Edition du jeudi 6 juin 2013

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LES ANNONCES DE LA SEINE Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Jeudi 6 juin 2013 - Numéro 34 - 1,15 Euro - 94e année

Cour de cassation Rapport annuel 2012 24 mai 2013 VIE DU DROIT

Cour de cassation

Etre à l’écoute de la société par Vincent Lamanda............................. Le parquet général de la Cour de cassation : l’avocat de la loi dans l’Etat de droit par Jean-Claude Marin................................................. Vérité judiciaire par Jean-François Cesaro...........................................

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Médiation en Seine Compte-rendu du Conseil scientifique du 18 avril 2013 par Soraya Amrani-Mekki.................................................................

15 AGENDA ......................................................................................5 ECONOMIE

Assises de l’entrepreneuriat

Esprit d’entreprendre et innovation par François Hollande ...........

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AU FIL DES PAGES

Les jeux en ligne en France et en Europe par Martine Béhar-Touchais, Judith Rochfeld et Ariane de Guillenchmidt-Guignot. Avec la participation d’Alice Fournier ......

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VIE DU CHIFFRE

Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables Mobilisation pour le préfinancement du CICE par Joseph Zorgniotti .....................................................................

14 ANNONCES LEGALES ...................................................16 PALMARÈS...............................................................................32

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e Premier Président de la Cour de cassation Vincent Lamanda et le Procureur Général JeanClaude Marin près ladite Cour ont présenté le rapport annuel 2012 de la Haute Juridiction du Quai de l’Horloge lors d’une conférence de presse qui s’est tenue ce vendredi 24 mai 2013 en Grand’Chambre. Cet ouvrage, qui rend compte des évolutions significatives de la jurisprudence de la Cour de cassation, avait été remis trois jours avant à Christiane Taubira, Garde des Sceaux. Le thème retenu cette année était celui de la preuve, mis en perspective à travers une étude de jurisprudence conduite par les membres de la Cour de cassation, sa direction scientifique a été confiée au Professeur JeanFrançois Césaro. Celui-ci a remarquablement démontré que le droit de la preuve, instrument de vérité judiciaire, « dessine une image optimiste de l’homme qui doit être a priori présumé comme bon dès lors qu’il présume sa bonne foi» et a cité Portalis qui écrivaitque « les plus mauvais d’entre les hommes devaient être supposés meilleurs qu’ils ne sont». En 2012 l’activité a été soutenue puisque 30 165 affaires ont été enregistrées par rapport à 29 866 en 2011, le Premier Président Lamanda a donc remercié tous « les contributeurs de cette œuvre collective » et présenté aux journalistes et personnalités une sélection de décisions et d’avis les plus

marquants de l’année écoulée. Il s’est félicité que la Cour de cassation s’attache « à répondre avec exigence au besoin de justice chaque jour réaffirmé par nos concitoyens ». Quant au Procureur Général Jean-Claude Marin, après avoir rappelé brièvement le rôle particulier et l’utilité du parquet général de la Cour de cassation qui « joue celui de l’avocat de la loi dans l’état de droit», il a commenté quelques décisions rendues en 2012 intéressant plus particulièrement le Ministère Public. La Cour de cassation a statué sur l’importance du rôle du parquet général dans des litiges civils et commerciaux : rappelant le rôle de gardien de l’ordre public du parquet général en matière d’état des personnes, elle a cassé trois arrêts de trois Cours d’appel différentes en estimant que « le point de départ du délai est le jour où le Ministère Public découvre la fraude ou le mensonge puisqu’il est le seul à pouvoir agir en annulation de l’enregistrement » alors que les Cours d’appel avaient retenu « que le point de départ du délai était le jour où l’administration avait eu connaissance de la déclaration de nationalité ».

Ce rapport, une fois encore, démontre qu’il est un outil indispensable aux juristes pour actualiser leurs connaissances en raison de la richesse de ses informations et de leur pertinence. Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

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Vie du droit

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Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05 Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède Comité de rédaction :

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Etre à l’écoute de la société par Vincent Lamanda

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

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Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Siège social : 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS R.C.S. PARIS B 339 349 888 Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr e-mail : as@annoncesdelaseine.fr

a publication du rapport annuel constitue un moment fort de la vie de notre juridiction. D'abord, parce qu'elle marque le point d'achèvement de travaux conduits tout au long de l'année par l'ensemble de ses membres. Ce rapport est une oeuvre collective et je remercie tout particulièrement les contributeurs qui ont donné de leur temps et n'ont pas ménagé leurs efforts afin de permettre que, cette année encore, le résultat obtenu soit de qualité. Que soit également remercié le service de documentation, des études et du rapport, qui a assuré la coordination de ces travaux et la préparation de cette édition.

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Moment fort, la publication du rapport de la Cour l'est aussi pour la communauté des juristes, pour qui il constitue un document de référence. Je tiens à saluer ici les représentants de la presse spécialisée qui, chaque année, sont fidèles à notre rendez-vous et se font l'écho de notre publication auprès de cette communauté. Mais s'il s'adresse en premier lieu aux professionnels du droit, le rapport annuel ne leur est pas réservé. Son élaboration répond en effet à une exigence démocratique : la justice étant rendue au nom du peuple français, il est naturel que les citoyens puissent exercer un droit de regard sur son action. C'est pourquoi nous nous félicitons de la présence parmi nous de représentants de la presse généraliste. Cette exigence démocratique n'est du reste pas étrangère au choix fait, à l'occasion de cette édition, d'une nouvelle mise en forme du rapport, que nous voulons plus claire et qui

s'inscrit dans un ensemble plus vaste d'actions destinées à faciliter l'accès à l' information sur les activités de la Cour. Le président Tardif y reviendra sans doute lors de son intervention. A travers sa jurisprudence, la Cour de cassation participe à l’élaboration d’un droit vivant et se tient à l'écoute de la société. Le rapport annuel rend compte de cette réalité en proposant une sélection des décisions et avis les plus marquants de l’année écoulée. Parmi celles-ci, on retiendra l’arrêt par lequel l' Assemblée plénière s'est prononcée sur la conformité aux règles du procès équitable de la constitution de partie civile du Président de la République (Ass. plén., 15 juin 2012, pourvoi n° 10-85.678, rapport p. 375). Mais aussi, la décision, très commentée, rendue par la 1ère Chambre civile sur les conditions dans lesquelles un étranger en situation irrégulière peut être placé en garde à vue (1ère Civ., 5 juillet 2012, pourvoi n° 11-19.250, pourvoi n° 11-30.371 et pourvoi n° 11-30.530, rapport p. 401). En matière économique, citons encore l'avis rendu, le 2 juillet dernier, sur la représentativité des organisations syndicales (demande n° 1200.009, rapport p. 386), ou cet arrêt de la 2ème Chambre civile précisant, à la suite d'une décision rendue par le Conseil constitutionnel, l'étendue de la réparation pouvant être demandée par une victime, devant la juridiction de sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de l'employeur (2e Civ., 4 avril 2012, pourvois n° 11-14.311 et n° 11-14.594, pourvoi n° 1115.393, pourvoi n° 11-18.014, pourvoi n° 11-12.299, rapport p. 458). Et, notre temps étant marqué par la crise économique, les nombreuses décisions rendues par la Chambre commerciale en matière de droit des entreprises en difficulté, dont celle, publiée au rapport,

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Vie du droit qui précise les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité des créanciers à l'occasion d'une procédure collective (Com., 27 mars 2012, pourvoi n° 10-20.077, rapport p. 448). De même, cet arrêt de la Chambre sociale rappelant que la nullité d'une procédure de licenciement pour motif économique ne peut être prononcée qu'en raison de l'absence ou de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi (Soc., 3 mai 2012, pourvoi n° 11-20.741, rapport p. 439). Enfin, dans le domaine du droit de. l'environnement, la décision rendue par la 3ème Chambre civile, le 11 juillet 2012, sur les conditions d'élimination de déchets abandonnés par le locataire d'un site industriel (3e Civ., 11 juillet 2012, pourvoi n° 11-10.478, rapport p. 443) et l'arrêt du 25 septembre dernier rendu par la Chambre criminelle dans la très médiatique affaire dite de « l'Erika » (Crim., 25 septembre 2012, pourvoi n° 1082.93 8, rapport p. 473). Ces quelques exemples montrent combien les questions sur lesquelles notre juridiction est appelée à se prononcer sont variées et concernent des sujets essentiels, souvent placés au coeur de l'actualité et des préoccupations de nos concitoyens. Mais, au delà de cette rétrospective des décisions les plus importantes de l'année, le rapport annuel est aussi l'occasion de prendre du recul et de mettre en perspective la jurisprudence de la Cour dans une étude thématique conduite sous la direction scientifique d'un professeur des universités. Après les personnes vulnérables, le droit de savoir et le risque, c'est le thème de la preuve qui, cette année, a retenu notre attention.

Question centrale pour le procès, qui en détermine souvent l'issue et dont le professeur Cesaro, que je remercie très chaleureusement pour la précieuse contribution qu'il a apportée à nos travaux, vous dira quelques mots. Outre les éléments relatifs à la jurisprudence de la Cour, le rapport annuel propose un ensemble de suggestions de réformes. Il est ainsi le vecteur d'un dialogue entre le juge et le législateur ou le pouvoir réglementaire, dans lequel notre Cour fait part à ces interlocuteurs des difficultés qu'elle a rencontrées dans l'application des textes et des améliorations qui lui paraissent de nature à y remédier. Parmi les suggestions nouvelles formulées cette année, citons celle consistant à clarifier les règles de computation des délais de procédure en matière pénale. Animée par un souci de simplification, de mise en cohérence des textes, cette proposition entend favoriser une réforme d'ensemble qui bénéficierait tant au justiciable qu'aux professionnels du droit. En matière civile, la Cour s’est aussi intéressée à la question — sensible en ces temps de crise — du surendettement des particuliers, en formulant une proposition tendant à permettre que les décisions statuant sur la recevabilité de la demande d'un débiteur puissent faire l'objet d'un appel, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ces suggestions font l'objet d'un suivi régulier et d'échanges avec les représentants du ministère de la justice. Le dialogue que j'évoquais à l'instant est un processus vivant.

Arrêts rendus en Assemblée Plénière ARRÊTS RENDUS EN MATIÈRE CIVILE Prud'hommes - Référé - Mesures conservatoires ou de remise en état - Trouble manifestement illicite - Défaut - Applications diverses - Changement d'affectation d'un salarié consécutif au retrait de son habilitation à la conduite de certains véhicules - Conditions Détermination - Portée Ass. plén., 6 janvier 2012, pourvoi no 10-14.688, Bull. 2012, Ass. plén., no 1, rapport de M. Le Dauphin et avis de M. Foerst Ne constitue pas une sanction disciplinaire le changement d'affectation d'un salarié consécutif au retrait de son habilitation à la conduite de certains véhicules dés lors qu'il a pour seul objet, conformément au réglement de sécurité de l'exploitation d'un système de transport public guidé, d'assurer la sécurité des usagers, du personnel d'exploitation et des tiers. Ayant constaté que le retrait par un employeur de l'habilitation d'un salarié à la conduite des tramways et son affectation sur une ligne

d'autobus étalent intervenus après que ce salarié, à qui aucune réprimande n'avait été adressée en raison de cet incident, eut conduit une rame à contresens de la circulation, et qu'il n'en était pas résulté une modification de son contrat de travail mais seulement de ses conditions de travail, une cour d'appel, statuant en référé, a pu en déduire que le trouble invoqué n'était pas manifestement illicite. Propriété industrielle - Brevets d'invention - Droits attachés Transmission et perte - Nullité Effets - Limite - Paiement effectué en exécution d'une condamnation du chef de contrefaçon devenue irrévocable Ass. plén., 17 février 2012, pourvoi no 10-24.282, Bull. 2012, Ass. plén., no 2, rapport de M. André et avis de M. Le Mesle L'anéantissement rétroaclif et absolu d'un brevet par une décision de juslice n'est pas de nature à fonder la restitution des sommes payées en exécution d'une condamnation antérieure du chef de contrefaçon devenue irrévocable.

ARRÊTS RENDUS EN MATIÈRE PÉNALE Président de la République Exercice des droits de la partie civile - Procès équitable - Égalité des armes - Recevabilité Ass. p/én., 15juin2012, pourvoi no 10-85.678, 8ull. crim. 2012, Ass. p/én., No 1, rapport de Mme Bregeon et avis de M. Salvat Le Président de la République, en sa qualité de victime, ayant joint son action à celle du ministére public, est recevable, en application de l'article 2 du Code de procédure pénale, à exercer les droits de la partie civile pendant la durée de son mandat. Au regard du droit à un tribunal indépendant et impartial, qui ne vise que les juges, la seule nomination des juges par le Président de la République ne crée pas pour autant une dépendance à son égard dés lors qu'une fois nommés, ceux-ci, inamovibles, ne reçoivent ni pressions ni instructions dans J'exercice de leurs fonctions juridIctionnelles. Les garanties du procés équitable s'apprécient en fonction des circonstances de l'espèce.

