afin f que chaque citoyen du dépar tement de l’Eure et Loir bénéficie d’un service public de justice performant garantissant leurs libertés individuelles. Jean-René Tancrède

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Patrice Ollivier-Maurel

Quatre priorités pour une justice de qualité par Patrice Ollivier-Maurel (...) ous voilà à l'amorce d'une nouvelle année qui s'ouvre sur une crise économique qui n'en finit pas, et la lutte contre le terrorisme qui vient de prendre un tragique tournant au Sahel et en Algérie. (...)

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Dans ce climat de morosité et d'appréhension de l'avenir, les difficultés de cette juridiction peuvent paraître bien dérisoires. Pourtant, je me dois de me faire le porte parole de ceux qui travaillent dans des locaux bien trop exigus, qui nous condamnent à travailler dans des conditions difficiles, parfois en marge des règles d'hygiène et de sécurité, et qui constituent un obstacle à toute tentative de réorganisation... (...) Je sais, Monsieur le Député Maire de Chartres, que vous avez fait et que vous faites encore votre possible pour doter la justice eurélienne d'une cité judiciaire digne de ce nom, et je ne peux en cela que vous remercier. Pourtant, comme vous le savez, le silence que nous recevons en écho

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n'augure rien de bon. Aussi, et parce que Madame la Présidente et moi ne pouvons baisser les bras...c'est avec les yeux de Chimène que nous regardons du côté de la maison d'arrêt qui libèrera à l'horizon 2014 des locaux attenant à notre Tribunal... C'est encore sur cette triste tonalité que commence cette année en terme d'effectifs pour des greffiers et des fonctionnaires qui travaillent avec beaucoup de dévouement mais toujours sur le fil du rasoir à la merci de la moindre absence, du moindre aléa, et qui ont parfois le sentiment de ne faire que rattraper le retard... Et je ne peux bien sûr ignorer les difficultés des magistrats du siège, en nombre insuffisant pour une juridiction classée parmi les plus importantes de son groupe. Pourtant, mon propos n’est pas de remplir ici un quelconque cahier de doléances. Il n'est pas de problème sans solution, et ma nature optimiste me pousse bien plus à l'action qu'à l'observation. Je dois en ce qui me concerne, exprimer très égoïstement ma satisfaction en vous disant que les effectifs de ce parquet sont enfin au complet…. Un plein des effectifs…que j’espère durable… et qui m’a permis d’envisager la réorganisation de ce parquet autour d’une nouvelle répartition des charges, que j’ai souhaitée plus équilibrée, tout en tenant compte largement des aspirations des uns et des autres, et la création d’une cellule de traitement en temps réel. Une répartition des contentieux par thème, qui garantit une meilleure spécialisation et donc un meilleur suivi et une traçabilité des procédures. Une répartition qui facilite notre visibilité à l’égard des partenaires. Cette visibilité, c’est aussi la participation du Ministère public dans les différentes instances de prévention locales : Conseil Local de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSPD) et Contrat Intercommunal de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CISPD) ou départementale dans le cadre du conseil départemental de la délinquance.... C'est encore la concrétisation d’actions communes telle notre implication dans le document général d’orientation de sécurité routière signé en octobre dernier. C’est également un réel engagement à vos côtés, Monsieur le Préfet, et dans le respect de nos compétences respectives dans les politiques de

