LES ANNONCES DE LA SEINE jeudi 9 février 2012 - Numéro 11 - 1,15 Euro - 93e année
Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
Nathalie Becache, Gilles Rosati, Véronique Dagonet, Grégory Hania et Nicolas Podolak
Barreau du Val-de-Marne Rentrée Solennelle de la Conférence - 26 janvier 2012 RENTRÉE SOLENNELLE
Barreau du Val-de-Marne
Accessibilité et vulnérabilité par Véronique Dagonet..........................
DIRECT
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Droit social par Jacques Brouillet....................................................5
AGENDA ......................................................................................5 CHRONIQUE
Ecole Internationale d’Arbitrage
Une recherche perpétuelle de nouveaux horizons par Mauro Rubino-Sammartano ..........................................................
PALMARÈS
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Prix Claude Erignac 2012 au Sénat ..........................................8
SOCIÉTÉ
Cercle Turgot ...................................................................................9
ANNONCES LEGALES ...................................................10 ADJUDICATIONS ................................................20 et 22 JURISPRUDENCE
Garde à vue et assistance d’un avocat
Cour de cassation - chambre criminelle- 7 février 2012 .................
DÉCORATION
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Jean-Luc Chartier Chevalier de l’Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand ............23
SUPPLÉMENT
Rentrée de la Conférence du Stage du Val-de-Marne
a Rentrée Solennelle du Barreau du Val-deMarne s’est déroulée le 26 janvier 2012 dans la salle des assises du Palais du Justice en présence des chefs de la juridiction cristolienne, Gilles Rosati et Nathalie Becache, respectivement Président et Procureur de la République du Tribunal de Grande Instance, ou encore d’Elizabeth Ménesguen, Directeur de l’Ecole de Formation des Barreaux du ressort de la Cour d’Appel de Paris. Cette cérémonie fut l’occasion pour Véronique Dagonet, qui a pris ses fonctions à la direction de l’Ordre des Avocats du Val de Marne le 1er janvier dernier, d’inaugurer sa mandature. Elle a choisi de prononcer un discours original et orienté sur les missions de la profession envers les personnes vulnérables. Elle a d’abord souhaité sensibiliser l’assistance au difficile exercice de la défense auprès de la Cour Nationale du Droit d'Asile, juridiction d’appel des décisions de l’Office Français Pour les Réfugiés et les Apatrides OFPRA, relatives aux demandes de statut de réfugié politique. Le Bâtonnier du Val de Marne a ainsi dénoncé la récente multiplication des incidents d’audience, « souvent liés à des refus de renvois légitimes, ou à la violation du principe du contradictoire, mais également à des propos discourtois, parfois même injurieux envers les Avocats ! »
L
Soulignant que le souci de « déstockage » des dossiers de cette juridiction « ne doit pas se faire au détriment des droits de la défense, s'agissant de surcroît, de celle de justiciables éminemment vulnérables », elle s’est néanmoins dite confiante pour venir à bout des résistances. Véronique Dagonet a ensuite abordé l’assistance et la représentation des personnes faisant l'objet d’une hospitalisation sous contrainte devant le Juge des Libertés et de la Détention. Ce sujet revêt une importance toute particulière dans le département du Val-de-Marne qui compte sept établissements. Pour que l’intervention des avocats auprès des patients soit effective, beaucoup reste à faire et en tout premier lieu l’organisation d’audiences foraines au sein des hôpitaux. Avant de clore son propos pour laisser la parole à ses confrères du Jeune Barreau, Nicolas Podolak et Grégory Hania, respectivement premier et deuxième secrétaires de la Conférence, le Bâtonnier Véronique Dagonet a plaidé pour qu’au cours de sa mandature, l’ « accessibilité des personnes à mobilité réduite, qu’elles soient avocats ou justiciables devienne effective, « dans tous les lieux de Justice et les Commissariats du Département ». Jean-René Tancrède
J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne
12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : as@annoncesdelaseine.fr FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE
Rentrée solennelle
LES ANNONCES DE LA SEINE
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Véronique Dagonet
Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01.34.87.33.15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01.42.60.84.40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01.42.60.84.41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01.45.97.42.05
Comité de rédaction : Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appel Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président de la Chambre des Notaires de Paris Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International
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Accessibilité et vulnérabilité par Véronique Dagonet
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COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES NORMES TYPOGRAPHIQUES Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas
Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.
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Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède
'est un honneur et un plaisir pour notre barreau de vous accueillir à l'occasion de la cérémonie de rentrée de notre jeune barreau. Mais c'est aussi, vous vous en doutez, une épreuve pour le bâtonnier, d'avoir à s'exprimer, dès les premiers jours de son mandat, devant un public aussi relevé, attentif, exigeant et critique. C’est donc le cœur battant que je m’adresse à vous pour inaugurer ma mandature. Lors d’une Rentrée solennelle, la tradition nous inflige des figures souvent imposées : - Evoquer toutes les difficultés de la profession puisque le bâtonnier est censé n’en ignorer aucune. - S’insurger contre les atteintes portées aux droits de la défense, puisque le bâtonnier incarne, par essence, la défense de la défense. - Souligner le rôle social de l’avocat, garant du respect des droits du citoyen, parce que les personnalités politiques du département sont présentes… en tout cas, elles ont été invitées. - S’affirmer auprès des chefs de juridiction comme un interlocuteur loyal, tout en se montrant ferme et vigilant. Je tiens cependant à vous rassurer, je n’ai pas l’intention, à mon tour, de vous imposer un catalogue de récriminations !
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Je ne vous parlerai donc pas du devenir de la gouvernance de la profession
Sur le projet d’instaurer des Conseils régionaux et un Ordre national, mon barreau s’est exprimé
par la voix de son Conseil de l’Ordre. Il a affirmé son attachement à un ordre local : « là où il y a un Procureur, il doit y avoir un Bâtonnier ». A Créteil, là où il y a Madame le procureur de la République Nathalie Bécache, que je salue chaleureusement, il y aura le bâtonnier du Valde-Marne ! J’ignore si la profession se fera mieux entendre si elle s’exprime depuis le sommet d’un ordre national, mais je sais, en revanche, que la profession est diverse et doit exprimer sa diversité au sein d’un organe démocratiquement élu par un mode de scrutin qui assure à toutes ses composantes, une juste représentation. Il faut que les avocats du Barreau du Val-deMarne aient le sentiment au même titre que ceux du Barreau de Paris ou d'ailleurs d’être efficacement représentés auprès des pouvoirs publics. Si la gouvernance de la profession doit être réformée, c’est pour que sa représentation nationale soit crédible aux yeux des pouvoirs publics. Mais, elle se doit également de répondre à l’attente des confrères qui la composent. Les avocats de ce barreau souhaitent avant tout conserver une proximité avec leur ordre et une accessibilité à leur bâtonnier. Mes chers confrères, je vous la garantis pendant deux ans. Je ne vous parlerai pas non plus de l’avocat en entreprise
Ce débat agite notre profession, de façon récurrente, depuis quelques années. Il nous a d’abord été proposé de fusionner avec les juristes d’entreprise. Ne sachant pas quelle serait la valeur ajoutée pour le barreau, ni à quelle définition répondaient les juristes d’entreprise, la profession a dit non. Aujourd’hui, il nous est proposé un statut d’avocat salarié en entreprise. La profession a, de nouveau, dit non. Ce refus n’est pas motivé par la peur du changement ; nous avons déjà réussi la fusion avec les anciens conseils juridiques en 1991, tout simplement parce que ces derniers ont adopté nos règles professionnelles, éthiques et déontologiques. L’essence de notre profession est son indépendance, le respect absolu du secret professionnel, mais aussi, et peut-être essentiellement, l'interdiction de servir des intérêts en conflit. Il me paraît actuellement difficile qu’un avocat soit soumis au pouvoir hiérarchique ou disciplinaire d’une entreprise commerciale. L’entreprise est guidée par des objectifs commerciaux et de rentabilité : le libéralisme économique n’est pas toujours compatible avec une déontologie forte et exigeante. Il n’est pas non plus pertinent, à mes yeux, qu’un double tableau voit le jour, composé d’une part, d’une liste d’avocats plaidant et d’autre part, d’une sous liste d’avocats pour ne pas dire d’une liste de « sous avocats » répondant non pas à leur bâtonnier mais à un chef d’entreprise et aux règles du marché. L’avocat peut être présent aux côtés de l’entreprise, en amont des prétoires, sans nécessairement en être le salarié. Je partage le vœu de Monsieur Wimart, président du tribunal de commerce de nous
Les Annonces de la Seine - jeudi 9 février 2012 - numéro 11
Rentrée solennelle voir, à Créteil, intervenir plus souvent au stade du conseil et de la conciliation qu’à celui de la procédure collective. Nous œuvrerons ensemble pour y parvenir. Je ne parlerai pas davantage des efforts toujours plus importants que l’on attend de notre profession dans le cadre du secteur assisté et particulièrement dans le Val-de-Marne
Vous savez que plus de 60% de la population du Val-de-Marne est éligible à l'aide juridictionnelle. Les avocats de notre barreau sont profondément investis dans l’accès au droit. Mais qu’en est-il de cet investissement, lorsque les missions que nous assumons, avec une compétence accrue, se multiplient alors que leur indemnisation se réduit ? Je déplore d'avoir été contrainte d'inscrire à l’ordre du jour de mon premier Conseil de l’Ordre un débat sur la diminution de la rétribution des permanences pénales en raison de l’insuffisance des dotations de l’Etat. Je n’ai pas l’intention d’accepter sans réagir cette situation et je compte Monsieur le président, Madame le procureur et Mesdames et Messieurs les élus, sur votre appui pour que la défense d’urgence puisse être exercée dignement dans notre ressort. Mesdames et Messieurs les parlementaires, il vous faut prendre conscience que la situation de l’aide juridictionnelle devient explosive, et que la médiocrité du financement de ce pilier républicain entraîne avec elle la précarisation d’avocats qui s’y consacrent avec compétence et conviction. Dès le 14 avril 2011, lorsque la Cour de cassation a enfin reconnu le droit à l’assistance d’un avocat pendant la garde à vue, nous avons répondu présents avant de nous poser la question de la rémunération. Il aura fallu près de 3 mois pour qu’un décret définisse cette rémunération ! Mais qu’en est-il des frais d’organisation et de fonctionnement de la garde à vue pour notre Ordre, qui doit financer sur ses fonds propres, l’ensemble des moyens matériels et humains nécessaires au fonctionnement de la garde à vue ? Les dotations incombant à l’Etat ne sont toujours pas versées, ni même arrêtées et sont soumises à des engagements conventionnels de notre part sans véritable garantie réciproque de leur financement.
Depuis le 1er décembre 2008, l’aide juridictionnelle est de droit pour les demandeurs d’asile ce qui a contribué à augmenter le nombre de saisines. Douze salles d’audience par jour ! Cinq jours d'audience par semaine ! Je tiens, d’ores et déjà, à rendre hommage à sa présidente, Madame Denis Linton, qui nous honore de sa présence et à préciser, qu’elle fait preuve d’une ouverture d’esprit et d’une volonté de conciliation évidentes.
dont les motifs du rejet de la demande d’asile ne seront connus au mieux que quelques jours avant l’audience ! D’autre part, parce que certains magistrats qui y siègent, ne semblent pas excessivement préoccupés par l’exercice des droits de la défense. Mais aussi, par la pratique des ordonnances de tri qui consiste à rejeter près de 15% des requêtes, sans que nous ne soyons parvenus à
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Pour un avocat, la représentation d’un client, fût-il atteint de troubles mentaux, n’est pas une simple formalité. Elle suppose que l’avocat puisse voir son client, s’entretenir avec lui et si cet entretien est impossible en raison de son état, c’est à l’avocat de Véronique Dagonet le constater.
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Pour autant, l’exercice de la défense auprès de cette juridiction est particulièrement difficile pour plusieurs raisons. D’une part, en raison du rôle singulier de l’OFPRA, qui a instruit le dossier sans avocat et
comprendre les critères objectifs conduisant à ces rejets. A plusieurs reprises dans le passé, les bâtonniers de la Couronne sont intervenus pour tenter d’améliorer les choses.
Grégory Hania et Nicolas Podolak
…de trois sujets concernant des personnes vulnérables, qui intéressent l’ensemble de notre profession, avec une acuité particulière le Barreau du Val-de-Marne. Je veux vous parler d’abord de la situation de la Cour nationale du droit d'asile :
Il s'agit de la juridiction d’appel des décisions de l’OFPRA, l’Office français pour les réfugiés et les apatrides, relatives aux demandes de statut de réfugié politique. Cette juridiction siège à Montreuil, à quelques mètres de Vincennes, mais Seine-Saint-Denis ou Val-de-Marne, quelle importance, puisque des confrères de toute la France viennent y plaider. Cette juridiction, peu connue, est pourtant la plus importante juridiction nationale par le nombre de dossiers traités.
Les Annonces de la Seine - jeudi 9 février 2012 - numéro 11
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En revanche, je souhaite vous parler de ce qui me tient à cœur en ce début d’année,
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Rentrée solennelle Pourtant, depuis quelques mois, les incidents d’audience se sont multipliés. Ces incidents sont souvent liés à des refus de renvois légitimes, ou à la violation du principe du contradictoire, mais également à des propos discourtois, parfois même injurieux envers les avocats ! L'avocat a le droit d'exiger de tous, la même modération et la même courtoisie qui s'imposent à lui. Il m'est apparu comme une évidence de répondre au désarroi des confrères qui plaident habituellement devant cette Cour et de sensibiliser les bâtonniers d'Ile-de-France à leurs difficultés. Des négociations sont en cours pour faire évoluer certaines pratiques dans cette juridiction. Le souci de « déstockage » des dossiers qui anime la CNDA, ne doit pas se faire au détriment des droits de la défense, s'agissant de surcroît, de celle de justiciables éminemment vulnérables. Notre barreau a organisé avec les barreaux d'Ile-de-France et de Paris une permanence quotidienne de bâtonniers et de membres du Conseil de l'Ordre, au sein même de la Cour, pour résoudre les nombreux incidents. Elle commence à porter ses fruits. Je sais, Madame le Président, que notre action conjuguée permettra de venir à bout des résistances de ceux qui refusent d’admettre que le rôle de l’avocat est indispensable et doit être respecté. Je veux aussi vous parler de l'hospitalisation sous contrainte dans les établissements psychiatriques :
Depuis le mois d'août 2011, grâce à une Question prioritaire de constitutionnalité, nous assumons une nouvelle mission découlant de la loi du 5 juillet 2011 : assister ou représenter devant le juge des libertés et de la détention les personnes faisant l'objet d’une hospitalisation sous contrainte. Le Val-de-Marne présente la spécificité d'être le département le plus doté en établissements psychiatriques. C'est donc le plus touché par les exigences de l’hospitalisation sous contrainte. Cela concerne rien moins que deux cents patients par mois, cinq audiences par semaine et sept établissements psychiatriques.
