Edition du lundi 19 mars 2012

Page 1

LES ANNONCES DE LA SEINE Lundi 19 mars 2012 - Numéro 20 - 1,15 Euro - 93e année

27ème Colloque des Instituts d’Etudes Judiciaires

D.R.

La motivation des sanctions prononcées en justice : nouvelles tendances, nouveaux enjeux Amiens - 10 février 2012 VIE DU DROIT

27ème colloque des instituts d’études judiciaires La motivation des sanctions administratives par Jean-Marc Sauvé............................................................................

2 AGENDA ......................................................................................5 PALMARÈS

25ème Prix Turgot

Du meilleur livre d’économie financière ..............................................

DIRECT

7

Bilan du Grenelle de l’environnement....................................8 Evolution statistique des mariages et des divorces...........9 Election du Président de la République .............................23

JURISPRUDENCE

Loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives Conseil constitutionnel - 15 mars 2012 Décision n° 2012-649 DC .................................................................

AU FIL DES PAGES

10

La maîtrise de la vie

12 ANNONCES LEGALES ...................................................13 DÉCORATION

Sous la direction de Lucette Khaïat et Cécile Marchal ....................

Claude Cazes, Officier de la Légion d’Honneur ............................................24

e 27ème Colloque des Instituts d’Etudes Judiciaires organisé par le Centre de Droit Privé et de Sciences Criminelles d’Amiens, l’Institut d’Etudes Judiciaires d’Amiens et le Laboratoire de Sociologie Juridique de l’Université Panthéon-Assas Paris II, s’est déroulé le 10 février dernier à Amiens sous la direction scientifique de Cécile Chainais, Professeur de droit privé à l’Université de Picardie Jules Verne, de Dominique Fenouillet, Professeur à l’Université Panthéon-Assas Paris II et de Gaëtan Guerlin, Maître de conférences en droit privé à l’Université de Picardie Jules Verne. Cette manifestation intitulée « La motivation des sanctions prononcées en justice : nouvelles tendances, nouveaux enjeux », a rassemblé de prestigieux intervenants parmi lesquels Guillaume Drago, Professeur de droit public à l’Université PanthéonAssas Paris II, Natalie Fricéro, Professeure de droit privé à l’Université de Nice, Directrice de l’Institut d’études judiciaires, ou encore Jean-Marc Sauvé, Vice-président du Conseil d’Etat dont nous publions ci-après l’intervention consacrée à la motivation des sanctions administratives. Ces travaux envisageant la sanction « comme toute réaction du droit à une violation de la légalité », ont permis d’explorer ses fondements, son encadrement supra-législatif au niveau du droit constitutionnel et des normes européennes, mais aussi les nouvelles pratiques qui se dessinent non seulement dans le domaine pénal, mais aussi dans les matières civile, constitutionnelle, européenne et administrative.

L

Le Vice-Président Jean-Marc Sauvé a évoqué dans son intervention le rôle du juge administratif dans la motivation des sanctions. Il a d’abord rappelé comment le Conseil d’Etat a contribué à définir, sur la base d'un contrôle juridictionnel, le régime juridique de la sanction administrative et les exigences de motivation. Ce travail classique du juge s’est ensuite transformé « sous l’influence tant de contraintes juridiques exogènes, qui tiennent à la multiplication des normes et de leurs interprètes, que de choix propres » pour entrer dans une « ère post-moderne » se caractérisant « par l’évolution générale du rôle et de la fonction de la motivation des décisions de la justice administrative. » La motivation a certes une fonction pédagogique mais elle est aussi « la clé de voûte du dialogue que le juge entretient avec les parties ». Le Vice-Président Sauvé a estimé qu’« une meilleure motivation est sans aucun doute un moyen de parvenir à une plus grande légitimité des décisions de justice » et des juges. « La motivation n’est pas un acte banal : elle pose de multiples questions et elle constitue une part fondamentale du travail du juge qui doit rendre compte des déterminants, des raisons de ses décisions. Il est donc tout à fait légitime que le juge ne perde jamais de vue l'importance qu'elle revêt et réfléchisse à cette problématique qui est inscrite au cœur de sa mission » a ainsi souligné en conclusion le Vice-Président de la haute juridiction administrative. Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : as@annoncesdelaseine.fr FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE


Vie du droit

LES ANNONCES DE LA SEINE Siège social : 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS R.C.S. PARIS B 339 349 888 Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr e-mail : as@annoncesdelaseine.fr

l

l

l

Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05 Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède Comité de rédaction :

Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appel Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International Publicité : Légale et judiciaire : Commerciale :

La motivation des sanctions administratives par Jean-Marc Sauvé(1)

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 12 369 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

2011

Copyright 2012 Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Sauf dans les cas où elle est autorisée expressément par la loi et les conventions internationales, toute reproduction, totale ou partielle du présent numéro est interdite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal. Le journal “Les Annonces de la Seine” a été désigné comme publicateur officiel pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, par arrêtés de Messieurs les Préfets : de Paris, du 27 décembre 2011 ; des Yvelines, du 20 décembre 2011 ; des Hauts-deSeine, du 28 décembre 2011 ; de la Seine-Saint-Denis, du 26 décembre 2011 ; du Val-de-Marne, du 20 décembre 2011 ; de toutes annonces judiciaires et légales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procédure Civile et de Procédure Pénale et de Commerce et les Lois spéciales pour la publicité et la validité des actes de procédure ou des contrats et des décisions de justice pour les départements de Paris, des Yvelines, de la SeineSaint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine. N.B. : L’administration décline toute responsabilité quant à la teneur des annonces légales.

- Tarifs hors taxes des publicités à la ligne A) Légales : Paris : 5,48 € Seine-Saint-Denis : 5,43 € Yvelines : 5,22 € Hauts-de-Seine : 5,48 € Val-de-Marne : 5,41 € B) Avis divers : 9,75 € C) Avis financiers : 10,85 € D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,82 € Hauts-de-Seine : 3,82 € Seine-Saint Denis : 3,80 € Yvelines : 5,22 € Val-de-Marne : 3,83 € - Vente au numéro : 1,15 € - Abonnement annuel : 15 € simple 35 € avec suppléments culturels 95 € avec suppléments judiciaires et culturels COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES NORMES TYPOGRAPHIQUES Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

2

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

l

Jean-Marc Sauvé

près avoir accepté d’intervenir lors du colloque de ce jour et pris connaissance du thème de l’intervention qui m’échoit, j’ai espéré alléger ma tâche en recherchant dans mon bureau l’étude du Conseil d’Etat de 1995 consacrée aux sanctions administratives, confiant dans les réponses que je pourrais y trouver. Tournant les premières pages de cet ouvrage à peine jaunies par le temps, mon élan a soudain été brisé par cette phrase, figurant en introduction et constituant une sorte d’aveu sous la plume du Conseil d'Etat : « La notion de sanction administrative compte parmi l’une des moins assurées du droit administratif »(2). J’en avais l’intuition ; l'étude du Conseil d’Etat me le rappelait, par une sentence aussi concise que précise : la notion de sanction administrative ne se laisserait pas aisément appréhender. Je pris rapidement conscience d’une seconde difficulté. Une sanction administrative est usuellement définie comme une décision unilatérale prise par une autorité administrative agissant de la cadre de prérogatives de puissance publique, qui punit l'auteur d'un manquement aux lois et aux règlements(3). Or, si le sujet qui m'est assigné porte sur « la motivation des sanctions administratives », le colloque d’aujourd’hui s’intitule : « La motivation des sanctions prononcées en justice ». Nul ne doute qu’une sanction puisse être juridictionnelle(4), mais par sanction administrative, on entend généralement une décision prise par une autorité administrative. La doctrine souligne d’ailleurs la considérable extension de ce type de sanction lors des trente dernières années, permettant de « punir sans juger »(5). Si le regard se porte en revanche sur les compétences répressives du juge administratif, force est de constater que celles-ci sont marginales. Mon

A

illustre prédécesseur, Edouard Laferrière, qui dans son Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux(6) avait érigé le contentieux répressif en une branche du contentieux administratif, n’y incluait que les contraventions de grande voirie(7). Tout au plus est-il aujourd’hui possible d’y rattacher les sanctions qui sont prononcées, notamment, par des juridictions administratives spécialisées, comme les juridictions financières ou les juridictions disciplinaires, telles que le Conseil supérieur de la magistrature statuant à l’égard des magistrats du siège ou les sections disciplinaires des ordres professionnels. Mais l’horizon de la notion de sanction est vaste et peut-être se trompe-t-on à vouloir trop le restreindre. La sanction peut en effet également être définie comme une « obligation juridique secondaire, qui naît de la violation ou de la méconnaissance d’une obligation juridique primaire » et qui est garantie par la force ou la contrainte(8). Elle est même définie, par les organisateurs de ce colloque, comme « toute réaction du droit à une violation de la légalité », c’est-à-dire qu'elle peut inclure jusqu’à l’annulation d’une décision administrative illégale, qui constitue le noyau dur de la mission du juge administratif. Dès lors, mon propos portera sur le rôle du juge administratif dans la motivation des sanctions, que celles-ci soient prises par des autorités administratives ou, plus largement, entendues comme toute réaction à une violation de la légalité, la seconde branche absorbant au demeurant la première. Ce rôle est d’un grand classicisme, lorsque le juge administratif contribue à la définition du régime des sanctions administratives, y compris de leur motivation (I). Il est aussi d’une indéniable modernité, lorsque le travail du juge se transforme et se recompose sous l’influence tant de contraintes juridiques exogènes, qui tiennent à la multiplication des normes et de leurs interprètes, que de choix propres qu’il opère (II). Ce rôle peut être enfin regardé comme post-moderne, en ce qu’il évolue au regard des questionnements les plus récents sur les fonctions assignées à la motivation des décisions de justice (III).

I. Le premier âge de la motivation des sanctions a été l'âge classique Le premier âge de la motivation des sanctions a été l'âge classique : parallèlement aux autres branches du contrôle de la légalité des actes administratifs, le Conseil d’Etat a contribué à la définition d'un véritable régime de la sanction administrative et, au premier chef, des exigences de motivation de celle-ci, sur la base d'un contrôle juridictionnel qui s'est progressivement resserré sur la procédure, la forme et le fond de la sanction. Le Conseil d’Etat a contribué à définir le régime juridique applicable aux sanctions administratives (A), et plus précisément à la motivation de celles-ci (B), par des voies semblables à celles utilisées dans d’autres contentieux.