Le rapport annuel est enfin l'occasion d'un bilan chiffré d'activité. La statistique révèle que, cette année encore, notre Cour a été confrontée à une demande de justice particulièrement forte et que ses membres se sont mobilisés afin d'y répondre dans des délais raisonnables, certains disent même performants. Plus de 30 000 affaires nouvelles ont été enregistrées durant la période de référence, auxquelles se sont ajoutées 385 questions prioritaires de constitutionnalité. La durée de traitement des affaires : un peu plus d'un an en matière civile (dont dix mois en tout laissés aux parties pour déposer leurs mémoires en demande et en défense); cinq mois et demi en matière pénale n'en est pas moins resté contenue. Outre l'investissement de l'ensemble des membres de la Cour, 2012 confirme ainsi les bénéfices tirés de la dématérialisation des procédures, mises en place il y a quelques années. Celle-ci connaîtra prochainement son achèvement avec la signature électronique des arrêts, rendue possible par la promulgation d'un décret, le 28 décembre dernier. Cette courte présentation montre combien l'année passée fut, pour notre juridiction, une période riche et féconde. Ouverte sur le monde, attentive aux préoccupations de notre temps, soucieuse de la qualité des réponses apportées par le juge aux questions dont il est saisi, la Cour de cassation s'attache à répondre avec exigence au besoin de justice chaque jour réaffirmé de nos concitoyens. Ce rapport annuel se veut le reflet de cette action.

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Vie du droit Loup, l’avocat général, Bernard Aldigé, a demandé au professeur Keppel d’intervenir devant la Chambre sociale de la Cour comme amicus curiae. Par ailleurs, dés lors que se pose un problème de droit international, les avocats généraux consultent également les magistrats de liaison présents dans les représentations diplomatiques françaises ou dans les ministères de la justice étrangers.

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Le magistrat de liaison en Algérie a ainsi été consulté par un avocat général de la deuxième Chambre à propos des protocoles judicaires liant la France et l’Algérie. Enfin, en étant publiés dans des revues juridiques, les avis des avocats généraux permettent d’appréhender la richesse du débat qui ne ressort pas toujours de la simple lecture de l’arrêt. La publication des avis des avocats généraux dans les revues juridiques est en effet importante pour l’élaboration de la doctrine. Cela est particulièrement intéressant lorsqu’un arrêt est publié et qu’il est accompagné de l’avis de l’avocat général et du commentaire d’un universitaire.

Le parquet général de la Cour de cassation : l’avocat de la loi dans l’Etat de droit par Jean-Claude Marin e voudrais avant toute chose, rappeler brièvement le rôle du parquet général de la Cour de cassation dans l’élaboration de la jurisprudence de cette Cour.

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Ce parquet général, qui ne fait pas partie de la hiérarchie du ministère public en tant qu’il n’est chargé d’aucune mission d’action publique, joue en toute indépendance, le rôle si particulier d’avocat de la loi et de son application adaptée aux évolutions et aux aspirations de la société civile, et ce dans le respect des principes de l’Etat de droit. Chaque avocat général à la Cour de cassation est affecté à l’une des Chambres de la Cour et donne un avis, soit dans toutes les affaires, comme à la Chambre criminelle, soit dans les affaires qui méritent un débat approfondi. Ces avis sont écrits et communiqués, avant l’audience, aux conseillers de la chambre appelés à siéger dans l’affaire ainsi qu’aux parties, puis développés éventuellement, à l’oral, à l’audience. Ce regard de l’avocat général, croisé avec celui du conseiller rapporteur, est essentiel à l’élaboration des arrêts et donc de la jurisprudence de la Cour. Son utilité et son originalité est telle que l’institution de l’avocat général, dans cette configuration, est reconnue même hors de France. Ainsi, la Cour de justice de l’Union européenne dispose également du concours d’avocats généraux dont les conclusions sont lues, commentées et constituent une partie importante de la doctrine, en droit, de l’Union européenne. L’avocat général à la Cour de cassation effectue, en premier lieu, un examen approfondi de l’affaire

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afin d’évaluer les mérites des moyens de cassation soulevés et des arguments qui les soutiennent, explore les différentes solutions, les expose, les argumente et éclaire ainsi la Chambre dans son délibéré. Même lorsque l’avis de l’avocat général n’est pas suivi par la formation de jugement, il permet un débat riche et complet sur des questions juridiques délicates, comme cela a été le cas, notamment, s’agissant de la question de la recevabilité de la constitution de partie civile du Président de la République pendant la durée de son mandat (Assemblée Plénière, 15 juin 2012, Bull n° 1, cité au rapport, p. 375) ou lors de l’examen du pourvoi formé dans l’affaire de l’Erika (Crim., 25 septembre 2012, Bull n° 198, cité au rapport, p. 473). Ensuite, et surtout, en dehors de ce rôle classique et assez connu, l’avocat général peut, à la différence du conseiller rapporteur, s’ouvrir vers l’extérieur et recueillir des informations auprès d’administrations, de groupements, de syndicats, de sachants, d’amici curiae, afin de bien comprendre l’impact ou les conséquences que pourrait avoir telle ou telle solution. Les éléments ainsi recueillis sont versés au débat contradictoire et servent à éclairer la Chambre qui pourra alors prendre sa décision en toute connaissance de cause. Ainsi, dans l’affaire dite de « l’embuscade d’Uzbin » ayant donné lieu à l’arrêt de la Chambre criminelle du 10 mai 2012 (pourvoi n° F 12-81.197, non cité au rapport), l’avocat général Michel Gauthier a pu s’entretenir avec une délégation du ministère de la défense et recueillir des informations utiles pour comprendre le fonctionnement des troupes en opérations extérieures, intégrées à une force internationale agissant en exécution de résolutions du conseil de sécurité de l’ONU et, notamment, sur la notion de « risque consenti », qui est la conséquence des devoirs des militaires. Enfin, et même si l’arrêt n’a été rendu qu’en 2013, il convient de mentionner que dans l’affaire Baby

La Cour de cassation a, en 2012, pour me concentrer sur les seules décisions intéressant le ministère public, été appelée à plusieurs reprises à statuer sur l’importance du rôle de ce dernier notamment dans les litiges civils et commerciaux. La Cour a d’abord rappelé l’importance de l’obligation de communication au ministère public des cours et tribunaux lorsque celle-ci est requise par la loi ou le règlement. Ce rappel est intervenu dans trois cas. La deuxième Chambre civile a rappelé la nécessité qu’il y a, avant de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation, de recueillir l’avis du ministère public dans les instances où il n’est pas partie. L’omission de cette formalité rend la question irrecevable (Civ. 2°, 31 mai 2012, QPC n° 12-40.023 et Civ. 2°, 27 septembre 2012, QPC n° 12-40.057, cités au Rapport, p. 487).

En matière de redressement judiciaire, la Chambre commerciale, économique et financière a jugé que, lorsque l’avis du ministère public est requis par la loi, la juridiction ne peut prononcer la résolution d’un plan de redressement sans que le ministère public ait fait connaître son avis. Il ne suffit pas que la procédure lui ait été communiquée (Com., 11 décembre 2012, Bull n° 227, non cité au Rapport). La Cour a rappelé que, lorsque le juge envisage de solliciter l’avis de la Cour de cassation en application de l’article L 441-1 du code de l’organisation judiciaire, il doit en aviser les parties et le ministère public à peine d’irrecevabilité de la demande d’avis (Avis du 2 avril 2012, demande n° 12-00.001, cité au Rapport, p. 383).

Les Annonces de la Seine - jeudi 6 juin 2013 - numéro 34


Vie du droit Par ailleurs, la Cour a rappelé à deux autres occasions, le rôle particulier du ministère public devant les juridictions civiles, notamment en matière d’état des personnes et de nationalité.

Dans un dernier registre, en matière de contrôle du séjour des étrangers sur le territoire, il est important de signaler les arrêts rendus par la première Chambre civile.

La première concernait des pourvois en cassation formés par le procureur général près la Cour d’appel de Paris à l’encontre d’arrêts de cette Cour qui avaient prononcé l’exequatur de décisions étrangères ayant prononcé l’adoption, équivalente en France à une adoption plénière, d’enfants mineurs par des parents du même sexe. Le procureur général a obtenu la cassation de ces arrêts en faisant remarquer que l’exequatur entrainant la transcription des jugements d’adoption sur les registres d’état-civil français, aboutirait à ce que l’acte de naissance d’un enfant indique qu’il est né de deux parents du même sexe. Or, ceci est contraire à un principe essentiel du droit français car la cohérence du droit de la filiation serait rompue. Ce droit suppose, en effet, qu’une personne qui possède une double filiation soit issue d’une lignée paternelle et d’une lignée maternelle (Civ 1°, 7 juin 2012, Bull n° 125 et 126, cité au rapport, p. 403).

Dans un premier arrêt, cette Chambre a étendu la solution adoptée par la Cour de justice de l’Union européenne concernant le contrôle d’identité de l’article 78-2 du Code de procédure pénale au contrôle prévu à l’article L 611-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Ces contrôles portent atteinte au principe de libre circulation dans l’espace Schengen (Civ. 1ere, 6 juin 2012, Bull n° 119, cité au rapport, p. 398).

La seconde concernait le délai pendant lequel le ministère public peut contester l’enregistrement d’une déclaration d’acquisition de la nationalité française par mariage, laquelle est possible lorsqu’il y a eu mensonge ou fraude. L’action doit être engagée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du mensonge ou de la fraude. La Cour de cassation a rappelé, en cassant trois arrêts de trois Cours d’appel différentes, que le point de départ du délai est le jour où le ministère public découvre la fraude ou le mensonge puisqu’il est le seul à pouvoir agir en annulation de l’enregistrement. Les Cours d’appel avaient retenu que le point de départ du délai était le jour où l’administration avait eu connaissance de la déclaration de nationalité (Civ 1°, 28 mars 2012, Bull n° 76, cité au rapport, p. 405).

Dans une série de trois arrêts rendus après avis de la Chambre criminelle, la première Chambre civile s’est prononcée sur la question du placement en garde à vue des ressortissants de pays tiers à l’Union européenne, sur le seul fondement de l’irrégularité de leur séjour. Cette Chambre a considéré que le séjour irrégulier ne peut être constitutif d’une infraction punie d’une peine d’emprisonnement (ce que prévoit l’article L 621-1 du CESEDA) et que dès lors, la garde à vue, qui suppose la commission d’une infraction punie d’une peine d’emprisonnement, n’est pas possible du fait de ce seul séjour irrégulier (Civ 1ère, 5 juillet 2012, Bull n° 158, cité au rapport, p. 401). Ces arrêts ont entrainé un bouleversement complet des pratiques du ministère public relatives au contrôle du séjour des étrangers ressortissants de pays tiers à l’Union européenne. Ces quelques exemples, parmi tant d’autres, montrent que notre Cour de cassation est au cœur des grands sujets de l’actualité du droit, de son adaptation aux évolutions de la société civile et des exigences de nos démocraties sous le regard avisé du Conseil constitutionnel, de la Cour de justice de l’Union européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme.

Agenda

INSTITUT INTERNATIONAL DES DROITS DE L’HOMME La prévention des violations des droits de l’homme Colloque les 13 et 14 juin 2013 Université Paris II Panthéon – Assas 92, rue d'Assas 75006 PARIS Renseignements : 03 88 45 84 51 julie.tavernier@iidh.org 2013-405

ASSOCIATION FRANÇAISE DE DROIT DE LA SANTÉ - INSTITUT MAURICE HAURIOU - INSTITUT DROIT ET SANTÉ - ASSOCIATION FRANÇAISE DE DROIT CONSTITUTIONNEL Constitutions et Santé : regards comparatifs Colloque 17 juin 2013 Université Paris - Descartes 45, rue des Saints-Pères 75006 PARIS Renseignements : 01 42 86 42 10 veronique.fraysse@parisdescartes.fr 2013-406

REVUE BANQUE Liikanen, Vickers, Volcker : vers une nouvelle organisation des activités bancaires ? Colloque le 18 Juin 2013

Ces arrêts rappellent l’importance du rôle du ministère public de gardien de l’ordre public en matière d’état des personnes.

9, avenue Hoche 75008 PARIS Renseignements : 01 48 00 54 04 marchal@revue-banque.fr

Arrêts rendus en chambre mixte ARRÊTS RENDUS EN MATIÈRE CIVILE Mesures d'instruction - Expertise Irrégularités affectant le déroulement des opérations d'expertise - Sanction - Portée Ch. mixte, 28 septembre 2012, pourvoi n" 11-11.381, Bull. 2012, Ch. mixte, n" l, rapport de Mme Vallée et avis de M. Mucchielli Les parties à une instance au cours de laquelle une expertise judiciaire a été ordonnée ne peuvent invoquer l'inopposabilité du rapport d'expertise en raison d'irrégularités affectant le déroulement des opérations d'expertise, lesquelles sont sanctionnées selon les dispositions de l'article 175 du code de procédure civile qui renvoient aux règles régissant les nullités des actes de procédure. Dés lors, ayant constaté que la

nullité d'un rapport d'expertise dont le contenu clair et précis avait été débattu contradictoirement devant elle n'était pas soulevée, une cour d'appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen, a pu tenir compte des appréciations de l'expert pour fixer l'indemnisation. Preuve (règles générales) - Règles générales - Moyen de preuve Expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties Élément suffisant (non) Ch. mixte, 28 septembre 2012, pourvoi no 11-18.710, Bull. 2012, Ch. mixte, no 2, rapport de M. Feydeau et avis de M. Mucchielli Si le juge ne peut refuser d'examiner une piece régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une

expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties. Officiers publics ou ministériels Acte authentique - Acte affecté d'un défaut de forme - Prescriptions de l'article 8, devenu 21, du décret n' 71-941 du 26 novembre 1971 Respect - Défaut - Portée Ch. mixte, 21 décembre 2012, pourvoi no 12-15.063, Bull. 2012, Ch. mixte, no 3, rapport de M. Maunand et avis de M. Azibert Ch. mixte, 21 décembre 2012, pourvoi no 11-28.688, Bull. 2012, Ch. mixte, no 4, rapport de M. Maunand et avis de M. Azibert L'inobservation de l'obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l'acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique et, partant, son caractère exécutoire.