Est-ce la place des patients de se retrouver dans la salle des pas perdus, mêlés aux prévenus qui attendent d’être jugés devant la chambre correctionnelle ? J'ai pleinement conscience des effectifs et des moyens limités de la juridiction, mais les principes qui nous guident ne peuvent pas dépendre exclusivement de contingences matérielles. Il faut, Monsieur Rosati, je vous le demande respectueusement, que nous progressions ensemble pour que cette procédure réponde enfin à ses objectifs. Je veux enfin vous parler de l'accessibilité des locaux de Justice et de Police :
il doit obligatoirement être représenté par un avocat. Pour un avocat, la représentation d’un client, fût-il atteint de troubles mentaux, n’est pas une simple formalité. Elle suppose que l’avocat puisse voir son client, s’entretenir avec lui et si cet entretien est impossible en raison de son état, c’est à l’avocat de le constater. Il n’est pas question que l’on puisse dire à l’avocat : « Vous ne pouvez pas voir votre client. Vous ne pouvez pas non plus voir son dossier médical. Mais vous devez le représenter pour répondre aux exigences de la Loi ». Ces exigences ont été fixées dans l’intérêt des patients et l’avocat ne peut servir simplement d’alibi à la régularité de la procédure. La loi prévoit la mise en place des moyens permettant notre intervention effective. Ces moyens existent déjà dans d’autres départements. Dès les premiers jours d'application de ces dispositions, notre barreau s'est ému de l'absence d’audiences foraines au sein des hôpitaux. Pourquoi ne sont-elles toujours pas mises en
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Le Val-de-Marne présente la spécificité d'être le département le plus doté en établissements psychiatriques. C'est donc le plus touché par les exigences de l’hospitalisation sous contrainte. Cela concerne rien moins que deux cents patients par mois, cinq audiences par semaine et sept établissements psychiatriques.
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Véronique Dagonet
C'est dire si les avocats de ce barreau et les juges de ce tribunal sont concernés ! Cette loi prévoit l'audition par le juge, du patient faisant l'objet d’une hospitalisation sous contrainte, assisté ou, le cas échéant, représenté par un avocat. Elle prévoit en particulier que si le patient ne peut être auditionné pour des raisons médicales,
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place dans notre ressort, alors même que le principal établissement hospitalier concerné refuse systématiquement et par principe, d'organiser le transport des patients au tribunal, et qu’il s’est doté d’une salle d'audience et d’une salle de réunion pour permettre aux avocats d'être en contact avec leur client dans des conditions de sécurité assurées ?
Le Barreau du Val-de-Marne est très investi dans l'accès à la Justice, Monsieur Rosati, qui préside le CDAD m'en est témoin. Mais l'accès au droit c'est aussi l'accès effectif aux lieux de justice des personnes à mobilité réduite, qu’elles soient avocats ou justiciables ! Ce soir, grâce à vous Monsieur le président, c’est la première fois depuis 15 ans, qu’un avocat du barreau du Val-de-Marne, pénaliste reconnu, longtemps président du Groupe de défense pénale, peut assister à la rentrée solennelle de son barreau dans la Salle des assises. Tous mes prédécesseurs n’avaient cessé d’en faire la demande. Je vous remercie, mais il aura fallu attendre qu'un procès ultra médiatisé, celui du « gang des barbares », se déroule à la Cour d'assises de Créteil et que cet avocat de notre barreau assiste l'un des co-accusés, pour qu'enfin, l'accessibilité à la Cour d'assises par une personne à mobilité réduite soit permise… Devrons-nous attendre le 1er janvier 2015, date buttoir fixée par la loi pour que tous les « ERP » du Val-de-Marne (établissements recevant du public) soient accessibles aux handicapés moteurs ? Est-il normal qu’une personne handicapée ne puisse encore se rendre dans certains tribunaux d'instance ? Est-il acceptable qu’une personne handicapée ne puisse encore accéder à certains commissariats de police ? Je vous demande, Monsieur le président, Madame le procureur, Mesdames et Messieurs les élus d’associer vos efforts aux nôtres pour que cette accessibilité devienne effective dans le temps de ma mandature, dans tous les lieux de justice et les commissariats du département. Voilà ce que je souhaitais vous dire, Mesdames et Messieurs, mes chers confrères, à l'aube de ma mandature. Mais avant de passer la parole aux deux ténors de notre Jeune barreau, je souhaite terminer mon propos en ayant une pensée bien particulière pour Monsieur le bâtonnier Charles Waddy, qui nous a quittés cette année. C’était un humaniste et un avocat exemplaire. Il a marqué de son empreinte notre barreau, mais également j’en suis certaine, notre juridiction. Je vous remercie de votre attention, et je laisse la parole, sans plus attendre, à Nicolas Podolak et Grégory Hania, premier et deuxième secrétaires de la Conférence du Jeune barreau qui vont nous expliquer AAA Quoi bon ?
Les Annonces de la Seine - jeudi 9 février 2012 - numéro 11
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Direct
Agenda
Droit social
D.R.
par Jacques Brouillet*
Jacques Brouillet
Le forfait-jour retombe dans la tourmente ? n croyait que le forfait-jour remis en cause par divers partenaires sociaux et tribunaux, avait été sauvé par l’arrêt de la Cour de Cassation du 29 juin 2011 n° 09-71.107. Celui-ci légitime, en effet, sa mise en œuvre, dès lors que la convention est « assortie de garanties permettant d’assurer la protection
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de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait jour ». En substance il apparaissait nécessaire , mais suffisant, de justifier, (pour les salariés des catégories relevant légalement de cette forme d’organisation de la durée du travail) de l’existence d’entretiens périodiques susceptibles d’évaluer et au besoin de modifier, la charge de travail. Or, par un nouvel arrêt du 31 janvier 2012 n° 10-19807, la Cour de cassation considère que l’accord de branche de la chimie » ne comporte pas de limites et garanties suffisantes ». De telle sorte quelle proclame que « la convention de forfait en jours était privée d’effet »… ce qui revient a dire que « le salarié pouvait prétendre au paiement des heures supplémentaires » ! Il convient donc de ne pas se contenter des dispositions d’une convention collective (le plus souvent antérieures à l’arrêt du 29 juin 2011) ni a celles d’un accord d’entreprise (également rarement modifié depuis cette jurisprudence) ni même espérer « se couvrir » par une refonte de la convention individuelle de forfait. Cette dernière démarche serait en effet jugée insuffisante par la Cour de cassation, qui semble bien marquer sa volonté de ne légitimer les conventions de forfait jours que dans la mesure ou un accord collectif précise les mesures de protection et les garanties mise en œuvre… ! Autant dire que c’est pratiquement tous les accords qui doivent être révisés.
COLLOQUE
Les clauses contractuelles pré-divorce Comment les utiliser ? 5 mars 2012 Maison du Barreau - Paris 1er Renseignements : www.institut-dfp.com
2012-110
3ÈME ÉDITION
Salon de la formation et de l’évolution professionnelle 9 et 10 mars 2012 Palais du commerce Chambre de commerce et d’industrie Lyon Renseignements : 04 72 40 58 39 husson@lyon.cci.fr
2012-111
LES ENTRETIENS DU CONSEIL D’ETAT
Le patrimoine immatériel des personnes publiques 16 mars 2012 Ecole nationale d’administration Paris (6ème)
Qualification de cadre dirigeant et durée du travail La qualité de cadre dirigeant doit être réservée aux cadres qui participent (effectivement) à la direction de l'entreprise
ar un arrêt du 31 janvier 2012 la Cour de cassation entend limiter l'attribution de la qualification de cadre dirigeant à celui « qui participe (effectivement à la direction de l'entreprise ». Ainsi les 4 critères cumulatifs cités par la loi (art L 3111-2 du Code du travail) pour définir le cadre dirigeant pouvant être exclu de la réglementation relative à la durée du travail (et donc au décompte des heures supplémentaires) ne semblent pas suffire, à savoir : - exercer des responsabilités importantes ; - être habilité à prendre des décisions de façon largement autonome ; - bénéficier d'une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps ; - percevoir une rémunération se situant dans les niveaux les plus elevés des systèmes de rémunéra-
P
tion pratiqués dans l'entreprise ou l'établissement. De même, concernant la classification de « cadre supérieur » donnée par une convention collective, ou le titre accordé par un contrat de travail. En l'espèce, une personne qualifiée de cadre dirigeant par une entreprise de l'habillement par ce qu'elle était « responsable de la collection homme » a été admise a réclamer le paiement d'heures supplémentaires cass soc 31 janvier 2012 n°10-24.412 bref social du 3 février. Cette décision ne peut qu'inciter les entreprises, et notamment les PME, à user plus modérément de la qualification de cadre dirigeant ou cadre supérieur dans le but de se soustraire à la législation sur la durée du travail. Il leur faut être en mesure de démontrer par l'organigramme et/ou l'appartenance au « comité de direction », la réalité de cette participation des intéréssés à la définition des orientations stratégiques (sur le plan économique et social) de l'entreprise.
* Jacques Brouillet est avocat au barreau de Paris, Cabinet Audit Conseil Défense.
Renseignements : sre-colloques-conseil-etat.fr 2012-112
37ÈME COLLOQUE DE DEAUVILLE ASSOCIATION DROIT ET COMMERCE
Loyauté et impartialité en droit des affaires 31 mars et 1er avril 2012 Deauville Renseignements : Téléphone/télécopie : 01 46 28 38 37 isabelle.aubard@droit-et-commerce.org www.droit-et-commerce.org
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COLLOQUE DROIT ET ÉCONOMIE DE L’ENVIRONNEMENT
Droit de la concurrence et protection de l’environnement 2 avril 2012 Cour de cassation - Paris 1er Renseignements : www.courdecassation.fr 2012-114
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Les Annonces de la Seine - jeudi 9 février 2012 - numéro 11
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Chronique
Ecole Internationale d’Arbitrage et Médiation de la Méditerranée et du Moyen-Orient(1) Une recherche perpétuelle de nouveaux horizons
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par Mauro Rubino-Sammartano*
Mauro Rubino-Sammartano ue des propos inauguraux adressés à la Méditerranée et au MoyenOrient partent du seuil de la Sérénissime République de Venise apparaît approprié au vu de ses glorieuses traditions maritimes et de commerce entre l’Europe et l’Orient qui l’ont portée, grâce à Marco Polo, jusqu’à la Chine, tandis que deux autres grands explorateurs italiens, Christophe Colomb et Amerigo Vespucci, ont, pour le premier, conduit à la découverte de l’Amérique, tandis que le second lui a donné son nom. Il est des traditions qui, dans le monde d’aujourd’hui, aveuglé par la recherche de la réussite matérielle, ont peut-être été oubliées de la plupart, mais qui ne peuvent pas ne pas être présentes à l’esprit de ceux qui, pourvus d’une formation classique, souhaitent que la Méditerranée joue de nouveau - sur un plan intellectuel - le rôle majeur qui l’a toujours caractérisée. Avec le XIXème siècle, l’axe des affaires et du pouvoir politique et militaire s’est définitivement déplacé loin de la « mare nostrum ». Les civilisations antiques de la Méditerranée et du Moyen-Orient ne sont plus, depuis des siècles, en mesure de rester à elles-seules un grand interlocuteur du nouvel ordre intellectuel et spirituel mondial. Ensemble, elles sont cependant capables de retrouver leur force spirituelle d’autrefois. Cela me semble être l’objectif à poursuivre en
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vue de donner une telle opportunité, un tel élan intellectuel à nos nouvelles générations. Ceci n’a pas pour but de faire obstacle à d’autres civilisations, mais d’interagir et participer avec elles à ce mouvement spirituel, grand moteur de l’esprit humain. Je propose que nous réfléchissions ensemble sur l’arbitrage, à travers un bref exposé (qui, pour cette raison, ne rendra pas compte ici de l’analyse scientifique des thèmes abordés effectuée dans de nombreuses publications). Beaucoup, probablement trop, a été et est écrit sur ce sujet. On peut dire que certains ne voient pas l’arbre car leur attention est attirée par la forêt entière alors que d’autres ne voient pas la forêt parce qu’ils sont trop concentrés sur l’arbre. Je voudrais proposer une autre métaphore. Nous ne connaissons pas l’arbre si nous ne sommes pas capables d’arriver à ses racines. Par conséquent, cherchons ensemble à creuser le terrain de l’arbitrage dans cette direction. L’arbitrage : une justice privée créée par l’Etat lui-même
Une première étape de notre recherche peut consister à délimiter le périmètre de nos réflexions. Tout d’abord, on constate que l’arbitre est - audelà des nombreuses subtiles définitions - une juridiction privée, reconnue par les ordres juridiques, ceux-ci attribuant à leurs juges le pouvoir d’en confirmer ou annuler la décision. Cela a pour conséquence, dans quelque système juridique, de placer le rapport entre l’arbitrage et la justice ordinaire sur le plan de la compétence et non de l’appartenance à une juridiction différente. La nature processuelle de l’arbitrage se dessine donc nettement en tous les cas.
