LES ANNONCES DE LA SEINE Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35
Lundi 1er juillet 2013 - Numéro 41 - 1,15 Euro - 94e année
Barreau d’Aix-en-Provence
Séance Solennelle de Rentrée - 28 juin 2013 Charles Reinaud, Raphaëlle Mahé des Portes, Catherine Jonathan-Duplaa, Josianne Chaillol, Olivia Lischetti et Laure Laydevant
RENTRÉE SOLENNELLE
La parole judiciaire
2 par Raphaëlle Mahé des Portes et Charles Reinaud ................................ 5 par Catherine Jonathan-Duplaa ..............................................................
La communauté réduite au métier
JURISPRUDENCE
Le mandat d’intérêt commun avocat-client : libre choix du client et sécurité des sociétés........................ 10
AGENDA ...................................................................................... 11 VIE DU CHIFFRE
Centre d’Information sur la Prévention des difficultés des entreprises (CIP) ........................................ 12
AU
FIL DES PAGES
La France en miettes par Philippe Bilger ..................................... 12
CHRONIQUE
Quitter l’Euro ? par Paul N. Goldschmidt ....................................... 13
EUROPE
La Croatie devient le 28ème Etat membre ................................ 14
VIE
DU DROIT
Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière Projet de décret du Code de justice administratif .............. 15
DÉCORATION
Henri Leclerc, Commandeur de la Légion d’honneur ............ 24
’est au Pavillon Noir, avenue Mozart à Aixen-Provence, que s’est déroulée vendredi dernier la séance solennelle de Rentrée du Jeune Barreau aixois sous la Présidence de Catherine Jonathan-Duplaa qui accueillait, avec son Dauphin Josianne Chaillol, les personnalités civiles et élues ainsi que les Bâtonniers des grands Barreaux de France au premier rang desquels Christian Charrière-Bournazel et Jean-Luc Forget. Pour la Bâtonnière Catherine Jonathan-Duplaa, qui a placé l’oralité des débats au cœur de son discours d’usage, il appartient aux avocats de porter « aide et assistance » à la parole judiciaire et de combattre cette « politique de la parole qui prétend abolir les mots au prétexte que leur poids ne justifie plus leur prix ». S’adressant à ses jeunes confrères, elle leur a demandé de réfléchir aux nouveaux droits émergents et aux nouvelles perspectives qui s’ouvrent à la profession d’avocat : « ne restez pas dans les sentiers battus, ne prenez pas le risque de raccourcir l’avenir » car demain l’avocat devra apporter aux citoyens « les réponses argumentées et adaptées à leurs nouveaux besoins en droit ». Elle a également évoqué le financement de l’accès au droit ainsi que le projet de loi contre la fraude
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fiscale et la grande délinquance économique et financière qui est « inacceptable en ce qu’il porte atteinte aux libertés fondamentales, aux principes essentiels de la profession d’avocat et jette la suspicion sur le rôle des CARPA dans la prévention du blanchiment de capitaux », avant de laisser la parole à Raphaëlle Mahé des Portes et Charles Reinaud, respectivement 1 ère et 2 ème Secrétaires de la Conférence, qui se sont livrés, avec talent, à un exercice de joute oratoire intitulé : « La communauté réduite au métier ». Les prix décernés aux premier et deuxième secrétaires 2013 ont été remis successivement par le Président du Conseil National des Barreaux et le Président de la Conférence des Bâtonniers. Quant au prix Sauteron de Séranon, il a été remis à Olivia Lischetti par Guylaine Sèze, le prix Benjamin Abram a été remis par Andrée Minguet à Laure Laydevant ; nous félicitons chaleureusement ces jeunes talents. Sous forme d’un sketche savamment orchestré, Rahaëlle Mahé des Portes et Charles Reinaud ont décrit avec génie et provocation la vie des couples en ce début de troisième millénaire : comment être à la fois époux, amis, parents et avocats ? Jean-René Tancrède
J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne
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Catherine Jonathan-Duplaa
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Rentrée solennelle
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Didier Chotard Frédéric Bonaventura
Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 13 734 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS
2012
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Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas
Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.
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La parole judiciaire par Catherine Jonathan-Duplaa (...) otre présence apporte à mes jeunes Confrères le privilège d’une audience prestigieuse et le meilleur des encouragements. La séance solennelle est une des manifestations à laquelle le Barreau est très attaché. Elle marque le lien entre les générations, en conjuguant le passé, le présent et le futur. Cette cérémonie célèbre nos idéaux de confraternité, de respect des partenaires de justice, de solidarité avec la société civile. Elle met en lumière, et dans la lumière, les talents, les tempéraments de demain. Le concours de la Conférence est une épreuve d’éloquence difficile. Nos jeunes Avocats étaient nombreux à l’affronter avec brio. Deux d’entre eux se sont distingués. Mes Chers et Jeunes Confrères, vous avez été élus brillamment, votre maîtrise de la rhétorique et votre créativité ont séduit le jury présidé par Monsieur Jean-Louis Debré, Président du Conseil Constitutionnel. Ce jour est votre fête. En vous fêtant, nous exprimons aussi notre reconnaissance à toutes les robes noires aixoises qui, au travers des âges, par leurs qualités morales et intellectuelles ont fait de notre Cher Barreau, un Barreau de renom. Pour célébrer nos jeunes talents, il m’a plu de nous voir réunis, au cœur de cette audacieuse architecture qui arbore la couleur de notre robe. En effet, cette séance solennelle se tient dans un lieu inédit, le Pavillon Noir, sanctuaire de la danse contemporaine dirigé par Angelin Preljocaj, ce brillant sculpteur de corps, défenseur des valeurs humanistes qui font honneur à la double vocation artistique et judicaire de notre ville. Sans forcer l’analogie, j’aime à penser que les univers de la Danse et de la Défense se rejoignent lorsqu’il s’agit de conjuguer classicisme et modernité, hardiesse et élégance, discipline et exigence.
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Le danseur et l’avocat mesurent tous deux la vérité de leur art dans le miroir sans concession de leur audience et, osons le clin d’œil, éprouvent et améliorent jour après jour leurs techniques à la barre. Pourquoi cette infidélité à la salle des Pas Perdus du Palais Verdun, à ses colonnes rassurantes, à sa verrière restaurée qui éclaire et abrite nos destinées depuis plusieurs siècles ? Il ne saurait s’agir d’un abandon, mais du témoignage que, fort de son histoire et résolument tourné vers l’avenir, le Barreau est présent dans la vie de la cité en tous ses hauts lieux. Depuis toujours, mon Barreau entretient des relations de qualité avec ses Chefs de juridiction, basées sur le respect de l’exercice professionnel de chacun. Madame la Première Présidente, Le 1er janvier 2012, l’entrée en vigueur de la réforme de la procédure d’appel, la fusion de la profession d’avoué avec celle d’avocat, l’instauration de la communication par voie électronique devant les Cours d’appels dans la procédure avec représentation obligatoire, ont profondément modifiés nos pratiques. Il nous a fallu informer, rassurer, répondre aux inquiétudes légitimes suscitées par un tel bouleversement, communiquer sans relâche, convaincre la levée des réticences. Nous avons mené sur tous ces sujets, et bien d’autres, faisant polémique, une collaboration constructive, dans une relation de confiance. Je vous remercie pour la qualité de votre écoute des avocats, le respect que vous avez de notre exercice, et votre volonté de concertation avec le Barreau. Monsieur le Procureur Général, Je tiens à souligner la qualité de nos échanges, francs et loyaux. Nos relations sont empreintes de respect. Vos interventions au Conseil de l’Ordre sont toujours appréciées. Le Barreau d’Aix en Provence est associé à l’expérimentation menée sur le développement de la communication électronique en matière pénale. Vous savez tout l’intérêt que je porte à la poursuite de nos démarches communes.
Les Annonces de la Seine - lundi 1er juillet 2013 - numéro 41
Rentrée solennelle Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance, Un dialogue ouvert est le ciment de nos bonnes relations. Nous avons travaillé, en véritables partenaires de justice, sur de nombreux dossiers et nous continuerons. Votre écoute et votre réactivité ont permis de solutionner nombre de problèmes malgré un manque de moyens toujours plus grand et la situation immobilière catastrophique de notre Tribunal. Une lueur d’espoir toutefois, la reconstruction en cours du Tribunal qui devrait, enfin, voir le jour à l’aube de 2017, après 30 ans de promesses et d’attente.
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Madame le Procureur de la République, Nos réunions de travail, entre Avocats et représentants du Parquet, où nous abordons, en toute liberté, les problématiques rencontrées au quotidien, sont utiles. Nous partageons, je crois, la volonté d’assurer leur pérennité et de poursuivre de telles initiatives. Les difficultés attachées au relogement provisoire du pôle pénal et leurs incidences sur l’exercice de mes Confrères ont occupé bon nombre de nos discussions. Nos avis, parfois, divergent, sur la circulation des avocats dans le Palais, que je souhaite libre, la place qui nous est réservée, mais du dialogue naissent des solutions. Riche de son passé et de ses espérances, mon Barreau est surtout riche des femmes et des hommes qui le composent. Avec émotion et reconnaissance, je remercie mes Confrères pour la confiance qu’ils m’ont témoignée en me portant à la tête de ce beau Barreau. Avec gratitude, je remercie le Bâtonnier désigné, les anciens Bâtonniers, le Conseil de l’Ordre, les administrateurs de la CARPA, pour leur dévouement, leur investissement et le soutien qu’ils m’apportent. (...)
Mes Jeunes Confrères, je reviens à vous, pour vous féliciter chaleureusement et vous dire que le Barreau est fier de vos talents, dont je n’ai jamais douté. Héritiers d’une grande lignée, forte de sa déontologie, vous débutez votre exercice au XXIème siècle. A l’aube de ce nouveau siècle, de nombreux défis, à relever, sont au cœur même de notre exercice professionnel. Attachez-vous à préserver ce que vous avez reçu en héritage, à construire votre avenir en regardant vers de nouveaux horizons. Il vous faudra faire preuve de modernité pour défendre, avec conviction, ce que la Profession vous a transmis de plus noble, de plus consubstantiel, je vous parle de l’oralité. C’est la parole judiciaire qui aujourd’hui a besoin de votre aide et assistance. Mise à mal, silencieuse car bâillonnée au prétexte d’une justice surchargée et dépourvue, c’est le justiciable qui ne peut se faire entendre. C’est parce qu’il a des devoirs particuliers que l’avocat a des droits, notamment le droit de plaider sous le seul contrôle de sa conscience et de sa dignité (Voir encadré ci-contre). Vous combattrez cette politique de la parole qui prétend abolir les mots au prétexte que leur poids ne justifie plus leur prix. La parole judiciaire n’est pas virtuelle, elle est un acte de fabrication du réel, accompli en conscience, en responsabilité, avec la gravité qui lui sied de part et d’autre de la barre, un acte de communication et de compréhension entre les hommes. Cependant, il faudra, vous-même, être convaincus que la plaidoirie du XXIème siècle doit s’affranchir du formalisme archaïque et viser l’essentiel, c’est-à-dire moins l’ego du plaideur que l’efficacité du propos, pour répondre au mieux aux intérêts du justiciable. Mes Chers et Jeunes Confrères, vous êtes les acteurs du renouveau du discours vivant, de la
Marc Bollet, Jean-Luc Forget et Christian Charrière-Bournazel.