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20


Vie du droit A. Le domaine des sanctions administratives a été propice à l’épanouissement progressif des droits de la défense et de principes permettant de protéger contre toute forme d'arbitraire la personne concernée par la sanction. Certes, il n’en a pas toujours été ainsi. La lecture du Recueil Lebon des dernières années du XIXème siècle révèle ainsi l’insolente exorbitance du pouvoir de l’administration en matière de sanctions disciplinaires. Dès lors que l’administration faisait usage de ses pouvoirs disciplinaires, et sous réserve de l’hypothèse du détournement de pouvoir(9), le Conseil d’Etat se bornait à juger, par une motivation aussi lapidaire qu'hermétique, que la voie contentieuse n’était pas ouverte à l’agent public ou qu’elle ne l’était pas pour contester les motifs de l’acte(10). La loi du 22 avril 1905, dont l'article 65 toujours en vigueur(11) subordonne les mesures disciplinaires à la communication préalable du dossier, a instauré une garantie de procédure essentielle(12) au respect de laquelle le Conseil d’Etat a veillé avec attention(13). C’est toutefois surtout avec l'émergence des principes généraux du droit au sortir de la Seconde Guerre mondiale et donc par la voie jurisprudentielle que cet édifice a été complété. La décision Aramu(14) a ainsi expressément consacré, après l'arrêt Dame Veuve Trompier-Gravier(15), le principe général des droits de la défense, selon lequel une sanction ne peut légalement intervenir sans que l’administré ou l’usager n’ait préalablement été mis à même de présenter ses observations. Le Conseil d’Etat, dont la décision du 5 mai 1944, brièvement motivée, est éclairée par les conclusions du commissaire du gouvernement Chenot, a étendu le champ et la portée de cette jurisprudence tout au long de la seconde moitié du XXème siècle(16) et il a aussi tenu compte de l'approfondissement des garanties de procédure apportées par des textes législatifs et réglementaires de plus en plus nombreux et explicites(17). Le contrôle exercé par le juge administratif sur la légalité interne des sanctions s’est aussi progressivement renforcé. Il a successivement porté sur l'erreur de droit(18), l'erreur de fait(19), et la qualification juridique des faits susceptibles de donner lieu au prononcé d'une sanction(20). A partir de 1978(21), il a contrôlé l'existence ou non d'une erreur manifeste d’appréciation dans le choix de la sanction(22) et, par conséquent, d'une disproportion manifeste entre la faute et la sanction. Le contrôle du juge est devenu plus poussé - c'est un contrôle normal, donc de stricte proportionnalité - lorsque sont en cause les sanctions prononcées contre certains agents publics, en particulier les magistrats de l'ordre judiciaire(23), les licenciés des fédérations sportives, que la sanction soit prononcée par la fédération(24) ou par l’Agence française de lutte contre le dopage(25), mais aussi des catégories plus larges, comme les acteurs économiques ou professionnels(26). Seules les sanctions prises à l'égard de la généralité des agents publics restent soumises au contrôle de l'erreur manifeste. Le rôle du juge administratif en cette matière a été conforme à son œuvre générale de fondation du contentieux administratif : en dialogue avec le législateur, le juge a permis le développement de véritables garanties pour les agents publics ou les administrés, professionnels ou non, dans la mise en œuvre des sanctions administratives,

notamment en découvrant ou en révélant des principes généraux du droit et en étendant progressivement son contrôle sur les motifs de droit et de fait de ces mesures.

tif a contribué à définir le régime juridique applicable aux sanctions administratives et à leur motivation.

B. Le Conseil d’Etat a également contribué à la définition des exigences applicables en matière de motivation des sanctions administratives, entendues au sens de sanctions prononcées par des autorités administratives. Avant la loi du 11 juillet 1979, ces sanctions n’avaient pas, sauf texte contraire, à être motivées et aucun principe général du droit ne l’imposait(27). Certes, des textes imposaient cette motivation, comme l’ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires, mais celle-ci prévoyait aussi de nombreuses exceptions et cette obligation ne concernait finalement que certaines catégories de fonctionnaires de l’Etat(28). L’intervention de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs(29) a donc profondément modifié la donne, en posant en son article 1er l’obligation de motivation des décisions individuelles défavorables, notamment de celles qui infligent des sanctions. D’autres fondements législatifs doivent également être mentionnés, comme les dispositions du Code général des impôts et du livre des procédures fiscales ou de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Le Conseil d’Etat a donné à ces dispositions une réelle portée concrète. L’existence d’une motivation expresse et formelle s’impose, car le législateur a entendu imposer à l’autorité qui prononce une sanction « l’obligation de préciser elle-même dans sa décision les griefs qu’elle entend retenir à l’encontre de la personne intéressée, de sorte que cette dernière puisse à la seule lecture de la décision qui lui est notifiée connaître les motifs de la sanction qui la frappe »(30). Quant au contenu de la motivation, le juge administratif adopte une position mesurée : il n’est ainsi pas nécessaire pour l’autorité administrative de répondre à l’intégralité des arguments invoqués devant elle(31), ni d’assortir d’une motivation spécifique, distincte de la motivation principale, la sanction qui aurait le caractère d’une peine complémentaire, comme la décision de rendre publique la sanction principale(32). En ce qui concerne la motivation des sanctions prononcées en justice, par exemple par les sections disciplinaires des ordres professionnels qui ont le caractère, ainsi qu'il a été dit, de juridiction administrative spécialisée, il appartient à la juridiction de relever les faits avec suffisamment de précision pour permettre au Conseil d'Etat d'exercer le contrôle qui lui appartient, en se référant pour ce faire aux cas précis qui ont été soumis à son examen(33). Il faut également que le juge du fond rende compte des éléments de droit et de qualification juridique conduisant à la solution adoptée(34). Là encore, la position du Conseil d’Etat reste mesurée, afin de ne pas faire peser sur la juridiction disciplinaire une obligation lourde, mais purement formelle. Ainsi, le juge disciplinaire d'appel n'est pas tenu de motiver spécifiquement une diminution ou une aggravation de la sanction qui a été infligée en première instance(35). Progressivement donc, dans un dialogue permanent avec le législateur, le juge administra-

II. Le deuxième âge de la motivation des sanctions est un âge que je qualifierai de moderne Le deuxième âge de la motivation des sanctions est un âge que je qualifierai de moderne : le travail du juge s'est transformé sous l’influence de contraintes juridiques exogènes et de choix propres. A. Le domaine des sanctions administratives constitue un terrain de réflexion et de délibération privilégié pour une multitude d’acteurs et d’interprètes des normes applicables, à commencer par les juges. Ce champ du droit se caractérise en effet par un accroissement des sources juridiques, par une intervention fréquente du juge pénal et du juge administratif, mais aussi, plus récemment, par l'influence du juge constitutionnel et des deux Cours européennes, la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour de justice de l’Union européenne. Par conséquent, différents niveaux d’analyse des sanctions administratives coexistent, qui ne se recoupent pas nécessairement ou, en tout cas, pas entièrement. Cette pluralité, qui donne parfois l’impression d’un enchevêtrement, situe le juge administratif dans un monde ouvert où des contraintes exogènes, résultant du système juridique national et européen dans lequel il opère, s’imposent à lui en complément ou contrepoint des principes qu’il met à jour. Si « de plus en plus, le droit administratif repose sur son socle constitutionnel »(36), il repose aussi sur le socle de normes d’origine européenne(37) ainsi que, plus généralement, de sources internationales. Dans cet univers multidimensionnel, dans ce réseau impliquant une constante confrontation de normes et un constant dialogue des juges internes et européens, le travail du juge se transforme. Sous l’influence de ces contraintes juridiques exogènes, mais également par l'effet de ses choix propres, la façon dont il appréhende les sanctions administratives change. J’en donnerai deux exemples. B. Le premier exemple relève de la nécessaire clarification de la notion même de sanction administrative. Une interrogation classique en droit administratif porte sur la distinction entre sanction administrative et mesure de police. A cette première interrogation se rattachent dorénavant d’autres questions. Car la Cour européenne des droits de l’homme a énoncé que la notion d’accusation en matière pénale doit être entendue de manière autonome et peut donc viser les sanctions prononcées par une autorité administrative(38) et, de son côté, le Conseil constitutionnel a affirmé que les exigences constitutionnelles applicables aux peines prononcées par les juridictions répressives s'étendent à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la prononcer à

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

3


Vie du droit une autorité de nature non judiciaire(39). Dès lors, le juge administratif doit se poser, chaque fois qu’une sanction lui est soumise, la question de savoir si cette sanction procède d’une accusation en matière pénale, au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, ou a le caractère d’une punition, au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. La réponse à ces questions suppose, au cas par cas, de confronter la décision administrative contestée à des révélateurs différents de manière à obtenir la photographie finale, c’est-à-dire la détermination de la catégorie juridique de l'acte et du régime qui lui est applicable. L’effort de clarification qu’il convient de faire va, par conséquent, croissant. Il est de plus en plus subtil et complexe, mais prend tout son sens au regard des garanties qui s’attachent aux accusations en matière pénale ou aux punitions. La matière fiscale a donné lieu à de tels développements : le Conseil d’Etat a ainsi considéré que les pénalités pour mauvaise foi ou pour manœuvres frauduleuses constituent des accusations en matière pénale au sens de

de sanctions administratives(45), notamment en vue de la mise en œuvre du principe de proportionnalité. La Cour européenne des droits de l’homme demande également que les sanctions administratives susceptibles d’entrer dans la catégorie des accusations en matière pénale puissent être contrôlées par un « organe judiciaire de pleine juridiction » qui doit avoir « le pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise »(46). A contrario, le Conseil d’Etat souligne que dès lors que la décision d’une autorité administrative indépendante peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction, « la circonstance que la procédure suivie devant [cette autorité] ne serait pas en tous points conforme aux prescriptions de [l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme] n’est pas de nature à entraîner dans tous les cas une méconnaissance du droit à un procès équitable »(47). Il ne se déduit toutefois pas de ces jurisprudences qu’un recours de plein contentieux soit toujours nécessaire et, compte tenu des pouvoirs actuels du juge de l’excès de

Le droit des sanctions administratives, du fait de la multiplication des sources du droit et des interprètes de celles-ci, a ainsi conduit le juge administratif à affiner les concepts qu’il utilise et à se situer au sein de l’ensemble normatif imbriqué que Jean-Marc Sauvé constitue le droit actuel.

l’article 6 de la convention, dans le prolongement d’une décision Bendenoun de la Cour européenne des droits de l’homme(40). Il en va de même en matière de sanctions électorales dans la jurisprudence la plus récente du Conseil constitutionnel et du Conseil d’Etat : la question de savoir si l’inéligibilité prévue à l’article L.118-3 du Code électoral constitue une sanction a ainsi été tranchée dans le sens de l'affirmative par la récente décision Elections régionales d’Ile-de-France du Conseil d’Etat, qui avait bénéficié d’importants éclairages sur cette question de la part du Conseil constitutionnel(41). C. Le deuxième exemple de la transformation du travail du juge administratif que je souhaite aborder est relatif à la nature du contrôle effectué. Le cadre renouvelé dans lequel ce juge opère le conduit à prendre en compte, sur ce point également, l’apport des jurisprudences constitutionnelle et européennes(42). Le juge constitutionnel a ainsi précisé que toute sanction ayant le caractère de punition doit respecter les principes de légalité des délits et des peines, de nécessité des peines, de nonrétroactivité de la loi pénale plus sévère ainsi que de respect des droits de la défense(43). Il a aussi relevé, dans sa décision du 17 janvier 1989 comme dans celle du 25 février 1992(44), que l’existence d’un recours de pleine juridiction constitue, selon les termes du président Genevois, une « garantie essentielle » en matière

