Edition du lundi 2 juillet 2012

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LES ANNONCES DE LA SEINE Lundi 2 juillet 2012 - Numéro 43 - 1,15 Euro - 93e année

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Didier Marshall, Luc Kirkyacharian, Nicolas Knispel, Michèle Tisseyre, Christian Charrière-Bournazel, Jean-Luc Forget, François Bernon et Bernard Legras

Barreau de Montpellier Rentrée solennelle - 22 juin 2012 RENTRÉE SOLENNELLE

Barreau de Montpellier

2 5 7 Cour Impériale de Montpellier Bicentenaire .....................................................................................11 AGENDA ......................................................................................5 DIRECT Justice pour tous par Michèle Tisseyre................................................ L’auto-censure ou le nouvel enjeu de la liberté d’expression par Nicolas Knispel............................................................................... Quelle liberté d'expression pour l'avocat ? par François Bernon........

« Immersion » en Régions auprès des Services Publics de la Justice..........................12

JURISPRUDENCE

Procédure civile

Cour de cassation - 25 juin 2012 - Avis n° 1200005 .......................

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Mariage d’une personne sous curatelle

13 ANNONCES LEGALES ...................................................14 TRIBUNE

Conseil constitutionnel - 28 juin 2012 - Décision n° 2012-260 QPC ...

Assurance protection juridique au secours de l’aide juridictionnelle ...................................23 Tarif des Notaires ......................................................................23

DÉCORATION

Yves Mahiu

Chevalier de la Légion d’Honneur ...................................................

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’est Gérard Christol, Doyen de l’Ordre des Avocats du Barreau de Montpellier, ancien Président de la Conférence des Bâtonniers qui a ouvert l’Audience Solennelle de Rentrée du Jeune Barreau de Montpellier : cette année la cérémonie a revêtu un caractère exceptionnel puisque c’était la célébration du bicentenaire du rétablissement de ce Barreau chargé d’histoire et porteur de valeurs républicaines. Le premier temps fort de ce bicentenaire fut la reconstitution historique, le jeudi 21 juin 2012, de l’installation de la Cour Impériale de Montpellier en 1811 et du rétablissement de l’Ordre des Avocats de Montpellier au Palais de Justice, l’occasion pour le Premier Président Didier Marshall et le Procureur Général Bernard Legras de co-présider cette émouvante cérémonie et d’accueillir deux prestigieux orateurs le Bâtonnier Frédéric Vérine Commissaire de sa Majesté Impériale et Royale, en bicorne, campant le représentant de Napoléon ainsi que le Bâtonnier Pierre Chatel.

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Entourée de son Dauphin Luc Kirkyacharian, Michèle Tisseyre a présenté le lendemain au “Corum” les actions de son Barreau et ses réflexions sur la justice, elle a exhorté ses jeunes consoeurs et confrères à relever les défis de la concurrence et de la publicité ainsi que ceux de la virtualité et de la dématérialisation. Pour cette talentueuse juriste, l’avocat résiste à tout car il reste « debout et droit dans ses convictions et ses actions ». Nicolas Knispel et François Bernon, respectivement lauréats des prix Vincent Badie et Jacques Lafont ont ensuite discouru sur les thèmes « L’auto-censure ou le nouvel enjeu de la liberté d’e xpression » et « Quelle liberté d’e xpression pour l’avocat ? ». Les prix ont été remis par Jean-Luc Forget Président de la Conférence des Bâtonniers et Christian Charrière-Bournazel Président du Conseil National des Barreaux, nous présentons nos chaleureuses félicitations aux lauréats. Jean- René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : as@annoncesdelaseine.fr FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE


LES ANNONCES DE LA SEINE Siège social : 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS R.C.S. PARIS B 339 349 888 Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr e-mail : as@annoncesdelaseine.fr

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Michèle Tisseyre

Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05

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Rentrée solennelle

Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède Comité de rédaction : Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appel Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International Publicité : Légale et judiciaire : Commerciale :

par Michèle Tisseyre

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 13 346 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

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Copyright 2012 Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Sauf dans les cas où elle est autorisée expressément par la loi et les conventions internationales, toute reproduction, totale ou partielle du présent numéro est interdite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal. Le journal “Les Annonces de la Seine” a été désigné comme publicateur officiel pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, par arrêtés de Messieurs les Préfets : de Paris, du 27 décembre 2011 ; des Yvelines, du 20 décembre 2011 ; des Hauts-deSeine, du 28 décembre 2011 ; de la Seine-Saint-Denis, du 26 décembre 2011 ; du Val-de-Marne, du 20 décembre 2011 ; de toutes annonces judiciaires et légales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procédure Civile et de Procédure Pénale et de Commerce et les Lois spéciales pour la publicité et la validité des actes de procédure ou des contrats et des décisions de justice pour les départements de Paris, des Yvelines, de la SeineSaint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine. N.B. : L’administration décline toute responsabilité quant à la teneur des annonces légales.

- Tarifs hors taxes des publicités à la ligne A) Légales : Paris : 5,48 € Seine-Saint-Denis : 5,43 € Yvelines : 5,22 € Hauts-de-Seine : 5,48 € Val-de-Marne : 5,41 € B) Avis divers : 9,75 € C) Avis financiers : 10,85 € D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,82 € Hauts-de-Seine : 3,82 € Seine-Saint Denis : 3,80 € Yvelines : 5,22 € Val-de-Marne : 3,83 € - Vente au numéro : 1,15 € - Abonnement annuel : 15 € simple 35 € avec suppléments culturels 95 € avec suppléments judiciaires et culturels COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES NORMES TYPOGRAPHIQUES Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Justice pour tous

erci, mes jeunes confrères d’avoir dénoncé courageusement la contrainte que vous avez subie quant au sujet de vos discours. Je plaide coupable, mais je n’étais pas seule. Autant le dire tout de suite, je dénonce, à mon tour, sans vergogne, mon complice, en la personne du Bâtonnier Frédéric Vérine. Mais vous étiez consentants ! Aviez-vous le choix est une autre question ? Vous avez relevé le défi du paradoxe consistant à imposer comme sujet… « la liberté d’e xpression », grâce à votre impertinence, le luxe des avocats. Votre impertinence n’est pas allée, ce soir, jusqu’à la rébellion ; vous avez bien fait, on n’est jamais trop prudent avec la discipline. Cela étant, la prestation du lauréat du prix Jacques Lafont était sensiblement différente du discours qui m’avait été transmis, sans doute au titre du droit à la liberté d’expression. Pour ma part, j’avais une « excuse légitime », je voulais placer nos manifestations sous l’égide des Droits de l’Homme et des vertus de la République qui sont aussi les nôtres : l’Egalité, les Libertés, la Confraternité. Lors de la Séance solennelle, il est rituel de faire un bilan de la période écoulée ; ce sera rapide. Nous avons fait à Montpellier, comme tous les Barreaux, nous avons juste « fait face ». Quelques exemples : - Face à la réforme de la garde à vue et à la « collision » des deux normes : judiciaires et législatives, à la mi-avril 2011. Le 15 avril à 14 heures, nous étions prêts. - Face à la réforme de l’hospitalisation sous contrainte promulguée le 6 juillet 2011 pour être appliquée au 1er août. Nous étions prêts. - Face à la contribution de 35 € prévue « dématérialisée », puis rematérialisée, puis à moitié, puis tout à fait… sauf pour certaines

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juridictions ; due par tout demandeur, sauf bénéficiaire de l’AJ, sauf si l’AJ n’est pas encore accordée, sauf si le BAJ va très très vite… Bref, une mesure si simple et surtout si juste. - Face au « tsunami » Cour d’appel : nouvelle procédure, disparition des avoués, dématérialisation etc … La routine en somme ! A Montpellier, il faut signaler une particularité inaugurée le 1er janvier 2011. Alors que la mode était à la concentration plus ou moins rationnelle, plus ou moins justifiée, des juridictions - le Tribunal de commerce de Sète a été supprimé à tort selon nous - à Montpellier, nous avons fait preuve d’originalité, puisqu’on a déconcentré. Jusque-là nous avions, dans un rayon raisonnable autour de l’ancien Palais de Justice, siège de la Cour, toutes les juridictions devant lesquelles nous travaillons. Désormais, le Tribunal d’instance, les tutelles, la nationalité, le Tribunal de commerce et le Conseil de Prud’hommes sont logés dans un bâtiment, de belle facture soviétique, magnifiquement rénové et certes fonctionnel, à ½ heure à pied, ou 1 heure en voiture des autres lieux judiciaires. Il fallait bien s’adapter. Ainsi, à toute chose malheur est bon, Rachida Dati a amélioré le chiffre d’affaires des vendeurs et loueurs de deux roues. Je leur suggère de lui envoyer un mot de remerciement. Où ? Il paraît qu’elle serait avocat mais je ne sais à quelle adresse ; le mieux : « poste restante chez Dior ». Oublions tout cela. Aujourd’hui, notre Barreau, et depuis quelques jours, célèbre le bicentenaire de son rétablissement. Il y aura, cette année, 200 ans que le Conseil de Discipline des avocats de Montpellier a été composé à nouveau. Un bâtonnier a été désigné par arrêté du Procureur général. En soi, ce très vieil évènement n’était pas de nature à justifier qu’on le fête sur trois jours.