Vers la disparition de la plaidoirie? Ce droit de plaider, exprimé par la bâtonnière, reprend et fait écho au 5ème rapport exposé le 5 avril à Rennes à l’Assemblée générale de la Conférence des bâtonniers par Madame Laissue-Stravopodis, Secrétaire générale adjointe de la Conférence des bâtonniers, et de Monsieur le bâtonnier Yves Mahiu, membre du barreau. Ils ont fait état du mécontentement et de l’irritation des avocats devant la disparition de la plaidoirie, contrairement aux dispositions de l’article 779 du Code de procédure civile en son paragraphe 3. Le dépôt du dossier n’est qu’une possibilité et non un droit des magistrats. Le bâtonnier Pascal Eydoux, ancien Président de la Conférence, l’a rappelé judicieusement. La question ne se pose que devant les juridictions où la représentation est obligatoire. A. Coriolis L’article 779 §3 du Code de procédure civile stipule que : « Le président ou le juge de la mise en état, s'il a reçu délégation à cet effet, peut également, à la demande des avocats, et après accord, le cas échéant, du ministère public, autoriser le dépôt des dossiers au greffe de la chambre à une date qu'il fixe, quand il lui apparaît que l'affaire ne requiert pas de plaidoiries ».
discussion contradictoire adaptée aux exigences de notre temps. L’Avocat est le défenseur naturel de l’oralité. Pourquoi alors, très souvent, abandonne-t-il celle dont il porte haut les intérêts à la porte du prétoire ? L’Avocat doit investir, maintenant et pour demain, les procédures qui redorent le blason de celle qu’il défend. Je veux parler des procédures alternatives, solution moderne de traitement des conflits : médiation, arbitrage, procédure participative… L’oralité est au cœur de ces procédures. L’Avocat, professionnel de la parole juridique, y a un rôle essentiel à tenir puisqu’il lui revient de poser le diagnostic de l’opportunité d’une telle procédure, d’en expliquer les raisons au client, d’aider ce dernier à prendre la décision d’y recourir ou non. Il ne fait nul doute que l’intervention de l’Avocat, dans ses procédures, est une nécessité non contestée car le client a les mêmes besoins de conseil, d’aide et d’assistance que dans une procédure juridictionnelle. Nos valeurs, consacrées par notre serment, notre savoir-faire sont des atouts essentiels. Nos compétences juridiques sont indispensables dans la rédaction de la solution acceptée. Des réflexions sont actuellement menées sur les juridictions du XXIème siècle et au cœur de celles-ci, l’accès au droit, le rôle du juge, l’organisation judiciaire et processuelle. Que seront ces juridictions ? Y aura-t-il transfert de charges du juge sur d’autres professionnels du droit ou des structures ? Un préalable obligatoire des procédures alternatives à l’action judiciaire sera-t-il imposé ?
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Rentrée solennelle
Je n’en parlerai donc pas mais je dis : Qu’écarter l’avocat de la saisine directe en la confiant aux associations de consommateurs, c’est prendre le risque d’une justice à la merci des lobbies.
Remise du prix du 1er Lauréat de la Conférence du Stage par Christian Charrière-Bournazel à Raphaëlle Mahé des Portes
En tout état de cause, l’office de ce nouveau juge aura immanquablement un impact sur le rôle, la place, l’intervention de l’Avocat, la représentation et d’assistance devant ces nouvelles juridictions. Mes Chers Confrères, que de bouleversements, de mutations en perspective. Nous devons, pour les garanties du citoyen, défendre avec force notre fonction première d’assistance et de défense, mais l’avenir commande, aussi, de réfléchir à un redéploiement de nos interventions, de nos missions. Par ailleurs, de nouveaux droits émergent et donc de nouvelles perspectives s’ouvrent à nous.
pour rendre transparents d’éventuelles influences ou liens jugés dangereux n’est pas contestée, ni contestable. Par son éthique et sa déontologie qui mieux que l’Avocat peut identifier tout risque de conflit d’intérêt ? L’histoire politique de notre pays démontre que l’exercice engagé de la profession a servi et non desservi, et que l’on peut faire acte de politique et s’y comporter en avocat. Le méconnaître serait faire offense à nos anciens : Cambacérès, Portalis, Ferry, Gambetta, Mendès France, Badinter, Waldeck Rousseau, tous avocats, et reviendrait à renier ce qu’ils ont apporté à la
Je n’en parlerai donc pas mais je dis : Que l’idée de financer le développement de l’accès au droit en faisant peser sur l’avocat, et sur lui seul, une taxe sur son chiffre d’affaire est une mauvaise idée. La solidarité nationale ne peut s’entendre d’un financement supporté par une seule profession, celle-là même sur laquelle repose le système de l’accès au droit, qui contribue et participe au service public de la justice en assurant des missions de service public. Tel est le sens de la motion votée le 21 juin 2013 en Assemblée Générale de la Conférence des Bâtonniers. Nous serons attentifs à ce qui se dira lors du colloque organisé, le 10 juillet prochain, par le Haut Conseil Des Professions du Droit sur l’accès au droit. Je n’en parlerai donc pas mais je dis : Que le projet de loi contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière est inacceptable en ce qu’il porte atteinte aux libertés fondamentales, aux principes essentiels de la Profession et jette la suspicion sur le rôle des CARPA dans la prévention du blanchiment de capitaux. Voilà, j’en ai assez dit. Face à toutes ces provocations, la Profession a réagi dans l’unité et il me plait de penser que c’est cette unité qui fait notre force. (...)
Je crois de mon devoir de vous dire, Mes Chers et Jeunes Confrères : ne restez pas dans les sentiers battus, ne prenez pas le risque de raccourcir l’avenir. Par une formation d’excellence, l’Avocat apportera au citoyen les réponses argumentées et adaptées à ses nouveaux besoins en droit. Citoyen, un grand mot, un mot jamais assez grand. Avocat-Citoyenne, je ne pensais pas, un jour, à avoir à rappeler que l’avocat n’est pas moins citoyen qu’un autre. Flotte autour de l’avocat un effluve délétère de suspicion, de défiance institutionnelle. Beaucoup se sont déjà exprimés et il y aura encore beaucoup d’occasions d’en parler. Je n’en parlerai donc pas mais je dis : Quelles que soient les suites réservées à ces propositions et projets de loi, amendés, sousamendés, abandonnés ou votés, l’Avocat a été pris à partie, parce qu’il est Avocat, et une telle cascade de stigmatisations est dommageable pour la démocratie et fait injure aux principes de notre serment. Je n’en parlerai donc pas mais je dis : Avoir pensé à fermer, à l’Avocat, ce lieu de démocratie qu’est le Parlement est une discrimination institutionnelle. La nécessité de surveiller les conflits d’intérêts
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Remise du prix du 2ème Lauréat de la Conférence du Stage par Jean-Luc Forget à Charles Reinaud
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Nation pour la faire progresser, et pour la relever y compris dans les périodes sombres que notre pays a connues. C’est à eux que la France doit ses plus grandes réformes sociétales.
Rentrée solennelle
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Raphaëlle Mahé des Portes
La communauté réduite au métier par Raphaëlle Mahé des Portes et Charles Reinaud Raphaëllle Mahé Des Portes : Mes chers amis !! Je ne sais pas ce qui se passe… Charles devait ouvrir cette session avec moi. Comme vous pouvez le constater il n’est pas là. Non ?? Et me voilà bien dans l’embarras… Vous me direz, ce n’est pas la première fois que je me retrouve toute seule alors qu’on devait être deux … Même pour notre mariage, il est arrivé en retard ! Une soi-disant affaire de proxénétisme qui ne pouvait pas attendre. Et moi, devant le Maire, plantée comme je le suis ici, la seule différence c’est la couleur de la robe. Ah j’avais l’air maligne ! De toutes façons, quand ce ne sont pas les proxénètes qui ont besoin de lui, c’est la garde à vue des braqueurs qui s’est prolongée, une visite au parloir qui s’est éternisée, le rendezvous avec le confrère qui n’en finissait pas ou l’audience correctionnelle qui s’est achevée à 2 heures du matin ! Notre vie est rythmée par les obligations de Monsieur le Grand Pénaliste comme si la paaaaauvre civiliste que je suis n'avait pas de contraintes !!! Ah c’est sûr c’est moins prestigieux : ça fait moins rêver, ce n’est pas moi qui fais les gros titres de la Provence ou qui réponds aux interviews. Ah c’est sûr, dans les dîners en ville, c’est de la rubrique des faits divers dont on parle, et c’est Monsieur le Grand Pénaliste qui pérore et qui parade.
Ah c’est sûr, le public est suspendu à ses lèvres et d’ailleurs, Monsieur ne mégote pas les effets de manche… comme s’il était au prétoire ! Et moi me direz-vous ?? Quelle attitude j’adopte durant ce one man show ? Et bien je ris consciencieusement, la bonne épouse que voilà ! C’est évident, ce n’est pas moi qui vais faire l’affiche. Mes dossiers de divorce, de vasistas qui donne sur la salle de bain du voisin, de bornage et de servitude, tout le monde s’en moque. Et quand des propriétaires s'empaillent pour une histoire d’arbres mal taillés, micros et cameras ne m’attendent pas à la sortie du T.G.I. Toujours est-il qu’heureusement que je suis là pour faire face aux factures en attendant que Maître Reinaud ne devienne le Dupont-Moretti aixois ! C’est injuste ? Mais Nooooooon. On appelle ça la répartition équitable des charges dans un couple, dans un couple d’avocats pour ne rien simplifier. Moi la souris grise, lui l’aigle noir. Moi l’ombre, lui la lumiere. Moi le sandwich à la va vite, lui les Agapes D’après Assises. Moi la Vittel et lui le Champagne. (Sonnerie sms) Ah, excusez-moi. Ah, c'est lui justement : « J’arrive ma chérie ! ». Ahaha, ce message là, je le connais par cœur. Il fait partie de ses sms préprogrammés… Ce n'est pas à moi que Maître Reinaud cite du Racine ou du Céline. Non… Tout cela, c'est pour les jurés des Assises. Moi j'ai droit à un « J’arrive ma chérie » : 3 mots ! Non mais quel cirque ! Là je sais ce qu’il va me dire. Il va arriver en courant l’air faussement affairé et il va dire :
- Prétexte A : Excuse-moi, j’ai été appelé pour une garde à vue. - Prétexte B : Excuse-moi, l’audience vient de se terminer. - Prétexte C : Excuse-moi, j’étais à l’instruction. Allez, ce soir je parie sur le B ! Charles Reinaud : Je suis un peu en retard, je vois que nos invités sont arrivés. Ma délicieuse épouse a dû vous accueillir comme il convient. Veuillez excuser mon retard, une audience correctionnelle toute à la fois passionnante et vibrante mais qui, de ce fait, empiète sur mes obligations d’hôte. Vous avez bien fait de commencer sans moi. RMDP : Ça c’est sûr ! De toute façon, si on devait t’attendre on ne ferait jamais rien. CR : Ah mais Madame, c’est qu’on ne mégote pas avec la défense des libertés ! Lorsque j’assure la défense d’un prévenu, je me donne à 100 % ! Les contingences d’horaires, de dîners ou de retrouvailles avec les amis passent au second plan. RMDP : Oui mais, Charles … CR : Attends que je te raconte et imagine la scène … Il est aux alentours de 20h00, la salle est pleine, oui le juge Galli n'a entendu que 2 dossiers depuis 14 heures. Mais l’huissier a fini par appeler mon dossier avant de procéder à une suspension et de renvoyer toutes les affaires du rôle. Ce dossier, une comparution immédiate que j'avais pu longuement préparer dans l'aprèsmidi, concernait un brave homme qui était poursuivi pour conduite sous l'empire de l'alcool en récidive.
