LES ANNONCES DE LA SEINE Lundi 3 février 2014 - Numéro 8 - 1,15 Euro - 95e année
Conférence des Bâtonniers
Marc Bollet et Christiane Taubira
VIE DU DROIT
Conférence des Bâtonniers - Oser la réforme par Marc Bollet .................................. 2 l Confédération Nationale des Avocats. Salon européen de l’Avocat et du droit - Etre avocat : une vocation par Louis-Georges Barret ........ 13 - Thi My Hanh Ngo-Folliot élue Première Vice-Présidente de la CNA ........................... 16 l
RENTRÉE SOLENNELLE
Cour d’appel de Metz - Respecter la règle de droit par Henri-Charles Egret ...... 5 - Le Ministère public à la Française par Jean-Marie Beney .. 5 l
VIE DES CABINETS D’AVOCATS
La Lettre des Réseaux - « Simon Associés » lance un nouveau site................ 9
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AU FIL DES PAGES l
Cybersociété Entre espoirs et risques ................... 9
CHRONIQUE
A moyens budgétaires quasi constants, est-il possible d’améliorer le fonctionnement de l’institution judiciaire et de renforcer la confiance des citoyens dans la Justice ? par Renaud Chazal de Mauriac ............................ 10
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ANNONCES LÉGALES ................................ 17 PASSATION DE POUVOIRS Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce - Philippe Bobet succède à Frédéric Barbin .......... 23
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DÉCORATION l
Thierry Bary Chevalier de la Légion d’honneur.... 24
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our la première fois en sa qualité de Président élu, Marc Bollet, qui a succédé à Jean-Luc Forget le 1er janvier dernier, a ouvert l’Assemblée générale statutaire annuelle de la Conférence des Bâtonniers ce vendredi 31 janvier 2014. Comme l’an passé, Christiane Taubira a tenu à assister personnellement à cette manifestation incontournable du monde judiciaire français qui rassemble de nombreux représentants des 35 000 avocats rattachés à 160 Barreaux et qui a revêtu un caractère original et innovateur par l’organisation de trois tables rondes successivement animées par Jean-Luc Forget (Toulouse) et Dominique de Ginest (Dax), puis par Fabienne Roy Nansion (Boulogne-sur-Mer) et Philippe Joyeux (Nantes) et enfin par Hélène Marichal (Châlons-en-Champagne) et Jean-Luc Médina (Grenoble). Les questions posées à Christiane Taubira furent notamment les suivantes : - quelle sera la place de l’avocat dans les juridictions du 21ème siècle ? « Votre présence à l’Unesco les 10 et 11 janvier derniers, dans les commissions a été fondamentale. Rien ne peut s’élaborer sans vous et sans votre concours ». - à propos de la carte judiciaire, le décret du 27 décembre 2013, marque la volonté du Gouvernement de l’améliorer et de l’ajuster, toutefois le regroupement des cantons peut faire craindre le contraire, qu’en pensez-vous ? « Le Gouvernement maintiendra les dispositions du décret du 27 décembre 2013, la réforme des cantons ne devant pas y porter atteinte ». - quelle est la politique pénale du Gouvernement en présence d’une inflation législative exponentielle sans précédent ? Avocats et magistrats peinent. Quelles sont vos intentions en matière de peines planchers et de lutte contre la récidive ? « Je m’engage à rendre au juge son pouvoir d’appréciation et à
lutter contre la récidive par des moyens humains supplémentaires en particulier en matière de justice des mineurs ». - une question a porté sur l’avenir et le développement des réseaux virtuels pour les avocats et les magistrats ainsi que sur l’utilisation des nouvelles technologies dans le monde de la justice ; quelle est l’utilité de ces réseaux ? « La communication par voie électronique doit simplifier et clarifier le droit et les procédures pour faciliter la vie des citoyens et des entreprises dans leurs relations avec la justice ». A l’issue de ces tables rondes, qui ont suscité l’enthousiasme de la salle, s’est ouverte la séance solennelle traditionnelle. Marc Bollet a évoqué les sujets qui intéressent particulièrement ses confrères : la réforme de la justice afin « qu’elle soit plus simple, plus accessible et plus efficace » mais aussi celle de l’aide juridictionnelle pour améliorer l’accès au droit et à la justice pour tous. Quant à la Ministre de la Justice, « résolument à l’écoute », elle s’est engagée à mener une politique de solidarité : la réforme judiciaire doit être faite ensemble a-t-elle déclarée, convaincue de la qualité et de l’exigence des revendications des avocats. Avant de conclure, elle a insisté sur une priorité nationale du Gouvernement de Jean-Marc Ayrault qui lui tient particulièrement à cœur : tout mettre en œuvre afin que le Ministère de la Justice bénéficie d’une nouvelle progression de son budget avec une hausse de 1,5 % en 2014 pour atteindre un montant global de 7,81 milliards d’euros. En effet, Christiane Taubira met un point d’honneur, malgré un contexte budgétaire difficile de redressement des finances publiques, à ce que le budget de son Ministère reste prioritaire notamment en matière d’emplois afin que la réforme en profondeur de la Justice, pour laquelle elle plaide depuis vingt mois, aboutisse et place enfin le citoyen « au cœur du service public de la justice ». Jean-René Tancrède
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Assemblée générale, 31 janvier 2014
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Vie du droit Marc Bollet
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Comité de rédaction : Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Agnès Bricard, Présidente de la Fédération des Femmes Administrateurs Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Magistrat honoraire Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Chloé Grenadou, Juriste d’entreprise Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Gérard Haas, Avocat à la Cour, Président de Gesica Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président Honoraire de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président d’Honneur du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International
Oser la réforme par Marc Bollet (...)
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adame la Ministre, Les avocats sont et seront toujours à vos côtés pour combattre avec force, détermination et courage, les violences, la haine et les discriminations. Le Barreau est l’école de la différence, de la tolérance, de la solidarité et de la générosité. Nous ne déposerons jamais les armes, nous ne ferons jamais profil bas, ni silence là-dessus. Il n’y a pas de fatalité si ce n’est celle du renoncement. Nous ne renoncerons pas. Le Barreau ne se taira jamais. Comme l’écrivait Martin Luther King il y a 50 ans : « L’obscurité ne peut chasser l’obscurité ; seule la lumière le peut. La haine ne peut chasser la haine, seul l’amour le peut. » Mesdames et Messieurs les Bâtonniers, Vous exercez un mandat formidable au service des autres. Nos Barreaux de Province et d’Outre-mer rassemblent aujourd’hui plus de 35 000 professionnels rattachés à 160 Ordres. Ces Ordres sont indispensables à l’exercice de nos métiers, ce sont des lieux de régulation, de solidarité, mais surtout des lieux d’écoute, d’apprentissage et des lieux d’innovation. Nos Ordres doivent encore plus s’ouvrir, se moderniser et développer leurs activités pour nos confrères mais aussi et surtout à l’égard de nos partenaires bien sûr d’abord dans le domaine de la justice mais aussi dans le domaine économique, social et universitaire. La Conférence qui nous réunit aujourd’hui est votre outil. Nos prédécesseurs l’ont créé il y a plus de 100 ans, elle vous appartient, elle est conçue par les Bâtonniers, pour les Bâtonniers et avec des Bâtonniers. Cette Conférence doit renforcer son rôle déterminant comme moteur de diffusion et d’adoption de bonnes pratiques. Nous devrons être collectivement exemplaires et irréprochables. Nous ferons en sorte, avec le Barreau de Paris,
de penser ensemble riches de nos diversités avec l’objectif, selon des mots empruntés à Pierre Olivier Sur, d’être moins autocentrés. Nous mettrons, tous, de l’enthousiasme pour renforcer notre Conseil National des Barreaux, tellement indispensable pour exprimer nos revendications avec force à l’égard des pouvoirs publics. Le CNB ne souffre pas tant d’un problème de légitimité que du manque de volonté de nous tous d’affirmer son rôle et son autorité. Si nous nous y impliquons tous, et le Président Burguburu le souhaite ardemment, alors le Conseil sera l’organe que tous les avocats de France appellent de leurs vœux. Parce que les Bâtonniers sont sur le terrain et vivent au jour le jour les difficultés, les enjeux, les angoisses mais aussi les joies de leurs confrères, ils sont les mieux placés pour faire remonter les évènements du quotidien et ainsi pouvoir agir sur l’action collective. Parce que les Bâtonniers, sur le terrain, expliquent la norme et la font respecter, ils sont les mieux placés pour concourir à son élaboration. Oui, les Bâtonniers au travers de la Conférence ont un vrai rôle politique à jouer, je vous y invite. Et puis, vous êtes les seuls à pouvoir vous lever tous ensemble, partout en France, à interpeler les pouvoirs publics, Dire et redire notre désir d’une plus grande reconnaissance de notre profession. Dire et redire que l’avenir de la Justice ne se
Elections du 31 janvier 2014 Catherine Jonathan-Duplaa Aix-en-Provence Olivier Fontibus Versailles l Bernard Quesnel Bordeaux l Armand Marx Strasbourg l Marie-Christine Mouchan Nice l Michel Faraud du Barreau Grasse l François Axisa du Barreau Toulouse l Jean-François Mérienne Dijon l Bruno Blanquer Narbonne l Joëlle Jeglot-Brun Alès l Marie-Laure Viel Saint-Quentin l l
Les Annonces de la Seine - Lundi 3 février 2014 - numéro 8
Vie du droit
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Christiane Taubira, Alain Pouchelon, Jean-Luc Forget, Robert Badinter et Jean-Marie Huet
enjeux ; faire de la justice le lieu de la démocratie et un facteur de croissance. Les avocats, par la place qu’ils occupent non seulement dans le processus juridictionnel mais aussi dans l’ensemble de la sphère politique, économique et sociale, entendent se situer au premier rang parmi les forces de propositions. Nous serons vigilants, Madame la Ministre, pour rappeler sans cesse que la justice en démocratie ne répond pas d’abord avec les lois du marché et que toute réforme n’intervenant que sous la pression budgétaire serait une erreur fondamentale. Les contingences économiques ne doivent pas être le prétexte d’une déjudiciarisation qui loin d’être un progrès serait au contraire un recul considérable pour nos concitoyens. Nous serons vigilants, Madame la Ministre,
pour rappeler sans cesse avec force et détermination que l’organisation des juridictions sur notre territoire doit se faire, se construire, s’imaginer autour de critères cohérents ; des critères économiques, démographiques et géographiques bien sûr. La proximité comme vous l’avez dit le 11 janvier dernier en clôturant le débat national sur la Justice du XXIème siècle à l’UNESCO est une question essentielle. Vos propos faisaient d’ailleurs écho aux propos tenus par des observateurs éclairés et éminents que vous avez associés à cette réflexion. Tel le théoricien, le Professeur Pierre Rosanvallon « pour qui la proximité doit tenir compte des particularités » ou encore le géographe Michel Lussaut « pour qui il faut accepter la
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dessinera pas et ne se décidera pas sans nous, ni contre nous. Madame la Garde des Sceaux, Je lisais avec intérêt récemment une interview que vous avez accordée au magazine « ELLE » au mois de Novembre 2013. Vous y rappeliez avec force « votre rigueur intellectuelle spartiate y compris sur vos propres convictions » et vous précisiez : « Je m’interroge, j’écoute, soit on garde sa liberté avec un risque de corollaire l’inaction donc l’impuissance, soit on fait un pas avec les autres. » Faites ce pas avec nous Madame la Ministre. Vous voulez réformer la Justice, nous aussi. Nous voulons la rendre plus simple, dans son organisation, plus accessible à tous et ainsi plus efficace. Nous voulons aussi placer le citoyen au cœur des
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Vie du droit Vous voulez réformer l’aide juridictionnelle, nous aussi. Nul n’ignore que ce débat nous occupe et nous préoccupe depuis trop longtemps. Il y a urgence. Nul ne peut contester l’investissement des avocats en matière d’accès au droit et à la Justice pour les plus démunis. Nous revendiquons à corps et à cris, une réforme globale et pérenne du financement de l’aide juridictionnelle. De rapport en rapport, d’assemblée en assemblée, de mission en mission, rien ne semble devoir évoluer. Nous mesurons vos efforts sur ce dossier. Nous avons apprécié vos décisions courageuses dans un contexte difficile à la fin de l’année dernière mais pour autant tout reste à construire. La démodulation de l’unité de valeur dont vous avez obtenu la suspension est d’ores et déjà actée par la Loi de Finances 2014 pour l’année prochaine. Dans le même temps, la concertation annoncée suite à la dernière Assemblée générale du Conseil National des Barreaux du 4 octobre 2013, n’a jamais véritablement démarrée. Nous savons qu’une mission est en cours; espérons que les propositions qui seront formulées, déboucheront sur une réforme en profondeur. Face à cette situation, les bâtonniers réunis dans cette salle, vous demandent très solennellement d’ouvrir au plus tôt, une concertation sur ce chantier en le liant très clairement aux autres chantiers de la Justice. Construire la Justice du XXIème siècle c’est assurer l’accès au droit et à la Justice pour tous. Or, l’actuel système fait reposer une charge inacceptable sur les avocats, qui va s’alourdir encore pour devenir insupportable avec la démodulation en 2015. Nous ne pouvons pas l’accepter ; la profession s’est investie sur le sujet en faisant différentes propositions alternatives de financement. Nous sommes d’ailleurs prêts pour la concertation. Nous ferons preuve de réalisme