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INSTITUT MICHEL VILLEY « Droit et sociologie (1860-1939). Moment juridique de la sociologie ou moment sociologique du droit ? » Colloque les 20 et 21 juin 2013 Université Paris II Panthéon – Assas 12, Place du Panthéon 75005 PARIS Renseignements : 01 44 41 89 92 inst.mvilley@u-paris2.fr 2013-408

AVOSIAL - AVOCAT D’ENTREPRISE EN DROIT SOCIAL - ECOLE DES HAUTES ETUDES APPLIQUÉES DU DROIT (HEAD) "Co-emploi : A la recherche d'un employeur ou d'un payeur ?" Colloque le 25 Juin 2013 120, rue La Fayette 75010 PARIS Renseignements : 01 34 74 38 95 www.avosial.fr

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Vérité judiciaire par Jean-François Cesaro

nstrument de la vérité judiciaire. La preuve est le moyen par lequel est découverte une vérité humaine particulière, cela vaut pour la vérité judiciaire. D'aucuns pourraient penser que la vérité est absolue et ne connaît pas de variations quelle que a soit l'enceinte où elle est proférée. Le vocabulaire de la philosophie définit en effet la preuve comme une « opération amenant l'intelligence d'une manière indubitable et universellement convaincante (du moins en droit), à reconnaîrre la vérité d'une proposition considérée d'abord comme douteuse (1)». La vérité judiciaire ne saurait avoir d'aussi grandes prétentions. Elle ne naît pas dans le calme d'un cabinet de philosophe qui, nourri de lecture et d'échanges, peut consacrer toute son existence à la découverte de ces vérités universelles et absolues. Elle n'est pas non plus le fruit d'expérimentations conduites dans un laboratoire à l'aide d'éprouvettes et de microscopes, par des équipes d'hommes collaborant à la découverte de tel ou tel nouveau remède ou vaccin. La vérité judiciaire naît dans le contexte difficile d'un conflit. Il ne s'agit pas d'une simple controverse intellectuelle ou scientifique, portant sur la validité de telle ou telle théorie, et ayant pour enjeu la reconnaissance par les pairs, mais de la recherche d'une vérité qui s'effectue lors de procès pouvant mettre en cause la liberté, la fortune, la filiation ou l'honneur des justiciables. Dans un tel contexte, chacun est si bien convaincu de son droit qu'il peut, pour le soutenir, vouloir mettre en oeuvre tous les moyens probatoires allant parfois jusqu'à dissimuler ou à mentir « de bonne foi ». La vérité judiciaire présente encore la caractéristique notable de devoir être affirmée dans un temps limité. Alors qu'en philosophie ou dans les sciences on peut concevoir que la

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vérité soit le résultat d'une vie voire de plusieurs, en droit, le juge ne peut différer son jugement dans l'attente d'une parfaite certitude. Il doit trancher le litige en un temps limité, car l'existence même du procès est un trouble auquel il est nécessaire de mettre un terme. L'exigence du respect d'un délai raisonnable est en effet considérée comme un droit fondamental consacré par la Cour européenne des droits de l'homme et figure dans l'article préliminaire du Code de procédure civile (2). C'est donc une vérité raisonnable et de nature à éteindre rapidement le conflit que l'institution judiciaire doit imposer. Condition du droit. La vérité judiciaire est encore particulière en cela qu'elle en conditionne une autre : la vérité du fait détermine la vérité du droit. En effet, la détermination de la bonne règle applicable ou de sa signification réelle n'a de sens et ne permet de rendre justice que lorsque les faits sont prouvés. L'application d'une règle de droit suppose que les conditions légales de son application soient établies. Sans preuve, le droit est comme désarmé, il ne peut être mis en oeuvre par le juge. Selon un adage ancien, « c'est la même chose de ne pas être ou de ne pas être prouvé (3) ». Il est donc possible d'avoir juridiquement raison, mais judiciairement tort. L'enjeu est considérable pour le justiciable qui doit présenter au juge, s'il veut que ses droits soient reconnus, les preuves de ses allégations. Objet de droit. La vérité judiciaire est enfin particulière parce qu'elle est admise selon les voies du droit. Le vocabulaire juridique définit la preuve comme « la démonstration de l'e xistence d'un fait [... ] ou d'un acte [... ] dans les formes admises ou requises par la loi (4) ». Il peut paraître bien étrange, pour le non-juriste, que des règles de droit régissent la manière dont la preuve est admise en justice. La vérité ne devrait-elle pas être une pure question de fait, laissée aux bons soins des enquêteurs, des experts, des scientifiques et de tous les sachants ? Il serait théoriquement concevable que, dans

chaque procès, des agents soient chargés de la recherche de la vérité. Un tel corps d'auxiliaires de la justice aurait ainsi, dans tout litige, et pas uniquement lorsqu'il s'agit de rechercher des infractions, vocation à systématiquement assister les plaideurs pour l'établissement des faits nécessaires à l'application du droit. En dehors de la matière pénale, où les enjeux pour la société sont considérables, ce corps n'existe pas. Il est plusieurs bonnes raisons à cela. En premier lieu, on peut se demander s'il appartient à l'Etat, dans tous les litiges privés, même ceux qui sont mineurs, d'assister les plaideurs. Outre les coûts formidables pour les finances publiques d'un tel dispositif, ce serait également une incitation au procès. Or, il n'est guère certain que cela soit souhaitable. Il doit demeurer une zone grise de relatif inconfort où les justiciables ont vocation à trouver des arrangements raisonnables. Selon un adage classique, les « mauvais arrangements valent mieux que bon procès ». Ajoutons que certains justiciables pourraient être incités à instrumentaliser la justice en l'utilisant comme un instrument d'enquête sur autrui. Il suffirait en effet de faire procès à autrui pour que soit jetée sur les secrets de son existence la lumière parfois inutilement cruelle de la vérité. Faut-il, sous un prétexte juridique quelconque, sacrifier l'intimité de la vie privée, la paix des familles, révéler à tous les difficultés ou les savoir-faire d'une entreprise? Cela n'est guère certain. Les règles de droit visent précisément à ce que la recherche de la vérité ne soit pas la cause de trouble inutile. En généralisant le propos, on peut même aller jusqu'à distinguer une finalité du droit de la preuve. La vérité judiciaire doit participer au fonctionnement harmonieux de notre société. Plus que de révéler les faits, il s'agit de renouer les hommes. Délimitation du sujet probatoire. Un des premiers principes du droit de la preuve dont il convient de faire état est celui qui délimite les questions faisant l'objet d'un débat probatoire. Selon une règle faussement simple, seuls les faits donnent lieu à un débat probatoire alors que le droit, qui est connu du juge, ne saurait être objet de preuve. Deux conséquences en sont naturellement déduites : 1) lorsqu'il s'agit de droit, il n'est pas question de débat probatoire, mais d'application de règles nécessairement connues par le juge ; 2) lorsqu'il s'agit de faits, le débat probatoire est possible et relève de l'appréciation souveraine des juges du fond. La première comme la seconde proposition appellent des précisions. Ainsi, la connaissance du droit par le juge porte sur la norme étatique interne. Il n'est pas supposé connaître tous les usages et toutes les coutumes de nos régions et pays, ni les accords professionnels qui ont été conclus par les partenaires sociaux. Enfin, il n'est pas davantage tenu de connaître les lois de tous les pays. Dans tous ces cas, la règle devient, pour partie au moins, objet d'un débat probatoire. La Cour de cassation l'exprime, s'agissant de la loi étrangère, en une jolie formule: lorsqu'une loi étrangère est applicable au litige, le juge doit en rechercher « la teneur, avec le concours des parties [nous soulignons] et personnellement s'il y a lieu (5)». Que le juge connaisse le droit interne n'interdit nullement aux parties d'en discuter le sens dans

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Règles de conviction ? La conviction du magistrat est encore, à bien des égards, déterminée par des règles de fond qui doivent permettre la juste manifestation de la vérité. Si, en principe, le juge dispose d'une grande liberté pour choisir les preuves qui fonderont sa décision, le droit formule néanmoins un certain nombre de principes qui guident cette conviction. Notre droit opère une transaction entre un système de « preuve légale » où la loi détermine la manière dont le juge forme sa conviction, et un système de « preuve morale » où le juge est totalement libre dans l'appréciation de la valeur des preuves qui lui sont présentées. Ici encore, il faut avoir égard aux motifs qui conduisent à déterminer l'importance des preuves. Certains relèvent du bon sens. Ainsi, un adage classique prévoit que « nul ne peut se constituer un titre à soi-même ». Chacun comprend en effet qu'il n'est guère possible de créer de sa propre main un document imposant à autrui une obligation contractuelle. Sans quoi, il suffirait simplement de réclamer par un courrier valant mise en demeure une certaine

somme pour que celle-ci soit due. Pour autant, un tel principe appliqué dans toute sa rigueur conduirait à rejeter des procès toutes les preuves qui proviennent même indirectement de celui qui les produit. Cette solution n'est pas retenue par notre système juridique. « Ce qui est strictement interdit, c'est de se constituer un moyen de preuve pour les besoins du procès (9) ». En réalité, ce qui importe véritablement ce n'est pas de déterminer l'origine d'une preuve, mais de s'assurer qu'elle présente des garanties suffisantes de sincérité (10). Une autre règle d'une importance considérable est celle qui fait primer, s'agissant de la preuve des obligations, les écrits sur les indices et les témoignages. L’article 1341 du Code civil, dont la rédaction est demeurée inchangée depuis 1804, dispose en effet qu'il « doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre ». Cette règle est-elle le gage de la parfaite vérité? Ce n'est guère certain, car ce qui est écrit peut ne plus correspondre à la volonté des parties ou être une simulation. Mais alors, pourquoi imposer cette règle? C'est d'abord la considération de l'alternative qui confère une supériorité à l'écrit sur le témoignage. La preuve par témoin n'est, en effet, pas un meilleur gage de vérité. Si en ancien droit on préférait les témoins qui rendent compte de ce qu'ils disent, cela supposait, sans garantie de succès, d'importants efforts pour déceler le mensonge (11), débrouiIler l'imprécision, stimuler la mémoire des témoins (12). L'ancien droit se méfiait encore des témoignages isolés, un adage - testis unus, testis nullus - leur refusant même toute portée. Certaines coutumes prévoyaient de ne retenir que les témoignages d'hommes disposant d'un patrimoine, car ces derniers ont quelque chose à perdre en cas de mensonge. Ainsi, le statut de la ville de Bologne de 1454 ne permettait en matière contractuelle que la « déposition de quatre témoins gens d'honneurs & dignes de foy, majeurs de vinft-cinq ans, & au-dessus de tout reproche & possedans chacun la valeur de deux cens livres, monnoye de Bologne, auquel cas ces fortes preuves par témoins doivent être admises de quelque somme, de quelque chose, ou de quelque fait qu'il s'agisse, à concurrence de cinq cens livres & non au-dessus (13) ». Ce sont ces difficultés, liées à la vérification délicate des témoignages, qui ont convaincu, en 1566, Charles IX d'imposer la supériorité de l'écrit à l'article 54 de l'ordonnance de Moulins. L'objectif poursuivi n'est pas d'affirmer une vérité absolue de l'écrit, mais de lui attribuer la valeur de vérité préférable, car elle permet « d'obvier à multiplication de faits que l'on a vu ci-devant estre mis en avant en jugement, sujets à preuves de témoins et reproches d'iceux dont adviennent plusieurs inconvéniens et involutions de procès ».

n'apparaît qu'au moment du procès et n'existe que pour le procès, il repose sur une mémoire faillible, parfois subjective et sensible aux passions. Ce n'est pas là pourtant l'argument le plus convaincant pour fonder la valeur particulière de la preuve écrite. Deux raisons supplémentaires au moins peuvent être avancées. En premier lieu, l'écrit est immédiatement perceptible par les sens, la partie qui perd le procès en raison de la preuve apportée par cet écrit ne peut qu'en constater l'existence. En second lieu, et c'est là le motif décisif, la règle de l'écrit est un appel à la responsabilité des justiciables. Elle leur fixe un devoir. Lorsque l'enjeu du contrat est important, il convient d'être prudent et de rédiger l'engagement sur un support stable auquel le droit donnera une efficacité juridique maximale. En conséquence, celui qui ne rédige pas d'écrit se montre négligent et succombe légitimement. Inutile de tenter de rattraper cette insuffisance et d'encombrer la justice avec des témoignages incertains et imprécis. L'application de l'article 1341 du Code civil, qui incite à la constitution d'écrit, contribue ainsi à améliorer le fonctionnement de la société en sécurisant et en fiabilisant les rapports juridiques qu'entretiennent les hommes. C'est une autre illustration de la manière dont le droit concilie, dans la vérité judiciaire, l'exigence de vérité avec l'exigence de justice. On peut se demander si les évolutions des techniques ne devraient pas conduire à reconsidérer la place de l'écrit classique dans la hiérarchie des preuves. La question n'est guère nouvelle. Chaque génération, en considération de son état technologique, l'a posée. En 1890, un remarquable juriste s'interrogeait sur les applications que pouvait recevoir le phonographe en matière probatoire (15) dans les années cinquante, l'interrogation s'étendait ensuite au rôle probatoire du magnétophone (16) et aujourd'hui, où certains s'extasient devant les réseaux informatiques, on se demande si l'écrit électronique ne devrait pas supplanter l'écrit papier. Le droit adopte une démarche prudente. il n'est guère question de renverser des règles qui participent d'une certaine sécurité juridique depuis plusieurs siècles au motif que le support des échanges humains évolue.

