LES ANNONCES DE LA SEINE Jeudi 26 janvier 2012 - Numéro 7 - 1,15 Euro - 93e année
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Henri-Charles Egret, Richard Vignon et Jacques Pin
Cour d’Appel de Metz Rentrée solennelle - 6 janvier 2012 RENTRÉE SOLENNELLE
Cour d’Appel de Metz
Une longue marche par Jacques Pin ................................................... Une charge nouvelle et délicate par Henri-Charles Egret ...................
Cour d’Appel de Douai
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7 9 AGENDA ......................................................................................5 ANNONCES LEGALES ...................................................12 AVIS D’ENQUÊTES ...........................................16 et 17 VŒUX Président de la République ....................................................22 Garde des Sceaux .......................................................................25 Conseil National des Barreaux ..............................................28 Chambre des Notaires de Paris ............................................30 Conseil Supérieur du Notariat ...............................................31 Préfet des Yvelines ....................................................................32 Humanisme et fermeté par Olivier de Baynast ................................... Un juste équilibre par Dominique Lottin .............................................
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a Rentrée Solennelle de la Cour d’Appel de Metz s’est tenue le 6 janvier 2012 en présence des personnalités institutionnelles et judiciaires de la région mais aussi des Chefs des Cours voisines allemande et luxembourgeoise. Le Premier Président Henri-Charles Egret a tout d’abord dressé le bilan particulièrement préoccupant de l’activité de la Cour d’Appel de Metz : subissant la difficile conjoncture économique de la Lorraine, elle a enregistré une forte augmentation du nombre d’affaires nouvelles à laquelle elle peine à faire face « malgré un ratio de performance des magistrats et des fonctionnaires conforme à la moyenne des Cours d’Appel voire supérieur ». Il a ensuite évoqué les nombreuses réformes intervenues au cours de l’année écoulée dans tous les domaines, « ce qui demande à chacun de faire preuve de grandes qualités d’adaptation qu’il convient de souligner tout particulièrement ». Le ressort de la Cour d’Appel de Metz a d’ailleurs été choisi pour expérimenter depuis septembre dernier les extractions judiciaires afin d’escorter les détenus depuis leurs cellules jusqu’au palais de justice, désormais confiées à des unités spécialisées de l'administration pénitentiaire et non plus à la police et à la gendarmerie. Pour le Premier Président Egret, les textes adoptés en 2011 dans les domaines de la garde à vue, du placement de l’étranger en rétention administrative, ou du malade hospitalisé sans son consentement pour bénéficier de soins psychiatriques sont aussi synonymes de charge croissante pour le juge judiciaire en tant que gardien de la liberté individuelle. C’est donc grâce à un travail d’équipe entre les acteurs de ces réformes, magistrats, fonctionnaires du greffe et avocats, qu’il convient de moderniser les méthodes afin de réduire les délais de jugement et les stocks d’affaires à traiter.
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Plaidant pour une plus grande transparence du travail des magistrats, il a estimé que la justice « sera d’autant mieux acceptée et exécutée qu’elle s’inscrit dans une démarche d’information et d’explication » Le Procureur Général Jacques Pin s’est quant à lui voulu optimiste, même « s’ il n’existe pas de victoire facile ou de hasard heureux sans effort ». Il a évoqué la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue qui a constitué « la réforme d’importance » de l’année écoulée dont l’innovation réside dans le renforcement du contrôle par l’autorité judiciaire qui est garante de la sauvegarde des droits de la personne: la garde à vue s’exécute en effet sous le contrôle du Procureur de la République pendant les premières 48 heures et du juge des libertés et de la détention au-delà de la 48ème heure, le Procureur de la République est avisé des placements en garde à vue par tous moyens, il en contrôle le déroulement, il en ordonne la prolongation et décide du sort de la personne à l’issue de cette mesure. Jacques Pin a aussi insisté sur la décision du Conseil constitutionnel du 18 novembre 2011 qui « a validé l’intégralité de cette loi tant sur le plan des droits de la défense que sur le contrôle par les magistrats du Ministère Public qui font partie du corps judiciaire » et ainsi répondu directement à la Cour Européenne des Droits de l’Homme, qui avait estimé que « les magistrats du parquet ne seraient pas une autorité judiciaire susceptible de contrôler une restriction d’une liberté individuelle en raison de leur mode de nomination. » Conjuguée à l’engagement du Garde des Sceaux de se conformer aux avis du Conseil Supérieur de la Magistrature lors de la nomination des magistrats du Ministère Public, cette décision, « va dans le sens de l’unité du corps judiciaire ». Jean-René Tancrède
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Rentrée solennelle
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Jacques Pin
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2011
Une longue marche par Jacques Pin
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Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.
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Comité de rédaction : Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appel Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président de la Chambre des Notaires de Paris Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International
(…) es audiences solennelles peuvent parfois être comparées à des grandes messes, sans aller nécessairement jusqu’au requiem. Gardons toujours une note d’optimisme... mais la justice verra-t-elle un jour la lumière ? J’aimerais apporter une réponse positive. Dans l’immédiat, nous méditerons la maxime de Jean-Marie Vianet, curé d’Ars, qui avait écrit de façon pertinente près de sa chambre de travail : « Je ne crois pas aux miracles ». Il n’existe pas de victoire facile ou de hasard heureux sans effort. Je rassure toutefois l’assistance : l’administration centrale, au cours de l’année 2011, nous a tout de même apporté des moyens supplémentaires à la cour d’appel et dans les différentes juridictions, notamment : - trois magistrats du siège, trois greffiers et cinq adjoints administratifs, - les postes de magistrats du parquet ont été globalement pourvus. Le dispositif Cassiopée (enregistrement des procédures pénales) et le service de l’exécution des peines ont pu fonctionner grâce à un apport conséquent de 34 vacataires contractuels sur notre ressort. Sur quelle base notre politique pénale va-t-elle alors reposer ? Sur notre propre capacité, en fonction de la variation des effectifs à laquelle nous devons nous adapter et sur la mise en place d’une organisation rigoureuse. La justice est une longue marche ; il faudra bien un jour la conquérir.
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Le système judiciaire, par les réponses qu’il apporte aux actes de délinquance, participe de manière déterminante au maintien de la sécurité en partenariat avec les autres acteurs de l’Etat : - police nationale, - gendarmerie, - municipalité dans le cadre de la politique de la ville, - et naturellement avec l’autorité préfectorale dans le cadre des Etats-Majors de sécurité où sont présents les Procureurs de la République. Fidèle à des principes d’éthique, notre institution doit garantir la liberté individuelle et les droits de l’homme. Le ministère public joue un rôle essentiel dans ce fonctionnement. La stabilisation de la délinquance dans le département de la Moselle montre l’engagement et la réactivité des services de l’Etat. Ceux-ci ont notamment résolus en 2011 des affaires de cambriolages en série, secteur sensible qui reste un objectif à privilégier. Les trois parquets de Metz, Sarreguemines et Thionville se sont fortement investis dans la politique pénale. L’activité de police judiciaire est dirigée avec pertinence. 69 875 affaires ont été traitées. Le déferrement des auteurs est assuré lorsque des atteintes sont portées à la sécurité des personnes et des biens, avec 1 260 personnes déférées devant les tribunaux de grande instance pour l’ensemble du département. Le traitement judiciaire est rapide sans être expéditif. 6 482 jugements correctionnels ont été rendus par les trois juridictions. Les sanctions requises sont adaptées et réalistes. Les peines prononcées sont exécutées plus facilement avec l’appui des bureaux d’exécution des peines.
Les Annonces de la Seine - jeudi 26 janvier 2012 - numéro 7
Rentrée solennelle Les garanties des droits des victimes sont respectées. Les mesures alternatives demeurent présentes tant dans les trois parquets qu’au sein des Maisons de justice et du droit de Woippy, Forbach et Faulquemont. 7 403 mesures ont été prises, dont 2 450 rappels à la loi. Toute politique pénale doit toutefois être expliquée aux magistrats du siège, aux justiciables et à nos partenaires. Il en va de notre crédibilité. En 2011, la cour d’appel, en sa qualité de juridiction propre, a rendu : - pour la chambre des appels correctionnels : 1 549 arrêts (majeurs, mineurs, application des peines, intérêts civils) ; - pour la cour d’assises : 26 arrêts pour 34 personnes jugées ; ce service est en augmentation en raison des appels des décisions rendues par les cours d’assises voisines ; - 1344 décisions ont été exécutées, contre 1 286 en 2010. (…) Sur le plan des réformes législatives, notre système judiciaire ne sera jamais un long fleuve tranquille. En 2011, la réforme d’importance a été celle de la garde à vue. Le 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel déclarait, en raison de l’absence de l’assistance d’un avocat au cours de celle-ci, le régime de la garde à vue non conforme à la constitution, Par quatre arrêts du 15 avril 2011, l’assemblée plénière de la Cour de cassation confortait la décision précédente et estimait ne pas devoir reporter dans le temps les effets de sa jurisprudence : - sur le droit à l’assistance d’un avocat auprès du gardé à vue, - sur la notification du droit au silence. Différentes dispositions transitoires étaient mises en place par la Chancellerie dans l’attente de la mise en place d’une nouvelle loi et de son entrée en vigueur le 1er juin 2011. Elle redonnait une définition plus exacte de la garde à vue. Celle-ci devenait une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire sous le contrôle de l’autorité judiciaire. La personne maintenue à la disposition des enquêteurs doit être soupçonnée d’avoir
commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement. Une mesure de garde à vue ne peut être ordonnée que dans le cadre d’objectifs suivants : - permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne, - garantir la présentation de celle-ci devant le Procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête, - empêcher que la personne ne modifie les preuves, les indices matériels, ne fasse pression sur les témoins, les victimes ou leur entourage, ou ne se concerte avec des co-auteurs ou complices, - enfin, de mettre fin à l’infraction. La garde à vue devient non obligatoire après un contrôle d’alcoolémie et de dépistage de stupéfiants au volant. La nouvelle loi met en place un nouveau dispositif d’audition libre ; toutefois, celui-ci a ses limites.
Procureur de la République pendant les premières 48 heures et du juge des libertés et de la détention au-delà de la 48ème heure. Le Procureur de la République est avisé des placements en garde à vue par tous moyens. Il en contrôle le déroulement. Il en ordonne la prolongation ; il décide du sort de la personne à l’issue de cette mesure. Le Conseil constitutionnel, le 18 novembre 2011, a validé l’intégralité de cette loi tant sur le plan des droits de la défense que sur le contrôle par les magistrats du ministère public qui font partie du corps judiciaire. Cette décision répond directement à la Cour européenne des droits de l’homme qui avait estimé que les magistrats du parquet ne seraient pas une autorité judiciaire susceptible de contrôler une restriction d’une liberté individuelle en raison de leur mode de nomination. Par ailleurs, le Garde des Sceaux s’est engagé lors de la nomination des magistrats du ministère public, tout en gardant son pouvoir
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La combinaison de la loi sur la garde à vue et notamment de son contrôle, associée à l’engagement du Garde des Sceaux, Jacques Pin va dans le sens de l’unité du corps judiciaire.
Ultérieurement, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 18 novembre 2011, considérera que cette audition libre ne peut perdurer que si la personne a été informée de la nature et de la date de l’infraction dont on la soupçonne ainsi que de la possibilité de quitter les locaux de police ou de gendarmerie. Les enquêteurs devront donc être très prudents dans ce domaine. L’innovation importante de cette loi, outre une véritable assistance au niveau des droits de la défense, confirme le renforcement du contrôle de la garde à vue par l’autorité judiciaire, garante de la sauvegarde des droits de la personne. La garde à vue s’exécute sous le contrôle du
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de proposition, à se conformer aux avis non conformes du Conseil supérieur de la magistrature. Il vient encore de le faire en matière disciplinaire. La combinaison de la loi sur la garde à vue et notamment de son contrôle, associée à l’engagement du Garde des Sceaux, va dans le sens de l’unité du corps judiciaire. Il s’agit d’une avancée non négligeable par rapport au dispositif antérieur. Telles sont les observations que le ministère public souhaitait développer. Je tiens également à souhaiter à chacun d’entre vous une année fructueuse en 2012.
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Jean-Louis Masson, Marie-Jo Zimmermann, Patrick Weiten, Richard Vignon et Dominique Gros
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Rentrée solennelle
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Henri-Charles Egret
Une charge nouvelle et délicate par Henri-Charles Egret (…) ’audience solennelle de rentrée de la cour d’appel, en cette période de vœux, est l’occasion de rendre compte de notre activité judiciaire d’une année, d’expliquer nos objectifs, nos priorités à venir sans jamais céder à la pente facile de l’autosatisfaction. La justice est l’affaire de tous. Le principe de la publicité est consubstantiel à l’œuvre de justice. La plaquette mise à votre disposition vous montre les évolutions de notre contentieux. La création d’un nouveau site intranet de la cour d’appel et des juridictions du ressort au début de l’année 2011 souligne l’importance que nous attachons à la communication dans notre cour d’appel. Nous avons attiré l’attention de la Chancellerie sur la situation critique des chambres civiles de la cour d’appel qui malgré un ratio de performance des magistrats et des fonctionnaires conforme à la moyenne des cours d’appel voire supérieur, n’a pu faire face à l’augmentation du contentieux de ces dernières années. Un exemple, pour l’année 2010 : la cour d’appel a enregistré une forte augmentation du nombre d’affaires nouvelles de plus de 10 %. La conjoncture économique défavorable de la Lorraine et la dégradation du tissu industriel qui l’accompagne ont en effet engendré un accroissement des affaires que la cour d’appel n’a pas pu traiter dans les délais satisfaisants faute d’effectif suffisant. Au vu de cette situation particulièrement préoccupante, qui s’est encore détériorée en
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raison des vacances de poste de magistrats et des fonctionnaires du greffe, nous avons obtenu de la Chancellerie un contrat d’objectif qui a été signé le 12 mai 2011 entre les chefs de cour et le directeur des services judiciaires et qui prévoit pendant la durée de cette convention un surnombre de deux présidents de chambre et d’un conseiller ainsi que le plein effectif des greffiers. Conformément aux objectifs fixés, une chambre civile supplémentaire a été créée, les autres chambres civiles ont été renforcées. Pour la réalisation de ces objectifs, un effort de réflexion des magistrats et des fonctionnaires du greffe sur leur méthode de travail a été entrepris avec le concours de la Chancellerie, de la Direction générale pour la modernisation de l’Etat et la société Capgemini. Cette réflexion se poursuit dans le cadre d’un groupe de travail comprenant magistrats, fonctionnaires du greffe et avocats, organisée par la Chancellerie qui a pour but de partager les bonnes pratiques identifiées dans les juridictions. Pour apprécier l’impact de ces mesures, un suivi statistique précis est effectué chaque mois et doit permettre à chaque président de chambre et aux conseillers de faire le point avec le premier président sur l’organisation du service. Les chambres pénales de la cour dans l’ensemble fonctionnent bien. Un effort particulier a été porté depuis deux ans sur les intérêts civils ce qui a permis une importante diminution du stock. L’augmentation des affaires traitées par la chambre des appels correctionnels a permis une baisse de 15% du stock par rapport à 2010. Je remercie tout particulièrement monsieur le président de cette chambre de son engagement. En 2011, la cour d’assises de la Moselle a connu une forte progression des affaires nouvelles, la Cour de cassation nous ayant saisi de plusieurs dossiers en appel.