pour appréhender toutes les réalités du dossier. Nous attendons votre soutien, votre action, nous comptons sur vous Madame. Nous vous appuierons confiants sur votre courage et votre volonté politique Madame la Ministre. Osez, osons une belle et une grande réforme de l’aide juridictionnelle. Les avocats seront à vos côtés. Si rien n’évolue, nous risquons devoir affronter de nouveau une crise, dont la profession ne veut pas, crise qui serait de nature une nouvelle fois à provoquer la colère des avocats. Rappelons encore les paroles du Pasteur Martin Luther King : « Non, non nous ne sommes pas satisfaits et nous serons satisfaits que le jour où la Justice se déchainera comme les eaux et que la rectitude sera comme un fleuve puissant ». Vous aimez les avocats, nous aussi. Vous nous aimez Madame la Ministre ; il vous plaît de le dire souvent. Nous l’entendons. Nous vous croyons. J’ai fait un rêve Madame la Ministre. J’ai rêvé d’une justice moderne avec une défense indépendante et de qualité pour la servir. J’ai rêvé que la profession d’avocat qui conjugue modernité et tradition et qui a toujours été au premier rang des combats pour les droits fondamentaux, pouvait continuer à défendre ces belles valeurs. J’ai rêvé que le secret de l’avocat était renforcé pour conforter nos valeurs démocratiques. J’ai rêvé dans une société en mouvement, dans une économie dynamique, dans une civilisation des droits et des libertés que la profession contribuait à l’œuvre de justice. J’ai rêvé qu’Avenir se conjuguait avec Espoir… J’ai rêvé de Paul Eluard. « Et par le pouvoir d’un mot. Je recommence ma vie. Je suis né pour te connaitre. Pour te nommer… Liberté. » 2014-90
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variété des organisations locales ». La proximité doit être le mouvement de la réforme judiciaire pour garantir une justice accessible à toutes et à tous, égale pour tous sur tout le territoire. Nous innoverons, c’est notre devoir, parce que nous sommes au contact du terrain les plus à même de relayer les besoins exprimés par les usagers et d’adapter notre pratique aux modifications substantielles des comportements sociaux. C’est pourquoi nous poursuivrons et amplifierons notre révolution numérique visant notamment la dématérialisation des échanges ; Madame la Ministre nous comptons sur vous pour nous soutenir et accélérer le processus pour que la communication de la Justice soit en adéquation avec le Monde dans lequel nous vivons. C’est ainsi également que nous développerons notre acte d’avocats pour en faire un outil indispensable que ce soit dans le processus juridictionnel ou dans les modes alternatifs de règlement des conflits. Cet acte doit évoluer. Vous nous y aiderez. Il sera demain plus simple, plus rapide, plus efficace et la sécurité juridique s’avérera renforcée. Nous serons innovants enfin parce-que dans toutes matières et notamment dans la matière familiale, les avocats s’engagent sur des voies modernes de traitement des conflits. Ils privilégieront la procédure participative, la procédure collaborative et la médiation tout en rappelant que dans certaines matières et dans certaines situations, l’Office du Juge s’avèrera toujours indispensable. Vous rêvez Madame la Ministre, nous rêvons tous Mesdames et Messieurs, que les citoyens de ce pays « se voient garantir un accès effectif à l’ensemble de leurs droits fondamentaux ». Réalisons ce vœu en 2014. Alors…
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Rentrée solennelle
Cour d’appel de Metz Metz - 17 janvier 2014 Le Premier Président Henri-Charles Egret a dressé le bilan d’activité de la Cour d’appel de Metz au cours de l’année écoulée puis a souligné son rôle important dans la voie de l’innovation ce 17 janvier 2014. Il a, en effet, annoncé aux personnalités invitées que « la volonté d’innover » avait été reconnue par la Chancellerie qui vient de choisir la Cour d’appel de Metz comme site pilote pour l’expérimentation du nouveau circuit des frais de justice et la dématérialisation des mémoires. Il a ensuite insisté sur le rôle important que doit continuer à jouer « notre Cour d’appel héritière du Parlement de Metz créé en 1633 » dans l’organisation de la justice en Lorraine. Quant au Procureur Général Jean-Marie Beney, il s’est déclaré très attaché au modèle du Ministère Public à la Française et en a rappelé sa mission essentielle « même si elle est loin d’être unique » : l’exercice de l’action publique. La loi confère aux Procureurs Généraux et au Procureurs de la République l’adaptation et la mise en œuvre du cadre juridique de la politique pénale définie par la circulaire de la Garde des Sceaux du 19 septembre 2012 ; pour le Chef du Parquet Général de Lorraine, une « politique pénale volontariste permettra de faire décroître la délinquance par l’analyse, l’adaptation et l’innovation ». Jean-René Tancrède
Respecter la règle de droit
Henri-Charles Egret
par Henri-Charles Egret
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a Cour d’appel est ainsi en train de remplir les objectifs fixés à savoir : l permettre de répondre rapidement à des affaires urgentes l diminuer le nombre d’affaires restant à juger l rajeunir le stock d’affaires à juger Pour apprécier l’impact de ces efforts, un suivi statistique précis est effectué régulièrement et permet à chaque président de chambre et conseiller et aux fonctionnaires du greffe de faire le point sur l’organisation du service et d’évoquer avec le Premier Président l’évolution du contentieux. En juillet 2013, le directeur des services judiciaires nous a indiqué qu’au vu des éléments de performance communiqués et des rapports d’étapes, il avait décidé de maintenir des emplois en surnombre au sein de la Cour d’appel au delà des termes du contrat d’objectif. Cette arrivée de renfort de magistrats du siège avec le maintien des effectifs du greffe nous a permis de réorganiser la chambre sociale avec trois présidents de chambre, deux présidents de chambre étant chargé du contentieux du droit du travail, le troisième président étant chargé du contentieux de la sécurité sociale. Le doyen des présidents des chambres sociales s’est vu confier un rôle d’animation et de coordination de l’ensemble de la chambre sociale. Les barreaux des trois juridictions du fonds et de la Cour d’appel ont été étroitement liés à cette réforme. Cette recherche d’efficacité, tout en maintenant une justice de qualité, nous a obligé à une réflexion sur nos méthodes pour arriver à faire face à la forte demande de justice. Des réunions de service regroupant magistrats et fonctionnaires du greffe sont régulièrement organisées. Il faut souligner l’engagement de tous les magistrats et fonctionnaires du greffe animés par leur directeur de greffe pour aboutir à cette baisse des stocks et à réduire les délais d’audiencement
des affaires civiles et pénales. La Cour d’appel a aussi un rôle d’animation et de coordination des juridictions du ressort. Le Premier Président rencontre régulièrement les Présidents des juridictions, les directeurs de greffe et le barreau. Des réunions avec les juges d’instruction, les juges d’application des peines, les juges des enfants, les juges d’instance, les juges aux affaires familiales, les associations de médiation familiale sont régulièrement organisées et animées par des magistrats de la cour pour réfléchir ensemble sur leurs actions et mieux préparer les nombreuses réformes en cours. L’administration pénitentiaire et la protection de la jeunesse sont amenée à y participer. En matière de protection de l’enfance, l’organisation à la Cour d’appel de réunions tripartites entre les magistrats, l’aide sociale à
l’enfance et la protection judiciaire de la jeunesse est toujours d’actualité et témoigne de l’attention commune de tous les acteurs apportée à cette question sensible. Un des points marquants de l’activité de la Cour à cet égard aura été la réitération d’une rencontre déjà initiée en 2012, entre les magistrats et le président du conseil général de Moselle, illustrant le souci d’échange et de dialogue entre nos différentes institutions. La Cour d’appel et les juridictions du ressort ont réussi à faire face depuis plusieurs années aux réformes malgré les difficultés rencontrées notamment en termes d’effectifs et de budgets contraints. On peut citer quelques exemples significatifs: l la réorganisation des extractions judiciaires, l la réforme de l’hospitalisation sans consentement des personnes nécessitant des soins psychiatriques,
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Rentrée solennelle le renouvellement des mesures de tutelles, le contentieux de la rétention des étrangers particulièrement chargé pour le tribunal instance de Metz et la cour d’appel étrangers de grande l le développement par le juge de l’application des peines des aménagements des peines dans l’optique de la réduction de la récidive et de la diminution du nombre de personnes incarcérées Il faut aussi saluer les efforts faits par les juridictions du ressort et la Cour d’appel pour d’une part améliorer l’accueil du justiciable par la mise en place de guichets uniques de greffes plus performants, pour d’autre part faciliter l’accès à la justice à travers l’action exemplaire du conseil départemental de l’accès au droit et pour enfin développer la médiation judiciaire. La médiation judiciaire est en effet un véritable mode autonome et alternatif du règlement des litiges. Les rapports de Messieurs Pierre Delmas-Goyon et Didier Marshall sur la justice du XXIème siècle recommandent la médiation judiciaire qui n’a pas pour but de pallier à l’insuffisance du nombre de magistrats mais de permettre une justice de meilleure qualité qui répond mieux aux besoins du justiciable. Une nouvelle fois le Barreau doit jouer un rôle moteur dans le développement de ce contentieux. Les magistrats et les fonctionnaires du greffe de la Cour d’appel et des juridictions du ressort ont su à nouveau tout au long de cette année allier efficacité, professionnalisme, qualité et attention au justiciable pour donner une image valorisée et humaine de la justice. Notre Cour d’appel doit continuer dans la voie de l’innovation notamment par le développement des nouvelles technologies et en particulier la dématérialisation des procédures civiles et pénales. Notre volonté d’innover vient d’être reconnue par la chancellerie qui a choisi la Cour d’appel de Metz comme site pilote pour l
l’expérimentation du nouveau circuit de frais de justice et la dématérialisation des mémoires. La communication électronique entre les juridictions et les barreaux, la numérisation des procédures qui doit devenir l’instrument de travail entre le Parquet, le Siège et le Barreau, le développement de la visio-conférence, la mise en état électronique au sein de la Cour et des juridictions sont des opérations qui demandent du temps, de la ténacité, et la présence de techniciens compétents. Il faut ici souligner le rôle important dans toutes ces réformes du service informatique du SAR (Service administratif régional) de la Cour aujourd’hui aidé par la plate-forme technique de la sous-direction de l’informatique. La justice est dotée depuis plusieurs années au niveau du ressort de chaque Cour d’appel d’une véritable administration budgétaire et comptable placée sous l’autorité conjointe des chefs de Cour assistée du SAR. Malgré des budgets contraints, nous devons faire face aux besoins en faisant preuve d’imagination, d’organisation et de détermination avec un impératif de performance. Le SAR et le pôle Chorus sont pour nous des collaborateurs précieux. Au moment où la Chancellerie engage une réflexion sur les magistrats et les juridictions du XXIème siècle sur l’organisation future desjuridictions il est bon de rappeler que notre Cour d’appel héritière du Parlement de Metz créé en 1633, aujourd’hui siège de la zone de défense Est, capitale régionale aux fonctions administratives culturelles et commerciales importantes doit continuer à jouer un rôle de premier plan dans l’organisation de la justice en Lorraine. Il convient aussi de rappeler à l’occasion de ces projets de réforme que la justice au nom
de l’efficacité ne doit pas perdre ses valeurs, que le juge doit demeurer porteur de légalité et chercheur de vérité et qu’il doit être non seulement le protecteur des libertés individuelles mais aussi le régulateur des conflits publics et privé, celui qui au nom du peuple français rend la justice en restituant au justiciable sa dignité. Dans un monde en perpétuelle évolution où l’institution judiciaire est mise en cause le juge doit garder la confiance de ses concitoyens, continuer d’écouter et de comprendre et, avec courage et sérénité, décider dans la liberté et l’indépendance conformément aux règles de droit issues de la loi et du décret qui sont de plus en plus en matière économique construites à Luxembourg et en matière de liberté à Strasbourg. Comme le soulignait Monsieur Pierre Drai Premier Président honoraire de la Cour de cassation : « ce juge responsable, attentif et appliqué à sa tache, qui sait écouter et décider en respectant la règle de droit, doit veiller à suivre une éthique professionnelle exigeante et doit rester convaincu que son intervention est un facteur essentiel d’équilibre, de stabilité et de paix sociale ». Quand je vois le dévouement, le sérieux, la conscience professionnelle et la compétence des acteurs de l’institution, magistrats professionnels, juges consulaires, conseillers prud’homaux, assesseurs des tribunaux pour enfants, des tribunaux des affaires de sécurité sociale et des tribunaux paritaires des baux ruraux, et les fonctionnaires du greffe, officiers de police judiciaire, membres de l’administration pénitentiaire, de la protection judiciaire de la jeunesse, avocats, notaires, huissiers, conciliateurs, experts, je dois vous dire avant de conclure qu’il faut avoir confiance en notre justice et plus particulièrement en celle de notre cour d’appel de Metz.