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Rentrée solennelle

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Mais, je l’ai pris comme prétexte à l’organisation de rencontres multiples dont vous avez vu un petit compte rendu en image - précédées par le prélude offert par la Faculté de Droit de Montpellier avec éloge à Placentin, qui démontrent que : - la place du juriste, et notamment de l’avocat, dans la société, a, de tout temps, été source de progrès, social et citoyen, - tous les juristes, et tous ceux qui participent à l’œuvre de justice, conscients d’appartenir à une communauté exigeante, partageant savoir technique et éthique, sont capables de se retrouver autour de sujets sérieux - en les déclinant parfois sous un genre qui peut l’être moins. A quoi sert l’observation du passé ? Que nous apprend l’histoire sur l’avocat et son rôle social ? Nous savons que le costume de l’avocat est identique depuis des siècles. Chaque retour en arrière nous fait remarquer que les vertus, l’identité, le « profil », le rôle, les charges de l’avocat n’ont pas beaucoup changé. L’arrêté du 2 novembre 1812, reproduit dans notre petit fascicule, impose comme premiers devoirs au Conseil de Discipline rétabli de : - pourvoir à la défense des indigents par l’établissement d’un bureau de consultations gratuites, - désigner d’urgence les avocats devant composer ce bureau. C’est l’embryon de l’accès au droit des plus démunis. Les avocats font don, déjà, de leur science et de leur concours. Mais replaçons ces dispositions dans leur contexte. Les avocats sont, à l’époque, des notables qui ne pratiquent pas encore véritablement un métier. Il n’y a pas non plus de prise en charge publique des besoins essentiels des individus. L’Aide Juridictionnelle ne sera constituée embryonnairement qu’en 1851. 22 Juin 2012, le monde a changé, fondamentalement. L’accès au droit si peu. Je ne décrirai pas, encore, à tous ici, qui les savez, dans quelles attentes sont les justiciables démunis et dans quelles attentes sont les avocats. Sous l’Ancien Régime, l’avocat ne pouvait exiger aucun honoraire, si on voulait bien lui donner

quelque chose, il le prenait avec modestie et délicatesse. Nous sommes aujourd’hui des professionnels qui n’ont plus à refuser de parler de leur situation matérielle. Nous n’avons pas peur de servir les intérêts de ceux qui n’ont pas les moyens d’accéder au droit, au juge. Nous n’avons pas à avoir honte de servir également nos intérêts Mais nous savons que cela, aussi, va, forcément, changer ; enfin, nous l’espérons. Car nous nous souvenons qu’en décembre 2000, lors d’un ministère, sans doute trop court, Madame Marylise Lebranchu avait pris des

ensemble, des solutions, à travers notre représentation, le Conseil National des Barreaux. « L’égalité » 1789 l’a proclamée. En 1950, la Cour Européenne des Droits de l’Homme n’a fait que l’élargir, rendre universelle l’exigence d’égalité de tous devant la loi, devant le juge, l’égalité des armes, instaurant le « droit au procès équitable ». La France a trainé les pieds, chacun le sait, en matière de garde à vue. Les 14 et 15 avril 2011, un progrès a été marqué mais ce n’est pas fini. Nous ne serons pas conformes aux textes fondamentaux et européens tant que l’avocat n’aura pas accès au dossier.

Sous l’Ancien Régime, l’avocat ne pouvait exiger aucun honoraire, si on voulait bien lui donner quelque chose, il le prenait Michèle Tisseyre avec modestie et délicatesse.

engagements, quant à la reconsidération significative de l’indemnisation pouvant devenir rémunération des avocats et quant à la refonte du système de l’aide juridique. Depuis 2001, chaque année, nous répétons inlassablement nos revendications : - « Justice pour tous », - « Des moyens pour les défendre tous ». Nous connaissons ces slogans par cœur ainsi que les pavés des rues qui approchent la Place Vendôme où, désormais, nous n’entrons plus. La répétition est, je crois, redevenue à la mode. On l’appelait tirade - souvenez-vous la tirade des « non merci » de Cyrano - on l’appelle aujourd’hui plutôt… « anaphore ». Nouveaux dirigeants, nouveaux parlementaires, nous avons confiance en vous et savons que les engagements pris, et renouvelés auprès du Conseil National des Barreaux, pendant la campagne électorale, seront respectés. Nous sommes prêts à coopérer pour trouver,

Pour autant, les Barreaux ne pourront pas continuer de faire le travail du Service Public au titre de l’organisation de la garde à vue comme de l’AJ, si le coût, considérable, de la gestion n’est pas assumé par l’Etat. Depuis plus d’un an, tous les Barreaux sont en attente de l’indemnité convenue, retardée par divers stratagèmes, dilatoires. Nous sommes citoyens, nous sommes solidaires, mais nous sommes, je le répète, de vrais professionnels, des entrepreneurs libéraux, confrontés à de vraies charges et taxes, perçues par des organismes désincarnés qui n’entendent rien au principe juridique abstrait du parallélisme des formes que certains invoqueraient volontiers : « L’Etat ne me paie pas, pourquoi le paierais-je ? » Dernière supplique pour l’accès au droit, celui des victimes. Qu’il ne soit plus dit que les avocats ne défendent que les auteurs au mépris des victimes. Ils les défendent tous. Les avocats sont engagés depuis toujours aux côtés des victimes, qu’elles soient majeures ou mineures. Notre barreau s’enorgueillit d’une Commission pénale très efficace, très engagée et d’une association l’Avocat et l’Enfant qui œuvre depuis 20 ans aux côtés des mineurs et qui organisera du 30 novembre au 1er décembre 2012 « Les Assises du droit de l’Enfant ». Que nous apprend l’histoire sur l’existence et le rôle des Ordres ? Disons-le tout de suite, les avocats de Montpellier, qui s’expriment aujourd’hui par ma voix, tiennent à leur Ordre près leur Tribunal de Grande Instance. Napoléon, qui ne nous aimait pas, n’a pas rétabli les Ordres pour nous faire plaisir, mais parce qu’il remettait un cadre à l’exercice du « défenseur », à la fois pour organiser, sans bourse déliée l’accès au droit, mais aussi pour réinstaurer le Conseil de Discipline chargé de faire respecter l’éthique, la morale.

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Rentrée solennelle Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est que se renforçant, utilisant leur érudition et leurs talents oratoire et politique, les avocats, à travers l’institution ordinale, reconquerraient leur indépendance. Nous tenons à celle-ci. Cela a été rappelé ce matin. Les avocats redevenaient garants de moralité et d’ordre social, comme au siècle des Lumières. C’est grâce à cette force d’exercice réglementé, à sa déontologie, grâce à son indépendance, que l’avocat peut combattre librement pour les autres. Et combattre pour des causes capitales pour lesquelles les avocats mettent leur intégrité et leur vie en danger. Ces causes peuvent être celles, immenses, du retour à la démocratie, à la justice. Nous devons saluer le courage de nos confrères des révolutions et des pays arabes. Celui des confrères du Barreau de Dyaberkir en Turquie qui sont incarcérés aujourd’hui parce qu’ils ont seulement voulu exercer leur mission de défenseurs. Le barreau français, le CNB en tête, plusieurs Barreaux, dont celui de Montpellier, se relaieront à partir du 16 juillet prochain pour assister comme observateurs à leur procès. Chaque année, davantage d’avocats sont assassinés, incarcérés, persécutés dans le monde. Le rapport annuel de l’Observatoire de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens a répertorié 150 avocats concernés en 2011 mais Il y en a, en fait, beaucoup plus. Ce n’est pas acceptable. Enfin, des avocats luttent, près de nous, pour abolir la peine de mort qui existe encore dans trop de pays. Je voudrais saluer l’action, en ce sens, de nos confrères combattants des droits de l’Homme, ici présents, des Barreaux du Maroc et d’Algérie. L’indépendance des avocats passe enfin par la protection, définitivement, du secret professionnel.

Nous avons cru les engagements électoraux de mai et ceux réitérés en juin par le Garde des Sceaux. Le Président Charrière-Bournazel, on le sait, est vigilant sur cela. Mes jeunes Confrères, Vous avez plusieurs défis : L’explosion de la demande judiciaire et la modification de la demande de droit. Adaptons-nous. Approprions-nous les modes alternatifs de règlement des conflits. La Concurrence et publicité Il est difficile aujourd’hui de ne pas voir que nous sommes dans un monde de communication. D’autres professions ont déjà été quelque peu bousculées par la vision européenne de la publicité et du démarchage. Ne tombez pas dans la simple prestation de service appuyée sur les moyens modernes du marketing. Virtualité et dématérialisation Vraie révolution des 20ème et 21ème siècles, le numérique ne nous épargne pas. Les réseaux, personnels, professionnels nous font parfois oublier que, même lorsque nous ne sommes plus en train d’exercer notre activité, nous sommes toujours avocats. Dans le passé, au moyen âge, les avocats gardaient leur long manteau dans les rues après avoir plaidé ; et si nous prenions soin de faire de même : garder une longue robe d’avocat virtuelle lorsque nous surfons sur le Net ou sur les réseaux sociaux quels qu’ils soient. Restez dans la vraie vie. La déshumanisation, la dispersion et la dilution nous guettent. Ne perdons pas notre idée commune de l’avocat, notre idéal collectif.