Le critère permettant la définition de l’internationalité de la procédure arbitrale (qui est règlementée par les divers ordres juridiques dans le cadre de leur propre règlementation processuelle) ne peut être, par conséquent, ni subjectif ni objectif, mais uniquement processuel. Le critère procédural permet ainsi de classer, à côté des arbitrages internes et externes, les arbitrages à proprement parler internationaux tels ceux de la Convention de Washington de 1965 et ceux régis par les règlements arbitraux supra nationaux. Insuffisance de la référence à l’arbitrage international « commercial »
Il est courant de faire référence à l’arbitrage commercial, par opposition à l’arbitrage international public et aux arbitrages en matière d’investissement. En fait, le terme commercial est restrictif puisqu’il ne comprend pas, au-delà des arbitrages commerciaux, ceux-là mêmes entre des parties privées ayant pour objet des questions civiles. Existence d’un droit arbitral international
On note une réticence à accepter l’existence d’un droit arbitral international. Des voix influentes, notamment celle de mon ami, le Professeur Pierre Mayer, s’en font écho. Pourtant, les conventions internationales, les différentes règlementations nationales en termes d’arbitrage international, la lex mercatoria, le « tronc commun » (dont il sera traité dans un instant), les règles matérielles de droit international (reconnues par la doctrine et la jurisprudence française), semblent aboutir à la reconnaissance de son existence. Ces prémisses systématiques étant esquissées, plusieurs questions vont être abordées.
La notion d’internationalité de l’arbitrage
Le dépassement des règles de conflit
La doctrine et même les ordres juridiques considèrent généralement international l’arbitrage entre des parties appartenant à des juridictions différentes, ou l’arbitrage de litiges relatifs au commerce transnational, ou selon ces deux critères. Si on raisonne par analogie à ces critères pour statuer si un procès devant les tribunaux ordinaires est interne ou étranger, ces deux critères - séparés ou cumulés - ne sont pas pertinents à des fins de qualification. De tels procès seraient plus correctement dénommés transnationaux.
La détermination de la loi applicable, si elle n’est pas effectuée par les parties, est - comme on le sait - établie selon les règles de règlement des conflits, règles non identiques dans les divers ordres juridiques et qui donnent lieu fréquemment à des résultats artificiels. Nous devons au Professeur Goldman l’élaboration de la lex mercatoria, laquelle du reste - quand elle cherche à se faire reconnaître comme un système juridique - rencontre des obstacles, mis en évidence entre autres par le Professeur Mann et par le juge anglais Sir Michael Kerr.
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Chronique Cela a mené à l’élaboration de la théorie du « tronc commun ». Celle-ci part du postulat que, si les parties n’ont pas choisi une loi substantielle, un tel silence est éloquent et indique qu’aucune de ces parties n’a souhaité se soumettre à une loi que généralement elle ne connaît pas, et voudrait que s’applique sa propre loi nationale. La solution consistant à appliquer la partie commune des deux lois substantielles des parties apparaît destinée à satisfaire les exigences de ces dernières et est plus apte que le système artificiel des règles de conflit à régler les rapports entre elles. Une règlementation commune à intégrer, quant aux aspects non couverts par elle, selon les usages et les attentes des parties. L’arbitrage : une procédure différente et meilleure que celle du juge ordinaire
L’approfondissement de l’institution de l’arbitrage doit être - à mon avis - soutenu par la constante remarque que les parties recourent à l’arbitrage pour obtenir un service non seulement différent, mais aussi meilleur que celui du juge ordinaire. Les institutions arbitrales et les arbitres doivent donc garder à l’esprit, à chaque moment présent (comme leitmotiv), qu’il est de leur devoir de satisfaire cette attente légitime. Un seul arbitre au lieu de trois
Conformément au « mythe de la symétrie », l’on a été amené à voir favorablement que chacune des parties puisse nommer son « propre arbitre ». Une telle solution ne semble toutefois pas positive, avant tout pour des raisons très pratiques (cela triplant les coûts), les procédures moyennes et petites ne pouvant supporter des coûts disproportionnés à la somme en jeu dans le litige. Cependant, bien au-delà de cette considération pratique, il apparaît inopportun de donner vie à un collège de juges dont deux sur trois sont choisis par chaque partie (avec une attente fréquente, desdites parties, que ceux-ci soient sensibles à leurs espérances respectives). Le parallèle constant entre l’arbitrage et la justice ordinaire confirme qu’il ne s’agit pas d’une solution adéquate. Un arbitre unique (choisi d’un commun accord par les parties ou, à défaut, nommé par l’institution arbitrale) semble la solution correcte. Durée réduite, si contrôlée, de la procédure
L’arbitre est souvent conduit à imiter le juge. Voyant que très, trop souvent, le juge ne se préoccupe pas de la durée du procès et de la nécessité d’une décision rapide, cela le conduit à l’imiter, avec pour résultat que les arbitrages qui se terminent en deux ans ne sont en rien la règle et qu’ils durent parfois jusqu’à dix ans. L’objectif dans l’organisation et la gestion des procès arbitraux doit être de parvenir à la décision dans l’année. Notre règlement et - je pense - notre devoir vont dans ce sens. Réexamen du fond de la sentence arbitrale
Un des dogmes du monde de l’arbitrage commercial est que la décision arbitrale doit être un « tabou », c’est-à-dire que personne, ni juges ni même arbitres, ne doit la modifier (excepté - cela ne pouvant être évité - pour des motifs procéduraux).
La conséquence de cette position est que la décision arbitrale bénéficie de l’immunité absolue sur les erreurs de droit (par exemple, sur le choix de la loi applicable), sur les erreurs de fait ou quant à l’évaluation de la preuve. Si cette immunité donnait sa valeur à la procédure arbitrale, cette dernière ne mériterait pas, à mon avis, d’être utilisée. Le réexamen du fonds de la décision n’affaiblit pas l’arbitrage, mais sert à faire que soient respectées les attentes légitimes d’un homme juste. La formule adoptée, sur ma proposition, par la Cour européenne d’arbitrage d’un degré arbitral d’appel, auquel la partie perdante (en tout ou partie) peut accéder à condition qu’elle dépose auprès de notre Cour la somme [non accordée par la première décision arbitrale et pour les coûts du second degré], consent ainsi de réaliser le rêve impossible de l’arbitre, celui d’être « selfexecuting » et de voir par conséquent sa sentence exécutée sans devoir recourir au juge ordinaire. En effet, de cette façon, la partie victorieuse obtient tout de suite l’exécution de la décision de premier degré, sans avoir à se soumettre au calvaire de l’exéquatur d’abord et de l’exécution ensuite (restant encore en outre les éventuelles voies de recours consenties). Cela aussi est une importante conquête, faisant désormais partie de notre bagage. Un Tribunal arbitral international permanent pour les contestations et l’exéquatur des sentences arbitrales transnationales
Les voies de recours d’un côté, et la recherche de l’exéquatur, des sentences arbitrales transnationales donne lieu à des décisions contrastées ou, en tous les cas, à des solutions inharmonieuses, comme dans les affaires Hilmarton et Chromalloy, dans lesquelles une décision, annulée dans le pays d’origine, a été reconnue et déclarée exécutoire dans un autre Etat, en l’espèce en France et aux Etats-Unis. Réserver à un Tribunal arbitral international permanent la décision, tant sur le recours que sur l’exéquatur des sentences arbitrales transnationales, apparaît également comme un progrès dont notre école de pensée est porteuse. Quelle justice l’homme juste attend-il de l’arbitrage ?
Je crois que nous, de la Méditerranée et du Moyen-Orient, ressentons en notre for intérieur - peut-être plus que d’autres - que le citoyen se tourne vers l’arbitrage, non pour avoir une copie de la justice ordinaire, et non, par conséquent, une décision qui soit un brillant exercice intellectuel, mais un prononcé qui rend une justice substantielle, appliquant la loi avec humanité. Ce critère est, du reste, bien présent également dans les règlements de common law. Ainsi, le Chancelier anglais dans l’affaire Knox(2) a affirmé : « L’arbitre a une plus grande latitude que la Cour pour rendre la justice entre les parties : par exemple, il peut accorder à une partie la levée d’un droit qui pèse sur elle alors que, celui-ci ayant été acquis légalement et sans fraude, on ne pourrait pas s’y opposer dans une Cour de Justice. » et le Conseil privé de la Couronne de Grande-Bretagne dans Moses(3), saisi d’une demande de rejet d’un appel d’une décision de la Cour suprême de Tasmanie, a affirmé que dans l’exercice de ces pouvoirs
discrétionnaires, la Cour : « doit être guidée uniquement par l’équité et la bonne conscience… la Cour ne doit pas non plus être, en tout cas, liée par les dispositions strictes de la loi, ou autres technicités et formalismes. » Il ne pouvait y avoir de meilleur rappel des commentaires érudits de la doctrine que celui qui a été effectué par Lord Denning dans la décision Eagle Star(4) dans laquelle la cour d’appel d’Angleterre examinait la clause compromissoire suivante : « Les arbitres ne seront pas liés par les dispositions de la loi mais doivent trancher tout différend qui leur est soumis en vertu d’une interprétation équitable, plutôt que strictement légale, des stipulations contractuelles. » Dans le motif de sa décision, Lord Denning a déclaré : « Le public souhaite des règles et n’aime pas la loi, alors que sans loi il n’y aurait pas de règles. Les qualités judiciaires que le public porte aux nues sont le sens commun et l’humanité; la dévotion à la loi est moins admirée que la volonté de la restreindre. Par conséquent, ce n’e st pas surprenant que le droit anglais s’e st très tôt accommodé de différents moyens conçus pour empêtrer le système légal avec la justice de l’affaire. » Le rôle de l’arbitre
Notre vision de l’arbitrage ne pourrait pas ne pas aborder aussi le rôle de l’arbitre. Le monde de l’arbitrage connaît d’un côté une tendance répandue à créer une image de l’arbitrage comme une clinique de luxe, et l’on enregistre de l’autre quelques groupements d’arbitres très liés entre eux ainsi qu’un nombre croissant de nouveaux arbitres, récemment nommés et donc avec une expérience limitée. Parmi ces arbitres émergent des objectifs souvent égoïstes: obtenir les honoraires les plus élevés possibles et/ou être admirés et glorifiés. L’arbitre, que l’homme juste a le droit d’exiger, doit à mon avis avoir un objectif différent: celui de rendre service aux parties, en décidant avec attention et humilité de la manière la plus juste. En conclusion
Des remarques qui précèdent, il ressort, je crois, que nous avons et devons avoir de l’arbitrage une vision nettement différente de celle de plusieurs autres. Une vision (que j’ai forgée à travers des dizaines d’années d’études) qui ne se limite pas à attester sur les lieux communs de l’arbitrage mais qui va à la racine de cette institution et constitue l’ossature du règlement de la Cour européenne d’arbitrage. C’est avec cet esprit que nous inaugurons notre Ecole internationale d’arbitrage et médiation de la Méditerranée et du Moyen-Orient, avec le vœu que nous parcourions ensemble le chemin d’une recherche perpétuelle de nouveaux et meilleurs horizons. Notes : 1 - © Copyright, Mauro Rubino-Sammartano 2011. 2 - Knox and Co. v. Symmonds (1971) 1 Ves 369. 3 - Moses v. Parker (1986) AC 245. 4 - Eagle Star Insurance Co. Ltd. v. Yuval Insurance Co. Ltd. (1978) 1 Lloyd’s Rep. 357. * Mauro Rubino-Sammartano est Président de la Cour Européenne d’Arbitrage, il a prononcé ce discours inaugural de l’Ecole à la Villa Canossa de Venise à l’occasion de la cinquième Conférence Internationale Med-Mid (Méditerranée et Moyen-Orient) le 1er octobre 2011.
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Palmarès
Prix Claude Erignac 2012 Sénat, Paris - 7 février 2012
Richard Descoings, Laura Carpentier, Antoine Rufenacht, Dominique Erignac, Jean-Pierre Bel, Marie-Christophine Erignac et Charles-Antoine Erignac
Un grand commis de l’Etat par Jean-Pierre Bel 'est un grand honneur pour moi de vous accueillir aujourd'hui au Sénat, pour la remise du Prix ClaudeErignac. Cela fait partie de l’un de ces moments solennels et émouvants que j’aurais eu à connaître depuis mon élection à la présidence du Sénat. Cette cérémonie dans les murs du Sénat est devenue une tradition. Honorer cette tradition est pour moi, pour nous tous, bien plus qu'un devoir : c'est une évidence. Cela fait quatorze ans maintenant que le Préfet Erignac est tombé sous les balles de ses lâches assassins. Cet évènement dramatique de notre vie nationale nous semble à la fois étrangement lointain et terriblement proche. C'était hier, mais les coups de feu résonnent encore aujourd'hui. Quatorze ans ! Quatorze longues années qui nous séparent de la mort d'un homme, et de la disparition d'un grand serviteur de l'Etat. Car en ce 6 février 1998, c'est un double assassinat qui est commis. Celui d'un grand humaniste, dont tous ceux qui l'ont connu
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évoquent le souvenir avec émotion : Claude Erignac fut un homme de dialogue, d'écoute, un grand Républicain. Et ce fut un grand Préfet, de la trempe de ceux qui font honneur au corps préfectoral et à l'Etat. Tout son parcours témoigne de la haute idée qu'il se faisait de l'Etat, de sa conception exigeante de l'intérêt général, de sa volonté farouche de servir. Ecouter avant de décider : c'est le meilleur moyen d'agir, la manière juste. Associer toutes les parties prenantes à la conduite des politiques publiques : c'est un gage d'efficacité et une manière moderne de concevoir l'action. Etre ouvert d'esprit et de cœur, sans jamais reculer devant les décisions qui s'imposent : c'est la marque d'une fermeté maitrisée. Toutes ces qualités, Claude Erignac les conjuguait au plus haut point. Tous ces traits de caractère sont ceux d'un grand commis de l'Etat. Il incarnait au plus haut point les valeurs du service public. Ces valeurs ne sont pas désuètes. Elles ont contribué, au fil des ans, à façonner la République et à l'ancrer dans nos cœurs. Aujourd'hui, dans une période où l'intérêt général semble être pour certains une notion obsolète ou méconnue, elles demeurent plus que jamais nécessaires. Je sais aussi qu'elles continuent d'être incarnées.