Les Annonces de la Seine - lundi 1er juillet 2013 - numéro 41
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Rentrée solennelle Rends-toi compte, le procureur a requis deux ans fermes ! Tu me connais : j’ai pris à bras le corps la vie misérable de ce pauvre homme et je me suis lancé dans une Plaidoirie fleuve. J’ai dénoncé toute l’inutilité de la peine de prison et à l’instar de mes maîtres à penser, j’ai pourfendu de mon mieux la sévérité du ministère public. RMDP : Et le résultat ? CR : 5 ans fermes ! Et toi, quelle expérience peux-tu nous apporter de cette journée d'avocature ? RMDP : Ah écoute, je n’ai pas arrêté ! Chambre de la famille à la Cour à 8 heures 20, Juge aux affaires familiales à 9heures à Pratési, Tribunal d’Instance à 9 heures 30 pour deux dépôts. Et puis cet après-midi, j’étais au cabinet, ah oui, j’ai demandé le rabat d’une ordonnance de clôture et j'ai fait partir des conclusions au fond par RPVA. CR : Clôture, dépôt, RPVA ….. Mais c’est ça qu’est devenu le métier ? Vous avez tué la parole et déchiré votre robe trop tôt! Finalement, ce ne sont pas les avoués qui sont devenus avocats mais nous qui sommes devenus avoués !! Ah Raphaëlle, rappelle-toi le beau temps des mises en état dans le cabinet du juge. Qu’est devenu ce moment de partage du dossier, d'explication et de compréhension, suivis généralement de café post-audience avec les confrères ? Vous les civilistes avez abdiqué votre verve au profit de la Technologie. Et vous voilà aujourd’hui dans le stress quotidien, face à un écran informatique, à des messages automatisés, pressés par des délais pour conclure : 3 mois, 2 mois… Vous avez transformé cette profession en asile de névrosés !
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RMDP : Rooooh il faut toujours que tu exagères ! Toi tu crois encore que la profession se pratique comme au XIXème siècle ! Mais enfin, c’est fini le temps des conclusions
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Josianne Chaillol
manuscrites, le temps des sténodactylos, de la bonne vieille Remington, du dossier papier de trois tonnes qui prenait la poussière dans un coin du cabinet ! La modernité ne nous a pas affaiblis, elle nous a renforcés et nous a permis d’être beaucoup plus efficaces. Puis chez nous, le travail ne se fait pas uniquement lors de la plaidoirie mais bien en amont de l’audience : en étudiant le dossier, en sortant des axes, en rédigeant plusieurs jeux de conclusions et en recherchant des jurisprudences. Crois-moi, ça n’est pas moins noble, je n’ai pas l’impression d’exercer une profession de grattepapier ou de gratte-clavier, comme tu dirais !! Ah c’est sûr que dans l’imaginaire collectif, l’avocat fait des grands moulinets et renvoie son épitoge par-dessus son épaule pour ponctuer sa tirade. Mais il n’y a que les pénalistes qui correspondent à cette image d’Epinal ! Entre vos poses et vos mimiques : Et je me prends le menton, et je me passe la main dans les cheveux, et je hausse les sourcils, je les fronce... On ne sait plus si c’est au Théâtre ou au Tribunal que l’on est !! D’ailleurs, quand vous vous aventurez au civil, ça nous fait bien rire de vous voir vous enflammer démesurément pour une simple histoire de bornage.
Les gouvernants vont jusqu'à malmener notre serment et nous réduire à cette spécialité. Ainsi la politique serait immorale lorsqu'elle est confiée à des avocats dits « d'affaire ». Notre robe changerait de couleur au gré des spécialités, et un « racisme intellectuel » nous interdirait de participer à la vie de la cité. Et pour ne rien arranger, on délire, on devient schizophrène : on veut à la fois s’ultra-spécialiser et avaler toutes les professions qui gravitent autour de nous. Tout ça pour créer la Grande Profession du Droit. Demain, après avoir fait disparaître le notaire et l’huissier, nous ne dirons plus « je suis avocat » mais « je suis spécialiste de la délivrance d’assignations ». RMDP : Oui oui, tu as peut être raison, c’est compliqué pour les novices de s’y retrouver làdedans et de savoir qui fait quoi. Mais crois-moi, lorsqu’ils souhaitent divorcer ou attaquer leur voisin parce qu’il a annexé une partie de champ, ils comprennent tout de suite vers qui il faut se tourner ! CR : Dieu merci pour l’instant en tant que pénaliste, je sais ce que je fais et les gens le savent aussi. Je ne me sens pas concerné par votre crise identitaire. Tiens au fait, j’ai un article dans la Provence demain, tu sais mon affaire des deux braqueurs ?
CR : Dis tout de suite qu’on est ridicules ! RMDP : Haha ! C’est trop drôle ! Maître Reinaud est piqué ! Avoue tout simplement que la procédure civile ne se fait pas sur de l'improvisation. Elle est bien plus longue et demande de la patience, du sérieux, de la technicité. Bref, un travail approfondi et méticuleux. C’est un travail sans paillettes, certes, mais qui n’en requiert pas moins beaucoup de professionnalisme, figure-toi. CR : Quelle humilité Maître Mahé Des Portes!! L’allégorie du génie travaillant dans l’ombre et dans l’indifférence !!! J’ai tout simplement l’impression que ce qui te contrarie, c’est que personne ne comprenne la réalité de ton activité. Dans les dîners en ville, lorsqu’on rencontre des non-juristes, on s’exclame me montrant du doigt : « C’est donc lui le défendeur des salauds, Lui qui fait acquitter le violeur d’enfant que pourtant la clameur publique avait, elle, condamné depuis longtemps. Lui qui disculpe l’homme violent pour absence de preuve. Lui qui se pare de la pourpre pour défendre le dictateur déchu. Lui enfin qui oublie qu’une victime est assise sur son banc pour s’en prendre à son seul et véritable adversaire : le ministère public. » Mais toi, personne ne peut te définir ! Combien de fois ai-je entendu le quidam s’interroger : « Civiliste ? Elle travaille à l’Etat civil ? Ou encore : « Mais quelle est donc la spécialisation de Madame votre épouse ? » Eh oui, l’image de l’avocat est brouillée ! Autrefois, on défendait les droits, on défendait le prévenu, maintenant on est réduit à une spécialité !
RMDP : Oh tu sais, la Provence, c’est comme Ouest-France ou Var-Matin, on finit toujours par allumer le feu avec ou éplucher les carottes dessus. Oui, c’est sûr que ça fait plaisir d’y voir son nom mais rappelle-toi que la gloire est éphémère. Comme le disait ton professeur préféré à la fac, « le succès est une gorgone affamée et ceux qui ne la nourrissent pas sont vite remplacés ». En clair mon cher : ne dors pas sur tes lauriers ! L’opinion publique ne se rappellera pas éternellement du procès des braqueurs que tu viens de gagner. Trouve-toi vite un autre procès juteux qui attire les journalistes sinon ton nom sombrera rapidement dans les abîmes. CR : T’inquiète pas pour moi ma chérie, je suis solide. Tu sais, j’ai commencé à me faire un nom en prison, je sais parler aux malfrats, ils m’apprécient et me font confiance. On se parle d’homme à homme…. RMDP : Mais oui, c’est ça ! Comme si les femmes avocats n’étaient pas capables de comprendre les délinquants et comme s’il n’y avait pas de prévenues !!! Vous autres les hommes avez l’impression que le pénal vous est réservé. Tu me diras, dans les faits, ce n’est pas complètement faux. Mais c’est bien le seul bastion qui vous reste d’ailleurs ! Vous vous êtes tous réfugiés dans ce domaine où vous pouvez pavaner comme autant de petits coqs. Mais je ne vous donne pas une décennie avant que vous ne perdiez également cette place forte ! Le beau sexe est aujourd’hui largement dominant dans les rangs de la profession et il n’y a pas de raison pour qu’il n’envahisse pas
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Rentrée solennelle
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Charles Reinaud
non plus les juridictions pénales. D’ailleurs regarde, même notre ministre est une femme et ça n’est pas la première. CR : Ah, je me demandais quand cela allait arriver. Nous y voilà encore, l’Ode à la Femme !! RMDP : Oui justement l’Ode à la femme ! Et figure-toi que je te la chanterai jusqu’à ce que tu finisses par l’entendre ! Les femmes ont dû se battre pour se faire leur place : contre les pouvoirs en place, contre le conservatisme, contre les idées reçues, pour faire évoluer les mentalités et pour obtenir un modèle de société ! C’est ça ! Moque-toi ! Tiens, regarde, toi qui est si féru d’histoire. Petit retour en arrière, écoute un peu la haute considération que ton idole, ce cher Bonaparte, avait pour les femmes. CR : Ah non ! Ne touche pas à Bonaparte. RMDP : Je vais me gêner, tiens ! Regarde le Code civil dans sa rédaction de 1804 : la femme ne vaut pas mieux qu’un meuble. Et pour cause : pas une femme dans les rédacteurs du code civil ! Merci Napoléon ! Dois-je te rappeler les dires de ce dernier ? « Ce qui n'est pas français, c'est de donner l'autorité aux femmes ». « La femme doit savoir que sortie de la tutelle de sa famille, elle passe sous celle de son mari ». Et voilà de quelle manière on a hérité d’un Monument de Misogynie, oups, pardon d’un Code, qui prévoyait ce genre de dispositions : « Les personnes privées de droits juridiques sont les mineurs, les femmes mariées, les criminels et les débiles mentaux. » « La femme doit obéissance à son mari. » « La femme est obligée d’habiter avec le mari et de le suivre partout où il juge à propos de résider. »
Quant à la jurisprudence de l’époque, autant te dire qu’elle ne s’est pas montrée plus moderne. Laisse-moi te livrer quelques perles des tribunaux d’antan : « La femme ne pourrait même se soustraire à cette obligation de cohabitation sous prétexte de santé, à moins cependant que le danger ne soit réel ou que la femme ne soit exposée à de sérieuses souffrances. » Donc, sauf à nous trouver dans un véritable état d’agonie, nous étions contraintes de vous suivre, même jusqu’à Pékin ! Mais encore mieux : « La femme ne pourrait se soustraire à son obligation de cohabitation en alléguant les mauvais traitements qu’elle aurait reçus de la part son mari. » Bref, même battues, nous étions contraintes de rester ! Mais ne soyons pas si critiques… Ce code comprenait tout de même quelques articles « visionnaires ». Ainsi, sache que : « L’autorisation du mari n’e st pas nécessaire lorsque la femme est poursuivie en matière criminelle. » Aaaah nous y voilà, enfin un peu d’autonomie !! Eh oui ! Là, grande clémence, pas besoin de l’autorisation du mari pour que la femme soit poursuivie en justice car à ce moment, celle-ci retrouve soudainement toute sa capacité !!! Je dois dire que les dispositions relatives au divorce sont aussi empreintes d’un certain souci d’égalité. Le mari peut ainsi demander le divorce pour cause d’adultère de sa femme. Quant à la femme, elle peut aussi demander le divorce en cas d’adultère de la part de son époux… Bon, certes le Code précise aussitôt une petite nuance en ajoutant une condition : il faut que
le mari ait tenu sa concubine dans la maison commune. Bref qu’il soit bigame ! Franchement, quel mari serait assez crétin pour établir sa maîtresse chez sa femme?!! Non, non, en hommes pratiques, vous préfériez généralement leur faire construire un petit hôtel particulier, dans le 9e arrondissement de Paris par exemple. Remarque, la belle Otéro ou Cléo de Mérode, elles ont bien su en tirer profit ! CR : La prêtresse de l'IPhone et de la tablette numérique figée en 1804. Maîtrise aussi bien ceux qui se trouvent actuellement dans le Code civil… RMDP : Attends, attends, j'ai pas terminé ! Je récapitule : Pas de capacité civile, pas d’égalité dans le mariage, pas d’égalité dans l’autorité parentale, pas d’égalité dans l’éducation, pas de droit de vote, pas de libre disposition de nos salaires. En revanche en 14, lors de la Grande Guerre, là on est venu nous chercher pour fabriquer des obus lorsque tous les hommes étaient au front. Et pour le coup, là non plus, c'est-à-dire à chaque fois que ça vous arrange, pas besoin d’autorisation du mari !! Tu vois, on a dû se battre contre toutes ces lois iniques, pour faire évoluer les mœurs et conquérir notre liberté. Notre statut de femme libre, on l’a obtenu uniquement grâce à des femmes courageuses qui ont cru dans un modèle de République où la femme était l’égale de l’homme : - Marie-Olympe de Gouges, - George Sand, - Simone de Beauvoir, - Marie Curie, - Simone Veil, Et le chemin a été long...