Ne sombrons pas dans le spleen. « La profession exige son homme tout entier » disait Loisel à ses étudiants. Paraphrasant le philosophe Alain, j’ajouterai : « [Avocat] est un travail qu’il faut faire debout. » Que l’on plaide ou que l’on conseille, que l’on vienne à la barre ou que l’on n’y vienne pas, on attend de nous d’incarner - et vous avez pris cet engagement solennel lors du serment - conscience, dignité, probité, indépendance et humanité. L’avocat a pour devoir de refuser de ressembler à la société décrite par Rousseau, dont on fête le tricentenaire de la naissance, qui reposerait sur une « contradiction entre le dire et le faire ». Debout, droit dans ses convictions et ses actions, l’avocat résiste à tout. Vous devez garder en mémoire cette part de notre histoire où l’on voulait devenir avocat pour rentrer dans une corporation identifiée comme noble et exemplaire, grâce à son éthique appelée aujourd’hui déontologie. Tant que vous défendrez avec confiance « la cause de l’humanité » (Rousseau encore), vous resterez avocat. Il est temps de conclure et j’adresserai mes derniers mots à mes confrères de Montpellier, et seulement à eux. Nos invités me le pardonneront, j’en suis sûre. C’est une confidence, n’écoutez pas. Dans quelques mois, mes chers confrères, je cèderai la place à notre excellent confrère Luc Kirkyacharian. Je vous dirai en quelque sorte « adieu ». Je n’aurai pas trop souffert avec vous car « voici mon secret, il est très simple ». Si j’ai résisté et gardé l’envie d’aller de l’avant, avec vous, pour vous, c’est parce que : « du plus loin qu’il m’en souvienne, ma plus belle histoire d’amour c’est vous ! »

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Michèle Tisseyre

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Rentrée solennelle

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Nicolas Knispel

Agenda

CURSUS DE FORMATION

Les Indispensables 2 au 6 juillet 2012 Bibliothèque de l’Ordre des Avocats 1, avenue du Général de Gaulle 94000 CRETEIL Renseignements : 01 45 17 06 06 edouchy@lexposia.com 2012-476

CAMPUS 2012

Session de Formation du Barreau de Paris

L’auto-censure ou le nouvel enjeu de la liberté d’expression par Nicolas Knispel uand Madame le Bâtonnier nous a demandé d’intervenir sur le sujet de la liberté d’expression, j’ai pensé qu’il serait indispensable de vous parler du problème de la censure. Cela ne m’a pas véritablement convenu car je n’ai rien à dire de plus sur le sujet de la censure que vous ne connaissiez déjà. Aussi, pour ne pas vous infliger mon incompétence béante sur cet aspect du sujet, j’ai décidé de le disqualifier dans une partie préliminaire. J’ai donc pour dessein de vous persuader que la censure n’est pas un problème intéressant, ou tout du moins que ce n’est pas là un adversaire digne de notre attention. Vous me permettrez ici une digression en citant Monsieur le Bâtonnier Charrière-Bournazel ici présent. Monsieur le Bâtonnier exerçait alors ses fonctions à Paris et à ce titre haranguait les aspirants avocats en leur prédisant avec un certain lyrisme qu’en embrassant la profession nous entrerions « en chevalerie ». Or la chevalerie suppose certaines exigences. On entre en chevalerie parce qu’on a une haute opinion de soi-même, ce qui est particulièrement vrai pour nous autres avocats : « quelle est la différence entre Dieu et un Avocat ? Dieu, lui au moins, ne se prend pas pour un Avocat ». De même, on entre en chevalerie pour s’attaquer à des ennemis dont on puisse avoir une haute estime.

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Joseph Conrad disait que l’on juge un homme sur ses ennemis autant que sur ses amis. Joseph Conrad aurait dû ajouter que cette phrase n’est pas valable que pour les hommes, mais également pour les avocats. Car en effet mes Chers Confrères, nous devons avoir cette « humilité » qui consiste à reconnaître que, parfois, ce qui est vrai des hommes est aussi vrai des avocats. Nous avons donc, en tant qu’avocats, besoin d’adversaires à notre hauteur. Or la censure est-elle un ennemi digne de notre merveilleuse profession ? Au contraire il me semble que la censure est un adversaire grotesque qui ne mérite pas notre auguste attention. Un exemple récent illustre parfaitement la médiocrité de ce combat. Il s’agit d’un fait divers qui a eu lieu en banlieue parisienne, dans la commune de Puteaux. Fin 2011, Le Canard enchaîné a révélé des informations compromettantes sur le compte de la députée-maire de Puteaux - je parle du compte qu’elle a au Luxembourg et qui abriterait selon le journal une part substantielle de son patrimoine. Comment a réagi cette députée ? Par une idée géniale, celle de faire racheter les 600 exemplaires du Canard enchaîné publiés dans sa commune afin d’empêcher la diffusion des informations compromettantes. Bien évidemment, en deux twit tout le web était au courant de cette pitrerie. Alors même que l’histoire d’évasion fiscale était supposée n’intéresser que l’opposition municipale d’une commune de 50 000 habitants, elle a eu un écho national à partir du moment où on a essayé de bloquer sa diffusion. Mais cet aspect bouffonesque de la censure n’est pas valable uniquement pour notre époque. Prenez « la philosophie dans le boudoir », cette sorte de vaudeville sans scénario rédigé en style

4, 5 et 6 juillet 2012 Maison de l’Unesco 125, avenue de Suffren 75007 PARIS Renseignements : 01 47 55 54 50 contact@avocatcampus.org 2012-477

SÉMINAIRE

Les nouveaux défis des fonctions d’arbitre 5 juillet 2012 Chambre de Commerce Internationale er 38, Cours Albert 1 75008 PARIS Renseignements : 01 42 65 12 66 icc-France@icc-France.fr 2012-478

XXÈME CONGRÈS DE L’ACE

Avocat : une profession unie dans sa diversité 27 au 29 septembre 2012 Hôtel Martinez 06400 CANNES Renseignements : mc.midavaine@avocats-conseils.org www.avocats-conseils.org 2012-479

33ÈMES RENCONTRES NOTARIALES

Esprit de famille 11 octobre 2012 Ecole du Notariat 10, rue Traversière 75012 PARIS Renseignements : 01 44 90 30 89 alexandra.pain.cns@notaire.fr www.notaires.fr

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Rentrée solennelle Remise du Prix Vincent Badie par Jean-Luc Forget à Nicolas Knispel

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pré-pornographique par le marquis de Sade en 1795 : force est de reconnaître que l’ouvrage est incroyablement répétitif, d’une grande morosité, et ne sert que de la bouillie indigeste en guise de philosophie. Le véritable tour de force de ce livre est finalement d’être tellement cru qu’il était certain d’être censuré dans toute l’Europe. C’est bien évidemment ce qui a assuré son succès. Jusqu’au 20ème siècle, il n’était officiellement pas en libre circulation, autant dire qu’il n’a en fait jamais autant circulé que durant cette période. Cet objet littéraire mal identifié a capitalisé sur son succès de scandale à un point tel qu’aujourd’hui quand vous tapez « la philosophie » sur google, la deuxième proposition du moteur de recherche est « la philosophie dans le boudoir ». Force est de reconnaître que le Marquis de Sade avait tout compris en choisissant d’investir le terrain de l’impubliable : à défaut d’être un écrivain génial, il aurait fait un directeur de marketing hors pair. Et ces considérations ne sont pas spécifiques à notre vieille nation frondeuse et libertaire. Au Canada au printemps dernier la contestation estudiantine s’essoufflait et perdait de son écho. Le label « printemps érable » était en train de faner et les manifestations étaient de plus en plus clairsemées. C’est à ce moment que l’exécutif canadien a pensé achever le mouvement en rédigeant la loi 78, limitant la liberté de manifestation, cousine de la liberté d’expression. Le printemps érable, dès lors que s’est profilée cette tentative inédite de limitation des libertés fondamentales, est reparti de plus belle et les rangs des manifestants se sont à nouveau resserrés. Ainsi à chaque fois qu’une idée rencontre une tentative de bloquage, elle s’en nourrit et en ressort plus forte. Eric Zemmour, Michel Houellebecq, Pierre Péan ne font jamais autant parler d’eux et de leurs écrits que quand ils essuient un procès pour propos racistes. Tous ces exemples montrent que la censure n’est finalement rien moins que la meilleure des publicités pour les idées qu’elle prétend bâillonner.

Je suis même persuadé que vous éprouvez beaucoup de gratitude pour mon angle d’attaque. Mais j’en viens au corps de mon sujet. En effet, je pense qu’il existe aujourd’hui une véritable limite à la liberté d’expression, autrement plus pernicieuse que la censure, et qu’on pourra appeler l’autocensure, ou le « tabou ». Et je pense même que c’est là un adversaire tellement sinistre qu’il en devient digne de notre attention en tant qu’avocats. Les éléments de cette autocensure ont pu être dénoncés à l’occasion de ce qui est probablement la plus grave affaire de non intervention du journalisme français, c’est-àdire l’affaire Strauss-Kahn. Mais ce scandale n’est en fait que l’ultime avatar d’une déplorable muselière que s’imposent les média français sous le prétexte de la pudeur.

Mes Chers Confrères, nous devons avoir cette « humilité » qui consiste à reconnaître que, parfois, ce qui est vrai des hommes est aussi vrai des avocats. Nous avons donc, en tant qu’avocats, besoin d’adversaires à notre hauteur. Or la censure est-elle un Nicolas Knispel ennemi digne de notre merveilleuse profession ?

