Edition du lundi 13 août 2012

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Lundi 13 août 2012 - Numéro 51 - 1,15 Euro - 93e année

Cour des comptes L’État et le financement de l'économie 12 juillet 2012 Didier Migaud

VIE DU CHIFFRE

Cour des comptes

Maîtriser les risques sans contourner les contraintes budgétaires par Didier Migaud ................................................................................ Principales orientations et recommandations ..................................... Synthèse du rapport public thématique .............................................. Passation de pouvoir Gilles Johanet succède à Jean-François Bénard..................................

2 3 8 9 AGENDA ......................................................................................5 ANNONCES LEGALES ...................................................10 DIRECT Premier Ministre .........................................................................23 Ministère de la Justice .............................................................23 CHRONIQUE Capter une clientèle en ligne par l’utilisation de mots clés Une conception libérale d’inspiration communautaire par Aurélie Dantzikian-Frachon .......................................................

R. TANCRÈDE S.A. Toutes formalités légales et démarches administratives

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our la première fois, la Cour des Comptes a réalisé une analyse de l’évolution du système de financement de l’é conomie française, l’occasion pour le Premier Président Didier Migaud d’é voquer ce jeudi 12 juillet 2012 les difficultés que rencontre la France « à financer des besoins essentiels pour sa compétitivité et la cohésion de son territoire ». La Cour des Comptes a formulé des recommandations face aux choix auxquels est confronté l’Etat alors que ses « leviers d’action atteignent leurs limites » : Les aides directes à l'investissement sont restées stables (7,5% du PIB), mais sont désormais en grande partie distribuées par les opérateurs et les collectivités territoriales, ce qui en a fait perdre progressivement la maîtrise à l'Etat. L'Etat actionnaire a dû ralentir fortement le flux de ses opérations, tant en termes de cessions que d'acquisitions ; il prélève, pour abonder ses recettes non-fiscales, un taux de dividende (56 % du résultat) plus élevé que la moyenne des entreprises du CAC 40 (50 %). Les dépenses fiscales en faveur du financement de l'économie, qui ont doublé en cinq ans entre 2005 et 2010, pour atteindre environ 20 milliards d’euros par an se heurtent au butoir des déficits publics ; leur croissance éventuelle n'est plus soutenable.

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Les cofinancements (partenariats public-privé) ont paru constituer une alternative, mais cette possibilité s'essouffle en raison d'une moindre attractivité pour le secteur privé. Les garanties accordées par l'Etat (124 milliards d’euros d'encours de dette garantie en 2011) ne peuvent plus être utilisées autant qu'autrefois car le niveau de leurs encours peut influencer négativement la perception qu'ont les investisseurs extérieurs de la solvabilité de la France. Dans ce contexte, il convient d’améliorer encore les conditions de financement en favorisant le renforcement des fonds propres et l’autofinancement plutôt que le recours à l’endettement. La Cour des Comptes recommande également de réorienter l’épargne en développant l’offre de financement à long terme afin de mieux répondre aux besoins des entreprises ; quant aux collectivités territoriales, elles doivent participer à l’effort de désendettement de la France en autofinançant leurs investissements. La « sphère financière publique » devra donc faire face à des évolutions de « nature systémique et internationale » en agissant avec des instruments nouveaux, mais à moindre coût, pour rester efficace dans un monde incertain et en pleine mutation. Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

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Maîtriser les risques sans contourner les contraintes budgétaires par Didier Migaud oyez les bienvenus à la Cour des comptes ce matin, à l'occasion de la publication d'un nouveau rapport public thématique qui porte cette fois sur l'État et le financement de l'économie. Vous remarquerez que la Cour publie un grand nombre de rapports en ce mois de juillet: il s'agit de la simple conséquence du choix de la juridiction de s'abstenir de toute publication à sa propre initiative entre mars et juin, pendant la période électorale. Le financement de l'économie rassemble tous les processus qui permettent aux particuliers, aux entreprises et aux administrations, bref à l'ensemble des agents économiques, de couvrir les besoins de financement liés à leur activité. Sans en avoir toujours conscience, beaucoup d'entre nous font quotidiennement appel à ces mécanismes lorsque nous contractons un emprunt pour acheter un logement ou lorsque nous déposons notre épargne à la banque. De même, lorsqu'une entreprise contracte un prêt pour financer un projet ou lorsqu'elle introduit des titres sur les marchés financiers, elle s'insère dans un système plus large, le système de financement de l'économie. Ce système organise la circulation des richesses, des épargnants vers les porteurs de projets, en faisant ou non intervenir des intermédiaires, contre une rémunération et compte tenu d'un certain niveau de risque. Vous le comprenez, la qualité de ces mécanismes est une des conditions essentielles pour le bon fonctionnement d'une économie et sa capacité à générer de la croissance. Elle doit donc constituer un point de vigilance majeur pour les pouvoirs publics. Le financement de l'économie recouvre de vastes enjeux financiers, d'une importance cruciale pour le fonctionnement de notre économie, à l'heure même où celle-ci traverse une grave crise. Or, en dépit de l'importance des moyens publics engagés pour répondre à cette