Cette année à nouveau nous avons réussi à faire face aux nombreuses réformes malgré les difficultés que nous rencontrons à la cour d’appel et dans les juridictions du ressort notamment en termes d’effectif et de budget contraint. Nous avons été choisis comme site expérimental pour la réorganisation des extractions judiciaires qui ont été confiées à l’administration pénitentiaire et non plus à la police et à la gendarmerie qui restent cependant engagées dans la période expérimentale à hauteur d’environ 40% des extractions. Nous avons mis en place l’importante réforme de l’hospitalisation sans consentement des personnes nécessitant des soins psychiatriques, qui prévoit l’examen systématique par le juge des libertés et de la détention au bout de 15 jours et tous les 6 mois pour toutes les hospitalisations sans consentement. Cette ordonnance du juge des libertés est susceptible de recours devant la cour d’appel qui doit statuer à « bref délai ». Cette lourde charge nouvelle touche toutes les juridictions et principalement le tribunal de grande instance de Sarreguemines avec son unité de malades difficiles U.M.D (110 affaires examinées par mois par le juge des libertés et de la détention) et de Metz (100 affaires examinées par mois par le juge des libertés et de la détention). Le contentieux de la rétention des étrangers continue de donner une charge particulièrement lourde au tribunal de grande instance de Metz et à la cour d’appel en raison de la compétence nationale du nouveau centre de rétention situé à Metz-Queuleu et de la fermeture provisoire du centre de rétention en Alsace. Le Conseil constitutionnel a rappelé dans plusieurs décisions récentes que la compétence du juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle, trouve directement à s’exercer en cas de privation de liberté dans le cadre d’une garde à vue, du placement de l’étranger en rétention administrative, du malade hospitalisé sans son consentement pour bénéficier de soins psychiatriques. Ce rappel des compétences du juge des libertés souligne la charge croissante du juge judiciaire dans toutes ces réformes. Suite à la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, tout justiciable peut aujourd’hui invoquer l’inconstitutionnalité d’une loi déjà entrée en vigueur devant les juges de première d’instance ou d’appel. Ce juge a maintenant pour mission d’accepter ou de refuser la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à la Cour de cassation, qui statue dans les brefs délais sur sa transmission au Conseil constitutionnel. Le juge se trouve ainsi devant une charge nouvelle et délicate. Cette année 2011 nous avons avec les juges de l’application des peines, l’administration pénitentiaire et les comités de probation continué de mettre en place l’importante réforme du 24 novembre 2009 qui entend développer encore davantage les aménagements de peines dans l’optique de mieux prévenir la récidive en renforçant le caractère exceptionnel de la détention provisoire avec la création de l’assignation à résidence sous surveillance électronique. D’autres réformes ont été mises en place cette année qui ont demandé un effort d’organisation et de méthode.
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Rentrée solennelle La prise en charge par le tribunal de grande instance à compter du 8 février 2011 de la gestion du contentieux des tutelles mineurs qui était de la compétence des tribunaux d’instance, et en juillet 2011 la réforme de la garde à vue que vient de développer Monsieur le Procureur général. En janvier 2011, une importante réforme procédurale en matière civile est intervenue à la cour d’appel. Elle fixe de nouvelles règles notamment pour la mise en état et impose de nouveaux délais aux parties.
des peines et de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel. Cette réforme est mise en place cette année, à titre expérimental, dans les cours d’appel de Toulouse et de Dijon et si cette expérience est concluante pourrait s’appliquer dans d’autres cours d’appel en 2014. Cette loi prévoit aussi dès 2012 de nouvelles règles de majorité de la cour d’assises et la motivation des arrêts de la cour d’assises, la réduction du nombre de jurés populaires dans les cours d’assises passant de 9 à 6 en première
Agenda
EXPOSITION
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On attend de la justice qu’elle offre une prestation de qualité. Dans ce sens l’amélioration de l’accueil du justiciable dans les tribunaux de grande instance et à la cour s’est poursuivie notamment par la mise en place dans de nouvelles juridictions de la charte Marianne ainsi que par le développement de l’accès à la justice pour les personnes les moins favorisées avec l’action Henri-Charles Egret soutenue des bureaux d’aide juridictionnelle.
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C’est ainsi que les déclarations d’appel et les constitutions d’avocats se font, depuis le 1er octobre 2011, par voie électronique. Tout en tenant compte des contraintes des avocats et du greffe, il nous faudra poursuivre cette réforme en instaurant une mise en état électronique avant la fin de l’année 2012, ce qui constituera un pas supplémentaire dans la dématérialisation des procédures et permettra, par voie électronique, aux avocats de déposer leurs conclusions, de communiquer avec les magistrats et d’accéder à l’historique de leurs affaires. La loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et des mineurs a été publiée au Journal Officiel du 11 août 2011. Cette loi prévoit la présence de deux citoyens tirés au sort sur les listes électorales siégeant aux cotés des magistrats au sein du tribunal correctionnel et de la chambre des appels correctionnels pour juger certains délits passibles d’au moins 5 ans d’emprisonnement et au sein du tribunal de l’application
Viviane Schmitzberger-Hoffer
instance et de 12 à 9 en appel ainsi qu’un rapport oral du président de la cour d’assises en début d’examen de chaque affaire qui remplacera la lecture de l’arrêt de renvoi. Cette loi établit également la création d’un tribunal correctionnel présidé par un juge des enfants pour les mineurs récidivistes de 16 à 18 ans. Notre cour d’appel, comme les autres cours, connaît ainsi continuellement de nombreuses réformes dans tous les domaines ce qui demande à chacun de faire preuve de grandes qualités d’adaptation qu’il convient de souligner tout particulièrement. Enfin, suite à la directive européenne de 2008 ayant pour objet d’améliorer le régime de la médiation au sein de la justice, je salue les efforts fait par les juridictions du ressort pour développer la médiation judiciaire qui est un véritable mode autonome et alternatif du règlement des litiges. C’est une voie procédurale à part entière qui permet à un conflit engagé dans la voie du contentieux judiciaire d’être réorienté vers un traitement consensuel sous l’égide du juge avec la participation des parties et de leurs avocats. Je souhaite que la médiation judiciaire se développe encore plus dans le ressort de notre cour d’appel. A cet effet, j’ai désigné des magistrats de la cour d’appel pour soutenir cet effort avec la collaboration des avocats et des structures de médiation. En matière budgétaire la loi organique relative à la loi de finances, la Lolf, nous a fait passer d’une gestion de moyens à une gestion de résultats avec un impératif de performance et nous a contraints à nous fixer des objectifs et à rendre compte des résultats obtenus. Jusqu’en 2011, les 35 cours d’appel étaient titulaires d’un budget opérationnel de programme et les chefs de cour étaient ordonnateurs secondaires conjoints.
Albert Gallatin Un Genevois aux sources du rêve américain 1761-1849 jusqu’au 17 mars 2012 Bibliothèque de Genève BGE Parc des Bastions - Genève (Suisse) Renseignements : +41(0)22 418 28 00/14 www.ville-ge.ch/bge
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DINER
Dîner festif des femmes juristes et entrepreneures 30 janvier 2012 Sénat Renseignements : Odile Lajoix 06 79 64 80 01
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SALON
Salon des entrepreneurs 1er et 2 février 2012 Palais des Congrès - Paris Renseignements : www.salondesentrepreneurs.com
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COLLOQUE CYCLE HISTOIRE ET JUSTICE 2012 : LES ÉCRIVAINS EN JUSTICE
Les écrivains médiévaux dans les geôles pontificales d’Avignon au XIVème siècle Le cas de Jean de Roquetaillade 9 février 2012 Cour de cassation - Paris 1er Renseignements : www.courdecassation.fr
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SÉMINAIRE UIA
Le droit de la famille face à la crise financière actuelle 16 et 17 mars 2012 Saragosse - Espagne Renseignements : 01 44 88 55 66 uiacentre@uianet.ort - www.uianet.org
Les Annonces de la Seine - jeudi 26 janvier 2012 - numéro 7
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Rentrée solennelle cours d’appel et les autres cours d’appel responsables d’unité opérationnelle. Le service administratif régional qui a prouvé sa grande compétence et son sens du service public reste l’outil privilégié pour aider les chefs de cour dans la gestion des ressources humaines et la gestion des moyens. En conclusion, dans le domaine de l’administration des juridictions, Monsieur le Procureur général et moi-même en notre qualité de responsables d’unité opérationnelle et d’ordonnateurs secondaires, nous continuerons à maîtriser notre plafond d’emploi, nos frais de justice,
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Pascal Bourguignon
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Dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (la RGPP), le ministre de la Justice et des Libertés s’est engagé à mettre en place des plateformes interrégionales et interdirectionnelles des services à compter du 1er janvier 2012. La conférence des premiers présidents a rappelé que l’indépendance de moyens était nécessaire à l’indépendance de la justice et a obtenu que les budgets des cours et tribunaux ne soient pas administrés par ces plateformes dirigées par le secrétaire général du ministre de la Justice et a obtenu que 10 cours d’appel soient responsables du budget opérationnel de programme et ordonnateur secondaire conjoint et que les autres cours d’appel soient responsables d’unité opérationnelle, et demeurent ordonnateurs secondaires conjoints. Pour le bon fonctionnement de cette nouvelle gouvernance budgétaire ont été prévues des organes de concertation entre la Chancellerie et les 10 cours d’appel responsables de budget opérationnel de programme et entre ces dix
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Jacques Pin et Henri-Charles Egret
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Dans ce sens l’amélioration de l’accueil du justiciable dans les tribunaux de grande instance et à la cour s’est poursuivie notamment par la mise en place dans de nouvelles juridictions de la charte Marianne ainsi que par le développement de l’accès à la justice pour les personnes les moins favorisées avec l’action soutenue des bureaux d’aide juridictionnelle. L’accès aux droits à travers l’action du Conseil départemental de l’accès aux droits de la Moselle (CDAD), présidé par le président du tribunal de grande instance de Metz, la création de nouvelles maisons de justice et du droit, dont
Notre cour d’appel, comme les autres cours, connaît ainsi continuellement de nombreuses réformes dans tous les domaines ce qui demande à chacun de faire preuve de grandes qualités d’adaptation qu’il convient de souligner tout particulièrement.
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Henri-Charles Egret
les crédits d’aide juridictionnelle, à gérer le budget du ressort dans le contexte du maintien strict des finances publiques, à poursuivre la rationalisation de la dépense ainsi qu’à procéder à une évaluation rigoureuse de chacun des postes budgétaires afin de déterminer des priorités. Nous continuerons aussi à participer activement, dans le cadre de la mise en place des organes de concertation, au dialogue de gestion où nous mettrons en valeur les besoins des juridictions de notre cour d’appel et la performance des magistrats et fonctionnaires du greffe de notre ressort. On attend de la justice qu’elle offre une prestation de qualité.
celle de Faulquemont inaugurée récemment par Monsieur le Garde des Sceaux, le développement des points d’accès aux droits, est une priorité pour nous tous et participe activement à cette justice de qualité. Cette année, la création d’un bureau d’exécution des peines à la cour d’appel dans le prolongement de ceux créés dans les juridictions participe à cet effort d’une justice plus réactive et plus efficace comme la mise en place des différents bureaux d’aide aux victimes. Nous devons tous, par un travail d’équipe entre les magistrats, les fonctionnaires du greffe et les avocats qui sont partis prenantes à toutes ces réformes, réussir à moderniser nos méthodes afin de réduire nos délais de jugement et nos stocks d’affaires à traiter. Tous nos efforts vers une plus grande transparence de notre travail, vers une plus grande efficacité de notre activité, nous permettent de rendre une meilleure justice pour nos citoyens au nom de qui nous jugeons quotidiennement. Le juge doit être non seulement le protecteur des libertés individuelles mais aussi le régulateur des conflits privés et publics, celui qui au nom du peuple français rend la justice en restituant aux justiciables sa dignité. Le juge doit veiller à respecter une éthique professionnelle exigeante, resté convaincu que son intervention est un facteur essentiel d’équilibre, de stabilité et de paix sociale. Il doit être l’homme ou la femme qui sait écouter et avec humilité, discrétion, en dehors de toute pression, trancher, décider, en respectant la règle de droit et en poursuivant cet objectif d’humanité pour rendre une justice soucieuse du bien commun et des attentes du justiciable. Cette justice qui doit mériter la confiance et le respect sera d’autant mieux acceptée et exécutée qu’elle s’inscrit dans une démarche d’information et d’explication. (…)
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Rentrée solennelle
Cour d’Appel de Douai 5 janvier 2012 La Rentrée Solennelle de la Cour d’Appel de Douai s’est tenue dans la salle d’audience du Parlement de Flandres ce 5 janvier 2012 en présence de nombreuses autorités politiques et judiciaires. Olivier de Baynast, qui a été installé à la tête du Parquet Général de Douai il y a quelques mois seulement en octobre 2011, a consacré son discours à l’application de la loi dans cette région du Nord Pas-de-Calais durement frappée par la crise économique, celle-ci étant « elle-même facteur de délinquance ». Dans ce contexte difficile, le Procureur Général a indiqué ressentir « comme une obligation » d’en « corriger les effets les plus injustes. » Il a ainsi évoqué un certain nombre de thèmes, parmi lesquels la protection de l’environnement, la justice des mineurs, en insistant sur le rôle de prévention des Parquets ou encore la dimension internationale du ressort qui est fortement touché par la délinquance transfrontalière. Il souhaite appuyer son action en ce domaine sur « la remarquable expertise acquise » par les magistrats de la Juridiction Inter-Régionale Spécialisée, la JIRS de Lille, estimant qu’elle est la « meilleure de France ». Evoquant ensuite le statut du Ministère Public, Olivier de Baynast a fermement rappelé que « la position du Garde des Sceaux au sommet de l’administration du Parquet » lui permet de veiller à ce que tous les Procureurs en tant que « garants de l’unité de l’action publique de Douai à Aix-en-Provence », appliquent également la loi. La Première Présidente Dominique Lottin a ensuite consacré son propos à l’é volution des contentieux civils et pénaux. La forte inflation législative a élargi les missions du juge, sans pour autant s’accompagner « dans des proportions suffisantes de l’e xtension de ses moyens ». Le contrôle plus strict de la garde à vue, mais aussi la réforme des tutelles comme celle du contrôle des hospitalisations d’office ont considérablement étendu les compétences judiciaires dans le domaine de la garantie des libertés individuelles. S’il convient en conséquence de faire des choix dans le traitement des contentieux, le jugement des affaires pénales les plus complexes « qui ne doivent pas être délaissées au profit d’une politique du chiffre qui tendrait à privilégier le traitement des procédures rapides les plus simples ». La Première Présidente a ainsi plaidé pour qu’une réflexion soit engagée avec les dix Procureurs de la République du ressort afin de trouver « les justes équilibres dans des projets de juridictions qui concilient efficacement justice civile et justice pénale ». Jean-René Tancrède puisque j’ai déjà rendu visite à l’ensemble des dix tribunaux de grande instance et que j’ai été amené à rencontrer des dizaines de responsables dont nombre d’entre vous. (…) J’aborderai en premier lieu le sujet sur lequel j’ai sans doute le plus de raisons de m’exprimer devant vous, c’est-à-dire l’exercice de l’action publique - au sens large c’est-à-dire l’application de la loi - dans un ressort durement frappé par la crise économique, la crise étant elle-même facteur de délinquance. Permettez-moi d’aborder d’emblée la question des moyens : je ne veux pas ici vous assommer par des considérations déjà faites, même si elles reflètent parfaitement la vérité : les postes vacants dans les greffes, la difficulté d’attirer et de fidéliser des magistrats dans certains ressort, le nombre bien naturel des congés maternité compte tenu de la jeunesse de nos effectifs, l’inconfort matériel de certaines juridictions comme Douai, Valenciennes et Boulogne même avec l’espoir des travaux déjà engagés ou à venir. (…)
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Olivier de Baynast
I. La justice des mineurs
Humanisme et fermeté par Olivier de Baynast l peut paraître un peu paradoxal de faire un discours de rentrée à peine quatre mois après mon installation dans ce ressort. Pourtant je me sens plus légitime pour parler de la vie judiciaire, vue du parquet
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En ce début d’année je n’aborderai qu’un nombre restreint de thèmes et je commencerai par la justice des mineurs. Nous sommes une région jeune, fragilisée par la crise, le chômage et la précarité mais nous sommes aussi une région riche d’hommes et de femmes avec d’immenses potentialités et de grandes disparités. C’est pourquoi je veux que soit pris en compte parmi les missions des parquets, leur rôle dans la prévention, le travail qu’ils accomplissent avec les élus de la région, des conseils généraux dont
l’engagement que je salue est considérable, des mairies. Je demande aux procureurs de beaucoup s’investir dans ces missions, de travailler main dans la main avec les élus, la protection judiciaire de la jeunesse et que dans chaque tribunal une politique de juridiction respectueuse des compétences de chacun et de l’indépendance des juges soit affirmée en particulier pour les mineurs. Elle pourra s’articuler autour des thèmes constants : l’absentéisme scolaire, la drogue, l’alcool. A la suite de mon récent échange avec madame le Recteur je suis persuadé qu’il y a une marge de progrès à la coopération entre la justice et l’Education nationale et je demande aux procureurs d’y œuvrer de concert avec les inspecteurs d’académie.