C’est certes un procédé généralement repoussant, mais c’est surtout un procédé inoffensif et contreproductif. J’en ai terminé avec mon « in limine litis », et je suis certain de vous avoir à présent pleinement convaincu que j’avais parfaitement raison de ne pas vous ennuyer avec le faux problème de la censure.

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Les médias français sont en effet d’une rare cohésion dans leur parti pris de ne pas s’intéresser à la vie privée des hommes politiques ; toutes les informations qui concernent la maladie et la sexualité, l’amour et la mort, le corps sublimé et le corps putréfié, reçoivent un traitement journalistique mou, pour ne pas dire lâche.

Bien entendu les journalistes peuvent et doivent avoir des tabous. Il ne s’agit pas de revenir à l’époque monarchique ou les excréments et les draps du Roi étaient analysés sur la place publique. Mais ces tabous doivent pouvoir sauter en cas d’intérêt public supérieur. Il s’agit de s’intéresser à tout ce qui peut avoir des conséquences pour le public, quand bien même cela relèverait de la sphère de l’intime. Trop souvent, les journalistes français n’ont pas fait ce travail. En effet on ne peut pas dire qu’il y ait une véritable liberté d’expression dans un pays où les média se sont interdits sous la 5ème République de révéler la double-famille, le cancer ou la sénilité des Présidents de la République successifs. La liberté d’expression est forcément diminuée quand le journalisme français refuse par principe toute enquête sur les relations de couple, la vie sexuelle ou l’inaptitude professionnelle de ceux qui aspirent aux plus hautes fonctions. C’est un tel système qui aurait pu porter à la mandature suprême un économiste certes brillant, mais dont les appétences pour le personnel hôtelier féminin le rendaient manifestement impropre à la fonction. C’est également un tel système qui a maintenu au même poste deux Présidents mourant, Pompidou et Mitterrand, et qui il y a cinq ans a épargné les déboires sentimentaux des candidats aux élections, Royal et Sarkozy, alors même que ces déboires pesaient sur la campagne électorale, qui enfin a protégé le président du FMI contre toute raison et aussi longtemps que possible. Je vous décrivai tout à l’heure la censure comme un animal grotesque et impotent. Par contraste l’autocensure ressemble au lapin tueur de Sacré Graal : il a l’air parfaitement

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Rentrée solennelle inoffensif, personne ne s’en méfie, mais c’est un animal terriblement vicieux aux dents acérées comme des lames de rasoir. Dans l’optique lyrique de la chevalerie, vaut-il mieux s’attaquer à une grosse bête malade et sans griffe ou à Caerbannog, le lapin tueur des Monty Python ? Si j’essaie de vous intéresser à ce problème d’autocensure, c’est que la pusillanimité des média français s’explique dans une large mesure par le droit français. En effet l’article 9 du Code civil, rédigé par le Président Pompidou en réaction à des révélations d’un goût douteux portant sur les mœurs supposées de son épouse, protège la vie privée sans tempérament aucun. Contrairement à la Convention Européenne des Droits de l’Homme, qui prévoit des exceptions d’intérêt public au droit à la vie privée. Ce décalage s’est révélé pleinement à l’occasion de l’affaire emblématique du Docteur Gubler. Le Docteur Gubler, médecin traitant de François Mitterrand qui a révélé post mortem que le Président se savait atteint d’un cancer de longue date. Or la diffusion du livre relatant ces faits a été attaquée avec succès par les ayants-droit du défunt devant les juridictions françaises. Cette attitude des juges français, conformes au texte de loi national, montre bien un attachement excessif au respect de la vie privée, qui vient au détriment à la fois de la liberté d’expression et du droit à l’information. Dans un tel contexte on comprend que les médias français ne s’aventurent qu’avec parcimonie sur le terrain de la vie privée des personnes publiques, quand ils le font. On ne peut donc pas s’étonner que les grands scandales du domaine privé de nos gouvernants

François Bernon

n’aient jamais éclaté que plusieurs années après les faits. Mais il est manifeste que depuis l’affaire StraussKahn, les mentalités évoluent. La semaine dernière a ainsi été diffusée avec luxe de détails les motivations manifestement personnelles de Mme Trierweiller pour soutenir l’un des deux candidats aux élections législatives dans la circonscription de La Rochelle. Est-ce là du caniveau ? Certainement pas. On parle d’une dispute privée qui a des répercutions sur la composition de l’assemblée nationale. Ce n’est bien entendu pas le siège de La Rochelle qui fera basculer la majorité, mais les enjeux qui y sont attachés renseignent utilement sur les jeux de pouvoir au sommet de l’Etat. Il est aujourd’hui essentiel que soient pérennisées juridiquement ces timides percées du journalisme dans la sphère privée. Est-il nécessaire de réécrire l’article 9 du Code civil ? Je ne crois pas qu’une telle extrémité soit nécessaire. En revanche une réponse peut être cherchée en considérant l’un des problèmes majeurs de la profession de journaliste en France, qui est qu’il n’existe pas à proprement parler de corpus de règles déontologiques journalistiques. Une déontologie c’est un totem que l’on sculpte pour faire danser une tribu, que celle-ci soit celle des médecins, des architectes ou des experts comptables. C’est à la fois un objet sacré qui organise toute une profession, mais aussi un objet familier que chacun des membres de la tribu côtoie au quotidien. Un totem est comme un code de déontologie un objet à la fois rassurant, esthétique, et noble. Or aujourd’hui pour des raisons historiques la tribu des journalistes est encore orpheline de son Dalloz de déonto.

Nous avons cependant aujourd’hui un projet de code qui prévoit que « Le journaliste respecte la vie privée des personnes et ne diffuse d’informations dans ce domaine que si elles apparaissent nécessaires à la compréhension d’événements ou de situations de la vie publique. » Bien entendu la protection de la vie privée n’est pas oubliée dans cette formulation, et c’est heureux. Mais on remarquera surtout qu’une porte est laissée ouverte aux enquêtes légitimes qui portent sur l’intime, c’est-à-dire à l’information d’intérêt public. On est nettement plus avancé que dans la formulation du site « acrimed », selon lequel « seule une nécessité publique prépondérante peut justifier une intrusion dans la vie privée de quelqu’un. » Le critère de la « nécessité publique prépondérante », difficile à apprécier, est bien moins stimulant pour la liberté d’expression que celui de la nécessité « pour la compréhension d’évènements ou de situations de la vie publique ». Et manifestement le projet de code est plus en phase avec la jurisprudence européenne. Alors après tant d’années d’omerta sur l’influence de l’intimité dans la vie publique, il sera bien entendu nécessaire de déterminer ce qu’est un personnage public, et quel type de comportement privé peut être divulgué selon quel type de motif d’intérêt public. Mais c’est bien pour cette raison que notre tribu des robes noires doit s’intéresser à ce sujet : nous serons demain en première ligne pour défendre qui la liberté d’expression, qui la protection de la vie privée, mais selon des cartes rebattues et des règles qui restent à déterminer. Et quand on participe ne serait-ce qu’indirectement à l’élaboration des règles qui s’imposent à tous, on a bien le droit de se prendre un peu pour Dieu.

Quelle liberté d'expression pour l'avocat ?

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par François Bernon n discours imposé autour de la liberté d'expression, un paradoxe ! L'exercice de style est intéressant. Au début, je me suis dit que je pourrais dire que la liberté de s’exprimer, c’était aussi le droit de ne pas s’exprimer, et rendre 4 feuilles blanches en guise de discours. Mais d’une part je pense que ça n’aurait pas plu aux personnes ici présentes, et comme tout verbeux qui se respecte, je n’allais pas me priver d’une telle tribune. Pour une fois que tout le monde m’écoute !

U

I. Présentation de la liberté d’expression de l’avocat La liberté d’expression des avocats est fort heureusement protégée en France, mais celleci est différente de celle de tout particulier.

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Rentrée solennelle A - Dans le cadre de sa vie sociale, l’avocat bénéfice de la possibilité de s’exprimer, comme tout citoyen.

Il existe toutefois des restrictions d’ordre déontologique, mais pas uniquement.

Remise du Prix Jacques Lafont par Christian Charrière-Bournazel à François Bernon

b) D’autre part, l’avocat est soumis à une déontologie stricte, et notamment à deux principes principaux, invoqués généralement lors des dérapages verbaux : la modération et la délicatesse. Ce sont deux des 16 principes directeurs de la profession et, si leur violation abouti rarement à une sanction disciplinaire lourde, elle permet toutefois de légère sanction. On s’en sert d’un fourre-tout bien commode lorsqu’un avocat a fait quelque chose de déviant, mais que l’on ne sait pas trop comment le sanctionner. J’étais même parti à l’oral de déontologie avec ça en tête : si on a un doute, on se réfugie derrière un de ses principes et grâce à ça, on a réponse à tout ! B - Lorsqu’il s’exprime à la barre, l’avocat bénéficie d’une liberté d’expression renforcée, et heureusement !