sécurité et de lutte contre la délinquance : Comités Opérationnels Départementaux AntiFraude (CODAF), état major de sécurité et très prochainement dans le pilotage de la Zone de Sécurité Prioritaire drouaise sur laquelle je reviendrai. La création d’une cellule de traitement en temps réel était rendue nécessaire, à la fois pour les magistrats du parquet qui faisaient face, seuls, à un contentieux quotidien soutenu et à des tâches administratives toujours plus lourdes, et pour les services d’enquête qui rencontraient toujours plus de difficultés à trouver un créneau sur une ligne téléphonique encombrée. Cette cellule est opérationnelle depuis le 14 janvier. Le magistrat de permanence est désormais assisté d’un fonctionnaire et les relations avec les services d’enquête ont été redéfinies afin de recentrer la permanence téléphonique du magistrat sur l’essentiel. Une part du contentieux étant traitée désormais au travers d’échanges de courriels, il en résulte que le magistrat peut se concentrer sur sa véritable mission qu’est la prise de décision, et que son accessibilité pour les services d’enquête et les partenaires s’en trouve facilitée. Mais cette audience de rentrée est l’occasion, non seulement de vous accueillir afin de présenter le bilan de l’année écoulé, mais également de vous présenter des perspectives d’action. (...) Mais je ne voudrais pas m'en tenir au bilan et aux chiffres de l'année passée, tant il nous reste de nombreux défis à relever. Le premier d’entre eux sera de tenir le cap en maintenant au mieux l’é quilibre fragile des différents maillons de la chaine pénale, car notre devoir est de rendre une justice de qualité, à l’é coute du citoyen et dans des délais raisonnables. Mai ais nous aur aurons cette an année, qu quatr atre priorité ités : 1. Longgttemps mps igno norées, les vic vviicti ctim times doiivven vent nt êtr être, tout ut aut auta utan ant nt qu que les aut aute uteurs d'infracti ctio tion, au au cœur de nos préoccupati ations. Dire qu'elles doivent être prises en considération ne suffit pas...,elles doivent être prises réellement en charge tout au long du processus pénal. Et nous avons tous un rôle à jouer : policiers et gendarmes au stade de l'enquête..., le secteur associatif, l'AVIEL, les municipalités et le conseil

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Rentrée solennelle

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général qui interviennent au sein des commissariats et de gendarmeries, puis dans les points d'accès au droit et maisons de justice pour informer, rassurer, orienter...,les avocats qui accompagnent à la barre les parties civiles, nous, les magistrats qui devons leur donner la parole et les écouter, les protéger quand cela est nécessaire, et leur allouer une juste indemnisation de leur préjudice, l'administration pénitentiaire qui doit tout mettre en œuvre pour faire exécuter les condamnations au profit des victimes en incitant les détenus à réserver une grande part de leurs pécule qui sera bien mieux employé à réparer le mal qui a été fait plutôt qu'à cantiner inutilement. Dans ce Tribunal, cela se concrétisera par la création d'un bureau d'aide aux victimes, véritable service public qui sera à même de renseigner les victimes sur la situation des procédures qui les concernent et les orientera utilement vers le juge délégué aux victimes et les structures d'indemnisation existantes, telles que la commission d'indemnisation des victimes ou le service d'aide au recouvrement des victimes d'infraction. 2. L’exécuti ution des peines et l'aménagement nt des peines reste une priorité, car la certitude de l’accomplissement de la sanction est la contr ntreparti rtie indissociable de la préventi ntion. Mais la sanction ne doit pas non plus, être une fin en soi, elle est une étape dans un parcours dont le terme est une réinsertion réussie. A la mise à exécution de la peine suit l’application de la peine et son cortège de mesures destinées à accompagner le condamné. Bien entendu en détention, cet accompagnement ne doit pas avoir pour seul objectif d’accélérer la sortie de prison dans un souci de régulation de la surpopulation carcérale. Il suppose une politique concertée entre magistrats et responsables des services pénitentiaires pour encourager les méritants et sanctionner les perturbateurs. Cette concertation se concrétise au travers des réunions de la commission d'exécution des peines qui regroupe l'ensemble des acteurs, qui peuvent ainsi débattre des objectifs à atteindre,