II. La prison Notre région comporte de nombreux établissements pénitentiaires (11 au total dont 5 maisons d’arrêt) où œuvrent de nombreux personnels autour de quelques 3 700 détenus, chiffre sans doute jamais atteint. Je sais les efforts que font directeurs et surveillants, souvent admirables dans des conditions de travail considérablement compliquées par la surpopulation de toutes les maisons d’arrêt : 228% à Béthune, 200% à Valenciennes avec des matelas par terre. De son côté l’administration pénitentiaire a de grands projets de construction, des établissements vétustes sont fermés comme Loos, d’autres comme Lille, Annœulin les remplacent. Je suis allé rencontrer le directeur de l’Administration pénitentiaire, Monsieur Masse et le contrôleur géné-
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Rentrée solennelle ral des lieux de privation de liberté Monsieur Delarue que je remercie de leur écoute. Un magistrat du parquet général, Monsieur Charon est à mes côtés spécialement chargé des questions pénitentiaires qui pour moi traduisent le bon fonctionnement ou non d’une société démocratique. Nous développerons encore les alternatives à l’emprisonnement : le bracelet électronique, la surveillance électronique en fin de peines, la semi-liberté. Mais la réinsertion n’est pas une science exacte et qu’on cesse de nous tomber dessus à bras raccourcis à chaque fois qu’un délinquant réitère ou récidive surtout quand notre société ne sait pas se doter d’autant de médecins psychiatres qu’elle devrait et dont nous avons besoin pour nous éclairer sur la personnalité des personnes condamnées. Mais on ne peut pas supprimer la prison alors, n’en faisons pas des pourrissoirs : que l’offre d’enseignement y soit suffisante, que le travail y soit offert en priorité : c’est un moyen de réparation envers les victimes et aussi de préparation à la sortie, que les moyens de l’exécution et de l’application des peines soient reconnus comme prioritaires. Il faut que tous les effets négatifs induits par la surpopulation soient combattus : une attention particulière doit être accordée au travail pénitentiaire, aux visites, au courrier, aux soins, à la prévention du suicide. En cette période de vive tension d’effectifs sur nos maisons d’arrêt, je demande aux procureurs d’être en contact étroit avec les directeurs d’établissements pour m’informer de toutes les difficultés. En effet pour une juridiction, avoir un établissement dans son ressort est une responsabilité considérable et ressentie comme telle. Il y a eu récemment des divergences de vues sur telle ou telle répartition des tâches qui doivent être résolues d’urgence et qui auraient déjà dû l’être, chacun se mettant à la place de l’autre et non pas renvoyant la balle à l’autre. Pour avoir assisté à la commission d’évaluation de l’établissement pour mineurs de Quiévrechain le 29 décembre dernier, je puis attester du travail remarquable des magistrats de la jeunesse, des enseignants, de la Protection judiciaire de la jeunesse, des surveillants, des aumôniers, des visiteurs, du personnel soignant de cet établissement, que nous avons la chance d’accueillir dans notre ressort. Je rêve que toutes les prisons soient comme celles-ci : éducatives et protectrices.
III. La protection de l’environnement Quittant la Picardie et découvrant cette région, je suis étonné de constater que la protection de l’environnement n’était jusqu’ici, pas suffisamment un sujet pour la justice. C’est comme si nous étions restés à la traîne avec une vision du Nord Pas-de-Calais héritée du dix-neuvième siècle selon laquelle le Nord Pasde-Calais c’est l’industrie et son lot inévitable de pollution et de constructions disgracieuses. Je trouve cela désolant. Qui n’a pas admiré toute la partie côtière du Boulonnais, les marais de l’Audomarois, le pays d’Avesnes-surHelpe, la Flandre dans son ensemble. Que de paysages ravissants mais ô combien fragiles,
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combien d’envolées d’oiseaux migrateurs attirés par ces délicates zones humides qui régressent progressivement pour laisser place à ces ignobles centres commerciaux à l’américaine. Il est temps de nous ressaisir et je demande aux procureurs de se rapprocher de tous les services d’inspection techniques et des municipalités, de prêter attention aux associations reconnues et de mener une politique d’action publique hardie en matière de protection de l’environnement par le droit pénal. Ils le feront en utilisant toutes les possibilités offertes par la législation et la procédure, par exemple par la remise en état des lieux dégra-
Nous sommes bénéficiaires de l’ouverture des frontières qui fait de notre région une des plus actives et même des plus riches, même si une grande part de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté et n’a pas de travail. Par contre nous sommes frappés de plein fouet par la délinquance transfrontalière qui profite de l’ouverture des frontières et des difficultés de la coopération avec la Grande-Bretagne et les PaysBas et des différences entre les systèmes juridiques : c’est un peu comme si les seules frontières qui demeurent concernaient seulement les juges, les policiers et les gendarmes et que les délinquants savaient en jouer avec dextérité.
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Mais la réinsertion n’est pas une science exacte et qu’on cesse de nous tomber dessus à bras raccourcis à chaque fois qu’un délinquant réitère ou récidive surtout quand notre société ne sait pas se doter d’autant de médecins psychiatres qu’elle devrait et dont nous avons besoin pour nous éclairer sur la personnalité des Olivier de Baynast personnes condamnées.
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dés ou la suspension de peine en attendant la mise en conformité notamment en matière de stations d’épuration. J’espère voir un jour des audiences spécialisées dédiées à ces contentieux. On l’a fait à Amiens pourquoi pas ici ! Je sais que nous sommes complètement d’accord, Monsieur Pascal, directeur régional de l’Equipement, de l’Aménagement et du Logement et moi et d’ailleurs j’ai eu la chance d’ouvrir il y a quelques jours une réunion associant services de l’environnement de la région et magistrats sur ce thème et j’ai senti que notre détermination à agir était égale. Un magistrat du parquet général Monsieur Chaillet est chargé de suivre les progrès que nous accomplirons pour protéger l’environnement cette année.
IV. La coopération internationale Comme je l’avais indiqué lors de mon audience de présentation, le ressort de la Cour d’appel de Douai me paraît caractérisé en ce qui concerne la vie judiciaire par une dimension internationale et européenne sans équivalent. Ecoutez seulement ces chiffres : Sachez par exemple qu’en 2011 nous avons été requis pour interpeller 218 personnes sur mandat d’arrêt européen et toutes ces requêtes ont été examinées par la Cour ; nous avons dû effectuer près de 80 enquêtes sur commission rogatoires internationales dont 52 à la demande des Etats membres de l’Union européenne. Evidemment mon cher Claude, procureur général de Mons, venu en voisin, notre coopération avec la Belgique est exemplaire et ne demande qu’à se développer. Nous avons d’ailleurs entre nous un groupe de travail très concret à ce sujet mais il y a encore entre pays europées bien des progrès à faire.`
Certes des progrès ont été réalisés, grâce à Eurojust, grâce au mandat d’arrêt européen, grâce au développement d’une culture judiciaire commune qui fait que juges et procureurs des différents pays prennent l’habitude de travailler ensemble. Mais je voudrais que mon action soit marquée par de nouveaux progrès en matière de coopération internationale. Pour cela je m’appuierai en priorité sur la remarquable expertise acquise par les magistrats de notre Juridiction interrégionale spécialisée, la JIRS de Lille qui pour moi est la meilleure de France ainsi que sur les policiers et les gendarmes qui travaillent avec elle. Avec moi M. de Phily, substitut général est chargé de développer cette action. Nous allons commencer au cours du prochain semestre par un travail pratique sur la coopération avec la Grande-Bretagne. Le Tribunal de grande instance de Boulogne, connaisseur en la matière nous apportera son expérience pour rechercher les progrès souhaitables dans la coopération avec ce pays.
V. Conclusion Nous vivons une crise profonde, chacun le sait. Notre devoir est de protéger les plus faibles de nos concitoyens contre ses effets et d’abord les jeunes en les empêchant de sombrer dans la délinquance ou d’y demeurer. Notre devoir est aussi d’assurer la sécurité de nos concitoyens dans la difficulté. Certes la justice est un humanisme mais cela n’exclut pas la fermeté. Frapper la délinquance organisée reste un objectif premier et en particulier l’atteindre dans ses moyens comme y sont souvent si bien parvenus au cours de l’année écoulée vos services mon Général et Messieurs les directeurs de la Police judiciaire et des Polices urbaines. Notre devoir est aussi de protéger les victimes en organisant nos juridictions pour que leur accès à la justice soit simplifié.
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Rentrée solennelle de l’intérêt public que nous sommes, je dis bien : il décide. Comme magistrats du parquet, sommes-nous indépendants ? Le suis-je ? Si indépendance veut dire : le pouvoir de faire n’importe quoi, quoi qu’en dise la loi, soit en procédure, soit au fond alors, je ne suis pas indépendant et d’ailleurs le juge non plus. Si indépendance veut dire : faire appliquer la loi sans que personne ne puisse m’en empêcher alors oui, je suis indépendant et la position du garde des Sceaux au sommet de l’administration du parquet ne lui permet pas de m’en empêcher, il ne le cherche pas d’ailleurs je puis vous en assurer. Par contre il peut veiller par mon intermédiaire à ce que tous les procureurs appliquent également la loi, c’est une des grandes traditions de notre Etat qu’il ne faut pas remettre en cause, nous ne sommes pas des roitelets dans nos parquets mais garants de l’unité de l’action publique de Douai à Aix-en-Provence. Mais l’indépendance est aussi une vertu qui doit souvent s’appuyer sur une qualité : le courage et là : moi procureur, je rejoins le juge : comme lui je peux avoir ce courage ou au contraire dans mes actes rechercher ce qui fera plaisir à l’exécutif, à la presse, à mon milieu social, à mon goût du loisir, etc. Mais alors si je faillis, il faut m’en punir disciplinairement, cela n’est pas induit par mon appartenance au parquet et ma déontologie et
Un juste équilibre
sociale. Tel est l’objet de mon propos en cette audience de rentrée 2012. L’extension des compétences judiciaires dans le domaine de la garantie des libertés individuelles s’est d’abord traduite par la réforme de la garde à vue et l’intervention du juge du siège pour en assurer un contrôle beaucoup plus strict. Conditions de la garde à vue également plus restrictives dans le cadre des procédures initiées pour les étrangers en situation irrégulière. Et dans ce domaine, le ressort de la Cour d’appel de Douai est particulièrement impacté par la réforme avec plus de 1 600 procédures contrôlées par les juges des tribunaux de Lille et de Boulogne et plus de 600 appels soumis à la cour chaque année. Mais c’est surtout dans les domaines de la protection des personnes atteintes de troubles mentaux que l’extension des compétences du juge judiciaire est la plus significative. Permettez-moi en quelques traits d’évoquer la réforme des tutelles, celle du contrôle des hospitalisations d’office et celle, encore plus emblématique pour le juge, du suivi des délinquants notamment sexuels atteints de troubles mentaux. S’agissant des deux premières (la réforme des tutelles et celle du contrôle des hospitalisations d’office), elles sont le fruit d’une lente évolution historique qui tend à reconnaître des droits à ceux que l’on a trop longtemps catalogués dans la rubrique des « fous ». La réforme des tutelles des incapables majeurs est entrée en vigueur progressivement en 2009 et 2010. Il s’agit des mesures de protection mises en œuvre pour les personnes qui ne sont plus en mesure de gérer elles-mêmes leurs affaires
par Dominique Lottin (…) l nous est apparu important, à l’issue d’une année particulièrement riche en réformes touchant l’institution judiciaire, d’évoquer, en cette audience solennelle, l’évolution des contentieux civils et pénaux qui nous sont désormais soumis et les équilibres à trouver entre les différentes procédures. Traditionnellement les juridictions de l’ordre judiciaire étaient définies comme celles chargées de « régler les litiges entre les personnes et de sanctionner les auteurs d’infractions aux lois et règlements ». Dix ans après le début de XXIème siècle, nous sommes bien loin de cette définition très restrictive de notre champ de compétences. En effet, sous les effets conjugués de la jurisprudence des instances européennes et des avis du Conseil constitutionnel, le juge judiciaire est avant tout devenu le garant des libertés individuelles et le juge de droit commun du règlement des litiges. Malgré quelques efforts pour enrayer cette inflation procédurale et multiplier le recours à des procédures alternatives, force est de constater qu’à une époque où les ressources étatiques se font de plus en plus rares, cette extension permanente de nos compétences nous contraint à faire des choix et à privilégier le traitement de certaines procédures. Ces choix doivent être réfléchis et guidés par le seul intérêt des justiciables et le souci de répondre à notre mission première qui est de garantir la paix
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mon serment auraient dû m’en dissuader. Reste mon statut et à la différence des juges, un avis positif du Conseil supérieur de la magistrature, organe constitutionnel indépendant, n’est pas nécessaire pour que je sois nommé et si je commets une faute, mon sort relève en dernier ressort du ministre et pas du Conseil supérieur de la magistrature. Même si la pratique de notre ministre rapproche notre statut de celui de juges, il reste à faire entrer ce rapprochement dans la loi. Comme le collège des procureurs généraux et la Conférence des procureurs, je souhaite personnellement que cela soit fait ! Mais en attendant je demande à ce que le parquet soit respecté, y compris de la part de la presse, y compris dans des plaidoiries de ténors à la mode qui nous présentent parfois comme de suppôts du pouvoir. Oui, parquet et siège sont les deux piliers de cette institution démocratique qu’est la justice, qui ne peut d’ailleurs accomplir sa mission sans les avocats veilleurs par fonction sur les libertés individuelles grâce à ce rapport de proximité avec les individus, que nous ne pouvons pas avoir de la même façon. Il peut y avoir de mauvais procureurs, de mauvais juges, de mauvais greffiers, de mauvais avocats mais nos missions sont nobles et méritent le respect car les respecter c’est aussi respecter l’Etat de Droit. (…)
Dominique Lottin
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Dans notre domaine de compétence, je ressens comme une obligation de corriger les effets les plus injustes de la crise. Nous le ferons en utilisant des moyens nouveaux comme le recours à l’Agence de recouvrement des avoirs criminels saisis dirigée efficacement par Madame Elisabeth Pelsez dont je salue la présence aujourd’hui. En ce temps qui frappe durement beaucoup de foyers de notre région, les fraudes, les comportements antisociaux, la violation des règles concernant l’utilisation des fonds publics, sont ressentis par tous comme particulièrement insupportables. Que chacun sache notre grande détermination à poursuivre et faire sanctionner ces comportements, en liaison avec les finances publiques et les douanes et en bonne coordination avec la Chambre régionale des comptes ! En conclusion, quelques méditations que m’a suggéré la préparation de la conférence semestrielle sur l’exécution des peines regroupant siège et parquet et qui fut un succès. Je suis un magistrat du parquet, je fus un juge, je fais partie du corps judiciaire. Que cela signifie-t-il ? Le Parquet veille à l’application de la loi. Dans notre système, en présence d’une infraction il décide de poursuivre ou de ne pas poursuivre. Au juge de décider de la culpabilité et de la peine. Le juge décide, il n’arbitre pas entre une défense des intérêts privés et les représentants
ou de prendre les décisions qui s’imposent pour leur santé, en raison d’une altération de leurs facultés, du fait d’un handicap, d’une maladie mentale, d’un accident ou de l’âge. Cette réforme est fondamentale dans une société où l’allongement de la durée de vie se traduit inexorablement par l’accroissement des maladies dégénératives à l’origine de démences
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Rentrée solennelle séniles telles que la maladie d’Alzheimer. En France, on estime à plus de 800 000 le nombre de personnes faisant l’objet d’une mesure de protection juridique. Pour le seul ressort de la Cour d’appel de Douai, ce sont plus de 45 000 procédures qui sont suivies par les 51 juges d’instance du ressort. La réforme a consisté principalement à limiter dans le temps les mesures de protection, obligeant le juge à revoir régulièrement le régime de protection mis en place en fonction de l’évolution de l’état de santé du majeur. C’est un très important travail pour les juges des tutelles du ressort ; mais faute de temps et surtout de personnel de greffe, il n’est pas certain qu’avant la fin de la première échéance qui est celle du 1er janvier 2014 toutes les décisions de renouvellement aient pu être prises.
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pouvons compter sur vous pour engager rapidement ce chantier et que nous aurons l’occasion de l’é voquer lors d’une de nos prochaines rencontres. Deuxième réforme emblématique, celle du contrôle des « hospitalisations d’office » ou à la demande d’un tiers qui est entrée en vigueur cet été et plus précisément le 1er août 2011. L’origine de la réforme tient à la décision du Conseil constitutionnel du 26 novembre 2010 qui a rappelé que conformément à l’article 66 de notre Constitution « Nul ne peut être arbitrairement détenu », le juge judiciaire étant constitutionnellement le garant du respect de ce principe. La tâche est délicate pour le juge car il doit concilier deux exigences parfois contradictoires : protéger les libertés individuelles et
Force est de constater qu’à une époque où les ressources étatiques se font de plus en plus rares, cette extension permanente de nos compétences nous contraint à faire des choix et à privilégier Dominique Lottin le traitement de certaines procédures.