Par essence, le procès est un moment de rupture et de violence. Si deux citoyens se retrouvent l'un en face de l'autre, c'est qu'il existe une crise que la société doit trancher si elle ne veut pas sombrer dans la violence. Et à l'occasion de ce litige, l'exposé impartial des faits et surtout des règles de droit est parfaitement impossible, puisque c'est précisément le juge qui doit tenir ce rôle. En conséquence, l'avocat doit avoir la possibilité de dire tout ce qu'il estime nécessaire, et même le surplus. C’est pour cela qu’en France, un texte protège précisément le temps de la plaidoirie, l’article 41 de la loi de 1881 qui dispose : « Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux ». Cela protège notamment le bâtonnier du barreau de Saint-Pierre La Réunion GeorgesAndré Hoarau qui avait osé dire en plaidoirie que Mme Dati, alors garde des Sceaux, avait produit un faux MBA. Etant donné qu’il n’y avait plus de grand combat au sein de la justice française, elle était allée lui chercher querelle et avait porté plainte pour diffamation. Renvoyée dans les cordes Madame la Ministre, Monsieur le Bâtonnier était protégé ! De fait donc, il existe une protection particulière

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a) D’une part, dans le cadre de sa liberté d’expression, la critique qu’il peut effectuer des institutions judiciaires ne peut dépasser certaines limites, comme l’on jugé tant les juridictions internes que la Cour européenne des droits de l’homme. Les « limites » auxquelles il est fait référence sont très floues, de sorte qu’il n’est pas forcément évident de réussir à la situer. Cette limite se comprend au regard du rôle de l’avocat qui est l’un des acteurs du système judiciaire. Ainsi, les juges saisis d’éventuels manquements de l’avocat essaient de concilier la liberté d’expression d’une part, et le respect de l’autorité judiciaire. C’est donc une limite d’ordre politique, et non déontologique.

de l’avocat au moment de la plaidoirie sur les termes qu’il emploie.

II. La plaidoirie bridée Mais la liberté d’expression de l’avocat est-elle réellement protégée ? L’avocat perd pourtant de plus en plus la maîtrise de celle-ci. A - Point culminant du litige, l'avocat est souvent bridé et la plaidoirie est rendue de plus en plus difficile par une justice qui ne désire que rapidité, efficacité et économie.

a) Les « observations » de l'avocat, terme qui tend à remplacer celui de plaidoirie, doivent pour certain être uniquement techniques et brèves. Il n'est pas rare d'observer des juridictions où le magistrat transforme le temps de la plaidoirie en discussion, en questionnant les avocats, parfois au milieu de leur plaidoirie, en interrogeant l'adversaire, voire même en faisant intervenir les parties, alors pourtant qu'elles sont assistées ! Cette pratique gagne de plus en plus de juridictions. Cela résulte peut-être aussi du fait que certains magistrats découvrent le dossier au moment de l'audience, et seulement à ce moment-là... Dans un système de plaidoirie interactive, c'est le magistrat qui a l'initiative de la procédure. C'est lui qui pose les questions, tuant dans l'œuf l'initiative de la plaidoirie. L'avocat ne peut construire seul sa plaidoirie, il est obligé d'improviser, souvent à son grand dam, et à celui de son client ! b) Imaginez : Appel des causes qui dure, Une pression qui monte… et qui retombe.

On démarre la plaidoirie, puis on se fait couper une fois, deux fois, trois fois… On a envie de répondre calmement : « Monsieur le Président. J’ai du mal m’e xprimer sur un point, et même votre immense sagacité n’a pu démêler mes propos. Toutefois, si l’on reprend bien les termes du litige, vous verrez que l’article X de tel Code ne trouve pas à s’appliquer… » Oui, on aimerait répondre calmement. Mais on sait que si on fait ça, on n’aura pas fini la première phrase qu’on sera coupé successivement : par le Confrère, par le magistrat, voire même un justiciable non représenté dans une autre affaire qui dira « vous voyez ! C’e st comme dans mon affaire ». En plus, on a le sang qui bouillonne, qui monte, une envie primaire remontant du temps des âges farouches revient, et l’ensemble de nos ancêtres, tapies au fond de notre mémoire nous dit : « te laisse pas faire ! Te laisse pas faire !!! » alors on craque : « Taisez-vous ! » Heureusement, on n’en arrive que rarement à ce stade… Tout ça pour dire que garder son flegme en de telles conditions est sans doute l’une raison qui justifie nos honoraires somptueux. B - Le magistrat a tendance à l'oublier, mais la plaidoirie n'est pas là uniquement pour faire mousser l'avocat. C'est aussi le moment où physiquement, le client voit et entend son litige évoqué, et la seule et unique fois.

a) Les avocats le savent, la partie est souvent jouée avant la plaidoirie, mais les clients ne le savent pas. Dans la gestion du procès et dans le conseil, l'avocat doit apprécier trois éléments : les délais, le coût de la procédure, et le trauma. Malgré les calculs et les linéarisations jurisprudentiels tentées pour purger le litige de

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b) La déontologie de l'avocat fait figurer la « modération », mais quelle modération est possible lorsque la défaite apparaît insoutenable aux yeux de son client ? N'est-on pas son mandataire ? Sa voix ? Son thuriféraire ? A travers les âges, on a cherché à brider l'avocat, en cherchant à éviter qu'il exprime la colère du citoyen contre le pouvoir en place politique ou religieux. Cela se retrouve par exemple dans une ordonnance de 1274, qui constitue l’une des premières dispositions réglementaires relatives à l’organisation de la profession en France : « Les avocats, tant du parlement que des bailliages et autres justices royales jureront, en latin ; sur les Saints évangiles qu’ils ne se chargeront que des causes justes, et qu’ils les défendront diligemment et fidèlement ; et qu’ils les abandonneront dès qu’ils connaîtront qu’elles ne sont point justes. » L'évolution du serment est elle aussi éloquente à ce titre, les pouvoirs politiques cherchant à s'abriter de la critique. En effet, les premiers serments que les avocats devaient prononcer avaient pour but de contraindre l'avocat à un discours conformiste. En 1804 la formule alors retenue porte la marque de l'allégeance nécessaire à l'empereur : les futurs avocats doivent jurer « de ne rien dire ou publier, comme défenseurs ou conseils, de contraire aux lois, aux règlements, aux bonnes mœurs, à la sûreté de l’Etat et à la paix publique, et de ne jamais s’é carter du respect dû aux tribunaux et aux autorités publiques ». Pendant plus d'un siècle et demi, la formule du serment est restée peu ou prou la même. En 1971 un nouveau serment naîtra, marqué par l'apparition des premières obligations humaines de l'avocat : « Je jure, comme avocat, d’e xercer la défense et le conseil avec dignité, conscience, indépendance et humanité, dans le respect des Tribunaux, des autorités publiques et des règles de mon Ordre, ainsi que de ne rien dire ni publier qui soit contraire aux lois, aux règlements, aux bonnes mœurs, à la sureté de l’Etat et à la paix publique ».

Mais l'emprise de l'Etat est toujours existante. Le pas franchi en 1982 avec la mise en place d'un serment totalement émancipé d'une quelconque allégeance au pouvoir en place a dû être un moment charnière dans la profession. L’avocat jure simplement « d’e xercer la défense et le conseil avec dignité, conscience, indépendance et humanité ». De légers changements dans le serment sont encore intervenus par la suite, mais l'essentiel était là : l'avocat est désormais supposé être

A - Je rappelle ici que si le magistrat a un devoir de réserve, il n'a encore jamais été vu de magistrat poursuivi disciplinairement pour avoir tenu des propos outrageant envers l'avocat lors de l'audience ! L'outrage à avocat n'existe pas.

Le magistrat doit aussi demeurer impartial lors de l'audience comme dans le prononcé du jugement. Cette impartialité doit être non seulement effective, mais aussi apparente, pour convaincre le justiciable que sa cause est justement entendue.

L'avocat a acquis une liberté de plaider, bénéficiant depuis 1881 d'une immunité pour les propos tenus à la barre. L'avocat dans sa plaidoirie ne peut être poursuivi pour diffamation, et c'est François Bernon bien la moindre des choses !

affranchi de toutes servitudes religieuses, politiques, judiciaires. En parallèle de cette évolution l'avocat a acquis une liberté de plaider, bénéficiant depuis 1881 d'une immunité pour les propos tenus à la barre. L'avocat dans sa plaidoirie ne peut être poursuivi pour diffamation, et c'est bien la moindre des choses ! La prudence et le fameux « sous toutes réserves » ne veulent en réalité rien dire et l'avocat doit savoir appeler un escroc un escroc, sans risquer d'être poursuivi.

III. L’opposition Magistrat / Avocat Récemment, la Cour de cassation a estimé que l'avocat ne peut s'exonérer de l'obligation déontologique de modération et de courtoisie, même sous la provocation du magistrat.