définir une jurisprudence et définir en commun une véritable politique concertée dans ce domaine. Mais dans tous les cas, l'accompagnement et le suivi des condamnés dans leur parcours de réinsertion suppose surtout que les juges d’application des peines aient à leur disposition un large choix de mesures : contrôle et suivi des obligations liées à la mise à l’épreuve, surveillance des délinquants sexuels, alternatives à l’incarcération : travaux d’intérêt généraux, chantiers extérieurs et semi-liberté… Je sais que je peux compter sur la coopération des communes et de certaines administrations pour offrir des postes de travail et que le service de probation et d’insertion ne ménage pas sa peine pour proposer des actions variées et innovantes… Mais je voudrais pousser un cri d’alarme car le départ programmé de la maison d’arrêt à l’horizon 2014, c'est-à-dire demain, qui nous contraindra à de laborieuses extractions, va surtout priver tout le département de structure de proximité pour accueillir les condamnés en semi-liberté…,au moment même où nous cherchons à développer cette mesure qui permet d’exécuter une peine tout en conservant un emploi et qui est donc très adaptée à un certain type de délinquants, tels que les auteurs de violences sur les femmes. 3. Les violences sur les fe femmes, c’est précisément l’un des axes fo fort de la politique que pénal ale que que j’ente ntends conduire cett tte année. 420 procédures ont été enregistrées cette année dans ce département. 111 ont fait l'objet d'une saisine du Tribunal correctionnel et 122 ont fait l'objet d'une mesure d'alternative aux poursuites. La réponse que nous apportons, à ce jour, est insuffisante et souvent inadaptée. Tous les signalements doivent faire l'objet d'une enquête et les simples PV de renseignement ou les mains courantes sont à bannir. Tout doit être fait également pour éviter que ces femmes subissent une double peine, après les coups de leur compagnon...,un hébergement en urgence dans des foyers ou des hôtels impersonnels. A la souffrance physique ne doit pas s'ajouter l'isolement, un isolement d'autant plus difficile

à supporter qu'il s'accompagne d'une brutale paupérisation due à l'absence d'emploi. C’est l’auteur des violences qui doit être éloigné du domicile et non la victime. Sauf dans les cas les plus graves, des solutions permettent cette mise à distance sans compromettre l’emploi existant : semi-liberté ab initio, hébergement d’urgence. A l’occasion du dernier conseil départemental de prévention de la délinquance, j’ai lancé un appel à l’ensemble des organismes HLM du département pour qu’ils puissent réserver, pourquoi pas à tour de rôle, un logement destiné à ce type d’hébergement. Mais pour prévenir la récidive, cet éloignement doit aussi être accompagné d’une véritable prise de conscience…Il vous sera proposé, Monsieur le Préfet au titre du FIPD, le financement de groupes de paroles. Nous réfléchissons aussi à la mise en place de stages de citoyenneté adaptés à cette forme de délinquance. Les victimes ne doivent pas non plus, être abandonnées. Nous saisirons les juges aux affaires familiales d’ordres de protection, il faudra pouvoir doter celles qui sont le plus exposées de téléphone d’urgence, enfin, nous devrons réfléchir ensemble à trouver un moyen de rompre avec leur dépendance économique…Elle est bien souvent au cœur du problème. Ne pourrait-on pas sensibiliser le pôle emploi et certains acteurs économiques pour qu’ils facilitent l’accès au travail de certaines femmes en grande détresse ? 4. La qua quatr atrième priorité et non des moindre, c’est la mise en œuvr vre de la Zone de Sécurité ité Priorita itair aire. L’objectif n’est bien entendu pas de stigmatiser les quartiers de Dreux, qui sont dans son périmètre, mais de saisir l’opportunité qui nous est offerte de travailler en concertation – police, justice, administrations, élus… pour tenter d’améliorer la sécurité et donc le quotidien des citoyens qui y vivent. Vous pourrez compter sur moi Monsieur le Préfet pour engager ce parquet dans une action volontariste… Je prendrai l’initiative de créer un groupe local de traitement de la délinquance qui s'intègrera, en le complétant, dans le dispositif afin de lui donner une dimension judiciaire. Sous mon autorité, ce Groupe Local du Traitement de la Délinquance permettra de conjuguer les forces des services de police judiciaire et de certaines administrations afin de concentrer les efforts sur des objectifs, un temps et une zone géographique déterminée : trafics en tous genre, blanchiment, comportements dangereux sur la route tels que les rodéos, entreront dans le champ d'action de ce GLTD. (...) Avant de terminer, je voudrais rendre hommage au travail de tous ceux qui concourent à l’œuvre de justice, forces de l’ordre, administration pénitentiaire, protection judiciaire de la jeunesse, avocats, officiers ministériels, auxiliaires de justice, greffiers, fonctionnaires… Je vous remercie pour votre engagement, la justice n’est pas que la chose des juges et des procureurs, elle est l’affaire de tous…,et je sais pouvoir compter sur vous tous pour tendre vers ce qui doit être notre unique objectif : rendre une justice de qualité et respectée. (...)