4

pouvoir ainsi que du contrôle approfondi qu’il peut exercer sur le bien-fondé de la décision attaquée, un recours de ce type répond aux exigences ci-dessus rappelées. Toutefois, un recours de plein contentieux a l’avantage de « garantir plus sûrement la compatibilité avec la Convention européenne des droits de l’homme et la constitutionnalité de dispositifs de sanctions disparates, anciens, souvent frustes », selon l’expression de ma collègue Claire Legras qui était rapporteur public dans l’affaire Société ATOM(48). En suivant les conclusions de son rapporteur public, le Conseil d'Etat s'est engagé dans la voie du contrôle de plein contentieux en cas de sanction infligée à un administré et donc de l'éventuelle substitution de sa propre décision à celle de l'autorité administrative, lorsque cette dernière décision lui paraît disproportionnée. Il a aussi permis de mettre aisément en œuvre le principe de rétroactivité des lois pénales plus douces, la rétroactivité in mitius. Néanmoins, cette évolution profonde reste un choix propre du juge(49), qui a trouvé sa justification première dans l’efficacité du contrôle ainsi effectué. Le choix entre plein contentieux et excès de pouvoir est en fait intimement lié à la volonté du juge de se donner les moyens de remplir sa mission de manière adaptée. Les conclusions de Claire Legras montrent que la décision Société ATOM n’échappe pas à ce pragmatisme. Mais dès lors que le juge de la sanction devient un juge de

plein contentieux, susceptible, le cas échéant, de substituer sa décision à celle de l’administration, la motivation de cette décision acquiert bien entendu une importance particulière et elle tend à se développer, pour les juges du fond comme pour le juge de cassation. Le droit des sanctions administratives, du fait de la multiplication des sources du droit et des interprètes de celles-ci, a ainsi conduit le juge administratif à affiner les concepts qu’il utilise et à se situer au sein de l’ensemble normatif imbriqué que constitue le droit actuel. En conséquence, la motivation des décisions qu’il rend en matière de sanctions administratives se développe et se transforme. Mais, plus généralement, la motivation des décisions de justice évolue sous l’impulsion d’autres facteurs.

III. Le troisième âge de la motivation des sanctions est celui de l'ère post-moderne actuelle Nous entrons dans le troisième âge de la motivation des sanctions, celui de l'ère postmoderne actuelle, qui est marqué par l’évolution générale du rôle et de la fonction de la motivation des décisions de la justice administrative. Traiter de ce dernier point, dont le lien avec les parties précédentes n’est pas apparent, ni évident, revient à adopter un point de vue beaucoup plus large de la notion de sanctions pour les définir, ainsi que le proposent les organisateurs de ce colloque, comme « toute réaction du droit à une violation de la légalité ». La refondation de l'office du juge retentit sur sa manière de motiver ses décisions. En outre, la position du juge dans notre société évolue : celui-ci ne manque pas de s'interroger, sous l'effet de chocs exogènes multiples et, en particulier, des interpellations de la société, sur la façon dont peuvent-être perçues ses décisions, sur leur intelligibilité et, au-delà, sur le rôle et même la légitimité qui sont les siens. Dans ce contexte, la motivation de ses décisions change. Ce changement n’est pas limité, en droit administratif, au champ des sanctions administratives ni corrélé avec lui, mais il influe évidemment sur lui. A. L’évolution de la motivation des décisions de justice tient d’abord à l’indexation de celleci sur les transformations de l’office du juge. Les « habits neufs du juge administratif »(50) exercent en effet une influence certaine sur la façon dont celui-ci s’exprime au travers de la décision de justice. Le régime des injonctions institué par la loi du 8 février 1995(51) a ainsi conduit le juge à se préoccuper particulièrement des effets de ses décisions d’annulation en indiquant à l’administration la marche à suivre pour mettre en œuvre celles-ci, dans le cadre d'injonctions, le cas échéant assorties d'astreintes. Le Conseil d’Etat éclaire également le juge du fond. Il a par exemple récemment précisé à quelles conditions ce juge peut, en exécution de sa décision, ordonner la destruction d’un

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20


Vie du droit immeuble dont la construction avait commencé en vertu d’une autorisation d’urbanisme illégale(52). Il est même arrivé, bien que cela reste rare, que le Conseil d’Etat précise la portée de l’annulation prononcée, alors même qu’il n’était pas saisi de conclusions à fin d’injonction(53). Le souci de l'efficacité de ses décisions est donc au cœur du travail quotidien du juge administratif et se révèle très directement dans ses motivations. Cette préoccupation a d’ailleurs parfois conduit le juge à transcender et dépasser les règles qu’il applique généralement en matière de réponse aux prétentions du requérant et, par conséquent, de motivation, comme la règle de l’économie des moyens(54), dont il sait s'affranchir, pas seulement lorsque la loi le lui impose. D’autres évolutions de l’office du juge sont à l’origine d’un approfondissement de la motivation de ses décisions. C'est le cas notamment lorsque le juge module dans le temps les effets d’une annulation de la décision administrative(55), voire les effets de ses propres revirements de jurisprudence(56). Le juge se prononce alors au regard de motifs d’intérêt général et d’impératifs de sécurité juridique qui peuvent commander une telle modulation et conduire à l’annulation différée d’un acte ou à un revirement de jurisprudence pour l’avenir. Dans tous les cas, il lui faut rendre compte de sa position. Ces évolutions incitent le juge à être plus pédagogue, notamment mais pas seulement par souci d’efficacité. A l’affirmation, à l’imperatoria brevitas de jadis ou encore aux solutions implicites de naguère - voir en ce sens la motivation laconique de l'arrêt Nicolo(57) de 1989 qui serait difficilement concevable aujourd’hui -, le juge préfère désormais l’explication. Il joue même parfois un rôle quasidoctrinal dans certaines décisions, ce que souligne le professeur René Chapus en se demandant si de telles motivations « ne sont pas empruntées à un ouvrage de doctrine […] plutôt qu’e xtraites d’une décision de justice »(58). Les arrêts Association AC !(59), Commune d'Aix-enProvence(60), Société Tropic Travaux Signalisation(61) ou Commune de Béziers(62) sont à cet égard représentatifs d'une tendance nouvelle et profonde dans laquelle des membres sourcilleux d’un nouveau Comité de salut public, dignes héritiers de l’esprit de la Révolution française, ne manqueraient pas de discerner, nonobstant les termes de l'article 5 du Code civil, de véritables arrêts de règlement. B. Mais l’évolution de la motivation des décisions de justice résulte aussi de l’évolution de la place du juge dans la société, et non plus en surplomb de celle-ci, ainsi que de la façon dont il se perçoit lui-même. La justice toutepuissante, celle que redoutait Montesquieu, car elle pouvait s’avérer « si terrible parmi les hommes »(63), devient progressivement plus immanente, plus humaine, au sens où le juge non seulement est immergé dans la société, mais doit y trouver sa place et y construire sa légitimité. La motivation apparaît alors comme le reflet de ce positionnement et des interrogations qu’il suscite. Le débat n’est d’ailleurs pas limité à notre pays. Il a, par exemple, été relancé dans des cultures juridiques où la motivation est conçue différemment, comme dans les pays anglo-saxons où, on le sait, au

syllogisme juridique, avec sa prémisse majeure et sa mineure, est résolument préféré le style narratif(64). La motivation, envisagée comme la justification ou l’explication de la décision de justice, apparaît de prime abord comme un exercice banal et assez évident. Il est toutefois réducteur de l’appréhender de cette sorte. Dans la mesure où le juge est « embarqué dans le processus décisionnel »(65), la motivation est censée indiquer le cheminement, le raisonnement effectivement suivi par le juge, c’est-à-dire les nombreux choix qu’il opère et qui conduisent au dispositif, sans qu’une personne extérieure ne puisse d’ailleurs jamais vraiment savoir si tel a bien été le cas. Les choix du juge portent en particulier sur l’argumentation des parties, les règles d’interprétation de la norme, l’interprétation retenue, la qualification juridique des faits… Le syllogisme, qui est généralement présenté comme la principale arme logique du juge, peut alors être critiqué en ce que sa validité dépendrait des propositions qui le composent et qui, elles-mêmes, procèdent d’un choix du juge(66). Certains auteurs invitent donc à reconnaître les failles de la logique formelle que représenterait le syllogisme pur et abstrait et à comprendre l’importance qui s'attache à ce qu'il soit intégralement rendu compte du raisonnement suivi par le juge. Je ne méconnais pas la force de ces interpellations et de ces contradictions. Elles passent néanmoins, à mes yeux, non sans m'exposer au grief de conservatisme, voire au soupçon de positivisme juridique, après les exigences de clarté, de cohérence, d'unité et de prévisibilité de la jurisprudence qui sont, toujours selon moi, plus aisées à assurer par le recours aux instruments de la logique formelle. Tous les modes de rédaction ne sont pas neutres au regard de l'exigence de sécurité juridique, surtout lorsqu'une juridiction rend non quelques dizaines de décisions par an, mais plusieurs milliers, voire dizaines de milliers. Il faut également reconnaître que la motivation joue un rôle propre et, à ce titre, remplit diverses fonctions. J'ai déjà fait référence, par exemple, à la fonction pédagogique qui est la sienne. Cette fonction conduit à un changement de nature de la motivation, qui se fait plus explicative, voire parfois doctrinale, comme je l'ai dit. Mais il y a plus, car dans notre société de transparence et de communication, la motivation est la clé de voûte du dialogue que le juge entretient avec les parties et vient clore. Par le biais de celle-ci, le juge informe les justiciables de la décision prise, il fait connaître le raisonnement suivi et il entend persuader ses lecteurs de son bienfondé. Il rend aussi prévisibles ses décisions futures. Il s'adresse enfin à un auditoire plus large, la communauté juridique, avec laquelle il dialogue, comme il dialogue avec les juges qui l'ont précédé et, peut-être aussi par anticipation, avec ceux qui le suivront(67). Ces évolutions reflètent la place du juge dans la société contemporaine. Au service du justiciable, le juge est acteur de sa propre légitimité, qui n’est pas acquise et qui, au contraire, tend à être régulièrement remise en cause. De cela, nous sommes tous les jours les infortunés témoins. Une meilleure motivation est sans aucun doute un moyen de parvenir à une plus grande légitimité des décisions de justice et, au-delà, des juges.