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Didier Chotard Frédéric Bonaventura

Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 12 373 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

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situation et des risques que cette intervention comporte, les analyses qui dressent un diagnostic global des instruments mobilises par l'Etat demeurent rares : le dernier document de synthèse sur ce sujet est un livre blanc publié il y a vingt-six ans sous l'égide de Pierre Bérégovoy. Le rapport que la Cour publie aujourd'hui présente donc un caractère inédit. La Cour a pensé indispensable d'établir cette synthèse alors que la crise économique et financière perdure et que des interrogations sont soulevées sur la reprise de la croissance et sur l'efficacité des multiples interventions de l'Etat. Elles appellent manifestement à la réflexion et à la recherche de cohérence dans l'action de l'Etat. Ce rapport apparaît donc à un moment charnière et permet d'éclairer des choix qui peuvent être majeurs pour la croissance. II démonte et analyse pièce par pièce les différents circuits de financement de l'économie française et les resitue dans une analyse de long terme, pour rendre ce sujet accessible à tous les acteurs de l'économie et aux citoyens et leur en fournir une vision d'ensemble. II répond donc particulièrement à la mission constitutionnelle de la Cour d'informer les citoyens. Avant de vous en présenter les constats et les principales recommandations, permettez-moi de souligner que ce travail s'appuie sur de nombreux rapports que la Cour a pu produire au cours des dernières années, ainsi que sur la consultation de très nombreux experts et de parties prenantes, dont vous trouverez la liste en annexe du rapport. L'analyse de la Cour privilégie les évolutions profondes par rapport aux phénomènes transitoires, afin de rendre compte des impacts durables de la crise. Elle ne porte pas un diagnostic sur les causes de la dégradation de la compétitivité de la France mais analyse ses conséquences et fournit des pistes pour favoriser l'investissement. Elle ne porte aucun jugement sur la conduite des politiques européennes et sur le contenu de la politique monétaire, car telle n’est pas la mission de la Cour. Pour vous présenter ce rapport, j'ai autour de moi Christian Babusiaux, Président de la formation inter-chambre qui a préparé ce rapport, Jean-Marie Bertrand, Président de Chambre et Rapporteur Général de la Cour, Gabriel Ferriol Auditeur et Rapporteur Général de ce rapport, Catherine Julien-Hiebel, Conseillère Référendaire, et Monique Saliou, Conseillère Maitre et Contrerapporteur. Je tiens également à remercier vivement les autres membres de l'équipe de synthèse : Emmanuel Bichot et Pascal Helwaser, Conseillers Référendaires, Christine Baillion, Jean-Pierre Beysson et Julien Tiphine, Rapporteurs ainsi que Raphaëlle Hours, Sophie Maillard et Tom Durand. Outre l'équipe de synthèse, je ne peux remercier chacun des douze autres Rapporteurs de la Première Chambre qui ont participé à l'instruction du rapport, mais je les remercie à travers Raoul Briet, Président de cette Chambre. Quels sont les quatre principaux messages qui ressortent de l'analyse de la Cour ? Le premier message est que la situation du financement de l'économie présentait des facteurs de fragilité dès avant la crise, certains relevant directement de la responsabilité de l'Etat ;