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Rentrée solennelle

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Françoise Barbier-Chassaing

En application de la L.O.L.F, le Ministère de la Justice a élaboré un certain nombre d’indicateurs de performance afin de mesurer l’activité des juridictions et de rendre compte de l’adéquation des moyens aux objectifs poursuivis. Pour ce faire, plusieurs tableaux de bord sont à disposition des chefs de juridiction. Les différents groupes de travail en place au Ministère ou dans les juridictions, notamment sur la difficile question de la charge de travail des magistrats, sont l’illustration d’un mouvement de maturation de ces indicateurs. Une ère POST - LOLF s’annonce -t-elle ? Une

Appliquer la règle de droit pour garantir les libertés individuelles par Françoise Barbier-Chassaing

’audience solennelle de rentrée est un important rendez vous pour la juridiction : elle permet tout d’abord d’être un envoi de bon augure par l’adresse des voeux les meilleurs pour débuter cette nouvelle année à vous tous, partenaires et interlocuteurs de notre quotidien judiciaire. Cette audience donne également l’occasion de faire un bilan de l’activité de l’année écoulée et de présenter nos perspectives : il s’agit aujourd’hui d’évoquer la politique de juridiction et d’arrondissement judiciaire de l’Eure-et-Loir. Cette politique part d’un constat et s’articule autour d’actions concertées tant au sein de la juridiction que de l’arrondissement judiciaire.

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Le constat Selon le classement de la DSJ de l’ensemble des Tribunaux de grande instance(TGI), Chartres est classé 52ème entre Orléans et Le Havre qui sont tous deux des Tribunaux hors hiérarchie, ce qui n’est pas le cas de Chartres. Un classement dans la catégorie supérieure lui permettait d’afficher une dimension et une stature à la hauteur de son activité réelle et de ses besoins tant humains que matériels. En effet, depuis l’année 2008 au moins, la situation ne fait que se dégrader. Si l’on tient pour un fait désormais acquis, car communément partagé par l’ensemble des juridictions voire d’autres administrations, que le budget de fonctionnement ne fait qu’assurer les strictes dépenses obligatoires réduisant ainsi les opérations de maintenance au strict minimum, la localisation des emplois affecte particulièrement l’arrondissement judiciaire de Chartres. (...)

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Vers une politique de juridiction et d’arrondissement