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Rentrée solennelle Le Ministère public à la Française par Jean-Marie Beney (...)
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Jean-Marie Beney A cet égard, l’annonce récente par Monsieur le Premier Ministre et Madame la Garde des Sceaux de la réouverture des débats autour de la question du statut des magistrats du Ministère public doit être relevée car l’attente et les exigences sont fortes sur cette question. L’année 2013 a également été celle de la réflexion avec notamment la remise à Madame la Garde des Sceaux de plusieurs rapports, dont ceux sur “les juridictions du XXIème siècle”, “le juge du XXIème siècle” et la refondation du Ministère public, fruit des réflexions des groupes de travail et commissions présidés par Messieurs Marshall, Delmas-Goyon et Nadal, soit un total de 268 propositions. 2014 a débuté sous les mêmes auspices de la réflexion puisque les 10 et 11 janvier derniers à la maison de l’UNESCO à Paris, une grande réunion de plusieurs centaines de personnes d’horizons multiples s’est déroulée sur le thème du “citoyen au coeur du service public de la justice”. Cinq ateliers ont traité les questions suivantes : l comment assurer une bonne adéquation entre juridictions, contentieux et territoires ?
Extraits du discours d’Installation de Jean-Marie Beney le 4 octobre 2013
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hers collègues, je sais pouvoir compter sur vos avis et vos analyses. Nos premiers rapports se sont établis sous le double signe de la franchise et de la liberté d’expression. Il s’agit à mes yeux des conditions qui permettent d’aller au fond des questions pour le bien de la mission qui est la nôtre. Il est prématuré de définir dès maintenant les actions que nous aurons à conduire ; nous avons chacun à notre place la charge de l’action publique, la garantie de la sécurité de nos concitoyens, le service de la loi et la garantie des libertés individuelles. Nos champs d’intervention sont multiples dans le domaine pénal bien sûr mais aussi
dans les domaines du droit commercial, du droit civil, du droit du travail et plus généralement partout où l’ordre public doit être garanti. Nous avons de nombreux engagements partenariaux dans le cadre des politiques publiques. Notre action doit être empreinte de clarté, d’humanisme, de respect, ce qui n’exclut ni la fermeté nécessaire et encore moins la rigueur juridique. Vos compétences sont connues et reconnues ; il nous appartient, dans une action de collaboration étroite et d’échanges nourris, de constituer un Ministère public uni, fort et ouvert. Ma nomination me place à votre tête dans ce ressort, mais seul,
le chef n’est rien. Vous avez compris que je conçois mon rôle comme celui d’un facilitateur. Nous arrêterons nos priorités de politique pénale dans le cadre de celles définies par le Ministre de la Justice ; nous les appliquerons et ne manquerons pas d’en rendre compte aux citoyens pour lesquels nous œuvrons. Monsieur le Premier Président, Mesdames et Messieurs de la Cour, Mesdames et Messieurs, Je souhaite apporter au service de la justice le fruit de mon expérience, de ma réflexion et de mes quelques qualités. J’ai besoin de vous pour réussir ; je sais que vous ne manquerez pas de me dire si l’objectif est atteint.
D.R.
’audience solennelle de rentrée de la Cour d’appel constitue un moment privilégié qui nous permet de constater l’intérêt porté à l’institution judiciaire. Les nombreuses personnalités civiles et militaires, religieuses et consulaires qui nous font ce matin l’honneur et le plaisir d’assister à cette cérémonie me pardonneront de ne pouvoir m’adresser à chacune d’entre elles individuellement ; que chacune reçoive cette marque de bienvenue et le témoignage de notre gratitude pour leur présence, leur attention et leur soutien. Située au début de l’année civile, cette audience est l’occasion de formuler des voeux à l’attention de chacune et chacun d’entre vous. Au nom du Parquet général et en mon nom personnel, je vous adresse mes souhaits les plus sincères pour cette nouvelle année 2014. S’agissant de l’activité de la Cour d’appel et des juridictions du ressort au cours de l’année écoulée, afin d’éviter une énumération fastidieuse, vous trouverez l’essentiel de nos chiffres dans la plaquette mise à votre disposition. Quelques données relatives au domaine pénal méritent cependant d’être soulignées : Au cours de l’année 2013, les trois parquets du ressort (Metz, Sarreguemines et Thionville) ont reçu 64.371 procès-verbaux pour crimes, délits et contraventions de la 5ème classe (62511 en 2012, soit - 3 %). (...) Les normes juridiques ont connu moins de bouleversements au cours de l’année 2013 que durant les années passées ; cependant, la multiplication constante des sources du droit et l’esprit créatif de certains n’ont pas toujours simplifié la tâche des magistrats du Ministère public. L’absence de réforme de leur statut, pourtant nécessaire, n’a été une bonne nouvelle ni pour les parquets, ni surtout pour les justiciables, même si la loi du 25 juillet 2013 a fait un pas non négligeable dans la direction souhaitable.
comment mieux travailler ensemble pour plus de lisibilité et d’efficacité pour les citoyens ? l comment permettre aux citoyens et à leurs conseils d’être davantage acteurs de leurs parcours judiciaires ? l comment reconnaître les nouveaux modes d’exercice de la justice ? l comment mieux garantir la protection des intérêts de la société et les droits et les libertés de l’individu ? L’examen attentif des intitulés des thèmes traités atteste de l’importance des enjeux et invite chacun à apporter son actif concours à ces réflexions heureusement centrées sur la place du citoyen dans ce service public particulier qu’est l’institution judiciaire. En cette période de voeux, je souhaite vivement que des mesures concrètes, pragmatiques et réalistes soient arrêtées au terme du processus. Permettez-moi en ce sens de vous faire part de quelques réflexions (tirées des travaux du dernier atelier cité) concernant le Ministère public “à la française”. Celui-ci constitue et entend offrir au citoyen, au nom de l’intérêt général, de fortes garanties de technicité, de déontologie, d’impartialité et de professionnalisme dans l’exercice de ses missions. Fondamentalement attaché à sa qualité de magistrat, il entend exercer un premier niveau de contrôle afin de garantir les libertés individuelles, non pas en lieu et place des juges, mais en amont de leur saisine. A ces fins, outre l’indispensable réforme du statut déjà évoquée, plusieurs mesures peuvent intervenir parmi lesquelles : une clarification des organisations, une modification des modes de gouvernance des parquets, afin de mieux concilier l’indépendance dans le traitement des procédures et le principe de fonctionnement hiérarchique, une action publique mieux individualisée, une direction plus “judiciaire” des enquêtes, une transformation des modes d’évaluation de l’action des parquets généraux et des parquets, une gestion plus valorisante des ressources humaines et une indispensable refonte en profondeur de la procédure pénale.... Pourquoi toujours attendre le dernier terme -constitué par exemple par la transposition de directives européennes- au lieu d’anticiper en préservant une cohérence globale ? l
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Rentrée solennelle particulièrement garde à ne pas se laisser déborder par un phénomène complexe, nécessitant des investigations lourdes et malheureusement parfois peu couronnées de succès. Politique pénale volontariste et politique d’action publique dynamique utilisant toutes les ressources données par la loi. L’enjeu est clairement de contenir et de faire décroître la délinquance par l’analyse, l’adaptation et l’innovation. Les échanges particulièrement fructueux dans ce ressort avec les services de sécurité intérieure -police et gendarmerie-, dont je tiens à affirmer publiquement la qualité, sont également un gage de la pertinence de nos actions et une aide
précieuse à la mesure de l’efficacité de celles-ci. L’efficacité et l’effectivité de l’action du ministère public se mesurent aussi en matière d’exécution et d’aménagement des peines. J’ai donné dans ce domaine des instructions aux procureurs de la république par une circulaire du 10 décembre 2013 rappelant que l’individualisation de la réponse pénale trouve son corollaire dans le domaine post-sentenciel. Il s’agit en effet de se consacrer pleinement à cette partie importante du rôle du ministère public auquel le législateur a confié la charge de veiller à l’exécution des décisions de justice pénale. 2014-91
Henri-Charles Egret, Richard Vignon et Jean-Marie Beney
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Rien ne nous oblige en effet à renoncer par principe au modèle du ministère public à la française auquel vous avez compris mon attachement. Si l’année 2014 sera en partie consacrée à la réflexion, le ministère public consacrera également son énergie à sa mission essentielle, même si elle est loin d’être unique : l’exercice de l’action publique. Le cadre juridique de cette action est connu et les priorités de politique pénale définies notamment par la circulaire de Madame la Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, du 19 septembre 2012. La loi confie au Procureur général et aux Procureurs de la république son adaptation et sa mise en œuvre. J’ai, à cette fin, adressé le 10 décembre dernier aux Procureurs de la république une note-circulaire précisant l’architecture de nos rapports. S’agissant des priorités de politique pénale du ressort, la lutte contre les trafics de stupéfiants continue à figurer au premier rang de celles-ci, non seulement à cause des dégâts sanitaires graves que ces substances provoquent, mais aussi en raison du renforcement des capacités financières des malfaiteurs généré par cette délinquance et des actes violents qui l’accompagnent. La lutte contre les infractions qui touchent les plus faibles doit également faire l’objet d’une attention toute particulière, ainsi les parquets renforceront-ils leur action s’agissant des infractions commises au préjudice des mineurs, des personnes âgées trop souvent isolées et des violences au préjudice du conjoint. D’autres problématiques sont et seront l’objet de toute notre attention : la lutte contre la délinquance d’appropriation et notamment les cambriolages d’une part, la lutte contre les phénomènes de cybercriminalité d’autre part ; en effet, cette délinquance sourde connaît un accroissement important et il faut prendre tout
« La levée du siège de Metz par Charles Quint en 1553 » Pour célébrer cet anniversaire Henri-Charles Egret, Premier Président et Jacques Pin, Procureur Général (qui a fait valoir ses droits à la retraite le 30 juin 2013) ont organisé le 18 juin 2013 une conférence animée par le professeur émérite Gérard Michaux à l’Université de Lorraine. Nous publions ci-dessous le résumé de cette journée historique sous la plume d’Henri-Charles Egret.
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polémique menée par un avocat, Maître Daniel Delrez, et la fédération de la libre pensée qui voyaient dans cette peinture du Christ en croix une atteinte intolérable au principe constitutionnel de laïcité. Les magistrats, fonctionnaires du greffe et le barreau étaient attachés au maintien de ce tableau, qui appartenait à l’histoire du palais. Pour faire cesser cette polémique, il fut décidé dans un premier temps de cacher ce tableau par un épais rideau, puis ensuite de le déplacer à l’Abbaye Saint-Nabor à Saint-Avold où il se trouve aujourd’hui. Ce grand panneau se trouvant vide, le procureur général et moi-même avons voulu honorer ce lieu chargé d’histoire d’une œuvre d’art de qualité. L’aide précieuse du maire de Metz, vice-président de Metz Métropole, monsieur Dominique Gros, de monsieur
L’œuvre illustre le premier rattachement de Metz à la France. Mais elle s’est chargée d’une deuxième signification après 1871 : l’espoir de la reconquête des provinces perdues, achevée par l’armistice de 1918.
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ous sommes heureux, monsieur le procureur général et moi-même, de vous recevoir dans ce beau palais du XVIIIème siècle construit par l’architecte Clérisseau pour accueillir le palais du gouverneur destiné au duc de Broglie, maréchal de France, gouverneur de Metz et commandant en chef dans les trois évêchés Metz, Toul et Verdun. Ce palais, majestueux et sobre, construit en pierre de Jaumont à la belle teinte ocre, est devenu le palais de justice au début du XIXème siècle, siège de la Cour d’appel héritier du célèbre parlement de Metz créé en 1633. Dans cette belle salle de la Cour d’assises trônait depuis 1866 une œuvre monumentale de 3 mètres 50 sur 1 mètre 80 : le tableau de Théodore Devill y représentant le Christ en croix. Cette peinture donne lieu à une ardente
Jean-Luc Bohl, président de Metz Métropole et maire de Montigny-les-Metz, de monsieur Philippe Brunella, conservateur en chef du patrimoine, directeur du musée de la Cour d’Or, nous ont permis de vous présenter aujourd’hui ce magnifique tableau « la levée du siège
de Metz en 1553 », copie exécutée en 1928 par LéonCharles Canniccioni d’après un tableau de Lucien-Etienne Melingue, provenant des réserves du musée de la Cour d’Or, tout juste restauré avec talent et soin. Cette belle œuvre où l’on voit l’empereur Charles
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Quint vieillissant quitter le siège de Metz défendu victorieusement par François de Lorraine, duc de guise, un des plus grands capitaine qu’ait eu la France, lieutenant général des trois évêchés, commémore un moment essentiel de l’histoire de Metz.