Daniel Tardif

Bien entendu, la doctrine rappelle que la force de l'écrit tient également au fait qu'il est préparé avant tout litige et qu'il a très souvent pour vertu d'éviter la survenance de celui-ci (14). Son contenu ne se modifie pas et reste insensible aux passions du procès. Le témoignage, lui,

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les procès. Il ne s'agit pas de prouver le droit, il s'agit d'en proposer une interprétation. En cette matière le juge est investi par le législateur de la mission de déterminer le sens véritable des lois. C'est non seulement un pouvoir, mais il s'agit surtout d'un devoir. L'article 4 du Code civil rappelle en effet que le juge ne peut refuser de juger « sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi ». Lorsqu'il s'agit de l'existence des faits, le débat probatoire où les parties ont un rôle essentiel peut avoir lieu. C'est au juge du fond qu'il appartiendra, souverainement, de déterminer ceux qui seront établis et ceux qui ne le seront pas. Ces appréciations n'ont pas vocation à être discutées devant le juge de cassation dès lors qu'il ne s'agit pas de droit. Pour autant, ce pouvoir sur les faits n'est pas totalement exempt de contrôle. En premier lieu, le droit pose les définitions. C'est à partir des règles de droit que l'on peut déterminer les faits pertinents qui seuls seront objets de débat probatoire. Autrement dit, l'appréciation souveraine des juges du fond ne peut porter que sur des faits qui entrent dans la définition prévue par la règle et contrôlée par la Cour de cassation (6). Il est ensuite certaines constatations dont la nature est empreinte d'incertitude. Certaines notions présentent un caractère intermédiaire entre le fait et le droit, le juge du fond en apprécie l'essentiel sous la réserve d'un contrôle, formé parfois de quelques directives, du juge de cassation (7). Enfin, l'existence d'un pouvoir souverain quant à l'appréciation des faits ne permet pas aux juges du fond de nier les évidences. Lorsque tel est le cas, la Cour de cassation intervient et contrôle en utilisant la technique de la dénaturation. Ainsi, l'appréciation de l'intention des parties à un contrat relève en principe du pouvoir des juges du fond. Deviner ce qu'a voulu faire tel ou tel contractant est en effet fort délicat, suppose de la psychologie, et n'est donc pas une question de droit. Pour autant, lorsque les termes du contrat sont sans ambiguïté, il est interdit au juge de prétendre leur donner un sens différent de celui que dicte l'évidence (8). Ainsi, le fait lorsqu'il est indubitable, lorsque sa preuve est éclatante, obtient un statut juridique comparable au droit.

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Vie du droit Pour autant, l'écrit électronique n'est nullement rejeté, il est admis avec des réserves qui viennent en garantir la fiabilité. L'article 1316-1 du Code civil dispose ainsi que « l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité». Il n'est pas question ici de remplacer une preuve par une autre, mais de permettre aux nouveaux modes de preuve, sous de strictes conditions, d'avoir la même force probatoire que les anciens. Une manière de prouver. En droit, la manière dont la vérité est révélée à la justice importe autant, si ce n'est plus, que la vérité elle-même. La violence et la souffrance sont inscrites dans l'histoire du droit de la preuve dont elles marquent jusqu'à l'étymologie du verbe « prouver », qui a d'abord signifié « mettre à l'épreuve » (17). Le recours à l'ordalie pour apporter la preuve judiciaire dans les sociétés archaïques en est la meilleure illustration. Elle consiste à soumettre un individu à une épreuve pour déterminer la véracité de ses affirmations. Telle personne devra ingurgiter un poison et l'on jugera de sa culpabilité à sa survie et à la nature de ses convulsions ; tel accusé sera jeté dans les eaux d'un fleuve, de la mer ou d'une cuve et son aptitude à flotter déterminera sa liberté ; tel plaideur devra saisir dans un récipient d'eau bouillante un objet et la nature de ses brûlures déterminera la vérité de ses propos (18). La force de ces procédés probatoires était telle qu'il arrivait fréquemment que des accusés, alors même qu'ils étaient innocents, acceptaient d'être considérés comme coupables. Ce n'était nullement le résultat du fatalisme, mais le résultat de l'ordalie elle-même qui ébranlait chez l'accusé « jusqu'à la croyance en son innocence (19)». L'évolution du droit de la preuve dans nos sociétés a consisté non seulement à se départir des conceptions mystiques qui sous-tendent ces épreuves, mais aussi à écarter la violence lors de la recherche de la vérité. Notre droit tente d'instaurer un rapport de proportionnalité entre le trouble causé par la recherche de la vérité et l'importance des principes en cause dans le litige. Plus l'action judiciaire mettra en jeu une valeur fondamentale, plus les moyens employés pourront être intrusifs. Réciproquement, le respect de règles strictes s'imposera aux plaideurs poursuivant en justice la satisfaction d'intérêts purement individuels. La recherche de cet équilibre conduit à, d'une part, contrôler la légitimité de l'acquisition des preuves et à, d'autre part, présenter la possibilité pour chaque partie de discuter les preuves avancées par l'autre. Lorsqu'il s'agit de déterminer les preuves que le juge peut admettre, une première limite tient au respect naturellement dû à l'intégrité de la personne. Il en résulte que la torture ne doit en aucun cas, pour aucune cause, être admise comme un moyen d'obtenir des preuves. Ainsi que le rappelle la présente étude, il n'est aucun facteur justificatif, aucune balance des intérêts, aucune prise en considération de la personne, de la nature de l'infraction ou de la qualité de la victime qui puisse justifier de tels agissements (20). Cette prohibition, qui pourrait relever du droit

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naturel, est consacrée par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui prévoit que « nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». Ce principe ne s'applique pas uniquement à la matière pénale, il s'étend à l'ensemble du droit de la preuve. Ainsi, en dehors du droit pénal, l'article 259-1 du Code civil dispose qu'en matière de divorce, un époux « ne peut verser aux débats un élément de preuve qu'il aurait obtenu par violence [... ] ». Hormis ce principe intangible, la conciliation entre la vigueur des moyens probatoires et les fins poursuivies suppose de délicats aménagements. Le contentieux relatif aux expertises biologiques en matière de filiation constitue une bonne illustration. La Cour de cassation y décide que « l'expertise biologique est de droit en matière de filiation (et d'action à fins de subsides (21)), sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder ». Ce principe permet aux juges de refuser une expertise biologique demandée dans un objectif strictement financier contre l'auteur d'une reconnaissance de paternité qui, ayant reconnu des relations sexuelles avec la mère de l'enfant, n'a jamais contesté, pendant près de soixante ans, sa paternité. La paix des familles et le respect d'une certaine quiétude quant au lien de filiation constituent un motif légitime s'opposant à l'expertise biologique (22). On trouve la même recherche d'une solution équilibrée, proportionnée, dans le contentieux relatif au recours à un détective privé lors d'un divorce. En principe, la Cour de cassation ne condamne pas ce procédé et permet au mari ou à la femme suspectant un adultère de solliciter un tel enquêteur (23). En revanche, elle condamne au nom du respect dû à la vie privée la surveillance constante de plusieurs mois pesant sur l'un des époux afin d'obtenir une diminution de la prestation compensatoire lui étant due (24). On trouve aussi en droit des relations de travail la recherche de tels équilibres. D'un côté l'employeur, propriétaire des moyens de production, investi de prérogatives contractuelles de contrôle de l'activité de ses salariés, peut souhaiter s'assurer qu'ils accomplissent efficacement leur prestation de travail ; de l'autre, l'entreprise ne saurait se transformer en un lieu de contrôle permanent et le Code du travail prescrit le respect des libertés du salarié. Plus généralement, la relation de travail impose aux parties confiance et loyauté réciproques. Il en résulte que si l'employeur peut librement contrôler le contenu des outils mis à la disposition du travailleur, il ne peut pour autant prétendre violer les espaces de vie personnelle (désignés comme tels par le salarié) que les salariés ont pu se ménager dans les interstices de leur vie professionnelle, il ne peut davantage placer des dispositifs clandestins de contrôle d'autrui, ni transformer son entreprise en un lieu de perpétuelle surveillance électronique. La nécessité, dans un certain nombre de contentieux civils, de faire preuve d'une certaine franchise, voire d'une certaine transparence lors de la recherche des preuves ne saurait être généralisée. Il faut parfois, pour saisir la vérité, pouvoir approcher à pas feutrés et dans le secret. Ainsi, il ne saurait être question d'informer un

délinquant que ses conversations téléphoniques sont enregistrées ou que les lieux où il est présumé commettre ses forfaits sont placés sous écoute. Ici le droit protège le secret de l'enquête et à travers lui permet la défense de la société tout entière. Bien entendu il ne s'agit pas d'un droit d'écoute inconditionnel et illimité dans le temps. La chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle que les écoutes et enregistrements trouvent une base légale dans le Code de procédure pénale et peuvent être effectués à l'insu des intéressés dès lors qu'ils sont opérés pendant une durée limitée, sur l'ordre d'un juge et sous son contrôle en vue d'établir la preuve d'un crime ou d'une infraction portant gravement atteinte à l'ordre public et d'en identifier les auteurs (25). Elle précise encore que l'écoute doit être obtenue sans artifice ni stratagème et que sa transcription doit pouvoir être discutée par les parties concernées dans le respect des droits de la défense(26). C'est là un second principe, qu'on appelle principe de la contradiction, essentiel pour l'admission des preuves, qui veut que chaque partie soit mise en mesure de discuter les preuves qui sont avancées par l'autre. Cette exigence est d'abord la conséquence de la recherche de l'égalité dans l'enceinte du procès. Chaque partie doit être en mesure, comme l'autre, de défendre ses intérêts. Mais cette exigence contribue aussi à l’amélioration de la recherche de la vérité. En effet l'une des vertus du principe de la contradiction est de favoriser la prévention des erreurs dans l'appréciation des faits. Le juge qui ne retiendrait l'affirmation que d'une seule des deux parties pourrait tenir pour acquis un point qui, en réalité, est incertain ou erroné. Soumettre chaque affirmation d'un plaideur à la discussion de l'autre permet un examen critique conduisant souvent à déjouer de fausses évidences. Cette vertu du principe de la contradiction justifie qu'il soit appliqué à toutes les preuves, y compris aux opinions, rapports ou conclusions des experts et des sachants. En effet, ni le savoir technique, ni l'objectivité, ni la connaissance scientifique ne prémunissent contre les erreurs. Sagesse des incertitudes. Comment faire, enfin, lorsque toutes les preuves ont été recherchées, lorsque tous les débats ont eu lieu, que toutes les parties se sont prononcées et que leurs experts ont rendu leurs conclusions, mais que malgré tout cela, le juge demeure dans l'incertitude alors qu'il doit délibérer ? C'est une incertitude qui bien entendu ne peut porter que sur la consistance des faits et ne résulter que de la faiblesse des preuves. Elle suppose encore que le juge n'ait pas la ressource de se fonder sur une preuve déterminante dont le droit aurait préalablement fixé la force probante. Le juge qui hésite, qui est incertain, ne peut reporter sa décision, il est impérativement tenu de trancher le litige. Ce doute qui l'étreint n'est pas une simple ignorance, il n'est pas le commencement de la recherche, il en est au contraire l'aboutissement. Ainsi que l'écrivait Merlin de Douai, « Cette position n'est pas celle des magistrats les moins sages et les moins éclairés. On remarque tous les jours que ceux qui ont le moins d'expérience et de lumières sont les plus hardis à trancher sur les difficultés les plus épineuses (27) ».