Dans cette perspective et pour amorcer une politique de juridiction et d’arrondissement, quelques fondamentaux méritent d’être retravaillés : - La LOLF responsabilise les acteurs de terrain : tel est son esprit. La juridiction doit pouvoir être à même de donner une appréciation critique des critères de performance et des outils informatiques proposés et être force de proposition. Ne peut-on pas s’interroger, par exemple, sur la pertinence du taux de réponse pénale et proposer d’autres volets d’action ? -Le magistrat du siège n’est pas une unité de production dans une chaîne d’interactions modélisables. Ce concept industriel n’est pas intégralement transposable au monde judiciaire. En langage Nov’Lang, le process est structurellement vicié. Certains paramètres ne sont pas maîtrisables et sont des critères objectifs de risque : tel est le cas du flux des affaires nouvelles (non contrôlable) et des ressources humaines compte-tenu de l’absence de prévisibilité pluri-annuelle des postes et de la gestion annuelle voire semestrielle des affectations. Le jugement rendu est a minima l’agrégation : - d’é changes d’informations provenant de plusieurs acteurs (justiciables, greffe, magistrats, auxiliaires de justice ...) dont on ne maîtrise pas totalement les interactions et où le juge in fine vérifie la réalité de l’information donnée et l’adaptation de la règle de droit. - d’une production intellectuelle dont la qualité dépend de la conduite des débats (sérénité, contradictoire, impartialité, écoute et respect du justiciable) et de la connaissance actualisée de la loi (information et formation continue). En conséqu quence, l’ objectif de perfo rfo forman ance doit it se recentr ntrer sur un impérati atif : rendre la justice dans des délais raisonnables en s’assurant du respect du contr ntradictoire et de l’imparti rtial alité ité. Il s’agit d’un objectif glo global al de la juridiction qui qui dépasse la myriade d’indicateurs de perfo formance. Tronçonner les objectiffss déresponsabilise et ffaait perdre le sens de son action. - Rendre la justice est ava vant nt tout ut une mission humain aine :

Le justiciable a le droit à une information éclairée sur la conduite du procès, à un temps d’audience suffisant, à une décision motivée et lisible : un procès équitable donc. Le juge a le droit et le devoir d’appliquer la règle de droit en faisant oeuvre créatrice et adaptée. Le juge n’est pas qu’un simple juriste. Rappelons que le référé est une oeuvre prétorienne menée à l’origine par le premier Président Drai. Or, l’espace judiciaire est le lieu clos où s’entrechoquent les souffrances et les passions. Il doit être sanctuarisé dans un climat apaisé. Ceci explique notamment que les conditions de travail doivent être prises en considération : le bien vivre au travail ne doit pas être un tabou. Il répond à un vrai besoin exprimé par les collègues ainsi qu’en atteste l’assistante sociale du ressort de la Cour. - Rendre la justice est une mission haut aute utement nt symbolique que : être garant des libertés individ viduelles n’est pas une obligati vi ation vir virtu rtuelle. L’application de la loi sur les hospitalisations sous contrainte en est une bonne illustration. Entorse à la dualité de juridiction, le JLD devra à partir de cette année statuer sur la légalité externe des actes administratifs. Il s’agit d’un enjeu majeur pour le juge des libertés dont le statut est toujours précaire (ce n’est pas un magistrat spécialisé) qui statue seul et dans l’urgence. L’accroissement de son activité est notable : 353 saisines en 2011 dont 109 pour les hospitalisations sous contrainte pour 507 saisines en 2012 dont 213 saisines pour les hospitalisations sous contrainte.

Sur la base de ces principes revisités, comment mettre en place une politique de juridiction ? Quelques pistes d’actions ont été explorées au sein de la juridiction chartraine.

1. Rénover le dialogue social pour donner du sens à notre action Plusieurs commissions thématiques à fréquence trimestrielle sont en place : commission pénale, commission famille, commission mineurs, commission civile. Impulsées par les magistrats du siège et ouvertes au greffe, au parquet et à nos partenaires institutionnels, elles ont vocation à favoriser les échanges sur nos pratiques et prendre des mesures et initiatives adaptées. En concertation avec le parquet et le Barreau, les actions suivantes sont entreprises : -en matière pénale : l’audiencement correctionnel est requalibré pour une audience d’un maximum de 7 heures. Sa réussite est conditionnée par une politique de renvoi plus stricte associée à une fixation d’horaire unique des convocations à 13 heures 30 suivi d’un appel des causes en collaboration avec l’huissier audiencier. Une réflexion sur les peines est en cours à partir des décisions prononcées. Une étude est faite entre l’orientation classique devant le Tribunal correctionnel et la troisième voie dont la Comparution sur Reconnaissance