Agenda

XXVIÈME CONGRÈS DE L’UAE

Energies renouvelables du 14 au 16 juin 2012 Barcelone - Espagne Renseignements : +34 93 487 70 28 acruz@acnlegalsolutions.com

2012-213

COLLOQUE CYCLE HISTOIRE ET JUSTICE 2012

Les écrivains en justice L’affaire Tartuffe : Molière face à la justice royale 5 avril 2012 Cour de cassation - Paris 1er Renseignements : www.courdecassation.fr 2012-214

CONFÉRENCE DE L’ASSOCIATION D’HISTOIRE ET D’ARCHÉOLOGIE DU XXÈME ARRONDISSEMENT

Charles Cros (1842-1888) par Jean-Marie Durand 12 avril 2012 Mairie du XXème arrondissement - Paris Renseignements : http://ahav.free.fr

2012-215

COLLOQUE

Croisière juridique SARL et restructurations du 13 au 20 mai 2012 Renseignements : Cécile Perraud : 03 85 42 83 63 Bâtonnier Jean du Parc : 06 07 64 68 72

2012-216

CONFÉRENCE INSOL EUROPE DE L’EST DES PAYS EUROPÉENS

Companies, creditors and collateral in crisis du 24 au 26 mai 2012 Poznan - Pologne Renseignements : david@drpartners.com lindasmith@insol-europe.org 2012-217

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

5


Vie du droit C. Ces remarques sont inséparables du fait que la juridiction administrative s’est engagée dans une démarche de réflexion sur la motivation de ses propres décisions. Le rapport final du groupe de travail dont j’ai confié la présidence à Philippe Martin, président adjoint de la section du contentieux du Conseil d'Etat, n’a pas encore été remis, mais un rapport d’étape a déjà été soumis à débat au sein de la juridiction, comme avec la doctrine et le barreau. En l'état, le groupe de travail propose d’enrichir la motivation, ce qui constitue, selon ses termes, une exigence démocratique, d’améliorer la lisibilité des décisions, de mieux tenir compte des rôles respectifs des différents acteurs dans l’élaboration de la décision, tout en ne sacrifiant pas la rigueur du raisonnement juridique. Les propositions faites à ce stade par le groupe de travail dont je rappelle qu'elles ne sont pas définitives visent à améliorer la présentation de la requête et de la procédure suivie, à approfondir la motivation sur l’interprétation de la norme, les faits déterminants et la qualification juridique des faits, mais aussi à faire évoluer le style rédactionnel. Des questions importantes se posent à cet égard, comme l’abandon éventuel du style indirect et de la phrase unique au profit d’un style direct fait de phrases multiples et courtes ou encore l’inclusion éventuelle, dans la décision de justice, de références à des décisions de principe de la juridiction administrative ou d'autres juridictions, constitutionnelle, européennes ou étrangères, dont la décision en cause ferait application ou dont elle s'inspirerait, sans que ces décisions ne soient revêtues de l'autorité de la chose jugée ou interprétée. Tel est l'état actuel de nos réflexions. Que l’on retienne une définition restrictive (la sanction administrative comme décision d'une autorité publique), ou une définition résolument large, qui envisage la sanction comme l'objet même d'un nombre substantiel de décisions juridictionnelles, l’exigence de motivation est, d’une part, certaine et, d’autre part, en profonde mutation au cours de ces dernières années. La motivation n’est pas un acte banal : elle pose de multiples questions et elle constitue une part fondamentale du travail du juge qui doit rendre compte des déterminants, des raisons de ses décisions. Il est donc tout à fait légitime que le juge ne perde jamais de vue l'importance qu'elle revêt et réfléchisse à cette problématique qui est inscrite au cœur de sa mission. Je me réjouis qu'il en aille ainsi actuellement au sein de la juridiction administrative française. Il est également heureux et pertinent que la doctrine accompagne le juge et chemine à ses côtés pour l’éclairer, le critiquer et le nourrir de ses propres réflexions en la matière. Chacun d’entre eux - le juge et la doctrine - a ses devoirs et ses responsabilités propres, mais aucun des deux ne peut les assumer sans écoute attentive de ce que l’autre pense, dit et fait. C’est sur ce message de confiance et d’espoir dans la coopération entre justice et doctrine que j'entends clore mon propos dans cette enceinte académique. Permettez-moi enfin de vous exprimer l’honneur et le plaisir qui sont les miens de partager ces réflexions avec vous en ce bel aprèsmidi d'hiver à l'Université Jules Verne dans le chef-lieu de la Picardie.

6

Notes : 1 - Texte écrit en collaboration avec M. Olivier Fuchs, conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d’appel, chargé de mission auprès du vice-président du Conseil d’Etat. 2 - Conseil d’Etat, Les pouvoirs de l’administration dans le domaine des sanctions, Paris, La Documentation Française, 1995, p.35. 3 - Conseil d’Etat, op. cit., p.35-36. Dans le même sens, F. Moderne définit la sanction administrative comme un « pouvoir répressif accordé à l’Administration pour punir des comportements sociaux considérés comme des infractions à une réglementation préexistante » (Sanctions administratives et justice constitutionnelle : contribution à l'étude du jus puniendi de l'Etat dans les démocraties contemporaines, Paris, Économica, 1993, p.5). 4 - Ainsi J. Rivero, « Sanction juridictionnelle et règle de droit », in Etudes juridiques offertes à Léon Julliot de la Morandière, Paris, Dalloz, 1964, p.457. 5 - M. Delmas-Marty, C. Teitgen-Colly, Punir sans juger : de la répression administrative au droit administratif pénal, Paris, Economica, 1992. 6 - Berger-Levrault 1887-1888, 2 volumes. 7 - E. Laferrière, Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, Paris, Berger-Levrault, 1888, tome 2, livre VII p.599. 8 - A. Laquièze, « Sanction », in D. Alland, S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, 2003, p.1382. 9 - CE, 16 novembre 1900, Sieur Maugras, n°96980, p.617. Le recours pour excès de pouvoir a été ouvert en cas de détournement de pouvoir à partir des décisions Pariset et Laumonnier-Carriol (CE, 26 novembre 1875, Rec., p.934). 10 - Voir ainsi CE, 6 mai 1881, Epivent, n°56194, Rec. p.458 (« la décision par laquelle le Président de la République, sur la proposition du Ministre de la Marine, a mis le requérant en non-activité par retrait d’emploi, en vertu de l’article 6 de la loi du 19 mai 1834, est un acte qui n’est pas de nature à donner lieu à un recours par la voie contentieuse ») ; CE, 22 mars 1889, Delaine, n°70214, Rec. p.385 (« le préfet, en prenant l’arrêté attaqué, s’est borné à faire usage des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 102 de la loi du 5 avril 1884 ; qu’ainsi sa décision constitue un acte d’administration dont le requérant n’est pas recevable à discuter les motifs par la voie contentieuse »). 11 - Pour une application récente, voir CE, 30 décembre 2009, Institut de France, n°304379, Rec. p.801. 12 - Des garanties avaient déjà été prévues par certains textes, comme le décret du 27 août 1898 relatif au Ministre de la Marine, dont l’article 22 instituait l’audition du fonctionnaire poursuivi disciplinairement par le conseil des directeurs du ministère et la communication du procès-verbal de ce conseil au ministre. CE, 29 mars 1901 Mazel, Rec. p.360. 13 - Voir par exemple CE, 4 mars 1910, Sieur Chanu, n°30744, Rec. p.204. Cette garantie procédurale s’est toutefois heurtée à la question de la grève dans le service public : l’agent en grève se plaçant lui-même, « par un acte collectif, en dehors de l’application des lois et des règlements édictés », il ne peut invoquer l’article 65 de la loi du 22 avril 1905 (par exemple CE, 6 août 1910, Sieur Amalric, n°37571, Rec. p.721). 14 - CE, Ass., 26 oct 1945, Aramu Rec. p.213. 15 - CE, Sect., 5 mai 1944, Dame Veuve Trompier-Gravier, Rec. p.133 ; RDP, 1944, p.256, concl. Chenot. 16 - Voir GAJA,18ème édition 2011, n°54. 17 - Par exemple, obligation de consultation d’un comité avant le prononcé d’une sanction (ainsi de l’article 4 du décret n°48-599 du 27 mars 1948 portant règlement d’administration publique pour l’application de la loi n°46-1055 du 15 mai 1946 relative à l’usage de l’insémination artificielle des animaux domestiques) ou obligation de convoquer au moins quinze jours en avance le contrevenant qui doit comparaître devant une commission et possibilité pour lui de se faire représenter par un avocat (article 6 de l’arrêté interministériel du 24 juin 1960 portant application de l’article L.18 du Code de la route). 18 - CE, 29 mars 1901, Sauve, Rec. p.361. 19 - CE, 14 janvier 1916, Camino, Rec.15. Voir par exemple CE, 4 juin 1947, Frémicourt, Rec. p.209 à propos d’une admission d’office à la retraite du Premier président de la Cour de cassation. 20 - CE, 17 mai 1933, Delle Giraud, Rec. p.531. 21 - CE, Sect., 9 juin 1978, Lebon, Rec. p.254. 22 - Que cette sanction soit manifestement trop faible (par exemple CE, 7 avril 2010, Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, n°301784, à paraître aux tables du Recueil) ou trop sévère (par exemple CE, 12 janvier 2011, Matelly, n°338461, à paraître au Recueil). 23 - CE, 27 mai 2009, Hontang, n°310493, Rec. p.207. 24 - CE, 2 mars 2010, Fédération française d’athlétisme, n°324439, à paraître aux tables du Recueil. 25 - CE, 9 novembre 2011, Benzoni, n°341658, à paraître au Recueil. 26 - CE, sect., 22 juin 2007, Arfi, n°272650, Rec. p.263. 27 - CE, 10 février 1978, Rischmann, n°96495, Rec. p.685. 28 - Ainsi le champ d’application des dispositions de l’ordonnance n°59-244 du 4 février 1959 relatives au statut des fonctionnaires, et notamment son article 31 posant l’exigence d’une motivation, était limité par les exceptions mentionnées aux articles 1er et 2 de celle-ci. Le Conseil d’Etat a confirmé que ces dispositions ne s’appliquaient pas de plein droit aux membres du corps enseignant (CE, 13 juillet 1967, Ministre de l’Education nationale c/ Puy, n°61324, Rec. p.331) ni aux agents départementaux (arrêt Rischmann précité). 29 - Loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public. 30 - CE, 23 mars 2005, Stilinovic, n°264005, Rec. p.954. La motivation doit ainsi mentionner les éléments de fait et de droit qui fondent la décision, sans que la transmission antérieure d’un document, une mise en garde par exemple, ne puisse dispenser l’autorité administrative de ses obligations de motivation (CE, 26 mai 1993, Caisse primaire d’assurance maladie des Deux-