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Le second volet de la réforme des tutelles a consisté à donner compétence à la cour pour connaître des appels des décisions rendues par les juges d’instance et non plus au tribunal de grande instance. Le législateur a souhaité ainsi marquer l’importance de ces mesures pour le majeur protégé. Ce sont désormais près de 300 procédures qui sont soumises à la cour d’appel de Douai par an. 60% d’entre elles portent sur la contestation même de la mesure de protection mise en place et 30 % sur le choix de la personne en charge de l’exercice de la mesure. Signe de l’importance du débat ainsi porté devant la cour, nous avons fait le choix de tenir toutes les audiences en collégialité c’est-à-dire devant trois magistrats spécialisés de la cour, assistés d’un greffe également spécialisé et dans des locaux adaptés pour que les personnes handicapées puissent s’y présenter en personne. Le barreau accompagne très largement cette réforme puisqu’il apporte son assistance dans près d’1/3 des affaires. La cour s’emploie également à contenir la procédure d’appel dans le délai moyen de 5 mois parce que derrière chaque procédure se cache trop souvent le drame d’une famille frappée par la maladie, un accident ou le grand âge d’un proche ; il est donc essentiel de pouvoir donner à ces familles une réponse rapide, étant précisé que 50% des décisions donnent lieu à réformation souvent en raison de l’évolution de la situation des majeurs protégés ou des éléments nouveaux apportés devant la cour. Monsieur le Président du Conseil général du Nord permettez-moi de profiter de cette occasion pour dire combien il est important que dans notre région tous les volets de la réforme puissent être mis en œuvre en particulier les mesures d’accompagnement social personnalisé. Nous savons que nous
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notamment la liberté d’aller et venir, en mettant fin à des hospitalisations psychiatriques arbitraires, et garantir la sécurité des citoyens, en mettant hors de porter de nuire des patients présentant une dangerosité pour autrui mais également pour eux-mêmes. Il appartient au juge, suivant les cas, de s’assurer de la réalité du consentement aux soins du patient ou de la qualité du tiers à l’origine de la mesure, de vérifier que l’hospitalisation complète est le seul moyen d’apporter un traitement médical à des troubles mentaux graves ou de se prémunir contre la dangerosité d’un malade. Pour prendre sa décision le juge à accès à un dossier très complet dont le législateur a pris soin de détailler le contenu en le rendant obligatoire. Il est également aidé par un expert, voir un collège d’experts ; enfin, l’audition du patient est obligatoire. Suivant en cela l’avis du 14 octobre 2011 du contrôleur des lieux de privation de liberté, il a été fait le choix devant les juridictions de première instance et devant la Cour d’appel de Douai de ne pas recourir à l’utilisation de la visio-conférence et de faire en sorte que les patients comparaissent en personne devant leur juge. Cela, vous l’imaginez ne va pas toujours de soi et pose d’innombrables questions notamment en termes de moyens et de sécurité. Ce qu’il est également important de retenir c’est que le juge des libertés, telle est son appellation, est saisi d’office et systématiquement de toutes les décisions prises sans l’accord de l’intéressé et dans le délai très court de quinze jours de l’hospitalisation, puis pour chaque période de plus de six mois. Cette réforme est d’ampleur puisque depuis le début de la mise en œuvre de cette réforme, soit en 5 mois seulement ce sont près de 1 000 décisions qui ont été rendues par les juges des
juridictions du ressort et 40 par la cour d’appel. Il me plaît également ici de souligner l’heureuse initiative prise par le Conseil départemental de l’accès au droit du Nord, avec le concours du Barreau, de créer des points d’accès au droit dans les hôpitaux psychiatriques de la région permettant ainsi aux patients de bénéficier de consultations juridiques gratuites d’avocats au sein de l’hôpital et d’avoir accès à une importante documentation sous la forme d’une valise pédagogique. Cette initiative a été récompensée par le garde des Sceaux qui a remis à toute l’équipe du Conseil départemental d’accès au droit du Nord le premier prix du concours «Initiatives Justice 2011». Les dernières réformes et non des moindres concernent les personnes atteintes de troubles mentaux, auteurs d’infractions pénales notamment d’infractions sexuelles. Certes, rappelons le principe que nul ne peut être pénalement sanctionné si son discernement a été totalement altéré au moment de la commission de l’acte. Mais la frontière est souvent très ténue et les études montrent que nombreux sont les délinquants qui sont atteints de troubles mentaux et restent potentiellement dangereux. Leur suivi et l’obligation qui leur est faite de suivre des soins sont donc essentiels pour tenter d’empêcher la récidive. Dans ce domaine, le législateur est intervenu à plusieurs reprises ces dernières années pour inscrire dans la loi l’obligation de soins des personnes condamnées et prévoir la mise en place progressive de la rétention de sûreté pour prévenir la récidive. Mais encore faudrait-il que les juges d’application des peines (JAP) soient en nombre suffisant et assistés de fonctionnaires des greffes également suffisamment nombreux. Actuellement dans le ressort, les 27 JAP suivent chacun en moyenne plus de 1 000 mesures et 900 délinquants. Il importe, en outre, que les services de l’administration pénitentiaire qui les assistent, les SPIP, soient également au complet et que les psychiatres soient en nombre suffisant pour accompagner efficacement ces malades. Tel est encore loin d’être le cas. S’agissant de la juridiction de la Cour d’appel de Douai, l’activité est particulièrement soutenue puisque la chambre de l’application des peines rend en moyenne près de 500 décisions par an et son Président près de 800 ordonnances portant principalement sur les permissions de sortie, les réductions de peine et la libération conditionnelle. Mais quels que soient les moyens et les efforts accomplis, rappelons une évidence : en matière pénale et particulièrement pour tous les délinquants atteints de pathologies psychiatriques, le risque de récidive zéro n’existe pas. Même si cette réalité est difficile à entendre, aucune réforme ne peut conduire à exclure définitivement tous ces malades de la société. L’extension des compétences judiciaires dans le domaine de la garantie des libertés individuelles pour les malades atteints de troubles mentaux est un sujet particulièrement complexe qui mériterait bien d’autres développements. Et à ce titre, nous nous félicitons à la Cour d’appel de Douai des échanges fructueux engagés entre magistrats, médecins psychiatres, travailleurs sociaux et fonctionnaires de l’administration
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Rentrée solennelle pénitentiaire dont le point d’orgue est la réunion organisée chaque année à Lille sous l’égide de plusieurs associations. Comme je l’indiquais au début de mon propos, l’extension des missions du juge ne s’accompagnant pas dans des proportions suffisantes de l’extension de ses moyens, des choix doivent être opérés dans le traitement des contentieux. C’est d’abord le nécessaire équilibre à trouver entre le traitement des contentieux civils et celui des infractions pénales. La question se pose avec de plus en plus d’acuité dans les juridictions de première instance particulièrement celles de petites et moyennes tailles où les saisines en matière de procédures pénales d’urgence sont de plus en plus nombreuses et contraignent parfois les juges à délaisser le traitement des litiges civils. Et pourtant, combien d’entre vous, dans cette salle ont-ils été victimes d’infractions pénales, bien peu sans aucun doute au regard de ceux qui ont vécu, ou dont les parents les plus proches ont vécu, un divorce douloureux, les conséquences économiques d’un licenciement ou du chômage (dettes, surendettement), ou ceux encore qui ont subi des malfaçons dans la construction de leur habitation ou lors de travaux importants ... c’est tout cela la justice civile. A la cour d’appel, cette justice civile représente 68 % de tous les contentieux traités soit près de 13 500 arrêts rendus au cours de la seule année 2011. Sans aucun doute cette justice est-elle moins médiatique parce qu’elle touche le plus souvent à l’intimité de chacun d’entre nous. Mais c’est une justice qui mérite toute notre attention et les moyens de fonctionner dans des délais raisonnables parce qu’elle est aussi facteur de paix sociale. Si à la Cour d’appel de Douai, les délais ont encore pu diminuer cette année pour se situer à un peu plus de 8 mois en moyenne et 5 mois en matière familiale, tel n’est plus le cas en première instance où force est de constater que bon nombre des procédures civiles voient leurs délais augmenter. Mais je sais, Monsieur le Procureur général, que je peux compter sur vous et sur les 10 Procureurs de la République du ressort pour engager ensemble cette réflexion et trouver les justes équilibres dans des projets de juridictions qui concilient efficacement justice civile et justice pénale. Nous devrons aussi aborder ensemble la question difficile du jugement des affaires pénales les plus complexes qui ne doivent pas être délaissées au profit d’une politique du chiffre qui tendrait à privilégier le traitement des procédures rapides les plus simples. En effet, tous les spécialistes de la délinquance s’accordent sur le fait que la grande criminalité notamment celle liée aux trafics internationaux de stupéfiants génère une délinquance au quotidien qui touche toute la population : violences de rue, cambriolages des particuliers ou vols à la tire sont souvent le fait de jeunes sous l’emprise de stupéfiants. Il en est de même des réseaux de prostitution. Notre Cour d’appel à la chance d’être le siège d’une juridiction spécialisée la Juridiction internrégionale spécialisée (JIRS) qui traite de la délinquance organisée ; elle doit se donner les moyens non seulement de pouvoir la
sanctionner pénalement mais également de pouvoir l’atteindre par de lourdes sanctions pécuniaires et la saisie des biens notamment immobiliers issus du blanchiment. Ces affaires nécessitent du temps devant les cours d’assises comme devant les chambres correctionnelles. Ainsi une seule affaire a nécessité cette année plus de 70 jours d’audience devant la Cour d’assises du Nord, étant précisé que les deux Cours d’assises du Nord et du Pasde-Calais siègent en continu toute l’année. De même est-il toujours essentiel dans notre société que la criminalité économique et financière soit poursuivie et sanctionnée, même si elle fait moins la une des journaux comme ce fût le cas dans les années 80 ? Importance également de la justice des mineurs en pleine mutation. Sans aucun doute la délinquance des mineurs a-t-elle évolué et les mineurs de 16 ans ne sont pas ceux que l’on a pu connaître il y a vingt ans. Nous comprenons tous l’importance de la sanction pénale pour ces jeunes désocialisés et trop souvent particulièrement violents. Pour autant, ces mineurs, et tant que l’âge de la majorité n’est pas modifié, on est toujours mineur jusqu’à 18 ans, ces mineurs, ont tous besoin d’un accompagnement social et de ce que l’on appelle «l’assistance éducative». Croire l’inverse, c’est défendre une vision bien pessimiste selon laquelle passer un certain âge il n’y a plus d’espoir de réinsertion sociale. Et dans une région où la population est plus jeune qu’au plan national et où le chômage est plus important, le travail des 37 juges des enfants du ressort mérite d’être salué ainsi que celui de tous les fonctionnaires de la protection judiciaire de la jeunesse dont le dévouement et l’engagement sont exemplaires. Mais il importe aussi que le secteur associatif qui apporte une aide particulièrement précieuse à tous ces professionnels soit soutenu. Nous comprenons, Monsieur le Préfet de région, qu’en ces temps économiques difficiles, des choix budgétaires doivent être faits. Mais encore une fois dans une région où la jeunesse est trop souvent enfermée dans une précarité plus forte qu’ailleurs, nous avons besoin de l’aide de ces professionnels pour remettre en selle des jeunes qui sont aussi l’avenir de cette région. Je voudrais enfin revenir un instant sur la justice civile pour évoquer quelques éléments caractéristiques des procédures soumises à la Cour d’appel de Douai. Sur les près de 13 500 arrêts rendus en matière civile au cours de l’année écoulée : - La proportion la plus forte des arrêts rendus est due à la chambre sociale de la Cour qui a rendu près de 3 300 arrêts, soit 16% du contentieux civil traité par la cour d’appel en 2011 ; spécialisée dans les contentieux de droit du travail et du droit de la sécurité sociale, la Chambre sociale de la Cour d’appel de Douai est l’une des plus importante de France et celle dont les délais de traitement sont toujours les plus bas (10 mois en moyenne) ; notre objectif est de les réduire en 2012 pour revenir aux délais moyens de traitement de 8 mois qui était le sien en fin d’année 2010. - Deuxième contentieux en volume : celui du droit de la famille, en 2011, 13% des arrêts de la cour ont été rendus par la chambre de la famille et sur ce point saluons l’effort très important accompli par ses 9 magistrats qui ont permis de
réduire les stocks de près de 400 affaires et donc les délais de jugement en appel de plus de 2 mois pour réduire le délai moyen de traitement des affaires familiales devant la cour à 5 mois. - Je voudrais encore citer la Chambre commerciale dont le contentieux augmente sans doute sous les effets de la crise économique et représente plus de 8% des arrêts rendus, la première Chambre civile dont les stocks ont eux aussi diminué de manière significative au cours de l’année écoulée malgré un contentieux traité toujours plus complexe et enfin la Chambre qui traite des affaires de surendettement qui malheureusement sont particulièrement nombreuses dans les deux départements du Nord et du Pas-de-Calais. Il est souvent difficile de parler de cette justice civile parce que les règles que nous appliquons sont souvent complexes et très techniques. Alors, on aurait parfois tendance à la stigmatiser, oubliant un peu vite que dans les procédures judiciaires civiles, l’équité doit parfois céder le pas à la règle de droit. Ainsi a-t-on pu lire s’agissant d’arrêts récents rendus par la Cour d’appel de Douai en matière d’indemnisation des victimes de l’amiante que la Cour de Douai leur infligeait la double peine. C’est faire fi un peu trop rapidement des arrêts rendus avant elle par la Cour de cassation qui dans des arrêts de principe a réaffirmé qu’il ne pouvait y avoir double indemnisation par la Sécurité sociale d’abord, par le fonds d’indemnisation ensuite, et que la première devait donc légitimement se déduire de la seconde. Bien sûr que ces règles de droit paraissent bien trop rigides face à la douleur des victimes et de leurs familles mais le juge est garant de l’application du droit. Et puis, c’est également faire fi de près de cinq cents décisions rendues annuellement par la Cour d’appel de Douai depuis 3 ans qui indemnise les victimes de l’amiante en cherchant à évaluer au plus juste les préjudices subis et qui a notamment été la première des Cours d’appel à imposer la capitalisation du préjudice économique de la veuve pour lui éviter de présenter chaque année une demande. La complexité de ces procédures civiles me permet de terminer mon propos en soulignant l’importance dans toutes les instances de l’assistance des avocats auprès de personnes souvent très démunies. C’est pourquoi, au cours de l’année 2011, nous avons tenu, malgré les difficultés de mise en œuvre de la réforme de la gestion des crédits d’aide juridictionnelle au niveau de la Cour de l’appel, à ce qu’aucune des Caisses des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) du ressort ne soit, à aucun moment de l’année, en rupture de paiement. Au total ce sont près de 26 millions d’euros qui ont été distribués aux CARPA au titre de l’aide juridictionnelle et toutes aides confondues 29,6 millions d’euros. Soyez assurés que nous maintiendrons nos efforts en 2012, de même que nous nous emploierons à accompagner la réforme de la profession d’avocat qui intègre désormais celle jusque-là exercée avec rigueur, compétence et dévouement par les avoués.