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Rentrée solennelle
CR : La religion, l’histoire, la politique, tu mélanges tout. Tout est prétexte à étoffer ta plaidoirie ! On n’est pas en Afghanistan que je sache : des avocatEs, des magistratEs, on n’en manque pas ! Bien au contraire, c’est plutôt la règle générale et c’est nous les hommes, qui faisons figure d’espèce en voie de disparition. Bientôt on deviendra une minorité cachée et il faudra mettre en place une discrimination positive ! Imagine une seconde : Toi, Maître Raphaëlle Mahé des Portes, tu te serais vue écartée de la profession au profit d’un homme au seul motif de son sexe, pardon de son « genre » comme on dit maintenant. Mais on ne peut pas bâtir une société sur la simple règle de la répartition égale entre les sexes ! C’est ridicule ! Sérieusement, la diversité c’est la richesse, Raphaëlle, on est complémentaires pas adversaires. Tu sais bien comme moi qu’on a tout intérêt à avoir une profession mixte et je m’inquiète d’ailleurs du peu de jeunes confrères masculins qui accèdent à la profession chaque année. Une féminisation excessive ne sert pas non plus la justice de notre pays.
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RMDP : Mais mon amour, moi ça ne me dérange pas d’avoir une profession ultra féminisée. Ainsi les justiciables passeraient toute leur vie entre les mains de différentes femmes : la maman, la nounou, la maîtresse d’é cole, la professeure, l’épouse, la seconde maîtresse, l’avocate, la juge… Mais rassure-toi, il vous restera toujours le rôle du maton !
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Remise du prix Benjamin Abram par Andrée Minguet à Laure Laydevant
Remise du prix Jules Sauteron de Seranon par Guylaine Sèze à Olivia Lischetti
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Regarde le monde de la justice par exemple : Pas de femme avocate avant 1900, pas d'avocate aux Assises avant 1903, pas de femme Bâtonnier avant 1933, pas de femme magistrate avant 1946 ! De toute façon, quelle que soit la profession, les hommes ont toujours fait barrage aux femmes. On dirait que vous avez peur de nous ! D’ailleurs vous avez peur de nous, regarde : à ce jour, toujours pas de femme prêtre, alors pape… n’en parlons pas !
CR : Tu as oublié la mort, je te la laisse... Bien sûr dans ta clientèle, les pleureuses rechercheront une femme persuadée, souvent à tort, que ces dernières maîtrisent mieux les sentiments humains et trouveront une oreille miséricordieuse. Mais aborde le monde des affaires, celui de l’argent roi, celui plus vulgaire mais ô combien intéressant de la finance, et tu verras des clients à la recherche d’Un avocat. RMDP : Mais ton raisonnement ne tient pas debout !! Certes, en majorité on trouve surtout des hommes pour défendre des hommes… Mais le jour où les femmes pourront enfin avoir accès aux grands postes politiques et économiques, alors nous verrons bien vers qui elles se tourneront !!! Je doute toutefois franchement qu’on ait dans l'avenir pareils procès au féminin… Nous sommes moins sujettes aux délits, ou en tous cas nous en donnons l’apparence !
Au demeurant, je te trouve bien mal placé pour critiquer ma clientèle, c’est quand même elle qui nous fait vivre et certainement pas tes malfrats. Ah c’est vrai, « parfois » tu reviens avec des honoraires coquets, sous forme de billets. Mais tes revenus sont quand même franchement irréguliers et ne nous permettent pas de faire face aux dépenses du quotidien, qu’elles soient personnelles ou professionnelles. Sans compter que vos bombances d’après Assises il faut bien les payer !! CR : Mais quelle classe! Peut être devrais-je à l'avenir te réveiller au son du tintement des pièces de monnaie ? Ma seignore, il est l'or, l'or de se reveillor, l'or de dépouiller tes petits clients ! C'est sûr, moi je n'ai pas besoin de me rendre au JAF un sac Gérard Darel à la main, habillé en Chanel au volant de ma nouvelle Mini! Il faut les voir se précipiter dans cet étroit couloir du JAF Pratési pour pia-piailler entre copines au sujet des dernières tendances, oubliant au passage le client qui est à leur côté et la dignité de leur serment. Mais va, va prendre tes 30 deniers, sers-toi sur tes divorcés, sur les successibles qui viennent de perdre leur parent, sur le licencié qui n'a plus que ses indemnités pour pleurer, rassasie-toi sur le dos du pauvre expulsé qui n'a plus de toit! Tu véhicules l'antique idée des avocats ventripotents qui vivent dans l'abondance et la vénalité. Moi je préfère vivre de gloire et de pauvreté. RMDP : Non mais quel orgueil ! Ça te va bien de me traiter de vénale et de prétendre que pour ta part, tu vis de gloire et de pauvreté ! Heureusement en tous cas qu’il y a mes « petits clients », mes « petits procès », mes « petites affaires » pour financer tes exubérances! Et puis tu dis que ma clientèle est ennuyeuse... Peut-être, mais ce sont des gens ordinaires avec des ennuis ordinaires et eux aussi, ils ont le droit d’être conseillés, aidés et défendus. Et au moins, ma clientèle ne nuit pas à notre vie de couple !
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Si tu crois que je ne suis pas fatiguée de tes nuits de permanences garde à vue, de ces interminables samedis au parloir... J’en ai assez que tes obligations rythment notre vie ! Crois-tu qu’il est vraiment sain de sacrifier les dîners avec les bons amis, les instants en famille pour des gardes à vue interminables et des prétoires sans fin ? Enfin il va falloir que tout cela change… Un jour, on aura bien un enfant, on ne l’emmènera pas au parloir tout de même ! CR : Et qu'est-ce que tu veux en faire? Tu t'imagines arriver devant ton boss lui apprenant que tu devras prendre un congé maternité ? Déjà que pour prendre une semaine de vacances dans l'année, il faut le prévenir l'année précédente... J'imagine parfaitement sa réaction : « Ma chère Raphaëlle, c'est une grande joie d'apprendre cet heureux événement et tout le cabinet se joint à moi pour vous transmettre nos meilleurs vœux. Je profite de cette occasion pour vous informer qu'à votre retour de congé maternité, nous serons contraints de mettre un terme à votre contrat de collaboration, le cabinet connaissant une baisse importante d'activité…. » Pour ne pas dire : « On ne va pas s'embarrasser avec une avocate qui devra aller chercher son rejeton chez la nounou à 18 heures ! » Ce n'est pas tout, comment vas-tu faire avec tes clients, crois-tu qu'ils vont t'attendre et voir leurs affaires reportées? Et la bienveillance des juridictions ? Bien sûr, le Président Trille part en retraite et on peut espérer un peu plus de respect des avocats. Mais tu trouveras toujours un magistrat zélé qui ne comprendra pas pourquoi il devrait accepter le renvoi d'une affaire au motif que le Conseil est enceinte. « Maître, la Cour n'est pas à la disposition des avocats! ». Et puis je n'ai pas l'intention de sacrifier tout ce qu'on a construit jusqu'à présent.