Sèvres, n°87788, Rec. p.566). 31 - CE, 11 février 2011, Société générale, n°316508, à paraître au Recueil. 32 - CE, Sect., 6 juin 2008, Société Tradition Securities and Futures, n° 299203, Rec. p.189. 33 - Voir par exemple CE, 15 décembre 1993, Bénitah, n°129277, Rec. p.367. 34 - Voir par exemple CE, 3 mai 1961, Richand, n°52312, Rec. p.281. 35 - CE, 23 juillet 2010, Haag, n°329191, à paraître aux tables du Recueil. 36 - B. Stirn, Les sources constitutionnelles du droit administratif, Paris, LGDJ, Systèmes, 7ème éd., 2011, p.205. Voir également F. Moderne, Sanctions administratives et justice constitutionnelle, op. cit. 37 - F. Moderne, « Le pouvoir de sanction administrative au confluent du droit interne et du droit européen », RFDA, 1997, p.1. 38 - CEDH, 8 juin 1976, Engel c/ Pays-Bas. 39 - Conseil constitutionnel, 17 janvier 1989, décision n°88-248 DC. 40 - CE, avis, sect., 31 mars 1995, Ministre du budget c/ SARL Auto-Indutrie Méric et autre, n°164008, Rec. p.154 ; CEDH, 24 février 1994, Bendenoun c/ France. 41 - CE, ass., 4 juillet 2011, Elections régionales d’Ile-de-France, n°338033, à paraître au Recueil ; Conseil constitutionnel, 8 avril 2011, décision n°2011117 QPC. En revanche, le non remboursement des dépenses de campagne n'est pas regardé comme une sanction. 42 - Pour une analyse détaillée de celles-ci, voir C. Legras, « Sanctions administratives : rétroactivité in mitius et plein contentieux », RFDA, 2009, p.259. 43 - Décision n°88-248 DC précité. 44 - Conseil constitutionnel, 25 février 1992, décision n°92-307 DC. 45 - B. Genevois, « Le Conseil constitutionnel et la définition des pouvoirs du Conseil supérieur de l’audiovisuel », RFDA, 1989, p.227. 46 - Voir par exemple CEDH, 4 juin 2004, Silvester’s Horeca Service c/ Belgique, n°47650/99. 47 - CE, 6 janvier 2006, Société Lebanese Communication Group, n°279596, Rec. p.1 ; CE, 22 décembre 2011, Union mutualiste générale de prévoyance, n°323612, à paraître aux tables du Recueil. 48 - CE, 16 février 2009, Société Atom, n°274000, Rec. p.26. Le passage au plein contentieux a été confirmé en matière de retrait d’une carte de résident au titre de l’article L.314-6 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CE, 10 juin 2009, Mme Zheng, n°318898, Rec. p.747) et de retraits de points du permis de conduire (CE, 9 juillet 2010, Berthaud, n°336556, Rec. p.287). 49 - Pour B. du Marais et A. Sée, si l’ombre de la convention européenne des droits de l’homme était particulièrement présente dans le litige, le développement du recours de pleine juridiction est en l’espèce « sans lien avec les exigences européennes » (« Avancée significative du plein contentieux dans le domaine des sanctions administratives. A propos de l’arrêt d’assemblée du Conseil d’Etat du 16 février 2009, Société Atom », Gaz. Pal., 5 décembre 2009, p.11). 50 - J. Arrighi de Casanova, « Les habits neufs du juge administratif », in Mélanges en l’honneur de Daniel Labetoulle, Paris, Dalloz, 2007, p.11. 51 - Loi n°95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative. 52 - CE, sect., 14 octobre 2011, Commune de Valmeinier, Syndicat mixte des Islettes, n°320371, à paraître au Recueil ; voir également J.-H. Stahl, X. Domino, « Injonctions : le juge administratif face aux réalités », AJDA, 2011, p.2226. 53 - Voir par exemple CE, ass., 29 juin 2011, Vassilikiotis, n°213229, Rec. p.303. 54 - En ce qui concerne les sanctions prononcées par la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers par exemple, le Conseil d’Etat a décidé de ne pas appliquer la règle de l’économie des moyens, lui permettant d’annuler en statuant sur un seul moyen emportant l’annulation, mais a choisi de répondre à tous les moyens (CE, sect., 27 octobre 2006, Parent et autres, n°276069, Rec. p.454). Cette précaution a pour but de permettre à l’administration d’identifier le moment de la procédure litigieux et, le cas échéant, de ne pas avoir à reprendre l’ensemble de la procédure mais uniquement une phase de celle-ci. 55 - CE, ass., 11 mai 2004, Association AC ! et autres, n°255886, Rec. p.197. 56 - CE, ass., 16 juillet 2007, Société Tropic travaux Signalisation, n°291545, Rec. p.361. 57 - CE, ass., 20 octobre 1989, Nicolo, Rec. p.190. 58 - R. Chapus, « La bonne administration de la justice », RDP, 2003, p.7. 59 - Arrêt Association AC ! et autres précité. 60 - CE, sect., 6 avril 2007, Commune d’Aix-en-Provence, n°284736, Rec. p.155. 61 - Arrêt Société Tropic Travaux Signalisation précité. 62 - CE, ass. 28 décembre 2009, n°304802, Rec. p.509 et CE, sect., 21 mars 2011, n°304806, à publier au Recueil. 63 - Montesquieu, De l'Esprit des lois, Deuxième partie, Livre XI, chapitre VI : De la constitution d’Angleterre, Genève, 1758. 64 - Voir à ce sujet la remarquable contribution de E. Jouannet, « La motivation ou le mystère de la boîte noire », in H. Ruiz-Fabri, J.-M. Sorel, La motivation des décisions des juridictions internationales, Paris, Pédone, 2008, p.251. 65 - C. Perelman « La motivation des décisions de justice », in Ethique et droit, Bruxelles, Presses Universitaires de Bruxelles, 1990, p.679. 66 - Voir par exemple M. Troper, « La motivation des décisions constitutionnelles » in Ch. Perelman, P. Foriers (dir.), La motivation des décisions de justice, Bruxelles, Bruylant, 1978, p.296 et s. ; E. Jouannet, op. cit., p.266 et s. 67 - Chaïm Perelman a de la motivation une vision très large, qui consiste à la regarder comme une somme d’arguments destinés à persuader un auditoire, plus large que les simples parties, de la justice de la décision et de ses effets (« La motivation des décisions de justice », op. cit).

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

2012-212


Palmarès

25ème Prix Turgot du Meilleur Livre d’Economie Financière Bercy, Paris - 14 mars 2012 Le 25ème Prix Turgot du Meilleur Livre d’Economie Financière 2012, présidé par Jean-Louis Chambon, a été remis le 14 mars dernier à Bercy ; cette édition a connu un rayonnement exceptionnel en raison de la présence de près de 500 personnes. Ce Prix créé en 1994 par l’Association des anciens élèves de l’Institut de Haute Finance a pour but d’encourager les auteurs, de susciter des vocations dans le domaine de l’économie financière, de contribuer à la « pédagogie économique » et de favoriser l’accession d’un public plus large à l’économie financière.

our son premier grand anniversaire (déjà un quart de siècle), le palmarès de ce prix fut proclamé au Ministère de l’Economie et des Finances par Pierre Lellouche, Secrétaire d’Etat au Commerce Extérieur, qui a déclaré que : « … le défi social rattrape l’Economie… et le Prix Turgot, devenu au fil des années le grand rendez-vous annuel de la littérature économique : une contribution essentielle pour le soutien des auteurs et le rayonnement de la pensée économique française et francophone… ». Les lauréats de cette 25ème édition sont JeanMichel Sévérino et Olivier Ray pour leur ouvrage « Le grand basculement - La question sociale à l’échelle mondiale », aux Editions Odile Jacob, dans lequel ils décrivent « le basculement économique du Nord au Sud avec ses conséquences potentiellement dévastatrices pour la planète, si on y prend garde (main d’œuvre à faible coût des pays émergents et crainte de déclassement des pays avancés) ». Les auteurs proposent de mettre en route des mécanismes soutenables par tous pour surmonter les tensions et les risques de ce grand basculement. Le Jury, présidé par Jacques-Henri David, a également décerné :

Photo © Pascal Brunier

P

Antoine Gosset-Grainville, Jean-Gilles Sintès, Jean-Louis Chambon, Pierre Lellouche, Christian Saint-Etienne, Jean-Michel Severino, Olivier Ray et Michel Bon - un prix spécial à André Orléan pour son ouvrage « l’Empire de la valeur », aux Editions du Seuil ; - deux prix d’honneur : à l’économiste Christian Saint-Etienne et au Président de la Caisse des Dépôts et Consignations, Antoine GossetGrainville.

Les trophées remis aux lauréats ont été conçus et réalisés par le Lycée Jean-Monnet d’Yzeure et son Ecole du verre ; Pierre Lellouche a souligné « l’e xcellence de ses réalisations ». Jean-René Tancrède 2012-218

REPÈRES

Le Grand Basculement La question sociale à l’échelle mondiale par Jean-Michel Sévérino et Olivier Ray es co-auteurs, économistes et spécialistes des questions internationales et de l’aide au développement, portent un regard de professionnels sur l’imbrication des problèmes économiques, environnementaux et sociaux auxquels les pays riches et pauvres sont solidairement confrontés, comme en témoigne l’actualité sociale, planétaire, avec les printemps et autres révolutions qui fleurissent partout dans le monde. Dans une synthèse percutante les auteurs indiquent les directions que pourraient prendre une « politique sociale

L

mondiale », susceptibles de résoudre partie des contradictions auxquelles nos sociétés sont confrontées tels que les inégalités, les rapports de classe, les déséquilibres de la mondialisation générateurs d’exclusion, la concurrence exacerbée entre pays riches et pays pauvres. Le Grand Basculement ou « la question sociale globale » propose d’enclencher des mécanismes d’enrichissement durable pour tous en allégeant la charge démographique et écologique de l’humanité, et espérer échapper à un monde de conflit et de violence.

Les co-auteurs, déjà remarqués par leur parution « Le temps de l’Afrique » suggèrent une « issue coopérative » donnant une « réponse politique construite » pour une nouvelle « grande transformation », concept cher à Karl Polanyi, et visant à « l’encastrement de l’Economie dans la société » . Par contraste avec le « dernier homme » de Fukuyama, il s’agit d’inventer le « premier homme » d’une nouvelle ère de l’humanité, bâtisseur d’un filet de sécurité sociale mondiale. Tel est le défi qui est aussi celui de la paix dans le monde. Jean-Louis Chambon

293 pages - 25,90 € - Editions Odile Jacob - www.odilejacob.fr

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

7


Direct

Bilan du Grenelle de l’environnement Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) Avis voté le 15 février 2012

es conclusions du Grenelle de l'environnement intervenues en octobre 2007 se sont traduites par 268 engagements. Elles ont donné lieu à deux lois, dont une de programmation sur laquelle le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a donné un avis, ainsi qu'à d'autres mesures contractuelles ou réglementaires. Plusieurs exercices d'évaluation systématique de la mise en œuvre des engagements du Grenelle ont déjà été menés par le Parlement et le Gouvernement. Le Premier ministre a souhaité le 18 juillet 2011 que le CESE puisse contribuer de manière originale et complémentaire à ces bilans : cela sera fait sous la forme d’un avis. Le CESE se prononce pour une relance du processus qui préserve les acquis du Grenelle et crée les conditions d’un nouveau modèle économique, tourné vers le développement durable. Il devra réduire les inégalités sociales et générer de l’emploi, tout en respectant l’environnement et les ressources naturelles. Le Conseil illustre ce choix par des propositions pour anticiper les ruptures, gérer les transitions, faciliter des choix clairs et efficaces. Pour le CESE, le processus du Grenelle de l’environnement a créé une véritable dynamique en faveur de l’environnement, dans le cadre notamment d’une « gouvernance à cinq » inédite. « Cette « gouvernance à cinq » a favorisé le dialogue, l’appropriation des enjeux et a permis l’e xpression d’une profusion de propositions. Mais le Grenelle reste un processus collectif fragile, qui s’essouffle progressivement et les évolutions récentes font craindre la remise en cause

L

d’engagements emblématiques : nous plaidons donc pour une préservation des acquis du Grenelle et une relance du processus. C’est dans ce sens que vont nos préconisations », ajoute Pierrette Crosemarie, rapporteure de l’avis. Créer les conditions d’une nouvelle dynamique des acteurs, pérenne et productive