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Rentrée solennelle Préalable de Culpabilité. Il faut rappeler que pour le juge homologateur chartrain, et conformément à l’esprit du texte, la CRPC est une orientation adaptée pour un primo délinquant ou presque et pour la commission d’infraction à gravité modérée. En raison de l’acceptation de sa responsabilité pénale, la peine proposée doit être plus douce que devant une formation correctionnelle classique. Dans ce cadre, un débat avec le barreau sur la défense pénale est envisagé. - en mati atière fa familial ale : le service des affaires familiale est entièrement restructuré avec, sur les trois cabinets, un plus particulièrement dédié aux urgences et à la mise en état. Cette nouvelle organisation permet notamment de répondre à la lutte contre les violences intra-familiales avec la possibilité d’avoir d’avantage recours aux ordonnances de protection. Le recours à la médiation assurée par les Caisses d’Allocations Familiales, les associations, les avocats est préconisé. Un partenariat avec le notariat de l’ Eure-et-Loir est envisagé. Des contacts ont été pris avec ces différents partenaires pour des actions à compter du mois de mars 2013, date à laquelle le service sera au complet avec trois magistrats de plein exercice. - en matière civile : les magistrats feront prochainement une communication sur la mise en place de l’injonction de payer au Tribunal de grande instance avec un point sur les différents crédits. - en mati atiè tière des libert rtés et et de la déte étenti ntio tion : pour mieux appréhender la quasi plénitude du contentieux en matière d’hospitalisation sous contrainte et unifier une jurisprudence, 6 juges des libertés et de la détention(JLD) interviennent à tour de rôle et feront le point sur les pratiques avant l’été 2013. Rénover le dialogue social conduit aussi à mettre en place une nouvelle gouvernance plus participative : des magistrats coordonnateurs ont été désignés avec pour mission d’élaborer un projet de service, ils font partie du collège de direction qui se réunit mensuellement.

2. Apprécier globalement la performance de la juridiction A partir des indicateurs et objectifs du Ministère, il s’agit d’apporter un complément par une approche globale de la performance et de mettre en place une cartographie des risques à partir de certains critères : - stabililité ité des effffe fectififfss : au delà d’un certain taux de postes vacants (jusqu’à 20 % à Chartres) la performance des magistrats doit être majorée, - dyn dyna ynamisme et adaptati ation des organisati ations : l’organisation générale, le service des affaires familiales, le JLD ont été réorganisés. Les fonctions des magistrats du siège ont été recentrées sur un noyau d’action principale, - ffiiabilisation des statistique ques locales, appréciation dyn dynamique que des applicatiffss : un comptage manuel de tous les services a lieu au mois de janvier, - identi ntificati ation des zones de vigililan ance : le TASS, le service des affaires familiales font l’objet d’une attention soutenue au premier semestre. - valorisation des bonnes pratique ques et transmission des savo avoirs : les temps de formation, les colloques, les réunions de service, les vadémecum sont de vrais temps de travail

à comptabiliser dans l’action soutien. Le 8 avril, un colloque dénommé “le printemps judiciaire de Chartres” propose comme thème : les soins sans consentement. - le bien viivvvrre au au sein de la jur uridi dicti ctio tion : cela passe d’abord par des conditions matérielles satisfaisantes. Au mois de juin 2013, un forum social sera organisé au sein de la juridiction. Ces actions sont évidemment applicables aux deux Tribunaux d’instance du ressort. Il faut saluer le dynamisme et l’engagement professionnel du Tribunal d’instance de Dreux ainsi que celui de Chartres qui a du absorber la réforme de la carte judiciaire et affronter d’importantes difficultés en 2012.