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Vœux du Président de la République aux Hautes Juridictions Palais de l'Elysée -13 janvier 2012
Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
Nicolas Sarkozy
La force du droit par Nicolas Sarkozy (…) 'an dernier, lors de cette même rencontre, j'avais insisté sur la nécessité de rendre notre justice plus efficace et plus accessible. Des progrès importants ont été réalisés en 2011, chacun conviendra que beaucoup reste à faire. À l'heure où l'Europe et la France font face à une crise profonde, qui fait naître des inquiétudes chez nos concitoyens, la force du droit demeure plus que jamais l'un des piliers sur lesquels repose notre société. Vous en êtes les garants, vous en êtes les gardiens. Le premier message que je veux vous adresser en ce début d'année, c'est donc celui de la reconnaissance de la République pour la mission indispensable que vous accomplissez au service de tous. Depuis presque 5 ans, j'ai cette obsession de tenter de rapprocher les Français et la Justice. Vaste sujet : quand une décision de justice est rendue, dans le meilleur des cas il y a un mécontent, dans la plupart des cas il y en a deux. Je ne vous cache pas ma satisfaction en constatant que les Français se sont pleinement appropriés les évolutions du droit que nous
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avons mises en œuvre pour mieux les protéger et améliorer leur accès à la justice. L'un des volets les plus importants de la révision constitutionnelle de 2008, la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), est désormais entré dans les usages de notre République. Elle a donné toutes les preuves de son utilité et vos juridictions sont les artisans de cette grande avancée de l'Etat de droit. Cette réforme est un progrès pour les libertés individuelles, chaque justiciable disposant aujourd'hui de la possibilité de contester la conformité d'une loi à notre Constitution. Cette nouvelle faculté, les Français s'en servent, puisque pas moins de 2 500 QPC ont été déposées pour la seule année écoulée. Pour autant, cette réforme n'a pas eu les effets négatifs que certains lui prédisaient pour notre stabilité juridique. Il n'en a rien été. Au contraire, le droit national en sort renforcé. D'abord grâce à la pertinence du filtrage qu'opèrent le Conseil d'Etat et la Cour de cassation. Ensuite, parce que plus de 60% des décisions rendues en 2011 par le Conseil constitutionnel ont validé les dispositions législatives qui lui étaient soumises, mettant ainsi un terme à toute forme de contestation. Enfin, lorsqu'il l'estime nécessaire, le Conseil constitutionnel a su faire usage de la faculté de reporter dans le temps les effets de ses décisions. En agissant ainsi, le Conseil laisse un délai suffisant au Gouvernement et au Parlement pour élaborer des lois nouvelles. Par ailleurs grâce à la QPC, et c'est à mon sens une autre de ses vertus, notre système juridictionnel a désormais le pouvoir de trancher, au plan national, des questions dont la solution était auparavant préemptée, imposée, par les juridictions européennes. Grâce à la QPC, le contrôle de conventionalité n'est plus l'alpha et l'omega de la protection des droits de l'homme. Désormais, la protection constitutionnelle des droits fondamentaux est assurée, d'abord, par un dialogue approfondi entre le Conseil constitutionnel et les cours suprêmes des deux ordres de juridiction, administratif et judiciaire. Il n'y a rien de plus normal dans le pays qui a énoncé, dès 1789, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ! Un autre volet de la révision constitutionnelle en matière de protection des libertés a été mis en œuvre en 2011, je veux parler du Défenseur
des droits. Il est encore tôt pour dresser un premier bilan mais je suis certain que le Défenseur des droits se révèlera, dans les années qui viennent, comme l'un des instruments majeurs de l'Etat de droit. Au-delà, nous avons souhaité que de nouvelles garanties viennent encadrer l'exercice de la puissance publique. Je pense à la loi qui étend le contrôle du juge judiciaire pour la protection des personnes hospitalisées d'office. Ces patients pris en charge pour leur propre protection sont aussi des personnes en situation de grande vulnérabilité, devant être protégées. Il était normal qu'ils soient régulièrement informés de leurs droits et de l'évolution de leur état de santé. Je pense également à la loi portant réforme de la garde à vue, qui aura permis de ramener cette mesure de contrainte dans des limites plus raisonnables, afin d'en diminuer le nombre sans porter atteinte à l'efficacité des enquêtes pénales. Hommage en soit rendu au garde des Sceaux ainsi qu'au Premier ministre. Le droit le plus essentiel, celui de bénéficier de l'assistance d'un avocat, n'est plus limité à un entretien formel de trente minutes, mais a été étendu à toute la durée de la garde à vue. Le droit au silence est désormais consacré, sa notification par les enquêteurs étant obligatoire. Il s'agit là d'avancées considérables qui viennent renforcer la garantie des droits fondamentaux dans notre pays. Le droit à l'avocat ne serait cependant qu'un droit théorique et virtuel s'il n'était pas permis à tous les citoyens d'y accéder. C'est pourquoi nous avons souhaité que la réforme de la garde à vue soit accompagnée de la création d'un nouveau mode de financement de l'aide juridictionnelle. L'instauration d'un droit de timbre de 35 euros sur les procédures judiciaires a suscité de nombreux commentaires - on se demande d'ailleurs ce qui ne suscite pas de commentaires - : certains ont dit qu'il s'agissait, ni plus ni moins, d'une « entrave à l'accès au droit et au juge ». C'est absurde, d'abord parce que ce droit de timbre est modéré et que de nombreuses exonérations sont prévues, notamment en faveur des plus démunis, mais surtout parce que je ne vois pas ce qu'il y aurait de choquant à porter l'idée selon laquelle une action en justice est un acte qui n'est pas anodin, qui a un coût pour la société. Le paiement de ce droit de timbre est donc à la fois un acte de
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Vœux responsabilisation du justiciable et un geste de solidarité. Il n'y a pas de droit de tirage du citoyen sur la justice. Saisir la justice, ce n'est pas quelque chose de banal, cela impacte l'ensemble de la société. Par ailleurs, nous avons essayé d'améliorer la proximité de notre justice avec les Français. Après la saisine directe du Conseil Supérieur de la Magistrature par les justiciables, fameux débat dont plus personne ne parle, cette plus grande proximité s'incarne aujourd'hui dans la participation de jurés populaires au fonctionnement de la justice pénale. Comme vous le savez, je suis très attaché à cette réforme, sur laquelle je m'étais engagé dès 2007. Elle est effective depuis le 1er janvier, et je suis convaincu que c'est un moyen de consolider le lien qui unit les Français à la justice et que ce lien permettra, pour les uns de restaurer la confiance, pour les autres de la renforcer, selon que l'on soit optimiste ou pessimiste. Pour le jugement des délits les plus graves mais aussi pour les demandes de libération conditionnelle dont est saisie la juridiction d'application des peines, deux citoyens assesseurs siègent désormais aux côtés de trois magistrats professionnels.
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combien rares sont les décisions des cours d'assises qui se trouvent contestées médiatiquement, publiquement ? La présence de jurés à côté de magistrats expérimentés, compétents, professionnels, fait beaucoup pour éviter cette contestation. Je suis certain que sur l'affaire si sensible des libérations conditionnelles, un homme est un homme, l'erreur est humaine, mais les conséquences sont très lourdes. Comme pour les jugements des tribunaux correctionnels, la présence de nos concitoyens au côté des magistrats va rapprocher la justice et le peuple français. Cette réforme qui a fait beaucoup parler, se met en tout cas en place dans des conditions me semble-t-il extrêmement satisfaisantes. Lorsqu'il est question de proximité avec la justice, je pense aussi à ceux qui en ont le plus besoin, je veux parler des victimes. Car c'est dans son rapport à la victime que la justice révèle toute son humanité. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu créer les bureaux d'aide aux victimes, qui leur apportent, au sein même de vos tribunaux, un suivi personnalisé et adapté. Compte tenu de leur succès depuis leur création en 2009, ils seront peu à peu généralisés.
Je trouve profondément injustes - et pour tout dire déplacées - les critiques qui sont adressées aux membres du Parquet, dont je rappelle qu'ils sont des magistrats à part entière et qu'ils exercent Nicolas Sarkozy leur métier en toute conscience.
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J'ai observé avec beaucoup d'intérêt l'implication exemplaire des premiers participants à ce nouvel exercice civique. Je n'en suis pas surpris. Lorsque chacun d'entre nous rencontre les Français, il constate qu'ils sont désireux de connaître davantage le fonctionnement quotidien de l'institution judiciaire. Au fond, dans le malentendu, il y a beaucoup d'incompréhension due à l'éloignement et à la complexité. Cette réforme est expérimentée dans deux cours d'appel, celle de Dijon et celle de Toulouse. Je souhaite qu'à la lumière de ce démarrage réussi, nous puissions, avec le Parlement, accélérer la généralisation du dispositif avant le terme actuellement prévu en 2014 et étendre les jurés populaires à l'ensemble des juridictions dès 2013. Mesdames et Messieurs, vous le savez, c'est sans doute le seul moyen de répondre à l'attente forte de nos concitoyens, pas toujours rationnelle, d'une plus grande sévérité de notre justice à l'égard de la délinquance du quotidien. Cette sévérité existe, les tribunaux et les Cours ont fait un travail assez remarquable en 2011. Mais le sentiment populaire, vous le savez comme nous le savons nous-mêmes, exige beaucoup de résultats en la matière. En acceptant d'intégrer des jurés populaires dans les juridictions de jugement, nous répondons à cette attente. La justice ne sera donc plus rendue simplement au nom du peuple français, mais au nom du peuple français et par le peuple français. Avez-vous observé d'ailleurs
Le droit est également plus accessible lorsqu'il devient plus lisible et plus simple. Là, il y a du travail ! Plus lisible, parce que la motivation des arrêts des cours d'assises permet désormais de faire connaître aux condamnés les principales raisons pour lesquelles la juridiction criminelle a été convaincue de leur culpabilité. C'était quand même étrange que pour les faits les plus graves, il n'y ait pas d'explication. Qui pouvait le comprendre ? Plus simple, puisque les démarches juridiques de nos concitoyens ont été facilitées. Je pense à l'accélération de la procédure de divorce par consentement mutuel, ou à l'allègement de la procédure d'appel grâce à la fusion des avocats et des avoués. Fameux combat, là aussi ! Je mesure pleinement que chacune de ces réformes exige des professionnels du droit un investissement important. J'entends les critiques de ceux qui déplorent des modifications de la loi qu'ils jugent trop fréquentes, mais si le droit change, c'est pour accompagner les transformations de la société. Que diraient-ils, ceux qui critiquent les adaptations, si le droit restait immobile alors que la société, c'est le moins que l'on puisse dire, ne l'est pas ? Prenons l'exemple des mineurs délinquants. Si nous avons modifié à plusieurs reprises l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante, c'est bien parce que le mineur délinquant d'aujourd'hui a bien peu de choses en commun avec le mineur délinquant d'hier.
Les Français ne m'ont pas élu pour demeurer dans l'immobilisme, ils ne comprendraient pas que nous ne nous attaquions pas à tous ces problèmes qui les touchent au quotidien. C'est la raison pour laquelle j'assume les améliorations successives de notre procédure pénale, à l'image du service citoyen qui vient d'être adopté. Cette mesure doit permettre de réinculquer les principes de la vie en communauté à des jeunes délinquants en risque de rupture avec la société. Je regrette que cette idée ait pu choquer. Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant à s'attaquer de front aux problèmes de notre temps. J'assume pleinement l'évolution qui a été décidée en matière de contentieux de l'entrée et du séjour des étrangers en France, pour préciser et mieux articuler le rôle dévolu aux juges des libertés et de la détention d'une part, aux tribunaux administratifs d'autre part. Notre politique d'immigration est, bien évidemment, respectueuse des droits des personnes. Je n'ignore pas le travail supplémentaire qu'occasionne chaque changement de nos lois sur le terrain, et je sais que les conditions d'exercice dans les tribunaux sont difficiles, que les missions nouvelles dévolues à l'institution judiciaire peuvent donner le sentiment que les moyens budgétaires et humains, pourtant sans cesse à la hausse, ne sont jamais suffisants. Mesdames et Messieurs, le budget de la Justice a augmenté de 20% depuis 2007, dans le contexte que nous connaissons avec la réduction de 2,5 de la croissance de la France. En 2009, le budget du ministère de la Justice a augmenté de 20%. Ce n'est sans doute pas suffisant (qui d'ailleurs peut dire que quoi que ce soit soit suffisant), mais c'est le témoignage que la société française fait un effort en faveur de l'institution judiciaire comme rarement un tel effort a été conduit. J'ai conscience qu'un effort supplémentaire est sans doute nécessaire pour une évolution qualitative du service public de la Justice. C'est une tâche ambitieuse, que nous avons engagée avec le récent dépôt au Parlement du projet de loi de programmation sur l'exécution des peines. Il s'agit d'une première étape, destinée à améliorer notre capacité à faire exécuter les peines. Il faudra amplifier cette démarche par une remise à niveau progressive des crédits de fonctionnement et d'investissement de l'ensemble de l'institution judiciaire. Les Français se disent : est-ce que les décisions sont assez sévères ? Et surtout est-ce que les décisions sont appliquées ? C'est un sujet qui nous concerne tous et qui crée, chacun le comprend, un risque de perte de confiance dans nos institutions. Nous devons poursuivre la refondation de notre justice. Je crois qu'il faudra que nous réfléchissions à la façon de « déjudiciariser » les contentieux les plus simples afin que les magistrats puissent se concentrer sur l'essentiel et que le juge retrouve tout son prestige dans l'esprit des Français ! C'est un travail que nous devons mener ensemble. A ce titre, je voudrais saluer tout particulièrement la poursuite de la modernisation de la Cour de cassation, qui a amélioré en 2011 le délai de traitement de ses dossiers, alors même qu'elle était saisie d'un nombre croissant de pourvois. Hommage vous en soit rendu Monsieur le Premier président, cher Vincent Lamanda. Grâce à l'engagement
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Vœux de tous les membres de votre juridiction, la Cour de cassation se place aujourd'hui au premier rang des cours suprêmes européennes en termes de délais de jugement. Quand cela n'allait pas, nombreux étaient ceux qui vous le reprochaient, maintenant que cela va beaucoup mieux, il est assez normal que l'on vous le dise. J'espère que vous n'y verrez pas une entorse à la séparation des pouvoirs et à l'indépendance que je vous dois, ainsi qu'à l'amitié que je vous porte. Depuis l'an dernier, cher Monsieur le Premier président vous présidez, aux côtés du Procureur général, que je salue, un Conseil supérieur de la magistrature rénové et beaucoup plus en phase avec la société. On a entendu tellement d'inexactitudes, tellement d'outrances. Il est vrai qu'en la matière le nombre de personnes non compétentes est assez impressionnant. J'ai voulu une évolution majeure et je remercie le Premier ministre et le garde des Sceaux de l'avoir soutenue. Cette évolution, je l'ai voulue pour garantir une plus grande transparence dans les processus de nomination et donner plus de gages de l'indépendance de notre corps judiciaire. Ce Conseil supérieur de la magistrature, plus transparent, plus fort est en prise directe avec les Français, qui peuvent désormais le saisir, je l'ai dit. C'est une nouvelle illustration de la mission essentielle qui est la vôtre, renforcer la confiance du public dans les décisions rendues au nom du peuple français et veiller au strict respect des obligations déontologiques des magistrats. Je voudrais rappeler que je suis le président de la République qui a mis fin à 65 années de présidence par le Président de la République du Conseil supérieur de la magistrature ! Je pense que ce n'était pas qu'un geste symbolique, c'était une décision majeure qui a mis fin à une situation qui mettait tout le monde en difficulté : le Président de la République dont on acceptait plus ou moins la présence, et l'institution ellemême. Cela n'avait pas de sens. Désormais le Conseil supérieur de la magistrature est une institution totalement indépendante, dont la composition a été élargie à un nombre plus important de personnalités de la société civile. Faut-il le rappeler, j'ai voulu également, par cette même réforme, que les nominations des plus hauts magistrats du parquet soient désormais soumises à votre avis, ce qui n'était pas le cas, avis qui est systématiquement respecté. Quand j'entends que l'on commente tel ou tel projet de nomination, est-ce que l'on prend la peine de rappeler qu'aucun chef de l'Etat français n'a limité son propre pouvoir de nomination comme je l'ai fait en le soumettant à l'avis du Conseil supérieur de la magistrature ? Alors soyons clairs : j'ai sur ce point la conviction que nous devrons aller au bout de cette logique, en demandant au Conseil supérieur de la magistrature de rendre un avis conforme pour la nomination des magistrats du parquet, comme c'est le cas pour la nomination des magistrats du siège. Et j'en profite pour dire, Monsieur le Procureur général, que je trouve profondément injustes - et pour tout dire déplacées - les critiques qui sont adressées aux membres du parquet, dont je rappelle qu'ils sont des magistrats à part entière et qu'ils exercent leur métier en toute conscience. Nous respectons systématiquement l'avis du Conseil supérieur de la magistrature pour les nominations ; nous allons franchir un pas de
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plus, nous allons mettre le droit en accord avec la pratique nouvelle, nous allons solliciter l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Je tiens également à adresser des remerciements au Conseil d'Etat qui, comme juge suprême des relations entre l'administration et les citoyens, a su déployer des efforts d'organisation permettant à l'ensemble de la juridiction administrative de juger dans des délais qui n'ont jamais été aussi courts. Je mesure en particulier les changements pratiques, au sein des tribunaux administratifs, qu'a entraînés depuis l'été 2011 la réforme du contentieux de l'entrée et du séjour des étrangers. J'associe à cet hommage, et vous le comprendrez, la Cour nationale du droit d'asile, qui a su se moderniser en tirant parti des nouveaux moyens qui lui ont été accordés. Nous sommes ainsi d'autant plus fidèles à notre tradition d'asile que nous pouvons répondre rapidement aux demandes qui sont adressées à notre pays. Je n'oublie pas que le Conseil d'Etat est également le conseiller juridique du gouvernement, une mission qu'il a remplie avec rapidité, notamment pour l'examen des projets de lois de finances indispensables afin de surmonter la crise économique et financière européenne. Dans le même esprit, le gouvernement a pu s'appuyer sur l'expertise de la Cour des comptes, Monsieur le Premier président, pour préparer nos réponses de politique économique à la crise. Vos travaux ont directement inspiré des réformes importantes : la convergence fiscale franco-allemande, la nécessité de réformer le financement de notre système de protection sociale et bien sûr la règle d'équilibre des finances publiques pour laquelle vous militez. La règle d'or permet d'inscrire juridiquement dans la durée l'effort de réduction de la dette et vous avez rappelé récemment, cher Didier Migaud, son impérieuse nécessité. Je propose de l'inscrire dans notre Constitution afin de rompre définitivement avec plus de 30 ans de déficit de nos finances publiques, en écrivant dans notre loi fondamentale le principe, de bon sens, de l'équilibre budgétaire. J'ai souhaité, et cela a été accepté par nos partenaires européens, que ce soient les juges constitutionnels de chaque Etat qui en assurent le respect, car c'est un élément essentiel de notre souveraineté. D'ailleurs, dans l'esprit du Premier ministre comme dans le mien, il n'a jamais été question qu'une juridiction européenne vienne décider de l'annulation d'un budget national. Personne ne l'aurait compris, personne ne l'aurait accepté. Je veux remercier la Cour des comptes pour la qualité de sa contribution à une meilleure gestion de la dépense. En plus de son statut de juridiction financière, elle est l'institution de référence pour l'audit et l'évaluation des politiques publiques. Je la remercie également de la vigilance avec laquelle elle exerce désormais le contrôle des comptes de l'Elysée. Je peux ainsi bénéficier du renfort de quatre magistrats qui, chaque année, contrôlent les comptes de l'Elysée. Je voudrais dire devant les Hautes juridictions du pays que c'est la première fois en 50 ans de Vème République qu'un magistrat de la Cour des comptes est autorisé à rentrer à l'Elysée. Cela n'existait pas, était-ce normal, était-ce exemplaire ? Est-ce que le symbole de l'autorité
politique, le chef de l'Etat, la demeure que la République met à sa disposition, son budget, pouvaient continuer à s'exonérer des contrôles que subissent par ailleurs toutes les autres institutions ? Il est vrai qu'il m'a été réservé un traitement particulier puisque le contrôle est annuel, c'est lourd pour la Cour des comptes, c'est lourd pour l'Elysée, mais je pense que c'est une façon pour chacun de se protéger et que la présidence de la République, bien loin d'en être affaiblie, en est renforcée. Je veux saluer l'impartialité avec laquelle les magistrats de la Cour des comptes procèdent à ces inspections. Je voudrais dire au Premier président que, naturellement, nous mettrons en œuvre la réforme qui est prévue, quelles que soient les difficultés ou les sensibilités des uns et des autres. Nous en avons parlé il y a encore quelques instants avec François Fillon. Mesdames et Messieurs, Pour terminer, la compétitivité de notre économie est l'un des enjeux de la sortie de crise. Il en va ni plus ni moins que de la préservation de notre modèle économique et social. La simplicité et la sécurité de la règle de droit doivent nous aider dans cette tâche. Il faut le reconnaître, la complication excessive du droit est moins le fruit de jurisprudences trop subtiles que de l'empilement des normes et de leur rédaction incertaine. Trop souvent, le droit européen impose au législateur national de transposer des règles détaillées. Trop souvent, le législateur national définit ce qui aurait dû rester dans le domaine du décret ou de l'arrêté. Et trop souvent, le pouvoir réglementaire, à son tour, se noie dans l'accessoire, sans parler de l'activité intense de la Cour de cassation en termes de jurisprudence, qui crée aussi naturellement à l'arrivée de nouvelles règles. A l'évidence, nous avons besoin d'améliorer la qualité des normes. Pour y parvenir, il me semble nécessaire de mettre en œuvre au cœur des administrations, dans les mois qui viennent, un effort juridique similaire à l'effort de gestion qui a été conduit depuis 2007 avec la révision générale des politiques publiques. C'est pourquoi j'ai demandé au Premier ministre de préparer ce qui pourrait être un programme pluriannuel de réduction des normes, ministère par ministère, conduit et assumé au plus haut niveau par le gouvernement. Mesdames et Messieurs, En terminant ces vœux, j'ai à l'esprit ce que le général de Gaulle déclarait en 1960 devant le Conseil d'Etat : « Il n'y a eu de France que grâce à l'Etat. La France ne peut se maintenir que par lui. Rien n'est capital autant que la légitimité, les institutions et le fonctionnement de l'Etat ». Les institutions que vous incarnez, chacune en ce qui la concerne, contribuent à cette pérennité de l'Etat au service de l'intérêt général. En donnant toute leur portée aux nouveaux droits que nous avons créés pour protéger les libertés, en sachant vous réformer pour faciliter le rapprochement entre les citoyens et l'autorité judiciaire, en vous investissant pour rendre une justice de qualité dans des délais réduits, vous participez tous pleinement à la protection de nos compatriotes. Sûr du travail accompli, je vous souhaite à toutes et à tous une excellente année 2012 qui sera, à n'en point douter, une année passionnante et difficile.