Vie des cabinets d’avocats
La Lettre des Réseaux
« Simon Associés » lance un nouveau site
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e cabinet Simon Associés a inauguré le 30 janvier dernier son nouveau site Internet dédié à l’actualité juridique et économique des réseaux de distribution www.lettredesreseaux.com La Lettre des réseaux était jusqu’à présent envoyée tous les deux mois par mail à 13 000 abonnés, en version PDF, et ce depuis de nombreuses années. Par ce nouveau site, trouvent ainsi leur place en ligne : les archives de la Lettre, les nouvelles actualités désormais consultables en permanence pour attirer l’attention des acteurs de la distribution sur l’actualité juridique et économique. Par ce nouveau site, apparaissent également de nouvelles rubriques, que la Lettre des réseaux n’embrassait pas dans sa version antérieure : il s’agit notamment des domaines du droit suivants : Corporate et Restructuring, qui viennent donc s’ajouter aux rubriques Distribution, Concurrence Consommation, Immobilier Commercial, Propriété Intellectuelle, et International. La vision résolument « transversale » qui anime Simon Associés dans sa relation avec les réseaux de distribution se retrouve ainsi parfaitement traduite dans ce site d’information qui a pour ambition d’être « la » référence dans le domaine
François-Luc Simon de la distribution, des réseaux et du retail dans les prochains mois. Simon Associés est le cabinet des réseaux de distribution. Il s’agit d’un Cabinet « multispécialistes », comprenant actuellement 50 avocats, présents en France : à Paris, Lyon, Nantes, Montpellier, et à l’international : en Chine, au Brésil, à Luxembourg et, d’une manière
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Paris, 30 janvier 2014
plus générale, dans une soixantaine de Pays à travers un réseau de correspondants spécialisés. La force de ce Cabinet repose sur ses équipes et sa compétence juridique partant d’une connaissance aboutie du monde de la distribution, des usages et des rapports de pouvoir dans une économie toujours plus concurrentielle. 2014-92 Source : communiqué du 30 janvier 2104
Au fil des pages
Cybersociété Entre espoirs et risques
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lus de deux milliards d’internautes dans le monde surfent aujourd’hui sur Internet, avec des outils numériques de plus en plus sophistiqués. Internet a des incidences complexes et insoupçonnées sur le fonctionnement du monde, des Etats, des organisations et des individus. Les activités humaines se déploient non plus sur un territoire défini mais dans le vaste cyberespace, espace numérique par excellence, encore mal connu du grand public. Myriam Quemener, Procureur-adjoint, responsable dupôle criminel au tribunal de grande instance de Créteil, nous livre une analyse des conséquences du cyberespace sur les comportements humains, le travail, les loisirs, les achats, la vie sociale en générale,
montrant combien Internet est un fabuleux espace de liberté. Mais elle nous présente également, du lieu de sa pratique, les dérives inévitables, depuis les escroqueries en ligne, le cyber-harcèlement, jusqu’à la cybercriminalité et ses ramifications mafieuses qui mettent nos sociétés démocratiques en danger et nécessitent une mobilisation des pouvoirs publics. Entre espoirs et risques, l’auteur fait le tour de la question des enjeux de la cybersociété. À la fois réflexif, analytique et très pratique. Fourmillant d’exemples éclairants, cet ouvrage va au-delà d’une simple découverte de la problématique en proposant des solutions pratiques et des conseils pour se protéger efficacement. 2014-93 Editions de L’Harmattan – 241 pages – 24,50 euros
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Par Myriam Quéméner
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Chronique
Renaud Chazal de Mauriac
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ne grande majorité de nos concitoyens manifeste à l’égard de notre système judiciaire une forte attente de lisibilité, d’accessibilité, de célérité et d’équité. Le coût du procès est aussi fréquemment invoqué. L’institution judiciaire française traverse depuis des années une crise sérieuse. Dans de nombreuses juridictions surchargées, magistrats et fonctionnaires des greffes sont à bout de souffle. Au fil des ans, de nouvelles tâches ont été confiées aux juges et aux procureurs sans que personne ne se préoccupe du franchissement des seuils de saturation. Aujourd’hui, un vent de réforme semble se lever. Dans de très récents rapports, un diagnostic a été clairement posé et des propositions, souvent très pertinentes, ont été formulées (voir en particulier le rapport sur la modernisation de l’action publique– Les Annonces de la Seine du 28 novembre 2013 numéro 67, le rapport sur l’office du juge au 21ème siècle, celui sur le juge du 21ème siècle et celui sur les juridictions du 21ème siècle - Les Annonces de la Seine du 23 décembre 2013 numéro 73). Cependant, il apparaît à la lecture de ces textes que leurs auteurs préconisent une très ambitieuse refonte de l’organisation judiciaire, des statuts, des procédures et des pratiques professionnelles. Ce remodelage complet, aujourd’hui à l’étude, va se heurter à des résistances idéologiques, culturelles,
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A moyens budgétaires quasi constants, est-il possible d’améliorer le fonctionnement de l’institution judiciaire et de renforcer la confiance des citoyens dans la Justice ? budgétaires ; il ne peut être réalisé que sur une longue durée. Nous avions déjà connu dans le passé (« Entretiens de Vendôme » - 2001) une période d‘effervescence réformiste au cours de laquelle toutes les assemblées générales des cours et tribunaux avaient même été consultées. Elle a débouché sur de très modestes résultats. Il convient d’en tirer des enseignements. Après une vingtaine de commissions , de groupes de travail et de rapports ayant émaillé les dernières décennies, face à l’urgence, comment adhérer à un large mouvement de réforme, tout en donnant la priorité aux mesures susceptibles d’améliorer notablement et rapidement la situation des juridictions et de redonner confiance aux justiciables ? Depuis très longtemps, malgré les déclarations publiques, il est difficile de percevoir dans les actes une réelle volonté de conforter la place de l’institution judiciaire et d’accroître fortement ses moyens. Quels sont les obstacles à des politiques de réforme significatives? La crainte d’un « pouvoir » judiciaire reste importante. L’indépendance des juges inquiète. Certains vont même jusqu’à s’interroger sur la légitimité du juge (dont ils se plaisent à souligner qu’il n’est pas élu) dès qu’il s’agit d’affaires concernant des membres des milieux politique, financier ou industriel. De tous temps, de beaux esprits ont estimé qu’une Justice faible est l’une des conditions d’un pouvoir politique ou économique fort. Des procureurs dépendants du pouvoir exécutif pour le déroulement de leur carrière, et des juges dotés de moyens manifestement insuffisants, s’inscrivent bien dans cette vision. A l’évidence, une telle approche est incompatible avec les fondements de la démocratie ; elle conduit inévitablement à la défiance des citoyens et contribue à déliter le pacte républicain. Certes, le champ d’intervention des juges comme leur liberté d’appréciation se sont élargis depuis une vingtaine d’années à la suite de l’introduction de normes juridiques européennes, de la soumission à la Justice de questions auxquelles le législateur n’a pu ou voulu répondre, de l’apparition de nouvelles normes nationales aux contours parfois imprécis tel le principe de précaution, et de la cohabitation de textes contradictoires. Mais les juges n’ont jamais revendiqué une extension de leur « pouvoir ». Ils se sont trouvés dans l’obligation de trancher des litiges dans le silence, la multiplication ou la confusion des normes applicables. On ne peut répondre à une légitime interrogation portant sur l’étendue du rôle du juge dans la Cité par la méfiance vis-à-vis de celui-ci et sa fragilisation. Dans notre conception française, le juge des
tutelles, le juge des enfants en matière d’assistance éducative, le juge de l’application des peines, le juge du surendettement et certains membres du parquet, exercent des fonctions de soutien et de contrôle qui, dans de nombreux pays, sont assurées par d’autres institutions. Il y a une contradiction à maintenir ces missions dans le périmètre de la Justice et à ne pas prendre suffisamment en considération leur poids et leur coût. La Justice fait face à une société en profonde mutation, ce qui complexifie sa tâche sans que cela soit pris en compte par les décideurs politiques lorsqu’ils évaluent les charges qui pèsent sur elle. La mondialisation a généré une économie ouverte entraînant une permanente et rude concurrence. Face à cela, les équilibres économiques sont difficiles à trouver et l’Europe évolue de manière hésitante. Par ailleurs, les rapides progrès scientifiques et techniques provoquent d’incessantes remises en cause des savoirs et des pratiques professionnelles. Si elle ne repose pas sur une constante volonté de formation, de recherche, d’innovation, notre économie se fragilise et ne peut créer d’emplois. Concomitamment, l’évolution des mœurs a été très rapide. Dans cet environnement mouvant et incertain, les attentes et les comportements des citoyens se sont modifiés. Enfin, malgré les nombreux atouts de notre pays, sa dette et son déficit budgétaire réduisent sérieusement ses marges. L’argent public ne pourra donc plus être utilisé de manière laxiste. Quelle que soit la priorité accordée aux missions régaliennes, et en particulier à la Justice, les budgets publics seront probablement faibles durant une assez longue période. C’est dans un tel contexte qu’il convient de réfléchir aux moyens susceptibles d’être mis en œuvre pour sortir de l’impasse les juridictions surchargées et conforter la confiance des citoyens dans la Justice. A - Certaines des réformes indispensables ont un coût élevé et sont difficilement envisageables, à court terme, au regard d’une forte contrainte budgétaire. Elles ne sont programmables que dans la longue durée. Encore faut-il en affirmer la nécessité, les chiffrer, fixer les priorités et proposer une programmation. On peut, en particulier, citer dans cette catégorie : l la poursuite de la réorganisation de la carte judiciaire, ou plutôt la restructuration de l’organisation judiciaire, non dans une perspective purement malthusienne mais dans le but, d’une part, de regrouper les moyens nécessaires pour mieux traiter certains contentieux spécialisés, et, d’autre part, de rapprocher la justice des justiciables lorsqu’il s’agit de contentieux qui le
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Chronique justifient (une telle réforme devra être liée à celle des collectivités territoriales), l la création de véritables collégialités pour l’instruction des affaires pénales (une version allégée de cette réforme, d’ailleurs critiquée par les magistrats instructeurs, va être soumise au vote du parlement), l l’accroissement des moyens humains et matériels des équipes chargées d’appréhender les formes de délinquance « habile » qui causent des préjudices considérables, malheureusement beaucoup moins connus que les conséquences d’actes délictueux plus « primaires », l la restauration ou le remplacement des bâtiments pénitentiaires vétustes, la création de structures adaptées permettant d’éviter de placer sous la responsabilité d’un personnel pénitentiaire non formé des détenus présentant des troubles psychiques avérés, le renforcement conséquent de l’encadrement des détenus violents, l la confortation des moyens des services chargés de la probation et de l’assistance aux libérés (un premier effort est programmé par le gouvernement), l l’amélioration sensible des dispositifs de prise en charge éducative mis à la disposition des juges des enfants pour faire face à la grande variété de problèmes auxquels les jeunes dont ils s’occupent sont confrontés, l au-delà des voies de recours, la mise en œuvre d’un véritable contrôle de qualité des décisions civiles afin d’assurer une homogénéité qualitative sur l’ensemble du territoire national ; j’ai, pour ma part, la conviction que la meilleure solution serait, en ce domaine, d’élaborer des normes de type ISO adaptées à l’activité judiciaire (rappelons que ce type de démarche consiste à déterminer les différentes actions des magistrats et fonctionnaires de justice intervenant dans le déroulement d’une procédure, à définir pour chacune les meilleures pratiques et à mettre en place des systèmes de contrôle qui, à chaque étape, assurent le respect de ces pratiques, et cela de la mise en état du dossier à la délivrance de la grosse en passant par la rédaction du jugement), l une juste rémunération de l’expertise judiciaire dans les domaines où elle est, aujourd’hui, manifestement insuffisante. B - D’autres réformes sont d’un très faible coût mais nécessitent un consensus politique qui, malheureusement, n’est pas encore acquis. Leur adoption renforcerait pourtant sensiblement la confiance des citoyens dans la Justice. Mentionnons : l l’indispensable et urgente réforme du statut du parquet (qui, rappelons-le, ne priverait nullement le gouvernement de la définition des grandes lignes de la politique pénale et des priorités ; quant aux éventuels conflits entre parquets, ils peuvent être arbitrés par un collège ad hoc installé au sein de la Cour de Cassation), l la modification du mode de désignation des membres du Conseil supérieur de la magistrature et des pouvoirs de celui-ci, l l’obligation faite au Parlement et à l’administration de procéder à des études d’impact sérieuses avant le vote de tout texte législatif ou la publication de tout texte réglementaire susceptible d’avoir des conséquences sur le fonctionnement des juridictions, l l’association systématique du ministère de la justice pour l’élaboration de tout projet de texte législatif ou réglementaire comportant des dispositions pénales.