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Le deuxième message est que la crise a aggravé ces fragilités et aura des conséquences durables sur le financement de l'économie française ; Troisième message : les outils très divers utilisés par l'Etat ont chacun révélé des limites, à des degrés divers ; Quatrième message : l'Etat dispose néanmoins de marges de manœuvre dont il peut tirer profit pour améliorer le financement de l'économie. Je reviens d'abord sur le premier message, celui d'une situation en apparence saine mais porteuse, dès avant la crise, de nombreuses fragilités. En France, le taux d'épargne des ménages est traditionnellement élevé et se situe entre 15% et 17% de leur revenu disponible brut. Cette épargne brute, soit un flux de 214 Md€ en 2011, constitue

2 000 Md€ d'encours, soit le double de la capitalisation des entreprises du CAC40. En outre, le crédit bancaire est en France, moins cher et moins sélectif que dans d'autres pays. Au-delà de sa responsabilité en matière de régulation financière, l'Etat assure six fonctions essentielles : • par la fiscalité et les dépenses fiscales, il agit sur l'épargne et l'autofinancement ; • il accorde des subventions d'investissement ; • il intervient en tant qu'actionnaire des entreprises publiques ; • il organise des circuits d'épargne réglementée ; • il oblige les entités publiques à déposer leurs disponibilités auprès du Trésor ; • enfin, il accorde sa garantie 0 de nombreux acteurs publics ou privés, afin de les aider à couvrir leurs risques.

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La France se distingue par l’importance du rôle joué par le secteur bancaire dans le financement de l'économie, qui assure la majeure partie de cette transformation. Les sociétés d'assurance y participent également, mais de façon plus marginale.

naturellement un atout pour le financement de l'économie, mais à condition que les circuits du financement de l'économie lui permettent d'être dirigée vers la satisfaction des besoins de financement des acteurs économiques. Les épargnants souhaitent à la fois une rentabilité de leur épargne, mais également une disponibilité permanente de celle-ci pour répondre à des besoins immédiats. Le tiers des placements financiers des ménages, soit 1 375 Md€ d'épargne accumulée, prend ainsi la forme de contrats d'assurance-vie, qui sont en apparence une forme d'épargne longue mais, qui, en réalité peuvent être utilisés comme une épargne disponible. Les autres formes les plus répandues d'épargne sont les livrets d'épargne réglementée, notamment le livret A, le livret de développement durable et le livret d'épargne populaire, pour 331 Md€ au total pour ces trois produits. En regard de cette épargne qui doit être disponible, les porteurs de projets souhaitent généralement des financements longs. Aussi, pour satisfaire tant l'offre que la demande, l'intervention d'intermédiaires est nécessaire, capables d'assurer ce qu'on appelle la transformation financière. La France se distingue par l’importance du rôle joué par le secteur bancaire dans le financement de l'économie, qui assure la majeure partie de cette transformation. Les sociétés d'assurance y participent également, mais de façon plus marginale. Grace à cette organisation, les emprunteurs français ont bénéficié jusqu'à récemment d'un crédit bancaire abondant, représentant environ

Dès avant la crise, ce modèle traditionnel présentait de nombreuses fragilités sousjacentes. Première fragilité : l'épargne des Français s'est orientée de façon croissante vers l'immobilier, dont la valorisation rapide a enrichi les ménages.

REPÈRES

Principales orientations et recommandations ASSEOIR LE FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE SUR UNE ÉPARGNE FINANCIÈRE DE LONG TERME - rationaliser la dépense fiscale dans le domaine de l’assurancevie afin de mieux inciter à la détention dans la durée. En particulier : - redéfinir la durée fiscale des contrats en fonction de l’historique des versements ; - réaménager le profil des taux de prélèvements forfaitaires libératoires s’appliquant aux revenus de l’assurance-vie de façon à encourager plus efficacement la détention longue ; - promouvoir une rémunération des contrats d’assurance-vie différenciée selon la durée de détention ; - réserver l’action publique dans le domaine de l’immobilier (hors logement social) aux zones qui connaissent une pénurie de logements ;

plafonds actuels des livrets et répartir par paliers sur plusieurs années ce relèvement ; -préciser le modèle prudentiel du Fonds d’épargne sur le plan de la liquidité pour bien calibrer sa marge de manœuvre ; - assurer globalement l’équilibre financier à terme des prêts au logement social ; - moduler les taux des prêts du Fonds d’épargne aux organismes de logements sociaux en fonction du caractère tendu de l’offre de logement ;