Charles Reinaud, Catherine Jonathan-Duplaa et Raphaëlle Mahé des Portes Les nuits sans sommeil, les week-ends au parc, le vomi sur la robe, très peu pour moi ! RMDP :Tu ne crois pas qu'on a le droit à une vie normale? CR : Tu me parles de normalité, mais notre profession est anormale par définition. Nous ne nous détachons pas de notre vie professionnelle, les accidents de la vie qui entrent dans nos cabinets nous poursuivent jusque chez nous. Et l’implication que l’on met dans chaque affaire, c’est notre sensibilité qui nous pousse à le faire. C’est d’ailleurs cette sensibilité intrinsèque à l’avocat qui le conduit à réussir dans sa mission. Imagine si nous étudions nos dossiers comme des machines, de vulgaires logiciels juridiques, alors notre ministère deviendrait inutile. RMDP : Je sais bien, mais parfois j’aimerais me dire que je n’ai pas épousé que l’avocat mais l’homme. CR : Oui, mais tu le savais ! En épousant un avocat, on accepte toute la complexité du personnage qui existe,
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Raphaëlle Mahé des Portes et Charles Reinaud
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Rentrée solennelle
les failles et bonheurs que lui procure la profession. Dès notre cycle universitaire, nous savions que c’était cette force, cette volonté de défendre, cette volonté de nous surpasser dans nos antagonismes qui nous rapprochait. Cette société de fait entre deux êtres consacrés à leurs valeurs, à la valeur de l’autre, qui enrichissait à la fois le couple, mais également l’avocat en devenir que nous étions. C’est la force de l’autre qui nous permet de surmonter nos maladresses d’impétrants. Alors oui, tu aurais pu épouser un notaire, un huissier, un banquier, un chef d’entreprise, mais serions-nous là où nous sommes si l’autre ne nous accompagnait pas tous les jours dans ce métier ? L'autre est la pierre angulaire de nos réussites, le partage et l'écoute que l'on trouve à ses côtés nous permet d'avancer. L'avocat est seul, terriblement seul, il ne peut se confier ni à son client, ni aux personnes qui l'entourent et c'est l'autre qui permet de surpasser cette solitude. Que de fois n’as-tu balayé mes inquiétudes, n’astu mis en avant les idées qui me manquaient, combien de fois m’as-tu permis de trouver l’argument qui faisait triompher notre cause ? Mon épouse est mon associée, ma meilleure amie, ma meilleure ennemie, la seule qui me connaît réellement, qui accepte mes faiblesses mais aussi celle qui montre qu’il y a autre chose que l’avocature. Et si je sais que la robe nous colle à la peau, il ne faut pas oublier que des émotions tout aussi fortes et tout aussi importantes nous attendent à côté de l’être aimé. Et pour conclure en faisant écho à Alfred de Musset : « L'avocat est orgueilleux, prétentieux, narcissique, faux, bavard, méprisant et séducteur. L'avocate est pinailleuse, perfide, entêtée et charmeuse. Mais il y a une chose sublime et merveilleuse, c'est l'union de ces deux êtres si imparfaits et si affreux ». Nous pouvons être découragés, avoir peur du lendemain, nous pouvons douter de nous, du client, du magistrat, mais à la fin d'une vie consacrée à la défense, nous pourrons regarder derrière nous en disant que nous avons su être époux, amis, parents, nous avons exercé notre métier avec joie et plaisir. Bref, nous avons su aimer. 2013-500
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Jurisprudence
Le mandat d’intérêt commun avocat-client : libre choix du client et sécurité des sociétés 2ème Chambre civile, 13 juin 2013, Arrêt numéro 968 F-D Deux arrêts de la 2ème Chambre civile de la Cour de cassation viennent de sécuriser tant pour les clients en société que pour les avocats, la relation de veille juridique annuelle en validant la durée du mandat confié, sans priver le client du libre choix d’un éventuel autre conseil. Cette nouvelle jurisprudence de Cassation infirme les deux arrêts du Premier Président de la Cour d’appel de Poitiers, lesquels confirmaient les ordonnances du Bâtonnier de Poitiers. Frédéric Bontemps
La Cour, Sur le moyen unique: Vu l'article 1134 du Code civil; Attendu, selon l'ordonnance attaquée, que M. Bontemps, avocat, et la société Cuisson et réfrigération ont, le 1er juillet 2008, conclu une convention intitulée « Lettre annuelle de mission d'intérêt commun de documentation, veille et conseils juridiques » aux termes de laquelle la société confiait à l'avocat, pour cinq exercices à compter de celui ouvert le 1er janvier 2008, une mission de conseil et d'assistance juridique moyennant un émolument annuel hors taxes de 960 euros (soit 1 148,16 euros TTC), frais de convocation et de reprographie en sus; qu'il était stipulé à l'article 6 de la convention que la partie qui entendrait y mettre fin avant le terme prévu devrait verser une indemnité « compensatrice forfaitaire du temps passé sur la préparation des dossiers, notamment par le suivi de l'actualité juridique et fiscale [...] pour couvrir l'ensemble des frais
forfaitaires de veille juridique de documentation et d'expertise de la législation en matière de droit des sociétés et de droit fiscal appliqué aux sociétés », égale à 75 % des émoluments qui seraient dus jusqu'au terme du contrat ; que la société Cuisson et réfrigération a résilié la convention le 7 avril 2010 ; que n'ayant pas été réglé de ses honoraires, M. Bontemps a saisi le bâtonnier de son ordre aux fins de fixation de ceux-ci à la somme de 2 964 euros HT, soit 3544,94 euros TTC ; Attendu que pour limiter à 1 686,36 euros TTC le montant des honoraires dus par la société Cuisson et réfrigération et condamner celle-ci à payer cette somme à M. Bontemps, l'ordonnance énonce que, même en présence d'une convention d'honoraires qui a prévu un honoraire forfaitaire à la charge du client, comme c'est ici le cas, le juge a la faculté de réduire les honoraires convenus initialement lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu; qu'au regard des critères énoncés à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et
du caractère très limité du service rendu par M. Bontemps pour les exercices futurs 2010 à 2012 inclus, la rémunération demandée, égale à 75 % du montant annuel jusqu'au terme du contrat, apparaît ainsi exagérée; que la juste rémunération due à M. Bontemps pour cette période peut être fixée à 450 euros HT ; que la société doit en outre la somme de 960 euros HT au titre de la rémunération forfaitaire totale afférente à l'année 2010 (exercice 2009), année où a eu lieu la résiliation et pour laquelle elle ne conteste pas avoir bénéficié des prestations de M. Bontemps; que l'honoraire dû à l'avocat sera donc fixé à la somme globale de 1 410 euros HT, soit 1 686,36 euros TTC; Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité prévue au contrat en cas de résiliation unilatérale de la convention par le client et dessaisissement de l'avocat constitue une clause de dédit non susceptible de réduction judiciaire, le premier président a violé le texte susvisé;
NOTE
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usqu’à l’arrêt de la Cour de cassation du 28 avril 2011 (pourvoi n°10-17405) inédit, confirmé par l’Ordonnance du premier Président de la Cour d’appel de Limoges le 4 juin 2013 (inédit), l’article 1134 du Code civil n’était pas appliqué aux avocats qui concluent des contrats avec leurs clients en sociétés au motif, que ce contrat porterait atteinte à la liberté du client de choisir son avocat. Dans ces deux espèces qui concernent un avocat spécialiste du Barreau de Poitiers, un mandat d’intérêt commun a été conclu avec un client en société pour lui garantir la veille juridique (suivi du droit des sociétés, application des nouvelles dispositions tant sur la société, que pour les dirigeants ou les actionnaires) pendant une durée fixée d’un commun accord de cinq et sept exercices. En application de l’article 1134, il est également prévu que dans le cas où l’avocat mettrait un terme à ce mandat, sauf force majeure, ou bien le client, dans les mêmes conditions renforcées par la faute professionnelle liée au mandat,
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et passée en autorité de chose jugée, la partie évinçant devrait verser à l’autre partie une indemnité égale à 75 % du solde des honoraires contractuels jusqu’au terme du contrat. Le délégué du Bâtonnier dans ces espèces n’a pas entendu faire application de ces conventions, invoquant le libre choix du client, confirmé par le premier Président de la Cour d’appel. La Cour de cassation, dans un premier arrêt du 28 avril 2011, casse l’ordonnance au motif que contrairement aux affirmations du Bâtonnier et du premier Président : « Vu l'article 1134 du Code civil ; Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier Président d'une Cour d'appel, que les sociétés Thermale de la Roche Posay et la Financière STRP (les sociétés) ont signé avec M. X..., avocat, deux conventions en date des 22 et 23 septembre 2008 régissant leurs rapports ; que les sociétés ayant décidé de résilier ces conventions, M. X... a réclamé à chacune d'entre elles le paiement de ses émoluments ; que les sociétés ayant refusé de s'en
acquitter, il en a sollicité la taxation par deux requêtes distinctes ; que le Bâtonnier de l'ordre des avocats s'est déclaré incompétent pour en apprécier le montant en raison de la nature de la facturation ; Attendu que pour débouter M. X..., l'ordonnance énonce que les actes intitulés « lettre annuelle de mission d'intérêt commun, de documentation, veille et conseils juridiques » confiaient à l'avocat une mission de conseil et d'assistance juridique comprenant notamment le suivi de leur vie sociale avec rédaction des documents sociaux moyennant un émolument annuel hors taxe de 2 200 euros pour la première et de 4 483 euros pour la seconde ; qu'aux termes de ces actes, les parties étaient convenues que cette mission était donnée à l'avocat pour cinq exercices pour la première, et pour sept exercices pour la seconde ; qu'une clause n° 6 intitulée « intérêt commun » stipulait que le mandat était d'intérêt commun; que la réalisation de l'objet du mandat présentait pour la société comme
le bureau d'avocat l'intérêt d'un essor des entreprises respectives par la sécurisation et la création et le développement des clientèles de chacun ; qu'il ne pouvait donc être résilié avant son terme que d'un commun accord, sauf à verser par la partie qui souhaitait y mettre fin, une indemnité égale à soixantequinze pour cent des émoluments hors taxes à majorer de la TVA en vigueur dus jusqu'au terme du contrat, pour couvrir l'ensemble des frais forfaitaires de veille juridique de documentation de la législation en matière de droit des sociétés et de droit fiscal appliqué aux sociétés ; qu'une telle clause est nulle en ce qu'elle tend à priver le client du libre choix de son avocat, qui suppose la liberté de mettre fin à la mission qui lui est confiée ; Qu'en statuant ainsi, alors que le principe du libre choix d'un avocat ne s'appliquait pas à un tel mandat d'intérêt commun, le premier Président a violé le texte “susvisé” ». Dans une ordonnance du premier Président de la Cour d’appel de Limoges (Cour de Renvoi), celui-ci
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confirme la position de la Cour de cassation : « Attendu que saisi en application des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991, le Bâtonnier en première instance et le premier Président en appel sont compétents pour fixer, conformément à l'article 10 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971, le montant des honoraires au regard, notamment, des conventions liant les parties, qui doivent être interprétées conformément aux articles 1134 et suivants du Code civil qui stipule qu'elles sont la loi des parties et doivent être exécutées de bonne foi… Attendu que cette convention d'abonnement qui constitue un mode de rémunération de l'avocat n'est en rien contraire à la règle du libre choix de l'avocat, le fait que soit fixé un dédit en cas de résiliation du contrat n'empêchant pas les parties de le rompre à tout moment mais aux conséquences conventionnelles fixées qui s'appliquent également aux deux parties à défaut d'accord, que par ailleurs, comme l'a jugé la Cour de cassation, le principe du libre