Incarnées par de nombreux fonctionnaires, dans le corps préfectoral bien sûr, mais aussi par les agents de tous grades dans l'ensemble des fonctions publiques : des femmes et des hommes compétents, dévoués, intègres y œuvrent jour après jour au service de leurs concitoyens. Trop souvent critiqués, caricaturés, dénigrés, ignorés, ils méritent, en cette journée particulière, de recevoir un hommage. Incarnées aussi par des élus locaux qui sont les premiers interlocuteurs des préfets et que Claude Erignac savait respecter, écouter, associer dans une relation confiante entre l’Etat et les collectivités locales qui est le seul moyen d’avancer dans les moments difficiles. Incarnées, enfin, par de nombreuses personnes de tous horizons ces héros méconnus de la vie quotidienne, qui ont décidé de placer leur vie sous le signe des valeurs chères à Claude Erignac. C'est l'une des forces particulières du Prix qui nous réunit ce soir. En créant l'association Claude Erignac, vous avez souhaité, Madame, avec vos enfants, avec vos proches, avec tous ceux qui ont connu, apprécié, respecté, aimé votre mari, que son souvenir continue de vivre, non pas comme une nostalgie mais comme une force pour demain. Vous avez su le faire avec pudeur, en adressant un message porteur d'espérance. 2012-116
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Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
Jean-Pierre Bel a présidé la cérémonie au cours de laquelle Laura Carpentier, étudiante en première année du master de sociologie politique et action publique de Sciences Po, a reçu le prix Claude Erignac 2012 pour son engagement en faveur des populations marginalisées. C’est à la présidence du Sénat que s’est déroulée cette manifestation émouvante à l’occasion de l’anniversaire de l’assassinat du Préfet Claude Erignac le 6 février 1998. Ce fut une façon de célébrer l’amitié active si chère au Préfet défunt. De nombreuses personnalités étaient présentes notamment le Préfet de la région Ile-de-France Daniel Canepa, Président de l’Association du Corps Préfectoral et des Hauts Fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur, qui est le Président de droit de l’Association Claude Erignac, ainsi que Jean-Pierre Duport et Jean Aribaud. Jean-René Tancrède
Société
Cercle Turgot
Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
Conférence-débat « Lucidité et lueur d’optimisme » - Paris, 22 novembre 2011
’Europe est elle condamnée à une « longue dépression » ? C’est à cette angoissante question que le Cercle Turgot vient d apporter avec ses économistes, des éléments de réponse, lors de sa conférence-débat qui s’est tenue le 22 novembre à l’Université de Paris Dauphine, co-organisée avec la DFCG, en présence d’éminentes personnalités du monde des entreprises, des universités et de la planète « finance ». En effet, alors que le souffle du boulet, qui a failli emporter l’Europe dans une spirale apocalyptique, la menaçant d’implosion politique et financière, reste encore bien présent dans les esprits, voilà que se lève un « vent mauvais », annonciateur d’un arrêt programmé de la croissance européenne, et d’une nouvelle phase de récession : le PIB stagnerait jusqu’au courant de 2012 et la croissance serait limitée à ½ % pour l’année… Chômage persistant (près de 10% attendus pour l’ensemble de la zone) en perte de confiance, inquiètes de la dérive des finances publiques et de la crise de solvabilité des Etats, les entreprises freinent brutalement leurs investissements et les ménages font preuve de prudence extrême dans leurs dépenses de consommation… L’ensemble de ces facteurs, qui s’aggravent mutuellement, constituant un cercle vicieux dont on peut se demander s’il est possible d’en sortir. L’Europe est certes sauvée, mais elle n’est pas guérie… Pour Jean-Pierre Petit, Président des Cahiers verts de l’économie et double lauréat du Prix Turgot, si le scénario d’une dépression lente est assez plausible, ce n’est pas une fatalité dès lors qu’une forte convergence des politiques
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économiques des Etats membres et qu’une vraie stratégie de la zone monétaire se font jour, en pleine cohérence fiscale et budgétaire. Comme le remarque Nicolas Bouzou, Président d’Astérès et Vice-président du Cercle Turgot, encore faut-il, dans l’urgence, orchestrer idéalement les séquences et les contenus des phases d’ajustement budgétaires, piloter simultanément croissance et rigueur, par delà le dilemme (de Buridan ?). C’est aussi accepter de concilier la part de souveraineté de chaque Etat-nation avec l’impérieuse nécessité d’avancer vers une nouvelle phase d’intégration, plus ou moins fédéraliste, en tout cas impulsée par les politiques et acceptée par les peuples. Pierre Sabatier, Président de Primeview, administrateur du Cercle, invitant de son côté l’auditoire à tirer les leçons de la décennie perdue du Japon qui, cruel détail, a comme l’Allemagne d’aujourd’hui tout misé sur ses exportations et a reçu en héritage 20 ans de dépression. Les tables rondes organisées avec la participation de Henri Malosse, Vice-président du Comité Economique et Social Européen (CESE), 3ème institution européenne, ont permis de mettre l’accent sur les points d’optimisme, inhérents aux évolutions raisonnablement espérées des différents facteurs, sources de la crise. Pour Hervé de Carmoy, auteur de l’ouvrage « Ou va l’Amérique d’Obama », il n’est pas impossible que la confiance puisse se rétablir plus rapidement qu’envisagé et que la croissance mondiale résiste mieux qu’anticiper, tandis que Christian Saint-Etienne souligne qu’une des voies de salut passe par une volonté forte de création d’un équilibre européen de la fiscalité ; David Thesmar, Prix Turgot 2011 et François Meunier, DGA de la Coface, ont pu montrer,
avec Philippe Dessertine, DG de l’Institut de Haute FInance (IHFI) en quoi la restructuration du système bancaire et les facteurs d’entrainement du « reste du monde », en particulier des pays émergents, pouvaient contribuer à la redynamisation de la zone euro et au soutien de ses exportations. Une forme d’optimisme que Jean-Louis Chambon reprenait dans la conclusion des travaux d’un débat qui sans doute alimentera largement l’actualité électorale, particulièrement riche en Europe dans les prochains mois. « La France doit être consciente que les défis qu’elle devra relever dans les prochaines décennies passent irrémédiablement par le douloureux, chaotique, mais salutaire, chemin de l’Europe auquel son Histoire la rattache sans doute à jamais pour l’avenir de ses enfants et la paix... ». Compte-rendu détaillé sur le site : lecercleturgot.com
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REPÈRES
A propos du Cercle Turgot e centre de réflexions et d’analyses (think tank) sur les grands sujets économiques et sociaux dont Jean-Louis Chambon est le Président-fondateur, encourage les auteurs, favorise la recherche fondamentale et la pédagogie en promouvant les jeunes talents, il édite des ouvrages (Repenser la
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planète finance - 2008 La chinamérique - 2009 et rigueur et relance 2010) et organise des conférences. Le Cercle soutient l’évènement annuel du Prix Turgot du meilleur livre d’économie financière en étroite liaison avec l’Association des Elèves de l’institut de haute finance IHFI (www.ihfiturgot.com)
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Jurisprudence
Garde à vue et assistance d’un avocat Cour de cassation - chambre criminelle- 7 février 2012 - pourvoi n°11-83.676
L’arrêt qui n’annule pas l’intégralité des procès-verbaux d’audition de la garde à vue s’étant déroulée en l’absence d’un avocat en retenant que ce dernier ayant été avisé dès la notification des droits ne s’est jamais présenté, ne saurait faire grief au prévenu dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s’assurer que la cour d’appel ne s’est pas fondée sur les déclarations recueillies en garde à vue pour le déclarer coupable. La Cour, Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 80-1 du Code de procédure pénale, ensemble les articles 63-4, alinéas 1er à 6, 174, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale ; « en ce que l’arrêt attaqué a infirmé le jugement ayant fait droit à l’exception de nullité soulevée par les deux prévenus et écarté les seuls procès-verbaux d’audition de M. Christopher X... ; « aux motifs que le droit à l’assistance d’un avocat durant la garde à vue dès la première heure est consacrée par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ; que la chambre criminelle de la Cour de cassation a reconnu à la personne gardée à vue les mêmes droits que ceux reconnus par la justice européenne mais a cependant au nom de la sécurité juridique et de la bonne administration de la justice retardé l’application de la règle jusqu’à la date d’entrée en vigueur de la loi devant modifier le régime de la garde à vue au plus tard le 1er juillet 2011 suivant la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010 ; que c’est donc à tort que les premiers juges ont annulé l’ensemble de la procédure ; qu’en l’espèce si les premiers juges avaient retenu que les procès-verbaux d’audition de MM. X... pouvaient être annulés pour défaut d’assistance d’un avocat durant les auditions, la nullité de l’ensemble de la procédure n’était pas encourue dès lors que les poursuites étaient justifiées par des éléments suffisants, précis et antérieurs à la garde à vue, notamment, par l’audition de la victime le jour des faits et par le procès-verbal du témoin M. Y... établi le 28 mars 2010 soit trois jours avant les auditions des mis en cause ; que la cour retiendra que M. Angelo X... est mal fondé à solliciter la nullité de la procédure dès lors qu’en garde à vue, lors de la notification de ses droits le 31 mars 2010 à 9 heures, il avait demandé l’assistance de son avocat Me Girard qui a été avisé ce jour à 9h25 et qui n’a pas usé du droit que la législation actuelle lui reconnaît ; que s’agissant de M. Christopher X..., celui-ci avait sollicité l’entretien avec un avocat commis d’office mais le procès-verbal de garde à vue se contente de mentionner que l’avocat a été avisé le 31 mars 2010 à 10h10 sans qu’il soit précisé le nom de l’avocat, la Cour estime en conséquence que la procédure lui fait grief et ce d’autant qu’il a fait des déclarations auto incriminantes, le procès-verbal d’audition le concernant et les actes subséquents doivent être écartés : pièces numéro 10, 11, 12, 13 ; qu’en conséquence, le jugement sera donc réformé et la procédure ne sera pas annulée mais seront seulement écartés les procès-verbaux du mis en cause M. Christopher X... à savoir les procès-verbaux côtés pièces numérotées 10, 11, 12, ainsi que la pièce subséquente n°13 ; 1°) « alors qu’en se bornant à relever, concernant M. Angelo X..., qu’il aurait demandé l’assistance de son avocat, que celui-ci en aurait été avisé et, par un motif inintelligible, que l’avocat n’aurait pas usé du droit que la législation actuelle lui reconnaît, la cour d’appel n’a pas établi qu’il aurait bénéficié de l’assistance d’un avocat durant son audition dans le cadre de la garde à vue ; qu’en statuant par des motifs ambigus, qui ne permettent pas de déterminer si M. Angelo X... a ou non pu bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de cette mesure, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’e xercer son contrôle sur la légalité de sa décision ; 2°) « alors que les Etats adhérents à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, sans attendre d’être attaqués devant
elle ni d’avoir modifié leur législation ; que, pour que le droit à un procès équitable consacré par l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales soit effectif et concret, il faut, en règle générale, que la personne placée en garde à vue puisse bénéficier de l’a ssistance d’un avocat dès le début de la mesure et pendant ses interrogatoires ; qu’à supposer que le rejet de l’e xception de nullité soit fondé non sur le fait, que les motifs obscurs de l’arrêt n’établissent pas, que M. Angelo X... aurait pu bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de la mesure, mais sur les termes des décisions de la chambre criminelle du 19 octobre 2010 et du Conseil constitutionnel du 30 juillet ayant reporté l’effet de la constatation de la violation des garanties conventionnelles au jour de l’entrée en vigueur de loi modifiant le régime de la garde à vue, auxquels la cour d’appel se réfère expressément, parce que la garde à vue de M. Angelo X... aurait été conduite dans le respect des dispositions législatives alors en vigueur, la décision de la cour d’appel serait nécessairement entachée d’une erreur de droit en ce qu’elle refuserait l’application immédiate des droits et libertés conventionnelles garantis » ; Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’à la suite des blessures subies par M. Z..., MM. Angelo et Christopher X... ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour violences en réunion ; qu’avant toute défense au fond, ils ont sollicité l’annulation de l’intégralité de la procédure, faute d’avoir bénéficié de l’assistance d’un avocat lors de leur garde à vue ; Attendu qu’après avoir fait droit à cette demande en ce qui concerne les seuls procès-verbaux retranscrivant les déclarations de M. Christopher X..., les juges du second degré sont entrés en voie de condamnation à l’égard des deux prévenus ; Attendu que, pour dire n’y avoir lieu à annuler les procès-verbaux d’audition de M. Angelo X..., l’arrêt retient que l’avocat choisi par ce dernier a été avisé dès la notification des droits et qu’il ne s’est jamais présenté ; Attendu que M. Angelo X... ne saurait se faire un grief de ce que les procèsverbaux de ses auditions n’aient pas été annulés, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s’assurer que, pour le déclarer coupable des faits visés à la prévention, la cour d’appel ne s’est pas fondée sur ses déclarations recueillies en garde à vue ; D’où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, ne saurait être accueilli ; Sur le second moyen, pris de la violation des articles 222-12 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ; « en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables de violences en réunion suivies d’une incapacité supérieure à huit jours ; « aux motifs qu’il résulte des éléments de l’audition de la victime recueillie le 27 mars 2010 à 15 heures, éléments corroborés par les déclarations du témoin M. Y... qu’une discussion suivie d’une bousculade a eu lieu entre M. Z... et M. Angelo X... puis est arrivé M. Christopher X... qui a donné un coup de pied à M. Z... qui est tombé et qu’une fois au sol il a reçu encore deux ou trois coups, trois coups de poing selon lui au visage donnés par le fils X... ; qu’ensuite la victime a indiqué avoir reçu un coup lorsqu’elle était dans la voiture de la part d’Angelo X... qui ne l’a pas contesté, parlant de coup de coude ; que la légitime défense ne peut être retenue ; que le coup de pied violent asséné par Christopher n’est la réponse à aucune violence à son égard ni même à l’égard de son père même si celui-ci se disputait