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Vœux
Ministère de la Justice et des Libertés Voeux du Garde des Sceaux aux personnalités du monde judiciaire Hôtel de Bourvallais - 18 janvier 2012
Une justice davantage respectée par Michel Mercier […] ’est un plaisir de vous retrouver aujourd’hui en cette nouvelle année, alors que nous venons de vivre douze mois particulièrement riches d’avancées pour notre justice et notre droit. Nous avons mené de nombreuses réformes nécessaires à la modernisation et à l’efficacité de notre justice. Je sais l’effort d’adaptation qu’a impliqué pour chacune et chacun d’entre vous cette dynamique de changement, et je veux vous remercier de votre engagement pour la justice. Beaucoup de règles et procédures nouvelles sont entrées en application avec succès et je suis convaincu que cette réussite doit beaucoup à l’esprit de dialogue qui a présidé à nos échanges tout au long de l’année écoulée. Bien sûr nous n’avons pas été d’accord sur tout, mais c’est bien grâce à cette écoute mutuelle qu’y compris dans les moments difficiles que nous avons pu connaître, nous avons su prendre de la hauteur et construire des solutions pour une justice de qualité, respectueuse des droits et libertés. Ce dialogue, je l’ai conduit tant avec les partenaires de l’institution judiciaire qu’avec les magistrats, les greffiers et l’ensemble des fonctionnaires de ce ministère ; permettez à cet égard que je souligne l’avancée que représente la mise en place toute récente des nouvelles instances du dialogue social, en application de la loi du 5 juillet 2010. Mesdames et Messieurs, Je crois pouvoir dire qu’au cours de l’année écoulée nous avons à la fois atteint les objectifs que nous nous étions fixés sur l’organisation du service public de la justice, et répondu avec efficacité aux nouvelles exigences induites par la question prioritaire de constitutionnalité. Sur ce dernier point, le défi était d’importance : 2 500 QPC ont été déposées et 174 ont donné lieu à une décision du Conseil constitutionnel. Autant dire que les justiciables et les professionnels du droit ont pleinement investi cette procédure. Je tiens à saluer l’implication des hautes juridictions, tant le Conseil d’Etat et la Cour de cassation dans leur rôle de filtrage, que bien sûr le Conseil constitutionnel. Toutes ont permis à la nouvelle procédure de
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Michel Mercier déployer l’ensemble de ses effets. Ceux qui pensaient que la QPC ne changerait rien, comme ceux qui redoutaient qu’elle ne mette à bas notre édifice juridique ont été démentis : la procédure constitue un formidable outil d’approfondissement de notre Etat de droit. Mais cela implique naturellement que le légis-
lateur procède aux adaptations nécessaires. Le ministère de la Justice est tout particulièrement concerné puisque le domaine pénal, pour n’évoquer que lui, représente environ 20% des QPC. Pas moins de huit réformes législatives ont été adoptées cette année afin de se conformer, dans les domaines intéres-
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Vœux sant la Chancellerie, aux décisions du Conseil. Il nous a donc fallu combiner la conduite de la politique définie par le Gouvernement avec les exigences nouvelles inhérentes au respect de la hiérarchie des normes. Pour autant, de cette double inspiration il a résulté une action profondément cohérente.
I. Des droits et libertés renforcés 1. Les droits des personnes placées en garde à vue, tout d’abord, ont été redéfinis par la loi du 14 avril 2011, qui a instauré le droit à l’assistance effective par un avocat tout au long de la mesure
Nous avons su trouver dans cette loi, sous le contrôle du Conseil constitutionnel qui l’a jugée conforme à la Constitution, un nouvel équilibre entre deux exigences de même valeur, celle du respect des droits de la défense et celle de la sécurité des biens et des personnes. La loi du 5 juillet 2011 a, pour sa part, considérablement renforcé le contrôle judiciaire sur les mesures d’hospitalisation sans consentement, en permettant un contrôle effectif, par le juge, de toutes les mesures privant ces malades de leur liberté d’aller et venir. La mobilisation de l’institution judiciaire et de l’ensemble des auxiliaires de justice a permis que ces nouvelles mesures soient mises en œuvre de manière aussi harmonieuse que possible, en dépit des difficultés pratiques de tous ordres qu’il a fallu résoudre en peu de temps. Nous restons bien sûr très attentifs aux conditions d’application de ces réformes, mais je tiens en cet instant à renouveler mes remerciements à l’ensemble des acteurs qui ont concouru à ce résultat. J’ai naturellement veillé à ce que l’ensemble de ces évolutions soient accompagnées de moyens supplémentaires. Sans doute ces efforts ne sontils pas suffisants, car je sais les fortes contraintes qui pèsent sur les acteurs de la justice. Mais je veux rappeler aussi, alors que nous nous trouvons dans une situation budgétaire sans précédent, que le Gouvernement et le Parlement ont continué à se mobiliser pour la justice : entre 2007 et 2012, le budget de la justice aura ainsi augmenté de 20%, et la hausse atteint près de 4% pour la seule année 2012. Encore faut-il que les emplois supplémentaires que nous avons obtenus soient pourvus, et je m’y attacherai dans l’organisation des concours de recrutement de l’année 2012. 2. Toujours en matière de protection des droits, je ne saurais oublier que, grâce à une loi organique que j’ai eu l’honneur de défendre au Parlement, cette année a vu la création d’une nouvelle autorité constitutionnelle dédiée à la protection et à la défense des droits des citoyens : le Défenseur des droits
Il a été doté de moyens et de prérogatives sans précédent pour l’exercice des missions qui lui ont été dévolues, que ce soit en matière de relations avec les administrations, de défense des droits des enfants, de lutte contre les discriminations ou de contrôle de la déontologie des activités de sécurité. Monsieur le Défenseur des droits, d’excellentes relations de travail se sont d’ores et déjà tissées entre vos services et ceux de la Chancellerie.
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Cette collaboration est le gage d’une bonne articulation entre votre intervention, non contentieuse, et celle de la justice ; bonne articulation qui contribuera, j’en suis sûr, à mieux protéger les droits de nos concitoyens.
me rendrai sur place pour le vérifier mais c’est sans nul doute en expliquant la justice, en faisant œuvre de pédagogie, que nous renforcerons la confiance de nos concitoyens dans l’institution judiciaire.
3. Et puis je tiens à saluer les nouveaux pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) à l’égard
2. Nous avons par ailleurs poursuivi la modernisation de notre justice pour garantir son efficacité et le service rendu au justiciable
notamment des nominations des procureurs généraux. Depuis un an, nous avons appris à travailler ensemble, dans le respect de nos compétences respectives, et j’ai veillé à ce que les avis que le CSM a rendus soient systématiquement suivis. Cette pratique va se prolonger puisque le Président de la République a annoncé il y a quelques jours, dans son discours de vœux aux hautes juridictions, qu’à l’avenir ces nominations ne pourraient se faire que sur avis conforme du CSM, ce dont je me réjouis.
II. Une institution judiciaire modernisée, plus accessible et plus proche 1. Rapprocher la justice des citoyens a constitué, vous le savez, un objectif majeur de notre action. Parce qu’une complexité inutile éloigne les Français de leur justice, nous avons veillé à leur offrir des structures plus lisibles et à simplifier les procédures
La réforme de la représentation devant les cours d’appel, inscrite dans la loi du 25 janvier 2011, ou la loi relative à la répartition des contentieux et à l’allégement de certaines procédures ont apporté des clarifications et des simplifications indispensables Nous avons également veillé à développer une politique active d’accès au droit pour permettre à chacun de mieux connaître ses droits et ses devoirs. Je veux rendre hommage aux professionnels et aux acteurs associatifs qui s’engagent à nos côtés, au sein des maisons de justice et du droit, des points d’accès au droit ou encore des bureaux d’aide aux victimes pour apporter écoute et conseil à nos concitoyens. Parce que nous devons accorder une attention toute particulière à ceux de nos concitoyens qui sont fragilisés, j’ai d’ailleurs souhaité que nous poursuivions l’ouverture de nouveaux bureaux d’aide aux victimes. 12 seront créés cette année en vue d’une généralisation sur le territoire qui est prévue par le projet de loi de programmation qui est actuellement à l’examen du Parlement. En renforçant la participation des citoyens à l’œuvre de justice, la loi du 10 août 2011 a marqué une autre avancée particulièrement emblématique dans ce rapprochement de la justice et des citoyens. Ainsi, depuis le 1er janvier, les premiers citoyens assesseurs ont siégé aux côtés des magistrats dans les ressorts des cours d’appel de Dijon et de Toulouse, pour le jugement des délits graves d'atteinte aux personnes. Ils seront aussi appelés à rendre des décisions de libération conditionnelle. Les premiers retours de cette expérimentation sont positifs : les premiers participants expriment leur sentiment d’accomplir un acte civique, et mesurent mieux sans doute la responsabilité que représente le fait de rendre la justice. Je
Les efforts déployés, cette année encore, pour la rénovation ou la réhabilitation des palais de justice, ont permis de mieux répondre aux impératifs d’accessibilité de l’institution judiciaire. En facilitant l’accueil du justiciable, en améliorant les conditions de travail des magistrats, des greffiers en chef, des greffiers et fonctionnaires, nous permettons aussi que l’œuvre de justice soit conduite en toute sérénité. La modernisation de notre justice passe aussi par le recours aux nouvelles technologies. L’ensemble des auxiliaires de justice l’ont compris : après les avocats et les avocats aux Conseils, la dématérialisation des échanges a vocation à s’étendre aux huissiers de justice, aux administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, aux greffiers des tribunaux de commerce ou encore aux experts judiciaires. La communication électronique obligatoire devant les cours d’appel, qui ne porte depuis le 1er septembre dernier que sur certains actes de procédure, sera généralisée d’ici l’année prochaine. Je tiens à remercier particulièrement les magistrats et greffiers, avocats et anciens avoués de leur implication essentielle dans la mise en place progressive de ce dispositif. Je n’oublie pas, dans ce mouvement de modernisation, les réalisations accomplies cette année pour la justice administrative. Certes l’encombrement du calendrier parlementaire n’aura pas permis, au cours de cette législature, de soumettre au Parlement un projet de loi entièrement consacré aux juridictions administratives. Mais je me réjouis de voir que cette contrainte n’a pas fait obstacle à ce que la plupart des propositions élaborées par le Conseil d'Etat et portées avec toute la force de conviction de son Vice-président aient été finalement adoptées et mises en œuvre. Ce n’est que justice s’agissant de magistrats, agents et juridictions qui ont consenti des efforts très importants ces dernières années pour réduire les délais de jugement avec le succès que l’on sait. Dans certaines matières, en application de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, le rapporteur public peut désormais être dispensé de présenter ses conclusions à l’audience. La loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles comprend un chapitre consacré aux juridictions administratives. D’autres mesures, de nature statutaire, sont en cours d’examen au Parlement. Enfin nous avons veillé, cette année, à définir une nouvelle articulation entre les interventions du juge administratif et du juge judiciaire dans le contentieux des étrangers, afin de parvenir à une plus grande lisibilité et à un traitement plus logique et plus efficace des dossiers, dans le respect du droit des personnes. Je sais l’accroissement de la charge de travail qui en résulte pour les juridictions administratives et les inquiétudes qui peuvent en résulter. Il y a là un sujet de réflexion.
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Vœux J’estime enfin que moderniser notre système judiciaire, c’est aussi savoir développer les modes alternatifs de règlement des litiges. Certains conflits gagnent à être réglés autrement que dans le cadre d’un procès. C’est pourquoi le régime de la conciliation et celui de l’arbitrage ont été profondément rénovés en 2011. Nous avons également transposé une directive européenne relative à la médiation. En outre, la nouvelle « procédure participative » permettra aux parties, en présence d’avocats, de parvenir, dans le cadre d’une convention négociée, à un accord susceptible d’être rendu exécutoire par un juge. Et je crois pouvoir annoncer des avancées prochaines dans la mise en place de recours administratifs préalables obligatoires dans les contentieux de la fonction publique, ainsi que le législateur l’a souhaité.