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Vie du droit Dans ces hypothèses, le juge étant neutre, c'est la partie qui a échoué à rapporter la preuve de ses prétentions qui devra en subir les conséquences et perdre son procès. Toute la question consiste à déterminer celle qui doit succomber dans ses prétentions en cas d'incertitude. Il est généralement affirmé que la charge de la preuve repose sur le demandeur au procès. À lui de supporter les conséquences de son incapacité à justifier des raisons qui l’ont conduit à engager son action. Cette règle est généralement rattachée à l'article 1315 du Code civil. Cependant, les choses ne sont pas si simples(28). Déterminer la partie qui doit succomber si la preuve n'est pas faite ne saurait être réglé par un seul principe. L'article 1315 du Code civil n'énonce aucun principe général, il n'a d'autre objet que la preuve du paiement de l'obligation. Hormis dans de très rares hypothèses, il existe dans chaque litige une présomption dite « antéjudiciaire » qui détermine le sens dans lequel il convient de trancher le litige lorsque les faits sont incertains. Ces règles sont parfois énoncées clairement par le législateur, mais elles peuvent aussi appeler un travail d'interprétation plus approfondi. Cependant, elles permettent dans l'immense majorité des cas de déterminer la partie qui doit succomber en cas d'insuffisance des preuves. Ce n'est que lorsque ces règles font défaut qu'il faut rechercher dans les principes généraux des motifs pour imputer à l'une ou à l'autre des parties le fardeau de la preuve. Ce qu'il convient de retenir, ce qui est essentiel, c'est que la décision judiciaire reste fondée sur des motifs raisonnables même dans des situations d'incertitude. Autrement dit, on peut réaliser la justice en n'ayant pas une connaissance parfaite des faits dès lors qu'on dispose pour cela de motifs raisonnables. Certaines règles sont connues de tous. Ainsi la présomption d'innocence, qui veut que l'accusé profite du doute, fait partie du fonds culturel commun des Français. Ce qui est moins connu en revanche c'est la consistance de ce doute. Il faut se garder de croire que le moindre doute, la première hésitation suffisent à garantir à l'accusé une relaxe. C'est un doute savant qui profite à l'innocent, le doute d'un juge qui aura déployé tous les efforts pour parvenir à une conviction et n'y sera pas parvenu. La Cour de cassation veille à ce que les juges du fond ne fassent état de leur doute qu'après avoir épuisé les moyens de preuve permettant de révéler la vérîté (29). La présomption d'innocence n'est que la partie émergée de l'ensemble des règles qui permettent aux juges de régler les situations d'incertitude. Des dispositions posant des présomptions antéjudiciaires, bien que n'étant pas toutes formulées de cette manière, traversent l'ensemble du droit. Il n'est guère possible de toutes les présenter, il n'est pas davantage possible, sans caricature, de prétendre qu'un principe commun les guide toutes. En réalité, dans chaque situation, le droit s'attache à trouver les arguments pertinents pour faire peser la charge probatoire plutôt sur une partie que sur l'autre. Ainsi, lorsqu'il s'agit d'une maladie née lors d'une hospitalisation, le droit décide que la victime supporte la charge d'établir que celle-ci a été contractée au sein de l'établissement de soins (30). Cependant, une fois cette preuve apportée, elle décide que l'hôpital

ne peut plus prétendre échapper à sa responsabilité soit en démontrant qu'il n'a commis aucune faute soit en prétendant qu'un autre établissement pourrait aussi être à l'origine de la maladie (31). On le voit, il y a ici un équilibre qui est trouvé entre l'établissement de soins et la victime. Cette dernière est dispensée d'établir la faute de l'hôpital et d'établir, lorsque plusieurs d'entre eux pourraient être à l'origine du dommage, celui qui est précisément le responsable. Pour autant les hôpitaux ne sont pas présumés responsables. Les raisons qui conduisent à attribuer le fardeau de la preuve à telle ou telle partie sont nombreuses. On s'attachera parfois aux faits probables, parfois on privilégiera les solutions préservant la paix des familles, des situations acquises, et l'on imputera la charge de la preuve à celui qui prétend les bouleverser, ou encore l'on fera peser le fardeau probatoire sur celui qui paraît le plus apte à apporter les preuves ou sur celui qui subira le moins lourdement un échec dans ses prétentions... Ces règles ne sont pas figées, elles correspondent, comme les lois qui régissent un pays, à une certaine forme de consensus social. En 1804 le maître était cru sur parole pour la quotité des gages qu'il devait à son domestique parce que le Code civil « ne voulait pas laisser le patron honnête à la merci de la parole d'un domestique sans racines ni moralité (31) ». L'actuel Code du travail prévoit que lorsqu'un doute subsiste quant aux motifs justifiant le licenciement, il profite au salarié. Les règles contribuent aussi à dessiner une certaine conception de l'homme dans ses relations avec autrui. Et, fait rassurant, par lequel il ne paraît pas mauvais de conclure, le droit de la preuve dessine une image optimiste de l'homme. Il présuppose la capacité juridique décidant que l'homme doit être présumé capable de conclure les actes juridiques plutôt qu'incapable et il suppose aussi que l'homme doit être a priori considéré comme bon et dès lors il présume sa bonne foi. Portalis estimait que les lois, même si elles doivent prévenir la méchanceté des hommes, « doivent montrer une certaine franchise, une certaine candeur. Si l'on part de l'idée qu'il faut parer à tout le mal et à tous les abus dont quelques personnes sont capables, tout est perdu. On multipliera les formes à l'infini, on n'accordera qu'une protection ruineuse aux citoyens ; et le remède deviendra pire que le mal. Quelques hommes sont si méchants que, pour gouverner la masse avec sagesse, il faut supposer les plus mauvais d'entre les hommes, meilleurs qu'ils ne sont (33) ». Notes : 1. A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, PUF. 17e éd., 1991, p. 822, V° Preuve. 2. F. Sudre, J.-P. Marguénaud, J. Andriantsimbazovina (et al.), Les grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, PUF, 6e éd., 2011, p. 374. 3. H. Roland, L. Boyer, Adage du droit français, Litec, 4e éd., 1999, n° 161, V° Idem est non esse et non probari. 4. Vocabulaire juridique de l'Association Henri Capitant, publié sous la direction de G. Cornu, PUF, 8e éd., 2007, V° Preuve. 5. Voir infra l'étude, partie 1, titre 1, chapitre 2, section 2, § l, A: 1ère Civ., 28 juin 2005, pourvoi n° 00-15.734, Bull. 2005, I, n° 289; Com., 28 juin 2005, pourvoi n° 02-14.686, Bull. 2005, IV, n° 138. 6. J. Chevalier, « Le contrôle de la Cour de cassation sur la pertinence de l'offre de preuve », D. 1956, Chron. p. 37. Voir aussi l'étude, partie 1, titre 2, chapitre 1, section 1, § 1, s'agissant de la notion de possession d'état. 7. Ainsi de la qualité de la notion d'« emprunteur averti » en matière commerciale ou la notion de « gravité » de la faute en matière sociale : voir l'étude, partie 1, titre 2, chapitre 1, section 5 et section 7.

8. Voir Civ., 15 avr. 1872, D.P. 1872, 1172 ; S. 1872, 1, 232 décidant « qu'il n'est pas permis aux juges, lorsque les termes de ces conventions sont clairs et précis, de dénaturer les obligations qui en résultent, et de modifier les stipulations qu'elles renferment ». 9. J. Carbonnier, Droit civil, volume I, Introduction. Les personnes, la famille, l'enfant, Ie couple, PUF, 1er éd. Quadrige, 2004, p. 346 ; voir aussi l'étude, partie 3, titre 1, chapitre 1, section 1, § 1. 10. Voir l'étude, partie 3, titre 1, chapitre 1, section 1, § 2, D. 11. Oeuvres de Pothier, annotées et mises en corrélation avec le Code civil et la législation actuelle par M. Bugnet, tome 2, Cosse et Marchal, 2e éd., 1861, p. 423 : « La corruption des moeurs et les exemples fréquents de subornation de témoins, nous ont rendu beaucoup plus difficiles à admettre la preuve testimoniale que ne l'étaient les Romains ». 12. Lors des travaux préparatoires, la crainte de la mauvaise foi comme celle de la faible mémoire des témoins justifient la supériorité de l'écrit. Ainsi, Jaubert déclare dans son rapport destiné au Tribunat : « Des hommes d'une égale bonne foi ne racontent-ils pas souvent d'une manière différente ce qu'ils ont vu, ce qu'ils ont entendu? [... ] Si nous n'avions que la tradition orale, que deviendraient la plupart de nos conventions lorsque les années en auraient altéré les traces? Que d'erreurs, que d'incertitudes, que de procès, enfin que de sujets de triomphes pour l'injustice! », cité par Locré, La Législation civile, commerciale et criminelle de la France, tome XII, Treuttel, 1828, p. 526. 13. Boiceau, Traité de la preuve par temoins en matière civile contenant le commentaire de Me J. Boiceau, sieur de La Borderie sur l'article 54 de l'ordonnance de Moulins, par M. Danty, C. Osmont, 1697, préface, p. V. 14. « Le procès sera peut-être évité toutes les fois que le plaideur en puissance sera convaincu... qu’un juge serait convaincu de lui donner tort », voir Ph. Théry, « Les finalités du droit de la preuve en droit privé », Droits 1996, p. 41 et s. 15. J. Valéry, « Examen des applications que le phonographe peut recevoir dans la correspondance commerciale et de leurs conséquences juridiques », Ann. de droit commercial 1890, doctr., p. 95. 16. P. Mimin, « La preuve par magnétophone », JCP éd. G, 1957, I, 1370. 17. A. Rey, M. Tomi, T. Hordé, C. Tanet, Dictionnaire historique de la langue française, dictionnaires Le Robert, réimpression mars 2000, V° Prouver. 18. H. Lévy-Bruhl, La Preuve judiciaire. Étude de sociologie juridique, Librairie Marcel Rivière et Cie, 1964, p. 63 et s. 19. H. Lévy-Bruhl, préc., p. 77. 20. Voir l'étude, partie 4, titre 1, chapitre 1, section 2, § 2, B, 2, b. et partie 4, titre 2, chapitre 2, section 2, § 1, A, 1, a. 21. 1re Civ., 8 juillet 2009, pourvoi n° 08-18.223, Bull. 2009, I, n° 159. 22. 1er Civ., 30 septembre 2009, pourvoi n° 08-18.398, Bull. 2009, 1, n° 297. 23. Voir l'étude, partie 4, titre 2, chapitre 2, section 2, § 2,A, 1. ; 1er Civ., 18 mai 2005, pourvoi n° 04- 13. 745, Bull. 2005, I, n° 213. 24. Voir l'étude, partie 4, titre 2, chapitre 2, section 2, § 2, A, 1 ; 2e Civ., 3 juin 2004, pourvoi n° 02-19.886, Bull. 2004, II, n° 273. 25. Voir l'étude, partie 4, titre 2, chapitre 2, section 2, § 2, A, 2, a, y. Enregistrements en matière pénale, not. Crim., 26 novembre 1990, pourvoi n° 90-84.594 ; voir aussi, Crim., 5 novembre 1991, pourvoi n° 91-84.134. 26. Voir l'étude, partie 4, titre 2, chapitre 2, section 2, § 2, A, 2, a, y. Enregistrements en matière pénale. 27. M. Merlin, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence, 4e éd., Garnery, 1812, tome IV, V° Doute, spéc. p. 385. 28. Voir, en particulier, J. Chevalier, La Charge de la preuve. Cours de droit civil approfondi, les Cours de droit, 1958-1959. 29. Voir l'étude, partie 2, titre 2, chapitre 2, section 1 : « La chambre criminelle veille depuis le XIXe siècle à une saine application du principe du bénéfice du doute. Elle le proclame sans réticence dans des arrêts innombrables. Mais elle se doit aussi d'inviter les juges du fond à ne pas écarter les preuves réunies, au profit d'un doute qui, certes, ne peut manquer d'ébranler dès le premier regard tout magistrat consciencieux, mais ne doit pas l'empêcher de juger (sur l'aspect théorique et pratique de la question, voir T. Fossier et F. Lévêque, « Le " presque vrai " et le " pas tout à fait faux " : probabilités et décision juridictionnelle », JCP éd. G n° 14, 2 avril 2012,427 ». 30. Voir l'étude, partie 2, titre 2, chapitre 1, section 3, § 1. 31. Voir l'étude, partie 2, titre 2, chapitre 1, section 3, § 1. 32. J. Carbonnier, Droit civil, volume I, Introduction. Les personnes, la famille, l'enfant, le couple, PUF, 1re éd. Quadrige, 2004, p. 349. Loysel pouvait encore écrire que « Pauvreté n'est pas vice : mais en grande pauvreté, n'y a pas grande loyauté, ou honneste pauvreté est clersemée ». Cet adage inspiré de Villon rendait « suspect le témoignage des pauvres [et] ne doit être entendu que de ceux qui sont mal contents de leur état, qui souhaitent des richesses ; car, quant à ceux qui ne souhaitent rien, et qui seraient fâchés d'être riches, cette règle ne convient pas ; ces derniers pouvant, au contraire, être dits heureux [... ]» , A. Loysel, Institutes coutumières, avec les notes d'E. de Laurière, nouvelle édition, revue, corrigée et augmentée par M. Dupin et E. Laboulaye, 1846, tome II, p. 161-162, n° 785; voir aussi T. Verheyden, « Les péripéties du droit de la preuve en matière de contrats de travail », in Cent ans de droit social belge. Mélanges offerts à Louis Duchatelet, Bruylant, coll. Droit social, 2e éd., 1988, p. 257 et s. 33. J.-É.-M. Portalis, Discours, rapports et travaux inédits sur le Code civil, [reprod. en fac-sim.], Centre de philosophie politique et juridique, coll. Bibl. de philosophie politique et juridique, textes et documents, 1989, Discours préliminaire sur le projet de Code civil, p. 54.