Dans son avis, le CESE identifie quatre leviers principaux pour créer les conditions d’une nouvelle dynamique des acteurs, pérenne et productive : la stimulation de la dynamique au niveau national ; la création d’une nouvelle dynamique au niveau territorial notamment en simplifiant les instances consultatives ; le développement des droits environnementaux et ce particulièrement dans le cadre professionnel. « Enfin, nous devons prendre conscience que le développement durable est l’affaire de tous. Au-delà de la notion même d’environnement, c’est celle de développement durable qui doit être intégrée dans l’éducation et la formation dès l’enfance et tout au long de la vie », complète Pierrette Crosemarie. Mieux intégrer les objectifs environnementaux dans la production, la consommation et les comportements de tous les acteurs

« Nous devons changer notre modèle économique pour anticiper les ruptures et gérer les transitions : c’e st la condition sine qua none pour que les objectifs environnementaux soient réellement pris en compte par l’ensemble des acteurs économiques et sociaux de notre pays », ajoute Pierrette Crosemarie. Cela passe notamment pour le CESE par l’encouragement des modes

de production agricoles durables ; le développement de nouvelles filières notamment industrielles ; la gestion dans la durée des transitions du bâtiment en accompagnant les transformations nécessaires ; ou la traçabilité sociale et environnementale des produits et des services. « Nous préconisons également la lutte contre la précarité énergétique des ménages. Cela passe par plusieurs points parmi lesquels le déploiement du programme « Habiter mieux », l’égal accès à tous à l’électricité ou la réalisation d’un plan européen contre la précarité énergétique », détaille Pierrette Crosemarie. Mobiliser les financements et la fiscalité

Pour Pierrette Crosemarie : « Il est indispensable de repenser la fiscalité impactant l’environnement pour donner un second souffle au Grenelle. Les prélèvements et les dépenses fiscales doivent ainsi être réorientés vers une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux. Mais cette réflexion ne peut se faire sans une réflexion sur la fiscalité dans son ensemble, liant efficacité économique, justice fiscale et urgence écologique. A ce titre le CESE peut avoir un rôle important à jouer. » L’avis préconise également la construction d’une fiscalité environnementale économiquement et socialement acceptable, prenant en compte la capacité contributive des contribuables ou la compétitivité des entreprises. Sans oublier la recherche de financements innovants, notamment dans le cadre de la création d’une taxe sur les transactions financières dont le produit pourrait contribuer au fond vert, à la mise en place d’un socle de protection sociale mondial et à l’aide au développement.

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Définir des priorités combinant efficacités environnementale, économique et sociale

8

Pour Pierrette Crosemarie : « La pérennité des engagements pris lors du Grenelle passera aussi par notre capacité à mettre en place des indicateurs de développement durable qui permettent d’évaluer les différentes réalisations. Et au-delà de faire, il est tout aussi important de faire savoir ! ». Parmi les propositions de cet avis, l’amélioration de la relation « santé-environnement » grâce notamment à des mesures plus précises des pollutions ; ou le renforcement du rôle de la société civile dans les stratégies européennes et internationales de la France. « Et là encore, le CESE a un rôle prépondérant à jouer », conclut Pierrette Crosemarie. L’avis a été voté ce jour avec 192 votants, 180 votes pour, 12 abstentions. Source : Communiqué du Conseil économique, social et environnemental du 15 février 2012. 2012-219

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20


Direct

Evolution statistique des mariages et des divorces Baisse des mariages, augmentation des divorces, les tendances observées ces dernières années se confirment. Si elles découlent de nouvelles habitudes de vie, elles accompagnent aussi différentes lois et réformes, comme l’apparition du pacte civil de solidarité ou la facilitation du divorce par consentement mutuel.

QUELQUES CHIFFRES

es dix dernières années, le nombre de mariages célébrés en France a continué de diminuer, comme c'est le cas depuis déjà la fin des années 1970 : il est passé de 295 720 à 241 000 entre 2001 et 2011, selon les données chiffrées de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Entre 2001 et 2010 (données non disponibles pour 2011), le nombre de pactes civils de solidarité (PACS) - entre personnes du même sexe et entre personnes du sexe opposé toutes données confondues - a, lui, bondi de 19 629 (deux ans après son instauration par la loi de novembre 1999) à 205 596. Dans ces chiffres, la proportion des PACS entre personnes de sexe opposé reste largement majoritaire, puisqu'ils sont 16 306 en 2001 et 196 415 en 2010. Au total, les unions entre personnes de sexe opposé - mariage et PACS - ont augmenté sur la période, passant de 312 026 à 448 107, en grande partie grâce à la généralisation du PACS. Pour autant, on ne peut pas en conclure que les couples préfèrent désormais se pacser plutôt que se marier, puisque de nombreux PACS restent des préalables au mariage. Par ailleurs, on se marie aujourd'hui plus tard qu'avant : en moyenne, les hommes convolaient pour la première fois à 30,2 ans en 2001 et à 31,8 ans en 2010. Quant aux femmes, l'âge du premier mariage a également reculé de presque deux années, passant de 28,1 ans en 2001 à 30 ans en 2010.

C

Davantage de divorces, mais des divorces plus apaisés

Globalement, les divorces ont progressé dans le sens inverse de la courbe des mariages et ont augmenté ces dernières années de 12%. Dans une étude réalisée en 2009, le ministère de la

Justice note que 120 000 divorces ont été prononcés en 1996 et 134 000 en 2007. Depuis 2008 cependant, on constate une légère tendance à la baisse des chiffres du divorce (130 601 en 2009 et 133 909 en 2010). Après une relative stabilité les années précédentes, les statistiques avec un pic conjoncturel en 2005 de 155 000 divorces, consécutif à la réforme du 26 mai 2004. Les premières années qui suivent la réforme cumulent en effet des divorces sur des demandes introduites avant 2005 et des divorces plus rapides introduits à partir de 2005. Le phénomène est à peu près stabilisé en 2007 et le niveau de 2010 est le même que celui de 2004 et 2007, environ 134 000 divorces prononcés dans l'année. Cette réforme a notamment considérablement raccourci la durée de la procédure de divorce par consentement mutuel, qui prend désormais trois fois moins de temps (2,5 mois en moyenne). On observe également une redistribution des types de divorces prononcés, sur la même période : d'une part, une forte progression du divorce par consentement mutuel, dont la part oscillait autour de 47 % avant 2005 et qui atteint 54 % en 2010 et d'autre part, au sein des divorces contentieux, une augmentation du divorce accepté (dont la part dans l'ensemble des divorces passe de 13% à 24%), et une forte diminution du divorce pour faute (37% des divorces en 2004 contre 10% en 2010). Source : Communiqué du ministère de la Justice et des Libertés du 17 février 2012. 2012-220

EVOLUTION DES DIVORCES PAR TYPE DE 1996 A 2007

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

9


Jurisprudence

Loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives Conseil constitutionnel - 15 mars 2012 - décision n°2012-649 DC

Saisi de la loi relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives, le Conseil constitutionnel a rejeté les griefs des requérants à l'e xception de celui tiré de l'adoption d'articles, notamment des « cavaliers législatifs », selon une procédure contraire à la Constitution. Parmi les dispositions ainsi censurées, figurent notamment l’article 134 relatif à l’immunité pénale des membres de la Miviludes, l’article 64 relatif à la définition des caractéristiques de l'envoi recommandé, le I de l'article 89 sur l’aliénation des biens ruraux, ou encore le III et le b du 1° du IV de l'article 95 relatif au classement de certains établissements hôteliers et terrains de camping. Le Conseil constitutionnel,

- Sur l’ensemble de la loi :

[…] 1. Considérant que les sénateurs et députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives ; qu’ils mettent en cause le recours à la procédure accélérée, qui aurait porté atteinte à la sincérité et à la clarté des débats parlementaires ; qu’ils considèrent que cette loi méconnaîtrait l’objectif d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi ; qu’ils demandent au Conseil constitutionnel de requalifier comme relevant du domaine réglementaire toutes les dispositions de la loi déférée qui ne relèvent pas du domaine de la loi, et notamment son article 92 ; qu’ils contestent la conformité à la Constitution de son article 45 ; qu’ils mettent enfin en cause, de façon générale, l’absence de lien avec le texte de la proposition de loi des dispositions introduites au cours de la discussion de la loi déférée ; - Sur l’engagement de la procédure accélérée :

5. Considérant que la proposition de loi dont est issue la loi déférée au Conseil constitutionnel comprenait quatre-vingt-quatorze articles organisés selon trois titres ; que le titre Ier, intitulé « Dispositions relatives à la simplification du droit des entreprises », comprenait cinq chapitres, relatifs respectivement à la simplification de la vie statutaire des entreprises, à la vie sociale des entreprises, au soutien au développement des entreprises, à la simplification des procédures, et à la simplification des dispositions relatives à la lutte contre la fraude ; que le titre II, intitulé « Dispositions relatives à la simplification du droit de plusieurs secteurs d’activité déterminés », comprenait sept chapitres, relatifs respectivement à la simplification du droit dans le secteur agricole, à l’assouplissement du régime des professions réglementées et à la simplification du droit des transports, du droit du tourisme, du droit des médias, du droit du logement, de l’aménagement et de la construction ainsi qu’à « diverses dispositions d’ordre ponctuel » ; que le titre III, intitulé « Dispositions diverses », comprenait initialement un seul article ; 6. Considérant que les requérants font valoir que la loi déférée, par la complexité de ses dispositions et leur caractère hétérogène, porte atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi ; 7. Considérant qu’il incombe au législateur d’exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ; que l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, impose au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ; 8. Considérant qu’aucune exigence constitutionnelle n’impose que les dispositions d’un projet ou d’une proposition de loi présentent un objet analogue ; que la complexité de la loi et l’hétérogénéité de ses dispositions ne sauraient, à elles seules, porter atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ; qu’aucune des dispositions de la loi déférée ne méconnaît par elle-même cet objectif ;

2. Considérant que les requérants font valoir qu’en engageant la procédure accélérée, le Gouvernement aurait privé le Parlement, sans que cela soit justifié par aucune urgence, de la possibilité de procéder à plusieurs lectures de la proposition de loi ; qu’aurait ainsi été méconnue l’exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité des débats parlementaires ; 3. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 45 de la Constitution : « Lorsque, par suite d’un désaccord entre les deux assemblées, un projet ou une proposition de loi n’a pu être adopté après deux lectures par chaque assemblée ou, si le Gouvernement a décidé d’engager la procédure accélérée sans que les Conférences des présidents s’y soient conjointement opposées, après une seule lecture par chacune d’entre elles, le Premier ministre ou, pour une proposition de loi, les présidents des deux assemblées agissant conjointement, ont la faculté de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion » ; que cette disposition permet au Gouvernement, postérieurement au dépôt d’un projet ou d’une proposition de loi, de faire part à tout moment de sa décision d’engager la procédure accélérée, dès lors que les Conférences des présidents des deux assemblées sont en mesure, avant le début de l’examen du texte en première lecture, d’exercer la prérogative qui leur est accordée de s’y opposer conjointement ; 4. Considérant qu’aucune disposition constitutionnelle n’impose au Gouvernement de justifier l’engagement de la procédure accélérée ; qu’en l’espèce, cette procédure a été régulièrement engagée ; que son engagement n’a pas eu pour effet d’altérer la clarté et la sincérité du débat parlementaire ; que les exigences constitutionnelles précitées ont été respectées ;