III. Mieux lutter contre la délinquance et prévenir la récidive Le Gouvernement s’est particulièrement mobilisé sur ces deux chantiers prioritaires afin d’imaginer les solutions les mieux adaptées et les plus efficaces, mais aussi pour répondre à une série de difficultés concrètes qui ont surgi cette année. La justice ne peut être pleinement efficace si elle ne dispose d’outils diversifiés et adaptés à l’évolution des actes de délinquance. Je veux dire à cet égard ma conviction que la prison ne peut constituer la seule réponse. Je veux dire aussi que lorsque l’incarcération est nécessaire, elle ne doit pas être identique pour toutes les peines. 1. J’ai souhaité que nous développions les aménagements de peine et, plus généralement, toutes les solutions qui favorisent la prévention de la récidive
Ainsi, au 1er janvier 2012, près de 10 700 condamnés bénéficiaient d’un aménagement de peine sous écrou sous forme de surveillance électronique, de semi-liberté ou de placement extérieur, soit 27% de plus qu’il y a un an, 125% de plus qu’en mai 2007. Ces données démentent, s’il en était besoin, l’idée que nous nous serions aveuglément engagés dans la voie du « tout carcéral ». J’ai également donné une nouvelle impulsion au travail d’intérêt général, car je suis convaincu des vertus de ce dispositif pour la reconstruction du lien social. 2. Parallèlement nous avons poursuivi, et je l’assume pleinement, la nécessaire extension et la modernisation du parc pénitentiaire
Nul programme de réinsertion ne peut en effet prospérer sans des conditions dignes de détention. Avec le nouveau programme pour l’immobilier pénitentiaire, et son prolongement par le projet de loi de programmation sur l’exécution des peines, nous accroissons la capacité du parc, mais nous veillons aussi, et c’est très important, à diversifier les structures pour mieux les adapter à la diversité des profils des détenus. Qui peut comprendre, en effet, que nous appliquions les mêmes règles de sécurité à des détenus dont les profils sont radicalement différents ?
Beaucoup, évidemment, reste à faire pour améliorer nos prisons, et nous sommes particulièrement attentifs aux avis rendus par Monsieur le contrôleur général des lieux de privation de liberté que j’ai plaisir à saluer. L’inspection des services pénitentiaires est d’ailleurs chargée d’un dispositif de suivi de ses préconisations. Un travail commun est également mené avec les services de la protection judiciaire de la jeunesse pour l’amélioration des quartiers pour mineurs comme des établissements pour mineurs, ainsi que des centres éducatifs fermés. 3. Mais la justice ne peut être crédible si ses décisions ne sont pas exécutées : c’est pourquoi j’ai lancé en février dernier un plan national d’exécution des peines, notamment des peines d’emprisonnement
Les premiers résultats de cette action doivent être intensifiés, et tel est l’objet du projet de loi de programmation que j’é voquais il y a un instant et que je m’attacherai à faire adopter définitivement avant la fin de la législature. Parce qu’il faut s’assurer de l’efficacité et de la continuité entre tous les maillons de la chaîne de l’exécution, les services de l’exécution et de l’application des peines seront renforcés ; les outils d’évaluation de la dangerosité et les soins en détention seront par ailleurs développés, car ils participent à une prévention toujours plus efficace de la récidive.
Dans le champ du droit des étrangers, que j’évoquais il y a quelques instants, il nous a ainsi fallu mener de front la réforme de nos procédures contentieuses et la gestion des conséquences d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne interprétant la directiveretour de 2008 ; nous y sommes, je crois, maintenant parvenus. De même, la grande loi de modernisation du 28 mars 2011 renforçant le rôle et les moyens d’intervention des professions juridiques et judiciaires intervient à une période où leur statut est interrogé par les juridictions et institutions européennes ; soyez assurés, à cet égard, que dans les mois à venir nous serons attentifs à ce que rien ne vienne affaiblir la sécurité que nous devons garantir à nos concitoyens dans les relations juridiques. C’est dans ce même esprit que nous veillerons à ce que la proposition de règlement sur le droit européen de la vente ne fragilise pas la protection accordée aux consommateurs et aux petites et moyennes entreprises, ou encore à ce que la proposition de directive sur l’accès à l’avocat ne fragilise pas un équilibre maintenant satisfaisant entre les droits des gardés à vue et les nécessités de l’enquête. Plus que jamais, la clarté, la prévisibilité et l’accessibilité du droit européen sont des sujets majeurs. Si nous avons parcouru une partie du chemin vers une justice mieux comprise, plus efficace et davantage respectée, beaucoup reste donc encore à faire car tous les chantiers, c’est évident,
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Mais je veux rappeler aussi, alors que nous nous trouvons dans une situation budgétaire sans précédent, que le Gouvernement et le Parlement ont continué à se mobiliser pour la justice : entre 2007 et 2012, le budget de la justice aura ainsi augmenté de 20%, et la hausse atteint près de 4% pour la seule année 2012.
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Michel Mercier
4. Enfin, j’ai souhaité, au cours de l’année passée, améliorer le fonctionnement de la justice des mineurs et adapter la réponse pénale à l’évolution de leur délinquance
La loi du 10 août 2011, avec le dossier unique de personnalité, la création du tribunal correctionnel pour mineurs ou encore l’élargissement des conditions de placement en centres éducatifs fermés, nous donne des outils efficaces pour apporter des réponses mieux adaptées. Il importe maintenant de réduire les délais de prise en charge des mineurs délinquants et la loi de programmation pour l’exécution des peines prévoit à cet effet la création de postes d’éducateurs. Mesdames et Messieurs, Notre justice est confrontée à des défis immenses et chacun à notre place, nous avons œuvré cette année à y répondre au mieux. Nous l’avons fait, faut-il le rappeler, dans un cadre européen de plus en plus prégnant, et en même temps de plus en plus mouvant et incertain.
n’ont pu être menés à leur terme. Je pense, parmi bien d’autres exemples, à la réforme de notre droit des contrats, qui a été largement préparée et qui, j’en suis sûr, trouvera le moment venu sa concrétisation, car il y va de la compétitivité et de l’attractivité juridiques de notre pays. A ce titre, le maintien de la Cour internationale d’arbitrage à Paris a constitué un succès pour le Gouvernement qui est, aujourd’hui, pleinement mobilisé pour parvenir à obtenir le siège de la division centrale de la juridiction unifiée en matière de brevets. Tous ces sujets seront, très naturellement, au coeur des enjeux des échéances électorales à venir. Je m’emploierai, pour ma part, à garantir, comme je l’ai toujours fait, l’indépendance et la sérénité de la justice, à rester à l’é coute de l’ensemble de ses acteurs et à veiller à la bonne mise en œuvre des réformes que je m’honore d’avoir portées. Mesdames et Messieurs, Que cette nouvelle année vous apporte toutes les satisfactions que vous en attendez sur le plan professionnel et personnel !
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Vœux
Conseil National des Barreaux Voeux à la presse - Paris, 20 janvier 2012
Vendredi dernier au nom du Conseil National des Barreaux, son Président le Bâtonnier Christian Charrière-Bournazel, ayant à sa droite le Bâtonnier Jean-Luc Forget, Président de la Conférence des Bâtonniers, entouré des membres de son Bureau, a présenté ses vœux à la presse en une allocution où il s’est exprimé avec une éloquence, une culture et une aisance dans l’e xpression qui forcent l’admiration. Attaché profondément à sa profession par ses racines, il entend poursuivre dans la continuité et le progrès, la tâche entreprise dès son entrée au Barreau comme Membre du Conseil de l’Ordre puis comme Bâtonnier de Paris, dont le mandat fut exemplaire. Ses chroniques hebdomadaires dans le Bulletin du Barreau, en témoignent. Leur rayonnement fut national. Son élection de maréchal le prouve. A l’issue de son allocution, il répondit avec humour, compétence et sagesse, aux questions posées : garde à vue, avocats dans l’entreprise, jurés dans les tribunaux correctionnels, etc… Il y a associé le Président Jean-Luc Forget, dont on apprécie dans ses interventions la précision, le savoir et la clarté, qui s’e xprima notamment sur la réforme de la carte judiciaire qui, pour certains n’est pas achevée, comme l’a souligné le Premier Président Jacques Degrandi lors de la rentrée solennelle de la Cour d’Appel de Paris ; le Conseil National des Barreaux et la Conférence des Bâtonniers entendent donc demeurer vigilants. Cette cérémonie augure que le Conseil National des Barreaux continue d’avoir un bon capitaine, chaque Président, bien que marquant de sa personnalité cette institution, poursuit le même objectif : la représentation unitaire de la profession, de concert avec le Barreau de Paris et la Conférence des Bâtonniers. A. Coriolis et Jean-René Tancrède
Lignes d'action
Christian Charrière-Bournazel
Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
par Christian Charrière-Bournazel l ne m’appartient pas de vous donner une orientation définitive sur des sujets techniques qui seront débattus en assemblée générale. Toutefois, je puis vous dire quelles seront certaines de nos préoccupations.
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I. La refonte de la formation Actuellement de dix-huit mois, elle n’est plus adaptée. En arrière plan, nous avons le désir d’une formation commune, avocats/magistrats, dont nous parlons déjà depuis longtemps, afin de casser le mur entre les cultures. L' Angleterre, le Canada ou l’Allemagne ont un système de beaucoup préférable. Il est significatif qu’en France, plusieurs dizaines de postes de magistrats déjà budgétés ne soient pas pourvus, simplement parce qu’il s’agit de recrutements au tour extérieur. On peut en déduire une certaine imperméabilité du corps issu de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) à l’égard de ceux qui viennent d’ailleurs.
II. Le juridiciaire Le statut du parquet
Cette réflexion doit prendre place dans une véritable réforme de la procédure pénale qui n’a toujours pas eu lieu, malgré le discours du Président de la République du 7 janvier 2009
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devant la Grand’ Chambre de la Cour de cassation dont je rappelle les grandes lignes : - substituer une culture de la preuve à une culture de l’aveu ; - inventer un véritable habeas corpus à la française ; - ne pas craindre la présence de l’avocat le plus tôt possible dès le début de l’enquête puisqu’il est astreint à une déontologie rigoureuse ; - mettre à égalité d’armes l’accusation et la défense, que ce soit celle des victimes ou des suspects ; - instituer une juridiction de l’instruction qui, à l’inverse de ce qui se passe aujourd’hui, donnera ses ordres au parquet et en contrôlera les actes, soit de son propre chef, soit pour avoir été saisie par les parties ;
- mettre à la charge de l’Etat les frais d’enquêtes, d’expertises, de recherches des preuves pour ne pas pénaliser les pauvres. Rien à ce jour n’en est sorti, à l’exception de la réforme - imparfaite - de la garde à vue. Les actions de groupe et dommages-intérêts punitifs
C’est un axe de réflexion important sur lequel nous souhaitons que les choses avancent. L’aide juridictionnelle
Une double réflexion doit être menée sur un contrôle plus efficace des affaires qui méritent d’être admises à l’AJ et sur une véritable rémunération dont le financement n’est pas difficile à trouver sans qu’il pèse sur les finances publiques.
Les Annonces de la Seine - jeudi 26 janvier 2012 - numéro 7
Vœux III. Le conseil et l'activité juridique Dès 2008, pendant mon bâtonnat, le Conseil de l’Ordre de Paris avait ouvert l’activité d’avocat à des domaines nouveaux : transactions immobilières, agent sportif, agent artistique, contrats d’assurance. De son côté, la loi a permis à l’avocat d’être fiduciaire. Le Conseil National des Barreaux, de son côté, a réfléchi sur l’adaptation de la déontologie, à ces nouveaux champs. Pour rester simples, retenons que partout où le droit est en question, l’avocat est plus légitime que tout autre puisqu’il est astreint à une déontologie exigeante : indépendance, respect du secret, vigilance constante sur le conflit d’intérêts et désintéressement (l’avocat n’est pas l’associé de son client). Des débats restent ouverts qui seront approfondis : - l’interprofessionnalité fonctionnelle entre
expert-comptable et avocat pour que, dans un même lieu, une entreprise ou un particulier puisse trouver conseil auprès du praticien du droit comme auprès de celui du chiffre. C’est un des sujets importants sur lesquels travailler ; - le sujet de l’avocat en entreprise comme celui de l’accès des parlementaires à la profession d’avocat demeurent en chantier ; - l’ouverture sur l’Europe et l’étranger : l’avocat français n’est pas seul au monde. Le CNB, comme la Conférence des Bâtonniers et le barreau de Paris, est présent à Bruxelles par l’intermédiaire de la Délégation des barreaux de France (la DBF) pour être en contact constant avec les autorités européennes. L’ancien président du Conseil national des barreaux, Michel Bénichou, est plus particulièrement chargé de ces relations avec l’Europe. Deux visions, en effet, s’opposent : - la nôtre, celle des barreaux latins, qui tiennent à leur spécificité déontologique et à l’autorégulation, c’est-à-dire au jugement des avocats fautifs par leurs pairs, - tandis que l’autre vision, plus anglo-saxonne, privilégie, au nom de la concurrence, une déréglementation en même temps que l’assouplissement des règles du conflit d’intérêts et la banalisation des services juridiques. Plusieurs de ces pays ont renoncé au pouvoir d’autorégulation et à l’organisation ordinale à laquelle, au contraire, nous tenons comme garante de notre indépendance. En même temps, il appartient au CNB chargé de la formation de favoriser, partout en France, l’acquisition par les futurs avocats de cultures étrangères. Nous essaierons de généraliser ce que j’avais mis en place pour Paris : des prêts à tous les élèves des centres de formation professionnelle des avocats pour leur permettre, sans qu’ils aient à fournir de caution, d’emprunter afin d’aller faire des études ailleurs dans le monde : en Europe, en Amérique, en Océanie, ou même en Afrique et en Asie. Parallèlement, pour permettre le rayonnement de notre système juridique et de notre culture, nous devons être beaucoup plus accueillants à l’égard des jeunes avocats issus de pays
francophones qui n’ont pas toujours les moyens de pourvoir à leurs besoins en France : pourquoi ne pas les loger, un mois ou deux, chez l’habitant ?
IV. Le Conseil national des Barreaux, sentinelle des libertés Le barreau français, qu’il s’agisse des avocats de Paris ou des avocats de province, remplit un rôle de vigilance constante en faveur des libertés. Des combats naguère commencés ne sont pas achevés ou vont devenir à nouveau nécessaires en raison de menaces récurrentes. 1) Le blanchiment
Nous avions obtenu, non sans peine, que la 3ème directive anti-blanchiment du 26 octobre 2005 ne soit pas transposée telle quelle en droit interne français. Si tel avait été le cas, l’avocat français aurait été obligé, dès qu’il aurait eu le soupçon que l’argent de son client, destiné à une opération juridique nouvelle, provenait d’un délit (en ce compris la fraude fiscale), de le dénoncer directement à Tracfin sans en prévenir le client concerné, sous peine d’encourir une amende ! La transposition française a imposé que la déclaration de soupçon se fasse par l’intermédiaire du bâtonnier et que l’avocat puisse dissuader son client afin de ne pas avoir à le dénoncer. Or, sous prétexte que les bâtonniers ne déclareraient pas suffisamment ou pas du tout de soupçon, les pouvoirs publics sont en train d’imaginer (et Bruxelles avec eux) d’imposer à l’avocat, même lorsqu’il refuse de participer à une opération qui ne lui paraît pas saine, de
En effet, aujourd’hui, la loi prévoit que lorsqu’une personne est convoquée pour une audition dite libre, elle n’est pas accompagnée d’un avocat. Elle peut être convoquée par la police sans être menacée de garde à vue, simplement parce qu’elle a fait l’objet d’une plainte auprès du procureur. Nous allons nous battre pour qu’une réforme intervienne, sans délai, et nous interpellerons les candidats à la présidentielle sur ce sujet : a/ La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme du 4 novembre 1950 prévoit que tout accusé a le droit de savoir ce dont on l’accuse. Il est donc indispensable que, lorsqu’une plainte est déposée contre quelqu’un, il ne puisse être ni convoqué, ni interrogé, ni mis en cause publiquement sans avoir connaissance de la plainte en question. C’est une évidence. b/ En second lieu, dès lors qu’une personne mise en cause par une autre, ou suspectée d’un fait contraire à la loi ou même lorsqu’elle est requise pour témoigner, elle doit pouvoir se faire accompagner de son avocat, témoin de la régularité de l’audition et de la retranscription de ce qui a été dit. 3) La confraternité solidaire
Le CNB a également pour rôle de venir en aide à tout confrère qui serait en difficulté pour avoir exercé son métier ou dont la liberté d’action ou de parole serait limitée de manière injustifiée, ou encore qui ferait l’objet d’intrusions illégitimes de la puissance publique mettant en péril le secret. Je prends un exemple récent : parce qu’ils ont protesté contre la sévérité systématique des arrêts rendus en appel par la Cour de Nîmes, les avocats du ressort et les bâtonniers font l’objet de réprobations et sont éventuellement menacés de poursuites pour avoir exprimé leur désaccord.