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Economie

Assises de l'Entrepreneuriat Palais de l'Elysée - 29 avril 2013

Les Assises de l’Entrepreneuriat engagées en janvier dernier se sont clôturées, après trois mois de travail, le 29 avril par un colloque à l’Elysée auquel participaient les principaux acteurs de la communauté entrepreneuriale française. Nous publions ci-dessous le discours prononcé par François Hollande qui fixe le calendrier des réformes que le gouvernement doit engager pour remettre en ordre l’économie et stimuler l’entrepreneuriat. Le dynamisme d'une économie, la nôtre, dépend sans doute d'un meilleur environnement - c'est la responsabilité du gouvernement - mais dépend de la vitalité des entreprises. Ce qui suppose que notre société puisse davantage reconnaitre la réussite, sous toutes ses formes, le talent quel que soit son domaine et la performance, quelle que soit la taille de l'entreprise ou même la nature de l'entreprise.

Photo © Jean-René Tancrède

François Hollande

Notre premier devoir, c'est donc de stimuler l'esprit d'entreprise, l'initiative, dans tous les domaines. C'est d'abord le rôle de l'école. J'ai entendu ce qui était prononcé. Le ministre de l'éducation est là. Il est donc prévu, de la sixième à la terminale, un programme sur l'entreprenariat.

Esprit d’entreprise et innovation par François Hollande (...) Le gouvernement a engagé trois grandes réformes ces derniers mois. La première, c'est le pacte de compétitivité, suite au rapport Gallois, et avec notamment le crédit d'impôt pour alléger le coût du travail de nos entreprises et permettre l'investissement, l'exportation, l'embauche. La seconde grande réforme, c'est la sécurisation de l'emploi suite à l'accord entre les partenaires sociaux qui va bientôt être transposé définitivement sous forme de loi. La troisième grande réforme, c'est la BPI qui est je peux le constater aujourd'hui - chargée de tous les espoirs du pays - avec cette facilité de penser qu'une banque suffirait pour se substituer à toutes les autres, et même à l'Etat... Aujourd'hui, c'est une quatrième étape, une quatrième grande réforme que nous posons : le soutien, la stimulation de l'entrepreneuriat. Non pas simplement parce que nous aurions une question de confiance à régler. Mais parce qu'avoir des entreprises suppose d'avoir des chefs d'entreprise. Avoir de l'activité économique suppose aussi d'avoir le développement des entreprises. Car c'est une évidence, mais parfois mieux vaut rappeler ce qui va de soi : ce sont les entreprises qui créent la richesse, qui créent l'activité et qui créent donc l'emploi.

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Il s'inscrira dans le cadre du parcours d'information, d'orientation et de découverte du monde professionnel. Il y a quelques semaines, je recevais des jeunes, ici, qui avaient été choisis en fonction de la diversité de notre société. L'une des plus grandes critiques qu'ils faisaient était qu'ils n'avaient pas été orientés comme ils l'avaient espéré ; qu'un certain nombre de filières ne leur avaient pas été présentées. Ils ajoutaient qu'ils auraient voulu que des chefs d'entreprise viennent dans les établissements leur montrer ce qu'ils faisaient. Il y a 30 ans, on aurait demandé à des jeunes ce qu'ils attendaient, est-ce qu'ils auraient dit : « nous attendons qu'il y ait des chefs d'entreprise qui viennent dans les établissements ? » Qu'aurait-on dit de cette génération ! Mais pourquoi cette lucidité : parce que pour ces jeunes, avoir une connaissance, une approche de ce qu'est l'entreprise, c'est pour eux la première étape vers l'emploi et peut-être même vers la création d'une activité. Alors, nous prendrons en compte ce besoin et même cette aspiration. Comment ? Sous la forme de stages plus nombreux qu'aujourd'hui, d'interventions des acteurs économiques eux-mêmes et d'initiations à la vie professionnelle. Dans l'enseignement supérieur - il y aura donc une formation spécifique et un accompagnement pour la création d'entreprise. J'ai entendu ce qui a été dit : faire en sorte que, dans l'Université - c'est sans doute largement fait dans les grandes écoles - il puisse y avoir des modules qui préparent à la création d'entreprise ; qu'un étudiant puisse, dans le cadre de son parcours, créer sa propre entreprise.

Nous devons dès lors mobiliser tous les talents. Les talents ne sont pas seulement dans l'Université ou dans les grandes écoles. Ils sont partout dans la société. Je ne veux pas que s'ajoute une injustice à une autre qui ferait que, dans certains quartiers, dans certains lieux, dans certaines familles, la liberté d'entreprendre ne serait que virtuelle. Il nous revient donc de faire tomber les barrières sociales, culturelles, géographiques psychologiques ou financières, pour que la création d'entreprise soit, si je puis dire, démocratisée. Parce que créer une entreprise, quelle qu'en soit la nature, quel qu'en soit le lieu, c'est aussi avoir une chance de plus d'accéder à la promotion sociale. Dans cet esprit, et notamment pour les quartiers, la Banque publique d'investissement, encore elle, mettra en place un financement spécifique pour la création d'entreprises dans les cités les moins favorisées de notre pays. Cet outil sera opérationnel d'ici l'été, ainsi que les outils d'accompagnement et de tutorat destinés aux jeunes de ces quartiers. De même, sera lancé un dispositif « entrepreneurs-étudiants » qui permettra que ceux qui créent une activité à l'issue de leurs études, puissent continuer, pendant un temps, à bénéficier du statut d'étudiant, c'est-à-dire de la couverture sociale, et puissent obtenir le refinancement du prêt qu'ils ont pu obtenir pour leurs études. Nous devons aussi garder nos étudiants pour qu'ils puissent créer ici, même si je conçois qu'avec l'internationalisation de l'économie, il serait quand même assez spécieux d'empêcher les jeunes, y compris les plus brillants de passer un temps à l'étranger. Ce qui compte, c'est de les faire revenir. De la même manière, nous devons attirer tous les talents en France. Fleur Pellerin me rappelait que la moitié des entrepreneurs de la Silicon Valley sont des migrants. J'ai donc demandé au ministère de l'Intérieur que soit introduit - sous certaines conditions notamment d'investissement minimal et d'une expertise sur la réalité du projet d'entreprise - un « visaentrepreneur », qui bénéficiera d'une procédure accélérée. Parce que quand je vais en Chine, j'y étais il y a quelques jours, que je vois des étudiants chinois qui me disent : « nous voulons venir en France étudier », ce n'est déjà pas facile. Puis ensuite d'autres que je vois en France, qui sont venus et

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Economie qui veulent y rester au moins pour un temps, pour créer leur entreprise, aujourd'hui, dans le droit actuel, ce n'est pas toujours possible d'y consentir. Nous ne devons gâcher aucun talent ; retenir toutes les conditions pour la création, ici, par des jeunes Français nombreux mais aussi par des jeunes étrangers que nous voulons installer ici. Je sais aussi que vous avez insisté, à juste raison, pour que soit mis un terme à cette stigmatisation de l'échec. C'est un mal français de ne rien oublier, de tout garder, de ne rien effacer pour qu'il y ait toujours une trace d'un échec et pour, ensuite, que cela vous suive toute votre vie. Si en politique, on avait fait le même raisonnement, vous imaginez ce que ça aurait pu produire ! Heureusement qu'on a effacé, pour certains, la trace de l'échec. Alors pourquoi les chefs d'entreprise seraient, eux, marqués parce qu'ils ont pu connaître dans un premier temps une difficulté, un incident et donc, disons-le, une défaillance, pour toute leur vie, ils ne pourraient pas accéder au financement ? ! A l'avenir, l'indicateur des fichiers de la Banque de France, qui concerne les dirigeants ayant connu une seule faillite, sera supprimé de manière à ce qu'il puisse y avoir le droit à une deuxième, voire à une troisième chance. J'ai annoncé il y a quelques semaines un choc de simplification. Pas facile, une fois que l'on a fixé la perspective de s'assurer de l'exécution ! Il y a toujours une bonne raison de maintenir une réglementation, la première étant d'éviter la fraude et l'abus qui est toujours un risque. Mais je pense que - et vous avez vous-mêmes ouvert la voie - nous devons faire en sorte que les réseaux de soutien, d'accompagnement des entreprises puissent être davantage coordonnés ; je n'ai pas dit « centralisés » mais je pense qu'il doit y avoir un interlocuteur unique à l'échelle régionale, rassemblant les réseaux consulaires, la BPI, les services des collectivités locales. J'ai donc fait la proposition, qui a d'ailleurs été ici élaborée, d'un « Pass entrepreneur numérique » permettant au chef d'entreprise d'avoir toutes les informations au moment où il veut y accéder sur les aides, les conseils et les règlements, dans une seule démarche sans qu'il soit besoin de faire et de refaire les mêmes dossiers. J'ai également été saisi d'une demande venant, non pas des TPE qui ont déjà eu satisfaction du Premier ministre, mais des PME sur l'application des comptes, qui est un vrai problème en France, parce que nous ajoutons une obligation à des entreprises, alors même que leurs concurrentes n'y sont pas soumises. Ce qui fait que nous fournissons, à des pays qui sont toujours intéressés ou à d'autres entreprises, des éléments très importants qui leur permettent d'accéder à des marchés à notre détriment. Je demande donc à notre gouvernement de supprimer ces obligations de publication des comptes. Chacun, là aussi, connait la situation, nous disposons de grands groupes en France, leaders dans bien des domaines, capables - et j'en fais le constat - de conquérir de nombreux marchés dans les pays développés, dans les pays émergents et qui ont aujourd'hui tous les éléments leur permettant d'avoir dans la mondialisation les capacités de réussir. Mais, en revanche, nous souffrons d'une insuffisance des entreprises intermédiaires, des

Les neuf groupes de travail des Assises de l'entrepreneuriat et leurs chefs de file Diffuser l’esprit d’entreprendre auprès des jeunes piloté par Philippe Hayat

Proposer de nouvelles sources de financement pour les entreprises piloté par Christophe Praud

Asseoir un cadre fiscal durable pour l’entrepreneur piloté par Marie Ekeland et Michel Taly

Promouvoir et valoriser l’entrepreneuriat « responsable » piloté par Nicole Notat

Mobiliser tous les talents pour la création d’entreprise piloté par Catherine Barba

Stimuler toutes les formes d’innovation dans l’entreprise piloté par Philippe Berna et Armelle Weisman

PME à l'exportation qui ne sont pas suffisamment présentes sur les marchés et cela m'a été encore confirmé aujourd'hui. Et c'est l'une des explications de notre écart de performance avec l'Allemagne. Nous devons poursuivre deux objectifs : l'exportation (...) et l'innovation. D'abord pour l'exportation, rendre plus facile et plus simple l'implantation à l'étranger parce que l'international reste pour beaucoup d'entreprises perçu comme une aventure périlleuse, coûteuse, en tout cas trop risquée pour être tentée. Le gouvernement a donc décidé, sous mon impulsion, de mettre en place, sur certaines zones géographiques, les Maisons de l'international qui proposeront aux entreprises les services d'un incubateur pendant une durée pouvant atteindre même une année. Nous commencerons aux Etats-Unis et en Asie. Cela peut même se faire par filière. Ainsi, en Chine, il y a eu la formation d'un club santé avec des grandes entreprises du secteur, des entreprises de taille plus modeste, qui se sont regroupées pour, ensemble, conquérir le marché et échanger les informations indispensables. J'ai bien conscience que les grandes entreprises, depuis plusieurs années, ont accompagné les PME sans qu'il ait été besoin de les inciter. Mais je souhaite encourager cette pratique toujours en cohérence avec notre politique de filières. Les prises de participation des grands groupes dans les jeunes PME innovantes ouvriront donc droit à un amortissement fiscal sur cinq ans, de façon à ce que le coût, la charge du soutien aux PME, puisse être, en cas d'échec, pris pour partie en charge par l'Etat. Le second objectif, c'est l'innovation. Nous avons déjà, depuis un an, confirmé le crédit impôt recherche. Nous l'avons même élargi à l'innovation et j'ai annoncé qu'il serait pérennisé sur les cinq années de mon mandat. Il me revient (...) que la demande d'un crédit impôt recherche est rapidement suivie de demandes de renseignements fiscaux pouvant déboucher sur un contrôle, sans doute dans un bon esprit. Eviter les abus, les excès ou la fraude, c'est le rôle de l'administration d'y veiller. Je demande cependant que ce soit fait avec moins de systématisme, moins d'automatisme et plus de compréhension. Il ne s'agit pas de fonctionnaires, qui font leur travail, et souvent