10

- Sur les dispositions dont le caractère législatif est contesté : 9. Considérant que les requérants soutiennent, de façon générale, que la loi déférée comporte des dispositions qui ne relèvent pas du domaine de la loi, au titre desquelles ils visent notamment son article 92 ; qu’ils demandent au Conseil constitutionnel de « requalifier d’office comme relevant du domaine règlementaire » de telles dispositions ; 10. Considérant que, si l’article 34 et le premier alinéa de l’article 37 de la Constitution établissent une séparation entre le domaine de la loi et

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20


Jurisprudence celui du règlement, et si l’article 41 et le deuxième alinéa de l’article 37 organisent les procédures spécifiques permettant au Gouvernement d’assurer la protection du domaine réglementaire contre d’é ventuels empiètements de la loi, la Constitution n’a pas pour autant entendu frapper d’inconstitutionnalité une disposition de nature réglementaire contenue dans une loi ; que, par suite, les requérants ne sauraient se prévaloir de ce que le législateur est intervenu dans le domaine réglementaire pour soutenir que la disposition critiquée serait contraire à la Constitution ou pour demander que soit déclaré son caractère réglementaire ; qu’il s’ensuit que le grief doit être rejeté ; - Sur l’article 45 : 11. Considérant que l’article 45 complète la section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier de la troisième partie du Code du travail par un article L. 3122-6 ainsi rédigé : « La mise en place d’une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail. « Le premier alinéa ne s’applique pas aux salariés à temps partiel » ; 12. Considérant que, selon les requérants, en permettant à une entreprise de moduler la répartition du temps de travail sur l’année sans devoir obtenir l’accord préalable du salarié, ces dispositions porteraient atteinte à la liberté contractuelle ; 13. Considérant que, d’une part, aux termes du huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 : « Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises » ; que, d’autre part, le législateur ne saurait porter aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d’intérêt général suffisant sans méconnaître les exigences résultant des articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ainsi que, s’agissant de la participation des travailleurs à la détermination collective de leurs conditions de travail, du huitième alinéa du Préambule de 1946 ; 14. Considérant qu’il résulte des travaux préparatoires de la loi déférée qu’en permettant que la répartition des horaires de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année ne constitue pas en ellemême une modification du contrat de travail exigeant un accord préalable de chaque salarié, le législateur a entendu conforter les accords collectifs relatifs à la modulation du temps de travail destinés à permettre l’adaptation du temps de travail des salariés aux évolutions des rythmes de production de l’entreprise ; que cette possibilité de répartition des horaires de travail sans obtenir l’accord préalable de chaque salarié est subordonnée à l’existence d’un accord collectif, applicable à l’entreprise, qui permet une telle modulation ; que les salariés à temps incomplet sont expressément exclus de ce dispositif ; qu’il s’ensuit que ces dispositions,

fondées sur un motif d’intérêt général suffisant, ne portent pas à la liberté contractuelle une atteinte contraire à la Constitution ; 15. Considérant que l’article 45 de la loi déférée n’est pas contraire à la Constitution ; - Sur la place d’autres dispositions dans la loi déférée : . En ce qui concerne les dispositions introduites en première lecture : 16. Considérant qu’aux termes de la seconde phrase du premier alinéa de l’article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l’application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis » ; 17. Considérant que l’article 64 crée un nouvel article dans le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du Code des postes et communications électroniques pour définir les caractéristiques du service d’envoi recommandé ; 18. Considérant que l’article 129 institue la reconnaissance légale des unions régionales des associations familiales, prévoit leur mission, leur composition et leur mode de fonctionnement et les fait bénéficier des ressources des unions des associations familiales ; 19. Considérant que l’article 130 autorise le transfert du dernier débit de boissons de quatrième catégorie d’une commune à une autre commune située sur le territoire du même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ; 20. Considérant que l’article 134 institue un régime d’immunité pénale en faveur des membres de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires ; 21. Considérant que ces dispositions, introduites à l’Assemblée nationale en première lecture, ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans la proposition de loi ; que, par suite, elles ont été adoptées selon une procédure contraire à l’article 45 de la Constitution ; . En ce qui concerne les dispositions introduites en nouvelle lecture : 22. Considérant qu’il ressort de l’économie de l’article 45 de la Constitution et notamment de son premier alinéa aux termes duquel : « Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l’adoption d’un texte identique », que les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion ; que, toutefois, ne sont pas soumis à cette dernière obligation les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle ; 23. Considérant que le III de l’article 31 habilite le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les dispositions nécessaires pour modifier et compléter les dispositions régissant l’organisation du secteur de

NOTE ar sa décision n°2012-649 DC du 15 mars 2012, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives dont il avait été saisi par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs. Il a rejeté les griefs des requérants à l'exception de celui tiré de l'adoption d'articles, notamment des « cavaliers législatifs », dans des conditions contraires à la Constitution. En premier lieu, les saisissants mettaient en cause l'engagement de la procédure accélérée pour faire adopter cette loi. Cependant le Conseil constitutionnel a relevé qu'en l'espèce cette procédure avait été régulièrement engagée et que les exigences constitutionnelles applicables avaient été respectées. En deuxième lieu, les saisissants dénonçaient la complexité des dispositions de la loi déférée et leur caractère hétérogène. Le

P

Conseil constitutionnel a, conformément à sa jurisprudence constante, jugé qu'aucune exigence constitutionnelle n'impose que les dispositions d'un projet ou d'une proposition de loi présentent un objet analogue. Il a par ailleurs relevé qu'aucune des dispositions de la loi déférée ne méconnaît par elle-même l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi. En troisième lieu, les saisissants soutenaient que la loi comportait des dispositions de nature règlementaire. Cependant, le Conseil était saisi de la loi déférée dans le cadre de l'article 61 de la Constitution qui n'a pas le même objet que les articles 37 alinéa 2 et 41 de la Constitution. Dans le cadre de l'article 61, les requérants ne peuvent se prévaloir de ce que le législateur est intervenu dans le domaine réglementaire pour soutenir que la disposition

critiquée serait contraire à la Constitution ou pour demander que soit déclaré son caractère réglementaire. Le grief a donc été rejeté. En quatrième lieu, les saisissants critiquaient l'article 45 de la loi qui permet que la répartition des horaires de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année ne constitue pas en ellemême une modification du contrat de travail exigeant un accord préalable de chaque salarié. Le Conseil a relevé que, par cette disposition, le législateur a entendu conforter les accords collectifs relatifs à la modulation du temps de travail destinés à permettre l'adaptation du temps de travail des salariés aux évolutions des rythmes de production de l'entreprise. Cette possibilité de répartition des horaires de travail sans obtenir l'accord préalable de chaque salarié concerné est subordonnée à l'existence d'un

accord collectif applicable à l'entreprise permettant une telle modulation. Le Conseil a jugé que l'article 45 de la loi déférée ne portait pas atteinte à la liberté contractuelle et, par suite, était conforme à la Constitution. Enfin les requérants soutenaient de façon générale que la loi déférée comportait des dispositions adoptées selon une procédure contraire à la Constitution. D'une part, le Conseil a jugé que quatre articles avaient été introduits en première lecture alors qu'ils ne présentaient pas de lien, même indirect, avec la proposition de loi initiale : les articles 64 (définition des caractéristiques de l'envoi recommandé), 129 (reconnaissance légale des unions régionales des associations familiales), 130 (transfert de débits de boissons entre communes membres d'un même EPCI) et 134 (immunité pénale des membres de la MIVILUDES).

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

D'autre part, sept dispositions avaient été introduites après la commission mixte paritaire, en nouvelle lecture, sans présenter de lien direct avec les dispositions restant en discussion : le III de l'article 31 (habilitation du Gouvernement à créer un Code de l'artisanat), le II de l'article 59 (habilitation du Gouvernement à transposer une directive relative à la monnaie électronique) et le III du même article (coopération entre autorités financières françaises et européennes), le 1° du I et le II de l'article 76 (compétences des experts fonciers et agricoles), le I de l'article 89 (aliénation des biens ruraux), le III et le b du 1° du IV de l'article 95 (classement de certains établissements hôteliers et terrains de camping). Ces diverses dispositions, adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, ont été censurées. Source : Conseil constitutionnel

11


Jurisprudence l’artisanat, celles qui sont relatives au statut des entreprises relevant de ce secteur, au régime de la propriété artisanale, à la formation et à la qualification professionnelle, ainsi qu’à la qualité des produits et services, afin de les simplifier, d’adapter leurs procédures à l’évolution des métiers de l’artisanat et, avec les dispositions qui sont particulières à ce même secteur dans les domaines de la fiscalité, du crédit, des aides aux entreprises, du droit du travail et de la protection sociale, de les regrouper et de les organiser en un Code de l’artisanat ; 24. Considérant que le II de l’article 59 habilite le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les dispositions nécessaires à la transposition de la directive 2009/110/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements ainsi que les mesures d’adaptation de la législation liées à cette transposition ; 25. Considérant que le III de l’article 59 modifie le Code monétaire et financier pour adapter les missions de l’Autorité des marchés financiers et de l’Autorité de contrôle prudentiel aux nouvelles obligations de coopération et d’échanges d’informations avec l’Autorité européenne des marchés financiers, l’Autorité bancaire européenne, l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles et le Comité européen du risque systémique ; 26. Considérant que le 1° du I de l’article 76 permet aux experts fonciers et agricoles d’assister le géomètre-expert pour les opérations d’aménagement foncier agricole et forestier ; 27. Considérant que le II de l’article 76 permet aux experts fonciers et agricoles et aux experts forestiers d’évaluer les éléments du patrimoine affectés à l’activité professionnelle par l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée ; 28. Considérant que le I de l’article 89 instaure une nullité de l’aliénation à titre onéreux d’un bien rural réalisée sans que les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural aient été informées de l’intention d’aliéner du propriétaire ; 29. Considérant que le III et le b du 1° du IV de l’article 95 modifient la date à compter de laquelle certains classements antérieurs à la promulgation de la loi du 22 juillet 2009 susvisée cessent de produire

leurs effets, respectivement pour les établissements hôteliers en catégorie cinq étoiles et pour les établissements de camping ; 30. Considérant, en l’espèce, que les amendements dont sont issues les dispositions susmentionnées ont été introduits en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale ; que ces adjonctions n’étaient pas, à ce stade de la procédure, en relation directe avec une disposition restant en discussion ; qu’elles n’étaient pas non plus destinées à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle ; qu’il s’ensuit que le III de l’article 31, le II et le III de l’article 59, le 1° du I et le II de l’article 76, le I de l’article 89 et le III et le b du 1° du IV de l’article 95 ont été adoptés selon une procédure contraire à la Constitution ; 31. Considérant qu’il n’y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d’office aucune autre question de conformité à la Constitution, Décide : Article 1er - Les dispositions suivantes de la loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives sont contraires à la Constitution : - le III de l’article 31 ; - le II et le III de l’article 59 ; - l’article 64 ; - le 1° du I et le II de l’article 76 ; - le I de l’article 89 ; - le III et le b du 1° du IV de l’article 95 ; - l’article 129 ; - l’article 130 ; - l’article 134. Article 2.- L’article 45 de la même loi est conforme à la Constitution. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 15 mars 2012, où siégeaient : Jean-Louis Debré, président, Jacques Barrot, Claire Bazy Malaurie, Guy Canivet, Michel Charasse, Renaud Denoix de Saint Marc, Valéry Giscard d’Estaing, Jacqueline de Guillenchmidt, Hubert Haenel et Pierre Steinmetz. 2012-221