Jurisprudence
Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 26 avril 2012, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Poitiers; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Limoges; Condamne la société Cuisson et réfrigération aux dépens; Vu l'article 700 du Code de procédure civile, condamne la société Cuisson et réfrigération à payer à M. Bontemps la somme de 3000 euros; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille treize. Moyen annexe au présent arrêt : Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. Bontemps. Il est fait grief à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir fixé à la somme seulement de 1.686,36 euros TTC le montant des honoraires dus à Monsieur Frédéric Bontemps par la société Cuisson et réfrigération et d'avoir condamné la société Cuisson et réfrigération à payer ladite somme à Monsieur Bontemps. Au motif qu'aucune disposition légale ou réglementaire ni aucun principe ne s'oppose à ce qu'un avocat se voie confier par un client une mission pour
choix d'un avocat ne s'applique pas à un tel mandat d'intérêt commun. Faisant application des article 1134, 1108 et 1109 du Code civil, 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 la Cour d’appel de Renvoi applique l’article 1134 au mandat d’intérêt commun. » Cette position, jusqu’alors non appliquée aux avocats d’affaires ne surprend pas car il avait été jugé que s'il est vrai que le dessaisissement de l'avocat avant la fin du litige rend, en principe, inapplicable la convention d'honoraires initialement conclue et que les honoraires dus pour la mission effectuée doivent alors être fixés selon les critères définis à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 (Civ. 2ème 7 juil-let 2011, n°09-15403 ; Civ. 1ère 28 novembre 1995, pourvoi n°93-20575; Civ. 2ème 16 juin 2011, n°10-20551 Civ. 2ème 7 octobre 2010, n°09-69067 ; Civ. 2ème 25 février 2010, n°0913191 ; Civ. 9 avril 2009, B. Civ. Il n°90 ; Civ. 18 novembre 2008, B. Civ. Il n°247; Civ. 2ème 25 janvier 2007, n°05-17771 ; Civ. 10 novembre 2005, B. Civ. Il re285), le juge taxateur doit toutefois tenir compte des stipulations de la clause
plusieurs années moyennant une rémunération forfaitaire déterminée en fonction de la durée ainsi prévue, élément déterminant du consentement des parties; qu'en pareil cas, la clause prévoyant qu'une indemnité compensatrice est due par le client qui résilierait avant son terme la convention conclue entre l'avocat et son client ne fait que tirer les conséquences de ce que l'économie du contrat, qui doit être appréciée globalement, se trouverait bouleversée par cette résiliation anticipée ; (...) Alors que les dispositions de l'article 2004 du Code civil aux termes duquel le mandant peut révoquer le mandat quand bon lui semble ayant un caractère supplétif, il en résulte que l'indemnité contrac tuelle prévue en cas de résiliation constitue un simple aménagement des conditions de rupture du contrat et, dès lors, ne représente que le prix de la faculté de résiliation unilatérale, en dehors de toute notion d'inexècution, de sorte qu'elle n'a pas le caractère d'une clause pénale susceptible d'être modifiée par le juge mais d'une clause de dédit, laquelle n'est pas soumise à réduction judiciaire; qu'en décidant cependant que même en présence d'une convention d'honoraires qui a prévu un honoraire forfaitaire à la charge du client, comme c'est ici le cas, le juge de la taxe a la faculté de réduire les honoraires convenus initialement lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu, le premier président de la cour d'appel de Poitiers a violé par refus d'application les articles 1134 et 2004 du Code civil et par fausse application l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971. 2013-501
de la convention d'honoraires prévoyant la rémunération de l'avocat en cas de dessaisissement (Civ. 2ème 7 avril 2011, n°1017069). A ainsi été jugé « qu'ayant relevé que M. X... avait accepté le principe du paiement d'un honoraire complémentaire dans la convention qui stipulait expressément que M. Y... aurait droit à la moitié d'un tel honoraire si le dossier lui était retiré et que l'avocat avait droit au paiement de cet honoraire eu égard aux intérêts en jeu, au travail important accompli qui avait abouti à une offre de 11 000 000 Euros dans le cadre de la médiation en cours, le premier Président, qui s'est borné à faire application de la loi des parties, a légalement justifié sa décision (Civ. 2ème 19 mars 2009, n°08- 14042). Par ailleurs, aux termes de l'article 2004 du Code civil, le mandant est libre de révoquer à tout moment son mandat, sauf à ne pas commettre un abus de droit (Civ. 1ère 2 mai 1984 Bull. I, n° 143). Et les dispositions de ce texte ayant un caractère supplétif, il peut être prévu une indemnité contractuelle de résiliation unilatérale (Civ. 1ère
6 mars 2001 Bull. I, n° 56). Il en résulte que l'indemnité contractuelle prévue en cas de résiliation constitue un simple aménagement des conditions de rupture du contrat et, dès lors, ne représente que le prix de la faculté de résiliation unilatérale, en dehors de toute notion d'inexécution, de sorte qu'elle n'a pas le caractère d'une clause pénale susceptible d'être modifiée par le juge mais d'une clause de dédit, laquelle n'est pas soumise à réduction judiciaire (cf. Cass. 3 juin 2003 pourvoi n°0012580; CA Paris 25 juin 2008 (0814433). Dans un nouvel arrêt de la 2ème chambre de la Cour de cassation du 13 juin 2013 n°968 F-D, il est fait application de l’article 1134 et posé définitivement le príncipe selon lequel l'indemnité prévue au contrat en cas de résiliation unilatérale de la convention par le client et déssaisissement de l'avocat constitue une clause de dédit non susceptible de réduction judiciaire. La Cour de Cassation assure donc ainsi la sécurité des opérations d’assistance réciproque entre professionnels du droit et sociétés. Frédéric Bontemps
Agenda
CONFÉRENCE DES BÂTONNIERS La mutualisation : Une solution pour des ordres efficaces et solidaires ? 2ème Université d’été des Barreaux Les 27, 28, 29 et 30 août 2013 Palace de Menthon 665, route des Bains 74290 MENTHON SAINT BERNARD Renseignements : 01 44 41 99 10 conference@conferencedesbatonniers.com 2013-502
CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX Etats Généraux du Droit Administratif (EGDA) Le 27 Septembre 2013 Maison de la Chimie 28, rue Saint Dominique 75007 PARIS Renseignements : 01 53 30 85 75 m.girard@cnb.avocat.fr 2013-503
CHAMBRE DE COMMERCE INTERNATIONALE Arbitrage commercial international Formation du 30 septembre au 3 octobre 2013 Chambre de commerce Internationale 38, Cours Albert 1er 75008 PARIS Renseignements : 01 49 53 28 67 www.iccevents.org events@iccwbo.org 2013-504
ASSOCIATION FRANÇAISE DES JURISTES D’ENTREPRISE (AFJE)
Campus AFJE 2013 - 3e Édition Formation le 11 octobre 2013 Eurosites George V 28, avenue George V 75008 PARIS Renseignements : 01 45 58 90 36 formations@lexisnexis.fr 2013-505
AVOCATS CONSEILS D’ENTREPRISES
L'Avocat du 21ème siècle : Partenaire et stratège Congrès les 17 et 18 octobre 2013 Palais de la Bourse 17, place de la Bourse 33000 BORDEAUX Renseignements : 01 47 66 30 07 ace@avocats-conseils.org
Les Annonces de la Seine - lundi 1er juillet 2013 - numéro 41
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Vie du chiffre
Centre d’Information sur la Prévention des difficultés des entreprises (CIP) William Nahum succède à Thierry Montéran, Paris - 25 juin 2013
D.R.
Par son rôle de prévention et d’information, le CIP est un outil indispensable pour contribuer à assurer le maintien du tissu économique en France. Le rôle du CIP National est de coordonner l’activité de la cinquantaine d’antennes territoriales et de réaliser des études et enquêtes sur la prévention des difficultés.
William Nahum illiam Nahum a été élu le 25 juin 2013 à la présidence du CIP National, par son Conseil d’administration(1), pour un mandat de 2 ans, après avoir été à l’initiative de sa création en 1999. Il succède à Thierry Montéran, avocat, et entend accroître le rôle de toutes les composantes des CIP sur l’ensemble du territoire national, dans le but, dans cette période de crise, de mieux répondre aux attentes des entrepreneurs en difficulté.
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William Nahum est par ailleurs Médiateur national du crédit délégué depuis sa création en 2008 ainsi que co-président du Comité Prévention-Résolution du Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables, ce qui lui permet de s’appuyer sur une grande expertise pour mener à bien cette mission.
Les CIP territoriaux constituent une plateforme d’accueil des chefs d’entreprise, en particulier à l’occasion des « Entretiens du jeudi », où ils sont reçus de manière confidentielle et gratuite par un trio d’experts : un Expert-Comptable ou un Commissaire aux Comptes, un avocat et un ancien juge du Tribunal de commerce. Les 2 objectifs étant de leur faire prendre conscience que l’anticipation des difficultés est le meilleur moyen de sauver leur entreprise et de les orienter sur les dispositifs existants susceptibles de les aider à résoudre les difficultés qu’ils rencontrent. « Les CIP représentent à travers toute la France une mobilisation fondamentale de toutes les parties prenantes professionnelles concernées. Je souhaite d’une part amplifier la création de CIP là où il n’en existe pas et d’autre part, développer substantiellement le nombre de chefs d’entreprise reçus », souligne William Nahum. (1) Composé de représentants du Conseil Supérieur de l'Ordre des Experts- Comptables (CSOEC), de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC), de la Conférence Générale des Juges Consulaires de France (CGJCF), du Conseil National des Barreaux (CNB), de l'Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie (CCI France), de l’Assemblée Permanente des Chambres de Métiers et de l’Artisanat (APCMA), de l'Inter Fédération des Organismes de Gestion Agrées (OGA) et par le Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce (CNGTC).
A propos de William Nahum Expert-Comptable, Commissaire aux comptes, Expert judiciaire près de la Cour d’appel de Paris et expert agréé par la Cour de cassation - William Nahum a mené en parallèle une carrière professionnelle et institutionnelle. Après avoir cédé son cabinet après 30 ans d’exercice, il crée en 2008 un nouveau cabinet spécialisé dans l’évaluation (des sociétés, des préjudices…) et le contentieux. Depuis 35 ans, il s’implique dans les institutions professionnelles françaises et internationales, au plus haut niveau. Il a été successivement pendant 14 ans, Président de l'Ordre des Experts-Comptables de Paris et de la Compagnie Régionale des Commissaires aux Comptes de Paris puis Président National du Conseil Supérieur de l'Ordre des Experts-Comptables. Il est Médiateur National du crédit délégué aux entreprises et le Président fondateur de l’Académie des Sciences et Techniques Comptables et Financières, qui rassemble aujourd’hui plus de 65 000 membres dans 25 pays. Au niveau international, il a siégé pendant 9 ans au Board de l’IFAC et a créé puis présidé deux instances internationales : le CILEA regroupant la profession d'Amérique du Sud et d'Europe latine et la FCM qui fédère 16 pays du pourtour méditerranéen. Depuis mars 2013, il préside la Commission du droit et des missions comptables ainsi que le Comité “Prévention-Résolution” du Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables. Source : Communiqué de presse Imedia Conseil & Communication du 28 juin 2013. 2013-507
Au fil des pages
La France en miettes Par Philippe Bilger
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psychologie et sa connaissance des acteurs du drame donnent à son texte un aspect crépusculaire. Son analyse originale sonde finalement les dérives séparatistes pour stopper la mécanique qui fait tomber la France en miettes. Ancien avocat général, Philippe Bilger a representé l'accusation lors de procès importants (Bob Denard, François Besse ou Emile Louis), ainsi que le ministère public lors du premier procès du gang des barbares. Il est aujourd'hui consultant. Editions Fayard - 194 pages - 17,00 euros 2013-508
Les Annonces de la Seine - lundi 1er juillet 2013 - numéro 41
D.R.