Les magistrats le savent et pour la plupart, ils prennent la distance qu'il sied de prendre en telle circonstance. Je me souviens à ce titre avoir été marqué par le procès d'Adolf Eichmann. J'avais été impressionné par la rigueur clinique avec laquelle le Président interrogeait ce haut dignitaire nazi à propos des horreurs qu'il avait commises, dénué de tout jugement de valeur. C'est cette impartialité dans la conduite du procès qui doit être recherché par le magistrat (du siège, s'entend). Mais celui-ci est humain, il est donc normal qu'il existe des moments où, comme certains avocats, il « sorte de ses gonds », et s'oppose ouvertement à l'avocat qui défend une position qu'il juge inacceptable. On a même pu entendre des magistrats dire que certaines défenses ne peuvent pas être moralement soulevées, à l'occasion notamment des tâtonnements sur la réforme de la garde à vue. Mais c'est le travail de l'avocat de chercher

Luc Kirkyacharian

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toute humanité, en rendant mathématique certaines règles de droit, le trauma reste un élément déterminant dans la direction par le client de « son » procès. C'est le trauma qui fait que parfois, un client refusera une transaction qui lui est favorable, ou à l'inverse acceptera l'inacceptable. A l'audience, le justiciable a en moyenne une chance sur deux de perdre, il a donc en moyenne une chance sur deux d'être incompris. Le juge doit donc comprendre que l'avocat est là pour permettre au client d'exprimer sa vision et que celui-ci se sente entendu, au moins par son avocat. Ce n'est pas simplement une lubie, c'est une obligation dans le cadre de la défense des intérêts de son client, une obligation intrinsèquement liée à la profession. C'est pour cela que parfois, l'avocat « surjoue » sa plaidoirie. C'est pour cela que parfois, il cherche l'incident d'audience. C'est pour cela qu'il peut même dépasser les bornes. C'est pour cela qu'il peut même chercher la sanction ordinale.

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Rentrée solennelle toutes les règles de droits de nature à aider son client à obtenir gain de cause. B - En outre, les magistrats n'ont pas à s'inquiéter de la liberté d'expression particulière donnée à l'avocat. Leur pouvoir est bien supérieur à tous les pouvoirs que notre humble profession pourra un jour obtenir.

A ce point de mon discours, certains d'entre vous doivent penser que je suis le prototype de l'avocat qui cherche le conflit pur et simple, mais tel n'est pas le cas. Je pense simplement que le rôle de l'avocat ne se limite pas à la pratique du droit et à son interprétation, mais aussi à l'expression du malêtre de son client. Je pense aussi que le rôle du magistrat est de le limiter voir de le contrôler, car la controverse juridique ne doit pas devenir un pugilat ou tourner à la cacophonie. Je pense que fondamentalement nos deux professions sont opposées, notre rôle étant de convaincre le magistrat, et le rôle de celui-ci de s'émanciper du discours de l'avocat pour arriver à dégager la règle de droit qui s'applique à la situation. Fondamentalement, j'estime que l'insulte ou les propos outranciers au sein d'une plaidoirie sont parfaitement inutiles pour la mener à bien. Dans un ouvrage appelé l'art d'avoir toujours raison, Schopenhauer décrit les 27 procédés de la rhétorique qui permettent de « gagner » toute discussion, c'est-à-dire de convaincre l'assistance que son point de vue est le bon. Ils sont hiérarchisés, mais Schopenhauer explique bien que cette hiérarchie doit être prise avec précaution, seule l'aptitude de l'orateur à sélectionner le bon procédé au bon moment pouvant avoir un réel impact sur la discussion. Le dernier de ces stratagèmes est l'attaque directe à la personne. Le dernier recours, la stratégie des fonds de tiroir. De tous les stratagèmes, c'est le seul dont il est certain de la place, la dernière, et il le nomme « l'ultime stratagème », car il clôt nécessairement la discussion. Il faut prendre un défaut personnel de l'adversaire, vrai ou non, en tous les cas pouvant être apparent à au moins l'un des

membres du public, et appuyer dessus au maximum, en utilisant les termes les plus durs et les plus crûs, et sans avoir peur d'être injurieux. Cette stratégie est un point de non-retour dans l'opposition entre les acteurs de la controverse qui ne peuvent se séparer qu'en désaccord. A mon sens, cette stratégie ne peut être valablement utilisée dans un discours visant à convaincre, qui est rappelons-le le but de la plaidoirie, sauf à considérer la cause comme définitivement perdue, mais à ce moment-là, à quoi bon même plaider ? Cela présuppose en outre qu'il existe des causes perdues, ce qui n'est pas mon opinion. Le désaccord entre l'avocat et le magistrat, voire son confrère adverse dans certain cas, n'est pas une possibilité, c'est un échec. Pour son client, pour soi, et pour la profession. En plus, je suis trop poli pour ça. On peut utiliser des mots durs sans pour autant être outrancier. Il est plus efficace de faire comprendre que l'adversaire est un faquin plutôt que de le dire. Pour conclure ce discours, j'aimerais évoquer cette anecdote concernant Gustave Courbet. Primé au salon de 1849, celui-ci savait qu'il pourrait exposer l'œuvre de son choix au salon suivant. Celui-ci, très engagé politiquement pour la cause populaire peint un enterrement à Ornans, toile monumentale représentant un enterrement de gueux en grande tenue, comme des bourgeois. La toile fait scandale, mais le message anticonformiste que Courbet voulait faire passer est exposé aux yeux de tous. Les vêtements des acteurs de la scène, en différentes impressions de noir, rend le message encore plus dur pour la haute bourgeoisie, qui assimile traditionnellement le noir à ce qui est laid et vil... C'est ainsi qu'un message subversif doit être porté : en utilisant les lois à bon escient, en s'affranchissant des codes, et vêtu de noir. 2012-475

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Le juge participe à la création du droit. Même s'il est influencé par l'avocat, d'une quelque manière que ce soit, il a seul la possibilité d'émettre directement la norme exécutoire. La loi ne serait rien sans un magistrat pour l'appliquer. Il peut l'interpréter et dès lors, s'en affranchir ou la déformer. Je l'ai déjà indiqué plus haut le juge est un humain, même s'il détient de très haute responsabilité. Il reste un humain, avec ses contradictions, ses passions, ses envies et ses influences. Ainsi, le mécanisme de création d'un jugement est parfois l'inverse de ce qu'il devrait être. Nous avons tendance à croire que la solution d'un litige dépend d'un raisonnement logique, un syllogisme contenant une prémisse majeure, une prémisse mineure, et une conclusion. En réalité, il n'est pas rare que le magistrat trouve la solution, et ensuite cherche à légitimer sa position en construisant un raisonnement juridique permettant d'assurer l'efficacité de son jugement. C'est donc un acte de volonté qui vient faire le droit, et non une simple logique juridique. Alors oui, il reste une limitation car il existe des recours. Oui, le législateur peut intervenir et contraindre la jurisprudence à prendre le sens qu'il désire. Oui, les contraintes sociologiques pesant sur le magistrat l’empêchent de dire n'importe quoi. Il n'empêche que le magistrat a la possibilité de donner à son opinion force de chose jugée. Nos libertés ne sont-elles pas maigres à côté du pouvoir juridictionnel ?

IV. Conclusions

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Cour Impériale de Montpellier Bicentenaire - 1er juillet 1811 / 21 juin 2012

D.R.

Le 21 juin 2012 magistrats et avocats ont reconstitué la cérémonie d’installation de la Cour Impériale de 1811 voulue par Napoléon, ce fut l’occasion de constater que les questions qui se posaient déjà à l’époque sont encore d’actualité puisque le Premier Président Honoré Duveyrier (6 décembre 1753/25 mai 1839) Baron de l’Empire en 1810 évoquait déjà les enjeux de la carte judiciaire et concluait ainsi ses propos ce 1er juillet 1811 : « Vous dont le rang élevé et les titres éminents n’ont point éclipsé la haute considération dont l’Europe entière payait déjà vos vastes connaissances et vos utiles travaux, Monsieur le Commissaire de sa Majesté Impériale Royale, portez nos hommages aux pieds de ce trône resplendissant de trophées et de bienfaits. Exprimez surtout les actions de grâces des anciens membres de la Cour d’Appel. La justice souveraine n’a voulu détacher aucune fleur de la couronne, peut-être unique, qu’elle a daigné décerner à leur zèle et à leur fidélité. Tous les magistrats qui composaient la Cour d’Appel, vous les voyez tous ici, nul n’est privé de l’honneur, nul n’est dispensé du serment de consacrer à Napoléon les derniers efforts d’une vie déjà pleine d’utiles et d’honorables travaux. Ce serment, nous venons de le prononcer tous devant son auguste image. Dans ces contrées lointaines, où sa présence ne peut être qu’un météore bienfaisant, nous avons formé le vœu que cette image sacrée fût toujours dans ce sanctuaire, l’espérance des bons, l’effroi des méchants, le gage et le témoin du zèle de l’impartialité. Peut-il être négligent ou parjure, le Magistrat qui a constamment devant lui les trois objets de son culte, les arbitres suprêmes de ses pensées et de ses actions : Dieu , L’Empereur et la Loi ! » Jean-René Tancrède

orsque, le 1er juillet 1811, les représentants des autorités constituées et “plus de deux cents citoyens et dames de la ville et des environs” prirent place dans la salle d'audience de la Cour impériale de Montpellier, “l'une des plus vastes de l'Empire”, ils assistèrent à une audience bien différente, dans sa forme, des audiences solennelles que tient chaque année notre Cour d'appel. Nul n'imaginerait plus, de nos jours, une Cour installée par le représentant du pouvoir exécutif siégeant, en majesté, distribuant la parole et organisant la cérémonie au nom d'un Empereur détenteur du pouvoir absolu. Nul n'accepterait plus aujourd'hui, en dehors d'une reconstitution historique, que les chefs d'une Cour d'appel adressent des éloges aussi appuyés et fanatiques au Chef de l'Etat ou considèrent leur juridiction comme le temple de Dieu autant que le temple des Lois... Pourtant, dépassons le style suranné et parfois excessif, qui permet de mesurer l'évolution de notre société. Au-delà de cette forme, les questions de fond qu'évoquent ces magistrats sont restées, elles, d'une cruelle actualité.