C - Différentes réformes peu coûteuses, mais relevant d’un important travail des services compétents du ministère de la justice, seraient de nature à apporter de réelles améliorations. On peut citer quelques pistes : l la simplification ou la modification de certaines règles de procédure civile et pénale (les auteurs des rapports susmentionnés ont fait de très intéressantes propositions), l la réforme du code de procédure civile afin d’imposer des règles de présentation des écritures des parties permettant d’asseoir le débat judiciaire sur des bases loyales, claires et efficientes de nature à faire gagner du temps à tous les acteurs du procès, l la mobilisation des chefs de cours et de tribunaux afin de développer le travail en équipe sous toutes ses formes, celui-ci étant un gage d’efficacité, évitant un exercice solitaire, toujours dangereux, du métier de juge et renforçant la sécurité juridique, l l’évaluation sérieuse et une meilleure diffusion des expériences conduites dans certains tribunaux ou cours d’appel et ayant démontré leur efficacité ; elles sont en effet susceptibles de généralisation dans des juridictions de dimension voisine, l la confortation du réseau d’information des citoyens sur leurs droits et sur l’état des procédures les concernant à travers les sites Internet, les maisons de justice ou des points d’information, l la participation à la création d’un site de règlement « en ligne » de certains litiges en matière de consommation, l la poursuite de la modernisation des outils statistiques du ministère, l l’amélioration des dispositifs permettant d’anticiper les besoins en matière de frais de justice pénale. Pour conduire ces réformes, comment accroître la disponibilité des membres d’un ministère dont les effectifs restent modestes? Suggérons d’alléger la tâche de la Direction des affaires criminelles et des grâces, et du Cabinet du ministre, dans le domaine de l’analyse des remontées d’information émanant des parquets généraux et portant sur des affaires individuelles (un petit groupe de pénalistes de haut niveau chargé, à la Cour de cassation, de conseiller les parquets sur le plan technique serait suffisant pour répondre aux questions purement juridiques)… La disponibilité ainsi dégagée serait bienvenue dans le management judiciaire dont le rôle est essentiel pour sortir des difficultés actuelles. D - Une réforme, dont le coût reste à évaluer, semble incontournable pour alléger la charge pesant sur les juridictions. Elle consisterait à revenir à l’essentiel de la mission du juge qui devrait être recentré sur son cœur de métier. La Conférence des premiers présidents a énoncé qu’il ne devrait trancher des litiges que « lorsque d’autres procédures ne permettent pas de parvenir à une solution acceptée ». (Voir Les Annonces de la Seine du 11 juillet 2013 n° 44). Les rapports susmentionnés sur la Justice du 21ème siècle retiennent l’alternative de « déjudiciarisation » dans certains domaines. On peut également mentionner dans cette catégorie de réforme, la suppression, préconisée de longue date, de l’intervention des magistrats dans une multitude de commissions, comités, organismes administratifs où leur présence est aujourd’hui requise. A quel consensus pourrait-on parvenir sur des options de cette nature ?
Agenda
AVOCATS CONSEILS D’ENTREPRISES Clauses contractuelles et cessions de sociétés Le 12 février 2014 Maison du Barreau 2, rue de Harlay 75001 PARIS Téléphone : 01 47 66 30 07 ace@avocats-conseils.org
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CHAMBRE INTERNATIONALE DE COMMERCE « La répartition des coûts dans l’arbitrage international » Conférence le 13 février 2014 Maison de la Mutualité 24, rue Saint-Victor 75005 PARIS Téléphone : 01 49 53 29 59 catherine.foster@iccwbo.org
2014-95
ASSOCIATION DE POLITIQUE CRIMINELLE APPLIQUEE ET DE REINSERTION SOCIALE (APCARS) « Les victimes de fraudes face à la cyber-délinquance » Colloque le 21 février 2014 Tribunal de grande instance Bibliothèque de l’Ordre des Avocats 7, rue du Pasteur Vallery Radot 94000 CRETEIL Téléphone : 06 60 73 50 71 communication@apcars.org
2014-96
ECOLE REGIONALE DES AVOCATS DU GRAND-EST Un an de droit pénal des affaires et de procédure pénale Formation le 14 février 2014 Cour d’Appel de Colmar Bibliothèque 9, avenue Poincaré 68000 COLMAR Téléphone : 03 88 14 19 09 alsace@erage.eu
2014-97
CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX CONSEIL NATIONAL DES COMPAGNIES D’EXPERTS DE JUSTICE « Le temps dans l’expertise » Colloque le 14 mars 2014 Maison de la Chimie 28, rue Saint Dominique 75007 PARIS Téléphone : 01 53 30 85 75 m.girard@cnb.avocat.fr
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Chronique L’accès au juge est un droit fondamental et la culture française penche plutôt vers la « judiciarisation »des conflits. Un dialogue approfondi entre les différentes familles politiques, les membres de l’institution judiciaire et le Barreau devrait cependant permettre de constater qu’au-delà des nécessaires transferts de compétences (et sans nier l’utilité des actuels conciliateurs comme l’importance des transactions réalisées entre avocats avant tout procès), nous avons besoin d’un vrai dispositif de médiation extrajudiciaire, susceptible d’être saisi de tout conflit n’imposant pas l’intervention d’un juge. Les Français souhaitent de plus en plus être partie prenante dans le déroulement des procédures les concernant ; la médiation devrait donc recevoir un accueil favorable après une bonne campagne d’information. Un dispositif structuré de médiation doit reposer sur un fort engagement du Barreau, que l’avocat soit médiateur ou conseil d’une partie (cela ne fait pas obstacle au concours de médiateurs diplômés spécialement formés à ce type d’intervention). Il faut que les réponses données aux citoyens, en amont du judiciaire, soient entourées de garanties. Une vigoureuse politique de développement de la médiation implique, entre autres, une formation adaptée des intervenants, une profonde réforme de l’aide juridictionnelle et de son financement, une tarification claire. E - Pour une dépense semblant à notre portée, un type de réforme serait en mesure d’assurer un important retour sur investissement : l’accroissement massif de l’utilisation des nouvelles technologies. Différents types d’outils sont susceptibles de faciliter la tâche des magistrats et des fonctionnaires de justice – ils appartiennent à trois domaines de l’informatique. L’informatique de communication et de gestion permet de numériser fichiers et dossiers, gérer la mise en état des procédures civiles et pénales, assurer la communication entre les cabinets d’avocats et les juridictions, programmer le travail du greffe, mieux maîtriser les flux, informer les justiciables sur l’état des procédures qui les concernent, autoriser toutes les juridictions d’un même département à communiquer entre elles, transmettre toutes les données d’un dossier à la cour d’appel en cas de recours, utiliser la vidéo conférence etc. Elle peut être sensiblement étendue et améliorée. Nous avons ensuite l’informatique d’aide à la décision. Les banques de données juridiques ont fait des progrès considérables et permettent d’accéder avec facilité aux textes législatifs et réglementaires dans leurs dernières versions, à la doctrine et à la jurisprudence. La veille juridique est également possible. Des systèmes experts peuvent être imaginés pour trouver encore plus aisément les textes, les jurisprudences et la doctrine applicables à la question soumise au juge dans des conditions facilitant largement le travail intellectuel qui est à la base de la prise de décision. Il convient d’ajouter, pour quelques contentieux à caractère très répétitif et pour la fixation de certaines indemnités, la généralisation de référentiels que le juge peut utiliser sans, bien entendu, qu’ils s’imposent lui. Enfin on dispose d’une informatique d’aide à la rédaction. Pour les contentieux à caractère répétitif, les formules préenregistrées figurant
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dans les programmes des « chaînes pénales », les « bibles » de formules préenregistrées utilisées dans les juridictions en matière civile, devraient être améliorées, développées et surtout mises continuellement à jour par des équipes spécialisées au regard de l’évolution des textes et de la jurisprudence (rien n’est plus dangereux que l’utilisation de formules mal maîtrisées et qui n’ont pas fait l’objet d’une permanente actualisation). D’intéressants éléments sont déjà fournis par la Cour de cassation. Une véritable pédagogie de l’utilisation de ces outils serait d’ailleurs utile. Il ne s’agit pas de créer des programmes informatiques destinés à cantonner le juge dans des décisions-type qui réduiraient sa liberté d’appréciation ou le pousseraient vers la paresse intellectuelle et le conformisme, mais d’utiliser les progrès accomplis dans le domaine des nouvelles technologies. Il faut seulement veiller à ce que les nécessaires précautions soient prises pour garantir que l’outil reste dominé par son utilisateur. J’ai souvent entendu déclarer que les informaticiens étaient des exécutants qui devaient se contenter de respecter toutes les dispositions des codes de procédure et les pratiques habituelles des magistrats. Or il faut comprendre que, dans tous les domaines d’activité, c’est dans un dialogue permanent entre les praticiens et les concepteurs de logiciels que peuvent être déterminés les processus les plus adaptés à l’utilisation d’outils informatiques performants. Bien entendu, on ne peut laisser des équipes d’informaticiens définir les règles de procédure en fonction de critères d’efficacité informatique. Mais on ne doit pas passer à côté des nouvelles opportunités qu’offre l’évolution des programmes de gestion, des moteurs de recherche, des systèmes experts, etc. L’objectif serait d’aboutir à une modification de certaines règles de procédure ainsi que de diverses pratiques professionnelles afin de faire bénéficier les magistrats, comme les membres des greffes, de toutes les possibilités offertes par l’informatique moderne. Le renforcement ambitieux des outils informatiques peut aussi ouvrir la porte à une nouvelle répartition des tâches entre magistrats et greffiers. Le niveau actuel de recrutement des greffiers en chef et greffiers l’autoriserait. Politiques, magistrats, avocats, greffiers et informaticiens devraient être en mesure de parvenir à des solutions permettant d’assurer à la fois le respect de toutes les valeurs sur lesquelles repose notre ensemble institutionnel et législatif et l’engagement dans la voie de l’efficience. Il s’agit d’un chantier nécessitant de nombreuses analyses, anticipations, consultations, expérimentations et évaluations. En tout état de cause, aucun service public ne pourra échapper à ce type de modernisation au regard des attentes des citoyens et des soucis d’économie des responsables politiques. Bien sûr, il faut savoir choisir les intervenants ayant vraiment les compétences nécessaires et la disponibilité voulue. Le simple choix du moinsdisant n’est pas toujours le bon… La mise en place, très laborieuse et coûteuse, des « chaînes pénales », « chaînes civiles » et « communication entre avocats et juridictions » a laissé des traces et doit servir de leçon… Mais la France compte suffisamment de concepteurs et de développeurs de talent pour que des réponses pertinentes puissent être apportées aux besoins des magistrats et des membres des greffes. Précisons enfin qu’une telle évolution ne doit
nullement conduire, en matière civile, à réduire les débats oraux et à éliminer progressivement la relation humaine entre les juges et les avocats. Bien au contraire, il convient de valoriser les « audiences interactives » instaurant un nouveau mode de communication orale entre juges et représentants des parties. C’est une condition essentielle pour une bonne appréhension de toutes les dimensions des litiges complexes et pour donner aux justiciables le sentiment d’avoir été réellement écoutés. Certains verront avec inquiétude cette invasion des nouvelles technologies dans la sphère judiciaire, trop d’habitudes étant bousculées et la dépendance à la « machine » suscitant des craintes. Mais les nouvelles générations sauront dépasser les conservatismes et les frilosités. D’autres objecteront qu’il serait plus approprié d’entourer le juge de collaborateurs qui prépareraient les dossiers, présenteraient une synthèse des questions soulevées par les prétentions des parties, procéderaient aux recherches juridiques, proposeraient des rédactions pour certains passages des décisions etc., et cela sous la direction et la responsabilité d’un juge ou d’un groupe de juges qui animeraient une véritable équipe. Cette perspective est très séduisante. Mais qui peut croire que nous disposerons, à court ou moyen terme, des moyens humains pour aller dans cette direction. Soulignons que les tentatives faites, à bas coût, pour entourer le juge d’assistants de justice ou de greffiers rédacteurs ont eu un impact très limité, même si l’utilité de leur travail n’est pas en cause. La contribution d’assistants de justice est trop incertaine dans la durée et trop problématique dans certains ressorts éloignés des grandes facultés de droit pour être considérée comme un remède efficace. En définitive, pour apporter un soutien massif aux juridictions en difficulté, trois directions sont prometteuses - l’allégement des missions dévolues au judiciaire et le développement de la médiation (à la condition expresse que de vraies garanties soient données aux citoyens concernés par les changements envisagés), la simplification et la rationalisation des procédures, enfin une large utilisation des nouvelles technologies. Cela ne dispense évidemment pas d’un remplacement immédiat des départs à la retraite... Sans une réelle amélioration des conditions de travail des magistrats et des fonctionnaires des greffes, nous ne pourrons sérieusement espérer un regain de confiance des citoyens dans la Justice. Seul un juge œuvrant dans le cadre de procédures plus rationnelles et déchargé de tâches pouvant être accomplies par d’autres, ou par des ordinateurs, sera en mesure de libérer du temps pour l’écoute, la réflexion, l’élaboration de décisions de qualité, mûries et équilibrées. L’urgence serait également de voter les réformes constitutionnelles d’un très faible coût, applicables immédiatement, mais nécessitant un consensus politique dont on a du mal à comprendre qu’il fasse défaut. Si la concertation est absolument indispensable, sans une volonté d’aboutir des politiques et de tous les acteurs du monde judiciaire, rien n’évoluera. L’expérience permet de l’affirmer. Renaud Chazal de Mauriac 2014-98
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Vie du droit
Confédération Nationale des Avocats Salon européen de l’Avocat et du droit Paris, 6 décembre 2013 Lors de l’Assemblée Générale du 6 décembre 2013 qui s’est tenue pendant le 39ème Salon de l’Avocat des 6 et 7 décembre derniers, les adhérents de la Confédération Nationale des Avocats (CNA) ont élu Louis-Georges Barret Président et Thi My Hanh Ngo-Folliot Première Vice-Présidente. La CNA, créée en 1921, le plus ancien syndicat d’avocats, a inspiré de nombreuses réformes et la création d’institutions de notre profession : la Caisse Nationale des Barreaux de France (CNBF), l’Union Internationale des Avocats (UIA) elle-même à l’origine du Conseil Consultatif des Barreaux Européens (CCBE). Elle est membre fondateur de l’UNAPL, etc. Membre de la CNA depuis 1999, Louis-Georges Barret, avocat au Barreau de Nantes, a d’abord été élu au Comité Directeur en décembre 2007 puis Secrétaire Général en janvier 2010 et premier Vice-Président en 2012. Thi My Hanh Ngo-Folliot, avocat au Barreau de Paris et Responsable de la Commission Vietnam, membre du bureau du Comité des Consultants pour le Vietnam et membre fondateur de l’Institut de Droit et Cultures Francophones, a été élue en 2009 au Comité Directeur et en janvier 2010 Secrétaire Générale adjointe de la CNA. En présence du conseiller spécial du Garde des Sceaux, de Ministres, des Présidents du Conseil National des Barreaux, de la Conférence des Bâtonniers, et de Maître Dominique Attias, représentant Madame le Bâtonnier de Paris, Louis-Georges Barret s’est élevé contre les projets de réformes qui visent la profession d’Avocat : « nous ne pouvons accepter cette mise en cause permanente ». Sur la réforme de l’organisation de la profession, il a rappelé que la CNA souhaite à la fois le maintien de deux collèges distincts au sein du CNB et un mode d’élection plus clair rapprochant l’institution des confrères. En matière d’aide juridictionnelle, « aujourd’hui en situation de faillite », Louis-Georges barret a affirmé : « Cette question doit être réglée, car on ne peut laisser les confrères plus longtemps dans cette insécurité financière qui leur devient insupportable ». Il a lancé deux chantiers majeurs : - celui du statut de l’avocat expert du droit de l’entreprise, pour lequel il a annoncé la mise en place rapide d’une commission mixte avec les représentants des petites et moyennes entreprises : « L’avocat est un chef d’entreprise comme un autre, il ne s’agit pas de céder aux sirènes de l’avocat en entreprise, qui n’intéresse pas les PME, mais d’une certaine manière de promouvoir nos compétences et nos expertises et de les partager ». - celui de la création de la Confédération des Avocats Européens car « le droit est devenu européen, le syndicalisme doit l’être aussi ». A la fin de son intervention, le nouveau Président de la CNA a annoncé que le 78 ème Congrès aura lieu à Ajaccio les 20 et 21 juin 2014 et qu’il sera dédié au Bâtonnier Antoine Sollacaro. « Quand on assassine un Avocat, c’est toute la profession qui est blessée. C’est notre premier devoir de témoigner notre proximité à nos confrères Ajacciens. »
Etre avocat : une vocation
Louis-Georges Barret
par Louis-Georges Barret
D.R.