Les Annonces de la Seine - jeudi 9 février 2012 - numéro 11
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Jurisprudence verbalement avec M. Z... et que le ton montait ; quand bien même il aurait reçu un coup de tête, le coup de pied était tout à fait disproportionné ; qu’enfin les coups portés lorsque la victime qui était à terre et avait crié sa douleur ou lorsqu’elle attendait après avoir été transportée dans une voiture pour être conduite à l’hôpital ne sont pas justifiés ; que l’infraction de violences en réunion suivies d’incapacité supérieure à huit jours est parfaitement caractérisée en tous ses éléments et établie à l’égard des deux prévenus ; qu’il convient de les déclarer coupables des faits qui leur sont reprochés ; 1°) « alors qu’en se bornant, pour déclarer, sur le fondement d’un unique coup de coude, M. Angelo X... coupable de violences suivies d’incapacité supérieure à huit jours, à relever, par un motif général ne le concernant pas expressément, que la légitime défense ne pouvait être retenue, sans préciser, comme elle l’a fait pour M. Christopher X..., les circonstances desquelles il résulterait que M. Angelo X... ne se serait pas trouvé en état de légitime défense et sans rechercher, pour ce faire, si le coup de coude donné n’avait pas été une riposte nécessaire et mesurée à une agression, la cour d’appel a privé sa décision d’une motivation suffisante ; 2°) « alors que la circonstance aggravante de commission en réunion suppose, pour être caractérisée, que l’infraction ait été commise par plusieurs agents ; que faute d’avoir motivé son rejet de l’e xception de légitime défense, cause
objective d’irresponsabilité susceptible de faire disparaître leur caractère délictueux aux faits commis, à l’égard de M. Angelo X... et d’avoir, partant, justifié la participation de celui-ci à l’infraction, la cour d’appel ne pouvait déclarer M. Christopher X... coupable de violences en réunion » ; Attendu que, pour écarter le fait justificatif de légitime défense et déclarer les prévenus coupables de violences en réunion, l’arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ; Attendu qu’en l’état de ces énonciations dont il résulte que l’état de légitime défense n’est établi à l’égard d’aucun des prévenus, la cour d’appel a justifié sa décision ; D’où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ; Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ; Rejette les pourvois. Président : M. Louvel – Rapporteur : Mme Radenne, conseiller - Avocat général : M. Mathon Avocat(s) : Me Spinosi. 2012-118
Décoration
Jean-Luc Chartier, Chevalier de l’Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand Paris - 2 février 2012
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Jean-Luc Chartier et le Cardinal André Vingt-Trois
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Les Annonces de la Seine - jeudi 9 février 2012 - numéro 11
Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
’est le Cardinal Archevêque de Paris André Vingt-Trois qui a remis ce 2 février à Jean-Luc Chartier les insignes de Chevalier de l’Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand. Son Eminence a remercié Jean-Luc Chartier d’avoir accepté la charge de Secrétaire Général de l’Académie Catholique de France qui a pour objet de rassembler des universitaires, des clercs, des laïcs, des écrivains et des artistes qui veulent réfléchir aux questions de société « en puisant ouverture et renouvellement dans l’apport séculaire de la pensée chrétienne ». Il a conclu ses propos par : « Je sais, Maître, que votre profession d’avocat et les contacts que vous entretenez à travers vos champs d’activité aussi variés qu’intéressants, vous permettent de remplir votre fonction au sein de l’Académie avec un zèle et un sens profond du service de l’Eglise, en assurant en particulier une ouverture au domaine du droit. (…) Aujourd’hui, en ce début de XXIème siècle instable et douloureux, votre vie et votre action reflètent ardeur et espérance. Votre exemple manifeste également que la lutte incessante pour engager notre monde tel qu’il est dans son destin divin et éternel n’e st pas un projet utopique, mais peut guider et vivifier chacune de nos existences et nos projets communs. » Nous adressons nos amicales et chaleureuses félicitations à Jean-Luc Chartier qui contribue au rayonnement du droit bien au-delà des prétoires. Jean-René Tancrède
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Supplément au numéro 11 du jeudi 9 février 2012 - 93e année
Barreau du Val-de-Marne Rentrée Solennelle de la Conférence - 26 janvier 2012 Grégory Hania, Véronique Dagonet et Nicolas Podolak a Rentrée Solennelle du Barreau du Val de Marne qui s’est déroulée le 26 janvier dernier au Tribunal de Grande Instance de Créteil, est traditionnellement le moment de mettre à l’honneur la jeunesse de la profession en permettant aux lauréats du concours de la Conférence de prononcer un discours devant une prestigieuse assemblée. Nicolas Podolak et Grégory Hania, respectivement premier et deuxième secrétaires de la Conférence, se sont ainsi livrés à une brillante joute oratoire intitulée « AAA quoi bon ? », mise en scène par Pierre Spivakoff. Le Jeune Barreau cristolien a ainsi, avec humour et autodérision, fait un tour d’horizon des sujets d’actualité de la profession, dénonçant les profits des compagnies d’assurances en matière protection juridique, qui « récoltent chaque
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année 700 millions d’euros et n’en redistribuent que 200… », le budget de la justice qu’en 2011, « était de 7 milliards d’euros, six fois moins que le budget de l’Education Nationale….! », Ou encore la diversification de l’avocat en entreprise, l’avocat fiduciaire, l’avocat agent sportif ou l’avocat mandataire en transactions immobilières, qualifiée « ‘solution anticrise pour les Avocats » et qui menace l’âme même de notre profession. « Rapidité, budget… Mais que reste-t-il de la fonction première de notre justice, celle de régulation qui garantit l’équilibre de notre démocratie ? » se sont ainsi interrogés les lauréats de ce 15ème Concours de la Conférence. Jean-René Tancrède
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Rentrée solennelle
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Nicolas Podolak
AAA quoi bon ? par Nicolas Podolak et Grégory Hania
icolas Podolak et Grégory Hania : Monsieur le Président du tribunal, Madame le Procureur de la République, Madame le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau du Val-deMarne, Mesdames et Messieurs les Bâtonniers des grands et petits Barreaux, petits barreaux, Mesdames et Messieurs les membres du conseil de l’Ordre, Madame le Directeur de l’Ecole de formation des barreaux du ressort de la Cour d’appel de Paris, Mesdames et Messieurs les secrétaires de la Conférence du Stage Grégory Hania : Mes chers confrères, je vous demande, à tous et à toutes, de faire un accueil vibrant et chaleureux à Monsieur Nicolas Podolak… Nicolas Podolak : Mesdames, Messieurs : Monsieur Grégory Hania, deuxième secrétaire de la Conférence du stage ! GH : Nicolas Podolak, 29 ans, 80 kilos… NP : 78… GH : Pardon ? NP : Non… je te disais juste « 78 »… pour les kilos… GH : Ah c’est vrai j’oubliais que notre cher Nicolas en plus, à 29 ans, d’être avocat et chargé d’enseignement à la faculté de Droit de Paris Est, trouve encore le temps… NP : Tu as oublié premier secrétaire de la Conférence du stage ! GH : Ah oui, bien sûr premier secrétaire de la Conférence du stage du Barreau du Val-deMarne ! Malgré tout cela, il trouve encore le temps un week-end par mois pour un semi-marathon de 24 kilomètres pour conserver la ligne !... ...Enfin et surtout, mon cher Nicolas, et je suis sûr qu’aucune de nos consœurs, greffières ou même parquetières ne me contredira… Tu obtiens le AAA… du jeune avocat séduisant et dynamique !
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A ce rythme, comptes-tu laisser Madame le Bâtonnier finir son mandat ? NP : Oui…, oui, oui, bien sûr !!! GH : Ne le regrette pas… je suis sûr qu’on saura te trouver en attendant un autre poste à ta taille… … Président du Groupe de défense pénale ?... NP : Ah… Non, non !!! GH : …Directeur de l’Ecole de formation des barreaux du ressort de la cour d’appel de Paris ?! En voilà une place qu’elle est bonne !!!... NP : Je crois que c’est déjà pris… GH : Une chair de professeur des Universités en droit du travail à Paris Est peut-être… ? NP : Ah non ! Ah non ! Celle-là, elle est pour toi ! C’est lui qui est tout de même docteur en Droit !!! Lui à l’esprit juridique et de synthèse : parfaits ! Le AAA du plan académique ! Donnez-lui un sujet, et il vous soutiendra en moins de temps qu’il ne faut pour le dire la thèse, l’antithèse et la synthèse ! Tiens par exemple... Tiens… au hasard… Euh….. Pour ou contre le printemps arabe ?!... GH : …Arabe ?... NP : …Oui, oui, arabe… ! GH : …Ah !... Arabe ?!!!... Disons que c’est un sujet délicat… Mais l’on peut prétendre que, dans une certaine mesure, le printemps arabe procède, en tout cas dans une première partie, d’une démocratisation universaliste… NP : C’est la thèse… GH : Je disais donc d’un développement des Droits de l’homme et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes sur le continent africain en prolongement notamment de la chute d’Etats opprimés, qui tels la Côte-d’Ivoire se sont insurgés légitimement… NP : Antithèse !!! GH : Antithèse, antithèse, c’est facile pour moi ! Mais… Il n’empêche Nicolas… Quel commentateur, quel philosophe, quel politique est aujourd’hui suffisamment avisé pour affirmer avec certitude la pérennité de tels événements ?
N’y a-t-il pas eu d’autres Etats qui, en leurs temps, de leurs conquêtes révolutionnaires ?… N’étaitce pas le cas de l’Iran en 1979 et aujourd’hui peut-être de l’Egypte ou de la Tunisie ?!… NP : Par-fait !!!… Là, il est bon pour l’ENA ! GH : L’ENA ? Pourquoi pas ! Eh bien n’empêche qu’à titre de synthèse, je te citerai cette phrase de Mirabeau, instigateur, s’il en est, de la Révolution Française et qui affirmait à la veille de sa mort « le plus difficile n’est pas de déclencher une révolution… Mais c’est de l’arrêter ! » NP : Génial… et… il nous fait ça avec tous les sujets !!! Alors ne sommes-nous le triple A d’un jeune barreau « ambitieux et conquérant » ?! NP : A pour As ! GH : Ambition… NP + GH : …Arrogance… GH : …Ah non Nicolas, on avait dit pas l’arrogance… NP : ... Ah non c’est vrai, pas l’arrogance, pas l’arrogance… Grégory, rappelle-toi notre serment… Nous ne sommes pas le triple AAA du Barreau, la fonction de secrétaire est : naissante, elle est exigeante, elle rend humble… GH : Eh… Oui… Souviens-toi Nicolas, le lendemain de notre élection lorsque tu es allé plaider au tribunal d’instance de Saint-Maur, Des Fossés, ce qui constitue le terreau propice au développement de l’éloquence : l’acquisition d’une clause résolutoire… Et comment la salle comble était suspendue à tes lèvres dans une fébrile attention… NP : …C’est vrai… Quel beau souvenir… C’est à ce moment-là que je me suis dit : fais attention à ta fonction de premier secrétaire, Soit modeste ! Pense que tu représentes à toi seul, le barreau… le barreau ! GH : Parfait Nicolas, ne change surtout rien ! Reste toujours modéré !!! NP : Modéré, modéré… Non je te le confirme, je ne suis pas modéré !
Les Annonces de la Seine - Supplément au numéro 11 du jeudi 9 février 2012
Rentrée solennelle J’essaie pourtant parfois, mais je n’y arrive pas, pas encore… Je suis sans doute encore trop nerveux, pas assez droit... Je n’ai pas encore les réponses… Je cherche sans cesse, dois-je devenir le notable avocat ou l’avocat révolutionnaire ?! Je suis à la croisée des chemins. Je suis premier secrétaire. J’ai qu’à bien choisir, je pourrai aller loin… Tiens, j’é crierais bien un livre : « Les doutes intérieurs d’un premier secrétaire »… Je prendrais un pseudonyme : Nicolas… Hollande ! Dis Grégory, crois-tu qu’à force de ne pas savoir quel chemin suivre je vais devenir comme François Hollande ? GH : (A la salle : « Tiens le revoilà qui me reprend pour son grand-frère ») Si tu veux faire la Révolution, retourne dans ta chambre !!! Crois-tu seulement qu’à ton âge, je n’étais pas pareil que toi ?! Moi aussi je portais une robe d’avocat déchirée sur le côté ! Moi aussi je refusais d’appeler le Président : « Monsieur le Président » ! Et le rabat ?! Le rabat, je n’en mettais pas ! Moi aussi, je refusais de travailler 17 heures par jour pour 1 200 € par mois ! NP + GH : Et oui, Et oui, 1 200 €, 1 200 € ! Par mois ! GH : Moi aussi, j’ai voulu mener tous les combats ! En 1993 j’intervenais déjà à la première heure de garde à vue et j’exigeais déjà la communication de tout le dossier ! Moi aussi je refusais qu’un bâtonnier passe devant moi en audience ! NP : Et après ?! GH : Et après tu vas retourner dans ta chambre !!!... NP : Je vais retourner dans ma chambre ?! Mais de quelle chambre parles-tu exactement ?! - Celle du Conseil où j’écoute, j’observe, j’essaie de ne pas faire de faux pas ! - Ou celle commerciale où je hurle de l’intérieur les dérives d’un système capitaliste ! - En sociale, je me bats à chaque dossier, chaque affaire est une victoire à ne plus remporter ! - En correctionnelle, je me bats contre moimême, je sens, je regarde, je renifle l’odeur de la salle, j’espionne le magistrat qui jette un regard de jugement avant même que mon MEC n’est ouvert la bouche ! Moi je te parle de cette révolution-là ! Pas celle de tes combats d’arrière-gardes ! GH : Il suffit, j’en ai plus qu’assez de tes jérémiades… Mais de quelle révolution parles-tu exactement ? Sais-tu seulement pourquoi veux-tu la faire ? NP : Oui je sais ! Je veux faire la révolution des esprits ! Des esprits, libres ! Camarades confrères, assez de poncifs, de plaintes inutiles, de désarroi ! Rejoignez-moi !!! L’adhésion est gratuite ! GH : Mais à quoi bon… ? NP : A quoi bon ?! Je fais le rêve qu’un jour sur les collines de Créteil, le barreau se réveille, qu’il se structure !