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Le premier président Duveyrier redoute déjà “le vague et l'obscurité dans les lois” source d'arbitraire et d'encombrement des juridictions, un problème chronique qui se posait probablement déjà dans les centumviri de la Rome antique et qui se pose toujours à l'heure de la dématérialisation. Lorsqu'é voquant les tribunaux il dit : “leurs attributions sagement combinées, leur territoire juridictionnel tracé dans de justes proportions avec les attributions, la population et les localités ; le nombre de juges distribué suivant le travail raisonnablement présumé sur le nombre des justiciables”, comment ne pas penser à la réforme de la carte judiciaire, toujours actuelle, ou à la stagnation des effectifs et des moyens des tribunaux d'une région qui est, pourtant, celle dont la démographie augmente le plus rapidement ? Nombreux sont encore les magistrats de 2012 qui se reconnaîtraient dans ces mots du Premier Président de 1811 : “Si le nombre ne suffit pas, l'excès du travail amène la lassitude et le découragement. On fait toujours moins, parce qu'on a trop à faire. Le découragement produit la lenteur, l'inaction, le retard”.

Les grands enjeux des débats sur la Justice sont donc demeurés constants. La détermination des magistrats et des auxiliaires de justice, au premier rang desquels les avocats, dont l'ordre fut reconstitué quelques mois après l'institution de la Cour, est, elle aussi, demeurée constante et inébranlable. Source : Communiqué de la Cour d’appel de Montpellier

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Direct

« Immersion » en Régions auprès des Services Publics de la Justice Photo © Caroline Montagné

Christiane Taubira

avec un débriefing organisé le soir même Place Vendôme par la Ministre en présence des magistrats chargés des affaires de justice à l’Elysée et à Matignon. Cette moisson d’informations a

permis une meilleure compréhension des difficultés des institutions de justice. La journée a été utile, les occasions d’échanges nombreuses, et l’opération pourrait être renouvelée. 2012-482

ne journée « Immersion » pour aller sur le terrain rencontrer celles et ceux qui assurent quotidiennement les missions du service public de la justice. C’est la consigne que la Garde des sceaux Christiane Taubira a donné aux membres de son cabinet le vendredi 29 juin dernier. Accompagné chacun d’un directeur de l’administration centrale, tous les membres du cabinet sont partis en binôme aux quatre coins du pays visiter soit un Tribunal, un établissement pour mineur ou une prison. Les visites à Lille, Marseille, Bourg en Bresse, Nantes, Clermont-Ferrand, Mulhouse, Rennes, Rouen, Pontoise, Bois-d’Arcy, Mulhouse, Beauvais, Fresnes, Melun, Besançon et Angoulême, se sont déroulées dans la journée

Photo © Caroline Montagné

U

Jurisprudence

Procédure civile “Doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions”. Cour de cassation - 25 juin 2012 - Avis n° 1200005 Procédure Civile - Procédure d’appel (art-1031.1 et suivant du Code de Procédure civile). Réforme - Décret du 28 décembre 2010 et arrêté du 23 décembre - Conclusion - Notification. Notification avec les pièces communiquées. Exclusion des pièces qui ne sont pas communiquées simultanément. Sur le rapport de M. Alt, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Lathoud, avocat général entendu en ses observations orales ;

La Cour de cassation, Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile, Vu la demande d’avis formulée le 21 mars 2012 par la cour d’appel de Paris, reçue le 5 avril 2012, dans trois instances (n° RG 12/01114, 12/01120 et 11/21611) relative à la sanction du défaut de communication simultanée des pièces dans les délais prévus par les articles 908 et 909 du code de procédure civile au regard des dispositions de l’article 906 du même code ainsi qu’à la possibilité de produire après l’expiration de ces délais des pièces qui n’auraient pas été visées dans les conclusions signifiées dans les délais des articles précités.

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En conséquence, Est d’avis que : Doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions. Président : M. Lamanda, premier président. - Rapporteur : M. Alt, conseiller référendaire, assisté de Mme Polese-Rochard, greffier en chef au service de documentation des études et du rapport Avocat général : M. Lathoud

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Jurisprudence

Mariage d’une personne sous curatelle Conseil constitutionnel - 28 juin 2012 - Décision n° 2012-260 QPC

Le conseil constitutionnel, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; le code civil ; le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; les observations produites pour le requérant par Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 4 et 21 mai 2012 ; les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 4 mai 2012 ; les pièces produites et jointes au dossier ; Me Spinosi, pour le requérant, Me Françoise Thouin-Palat, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour Mme Monique D. et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 19 juin 2012 ; Le rapporteur ayant été entendu ; Considérant qu’aux termes de l’article 460 du code civil : « Le mariage d’une personne en curatelle n’est permis qu’avec l’autorisation du curateur ou, à défaut, celle du juge » ; « Le mariage d’une personne en tutelle n’est permis qu’avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué et après audition des futurs conjoints et recueil, le cas échéant, de l’avis des parents et de l’entourage » ; Considérant que, selon le requérant, le mariage est un acte strictement personnel ; qu’en subordonnant le mariage d’une personne en curatelle à l’autorisation du curateur, l’article 460 du code civil porterait atteinte à la liberté du mariage ; Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le premier alinéa de l’article 460 du code civil ; Considérant que la liberté du mariage, composante de la liberté personnelle, résulte des articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; que cette liberté ne restreint pas la compétence que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution pour fixer les conditions du mariage dès lors que, dans l’exercice de cette compétence, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ; qu’il est en outre loisible au législateur d’apporter à cette liberté des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n'en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi ; Considérant que, selon l’article 415 du code civil, les personnes majeures reçoivent la protection de leur personne et de leurs biens que leur état ou leur situation rend nécessaire ; que cette protection est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne ; qu’elle a pour finalité l’intérêt de la personne protégée et favorise, dans la mesure du possible, l’autonomie de celle-ci ; que l’article 428 du même code dispose que la mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge qu'en cas de nécessité et lorsqu'il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la personne par l'application des règles du droit commun, par une autre mesure de protection judiciaire moins contraignante ou par le mandat de protection future ; qu’elle doit en outre être proportionnée et individualisée en fonction du degré d’altération des facultés personnelles de l’intéressé ; Considérant que la curatelle est l’une des mesures judiciaires de protection juridique qui, selon l’article 425 du code civil, peut être ordonnée à l’égard d’une personne atteinte d’une « altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté » ; que l’article 440 du même code

dispose que le juge peut placer en curatelle « la personne qui, sans être hors d’état d’agir elle-même, a besoin, pour l’une des causes prévues à l’article 425, d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile » ; Considérant que l’article 460 du code civil n’interdit pas le mariage de la personne en curatelle ; qu’il le permet avec l’autorisation du curateur ; que le refus du curateur peut être suppléé par l’autorisation du juge des tutelles dont la décision prononcée après un débat contradictoire doit être motivée en fonction de l’aptitude de l’intéressé à consentir au mariage ; que cette décision judiciaire est susceptible de recours ; que la personne en curatelle jouit des garanties nécessaires à l’exercice effectif de ces recours ; Considérant qu’eu égard aux obligations personnelles et patrimoniales qui en résultent, le mariage est « un acte important de la vie civile » ; qu’en subordonnant le mariage d’une personne en curatelle à l’autorisation du curateur ou à défaut à celle du juge, le législateur n’a pas privé la liberté du mariage de garanties légales ; que les restrictions dont il a accompagné son exercice, afin de protéger les intérêts de la personne, n’ont pas porté à cette liberté une atteinte disproportionnée ; Considérant que le premier alinéa de l’article 460 du code civil n’est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; que, par suite, il doit être déclaré conforme à la Constitution, Décide : Article 1er - Le premier alinéa de l’article 460 du code civil est conforme à la Constitution. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 2311 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 juin 2012, où siégeaient : M. Jean-Louis Debré, Président, M. Jacques Barrot, Mme Claire Bazy Malaurie, MM. Guy Canivet, Michel Charasse, Renaud Denoix de Saint Marc, Mme Jacqueline de Guillenchmidt, MM. Hubert Haenel, Nicolas Sarkozy et Pierre Steinmetz.

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Annonces légales

Tribune

Assurance protection juridique au secours de l’aide juridictionnelle Jean-Pierre Picard, Président de l’Association Nationale des Avocats Honoraires (ANAH) nous transmet un billet d’humeur car il s’étonne, qu’en cette période de crise, les douze propositions formulées par l’ANAH qui ont toutes pour but d’alléger sensiblement le budget de l’Etat, n’est pas sollicité de réaction des instances professionnelles destinataires du rapport réalisé* par le Groupe d’Etudes de l”ANAH et intitulé “Assurance protection juridique au secours de l’aide juridictionnelle”. Jean-René Tancrède

l existe au sein de l'A .N.A.H. (Association Nationale des Avocats Honoraires) un groupe d'études qui établit chaque année un rapport portant sur un problème d'intérêt général. Courant 2011, après un long travail de réflexion, il a diffusé un document comportant: "Douze propositions pour améliorer l'accès au droit et à la justice" (consultable sur le site de l'A.N.A.H. : contact@avocatshonoraires.fr) Il est regrettable, que cette étude n'ait eu aucun écho en dépit de son objectif qui, en période de crise, avait essentiellement pour finalité d'alléger la charge financière de I' Etat. Il est constant que la promotion de l'assurance protection juridique constitue le seul moyen qui permettrait d'améliorer l'accès à la justice.