C
’est avec une profonde émotion que je prends la parole ce matin, devant vous, au moment où débute mon mandat à la Présidence de notre syndicat. Je veux vous remercier de votre confiance, de votre amitié mais aussi de vos engagements dans notre syndicat. Evidemment, je tiens ici à rendre hommage à celle à laquelle je succède, Maître Heidi Rançon-Cavenel, quelques soient nos différences, il m’a été agréable d’être son premier Vice-Président durant ces deux années. Notre profession traverse, en ce moment, de nombreuses difficultés mais je veux, avant de les aborder les unes après les autres, rappeler ce qu’est d’être Avocat. Le Bâtonnier Le Mappian qui m’a appris mon métier et dont j’ai été le stagiaire, avait cette formule que je reprends à mon compte : « Etre Avocat, ce n’est pas un métier, ce n’est pas une profession, c’est une vocation. Etre Avocat exige un engagement total de la personne ellemême. Etre Avocat, c’est savoir être excessif, être passionné, être engagé. Etre Avocat, c’est savoir se lever aux côtés de celui que toute la société fustige pour être son rempart, son porte-parole. Etre Avocat, c’est avoir un regard sur son client dans lequel se mêlent compassion et recul. » Quelques jours avant sa mort, le Bâtonnier
Le Mappian, dans ce qui fût notre dernier dialogue, me redisait avec la passion qui était la sienne : « Engagez-vous, donnez tout, ne gardez rien pour vous-même, exercez avec passion et le reste suivra et vous ne regretterez rien. » Alors, mes amis, c’est avec passion que je souhaite conduire avec vous notre syndicat. Monsieur le Représentant de Madame le Garde
des Sceaux, nous en avons des choses à nous dire. Vous savez, la profession d’Avocat va mal, elle se pose des questions. Elle angoisse même lorsqu’elle remarque qu’elle devient, depuis quelques mois, une sorte d’exutoire. Les projets qui nous ont visés sont nombreux et nous ne pouvons accepter cette mise en cause permanente.
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Vie du droit L’avocat Parlementaire Un Médecin, Ministre, commet des actes contraires à la loi et voilà qu’un projet de loi vise à nous interdire d’être parlementaire. Comme si les avocats étaient à l’origine des soucis éthiques liés à des conflits d’intérêts que l’on ne connaît pas. Faut-il rappeler, comme je l’ai dit en son temps, que nous sommes tenus à la fois par un serment et par une déontologie, l’une des plus rigoureuses, que les confrères qui ne respectent ni leur serment, ni leur déontologie, sont poursuivis devant les conseils régionaux de discipline. Pourquoi les avocats ne pourraient-ils pas être parlementaires ? Les avocats qui siègent actuellement au Parlement ont-il violé la loi, sont-ils à l’origine d’affaires dont on ne parlerait pas ? Non et vous le savez. D’ailleurs, Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale dans notre prochain Barreau de France, rappeler la place essentielle des avocats au parlement. Nous avons noté qu’en l’état, cette partie du projet était retirée mais notre vigilance, je tiens à vous le dire, reste particulière sur cette question. L’action de groupe Voilà une action sur laquelle la Confédération Nationale des Avocats a travaillé depuis de nombreuses années. Je veux rendre hommage, ici, au travail effectué par le Bâtonnier Jean-Guy Levy et puisqu’il est là, je veux aussi rendre hommage à mon ami, Loïc Dusseau, Président de la Commission des Textes du Conseil National des Barreaux. Une action de groupe qui permettait de mettre en place une action moderne, respectueuse, respectant le libre choix de l’avocat par le client et permettant de répondre aux conflits de groupe qui se multiplient, qu’ils soient commerciaux, civils ou pénaux. Qu’avons-nous aujourd’hui ? Une action ouverte à quelques-uns et en réalité qu’à une seule association de consommateurs, qui a d’ores et déjà indiqué qu’elle n’en mènerait qu’une par an, là où nous vous proposions une action ouverte dont la validité pouvait être reconnue par le Juge, vous avez tellement filtré qu’en réalité, cette action n’existera pas. Nous avons rendu rapport sur rapport, nous avons été auditionnés par de nombreuses commissions, mais il nous a été répondu qu’il fallait circuler sans rien dire puisque le Conseil National de la Consommation avait tranché. Là où vous aviez la possibilité de créer une véritable action, vous avez créé un petit truc qui ne marchera pas. En voulant exclure le libre choix de l’Avocat, en voulant exclure les avocats en réalité de l’action de groupe, vous avez tué l’action de groupe. Pourtant, il n’est pas trop tard. Cette loi fondatrice pose d’importantes difficultés, y compris constitutionnelles. Il n’est pas trop tard pour nous écouter et nous entendre. Il n’est pas trop tard pour regarder le modèle canadien. Il n’est pas trop tard pour donner à cette action l’ampleur qui doit lui être réservée. Nous vous avons proposé, par exemple, la mise en place d’associations ad hoc, ce qui permettait à la fois le contrôle par le juge, sans doute la limitation du nombre mais aussi et surtout la liberté de choix de l’avocat. Nous ne transigerons pas sur ce principe essentiel.
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Les SCI Comment ne pas vous parler aussi, ici, des problèmes des Sociétés Civiles Immobilières ? Voilà la profession d’Avocat à nouveau visée. Comme si les marchands de sommeil étaient encouragés par les avocats ! Le parlement a décidé que les cessions de parts de Sociétés Civiles Immobilières ne pourront désormais être effectuées que par acte authentique. Mais les cessions en matière de SCI entraînent de très nombreuses difficultés : fiscales, sociétales, sociales, patrimoniales. Les avocats ont toutes compétences en la matière. Ils ont toutes qualités pour agir. Pourquoi le leur enlever ? D’autant que nous disposons aujourd’hui d’un acte tout aussi sûr que l’acte authentique, acte qui porte d’ailleurs les mêmes initiales qui est l’acte d’avocat. Les statuts, les cessions de parts, les modifications dans le cadre des SCI peuvent parfaitement être effectués par actes d’avocat, qui seront parfaitement archivés, sans la moindre difficulté. Pourquoi nous le retirer ? Pourquoi ainsi fragiliser un peu plus l’exercice de nombreux confrères, qui n’ont jamais démérité et qui n’ont jamais été complices de quoi que ce soit. Nous avons entendu, Madame la Garde des Sceaux, le 4 octobre dernier, qui nous expliquait qu’il ne s’agissait pas d’un projet gouvernemental mais d’un amendement parlementaire et qu’elle ne pouvait quand même pas répondre aussi de ce que faisaient les parlementaires, mais, sauf erreur de ma part, le gouvernement est portée par la majorité parlementaire. Nous vous demandons, à vous, notre Chancellerie, de veiller au respect de nos confrères. Et puis, il n’y a pas que cela. Les agents sportifs Les agents sportifs posent, paraît-il, d’importantes difficultés éthiques. Le Sénat en est saisi, un rapport est écrit. Dans les conclusions de ce rapport, le 4ème point, pour rendre le métier d’agent sportif plus éthique, il faut en interdire l’accès aux avocats. Ceux-ci sont strictement les termes de ce rapport. Et je vous le dis, Monsieur, ceci est inacceptable. Le nombre d’avocats agents sportifs n’est pas très important mais ce qui m’importe ici c’est davantage le principe. Une nouvelle fois, les avocats seraient à l’origine d’un problème éthique ? Lequel ? L’aide juridictionelle Enfin et dans la mesure où nous ne pouvons pas tout aborder ce matin, je veux m’attarder sur l’aide juridictionnelle. Cette aide juridictionnelle est aujourd’hui en situation de faillite et il faut le dire. Nous ne pouvons accepter que des confrères continuent à exercer avec brio leur métier, en ne percevant qu’une maigre indemnisation qui place leur cabinet en situation effective de difficulté. Plus de 60 % de l’action pénale, plus de 60 % de l’action familiale est aujourd’hui soumis à l’aide juridictionnelle. Ce problème ne date pas de votre gouvernement, c’est évident. Cela fait 25 ans que nous le soulignons. Et je me souviens de ces longues manifestations de l’année 2000 et des engagements pris par le Garde des Sceaux de l’époque, Madame Guigou, qui consistait, non seulement à réévaluer l’unité de valeur, mais aussi permettre aux avocats de bénéficier d’une véritable rémunération. A la suite de ces engagements, jamais respectés, il y
a eu de nombreux rapports, le dernier en date étant celui de Monsieur Gosselin. Chaque fois a été rappelée la difficulté. Jamais elle n’a été traitée. Ce sujet est aujourd’hui prégnant. Pourquoi ? Parce que la plupart de nos jeunes confrères travaillent au titre de l’aide juridictionnelle et ne supportent plus ce qu’ils prennent pour un mépris. Or, quand l’affaire de la démodulation est venue, il ne faut pas s’étonner qu’un très grand nombre de barreaux français, à commencer par le mien, celui de Nantes, ait décidé d’une grève immédiate. C’est vrai que, ce 4 octobre, Madame le Garde des Sceaux nous a confié qu’elle mettait fin à cette démodulation. Mais, pourquoi, quelques jours plus tard, au Parlement, avoir, par un amendement, fait entrer la notion de structure dédiée ? Nous sommes ici, Monsieur, attachés à la liberté de choix de l’Avocat, mais aussi à l’indépendance de l’Avocat. Ce sont deux problèmes majeurs que posent les structures dédiées. Il n’y aura pas de liberté de choix de l’Avocat pour ceux qui voudront être défendus au titre de l’aide juridictionnelle ; comment parler d’indépendance pour ces avocats dans des structures dédiées ? La règle fixée qui est que toute personne peut accéder à un avocat, quelque soient ses moyens et bénéficier d’une aide au titre de l’aide juridictionnelle lorsque ses moyens sont limités est un principe qui doit être respecté. Mais nous avons conscience ici, à la CNA, des difficultés majeures de financement et nous avons conscience aussi que le budget de l’Etat ne peut être aujourd’hui contraint davantage. Nous avons été surpris que les notaires soient rassurés avant nous sur le fait qu’il n’y aurait pas de fiscalité complémentaire de l’ensemble des actes juridiques pour financer l’aide juridictionnelle. Car cette question doit être aussi en débat. Ici, à la CNA, vous le savez, nous avons énormément travaillé sur cette question et je veux, à ce titre, rendre hommage au Bâtonnier Brigitte Marsigny, ancien Bâtonnier de Bobigny, Présidente d’Honneur de la CNA qui a, pendant six ans, présidé aux destinées de la Commission Accès au Droit du Conseil National des Barreaux. Nous avons fait des propositions. Il en est une qui, pour tout vous dire, me va bien. Pourquoi ne pas taxer à hauteur d’1, 2 ou 3 %, le chiffre d’affaires généré par la protection juridique des compagnies d’assurance, en préservant la liberté de choix de l’Avocat ? Il y aurait ici une logique et surtout un mode de financement permettant la pérennité de l’aide juridictionnelle. Nous avons noté avec plaisir que Madame le Garde des Sceaux désignait désormais Monsieur le Procureur Général (ou Madame ?) afin de réunir ensemble des interlocuteurs intéressés et de faire de véritables propositions de réformes de l’aide juridictionnelle. Nous travaillerons auprès de cette commission. La CNA, avec évidemment notre institution représentative qu’est le Conseil National des Barreaux, vous adressera ses propositions. Il faut dire les choses telles qu’elles sont : cette question de l’aide juridictionnelle doit être réglée car on ne peut laisser les confrères plus longtemps dans cette insécurité financière qui leur devient insupportable. Cela me permet de vous dire, ici, que si la profession d’Avocat est l’une des plus dynamiques de l’ensemble