Qu’il devienne plus fort, que des cabinets de 10, 20, 30 ou 40 avocats soient légions ! Que les confrères parisiens ! Et les confrères cristoliens puissent s’assoir ensemble à la table de la confraternité ! Que les fils de Gide, de Deloitte ou de Forster viennent s’inscrire au tableau du Val-de-Marne ! C’est ce chemin qu’il faut suivre ! Fini les avocats artisans, fini les pénalistes isolés ! GH : Eh bien tu vois que tu n’es pas François Hollande ! Mais je ne comprends pas très bien, tu veux faire des pénalistes qui vivent sur l’Olympe de la plaidoirie de vulgaires techniciens scribouillards ? Ils n’accepteront jamais !!! NP : Ils le devront pourtant ! Les pénalistes, les vrais… seront à la fois des experts et des mentalistes ! Tiens, sais-tu à quoi ressemblera le cabinet d’un pénaliste dans 30 ans ?! GH : Le cabinet d’un pénaliste dans 30 ans ? Non je ne sais pas… Mais je crois que tu es un grand utopiste ! Un utopiste de génie ! Mais un utopiste seulement ! NP : Au rez-de-chaussée, une morgue… GH : Une morgue ?! NP : Eh oui, Une morgue ! Camarade confrère, le Code de procédure pénale aura bien changé ! Comme le Parquet, nous aurons acquis de haute lutte le droit de disséquer le cadavre putréfiant du défunt et ce dans les intérêts de notre client ! Tiens le voilà le procès équitable ! Accusation et défense sur une égalité parfaite d’armes ! L’arme du bistouri ! Utiliser le substratum humain pour faire la démonstration de l’impossibilité du crime ! Ça c’est révolutionnaire ! GH : Mais arrête Galilée ! NP : Et pourtant elle est tourne… -Au 1er étage, nos nouvelles robes d’avocats… : des blouses blanches ! Avec l’hermine tout de même et… antitache de sang ! Cinq ou six collaborateurs médecins, physiciens, scientifiques… GH : Mais que fais-tu des principes de notre droit pénal dans tout ça ? De la présomption d’innocence et de l’intime conviction ?! NP : Ah… parce que t’y crois encore toi à la présomption d’innocence ?! GH : Oui… Nous nous étions battus pour la Loi Guigou qui interdit de diffuser menotté les images d’un détenu non jugé coupable… Ah c’était le bon temps, je me rappelle on avait fait le siège du Sénat, Noël Mamère nous avait même apporté un sandwich au colza ! Et en vélo bien sûr parce que à l’époque déjà, Monsieur ne prenait plus la voiture… NP : Et l’intime conviction ?! GH : C’est le fondement d’une justice humaine, il faut la conserver ! NP : L’intime conviction la conserver ?! Veux-tu que je te rappelle la carrière professionnelle de cette bonne vieille dame ! GH : Oui, rappelle-la moi donc ! NP : Patrick Dils condamné à perpétuité le 27 janvier 1989, pour le meurtre de deux jeunes garçons à Montigny-lès-Metz ! - Christian Ranucci ! - L’affaire Callas ! Intime conviction : vous êtes virée ! GH : Oh !!! Mais dis-moi, tu n’aurais pas un lien de parenté avec Danton par hasard ?...
NP : Il n’avait pas que des mauvais côtés camarade ! GH : Dis-moi Che Guevara, il y a tout de même une objection de taille à tout ça ! Oh je sais bien que cela te paraitra bassement matérialiste mais tout de même : le budget de toutes ces petites réformes surréalistes tu en fais quoi ? Dois-je te rappeler qu’en 2011, le budget de la justice était de 7 milliards d’euros, six fois moins que le budget de l’Education nationale…! NP : L’argent, camarade, sera utilisé autrement !!! GH : Autrement ?!… NP : ...Suppression des corporations d’aides juridictionnelles ! GH : Ça tombe bien, moi je n’en fais plus, je suis riche et en plus je n’ai plus le label AAAJ : Avocat Assigné à l’Aide Juridictionnelle ! NP : Tu es riche ?!... GH : Eh bien oui je suis riche, je n’en fais plus, te dis-je, ça ne m’intéresse pas… NP : Ca ne t’intéresse pas ! GH : Non ! NP : Combien coûte l’aide juridictionnelle par an en France ? GH : Ça ne m’intéresse pas te dis-je ! NP : Environ 280 millions d’euros… Embauchons à la place 4 500 avocats fonctionnaires ! GH : Euh… Je ne comprends pas très bien, refait les comptes s’il te plaît Crazuki ! NP : Problème de CE2 : -Soit 45 000 avocats en France Dont 23 000 à Paris… Parmi lesquels au moins 8 000 crèvent la dalle… Divisé par le nombre de dossiers d’Aide juridictionnelle déposés par an en France Egal à 4 500 le nombre de confrères pouvant devenir fonctionnaires… Tiens par exemple au hasard… les crèves la dalle ! GH : Et avec ça, ils auront même le droit de se plaindre ! Ahhh… Ça va être beau les grèves enseignantes couplées avec celles des avocats fonctionnaires à toutes les rentrées scolaires ! NP : Camaaraaddee, faut que je te dise ! Que 280 millions divisés par 4 500 = 5 185 € par mois ! GH : 5 185 € par mois et par avocat fonctionnaire ?! Ah ça calme !... NP : Allez, on baisse à 4 000 € nets et on dégage 1,2 million d’économie par an ! GH : Merci, Dominique, pour ce brillant cours d’économie ! NP : Non mais ce n’est pas tout, on va le retrouver notre triple A… tu vas voir ! GH : C’est in-sou-tenable ! Ces idées faussement révolutionnaires ! NP : Autre piste ! Taxer la protection juridique… Les compagnies d’assurances récoltent chaque année 700 millions d’euros et n’en redistribuent que 200… Une taxe de 10% permettrait d’engendrer 5 millions de recettes en plus par an ! NP : 5 000 000 de recettes supplémentaires… GH : Des avocats fonctionnaires et taxer la protection juridique, Darois l’a proposé, Nicolas, et personne ne l’a fait ! Et puis, des avocats fonctionnaires !!! Pourquoi ? Pour que notre indépendance soit réduite à néant ?! Il n’en est pas question ! Tes idées iconoclastes confirment ce que je disais : tu appelles à la révolution mais finalement tu ne sais pas pourquoi !
Les Annonces de la Seine - Supplément au numéro 11 du jeudi 9 février 2012
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Rentrée solennelle En revanche, puisque tu parles de chiffres et d’argent, je vais t’en donner une, moi, de bonne raison de faire la révolution : as-tu seulement conscience du fait que le modèle capitaliste qui nous gouverne depuis maintenant plus de 35 ans… NP : 35 ans ?!!!... Mais quel est ton point de départ ?... GH : Eh bien la fin des 30 glorieuses et le premier choc pétrolier… Je te disais donc que ce modèle capitaliste est sur le point d’imploser, raison pour laquelle il provoque des bouleversements sociaux et des crises à répétitions que nos gouvernements n’arrivent pas à endiguer ! Conséquence : nos droits économiques ne sont que chimères… Ils n’ont aucune tangibilité alors même que nous vivons dans un pays qui disposait jusqu’au vendredi 13 janvier 2012 de la note tant convoitée : le AAA ! Nous battre pour la sauvegarde de nos droits économiques et sociaux : voilà une bonne raison de faire la révolution ! NP : Eh bien… Tu vois que tu rejoins ma cause !!!... Mais que fait-on dans tout ça… de notre droit au « bonheur » garanti et consacré constitutionnellement ?! Quand concrètement 8 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté c’est-à-dire avec moins de 900 € par mois !!! Et par personne !… -Et le droit à la santé prévu par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 existe-t-il dans notre pays mieux qu’ailleurs ? Mieux qu’aux Etats-Unis, aux Pays-Bas ou en Afrique, nous n’avons plus de points de repères ! Nous sommes perdus… GH : Et… Le droit au logement ?! Aucun problème, tu as tout fait le droit d’acheter un trois pièces de 65 m² à Paris dans le 12ème, quartier raisonnable s’il en est, pour un prix modique : 420 000 euros, soit 2 755 000 de nos anciens francs, un prix de 6 400 euros le m² ! Et j’arrondis, sinon on ne s’en sort pas ! Tu vois, c’est bien le 12ème : pratique et pas cher ! Sans apport ou patrimoine antérieur, tu t’endettes sur 35 ans ! NP : Je crois que le droit au logement opposable est officiellement décédé ! 5% seulement des Parisiens peuvent aujourd’hui acheter dans le neuf ! Je te propose donc de faire comme en Angleterre : tu achètes tes murs et tu disposes d’un bail emphytéotique de 99 ans pour le sol ! Et ensuite il ne reste plus qu’à prier fort pour que les prix baissent !!! GH : Ah ! L’éternel modèle anglo-saxon, nous serions bien perdus sans nos camarades d’outreManche, isn’t it ? Et la situation de l’emploi, tu considères qu’elle est saine sans doute ?! En France, comme dans tous les grands pays européens d’ailleurs, le tropisme est le même : les jeunes très diplômés ne trouvent pas d’emploi… avec un Bac + 6 le seul job qu’un jeune a une chance de décrocher est celui d’hôte de caisse dans un fast-food ! NP : Pauvres, mal logés, jeunes… Nous sommes la génération « Indignés » ! Alors… NP + GH : A / quoi / bon ?
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NP : …A quoi bon s’acharner à construire un monde qui tourne à l’envers ?!!!... GH : Et ce d’autant plus que la loi des marchés bride la souveraineté populaire… NP : Sans doute… Mais à quoi bon interroger un peuple pauvre, mal logé, jeune et ignare sur la question de sa souveraineté ?… Ca n’intéresse personne non ? GH : Si Georges Papandreou, mais qui n’a pas été autorisé à demander l’avis du peuple grec quant à son maintien dans la zone euro : attitude jugée trop dangereuse pour les marchés. Cela a presque failli intéresser Sylvio Berlusconi à qui l’on a pardonné beaucoup de frasques, mais pas celle d’avoir une politique économique jugée subversive à l’égard des marchés. NP : Alors c’est à nous avocats, nous qui avons le privilège de pouvoir porter la parole d’autrui, d’être l’un des bras armés de cette révolution ! Sinon la vague risque de nous emporter avec elle !!!... GH : Et ce d’autant plus que notre profession est elle-même âprement touchée par cette crise et le déclin des droits économiques qu’elle engendre. Les classes moyennes sont exsangues et les petites et moyennes entreprises comptent le moindre de leurs deniers… Résultat : nos clients n’ont plus le sou, raison pour laquelle nous diversifions nos modes d’exercice. NP : La diversification ou « La solution anticrise pour les avocats » ! Le problème c’est qu’à trop diversifier, à trop repenser nos méthodes, Nos organisations, Notre mission, L’âme même de notre profession ne risque-telle pas de disparaitre ? GH : Je crains que ce ne soit déjà trop tard… Première diversification : l’avocat en entreprise ! J’ai hâte de voir comment : - en tant que salarié d’une entreprise et non d’un cabinet… - intégré dans des services structurés et hiérarchisés… - il va pouvoir celui-là exercer sa fonction avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité !? NP : …Mais Grégory soyons logiques avec nous-mêmes !!! Nous ne pouvons sans cesse nous plaindre et nous opposer systématiquement à toute proposition d’évolution de notre profession !!! GH : Tu as raison ! Pour rompre avec le passé il existe aussi maintenant : l’avocat fiduciaire ! Plus qu’un Conseil : un gestionnaire qui consacre tout son temps à l’administration du patrimoine d’autrui. A ceci près que nous ne sommes pas véritablement formés pour ce métier et je pressens que plus d’un confrère risque d’y engager leur responsabilité ! NP : Pas mal comme diversification ! J’ai mieux ! L’avocat agent sportif ?! Sympathique, jeune, désintéressé… Hautement investi dans les causes humanitaires… à dimension sportive ! Il va souvent en Afrique ou en Amérique du Sud aider les enfants… Les enfants qui tapent dans un ballon !... GH : J’ai encore mieux !
L’avocat mandataire en transactions immobilières !!! Ce n’est pas compliqué : tu trouves des mandats et tu vends des appartements pour ton client. NP : Dis-moi… Ce ne serait pas un peu commercial ça par hasard ?... GH : Non, c’est un mandat ! Tu ne fais pas d’acte de commerce, tu représentes l’acheteur ou le vendeur, jamais les deux à la fois, et ce ne peut-être qu’une activité accessoire de ton cabinet… tu n’es donc pas commerçant. Tout est dans la subtilité… NP : Je vois déjà le nom de notre futur cabinet… NP + GH : … « ORPI et Associés » !... NP : Notre profession se déstructure Grégory, je crois que le terme même d’« Avocat » ne veut plus rien dire et que nous devenons tous fous… GH : La folie … Oui… C’est bien de cela dont il s’agit ! Mais il n’y a pas que l’é conomie qui devient folle ! La société des hommes est empreinte de folie car les hommes eux-mêmes deviennent fous ! NP : Nous devenons fous et obsédés par l’argent ! Vous êtes hypnotisés par une vie AAA toute vitesse ! Mais quel est notre but ? Existe-t-il vraiment ? Donne-t-on encore un sens à une vie en société ? GH : Horla Nicolas !!!, C’est vrai nous vivons hors de nous-mêmes, hors de notre monde et de nos lois ! ….Nous sommes tous fous ! Nos habitudes sont irrationnelles, déraisonnées, elles nous dépossèdent de notre qualité d’homme ! NP : Nous sommes des hors-la-loi ! Ni Maupassant, ni personne ne semble pouvoir nous arrêter… Nous sommes pris dans le rythme infernal de ce que l’on appelle « le progrès » ?! Nous ne réfléchissons plus, Nous ne méditons plus, Nous sommes névrosés : aigris d’illusions perdues, assoiffés de besoins virtuels… Fous cliniques ou fous normaux, nous sommes tous des hors-la-loi ! GH : Hors-la-loi de la nature qui appelle, par essence, l’homme à : - cultiver son jardin, - à méditer, - à aimer en frère, Nous nous perdons, nous sommes les doubles de nous-mêmes ! D’ailleurs, certains se perdent à tel point que leurs doubles ne sont pas de simples ersatz d’eux-mêmes domestiques et moribonds, mais d’effroyables alter-ego capables des pires atrocités ! N’est-ce pas le cas d’Anders Breivik, le fou qui a tué 77 personnes en Norvège le 22 juillet dernier ?! Quelle est donc la nature de la folie qui a poussé Youssouf Fofana à commettre l’acte de barbarie dont il s’est rendu coupable à l’endroit du jeune Ilan Halimi ? La folie est dangereuse car elle peut conduire lentement et subrepticement chacun d’entre nous à perdre jusqu’à son âme. NP : Stop Grégory !... Mais qui nous sauvera alors de nous-mêmes ? GH : La loi et la justice bien sûr !