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Il est significatif qu’en France, plusieurs dizaines de postes de magistrats déjà budgétés ne soient pas pourvus, simplement parce qu’il s’agit de recrutements au tour extérieur. On peut en déduire une certaine imperméabilité du corps issu de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) à l’égard de ceux qui viennent d’ailleurs.
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Christian Charrière-Bournazel
dénoncer le soupçon d’un délit initial qui aurait procuré un argent douteux. Les avocats seraient ainsi transformés en des délateurs sournois, auxiliaires de la police, véritables indics, qui n’auraient que le choix de trahir. C’est évidemment inenvisageable et inacceptable et s’il le faut, nous prônerons à nouveau la désobéissance civile.
Le CNB leur témoigne, d’ores et déjà, son soutien et si l’un ou l’autre était poursuivi pour avoir critiqué une manière de juger dénotant une volonté systématique d’aggraver plutôt que d’être juste avec impartialité, le président ou les vice-présidents, ou plus généralement les membres disponibles du CNB, iraient plaider pour eux au côté de leurs avocats.
2) La garde à vue
4) La solidarité internationale
Vous savez quel combat nous avons mené pour que la législation française s’aligne enfin sur les critères européens en matière de garde à vue. La loi et la jurisprudence ont fait des progrès considérables. Mais ils ne sont pas totalement satisfaisants.
Enfin, le CNB est présent et sera présent à chaque fois que des avocats dans le monde auront besoin des témoignages d’avocats français et de leur soutien dans la lutte qu’ils mènent pour les droits de la défense et les libertés. (…)
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Vœux
Chambre des Notaires de Paris et Conseil Supérieur du Notariat Musée d'orsay - 17 janvier 2012
Valeurs intemporelles par Christian Lefebvre (…) e dirai simplement qu’au nom des 705 notaires de la Compagnie interdépartementale des notaires de Paris, je vous souhaite chaleureusement et sincèrement une bonne et heureuse année pour vousmême, vos proches, nos différents environnements professionnels et notre pays. Que 2012 fasse mentir, pour une fois, les pessimistes et les déclinistes. Nous avons la chance de compter ce soir un très grand nombre d’amis. Nous nous en réjouissons et je pense qu’ainsi nous allons passer une soirée agréable au cœur d’un musée exceptionnel, un des 10 musées les plus visités au monde : 3 100 000 entrées en 2010. Ce musée vient d’être complètement restructuré pour ses 25 ans d’existence : 2 000 m² complémentaires sont ouverts aux expositions ; la moitié des œuvres ont été raccrochées ; la mise en valeur des collections a été considérablement améliorée. En un mot, vous allez pouvoir redécouvrir ce soir ce musée que vous connaissez certainement déjà bien. C’est une nouvelle naissance après ces 25 ans, qui est celui de la jeunesse. (…) Que, pour la quatrième fois en peu de temps, le notariat organise ses vœux dans un musée pourrait vous faire penser que notre profession reste bien traditionnelle dans son posi-
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Christian Lefebvre et Benoit Renaud solides sur lesquels nous pouvons nous appuyer. Pour construire l’avenir, il nous faut des repères et des valeurs à transmettre dans ce nouvel équilibre mondial qui veut s’imposer dans les pires difficultés. En effet, ces difficultés nous conduisent à faire appel à des valeurs qui, pour être anciennes, sont intemporelles, et qui se réinventent en permanence parce qu’elles témoignent de la
On a beaucoup évoqué la « muséification » de notre pays et surtout de sa capitale. On a tort, car ce qualificatif est devenu un slogan péjoratif qu’il ne mérite pas. Le souci de la préservation du passé n’est Christian Lefebvre ni passéiste, ni passif, ni conservateur, ni rétrograde.
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tionnement, et peu portée sur l’innovation. On a beaucoup évoqué la « muséification » de notre pays et surtout de sa capitale. On a tort, car ce qualificatif est devenu un slogan péjoratif qu’il ne mérite pas. Le souci de la préservation du passé n’est ni passéiste, ni passif, ni conservateur, ni rétrograde. Se consacrer au développement de nos musées, ce n’est pas céder à la tentation de se tourner vers le passé et de négliger l’action. Au contraire, la culture et le patrimoine sont des vecteurs
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Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
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beauté, de la dignité et du tragique de notre destin. Si le Musée d’Orsay est aussi populaire et apprécié du monde entier c’est parce que la période à laquelle il se consacre reste fondatrice de notre sensibilité et de notre conception du monde. La période impressionniste dont il est l’écrin qui est celle de la naissance de la peinture moderne, est aussi celle de la naissance de la France moderne, entre les académismes et les avantgardes, entre les anciens et les modernes, qui
ont tous deux leur place, dans notre Panthéon certes, mais aussi dans notre Futuroscope. Raison de plus, devant ces œuvres qui nous parlent dans leur silence lui-même, de rechercher cette étincelle nécessaire pour discerner les voies du futur : dégager les fondamentaux sur lesquels construire ; mais isoler aussi l’éphémère pour déconstruire. Les civilisations les plus dynamiques ont, toutes, aspiré au dialogue avec le meilleur de leurs héritages. Notre passé est le gage de notre avenir. Et les musées comme Orsay témoignent aussi de leur profonde modernité. Par la maîtrise du progrès technologique qui a démultiplié les possibilités d’archivage ; par l’extension de la numérisation qui permet de raviver les couleurs dans la fidélité totale à l’auteur. Ces œuvres dont Malraux disait qu’elles avaient été repeintes en blanc par les siècles et qu’elles nous étaient parvenues sans couleur, ce nouveau Musée d’Orsay les a ravivées avec son nouveau décor. Nous dirions, dans notre langage professionnel, qu’il a réussi cet exploit d’en présenter une nouvelle formule authentique. Toutes ces valeurs sont notariales, de la tradition revendiquée à l’extrême modernité. Vous permettre ce soir de mieux les connaître, c’est vous permettre de mieux nous connaître. Pour toutes ces raisons, cette étape du Musée d’Orsay ne sera probablement pas la dernière en termes de choix de musée. Mais nous nous réservons bien évidemment la possibilité de faire des incursions dans d’autres domaines et sur d’autres sites. D’ailleurs, Paris n’est-il pas globalement un « musée à ciel ouvert » ?
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Vœux Retrouver la stabilité de la règle par Benoit Renaud omme l’a bien dit Christian Lefebvre, président de la Chambre des notaires de Paris, un musée et particulièrement celui d’Orsay est toujours une illustration de la rencontre entre tradition et modernité, comme vous l’avez bien compris, cette alliance subtile se veut être aussi celle de vos hôtes qui par ma voix, vous souhaitent une heureuse année. Faut-il pour autant en déduire que notre vieille Europe est vouée aux souvenirs, à la nostalgie d’un passé glorieux. Il est vrai que le Musée d’Orsay en serait le plus parfait exemple tant il magnifie le XIXème siècle triomphant. Pour autant comme il serait heureux que le XXIème siècle fut celui de la renaissance. J’observe comme vous que la hiérarchie mondiale évolue rapidement. Après la Chine, deuxième puissance mondiale menaçant le leadership des Etats-Unis d’Amérique, voici le Brésil qui s’empare de la sixième place, naguère détenue par l’Angleterre. Non loin l’Argentine revenue des abysses de la dépression progresse à grands pas et l’immense Russie est annoncée comme devant bientôt s’inscrire dans le peloton de tête. Le G8 de demain ne sera plus celui d’aujourd’hui. Mais la France en fera-t-elle partie ? Oui bien entendu et il faut tordre le cou aux pessimistes de tout poil qui professent à longueur de colonnes dans les journaux leurs sentences. Car la France ne manque pas d’atouts pour se maintenir dans l’excellence. J’en veux pour preuve, la qualité de notre formation qui s’exprime de nos écoles jusqu’à nos universités. J’en veux pour preuve, le taux de natalité qui fait de nous un pays jeune et innovant. J’en veux pour preuve, la diversité de nos richesses, naturelles, culturelles. J’en veux pour preuve, cette capacité d’innovation qui fait de nous des leaders dans de nombreux domaines de progrès pour notre vie quotidienne. Mais il est une preuve de notre force que l’on aurait tendance à oublier voire malheureusement à méconnaître, il s’agit de notre système juridique qui constitue un avantage considérable. Les USA ne se sont pas trompés sur l’importance d’un système de droit, puisqu’ils imposent directement ou par l’intermédiaire des organismes qu’ils contrôlent la common law à l’américaine. Et la méthode employée est alors classique chez les pays dominants : vous obtempérez ou vous n’obtiendrez pas notre soutien. Heureusement face à cet entrisme forcené, la résistance s’est organisée. Ainsi, vous remarquerez comme moi que la Chine que l’on appelle aujourd’hui au secours de nos finances défaillantes est un pays de droit écrit qui s’est doté d’un notariat. Ce choix n’a pas été fait au hasard et le notariat français y aura beaucoup contribué.
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Et le Brésil qui a supplanté la Grande-Bretagne est un pays de droit écrit qui entretient depuis longtemps la tradition notariale. Et de même l’Argentine où est née l’Union internationale du notariat aujourd’hui présidée par un Français, est un pays de droit résolument latin. Je n’oublierai pas la Russie qui a développé son notariat, et qui compte sur ses officiers publics pour lutter contre le blanchiment de l’argent sale. On pourrait s’étonner de voir les notaires en première ligne de ce combat mais ce sont là des fonctions auxquelles répugnent les ultralibéraux, lesquels s’accommodent aisément au prétexte du secret professionnel de pratiques douteuses tant qu’elles n’entravent pas la si chère liberté d’entreprendre, et surtout celle des conquérants anglo-saxons bien évidemment ! Ceux-là que l’on aurait pu croire accablés par la crise des subprimes et la dénonciation des pratiques bancaires aventureuses demeurent présomptueux et persistent dans leur credo obsolète de la concurrence à outrance, d’une liberté débarrassée du pseudo carcan de la régulation et de la sécurité. Certains esprits clairvoyants que l’on trouve même au sein du Barreau s’inquiètent aujourd’hui des initiatives de la commission européenne qui verraient sans sourire et sans frémir les supermarchés vendre du conseil juridique ou des statuts de sociétés préfabriqués comme l’on fait des choux-fleurs. Quand bien même le réveil serait tardif, il est bienvenu après tant d’années qui aura vu les bâtonniers français fasciner par le droit anglosaxons au point parfois d’être le cheval de Troie du droit anglo-saxon de leurs associés des cabinets d’outre- Atlantique ou d’outre-Manche. Notre avenir, notre modernité est justement d’avoir des traditions, un passé, une culture commune, et défendre nos valeurs n’est pas être passéiste c’est au contraire faire le choix de l’efficacité, de la sécurité.
un système intelligent qui consiste à déléguer à des officiers publics que le pouvoir contrôle, la perception de certaines taxes avec un taux de rendement remarquable. En ces temps où la moitié de notre planète tente de sortir du sous-développement, il apparait tout à coup qu’il existe un système intelligent qui se nomme le titrement inventé par les notaires du monde et qui consiste à octroyer à chacun, du paysan au plus riche, des titres de propriété qui pourront leur fournir une base solide pour investir, accéder au crédit, voire tout simplement vivre sans crainte d’être spolier. Ce sont ces mêmes notaires, instituteurs de la loi, collecteurs de l’impôt, rédacteurs impartiaux des contrats, qui se sont liés aux associations qui militent pour la fourniture de documents d’état civil aux enfants pour leur ouvrir le chemin de l’école et donc du savoir et donc du développement. Nous sommes dans une année charnière où les choix se feront dans le secret des isoloirs. Chacune et chacun pris dans les affres de catastrophes annoncées s’interroge sur le meilleur choix pour son pays, pour ses enfants et petits-enfants. Nous sommes dans cette expectative lourde car il ne faut entretenir l’idée que le vote est sans conséquence tant seraient étroites les marges de manœuvre. L’illusion serait de croire que l’on choisit une personnalité davantage qu’une politique. Les notaires de France parce que c’est leur métier plaideront clairement pour des solutions durables, des solutions de long terme. Il faut en finir avec la pratique ancienne et malheureusement partagée par tous les partis, du vote de lois de circonstances, d’une fiscalité pulvérisée au gré de 4 lois de finances par an, de la réglementation bavarde. La loi n’est pas un hochet que l’on agite avec frénésie pour démontrer l’activisme de l’exécutif ou l’é crasante charge des représentants du peuple.
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Aujourd’hui déjà, 15 pays du G20 ont un notariat, symbole du droit écrit dont l’acte authentique est le fleuron. Demain les EtatsUnis se sentiront bien seuls au G8. Ils seront entourés par des pays de droit continental c'est-à-dire par des pays qui privilégient la Benoit Renaud sécurité juridique.
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Aujourd’hui déjà, 15 pays du G20 ont un notariat, symbole du droit écrit dont l’acte authentique est le fleuron. Demain les Etats-Unis se sentiront bien seuls au G8. Ils seront entourés par des pays de droit continental c'est-à-dire par des pays qui privilégient la sécurité juridique. Et en ces temps de pénurie budgétaire où les gouvernements européens aux abois font tout pour tenter de réduire leur train de vie, il leur apparait tout à coup qu’il existe un système intelligent qui consiste à déléguer à des officiers publics que le pouvoir contrôle, des services publics sans qu’il en coûte un centime au budget de la nation. En ces temps où la collecte des recettes se fait hasardeuse, il apparait tout à coup qu’il existe
Dans notre système de droit, la loi doit être un phare qui éclaire le citoyen et auquel il peut se fier sans crainte qu’elle ne change au moindre prétexte. Voilà un vœu qui ne se veut pas pieux ; car il est primordial que l’on retrouve la stabilité de la règle. Et l’observation vaut aussi pour lutter contre l’agitation de la Commission européenne que l’on aurait pu espérer assagie par les déboires de l’euro mais qui au contraire persiste dans l’arrogance propre à ceux qui échappent au verdict des urnes, comme d’ailleurs au paiement de l’impôt. Stabilité, pour éclairer le chemin, n’est-ce pas cette tradition pour modéliser l’avenir que j’évoquais au début de mon propos ? (…)
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Préfecture des Yvelines Vœux de Monsieur le Préfet aux personnalités Versailles - 13 janvier 2012
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Michel Jau
l'occasion de la nouvelle année, le Préfet Michel Jau a présenté ses vœux aux nombreuses personnalités du département le 13 janvier 2012. Près de 500 personnalités étaient ainsi réunies lors de cette cérémonie traditionnelle républicaine, parmi lesquelles Alain Schmitz, Président du Conseil Général des Yvelines, David Douillet, Ministre des Sports, les Sénateurs Gérard Larcher et Alain Gournac, la Sénatrice Marie-Annick Duchêne, le Député Pierre Lequiller, l'ancienne Ministre et Conseillère Générale, Christine Boutin, les représentants des cultes religieux dans le département au premier rang desquels Monseigneur Eric Aumonier, Archevêque de Versailles, Samuel Sandler, Président de l'Association Cultuelle Israélite de Versailles et de sa Région, Ali Berka, Président de l'Union
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Islamique des Yvelines, Mohammed OuldKherroubi, Président de l'Association des Musulmans des Yvelines, ainsi que les Consuls Généraux du Maroc et de l'Algérie, les magistrats, les militaires, le monde associatif, de nombreux chefs d'entreprises issus du secteur de l'automobile, du spatial, de l'aéronautique, du secteur alimentaire, et les Présidents des Chambres consulaires. Ce fut un moment d’une grande convivialité et où l’affluence témoigne de l’importance du département des Yvelines, un des fleurons de l’Ile-de-France ainsi que de l’audience du représentant de l’Etat dans le département. Michel Jau a évoqué dans son discours les sujets qui préoccupent le plus ses administrés ainsi que les grands dossiers d'aménagement du territoire 2012 : le Grand Paris, l'OIN de
Paris Saclay, la construction de l'Axe Seine, le Schéma Départemental de Coopération Intercommunale. Il a aussi rendu un vibrant hommage à l'engagement fort de tous les agents des services de l'Etat à la recherche permanente de l'intérêt général, il a aussi rappelé que l'Etat poursuivrait son action en 2012 pour améliorer encore la protection des citoyens, le soutien à l'emploi et la politique du développement du logement, avec pour seul objectif de renforcer la cohésion sociale pour un « mieux vivre ensemble ».
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