Les Annonces de la Seine - Lundi 3 février 2014 - numéro 8
Vie du droit des professions libérales et l’une des plus jeunes, l’une de celles qui accueille le plus de confrères et donc qui est la plus ouverte, cela ne doit pas masquer une réalité qui est une véritable souffrance de nombreux avocats, partout en France. Mais cette profession mérite l’attention des pouvoirs publics parce que, lorsque les avocats sont fragilisés et sont trop fragilisés, je crois profondément que c’est la démocratie qui est fragilisée. Nous avons besoin d’être entendus et compris. L’organisation de la profession Et au-delà de ces soucis, nous avons aussi, évidemment, à travailler à l’organisation de notre profession. Vous ne m’entendrez jamais vous parler du terme gouvernance. Je pense, profondément, qu’on ne gouverne pas un avocat et je pense aussi que la sémantique a un sens et qu’une erreur sémantique peut entraîner une erreur de réforme. De quoi s’agit-il en réalité ? D’une part, de la réforme des barreaux partout en France et de seconde part de la réforme à la fois de l’élection de l’institution représentative, de sa composition et de son mode de fonctionnement. Alors j’entends bien que vont s’opposer en permanence, les représentations syndicales et représentations ordinales au sein du Conseil National, représentations parisiennes et représentations provinciales. Et je veux dire ici que j’ai l’honneur d’appartenir au Conseil National des Barreaux, que ces commissions se réunissent et travaillent et travaillent beaucoup pour le seul bénéfice de l’ensemble des confrères. Je ne vois pas dans les commissions de confrères qui seraient sous-estimés ou sur-estimés au prétexte qu’ils appartiendraient à un collège ou à un autre mais je vois des avocats qui sont passionnés par leur métier et leurs confrères. Et puis ces frontières qui ne sont pas aussi imperméables que ce que l’on voudrait nous vendre, surtout à l’extérieur. 80 % des membres des collèges généraux sont ou ont été membres de Conseils de l’Ordre, sont ou ont été Bâtonniers. Et dans les collèges ordinaux, on voit de nombreux confrères qui ont des engagements syndicaux, et c’est bien. Pour exemple, quand notre ami, Guillaume Le Foyer de Costil, siège au Conseil ordinal Paris, je sais pertinemment qu’il n’a pas oublié son appartenance syndicale comme Président d’Honneur de notre maison. Quand Jérôme Hercé siège avec le collège ordinal province, je sais aussi qu’il n’oublie pas, parce que cela est profondément inscrit en lui, son appartenance à notre maison. Quand le Bâtonnier Patrick Barret, Président de la Commission du périmètre du droit au Conseil National, décide de rejoindre la Confédération Nationale des Avocats et je l’en remercie, c’est aussi parce qu’il fait le lien entre ces deux actions. Ne laissons pas cultiver, surtout à l’extérieur, les différences entre nous. Je crois, mais cette question doit être en débat, que le Conseil National des Barreaux a besoin à la fois des ordinaux et des syndicaux. Mais je crois aussi que nous devons travailler ensemble pour proposer nous-mêmes une réforme qui soit à la hauteur des enjeux. Il faut que notre Conseil National soit davantage représentatif de l’ensemble des Barreaux de France de l’ensemble des avocats de France, je pense notamment aux petits et moyens Barreaux, qui n’y sont pas suffisamment représentés.
Il faut aussi que le mode de scrutin qui permet l’élection du Conseil National soit lisible de tous. Il faut enfin que notre Conseil National ait la hauteur de vue nécessaire pour les modifications de notre règlementation et de nos règles déontologiques. Je peux vous dire, mes amis, que la CNA travaille à l’unité. Je tiens à saluer mes confrères représentants des autres syndicats. Depuis plusieurs mois nous nous réunissons une fois par mois, pour voir ensemble ce que sont nos points de convergence. Je sais que le Président Burguburu va tenir au mois de décembre une nouvelle assemblée générale sur le thème de ces modifications d’organisation. Nous pouvons y arriver et nous devons y arriver. Travaillons à réfléchir aux propositions des autres pour les valoriser comme ils valoriseront les nôtres. Avec comme ligne de perspective, le seul bien commun de notre profession. Il est un point sur lequel la CNA est très claire : c’est celui des barreaux de France. Partout, où il y a un Procureur, il faut qu’il y ait un Bâtonnier. Partout où il y a un Tribunal de Grande Instance, il faut qu’il y ait un Conseil de l’Ordre. L’équilibre est de ce point de vue fondamental mais cela n’empêche pas d’envisager, dans des liens inter barreaux, ce que font beaucoup de conférences régionales de Bâtonniers, l’union des CARPA, l’union sur un certain nombre de questions administratives, permettant en réalité de mieux gérer les Ordres avec plus d’efficacité pour un coût réduit. La CNA fera, dans les semaines qui viennent, des propositions extrêmement concrètes sur la base de celles qui ont déjà été réalisées par le Président Schermann et fera aussi, lors de la prochaine Assemblée Générale du CNB, un point méthodologique qui nous semble important. L’avocat et l’entreprise Je veux aussi devant vous, parler de l’avocat et de l’entreprise. Si mes positions ont évolué avec le temps et vous le savez, je crois pour autant toujours d’abord que l’avocat est une sorte de chef d’entreprise comme les autres et ensuite que l’entreprise n’est pas un gros mot mais que nous devons travailler avec elle. Si l’expert-comptable est l’expert des comptes dans l’entreprise, il faut imposer l’avocat comme l’expert du droit dans l’entreprise. L’expert du droit, celui que l’on consulte et qui conseille naturellement l’entreprise. Celui que l’on appelle, celui qui est proche. Je sais, parce que depuis 15 ans d’engagement à leurs côtés, je crois y avoir gagné un peu d’expérience, que les PME ont besoin de nous. Je veux saluer la présence de mes amis, Président et Secrétaire Général de la CGPME au milieu de nous. Et si j’ai tenu à ce qu’ils soient là c’est parce que je pense que si nous ne tenons ce discours qu’entre nous, alors nous allons en être très satisfaits mais cela n’aura aucun effet. Il faut que nous nous rapprochions concrètement des entreprises et que nous tissions des ponts les uns avec les autres pour apprendre à travailler ensemble et que notre partenariat devienne un partenariat naturel. Durant ces deux années qui s’ouvrent, je souhaite tisser ce partenariat. Des propositions très concrètes seront faites dans les toutes prochaines semaines à ce niveau et nous aurons, à travailler ensemble dans une double perspective : celle de votre journée nationale des petites et moyennes entreprises et celle de notre congrès national du mois de juin.
Nous allons très rapidement confier à une commission mixte ( avocats, entreprise) le soin de faire des propositions concrètes avant le mois de juin prochain. Les liens doivent être renforcés et cela nous appartient. Qui mieux que nous, CNA, qui avons porté tant de projets pour la profession depuis bientôt 100 ans, qui mieux que nous pourrait travailler sur cette question ? Nous allons avancer ensemble, comme nous nous connaissons déjà un peu, nous allons gagner du temps car je pense profondément que cette question est urgente. Avoir réussi, comme vous l’avez fait avec votre commission, cher Patrick Barret, à solidifier et renforcer le périmètre du droit, est une bonne chose mais il nous appartient d’être conquérants sur la question de l’entreprise. Il ne s’agit pas de céder aux sirènes de l’avocat en entreprise qui d’ailleurs n’intéresse pas les PME, mais il s’agit, d’une certaine manière, de promouvoir nos compétences et nos experts, et sans doute nos compétences et nos expériences récentes. Nous allons ensemble pouvoir travailler sur ces questions. Je m’y engage. L’avenir de l’Avocat Mes amis si l’Avocat souffre aujourd’hui, je crois, comme vous chère Brigitte Longuet, que nous devons aussi regarder l’avenir avec enthousiasme. Dès lors que nous aurons consolidé trois piliers fondamentaux : - celui de l’excellence, il s’agit ici de l’excellence de notre formation et nous avons à travailler sur la formation dispensée par les écoles d’avocats qui aujourd’hui nous coûtent très cher, trop cher et ne sont sans doute pas à la hauteur que nous pourrions souhaiter. Il faut aussi travailler sur la formation continue. 20 h par an c’est bien, c’est d’ailleurs ce que vous offre le salon de l’Avocat mais 20 h c’est insuffisant lorsque l’on se compare aux autres professions libérales ou lorsque l’on se compare à nos confrères étrangers. La formation n’est pas un gros mot mais au contraire le gage de l’excellence et nous devons avancer encore un peu plus sur ces questions et vaincre les frilosités. Ce n’est plus une question de coût, c’est parfois une question de peur ou d’organisation du temps. Nous devons avancer là aussi. - l’exigence. L’exigence c’est évidemment celle de la défense et du respect, non seulement de notre Règlement Intérieur National, mais d’abord et avant tout de notre déontologie et de notre serment. Les Conseils régionaux de discipline : c’est une vraie et belle avancée mais il faut, de ce point de vue, réfléchir sur deux axes. D’abord que les CRD se réunissent davantage et mieux. Ensuite, rendre au Bâtonnier un peu de son autorité directe, permettant une sanction limitée mais qui évite de saisir le CRD. Nous manquons de cet élément médian et il faut y travailler. - le troisième pilier, c’est la solidité. Solidité de nos structures, solidité de nos cabinets. Je parlais toute à l’heure de la souffrance des confrères. Elle vient aussi des difficultés pour solidifier leurs structures. La solidification capitalistique n’est pas un gros mot. Evidemment, elle doit être encadrée de principes stricts mais nous devons ensemble y travailler et faire des propositions car s’opposer sans rien proposer consiste à ne rien faire.