Au fil des pages

La maîtrise de la vie Les procréations médicalement assistées interrogent l’éthique et le droit Sous la direction de Lucette Khaïat et Cécile Marchal

a maîtrise de la vie appartient-elle à Dieu, à l'Etat, au législateur, aux magistrats, aux médecins, à l'individu lui-même, et, lorsqu'il s'agit de donner la vie à un enfant, aux futurs parents ? Le droit qui prescrit des règles applicables à tous peutil se confondre avec l'éthique qui est une réponse individuelle et exigeante à une situation donnée ? Peut-il priver des hommes et des femmes de la liberté de procréer ou d'aider à la procréation ? Le droit peut-il dicter à la médecine les pratiques à suivre ou à proscrire et imposer aux médecins des règles contraires à la déontologie ? Peut-on à la fois dénoncer l'eugénisme, la supposée « recherche de l'enfant parfait » et imposer des critères pour les donneurs et les futurs parents afin de ne retenir que « les parents parfaits » et d'instaurer un « permis de procréer » ? Peut-on définir légalement les « bonnes » familles et les familles

L

12

« nuisibles » à l'enfant : familles monoparentales, couples homosexuels ? Peut-on affirmer que le mariage est le garant de parents au-dessus de tout soupçon ? Les procréations médicalement assistées soulèvent des débats passionnés et leur appréhension par le droit est souvent troublée par les enjeux politiques, sociétaux, religieux qu'elles sous-tendent. L'association Louis Chatin, sous l'impulsion de Lucette Khaïat et Cécile Marchai, a lancé une recherche sur ce thème et réuni les personnalités les plus éminentes dans leur discipline, choisies en raison de leur contact direct avec la réalité des faits, de leur réflexion approfondie et de leur rigueur scientifique. 2012-222 263 pages - 25 € Editions érès - 33, avenue Marcel Dassault - 31500 TOULOUSE www.editions-eres.com

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20


Annonces judiciaires et lĂŠgales

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20

13


Annonces judiciaires et lĂŠgales

14

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20


Annonces judiciaires et lĂŠgales

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20

15


Annonces judiciaires et lĂŠgales

16

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20


Annonces judiciaires et lĂŠgales

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20

17


Annonces judiciaires et lĂŠgales

18

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20


Annonces judiciaires et lĂŠgales

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20

19


Annonces judiciaires et lĂŠgales

20

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20


Annonces judiciaires et lĂŠgales

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20

21


Annonces judiciaires et lĂŠgales

22

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numĂŠro 20


Annonces légales

Direct

Election du Président de la République Liste des candidats arrêtée par le Conseil constitutionnel

e 19 mars 2012, en application de l’article 3 de la loi du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, le Conseil constitutionnel a arrêté la liste des candidats à l’élection présidentielle. A cette fin, il a enregistré et contrôlé les présentations (« parrainages ») reçues entre le 22 février et le 16 mars (à 18 heures) et procédés aux vérifications légales.

L

Conformément à la règle, l’ordre dans lequel apparaissent les noms sur cette liste a été tiré au sort. La liste arrêtée est la suivante :

JRT

SERVICES

Domiciliations commerciales

01 42 60 36 35 jr.tancrede@jrtservices.fr 12, rue Notre-Dame des Victoires 75002 PARIS

- Mme Eva Joly - Mme Marine Le Pen - M. Nicolas Sarkozy - M. Jean-Luc Mélenchon - M. Philippe Poutou - Mme Nathalie Arthaud - M. Jacques Cheminade - M. François Bayrou - M. Nicolas Dupont-Aignan - M. François Hollande En 2007, le nombre des parrainages reçus s’est élevé à 16 900. En 2012, le nombre de parrainages reçus s’élève à 15 047. C’est le Conseil constitutionnel qui contrôle la validité des parrainages. Les parrainages doivent parvenir au Conseil à partir de la publication du décret convoquant les électeurs (soit le 24 février 2012) et jusqu’au sixième vendredi précédent le premier tour (soit le 16 mars) à dix huit heures. Chaque formulaire de parrainage est donc examiné par le Conseil constitutionnel. Sur les 15 047 formulaires reçus en 2012, seulement 1,7 % ont été écartés comme non valides (absence de signature, défaut de candidat présenté, présentation effectuée sur un support autre que le formulaire arrêté par le Conseil

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

constitutionnel, présentation déjà reçue par le Conseil…). Cette proportion est légèrement supérieure à celle observée en 2007.

Le Conseil constitutionnel vérifie par ailleurs que les personnes valablement présentées remplissent les conditions légales pour être éligibles : - Être électeur - Avoir 18 ans révolus - Ne pas être privé de ses droits d’éligibilité par une décision de justice - Être en règle avec les obligations imposées par la loi instituant le service national Le Conseil constitutionnel doit également recueillir le consentement écrit de l’intéressé à être candidat. Enfin, chaque candidat doit remettre sous pli scellé une déclaration de situation patrimoniale (qui sera ouverte et publiée s’il est élu et lui sera retournée dans le cas contraire), ainsi que l’engagement de déposer, s’il est élu, une nouvelle déclaration de patrimoine à l’issue du mandat, laquelle sera également publiée.

2012-223

23


Décoration

Claude Cazes, Officier de la Légion d’Honneur Paris, Hôtel de Bourvallais - 14 mars 2012

ans la plus stricte intimité, le Garde des Sceaux a remis, dans son bureau de la Place Vendôme, les insignes d’Officier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur, à Claude Cazes ; il s’est exprimé en ces termes mercredi dernier : Je suis ravi que nous soyons réunis pour honorer le parcours et la carrière exemplaire de Claude Cazes. Je salue la présence du cercle des proches, d'amis et de partenaires professionnels, à vos côtés aujourd'hui pour cette cérémonie, je sais leur émotion et la vôtre au moment de vous remettre ces insignes d'officier de la Légion d'honneur. La présence du cercle des intimes confère à cette cérémonie toute sa dimension. Chacun ici vous connaît bien, nous avons eu pour notre part l'occasion de nous rencontrer et d'échanger sur les problématiques des professions du chiffre. Les mois qui viennent de s'écouler ont été particulièrement riches en effet, et nous avons établi un dialogue constructif qui a permis de progresser dans la voie des réformes. A l'heure de vous remettre ces insignes, je voudrais évoquer votre parcours bien sûr, puis votre action depuis 2009 à la présidence de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes. Diplômé de la faculté de droit et de sciences économiques de Montpellier, puis de l'Ecole supérieure de commerce de Reims, vous embrassez dès la fin de vos études la profession d'expert-comptable et de commissaire aux comptes. A vingt-huit ans, vous fondez votre propre cabinet, qui comprend aujourd'hui une trentaine de collaborateurs. C'est dire le dynamisme de cette structure. Intervenant auprès des PME, vous concevez le commissariat aux comptes comme une mission de terrain et de proximité. Fort de votre expérience, vous vous investissez depuis vingt ans déjà au sein des instances professionnelles. Au sein de l'« Institut Français des Experts Comptables », tout d'abord, syndicat professionnel dont vous deviendrez le président national de 1996 à 1999. Reconnu par vos pairs pour votre compétence et votre professionnalisme, vous serez rapidement porté à de hautes responsabilités au sein des instances régionales comme nationales de représentation des experts-comptables et des commissaires aux comptes. Vous accéderez en 2001 à la présidence du Conseil National de l'Ordre des Experts Comptables puis en 2009 à celle de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes. Vous faites à cet égard, avec votre éminent prédécesseur René Ricol, figure d'e xception. Dès votre premier mandat, en 2009, à la présidence de la Compagnie Nationale vous avez

24

D.R.

D

Michel Mercier et Claude Cazes exprimé votre volonté de modernisation et d'adaptation de la profession. Conscient que dans ce contexte de crise économique, il convenait de renforcer le rôle des commissaires aux comptes, et d'adapter leur intervention afin de répondre à la demande accrue de sécurisation financière. Vous accédez à la présidence de la Compagnie nationale alors que la profession vient de connaître de grands changements liés à la transposition de la 8ème directive sur l'audit de 2006. Vous vous consacrerez à achever cette mutation. Résolument engagé dans l'action, vous avez aussi à cœur (selon vos propres termes) de « mieux contribuer aux réflexions sur la régulation économique ». Cette contribution des commissaires aux comptes est tout à fait essentielle pour faire face aux enjeux de cette régulation. Votre expertise, votre connaissance du terrain sont un atout pour définir les solutions opérationnelles. Vous savez la nécessité d'apporter des réponses adaptées à la réalité économique, ainsi qu'aux besoins des entreprises. La norme Petite entreprise par exemple a permis de mieux prendre en compte les problématiques de ces entités, en simplifiant l'approche tout en garantissant la sécurité de leur information financière et comptable. Vous avez eu à cœur de moderniser les formations tant des experts-comptables que des commissaires aux comptes. Ces réformes vous les avez menées avec beaucoup d'intelligence, nourri de cette fine connaissance des professions du chiffre et leurs problématiques actuelles. Vous participez activement à la rédaction des textes en ce domaine, la prochaine publication du décret relatif à la formation des commissaires aux comptes est un aboutissement que vous attendiez.

Car vous savez qu'une formation de haut niveau, qui intègre les dimensions internationales et des nouveaux systèmes d'information, garantira la qualité d'intervention de ces professionnels, renforçant la confiance à l'égard de l'audit et de la comptabilité. Vous avez œuvré également au renforcement des normes de la profession. Je veux enfin saluer la collaboration fructueuse entre votre Compagnie et le Haut Conseil du Commissariat aux Comptes. Nous disposons en effet avec le H3C d'un système de surveillance remarquable, qui est une garantie de confiance. Dans chacune de vos fonctions, vous avez veillé à la modernisation et à l'amélioration des pratiques de la profession. Vous avez, par votre détermination, renforcé l'attractivité des missions d'audit et d'expertise comptable. Je sais qu'à l'heure où sont discutées les propositions de la Commission européenne, vous exercerez votre vigilance pour promouvoir la qualité de l'audit et le modèle d'indépendance qui est celui de votre profession. Le parcours professionnel de Claude Cazes est exemplaire, il reflète la clairvoyance et l’intelligence d’un homme d’actions et de convictions. Il était légitime que la République mette à nouveau en lumière les qualités intrinsèques de cet homme loyal, éminent représentant du monde du chiffre, apprécié et reconnu par ses pairs. Nous présentons nos chaleureuses et amicales félicitations à celui qui sait, avec discernement et lucidité, défendre les intérêts d’une profession proche des chefs d’entreprises, le dynamisme de ces acteurs économiques contribuant à la compétitivité de la France. Jean-René Tancrède

Les Annonces de la Seine - lundi 19 mars 2012 - numéro 20

2012-224


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.