Offrir à l’entrepreneur un accompagnement « global » et sur mesure piloté par David Pouyanne Réussir la projection précoce des PME à l’international piloté par Denis Jacquet et Franck Provost Inventer l’entreprise du « futur » piloté par Christian Nibourel

remarquablement, puisqu'il y a quelques heures j'ai rencontré un chef d'entreprise qui me dit que, lui, il a bénéficié - bénéficié j'entends ! - d'un contrôle fiscal, suite à une demande de crédit d'impôt recherche et qu'on lui a fait un rehaussement du crédit. Mais cela reste, j'en conviens, exceptionnel ! Je salue donc le travail du fonctionnaire qui a permis cette rectification et je demande aux ministres de veiller à ce que, sur ce qui est un atout pour nos entreprises disposer d'un crédit d'impôt, qui est une mesure très spécifique à la France et très incitative nous puissions lever au moins de cette appréhension. Cela vaut aussi pour le crédit impôt compétitivité : progrès, pérennisation, élargissement. De la même manière, la BPI a dans sa doctrine d'intervention prévu de soutenir davantage encore l'innovation sous forme de prêts : 100 millions d'euros sont inscrits pour 2013 et sous forme d'apports en fonds propres à hauteur de 600 millions d'euros, ce qui aura un effet de levier significatif par rapport à d'autres fonds de capital-risque. Mais je pense nécessaire que nous allions plus loin, d'abord en améliorant le statut des jeunes entreprises innovantes. Il sera donc mis fin à la dégressivité des exonérations de cotisations sociales qui avait été engagée il y a quelques années. J'ai même décidé d'étendre le champ des dépenses éligibles à ce mécanisme aux charges de personnel affectées à l'innovation, au design, au marketing, c'est-à-dire pas simplement l'innovation technologique. Ce qui sera d'abord favorable aux jeunes entreprises innovantes et favorable à l'emploi puisque cela permettra d'embaucher tous les jeunes qui sont dans ces métiers. Mais l'innovation n'est pas que technologique. Tout à l'heure, il était indiqué qu'elle était aussi sociale. Elle tient aux méthodes qui peuvent être employées, aux conceptions, aux finalités, à la nature même de l'entreprise, le secteur de l'économie sociale et solidaire. Je souhaite donc que nous puissions trouver des solutions financières pour ces entreprises quel que soit leur statut ; ces entreprises qui répondent à de nouveaux besoins sociaux ; qui par exemple participent à l'installation de crèches ou travaillent dans le secteur du vieillissement ou du recyclage pour les personnes éloignées de l'emploi. Bref, un ensemble de secteurs qui

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Economie

Suppression de l’indicateur dirigeant “040” Constat La Banque de France collecte et diffuse des informations sur la situation des dirigeants. Sur la base des informations collectées auprès des Tribunaux de Commerce, elle a conçu sous une forme synthétique une grille comportant quatre niveaux intitulée « indicateur dirigeant », comportant une note dite « 040 », qui peut attirer l’attention des réseaux bancaires sur le fait que l’entrepreneur a connu une liquidation judiciaire (et une seule)

au cours des trois dernières années, sans avoir pour autant commis de faute. Le principe de notation est utile pour le financement de l’économie. Mais la note 040 peut constituer un obstacle dans l’accès au crédit pour les entrepreneurs souhaitant recréer une entreprise après un premier échec. Réforme Pour lutter contre la stigmatisation de l’échec, l’indicateur « 040 » sera supprimé.

peuvent se développer. Faut-il encore qu'il y ait des financements appropriés. Il y aura donc création d'un fonds pour l'innovation sociale qui sera géré par la Caisse des dépôts et qui interviendra, là aussi, aussi bien sous forme de prêts que sous forme d'apports en fonds propres. (...) Pour les PME en particulier et les ETI, je souhaite qu'il puisse y avoir une bourse plus dynamique et dotée des ressources nécessaires permettant leur financement. Dans cet esprit, le gouvernement - le ministre de l'Economie et des Finances en est chargé - va créer au sein de ce qu'on appelle le plan d'épargne en actions, le PEA, un compartiment dédié au titre des PME et des ETI cotées ou non cotées. Le plafond sera fixé à 75 000 euros. Il s'agit de favoriser le placement en actions, parce que c'est ce qui finalement coûte le moins cher pour l'entreprise et qui permet d'avoir la garantie de la durée. J'ai été intéressé par les idées qui ont été avancées, ici, de finance participative, c'est-àdire le financement direct de projets par la population. Là encore, il convient d'y mettre un certain nombre de garde-fous et de limites. Mais c'est un bon moyen de rapprocher l'investisseur, l'épargnant de l'entrepreneur et de permettre que des initiatives qui jamais n'auraient pu voir le jour puissent être financées. Les réseaux Internet peuvent aussi démultiplier ce type de collectes, là encore, à condition de fixer dans le cadre de l'AMF un certain nombre de règles. Mais je souhaite que nous puissions donner toute sa place à ce placement parce que c'est un mode de financement tout à fait précieux dès lors que la protection de l'épargne est assurée. Je demande donc au gouvernement de formuler d'ici septembre des propositions en ce sens pour la finance participative. Je veux terminer par un dernier sujet qui est la rémunération du risque lié à l'aventure - parce que c'en est une - que représentent la création et le développement de l'entreprise. Je veux revenir donc sur le malentendu qui a pu à un moment, je ne sais pourquoi, se glisser entre nous, à l'automne, faute d'une écriture ou d'une lecture suffisamment imaginative ou claire. J'entends donc, une bonne fois pour toutes, les

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Cette décision traduit la volonté d’adresser un signal clair à destination des entrepreneurs qui souhaitent recréer et doivent pouvoir bénéficier d’une véritable « seconde chance », après avoir connu un premier échec. Cette évolution ne remet aucunement en cause le rôle essentiel de la Banque de France dans le financement de l’économie, en tant que principal observatoire du financement des entreprises et superviseur du système financier.

dissiper et proposer un régime équilibré, juste et pérenne pour le traitement fiscal des plusvalues de cession.Pour les PME en particulier et les ETI, je souhaite qu'il puisse y avoir une bourse plus dynamique et dotée des ressources nécessaires permettant leur financement. Dans cet esprit, le gouvernement - le ministre de l'Economie et des Finances en est chargé va créer au sein de ce qu'on appelle le plan d'épargne en actions, le PEA, un compartiment dédié au titre des PME et des ETI cotées ou non cotées. Le plafond sera fixé à 75 000 euros. Il s'agit de favoriser le placement en actions, parce que c'est ce qui finalement coûte le moins cher pour l'entreprise et qui permet d'avoir la garantie de la durée. J'ai été intéressé par les idées qui ont été avancées, ici, de finance participative, c'est-àdire le financement direct de projets par la population. Là encore, il convient d'y mettre un certain nombre de garde-fous et de limites. Mais c'est un bon moyen de rapprocher l'investisseur, l'épargnant de l'entrepreneur et de permettre que des initiatives qui jamais n'auraient pu voir le jour puissent être financées. Les réseaux Internet peuvent aussi démultiplier ce type de collectes, là encore, à condition de fixer dans le cadre de l'A MF un certain nombre de règles. Mais je souhaite que nous puissions donner toute sa place à ce placement parce que c'est un mode de financement tout à fait précieux dès lors que la protection de l'épargne est assurée. Je demande donc au gouvernement de formuler d'ici septembre des propositions en ce sens pour la finance participative. Je veux terminer par un dernier sujet qui est la rémunération du risque lié à l'aventure - parce que c'en est une - que représentent la création et le développement de l'entreprise. Je veux revenir donc sur le malentendu qui a pu à un moment, je ne sais pourquoi, se glisser entre nous, à l'automne, faute d'une écriture ou d'une lecture suffisamment imaginative ou claire. J'entends donc , une bonne fois pour toutes, les dissiper et proposer un régime équilibré, juste et pérenne pour le traitement fiscal des plus-values de cession. (...)

Cela veut dire qu'à un moment, un créateur d'une entreprise, après avoir assuré le développement de cette activité, vend ce qui lui est le plus cher, c'est-à-dire ce qu'il a créé. Et donc il doit y avoir un traitement équitable par la fiscalité de ce qu'a été son acte de développement, de promotion, de création de richesses. Deux principes doivent nous guider. D'abord, la simplicité. Pas moins de 40 régimes existent pour le traitement des plus-values. Parce qu'en France, on aime bien poser un principe général et ensuite créer des exceptions, des dérogations, des spécificités. Cela n'a pas manqué : 40 ! Je ne sais pas, d'ailleurs, comment on peut trouver autant de cas ! Sans doute pour les moins de 30 ans, les plus de 50 ans, ceux qui habitent la province, ceux qui sont à Paris, selon la nature de l'activité ! 40 régimes spécifiques ! (...) Il n'y en aura plus qu'un. Le second principe, c'est la lisibilité pour les entrepreneurs et aussi pour les Français, pour que chacun comprenne de quoi il s'agit. Alors passons à l'exercice pratique. Lorsque la cession intervient moins de deux ans après l'achat de l'entreprise ou sa création, les plus-values seront soumises - et c'est bien logique - au barème de l'impôt sur le revenu. Au-delà de deux ans, un abattement de 50% sera appliqué et il sera porté à 65 % après huit ans de détention des titres cédés. Un régime plus favorable sera créé pour les cessions des jeunes entreprises de moins de 10 ans mais également pour les transmissions familiales et pour les départs à la retraite. Il est bien logique, là encore, que celui qui a créé une entreprise ou qui l'a eue par son travail au bout de quelques années, partant à la retraite, ait un régime plus favorable. Et là, l'abattement pourra être porté à 85 % et il y aura aussi une franchise de 500 000 euros pour les départs à la retraite, de façon à ce que les petites entreprises ne soient en aucune façon lésées par ce système. Voilà ce que je voulais vous dire, non pas pour répondre à telle ou telle interpellation, mais pour avoir un régime clair et lisible, un régime simple, un régime compréhensible, un régime juste : avoir un cas général et le cas particulier des jeunes entreprises, des cessions au moment du départ à la retraite et les transmissions familiales. Mesdames et Messieurs, j'ai souhaité que ces Assises de l'entrepreneuriat se déroulent, ici, dans un lieu symbolique qui est celui de l'Etat. Ce que je viens de dire engage, non seulement le président que je suis, mais tout le gouvernement. Ce que j'ai voulu aussi marquer par ces Assises se concluant ici, c'est que la cause que vous représentez n'est pas une cause catégorielle, c'est une cause nationale ; que ce qui compte, c'est d'entreprendre dans tous les domaines à tous les niveaux. Entreprendre pour, bien sûr, la réussite que vous cherchez, que vous avez déjà pour beaucoup obtenue ; mais aussi pour la réussite de notre pays. Je ne dis pas qu'il y a du militantisme ou du bénévolat, mais il y a, dans l'acte d'entreprendre, la volonté de tenter

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Economie une aventure qui va bien au-delà de celui qui crée ou de celle qui crée, qui décide de prendre cette initiative. Il y a des sujets qui peuvent nous séparer, il y en a beaucoup. Et il y a d'autres sujets qui peuvent nous rassembler. Je considère que la réussite de notre pays, la vitalité de notre économie, la création de richesses - ensuite nous pouvons déterminer le partage -, ce sont des causes qui doivent nous rassembler. C'est la raison pour laquelle je souhaitais que ces Assises - et vous y avez tous contribué puissent envoyer des messages simples : encourager la création d'entreprises partout sur notre territoire ; mobiliser tous les talents, de nos quartiers jusqu'aux grandes écoles ; faciliter le développement par l'innovation parce que c'est l'innovation qui va faire la différence ; récompenser la création d'activité parce qu'elle a produit une richesse collective. Voilà sur quoi nous devions nous retrouver.

Avec un autre objectif : montrer que la réussite est possible, qu'elle n'est pas blâmable, qu'elle est au contraire estimable ; souligner aussi la force de nos atouts, nous en avons beaucoup en France. Ce qui frappe toujours, c'est quelques fois pénible, c'est que lorsque l'on va à l'étranger, l'image de la France est plus grande que lorsque l'on reste ici. Ce n'est pas la raison pour laquelle je voyage, mais nous devons être conscients de ce que nous représentons. Nous sommes un grand pays. Nous avons des valeurs, des idées, une histoire, une langue, une culture et puis, des entreprises qui sont regardées comme performantes, des innovations sociales, une manière de vivre, ce que l'on appelle un mode de vie avec une aspiration très grande à la liberté - liberté d'entreprendre, liberté de choisir sa vie. Nous devons porter cette belle idée de la France et faire apparaître nos atouts. Dans la compétition , ce ne sont pas les plus tristes qui

gagnent ; ce sont ceux qui sont animés d'une flamme qui leur permet, non pas de brûler les autres, mais de convaincre qu'ils sont les meilleurs dans la concurrence. C'est ainsi que nous redonnerons confiance dans l'avenir car la seule cause qui vaille - et je suis moi-même comptable, je dis bien comptable et responsable de ce qui chaque mois est annoncé : les chiffres du chômage - la seule cause qui vaille, c'est de lutter contre le chômage et de créer des emplois. Cela passe par la mobilisation de tous, de toutes et d'abord des entreprises. C'est l'esprit de cette rencontre. Si je voulais la résumer d'un mot, d'une phrase, ce serait : entreprendre oui, mais ensemble ! (...) 2013-410

Au fil des pages

Les jeux en ligne en France et en Europe Quelles réformes trois ans après l’ouverture du marché ? Collection « Trans Europe Experts » - Volume 7 Par Martine Béhar-Touchais, Judith Rochfeld et Ariane de Guillenchmidt-Guignot Avec la participation d’Alice Fournier

ar une loi du 12 mai 2010, la France, fortement incitée par les institutions européennes et notamment par la Cour de Justice de l’Union européenne, a libéralisé le secteur des jeux en ligne. Trois ans après cette ouverture, un rapport, rédigé par des membres du réseau Trans Europe Experts avec la participation des représentants du secteur des jeux en ligne (opérateurs, représentants des Autorités sectorielles de régulation, juristes...) pouvait s’avérer utile. Le présent rapport sur la libéralisation des jeux en ligne s’inscrit en effet dans une importante actualité tant sont nombreuses les réflexions lancées sur le sujet : la Commission européenne, dans le droit fil de son plan d’action du 23 octobre 2012, entend, semble-t-il, s’atteler à l’élaboration d’une harmonisation des législations nationales en la matière, ciblée ou non ; les pouvoirs publics français, sur le fondement de la « clause de revoyure » insérée dans la loi de libéralisation du 12 mai 2010, vont devoir repenser les articulations du dispositif initié.