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Rentrée solennelle NP + GH : Ouah… !!! 2 minutes 48 ! On a battu charlot !!! GH : Et attends ! Le recordman toutes catégories confondues de la plaidoirie la plus courte est sans nul doute notre confrère Vincent de Moro Giafferi qui, alors qu’un président lui avait demandé de plaider rapidement lui avait répondu : « Vous avez raison Monsieur le Président, le rôle est très chargé, je vais donc être bref : lui tort, moi raison, toi bon juge ! Merci Monsieur le Président !!! » NP : J’adhère !!! GH : 2 minutes 48 de folie quotidienne, Nous sommes devenus des hommes et femmes de lois aux pouls rapides, à l’œil dilaté, aux nerfs vibrants… NP : …Nous sommes des fous normaux ! …Juste à côté des fous cliniques… …Et des hospitalisés d’office, environ 2 000 personnes par an sont placées sous ce régime dans notre département ! Leur défenseur n’a même pas le temps dans la majorité des cas d’enfiler sa robe et de voir son client ! Le fou clinique est hospitalisé d’office par une justice elle-même folle ! GH : …La folie est-elle vraiment partout ?!, dans toutes les classes de notre société ?! …Mais comment guérir ?… NP : Il faudrait selon Walter Benjamin se transformer en : « Des anges qui repoussent cette tempête que l’on appelle le progrès... » GH : Plus de progrès. Plus de folie. Il faut devenir alors des écologistes sociaux, Tout économiser : notre énergie, notre productivité, nos envies ! faire moins pour faire mieux ! NP : En un mot, celui de Camus, il faut sauver l’homme !!! Sauver l’homme c’est donner ses chances à la justice qu’il est le seul à concevoir !
GH : Il nous faut donc concevoir une justice moderne et efficace pour mériter notre AAA, hommes de lois que nous sommes ! NP : Attends je ne comprends pas très bien Grégory… La justice est efficace parce qu’elle est moderne ? Ou sa modernité découle-t-elle de son efficacité ? GH : Un peu des deux à la fois et ma réponse n’est pas normande. L’adjectif moderne est en fait conjoncturel : est moderne ce qui est dans l’ère du temps. Or, aujourd’hui, l’ère est à la rapidité, la brièveté, pour ne pas dire l’immédiateté. Les justiciables veulent tout et tout de suite… NP : Tout et tout de suite, ils veulent juste que ça aille vite ! Un divorce ?… il faut que ça aille vite Maître ! Une adoption ?... il faut que ça aille vite Maître ! Un dépôt de bilan ?... Il faut que ça aille vite Maître ! GH : Toujours est-il que la justice doit donc s’adapter à ce mouvement, elle n’a pas le choix… alors c’est vrai qu’il n’est guère aisé de se déplacer avec rapidité lorsque l’on a : - les yeux bandés, - dans une main : une balance en bronze dont les deux plateaux doivent rester en équilibre ! - dans l’autre, un glaive massif ! …mais il faut qu’elle fasse un effort !!! NP : Mais… Crois-tu qu’il soit seulement possible de rendre la justice française plus efficace ?... Ce projet a été maintes et maintes fois remis sur le métier par nos gouvernements successifs qui ne sont pourtant jamais parvenus à atteindre cet objectif tant convoité ! - Dati qui a cherché l’efficacité de la peine… - Clément qui a cherché l’efficacité de l’instruction… - Alliot-Marie qui a cherché l’efficacité du Parquet qui mène l’enquête et juge à la fois… - Et l’actuel garde des Sceaux… Comment s’appelle-t-il déjà ?... GH : Mercier !
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NP : Mais… Où sont-elles ?!!!... Où sont la loi et la justice ??!!... GH : Elles sont là devant nous ce soir… regarde !!! NP : Alors que font-elles ???... GH : Elles se professionnalisent, elles deviennent mécaniques, froides, elles oublient leur fonction de régulateur social qui calme et qui apaise… NP : Nos juges deviennent-ils eux-mêmes fous ?... GH : Oui, je le crains, comme nous les avocats, nos magistrats deviennent des fous normaux… La justice confond hélas de plus en plus les genres, elle n’écoute plus, ne comprend plus, Elle devient folle, enrayée comme une vieille mécanique industrielle des temps modernes… NP : Les temps modernes... Combien de temps sous Charlot pour serrer un boulon ? 4, 5 minutes ? GH : …Oui environ… Et combien de temps pour plaider ? NP : 4 - 5 minutes ! GH : Tu es fou, c’est beaucoup trop long, on indispose le tribunal, on y arrive en 3 minutes chrono ! NP : On peut réduire encore… On peut faire mieux… En 2 minutes 50 ! 2 minutes 50 ! On y arrive ! GH : …Moins de temps pour plaider que pour serrer un boulon ??!! Je n’y crois pas !!! NP : Tu paries ! Moins de temps pour plaider que pour serrer un boulon ! - 40 secondes pour enfiler la robe avec rabat en prime…. - 30 secondes pour sortir le dossier, - 10 secondes pour entendre le magistrat dire « Maître… Vite ! Et par observations s’il vous plait ! », - 5 secondes pour lui répondre « Bien sûr » !… GH : -15 secondes pour la présentation des faits, - 1 minute pour argumenter, - 30 secondes pour la date de délibéré et… - …25 secondes pour rester poli !
Grégory Hania Les Annonces de la Seine - Supplément au numéro 11 du jeudi 9 février 2012
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Rentrée solennelle NP : Pardon ?... GH : Mer-cier ! NP : Ah oui Mer - cier !!! Merci ! …. Mercier… qui cherche encore l’efficacité des jurés populaires… L’efficacité à tout craindre est devenue la pierre de Sisyphe des temps modernes ! GH : « La pierre de Sisyphe des temps modernes »…. Quel talent ce premier secrétaire !!! NP : Et puis finalement qu’est-ce qu’une justice efficace ? GH : C’est très simple, il n’est pas besoin d’être savant pour le savoir… avocat devrait suffire. La justice a tout d’abord besoin d’être efficace dans le temps : tous les délais sont trop longs ! Et ce, quelle que soit la juridiction devant laquelle on se trouve : notre beau Tribunal de Grande Instance, 9ème chambre correctionnelle, jugement rendu le 23 mai 2011, appel interjeté le 25, date d’audience devant la cour d’appel : aucune à ce jour… on arrête pas le progrès c’est comme ça ! NP : J’ai mieux : - Conseil de prud’hommes de Nanterre, un client me supplie de faire renvoyer son affaire, il a peur d’être condamné… Je fais comme toujours mine de ne pas savoir si je vais y arriver… Demande formulée le 15 avril 2011… Renvoi le… 15 janvier 2013… Je lui ai annoncé la nouvelle par téléphone, il pleurait… J’aurais dû lui faire signer une convention d’honoraires… GH : Nicolas tu es premier secrétaire mais ne soit pas cynique ! C’est vrai après tout, on ne peut pas blâmer les magistrats car, en réalité, ils ne sont en rien responsables de la dimension kafkaïenne des délais. NP : Ah oui ! Et pourquoi ? De toutes façons, je n’ai jamais rien compris à Kafka… GH : Pourquoi ? « Et bien je vais vous le dire Monsieur Podolak » : parce qu’ils travaillent avec les moyens qu’on veut bien leur donner ! NP : De quels moyens parles-tu exactement ? Ceux peut-être du rapport de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice du 25 octobre 2010 où la France a été classée au 37ème rang des pays du Conseil de l’Europe pour le budget annuel alloué à la justice ? Juste derrière l’Azerbaïdjan !… Ça ne te choque pas toi ?... GH : Si ça me choque et je vais vous dire pourquoi Monsieur Podolak ! J’ai révisé mes classiques avant de venir, on m’avait prévenu que la question pouvait tomber ! Parce que ce beau pays compte 9 millions d’habitants lorsque nous en avons 63 millions dans l’hexagone !!! Cependant, Nicolas, sache que tout n’est pas perdu : suite à cette édifiante révélation, notre beau gouvernement a décidé d’augmenter de 4% le budget 2012 du ministère de la Justice ! NP : 4% ?!?!... Bravo… GH : 4% !!! Oui mes frères, oui mes sœurs, 4% !!! Grâce soit rendue au ministre du Budget !!! Les imprimantes de nos greffes pourront être alimentées en papier jusqu’au 31 décembre 2012 et le Service de documentation de la Cour de cassation pourra reprendre son abonnement à la Gazette du Palais !!! NP : Rapidité, budget… Mais que reste-t-il de la fonction première de notre justice, celle de
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régulation qui garantit l’é quilibre de notre démocratie ? GH : Dans ce registre c’est certainement notre justice pénale qui a le plus de pain sur la planche. Il y a quelques semaines l’Observatoire de la délinquance a révélé ses chiffres pour 2011 et le constat est édifiant : les violences aux personnes ont drastiquement augmentées. NP : …C’est ce que l’on prétend oui… Et pour faire face à cette violence que l’on dit « aveugle et brutale », d’aucuns appellent à la création d’un Code pénal des mineurs ! GH : Cependant, avec les moyens qui sont mis à leur disposition nos tribunaux sont bien en peine de pouvoir l’appliquer efficacement ! NP : C’est normal Grégory… Les sanctions ne sont pas assez lourdes ! Qu’en penses-tu papa ? Il faut mater les enfants dès le berceau !!! Berceau ! Berceau ! Dès le berceau ! Supprimons nos travaux d’intérêt général, nos dissertations et nos peines éducatives !!! J’en appelle à plus de fer-me-té ! Vite une nouvelle loi sur la récidive, ça urge !!! GH : Ah ?! Et tu aurais une idée ? NP : Oui Môssieur ! Plus dur que la « peine plancher » je te propose le concept de la peine « dalle de béton » ! Tu n’as pas encore récidivé mais ton profil sociologique nous intéresse… Et on te condamne à une peine minimale, juste pour le cas où !!! Beccaria n’a qu’à bien se tenir !!! GH : Voilà une belle idée à méditer ! Enfin, on se moque, mais ne blâmons pas nos tribunaux pour autant : on ne peut pas demander aux juges de construire un voilier avec 5 stères de bois ! Et lorsque nos dirigeants se retrouvent nez à nez avec leurs propres insuffisances, notamment lorsqu’un crime, commis par un multirécidiviste bien sûr, émeut le pays tout entier, ils nous montrent à quel point ils sont bien incapables d’assumer leurs carences lorsque sont prononcés ces mots : « Il y a eu un dysfonctionnement… » NP : Un dys-fonc-tionnement ! Et… on se met à rechercher le dys-fonc-tionnement !!! Alors où est le dysfonctionnement ?! Vous l’avez vu vous le dysfonctionnement ?! Où est le dysfonctionnement ?! Comme si le droit était un système informatisé, au moindre « bug »…on appelle la hotline ! …Et on demande aux juges d’assurer le service après-vente !!! GH : Exact ! Et notre classe dirigeante est, depuis maintenant bien longtemps, incapable de proposer les solutions idoines à stopper cette folie. Alors que fait-elle ?! Eh bien elle se décharge de sa responsabilité et la rejette sur les juges en clamant haut et fort à grands coups de renforts médiatiques : « Nous allons rechercher le dysfonctionnement » ! Mais A quoi bon ? La solution n’est pas là ! NP : Où est-elle alors ???... GH : Nulle part… Elle exige simplement que notre société opère une véritable « réflexion » sur elle-même, réflexion que nos dirigeants prendrons peut-être un jour la peine d’initier entre deux rendez- vous chez Moody’s afin de négocier une meilleure note. NP : Alors… Tu penses oui ou non… que notre
justice moderne est efficace et qu’elle mérite son AAA ? GH : Peut-être oui… mais si l’on parle de justice moderne, on parle aussi des avocats ! Et pour que notre justice soit efficace, il faut que nous le soyons nous aussi ! NP : Tu oses prétendre que nous, nous, avocats, nous ne sommes pas efficaces ?! GH : Pas tout à fait… je pense que nous le sommes mais que nous pourrions l’être bien plus encore… NP : En travaillant plus ?! GH : Non, en… NP : …En embauchant 8 stagiaires avocats payés 460 € nets par mois pour accomplir le travail de 3 collaborateurs tout en coûtant 2 fois moins cher ?! Ce n’est pas comme cela que certains cabinets qui se disent « au top » fonctionnent ? GH : Non, en… NP : Je sais ! En passant à165 le nombre d’heures par an de formation continue !!! GH : Mais non en… NP : Non, j’ai mieux, en exigeant que chacun d’entre nous soit titulaire d’au moins 3 certificats de spécialisation ! Ce qui devrait nous permettre d’entrer dans la carrière à quoi… 36 ans !!! GH : Non !!! En commençant peut-être par nous écouter les uns les autres… NP : Comment ?!... Nous écouter les uns les autres ! GH : Eh bien tout d’abord nous pourrions mettre de côté quelques-uns de nos usages… NP : A commencer par cette robe, qui est beaucoup trop lourde… et qui nous freine considérablement dans notre progression… Pas efficace pour un sou !!! Et chaque année le même sujet de la conférence… « Faut-il enlever la robe ? » C’est d’un original… Retirons là une bonne fois pour toute ! GH : Oui pourquoi pas, nous en reparlerons avec les secrétaires de l’année prochaine. En revanche j’ai une autre idée : cessons de perdre du temps avec nos formules de politesse ampoulées que nous n’avons de cesse d’échanger, comme le sempiternel : « Mon cher Confrère » !!! NP : Que tu proposes de remplacer par quoi ? GH : « Monsieur le concurrent… » Efficacité et réalité économique oblige !!! Et puis fini le « Votre bien dévoué confrère » en fin de lettre, juste un : «J’fais ce que je peux… » devrait largement suffire ! NP : C’est effectivement un bon début et il est certain qu’avec une initiative de cet acabit-là, la profession va grandement gagner en crédibilité... ! Mais je crois surtout que nous gagnerions en efficacité à être mieux compris de nos clients ?... Il y entre nous et eux comment dire… une sorte de frontière invisible… ! GH : C’est vrai que l’on devrait d’avantage leur expliquer que si nos honoraires paraissent si chers, c’est parce que 40% de nos émoluments sont uniquement destinés à payer des prestations sociales dont nous ne profitons jamais ! NP : Et comment ! Nous ne sommes jamais malades ! C’est un luxe que l’on ne peut se permettre ! 8ème commandement de l’avocat : « Même avec 39 de fièvre, tes conclusions tu rédigeras » ! Triple A pour l’avocat qui ne contribue pas au trou de la sécu !