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Vie du droit Dès le mois de janvier, nous demanderons à deux de nos confrères de travailler sur des propositions concrètes sur ce point, propositions qui seront soumises au comité directeur dès le mois de mars ou avril. La CNA et l’Europe Mais il est un autre sujet qui me tient à cœur, c’est celui de l’Europe. Chacun de nous voit bien que les règles qui nous sont imposées ou que nous appliquons ou sur lesquelles nous réalisons nos consultations sont des règles européennes. Le nombre d’avocats qui traversent les frontières pour venir exercer en France aujourd’hui, en Italie demain, en Espagne après-demain et en Allemagne la semaine prochaine, est de plus en plus important. Les difficultés que nous rencontrons ici sont parfois des difficultés rencontrées de l’autre côté des Pyrénées ou des Alpes. Pour tout vous dire, mes amis, je pense que le syndicalisme enfermé dans les frontières françaises est aujourd’hui un syndicalisme nécessaire mais insuffisant. Je souhaite un syndicalisme européen. Ce souhait profond, dont je parle depuis longtemps et qui me tient à cœur, j’en souhaite aujourd’hui la réalisation. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à notre ami, le Président Vincent Berthat, de créer la Confédération des Avocats Européens. Ne nous y trompons pas, il doit s’agir bien d’un syndicat mais d’un syndicat européen. La Confédération des Avocats Européens devra réunir à la fois des avocats français, allemands, italiens, espagnols, anglais et des avocats issus de toute l’union européenne mais je voudrais qu’elle aille bien au-delà. Je souhaiterais qu’elle rassemble aussi nos confrères de l’axe méditerranéen, algérien, tunisien, marocain, turc car nous avons, ne nous y trompons pas, et cher Christian Charriere-Bournazel, vous nous l’avez suffisamment rappelé et vous aviez
raison : nous avons un devoir, celui d’être entendus et celui d’assistance auprès de ses confrères. Les statuts de cette Confédération des Avocats Européens, dont la CNA sera membre fondateur ou même davantage puisqu’elle en sera à l’initiative, seront préparés et présentés lors de notre prochain congrès. Le Congrès Mes amis, j’ai voulu que ce congrès se tienne dans un endroit à la fois beau, endroit que j’aime profondément, mais qui soit symbolique lorsqu’on parle de la liberté de l’Avocat. Ce prochain congrès se tiendra les 20 et 21 juin 2014. Il aura lieu à Ajaccio et il sera dédié à notre confrère, le Bâtonnier Sollacaro. Lorsque l’on assassine un avocat, c’est toute la profession qui est blessée. C’est ce que j’avais dit au moment de son assassinat et je le redis aujourd’hui. Et faire naître la Confédération des Avocats Européens à Ajaccio a un sens, un sens fort qui dépasse largement le sens de notre syndicat. Vous voyez, mes amis, nous avons devant nous des projets. C’est bien de pouvoir dire que la CNA est le premier des syndicats d’avocats. C’est bien de dire que la CNA a été l’origine de nos caisses de retraite, de nos caisses de protection, de l’école de formation de nos collaborateurs et je veux saluer évidemment l’ENADEP à laquelle je suis très attaché. C’est bien de le rappeler à temps et à contre temps mais si cela n’est que pour regarder le rétroviseur, cela voudrait dire que nous n’avons plus de projets. Penser le partenariat avec les entreprises sous une forme qui est à mettre en œuvre, créer la confédération des avocats européens. Voilà des projets. Voilà des projets qui donnent à la CNA encore une longueur d’avance, qui lui donnent des perspectives et qui lui donnent de l’ambition.
Et pour tout vous dire, mes amis, que la CNA soit le premier des syndicats d’avocats par son âge, c’est bien. Je veux aujourd’hui, avec vous, faire que la CNA devienne premier des syndicats d’avocats par le nombre de ses propositions, le premier des syndicats d’avocats par le nombre de ses adhérents, le premier des syndicats d’avocats par le nombre de suffrages qu’elle rassemblera lors des prochaines échéances. Voilà, notre objectif. Voilà, l’objet de notre travail. Voilà les raisons pour lesquelles le comité directeur se réunira une fois par mois et le bureau une fois par semaine. Voilà pourquoi, je vous demanderai partout en France, dans tous vos barreaux, d’agir et d’agir encore et de faire la promotion de nos actions. Oui les avocats ont une mission particulière dans notre société. Oui, les syndicats d’avocats sont essentiels, ils ne sont pas que des cailloux dans les chaussures ; ils sont aussi des forces de propositions. Oui la CNA a toute sa place, place qu’elle entend bien prendre et reprendre et pour cela, nous avons besoin de chacune et de chacun d’entre vous. Car l’engagement syndical est un engagement collectif mais aussi un engagement personnel. Il nécessite le travail de tous mais aussi le travail de chacun. A ce prix, mes amis, nous gagnerons. Nous gagnerons une nouvelle reconnaissance, de nouvelles perspectives, de nouveaux adhérents, de nombreuses voix. Nous serons une CNA active, prospective et ambitieuse. Nous serons en fait la CNA telle qu’elle a toujours été et telle que nous l’aimons. Vive les avocats et vive la CNA ! 2014-100
Thi My Hanh Ngo-Folliot élue Première Vice-Présidente de la CNA
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D.R.
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ors de l’Assemblée Générale du 6 décembre 2013 qui s’est tenue pendant le 39ème Salon Européen de l’Avocat et du Droit des 6 et 7 décembre, les adhérents de la Confédération Nationale des Avocats (CNA) ont, à une très large majorité (82,4 %), élu Thi My Hanh Ngo-Folliot Première Vice-Présidente. En vertu des statuts, elle est appelée à présider la CNA en 2016 et 2017 après le Président Louis-Georges Barret. Thi My Hanh Ngo-Folliot avait été élue en décembre 2009 au Comité Directeur de la CNA puis en janvier 2010 Secrétaire Générale adjointe, sous la présidence de Vincent Berthat. Elle a pris une part décisive aux manifestations marquantes de ces deux années 2010 et 2011, spécialement pour le lancement de la série des dîners-débats de la CNA, sur l’avocat dans la justice, sur la représentation nationale des avocats et des syndicats d’avocats. En 2013, elle a participé à la conception et à l’organisation du Forum CNA de Bayonne-Biarritz tenu en septembre, sur la profession d’avocat et la diversité des métiers exercés, et y est intervenue sur le rôle de l’avocat relais international. Diplômée de l’Université Paris II – Assas, Thi My Hanh Ngo-Folliot, avocate au Barreau de Paris, membre du Comité de pilotage du premier Campus international qui s’est tenu au Vietnam en avril 2013, a été nommée
Responsable de la Commission ouverte Vietnam qu’elle anime. Elle s’est formée, ces dernières années, à la médiation. Elle attache le plus grand prix à la formation continue parce que la plus-value professionnelle est le seul moyen d’être présent sur les marchés du droit où l’on a besoin d’avocats. Praticienne des procédures collectives, elle participe assidument aux travaux et colloques organisés par Droit et
Commerce et l’Institut Français des Praticiens des Procédures Collectives (IFPPC) dont elle est membre. Membre fondateur de l’Institut de Droit et Cultures Francophones (IDCF), elle est également membre du bureau du Comité des Consultants pour le Vietnam. Trilingue français – anglais – vietnamien, son activité est beaucoup tournée vers l’international. Elle conçoit les rapports internationaux comme indispensables et fondés sur le respect et la réciprocité.
Elle continuera donc l’action internationale de la CNA pour contribuer à ouvrir les fenêtres sur l’Europe et sur le reste du monde et pour exporter des modèles dont les meilleurs vecteurs sont les avocats ainsi que pour faire profiter la France d’exemples étrangers. L’actualité brûlante en France est la réforme des juridictions au 21ème siècle. Elle entend que la CNA mène des combats pour : l réclamer le maillage de la France par des juridictions pour éviter les déserts judiciaires l revendiquer le titre d’avocat pour ceux et seulement ceux qui, dans le monde, exercent la profession l préparer le barreau à l’inéluctable extension des moyens alternatifs qui ne peuvent être justes et respectueux de la loi que si les avocats sont au centre du dispositif l lutter contre une vision dépassée et nuisible de la compétition économique ayant pour objectif quasi unique la baisse des prix et privilégier la concurrence par la qualité car c’est la qualité du service d’avocat qui est la meilleure défense de sa profession l préserver l’indépendance de l’avocat, son secret professionnel spécifique et sa déontologie. Thi My Hanh Ngo-Folliot milite pour la promotion de l’avocat, défenseur et conseil.
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Passation de pouvoirs
Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce Philippe Bobet succède à Frédéric Barbin
Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
Paris, 30 janvier 2014
Philippe Bobet et Frédéric Barbin
P
JRT
SERVICES
Domiciliations commerciales
01 42 60 36 35
hilippe Bobet, Greffier associé du Tribunal de Commerce de Paris depuis 2005 a été élu le 30 janvier 2014 pour un mandat de deux ans à la Présidence du Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce. Il a succédé, jeudi dernier, à Frédéric Barbin, Greffier du Tribunal de Commerce de Nantes. Diplômé de la Sorbonne et titulaire d’un DESS de l’Université ParisDescartes, il est entré au greffe de Paris comme salarié en 1993. Après avoir reçu une formation de terrain, il a été en charge du service juridique, de la mise en place de la démarche qualité et a participé à la mise en œuvre des nouvelles technologies de l’information au sein du greffe (site internet, dématérialisation des procédures, formulaires en ligne). Marié et père de deux enfants, âgé de 46 ans, Philippe Bobet a été élu délégué de la Cour d’appel de Paris en 2009, il est membre du Bureau du Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce depuis 2010 où il a successivement été chargé de mission, puis Vice-président.
Au sein du Conseil National il a également assuré la présidence de la commission qualité et dématérialisation. Philipe Bobet souhaite, dans le cadre de son mandat, développer trois axes d’actions : l le maintien et le renforcement des atouts technologiques de la profession au service des justiciables et des entreprises, lla formation des greffiers et des collaborateurs, le dialogue social, l la participation aux projets nationaux et européens. Jean Pouradier-Duteil a été élu Vice-président du Conseil national. Âgé de 60 ans, marié et père de 5 enfants, il a été nommé Greffier associé du Tribunal de Commerce de Grenoble en décembre 1979. Jean Pouradier Duteil est membre du Bureau du Conseil National depuis 2012, il est à la fois membre de la formation disciplinaire, de la commission juridique et de la commission déontologie, règles professionnelles et inspections. Par ailleurs, il continue d’exercer les fonctions d’inspecteur qu’il occupe depuis 2006. 2014-101 Source : communiqué du 30 janvier 2014
Bureau du Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce Président : Philippe Bobet, Paris Vice-Président : Jean Pouradier Duteil, Grenoble l Secrétaire : Louis-Dominique Renard, Saint-Quentin l Trésorier : Pierre Faure, Saint-Etienne l Chargée de mission : Anne Penchinat, Nîmes l Chargé de mission : Jean-Marc Pretat, Pontoise l Chargée de mission : Sophie Jonval, Caen l l
jr.tancrede@jrtservices.fr 12, rue Notre-Dame des Victoires 75002 PARIS
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Décoration & Vœux
Thierry Bary Chevalier de la Légion d’honneur Paris, 30 janvier 2014
atrick Sannino qui a succédé à Jean-Daniel Lachkar le 6 décembre 2013 (Les Annonces de la Seine du 30 décembre 2013, pages 1 et suivantes) a souhaité renouer avec une tradition à laquelle la profession d’huissier de justice était attachée mais qu’elle avait interrompue « en raison des aléas de la vie ordinale ». C’est ainsi qu’en présence de la Garde des Sceaux et de nombreuses personnalités des mondes politique, juridique, judiciaire, économique, universitaire, diplomatique et culturel, le Président de la Chambre Nationale des Huissiers de Justice (CNHJ) Patrick Sannino a présenté ses vœux en s’exprimant notamment ainsi : « L’année 2014 sera importante pour la justice de notre pays. Nos concitoyens ont aujourd’hui le sentiment que la justice est lointaine, trop complexe, onéreuse, pour tout dire peu accessible. Il nous revient à tous, ensemble, d’œuvrer à rapprocher cette justice qui est rendue au nom du Peuple français, à replacer la confiance au cœur du pacte républicain. Les huissiers de justice sont déterminés à y apporter toute leur contribution, à vos côtés Madame la Garde des Sceaux. Que cette nouvelle année soit donc utile. » Il a ensuite laissé le soin à Christiane Taubira de retracer le parcours « au service des autres et de l’intérêt général » du Délégué Général de la CNHJ Thierry Bary. Avec un talent inégalable la Ministre de la Justice a notamment mis en exergue les qualités pédagogiques du récipiendaire mais également son goût prononcé pour la littérature, l’art et la musique. Thierry Bary reflète l’image d’un humaniste dont les qualités intrinsèques exemplaires traduisent une « grande conscience ».
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Ainsi l’Officiante n’a pas hésité à citer René Char : « Tiens vis-à-vis des autres ce que tu t’es promis à toi seul. Là est ton contrat » avant de remettre les insignes à Thierry Bary. Particulièrement ému, il a tenu à rendre un hommage appuyé à sa famille et à la République : « Vivre ensemble et transmettre aux plus jeunes progressivement le témoin : c’est l’unique raison de vivre, c’est la seule façon de ne pas mourir ».
J’entends en écho Paul Ricœur « Je ne réclame rien, je ne réclame aucun après, je reporte sur les autres, mes survivants, la tâche de prendre la relève de mon désir d’être, de mon effort d’exister dans le temps des vivants ». Puis il a lu le poème « Transmission » d’Aimé Césaire : Le surplus, je l’avais distribué aux rides des chemins à l’acharnement des ravins les forces ne s’épuisent pas si vite quand on n’en est que le dépositaire fragile. qui combien aux prix de quels hasards les avaient amassées? un signe un rien une lueur au bas du ciel une flamme née du sol un tremblement de l’air le signe que rien n’est mort je hurlais : vous n’avez pas le droit de laisser couper le chemin de la transmission je hurlais : la bouffonnerie des neurones suffit à mettre hors de cause l’état de la caldeira je hurlais au violent éclatement cependant le temps me serpait dur jusqu’à la racine intacte. Nous saluons cet homme de tradition et de fidélité dont le sens profond de l’amitié inspire confiance. A la fois curieux et réfléchi, ses valeurs morales sont le moteur d’une incontestable réussite. Nous présentons nos amicales et chaleureuses félicitations à l’huissier de justice humble, authentique, actif et loyal qui conjugue avec talent pragmatisme et détermination et dont la diversité des actions a contribué au prestige de la France. 2014-102 Jean-René Tancrède
Thierry Bary et Christiane Taubira
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Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
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Thierry Bary