epuis plus d'une décennie, notre pays semble s'écrouler en morceaux, brisé par les revendications particularistes et rongé par les progrès de l'égoisme. Conscient des dégâts communautaristes, Nicolas Sarkozy n'a pas su enrayer l'effritement et l'a même accéleré en provoquant de nouvelles divisions entre les Français. François Hollande découvre les méfaits de ce processus alors que la crise économique progresse. Saura t-il y faire face ? Philippe Bilger ne se paye pas de mots. En scrutant la première année de la présidence Hollande, il décrypte les efforts de lutte contre notre érosion nationale. Son sens de la
Chronique
Quitter l’Euro ? A l’heure où la Croatie devient le 28ème Etat membre de l’Union européenne, Paul Goldschmidt s’interroge sur la préservation des valeurs et des acquis du modèle européen face à la réalité d’un monde globalisé. L’auteur nous parle de l’avenir de l’Union européenne face à la crise et des risques d’assister à un appauvrissement progressif du rayonnement de la civilisation européenne. Jean-René Tancrède
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La confusion s’étend jusqu’aux plus hauts niveaux de l’Etat : le Président Hollande appelle de ses vœux, le 16 mai, la création d’un « gouvernement économique » de l’UEM, assorti d’un budget et, in fine, d’une capacité d’émission d’Eurobonds, alors que, quelques jours plus tard, il fustige la Commission pour oser faire des recommandations de réformes structurelles (en contrepartie d’un délai supplémentaire de deux ans pour réduire le déficit) dans le cadre légitime de ses responsabilités. De surcroît, on entend au PS des propositions aussi farfelues qu’une responsabilisation (ingérable) de la BCE devant les Parlements nationaux de l’Eurozone, alors que c’est clairement le Parlement Européen qui devra assumer ce contrôle, après la mise en œuvre préalable des réformes nécessaires. Un premier amalgame injustifié, soigneusement entretenu par les partis extrémistes, est de rendre la monnaie unique responsable de la crise et de l’austérité et, par conséquent, de faire croire qu’on s’en sortira en s’extirpant de l’Euro. S’il est vrai que des erreurs ont été commises, notamment en ne parachevant pas l’UEM dans la foulée de l’introduction de la monnaie unique en 1999, il est tout aussi incontestable que l’Eurozone a été un rempart protecteur efficace pour ses Membres - et pour l’UE en général - face au déferlement de la crise. Sans l’Euro, les Membres de l’UE auraient eu recours, comme par le passé, à des dévaluations compétitives, détruisant les fondements du « marché unique » dont même la Grande-Bretagne se fait un défenseur acharné. Dans ce contexte il sied de souligner la contradiction du raisonnement proféré par Marine Le Pen : en effet si, comme elle le soutient, l’Euro est trop fort, il incombe à l’Eurozone de s’accorder sur une politique de change, complétée par une politique
monétaire compatible de la BCE, dans le but d’affaiblir la monnaie unique ; pour ce faire il faut nécessairement renforcer la cohésion économique au sein de l’UEM. Cette solution est évidemment totalement incompatible avec la sortie de la France de l’Euro, qui entrainerait l’implosion de l’UEM et le retour du « chacun pour soi ». Marine Le Pen (et autres pyromanes des monnaies) doit sortir du bois et affirmer clairement si elle favorise le renforcement de l’Eurozone, avec la possibilité de mener une politique de change qui protège les intérêts européens (ce qui justifierait le parallèle qu’elle fait avec le Japon) ou si la récupération de la souveraineté monétaire française est prioritaire, ce qui implique de facto une volonté de dévaluation unilatérale catastrophique pour la population en termes de pouvoir d’achat.
D.R.
es nombreuses réactions à mon article du 29 mai sur un abandon de l’Euro par l’Allemagne m’ont incité à revenir sur la question. Ce débat suscite, en effet, des prises de position politiques de plus en plus irresponsables et/ou irréalistes, notamment en France. Outre l’opposition du Front National et du Front de Gauche qui réclament la sortie unilatérale de la France de l’Euro, la polémique déchire aussi l’UMP et le Parti Socialiste. Cette situation est porteuse de très graves dangers, rendant urgente une information sobre et objective de l’opinion publique. En effet, la légèreté avec laquelle certains soidisant responsables politiques envisagent un abandon de la monnaie unique est stupéfiante et fait l’impasse sur les conséquences inévitables d’une telle décision.
C’est pourtant clairement cette dernière thèse qui prévaut. Si la crise des années 1930 est trop ancienne pour susciter une réaction de l’opinion publique lorsqu’on la compare à la crise actuelle, il serait bon de faire un rapprochement avec une autre crise, plus récente, d’ampleur comparable et qui est encore fraîche dans toutes les mémoires : il s’agit de l’implosion de l’Union Soviétique et de son « marché commun » associé, le Comecon. On se souviendra, en effet, que tous les pays impliqués, sans aucune exception, ont été touchés par une chute considérable et immédiate du niveau de vie avant de – et à des degrés divers – retrouver progressivement le chemin de la croissance, aidés pour nombre d’entre eux par l’adhésion à l’Union Européenne. L’implosion de l’UEM (et de l’Union Européenne) aurait inévitablement des conséquences désastreuses similaires qui devraient faire face, de surcroît, à une période plus ou moins prolongée de contrôle des changes, réminiscence des années d’après guerre, pour éviter une fuite des capitaux. Alors que dans le cas de l’implosion du communisme les sacrifices demandés étaient compensés par des perspectives d’une amélioration significative des libertés et des droits, ce qui les rendait plus supportables, aucune compensation de ce type ne sera offerte aux citoyens européens. Bien au contraire, les pertes de pouvoir d’achat et
autres restrictions seront susceptibles de créer l’effet exactement inverse, c'est-à-dire susciter des conflits sociaux débouchant sur des régimes politiques d’exception ; ceux-ci feront perdre aux citoyens les avancées économiques, sociales et politiques qu’ils considèrent aujourd’hui, parfois abusivement, comme des « acquis » définitifs et qui constituent l’exemplarité de la construction européenne. C’est donc cette vérité d’un avenir qui « déchante » qu’il faut présenter au citoyen européen comme alternative à la poursuite et l’approfondissement de soixante ans de construction européenne. Certes, le ré enchantement du projet européen implique aussi des sacrifices pénibles dont les moindres ne sont pas des abandons supplémentaires de souveraineté nationale qui serviront d’épouvantail aux sirènes du nationalpopulisme. Cependant, la préservation des valeurs et des acquis du modèle européen face à la réalité d’un monde globalisé et interdépendant ne peut s’envisager qu’à l’é chelle européenne ; la solidarité entre les peuples de l’Union ne peut se concrétiser que par l’augmentation de droits et de devoirs partagés. C’est pourquoi les élections européennes de juin prochain revêtiront une importance cruciale pour l’avenir de l’Union. En effet, grande sera la tentation de faire croire à l’électeur qu’il peut, sans risque majeur, user de son droit de vote pour « protester » impunément contre les insuffisances de l’Union en accordant son suffrage aux partis « eurosceptiques ». Etant donné les pouvoirs accrus dévolus au Parlement européen par le Traité de Lisbonne, ce résultat déboucherait sur le blocage total de l’Union. La sortie de crise serait reportée, induisant l’implosion de la monnaie unique et la vérification des conséquences mentionnées cidessus. Il ne faut pas négliger la possibilité que, au cas où une telle perspective s’emparerait de l’opinion, les marchés accéléreraient le processus en provoquant anticipativement une nouvelle crise financière d’une proportion telle qu’elle deviendrait très rapidement incontrôlable. Le temps du compromis est donc révolu. Soit le citoyen européen se laisse persuader que son intérêt et celui des générations futures passent par la poursuite de l’intégration, avec son lot de défis et de difficultés mais offrant aussi des perspectives et des espoirs, soit il devra se préparer à accepter son appauvrissement durable et irréversible et à assister impuissant à la fin du rayonnement de la civilisation européenne.
Les Annonces de la Seine - lundi 1er juillet 2013 - numéro 41
Paul N. Goldschmidt, ancien directeur de la Commission européenne 2013-509
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Europe
La Croatie devient le 28ème Etat membre Commission européenne, Bruxelles - 1er juillet 2013 Le 1er juillet 2013, la Croatie est devenue le 28ème État membre de l’UE, après une décennie au cours de laquelle des réformes ont été mises en place, nécessaires à l’alignement du pays aux normes et aux lois de l’UE. La Croatie va non seulement partager les avantages relatifs à l’adhésion à l’UE, mais également les responsabilités qui vont de pair. Le pays jouera son rôle à égalité avec ses 27 homologues européens dans le processus de prise de décision. La Croatie est le 28e pays qui adhère à l'UE. La cérémonie officielle s'est déroulée à Zagreb le 30 juin et les festivités se sont poursuivies jusque tard dans la nuit. Il y a vingt ans à peine, la Croatie, qui faisait alors partie de l'ex-Yougoslavie, luttait pour son indépendance. Une décennie plus tard, le pays déposait une demande d'adhésion à l'Union européenne. Aujourd'hui, elle rejoint 27 autres pays au sein d'une union politique et économique qui a vu le jour en 1958.
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Qu'est-ce que l'adhésion va apporter aux Croates? Les Croates bénéficient désormais de tous les avantages liés à la citoyenneté de l'UE. S'ils tombent malades dans un autre pays de l'UE, ils ont droit aux mêmes soins de santé que les citoyens de ce pays. En cas de problème lors d'achats effectués en ligne, ils peuvent faire valoir les normes de protection de l'UE applicables à tous les consommateurs. Et les frais d'itinérance pour les appels passés en Croatie depuis un autre pays de l'UE sont désormais beaucoup moins élevés.
Avant de rejoindre l'Union, la Croatie a dû aligner bon nombre de ses règles et procédures administratives sur celles de l'UE. Elle a notamment procédé à une refonte complète de son système judiciaire et modifié sa constitution pour garantir l'indépendance des procureurs. Le gouvernement a également créé un organisme chargé de la lutte contre la corruption. Le pays a dû mener d'autres réformes, et notamment fixer des limites pour ses émissions de gaz à effet de serre et adapter ses normes en matière de sécurité alimentaire.
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La voie vers l'adhésion à l'UE
Les entreprises, pour leur part, peuvent transférer des capitaux de la Croatie vers d'autres pays de l'UE et profiter des règles qui facilitent les paiements transfrontaliers. Les entreprises croates ont le droit de participer aux appels d'offres pour les marchés publics à travers l'UE, au même titre que leurs homologues européennes, tandis que les PME ont désormais accès aux financements de la Banque européenne d'investissement. La Croatie peut également bénéficier, dès à présent, des ressources du Fonds européen de
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3 formules 95 Euros : Abonnement (bi-hebdomadaire) avec suppléments juridiques et judiciaires (hebdomadaire) et suppléments culturels (mensuel) 35 Euros : Abonnement (bi-hebdomadaire) avec suppléments culturels (mensuel) 15 Euros : Abonnement (bi-hebdomadaire)
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développement régional. Les fonds structurels et de cohésion de l'UE aideront le pays à investir dans la recherche et l'innovation, les PME, les emplois durables et les initiatives visant à remédier aux pénuries de compétences et à lutter contre le chômage. Ces fonds sont gérés par la Commission européenne. Si un citoyen ou une entreprise croate dépose une plainte contre la Commission (ou tout autre organe ou institution de l'UE), celle-ci sera traitée par le Médiateur européen.