Que peut recouvrir une politique d’arrondissement ? En l’état de l’organisation judiciaire, l’arrondissement est le territoire de référence du Tribunal de grande instance. A Chartres, il correspond au département de l’Eure-et-Loir. Le monde judiciaire chartrain doit avoir une approche du territoire et mener une politique d’arrondissement en collaboration avec le Conseil Général, les élus, les services déconcentrés de la PJJ et de l’administration pénitentiaire notamment. Dans une carte administrative hétérogène où l’on parle de régions, d’inter-régions, l’arrondissement judiciaire concentre un carrefour de plusieurs entités. Une politique de territoires est possible à partir de plusieurs exemples : Le monde du travail

Grâce à la récente départementalisation des affaires prud’hommales en départage, le juge départiteur en charge de ce service sera à même de faire un diagnostic utile sur le monde du travail Eurélien en collaboration notamment avec les Conseils des prud’hommes du département. (...) Répression et réinsertion

L’exécution et l’application des peines sont également un très bon exemple. Le service de l’application des peines connaît une activité soutenue. Deux établissements pénitentiaires sont dans son ressort : le centre de détention de Châteaudun et la Maison d’arrêt de Chartres. (…) Sécurité et Liberté

La vidéo protection est un outil qui se généralise tant dans les établissements privés que dans les collectivités publiques. C’est un réel investissement qui n’est efficace sur le plan de la sécurité que si l’exploitation des images offre une qualité suffisante . La commission départementale de vidéo protection qui autorise les installations et examine une trentaine de dossiers par mois ,fait un travail de qualité au service d’un juste équilibre entre libertés et sécurité. Dans cet objectif, comme le texte le permet, elle a décidé de procéder aux contrôles des installations existantes. Un premier constat : une méconnaissance de la réglementation et une professionnalisation à parfaire des installateurs en ce sens.

Santé et Justice

Le nombre des médecins psychiatres est notoirement insuffisant dans ce département y compris de psychologues notamment au sein des CMP. Un délai d’au moins quatre mois pour un premier rendez-vous est donné pour la personne soumise à une injonction de soins. A l’occasion d’une rencontre pluridisciplinaire au mois de décembre dernier au Tribunal de grande instance de Chartres, il a été décidé de réactiver une commission santé-justice pour suivre ces points de vigilance. Accès au droit

En 2013, des informations ciblées à destination des personnes vulnérables seront dispensées dans tout le département dans les MJD. Quatre lieux stratégiques du département ont été privilégiés : Chartres, Dreux, Nogent-leRotrou et Châteaudun pour des communications sur un thème ciblé et relayé par la presse et les radios locales pour une information tout public. Ces actions s'opèreront avec un large partenariat avec les auxiliaires de justice, le monde associatif, les élus et les représentants de l'Etat. Nous bénéficions du concours actif du Préfet et des Sous Préfets du département. Les thèmes retenus : 1. « Les es soins sous us conttrrraainte te », le 8 avril 2013 au Tribunal de grande instance de Chartres. Le Barreau est associé à cette manifestation, les principaux intervenants sont des psychiatres et psychologues du ressort, 2. « Les es viole lences es ffaaite tes es aux fe femmes es », le 4 juin, à Nogent-le-Rotrou, avec le concours des associations, des magistrats des affaires familiales, le parquet et avocats de l'arrondissement, 3. « Les es sittu uati tionnss financière ère res es pré pré réca éccaaire éc ire res es », à Dreux en octobre, une conférence débat sera donnée avec le concours la Banque de France qui interviendra sur la problématique du surendettement, les huissiers, un magistrat sur les voies d’exécution et les services de la préfecture. 4. « Les es pers ers rsonnes es âg âgé gée ées ées es vuln lnéra érraable les es », le parquet interviendra sur le thème de la vulnérabilité des personnes âgées et un Juge des tutelles sur la dépendance. Les notaires pourraient intervenir sur « comment rédiger un testament ? » Il est également envisagé de mettre en place des actions « acces au droit » dans les hopitaux psychiatriques du département en partenariat avec l'Association d'Aide aux Victimes d'Infractions d'Eure-et-Loir (AVIEL).

Conclusion Politique de juridiction, politique de territoire judiciaire, tels sont nos perspectives pour cette année 2013.

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