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De multiples difficultés devront, alors, être surmontées. La régulation d’un secteur ouvert aux vents de l’inexistence de frontières bute en effet sur la disparité des législations nationales, que ce soit en matière civile (définition des jeux autorisés, protection des joueurs vulnérables, protection de la consommation) ou en matière pénale (lutte contre le blanchiment d’argent et les atteintes à la sincérité et à l’intégrité des sports et des jeux). Elle se heurte également aux difficultés d’organiser une réelle coopération entre les Autorités administratives indépendantes, dès lors qu’il n’existe pas de normes européennes communes. Enfin, dans ce contexte, la fiscalité des jeux trouve difficilement son équilibre. Pour répondre à l’ensemble de ces difficultés et proposer des solutions adaptées, le présent Rapport, issu des réflexions du groupe de travail « jeux en ligne » initié au sein de l’association Trans Europe Experts et de son pôle « Contrat, consommation, commerce électronique », est divisé en deux parties de taille inégale. La première dresse un état des lieux critique de

l’existant, avant que soient examinées, dans une seconde partie, les perspectives d’évolution. S’y trouve notamment débattue la question de l’opportunité d’une harmonisation européenne. Chacune de ces parties avance des propositions, discutées en séances du groupe de travail et s’insérant dans une réflexion d’ensemble de la matière. Société de législation comparée,

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640 pages - 28 € 2013-411

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Vie du chiffre

Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables Paris - 28 mai 2013

Dès mars 2013, le Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables (CSOEC) a mis en place à l’attention des professionnels de l’expertise comptable une palette d’outils opérationnels dédiés au Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi (CICE) pour informer et accompagner les entreprises. Mardi 28 mai, Joseph Zorgniotti, Président du CSOEC et Yves Nicolas, Président de la CNCC, étaient aux côtés de Bernard Cazeneuve, Ministre délégué auprès du Ministre de l’Economie et des finances chargé du Budget, et de Bruno Bezard, directeur général des Finances Publiques, pour une grande réunion d’information et de mobilisation sur le thème « tout savoir sur le CICE » à l’Hôtel Lutetia à Paris. Conscients de leur utilité, les experts-comptables et commissaires aux comptes assument leur rôle de partenaires des pouvoirs publics, afin de soutenir et de favoriser le développement économique des entreprises.

Les experts-comptables mobilisés pour le préfinancement du CICE

n réunissant aujourd’hui plus de 300 professionnels, dans ce magnifique hôtel Lutétia, pour « tout savoir sur le CICE », nous nous plaçons dans la suite immédiate et logique de la signature de l’accord de place signé vendredi dernier, avec les représentants de l’Etat, des banques, des entreprises, et de nos confrères et amis Commissaires aux comptes dont je tiens à saluer la présence aujourd’hui, en la personne de leur Président, Yves Nicolas. La mobilisation de notre profession concernant le préfinancement du crédit d’impôt compétitivité emploi constitue, pour le Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables, l’illustration parfaite du rôle que nous entendons jouer auprès des pouvoirs publics.

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Partenaire privilégié des entreprises, notre profession est un acteur essentiel de la simplification comptable, fiscale, sociale et administrative pour les TPE et les PME. Nous rendons intelligible au quotidien la complexité subie par ces entreprises. Nous sommes donc pour elles les traducteurs légitimes des dispositifs publics auxquels elles peuvent prétendre. Toutes les énergies sont désormais mobilisées pour combattre les effets d’une crise qui touche durement notre économie, et notamment ses plus petites composantes. Il était tout simplement impensable pour notre profession de se tenir en dehors d’un dispositif dont l’objectif affiché est de « redonner aux entreprises les moyens d’investir et de recruter ». En précisant explicitement – et je m’en réjouis – qu’il appartient aux professionnels de l’expertise comptable ou aux commissaires aux comptes, d’attester du montant du CICE déclaré par l’entreprise à sa banque, les pouvoirs publics

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Arnaud Debray, Julien Tokarz, Bernard Cazeneuve, Joseph Zorgniotti, Bruno Bezard et Yves Nicolas ont souhaité souligner les vertus attendues de l’intervention de membres de notre profession. Par notre signature, nous apportons, dans l’intérêt commun de nos clients, des banques et de notre économie, à un coût raisonnable, les garanties de fiabilité, de sincérité et d’indépendance… nécessaires à la confiance, sans laquelle ce dispositif ne pourra rencontrer le succès escompté. Indépendance, confiance, croissance… voilà le triptyque vertueux ! Je tiens d’ailleurs à souligner que notre profession, n’a pas attendu la signature de cet accord de place, ni la présente manifestation, pour se mobiliser et assumer son devoir. Nous sortons, en effet, d’une période de bilan qui nous a donné l’occasion d’inaugurer une nouvelle démarche, que le succès nous pousse à rendre systématique pour tout nouveau dispositif concernant les TPE et les PME. Dès la fin du mois de mars, le Conseil supérieur a inauguré avec le CICE sa nouvelle plateforme www.conseil-sup-services.com, dédiée au déploiement opérationnel des dispositifs publics. Grâce à la hotline du lundi, commune à l’Ordre des Experts-comptables et à la Compagnie des Commissaires aux comptes, et gratuite pour tous les professionnels, ainsi qu’aux nombreux outils opérationnels qui y sont mis à leur disposition, le décryptage et le

déploiement du CICE et de la mission de préfinancement ont été rendus possibles. Avec cette première opération labellisée « Conseil Sup’ Services », c’est toute une palette d’outils qui ont été packagés pour permettre aux professionnels de conduire leur mission d’accompagnement et de conseil : - des outils régaliens pour sécuriser cette nouvelle mission : avec une note méthodologique et des exemples de lettre de mission, de déclaration de l’entreprise, et d’attestation du professionnel ; - des outils techniques pour maîtriser le dispositif dans sa mise en œuvre opérationnelle : avec des notes de synthèse, des tableaux synthétiques, et un support de présentation pour les collaborateurs ; - des outils de communication pour informer les clients : avec une lettre d’information détaillé pour les chefs d’entreprises, et un diaporama de présentation grand public ; - toutes les sources documentaires pour compléter l’information. Par cette méthode et cette mobilisation, nous vous affirmons, Monsieur le Ministre, notre volonté d’assumer nos responsabilités aux côtés des entreprises, et d’entretenir avec vous et l’ensemble des pouvoirs publics des relations franches, basées sur le dialogue et le respect mutuels. 2013-412

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Photo © Eric Avenel

par Joseph Zorgniotti


Vie du droit

« Médiation en Seine »

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Boulogne Billancourt - Compte-rendu du Conseil scientifique du 18 avril 2013

Soraya Amrani-Mekki et Claude Duvernoy e Conseil scientifique de Médiation en Seine s’est réuni le jeudi 18 avril 2013 au Cap Seguin sous la présidence du professeur Soraya Amrani-Mekki et a réunit « 25 représentants du monde économique et social du département (Bâtonnier de l’Ordre, Présidente du MEDEF, Président de la CGPME, représentants de la Compagnie régionale des Commissaires aux comptes, de la Chambre des notaires, de la Chambres des huissiers…..) ». Comme chaque année, il a débuté par une conférence sur l’actualité de la médiation qui a porté cette année plus précisément sur la médiation en droit social. La matière sociale n’é chappe en effet pas au déploiement considérable de la médiation qu’elle accompagne quasiment naturellement. Il ne faut pas oublier que la devise du Conseil des prud’hommes est « servat et conciliat ».

L

L’essence même de cette juridiction d’exception instituée en 1806 à Lyon a été de concilier les parties. Jugés par leurs pairs, à parité, les justiciables passent obligatoirement par une phase de conciliation. Cette conciliation est jugée consubstantielle aux litiges du travail pour une double raison. D’abord, parce qu’il s’agit d’un contentieux dit chaud où l’affect est important. Il s‘agit ainsi bien souvent d’aller rechercher derrière le litige le conflit sous-jacent qui peut ne pas relever du droit. Il en est ainsi dans l’exemple fameux relevé par Madame Blohorn Brenneur, pionnière en matière de médiation, devant la Cour d’appel de Grenoble, d’un employeur considérant sa salariée comme sa fille et qui se disait avoir été trompé dans sa vie deux fois : une fois par sa femme et une fois par sa fille. Ensuite parce qu’il s’agit de litiges qui peuvent s’installer dans la durée car le contentieux prud’homal ne se résume pas uniquement au contentieux du licenciement.

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Pour cette double raison, commune aux litiges du divorce, le préalable obligatoire de conciliation devant le Conseil des prud’hommes a survécu à la suppression de tous les préalables existant en 1949. La raison en était aussi l’existence à l’époque d’un taux de conciliation de 80 %. Si la conciliation est installée structurellement devant le Conseil des prud’hommes, la question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment elle peut s’articuler avec la médiation qui se développe sensiblement ces dernières années tant en amont par la prolifération de clause de médiation dans les contrats de travail qu’en aval par le recours à la médiation judiciaire. Parler des modes alternatifs de règlement des litiges en contentieux du travail suppose de traiter de la tension qui existe indubitablement entre conciliation prud’homale et médiation car celleci est contenue par celle-là sans que les justifications juridiques tiennent nécessairement. Il semble au contraire patent que le choix politique a été fait de préserver la conciliation prud’homale de la médiation pour préserver la spécificité du Conseil des prud’hommes par ailleurs contesté de toutes parts. Remettre en cause le préalable de conciliation devant le Conseil des prud’hommes revient à s’attaquer au cœur même de l’institution et à la spécificité du contentieux du travail. C’est pourquoi on ne peut envisager la médiation qu’en contemplation du préalable de conciliation obligatoire. Tel a été l’objet de la conférence qui a donné lieu à des débats fructueux entre les participants. Soraya Amrani-Mekki Professeur à l'Université Paris Ouest - Nanterre La Défense, membre du Centre de Droit Pénal et de Criminologie et membre de la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme

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Oui, je désire m’abonner et recevoir le journal à l’adresse suivante : Me, M. Mme, Mlle :............................................................. Société : ................................................................................ Rue : ..................................................................................... Code postal :............................ Ville : ................................ Téléphone : ............................. Télécopie : ........................ E-mail : ................................................................................. o Formule à 95 Euros o Formule à 35 Euros o Formule à 15 Euros

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Palmarès

Comité Print Environnement Maison de la Recherche - Paris, 30 mai 2013

Ariane Marquages, AZ Imprimerie, Centre graphique Ligérien, Créaprim, Création Tendance découverte, Graphic Trappes, Imprimerie BM, Imprimerie DemortreuxLecornec, Imprimerie Laffont, Imprimerie Mercier, Imprimerie Thouarsaise, Média Pub, Rotochampagne et Yatooprint. Avant de clôturer cette émouvante cérémonie, le Président du Comité Print Environnement Gilbert Caron a annoncé la création du label « Print in France » ayant pour objectif la promotion et la valorisation des produits et savoir-faire industriels graphiques français.

Gilbert Caron et Philippe de Villiers résidée par Gilbert Caron, cette quatrième cérémonie de remise des trophées s’est tenue ce jeudi 30 mai 2013 sous le haut patronage de Monsieur Philippe de Villiers, député européen et célèbre créateur du Parc d’Attractions du Puy du Fou il y a trente-cinq ans et aujourd’hui mondialement connu.

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Près de 80 participants étaient réunis pour cette édition 2013. Et c’est dans une ambiance empreinte d’une forte convivialité qu’ils ont assisté aux remises de trophées et aux discours de remerciements des lauréats. Les entreprises ayant été labellisées cette année sont : 2 A Sérigraphie, Ain La Romaine,

Six entreprises pilotes ont reçu les premiers trophées « Print in France » afin de récompenser la qualité de leur offre graphique et leur engagement en matière de développement durable : Dupli Imprimerie, Imprimerie Moderne de l’Est, I mp r i m e r i e Tr u l l i , L a G a l i o te Pre n a nt , L-Imprimerie et Roto Presse Numéris. Nous leur adressons nos chaleureuses félicitations et les encourageons à poursuivre leurs efforts pour engager leurs entreprises dans une démarche volontaire de respect de l’homme et de l’environnement. 2013-414

Laurent Labat, Serge Lafaix, Sylvain Trulli, Michel Catalano, Daniel Ségala, Gilbert Caron, Philippe de Villiers, Philippe Vanheste, François Caron et Wilfried Souchet

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Les Annonces de la Seine - jeudi 6 juin 2013 - numéro 34

Photo © Chloé Grenadou - Téléphone : 01.42.60.36.35

Photo © Chloé Grenadou - Téléphone : 01.42.60.36.35

La remise des Trophées Print Environnement 2013 s’est déroulée le 30 mai dernier dans les salons de la Maison de la Recherche à Paris. A cette occasion, seize entreprises du secteur de l’imprimerie ont été récompensées pour leur démarche de management environnemental. Ont également été décernés les premiers trophées du label « Print in France » qui a pour objectif d’encourager la production graphique française en valorisant produits et savoir-faire. Chloé Grenadou


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