I

Cependant cette voie n'a jamais été efficacement exploitée jusqu'ici. Dans la pratique l'assurance protection juridique, qui devrait être le principal moyen d'accès à la justice, est quasiment inutilisée, et par contre, le principe de subsidiarité de l'aide juridictionnelle institué par la loi de 2007 est totalement méconnu. Certes "La sagesse est fille de l'expérience" (Léonard de Vinci), mais en constatant l'indifférence des diverses instances professionnelles au sujet de leurs travaux, les avocats honoraires se demandent si leur réflexion n'a pas été vaine ? Faut-il voir dans ce désintérêt une marque de défiance à leur égard alors que leurs propositions traduisent une appréciation "moderne" et "novatrice" du problème relatif à l'évolution de l'aide juridictionnelle qui ne se résume

pas à la réévaluation de l'unité de valeur et un appel incessant au financement de l'état. Alors que 2012 a été instituée année européenne de la solidarité intergénérationnelle, c'est l'occasion d'instaurer une véritable et efficace transmission de l'expérience, conforme au statut de l'avocat honoraire, dont on oublie trop souvent le rôle actif au sein de I'Ordre auquel il continue d'appartenir.

* Le rapport est consultable www.avocatshonoraires.fr

sur

le

site

:

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Tarif des Notaires la suite de la publication d’une tribune* relayée par divers sites Internet dont Le monde.fr au sujet d’une prétendue suppression du tarif des notaires, le Conseil Supérieur du Notariat tient à préciser que le Ministère de la Justice lui a fait savoir, par l’intermédiaire de son porte-parole, Pierre Rancé, que celuici « opposait un démenti formel à cette affirmation qui ne repose sur aucun fondement ».

A

* Les Annonces de la Seine numéro 41 du lundi 25 juin 2012, page 6 2012-486

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Décoration

Yves Mahiu, Chevalier de la Légion d’Honneur Rouen - 15 Juin 2012

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Alain Pouchelon, Yves Mahiu et Marc Absire

la Maison de l’Avocat de Rouen, le Bâtonnier en exercice, Marc Absire, recevait les invités de son confrère et prédécesseur Yves Mahiu ce 15 juin 2012 lors d’une cérémonie au cours de laquelle l’ancien Président de la Conférence des Bâtonniers remettait à ce dernier les insignes de Chevalier de la Légion d’Honneur, il s’est notamment exprimé en ces termes :

A

“(…) En préparant cet éloge j'ai été marqué par trois vertus théologales qui marquent votre conduite dans votre vie - la foi, - l'espérance, - la charité, mais aussi par quatre vertus cardinales : - la prudence, - la tempérance, - la justice, - la force. Votre vie personnelle, professionnelle, a été guidée par ces sept vertus. (…) Votre lignée maternelle est d'épée, mais vous avez préféré la défense par le verbe. Je n'en dirai pas beaucoup plus sur votre famille, vous l'écriviez : « Il n'est jamais de bon ton de parler de sa famille. » (…) Vous affectionnez les dossiers touchant à la responsabilité des entreprises, au droit pénal des affaires, mais aussi au droit de la presse, domaine dans lequel on vous reconnait une compétence certaine. Vous devenez membre du conseil de l'Ordre du barreau de Rouen de 2001 à 2006, puis à nouveau à compter de 2009. Vous avez été élu en 2003 membre du Conseil d'Administration du Centre de Formation Professionnel des Avocats. Vous devenez bâtonnier désigné en 2006 et élu bâtonnier de l'Ordre des Avocats à la Cour de Rouen pour les années 2007-2008.

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Votre bâtonnat est illustré par le respect des sept vertus qui font votre vraie personnalité. Vous affirmez votre Ordre au service de l'e xercice libre et indépendant des confrères et les deux ans de votre bâtonnat ont permis de mettre à la disposition des confrères, ce qui était souligné par la presse lorsque vous accédez au dauphinat, votre talent, votre esprit, votre adaptabilité, en un mot une intelligence vive. En poursuivant les actions entreprises et en entreprenant de nouvelles, vous avez veillé, tel un centurion, que dans un monde à genoux devant les lois économiques, les avocats soient encore capables de désintéressement, de dévouement, de sacrifice et dans nos relations professionnelles, de confraternité. Votre bâtonnat s'est inscrit dans un renforcement sur le plan administratif et sur le plan structurel, une réforme du fonctionnement ordinal, avec de véritables délégués du bâtonnier, investis d'un pouvoir et d'une responsabilité réelle. Le bâtonnier ne peut pas tout faire, ni être partout. Vous étiez prospectif Monsieur le Bâtonnier, les derniers textes consacrent le statut de vice-bâtonnier. Je sais aussi que pendant votre bâtonnat vous avez souhaité la promotion de la fonction de l'avocat, et non le métier, par une formation mieux adaptée pour mieux répondre à l'exigence de compétence dans notre exercice professionnel qui crée la confiance de ceux qui nous consultent, qui nous demandent de rédiger, qui nous demandent de les défendre. Monsieur le Bâtonnier, je sais encore que vous avez sensibilisé votre barreau au droit communautaire, au droit de l'environnement ou au développement durable. Mais le rayonnement d'un barreau c'est aussi l'initiative des manifestations en externe. Vous n'avez jamais ménagé vos efforts pour que votre barreau participe à des manifestations artistiques avec des grands témoins invités, tel Jacques Vergès, Jacques Trémolet de Villers, François Gibault, Denis Seznec ; mais aussi des manifestations économiques : - salon des collectivités locales, - journée nationale de la médiation familiale, - les rencontres Avocats / Entreprises sous la maîtrise d'œuvre de la Chambre de Commerce,

- des colloques, avec la célébration de l'arrêt de réhabilitation du capitaine Dreyfus initié par votre prédécesseur Madame le Bâtonnier Badina, que je salue. Je profite de l'occasion pour lui dire que j'ai toujours apprécié ses interventions de qualité lors des assemblées de la Conférence des Bâtonniers. Sous votre bâtonnat un colloque remarqué sur le cannabis en collaboration avec l'Ordre des Médecins ; le soixantième anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme avec la participation de Laurent Fabius, ancien Premier ministre et aujourd'hui Ministre des Affaires étrangères. Tous ces engagements ont révélé ce que vous étiez. Au service des autres, dans l'espérance de voir s'améliorer la nature humaine, mais parce que vous avez la foi, Monsieur le Bâtonnier Yves Mahiu, vous abordez vos confrères avec prudence, tempérance, justice, mais force. Vous êtes dans la quête du meilleur pour vos confrères, ne négligeant jamais le justiciable, les plus faibles, les plus démunis, les opprimés, les étrangers qui peuvent avoir à faire à la justice sur notre territoire, ceux qui sont en prison, ceux qui souffrent, qui ont faim et plus généralement, ceux qui ont soif de justice. Ce sont toutes ces vertus qui vous animent, qui ont fait de vous un bâtonnier plein d'humanité. (…) Toutes ces activités au service de la profession ne vous ont pas empêché d’activité syndicale, puisque vous avez été président de l'Union des Jeunes Avocats de Rouen, mais aussi d'engagement dans la vie civile puisque vous avez été maire adjoint de Mont-Cauvaire, dans le canton de Clères et membre de la communauté de l'agglomération de Rouen, membre du Conseil Scientifique de la Faculté de Droit de Rouen, consécration des efforts pendant votre bâtonnat d’avoir rapproché le Barreau de l’Université. Ces activités professionnelles, civiles, ne vous empêchent pas de vivre vos passions, les parcs et jardins, la réhabilitation du patrimoine immobilier. Je sais vos sacrifices dans l'entretien d'une demeure prestigieuse où sont organisées des visites. (…) Je n'ai pas souhaité évoquer votre foi, votre engagement catholique, c'est du domaine intime, comme pour sa famille, c'est ennuyeux pour les autres m'avez-vous écrit. (…) Je ne peux cependant, avant de conclure, ayant mis en évidence vos mérites éminents guidés par les sept vertus qui ont influencé votre vie, ne pas faire état de votre distinction honorifique, celle de Commandeur de l'Ordre Equestre du Saint Sépulcre de Jérusalem. Cet Ordre de chevalerie religieux créé après la prise de Jérusalem en 1099, ayant pour objectif d'accroître parmi ses membres, la pratique de la vie chrétienne en fidélité absolue au Souverain Pontife. Les actions humanitaires de l'Ordre restent tournées vers la pauvreté, tout en défendant la foi. (…)”

Qu’ajouter à l’éloquent discours d’Alain Pouchelon ? Qui mieux qu’Yves Mahiu méritait une telle distinction dans le plus grand Ordre National ? La richesse de l’expérience professionnelle du récipiendaire reflète sa loyauté et son exigence d’absolu. Nous adressons nos chaleureuses et amicales félicitations au grand juriste apprécié et reconnu dans son entourage, dont la clairvoyance n’a pour égale que sa rayonnante intelligence. Jean-René Tancrède

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