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Rentrée solennelle GH : Même béchamel infernale pour la retraite ! Notre métier est si stressant que peu d’entre nous y arrivent… NP : …Sans parler de ceux qui n’y arrivent jamais : « Me X : mort en exercice »… GH : …Et lorsque certains arrivent à la grande quille, ils sont si usés par le stress et le dévouement qu’ils ont malheureusement à peine le temps d’en profiter… NP : Consolons-nous en songeant que notre caisse de retraite est excédentaire ! Quand tu penses que notre caisse sert à compenser celle de la SNCF… ! GH : Quel scandale ! Nous pourrions également améliorer la compréhension linguistique avec nos clients. N’as-tu pas remarqué que nous passons une bonne partie de notre temps à leur servir de traducteur juridique ? NP : Oui, d’ailleurs j’ai eu beaucoup de mal à faire comprendre à une vieille dame que son caniche était un « bien meuble corporel »… GH : Oui, moi aussi j’ai eu grand peine à faire entendre à un pisciculteur que ces poissons étaient des « biens immeubles par destination » au sens de l’article 524 du Code civil. NP : Et alors, il a compris ? GH : J’en doute puisqu’il m’a dit : « Maître je vous fais entièrement confiance ! » NP : Ca veut tout dire… Heureusement qu’en l’an de grâce 2012 « les maîtres » sont toujours responsables « du dommage causé par leurs domestiques »…! GH : Notre bon vieux Code civil aurait bien besoin d’une petite refonte linguistique… et pourquoi pas en langage SMS ? C’est dans l’air du temps, ça plairait aux jeunes et ce serait bon pour l’é cologie puisque du même coup on réduirait des deux tiers le volume du Code ! NP : Tout à fait ! Et par la même occasion on n’y comprendra plus rien… Ou plutôt chacun l’interprétera comme il voudra… Ce qui finalement ne devrait pas changer grand-chose à la situation actuelle… GH : Tu fais des histoires pour rien ! Soyons encore plus modernes : dépôt de dossier par voie électronique ! Gain de temps et efficacité optimale ! Et pour nos assignations et nos conclusions, y a plus qu’à cocher des cases !!! 8 ans de droit ne servent pas à apprendre à écrire et à parler ! Ça se saurait !!! Alors où veux-tu agir ? : - tribunal de grande instance : tape 1, - tribunal d’instance : tape 2. NP : - Au fond : tape 1. - En référé : tape 2. GH : Nicolas regarde nous… NP : Oui Greg… GH : Nous faisons la critique narcissique de notre système judiciaire passé sous les fourches caudines du AAA… Mais notre discours d’Européens, d’Occidentaux d’avocats que nous sommes devenus manque cruellement d’ouverture d’esprit, d’intelligence, de culture… NP : Parfois j’ai honte de nous, pour la patrie des droits de l’homme que nous sommes devenus… Quelle image renvoie-t-on encore au monde ? Celle d’une terre d’accueil qui permet des parcours comme les nôtres ? Ou celle d’un pays en ruine ? Celle d’un pays amené à être le tiers monde de demain s’il ne parvient pas à s’adapter, et vite !
GH : Il n’y a vraiment pas de quoi être condescendants… NP : Condescendants oui… Nous l’avons été par exemple avec nos confrères africains présents dans cette salle, pardons de rappeler Dakar : « L’homme africain n’e st pas entré dans l’histoire » ! GH : Quelle honte ! NP : Qu’il leur demande celui-là si l’avocat africain est entré dans l’histoire ? GH : Madame le Bâtonnier, vous qui connaissez bien le système judiciaire togolais, est-il entré dans l’histoire ? NP : Ne vous cachez derrière aucun masque ! Confrères, bâtonniers en exercice ou plus anciens, Mesdames et Messieurs les membres du conseil de l’ordre, ne vous cachez derrière aucun masque, pas même celui de la justice, les avocats africains souffrent d’une discrimination pernicieuse qui rend bel et bien plus difficile leur insertion au sein du barreau… GH : Madame le Bâtonnier, vous qui connaissez le Barreau du Togo vous pourrez nous confirmer que celui-ci entre dans l’histoire et ce dans la plus grande indifférence… NP : Je pense aussi au silence assourdissant qui entoure l’entrée pas à pas de l’avocat africain dans notre histoire… Je pense à notre confère Garry Sakata Moke Tawab, avocat au barreau de Congo-Kinshasa et qui s’est vu cette année décerné le prix du Barreau de Caen pour une plaidoirie sur le viol massif des femmes… GH : Je pense également au silence honteux qui entoure le programme de modernisation de l’appareil judiciaire togolais initié depuis 5 ans et qui vise notamment à mettre un terme aux problèmes d’organisation, d’é quipements et d’infrastructures des juridictions togolaises… NP : Je pense encore au silence qui a entouré la victoire de notre confrère Mahmoud Arqan, jeune palestinien de 24 ans qui a remporté le 22ème concours de plaidoiries pour les droits de l’homme du Mémorial de Caen. Cet avocat Hébron a défendu en arabe la cause d’une femme enceinte bloquée en octobre 2001 à un poste de contrôle israélien. Des heures d’attente lui ont fait perdre le bébé qu’elle allait mettre au monde près de Bethléem. Sous-titrée sur deux écrans la plaidoirie de notre confrère Arqan a séduit. « C’e st extraordinaire d’être ému par une plaidoirie prononcée dans une langue que l’on ne comprend pas », affirmait l’écrivain et le résistant espagnol Jorge Semprun. GH : L’écriture ou la vie ! La vie du système judiciaire togolais qui veut doter courageusement la justice d’un fonctionnement impartial et indépendant du pouvoir exécutif avec pour finalités la modernisation de la législation et l’amélioration de l’accès au droit sans discrimination… NP : J’accuse le silence qui entoure aussi les discriminations que subissent dans notre système judiciaire nos jeunes confrères africains qui peinent plus que tous autres à décrocher une première collaboration et restent parfois en attente durant plusieurs années pour prêter serment… GH : Chut, tu vas choquer les huiles Nicolas, arrête ! NP : Il n’y a pas de cabinets d’avocats africains de l’Afrique subsaharienne implantés sur nos grands barreaux, alors qu’existent des cabinets
de pieds noirs d’Algérie qui ont permis à d’autres confrères d’exercer, les difficultés que rencontrent les avocats en général sont encore plus aigües chez les Africains… GH : Il nous faut donc construire de nouveaux liens avec nos confrères africains ! NP : C’est chose faite, nous sommes inscris Créteil ! Le Barreau du Val-de-Marne et le Barreau du Togo sont liés depuis le 1er janvier comme deux frères… GH : …Le barreau du Togo composé de 130 avocats dont… 17 femmes !!! NP : …Le barreau du Val-de-Marne composé de 530 avocats dont, ô quelle chance, 345 femmes… Pareil ! GH : Et un budget en augmentation de 0,42% cette année… NP : Pareil ! GH : Comme pour le serment de l’avocat français avant 1982, l’avocat togolais avant d’entrer dans la profession prête serment devant la cour d’appel selon sa formule sacramentelle : « Je jure de ne rien dire ou publier comme avocat, contraire aux lois, aux règlements, aux bonnes mœurs, à la sûreté de l’Etat et à la paix publique et de ne jamais m’é carter du respect dû aux tribunaux et aux autorités publiques »… NP : Tu vois Grégory les temps n’ont pas fondamentalement changés ?! GH : Et si Nicolas, les temps ont bien changé, 2012, l’apocalypse est annoncée…, menaces sur le climat, sur l’économie, sur notre avenir… Comme nos ancêtres, nous avons peur que le ciel nous tombe sur la tête ! L’homme est déjà entré en guerre ! En guerre avec son habitacle naturel, qu’il détruit chaque jour un peu plus, allant jusqu’à mettre en péril la terre nourricière sans laquelle aucune vie n’est possible… En guerre contre son prochain, qu’il regarde trop souvent avec les yeux de l’indifférence ou de la peur ! NP : …Mesdames et Messieurs, mes chers confrères, n’ayez pas peur ! Nous sommes les gardiens de nos frères ! Dina Cohen Saban et Joao Gonçalves nous ont ouvert la voie ici à cette même tribune, l’homme doit rester un frère pour l’homme, nous sommes les seuls responsables de notre survie collective ! GH : Plus que responsables Laura Nakic et Julien Dubs nous l’ont dit ici-même : nous sommes « tous coupables » ! NP : Tous coupables ? ! De quoi sommes sommes-nous tous coupables ?! GH : Tous coupables ! D’un manque d’amour ! Coupables de ne plus aimer ! Jennifer Layani et Guillaume Migaud nous avait cependant rappelé que l’amour mérite certains égards. Tous coupables de la dévastation terminale de la nature, de la disparition progressive des valeurs humaines qui cèdent le pas à la simple valeur marchande au profit de la rentabilité ! Tous coupables de la disparition de notre société… Aveugles, nous ne voyons pas le mal ainsi fait… Pourtant Bruno Bettheleim l’avait dit : « celui qui a le pouvoir de faire le mal et qui ne le fait pas, celui-là est seigneur et maître de son visage ! » NP : « Rouge ou Noir », Jean-William Vésinet et François-Xavier Lucas nous avaient également prévenus : la bille de l’existence humaine n’a qu’à tomber au bon endroit ! Si le hasard fait perdre ton voisin alors qu’il te fait tout gagner, ne le plains pas, ignore-le !
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Rentrée solennelle
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Arnauld Bernard, Véronique Dagonet et Olivier Fouché
Kristel Lepeu et Emmanuelle Debrenne nous le disent encore, il faut construire une nouvelle conscience collective pour que la montagne de l’humanité se couvre à jamais d’or… GH : Mais que voulons-nous pour nos enfants ? NP : Un monde parfait, où les mots viendront du cœur, le monde de l’espoir, sans atermoiements ni « aquabonistes » ! GH : Un monde où nous nous aiderions tous car les êtres humains sont ainsi faits. Ce monde dans lequel nous voudrions donner le bonheur à notre prochain. Ce monde où nous ne pouvons haïr, ni humilier personne, dans ce monde chacun aura sa place et la terre sera bien assez grande, elle sera assez riche, elle pourra nourrir tous les êtres humains. Ce monde dans lequel nous pourrions tous avoir une vie belle et libre ! L’envie n’empoisonnera plus l’esprit des hommes, le monde ne sera plus barricadé par la haine, plus de misère ni effusions de sang, plus de machines non plus qui nous apportent l’abondance mais nous laisse dans l’insatisfaction ! NP : Notre savoir nous a fait devenir cyniques, inhumains à force d’intelligence, nous ne ressentons pas assez et nous pensons beaucoup trop, nous sommes trop mécanisés et nous manquons d’humanité, nous sommes trop cultivés et nous manquons de tendresse et de gentillesse ! Sans ces qualités humaines, la vie n’est plus que violence et tout est perdu ! Les avions, la radio nous ont rapprochés les uns des autres, ces inventions ne trouveront
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leur vrai sens que dans la bonté de l’être humain, que dans la fraternité, l’amitié et l’unité de tous les hommes ! En ce moment même, ma voix atteint des millions de gens à travers le monde, des millions d’hommes, de femmes et d’enfants désespérés, victimes d’un système qui broie les faibles ! Je dis à tous ceux qui m’entendent : « ne désespérez pas » ! Mesdames, Messieurs, mes chers confrères, ne devenez pas des hommes machines avec une machine dans la tête et une machine à la place du cœur, vous n’êtes pas des machines ! GH : Vous êtes des hommes avec tout l’amour du monde dans le cœur ! Vous n’avez pas de haine sinon pour ce qui est inhumain, ce qui n’est pas fait d’amour. Mesdames, Messieurs, mes chers confrères ! Ne vous battez pas pour l’esclavage mais pour la liberté ! Nous avons le pouvoir de créer le bonheur, vous avez le pouvoir de rendre la vie belle et libre ! NP : Mes chers confrères, nous avons le pouvoir de faire de cette vie une merveilleuse aventure alors au nom même de la démocratie, unissonsnous, utilisons ce pouvoir, il faut tous nous unir ! Il faut nous battre pour un monde nouveau ! Un monde qui donnera à chacun le pouvoir de travailler, qui apportera un avenir à la jeunesse et à la vieillesse, la sécurité ! GH : Alors il faut nous battre pour accomplir toutes ces promesses ! Il faut vous battre pour libérer le monde ! Il faut se battre pour renversez les frontières et les barrières raciales pour en finir avec l’avidité, avec la haine et avec l’intolérance ! NP : Battez-vous pour construire un monde de
raison ! Battez-vous encore pour construire ce monde où la science et le progrès mèneront tous les hommes vers le bonheur ! GH : Mesdames, Messieurs, ensemble interdisons les « à quoi bon ? » ! NP : Mesdames, Messieurs, au nom de la démocratie ! NP + GH : unissons-nous tous ! 2012-108
LES ANNONCES DE LA SEINE
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2011
Copyright 2012 : Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Sauf dans les cas où elle est autorisée expressément par la loi et les conventions internationales, toute reproduction, totale ou partielle du présent numéro est interdite.
Les Annonces de la Seine - Supplément au numéro 11 du jeudi 9 février 2012