Présentation de la Croatie La Croatie est un petit pays de près de 4,5 millions d'habitants, qui a une frontière commune avec la Bosnie-Herzégovine, la Hongrie, le Monténégro, la Serbie et la Slovénie. Elle compte plus de 1 200 îles et îlots, dont 48 seulement sont habités en permanence. La monnaie actuelle est la kuna, mais la Croatie adoptera l'euro dès qu'elle remplira les conditions requises en matière de stabilité des prix, de finances publiques et de stabilité du taux de change. Source : Commission européenne
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Chronologie Juin 1991. La Croatie déclare son indépendance Octobre 2001. Signature de l’Accord de Stabilisation et d’Association Février 2003. Candidature pour l’adhésion à l’UE Juin 2004. Obtention du statut de candidat Octobre 2005. Début des négociations d’adhésion Décembre 2011. Signature du traité d’adhésion Janvier 2012. Réferendum relatif à l’adhésion du pays à l’UE : 2/3 des croates sont pour Juillet 2013. La Croatie rejoint l’UE
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Les Annonces de la Seine - lundi 1er juillet 2013 - numéro 41
Vie du droit
Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière Paris, 25 juin 2013
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La Garde des Sceaux rappelle sa volonté que ce procureur soit nommé après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, comme les magistrats du siège, afin d’organiser et consolider son indépendance. Elle souligne à ce titre l’importance de la réforme constitutionnelle relative au Conseil supérieur de la magistrature également en discussion au Parlement. Par ailleurs, le projet de loi renforce la poursuite et la répression des infractions en matière économique, financière et fiscale. Il comporte des dispositions visant à étendre la compétence de la police fiscale, à renforcer les moyens d’enquête, à aggraver les sanctions en matière de fraude fiscale et d’atteinte à la probité et à favoriser la saisie et confiscation des avoirs criminels. Le projet de loi permet aux associations de lutter contre la corruption de se constituer partie civile comme la ministre s’y était engagée en octobre 2012. Ces deux projets, qui entreront bientôt en
Christiane Taubira
Photo © Jean-René Tancrède
hristiane Taubira, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, salue avec grande satisfaction l’adoption par les députés de deux projets de lois gouvernementaux fondamentaux : le projet de loi organique relatif au procureur de la République financier à compétence nationale et le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. Ils constituent une avancée essentielle pour garantir une politique pénale efficace en la matière, depuis la détection des infractions jusqu’à l’exécution de sanctions dissuasives. Ils créent un procureur de la République financier à compétence nationale. Celui-ci disposera de moyens propres entièrement dédiés à la lutte contre la fraude fiscale et les atteintes à la probité, notamment la corruption. Ses moyens seront également renforcés avec la création, à terme, d'une cinquantaine de postes de magistrats et d'assistants spécialisés.
discussion au Sénat, traduisent la volonté du gouvernement de répondre avec fermeté aux actes de délinquance dans le domaine économique et financier, qui mettent en péril le pacte républicain. Source : Communiqué du Ministère de la justice du 25 juin 2013 2013-511
Projet de décret du Code de justice administratif : assistons-nous à la création d’une justice à deux vitesses ? n projet de décret du Code de justice administratif qui sera prochainement soumis à la signature du Ministre de la Justice inquiète particulièrement.
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Que prévoit ce projet de décret ? Ce texte crée une procédure spéciale pour les « contentieux sociaux », qui regroupent principalement les litiges concernant les personnes handicapées, privées d’emplois ou de revenus ou encore les bénéficiaires de l’allocation logement. Ces litiges ne seront plus jugés par une formation collégiale de jugement avec rapporteur public mais seront désormais traités par un juge unique sans rapporteur public. En outre, ces litiges seront jugés en premier et dernier ressort (plus de possibilité de faire appel) et inaugureront une nouvelle procédure avec plus d’oralité à l’audience qui n’aura pas pour effet d’aider les justiciables dans leur recours. Dans le même temps, les contentieux considérés comme plus nobles (urbanisme, marchés publics…) continueront à être examinés en formation collégiale par trois juges,
éclairés par un quatrième magistrat, le rapporteur public, et cette fois, les jugements seront susceptibles d’appel. Pourtant les dossiers « sociaux » portent sur des questions primordiales pour les intéressés et sont régis par des textes souvent complexes. Les syndicats signataires de ce communiqué de presse s’inquiètent de cette réforme qui stigmatise une partie, déjà fragilisée de la population.
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Le même décret prévoit également un transfert de compétences de premier et dernier ressort jusque là traitées par le Conseil d’Etat aux cours administratives d’appel. S’il est normal que le Conseil d’Etat se recentre sur sa mission de juge de cassation, la logique voudrait que les litiges ainsi transférés soient attribués aux tribunaux administratifs afin que les dossiers suivent le circuit désormais classique
de traitement des affaires : première instance, appel puis cassation. Ce transfert de compétences aux cours administratives d’appel crée là-aussi de fait une justice à 2 vitesses : - des contentieux de masse jugés peu intéressants juridiquement par les services gestionnaires traités devant les tribunaux administratifs avec une procédure de plus en plus allégée, - des contentieux jugés plus nobles traités directement par les cours administratives d’appel et délestés, de ce fait, du double degré de juridiction. Il s’agit d’une réforme de plus pour restreindre les conditions d’accès à la justice pour des motifs budgétaires sans considération de la qualité des décisions rendues. Les syndicats signataires du présent communiqué de presse ne peuvent cautionner de telles réformes qui portent atteinte aux garanties fondamentales des justiciables dont le principe d’égalité d’accès à la justice et d’égalité dans le traitement des requêtes examinés par la juridiction administrative, et espère que le gouvernement actuel ne signera pas le projet de décret tel qu’il lui est présenté. Source : Communiqué du Syndicat des avocats de France du 26 juin 2013
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Décoration
Henri Leclerc Commandeur de la Légion d’honneur
Christiane Féral-Schuhl, Henri Leclerc et Christiane Taubira
ans la salle haute de la Bibliothèque de l’Ordre des Avocats à la Cour d’appel de Paris, la famille judiciaire, ainsi que d’éminentes personnalités des mondes juridique, politique et universitaire au premier rang desquelles Michel Rocard, Pierre Joxe, Robert Badinter et Christine Lazerges étaient réunies au grand complet ce mardi 11 juin 2013 pour écouter Madame le Bâtonnier Christiane Féral-Schuhl et Madame le Ministre de la Justice Christiane Taubira qui ont successivement retracé avec brio et originalité la carrière exemplaire du récipiendaire, acteur inlassable de la régression des atteintes aux libertés et promoteur de la citoyenneté sociale.
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Christiane Féral-Schuhl s’est notamment exprimée en ces termes : « L’avocat est d’abord une voix, celle qui s’élève dans les prétoires lambrissés, pour défendre l’homme que les soupçons menacent ou la victime que la douleur accable. Il est le verbe de ceux que la mise en scène judiciaire a privés de parole (…) Il est le dépositaire de ce reste de liberté de l’être enchaîné dont on n’admettrait pas qu’il s’insurge. » (…) Ces quelques mots auraient pu vous être dédiés tant ils caractérisent l’homme, l’avocat, le défenseur que vous incarnez depuis toujours. Passionné, Démesuré, Insoumis, Colérique, Engagé, Généreux. En Angleterre, on dirait de vous que vous êtes « free, fair and fearless ». Quelques adjectifs que je ne résiste pas à prononcer, alors même que sitôt proférés, ils deviennent réducteurs, enfermant l’homme auquel nous rendons hommage, aujourd’hui, dans un « étiquetage » qui ne lui sied en rien. Car, vous êtes tout cela, mais, bien davantage encore ! A l’issue de l’une de vos premières plaidoiries, Alors commis d’office devant la 23ème chambre correctionnelle, vous jurez « de ne plus jamais
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plaider pour le plaisir des mots. Seule compte l’efficacité ». Pour vous, « Plaider est un aboutissement ». Un aboutissement dès lors qu’il vous appartient d’être utile, efficace. Un aboutissement dont le but est de convaincre, Convaincre, comme le jour où vous avez commencé votre plaidoirie d’appel dans le dossier de l’hormone de croissance en pleurant. Convaincre, quelle que soit la complexité du dossier. La complexité, qui ne vous a jamais rebuté. Convaincre en chantant, s’il le faut. Ainsi, avezvous fredonné « Tout ça n’empêche pas, petit Nicolas, la Commune n’est pas morte, et, Pierrot, tu seras vivant… », lorsque vous avez plaidé pour la famille de Pierre Overney, abattu en 1972, par un vigile de Renault. Rappellerais-je que vous avez prêté serment en 1955 ? Une date qui nous fait sourire parce que votre éternelle jeunesse nous laisse à penser que c’était hier… Secrétaire de la Conférence, en 1962. Elu membre du Conseil de l’Ordre, en 1982. Président de la Ligue française pour la défense des droits de l’Homme et
du citoyen, de 1995 à 2000. Mais avant tout : Un homme de terrain. Un jongleur des mots, un architecte de la stratégie. Comment oublier que vous êtes l’avocat historique de Libération ? De la grande époque de Libé, des procès de l’affrontement avec le Procureur général Sadon qui avait dit « Libé, je les aurai à la Caisse » ? Et ainsi avez-vous régalé la 17ème de vos plaidoiries quasi quotidiennes, Un jour sur l’outrage aux bonnes mœurs avec les fameuses petites annonces, Un autre jour, pour la dépénalisation du cannabis avec « l’appel du 18 joint ». Déjà, déjà, la dépénalisation du cannabis. Mais, bien sûr, vous avez eu bien d’autres vrais clients pour lesquels votre parole d’avocat a été déterminante : Alexandre Grothendieck, Richard Roman, Florence Rey, Jacques Viguier, Véronique Courjault, Diallo, Dominique de Villepin, Dominique Strauss-Kahn. Quelques noms qui brillent au fronton de vos faits d’arme. Vos combats vous ont conduit aux côtés des mineurs de fond, des pêcheurs, des paysans. Vous avez lutté pour l’amélioration des conditions de détention, pour une presse indépendante. Vous êtes ce que l’on dénomme, en Normandie, « Une vraie personne ». Une vraie personne amoureuse de la vie. Vous êtes un gourmand sans limite et sans complexe. Le refus catégorique de faire du sport (« no sport ») est un mode de vie chez vous. Une vraie personne qui a eu l’audace d’ouvrir un cabinet « boutique ». C’est la grande histoire d’Ornano. De sa fameuse cantine, du phalanstère où s’agitaient Francis Teitgen, Jean-Pierre Mignard, Francelyne Lepany et bien d’autres. (...) Nous adressons nos chaleureuses félicitations à Henri Leclerc, juriste d’exception et célèbre avocat pénaliste servant sa profession avec passion et dont l’exigence d’absolu n’a pour rivale que sa constante recherche de perfection et d’efficacité. Jean-René Tancrède 2013-513
Robert Badinter, Michel Rocard, Georges Kiejman, Jean-Yves Le Borgne, Christiane Taubira, Yves Repiquet, Francis Teitgen et Henri Leclerc
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Paris, 11 juin 2013