MIEUX RÉGLER ET ORIENTER LA LIQUIDITÉ DU FONDS D’ÉPARGNE - en cas de doublement du plafond du livret A et du livret de développement durable, appliquer un prélèvement social sur les revenus tirés des dépôts pour leur partie supérieure aux

CIBLER LES DÉFAILLANCES DE MARCHÉ POUR LE FINANCEMENT DES PME - soutenir la capitalisation des entreprises en phase de création, d’amorçage et de premiers développements : - améliorer les véhicules fiscaux existants (FCPI, FIP, FCPR) ;

AMÉLIORER LES CONDITIONS DE FINANCEMENT DES ENTREPRISES PAR UN REDÉPLOIEMENT DE LEUR FISCALITÉ - redéployer la fiscalité des entreprises dans un sens plus favorable à l’investissement et aux petites entreprises ; - plafonner la déductibilité des intérêts d’emprunt de l’impôt sur les sociétés ;

- redéployer une partie des moyens de CDC Entreprises ; - renforcer l’orientation des interventions d’Oséo vers la compensation des défaillances de marché, notamment l’innovation et le développement ; - maintenir une vigilance sur l’évolution de l’offre de crédit à destination des très petites entreprises et des PME et, à cette fin, prolonger la Médiation du crédit ; -engager une réflexion sur le droit des faillites, notamment sur la nature du contrôle de l’entreprise pendant le processus précédant la liquidation ; FAIRE ÉVOLUER LE MODÈLE DE FINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - mettre en place rapidement la structure commune entre La Banque Postale et la Caisse des dépôts et consignations ; - éviter que la responsabilité financière de l’Etat puisse être engagée par la création éventuelle d’une agence de financement des collectivités territoriales ; - interdire l’offre aux collectivités territoriales de produits financiers complexes ou structurés ;

ADAPTER LA SURVEILLANCE FINANCIÈRE AU NOUVEAU CONTEXTE - continuer à adapter les pratiques et les moyens de la supervision aux risques financiers actuels, et à l’éventuelle progression des flux financiers gérés par le secteur non-régulé ; - renforcer la présence française au sein des autorités européennes et internationales de régulation financière ; RENFORCER LE PILOTAGE EXERCÉ PAR L’ETAT - doter l’Etat des outils et procédures permettant une connaissance plus fine des besoins de financement de l’économie : - élaborer un rapport annuel sur l’ensemble des problématiques du financement de l’économie ; - présenter dans les documents budgétaires, et notamment sous forme d’un document de politique transversale, une vue cohérente et homogène de l’ensemble des instruments concourant à une même politique, en faisant apparaître les effets respectifs de chaque aide ; - élaborer des données agrégées sur la distribution sectorielle des aides des collectivités territoriales aux entreprises ;

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- rationaliser les différents canaux de financement au sein du groupe Caisse des dépôts s’agissant du financement des entreprises, notamment en étudiant la possibilité de regrouper CDC Entreprises et le Fonds stratégique d’investissement au sein d’une structure intermédiaire commune ; - maintenir séparées, en cas de réorganisation de la sphère financière publique, les fonctions de prêteur et d’investisseur en fonds propres ; ADAPTER LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS À LA NOUVELLE DONNE - élaborer un nouveau plan stratégique ; - améliorer la gouvernance du groupe Caisse des dépôts : - élargir les avis de la commission de surveillance aux comptes du Fonds d’épargne et aux principales décisions du ministre de l’économie concernant les prêts du Fonds ; - améliorer le processus de prise de décisions du Fonds stratégique d’investissement ; - renforcer le rôle des comités d’audit des filiales de la Caisse ; - mettre en place une politique active de gestion des participations de la Caisse.

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Vie du chiffre Elle a parallèlement aggravé leur endettement et réduit leur épargne financière. L'immobilier a également absorbé une part majeure des capacités de financement. Deuxième fragilité : cette épargne s'est davantage orientée vers l'étranger, notamment à travers l'assurance-vie et sans que les épargnants en soient toujours conscients. Près de 45 % du patrimoine financier des ménages sont désormais formé d'actifs non-résidents, c'est à dire d'actions, d'obligations, où d'autres titres financiers étrangers. Troisième fragilité : le système bancaire distribue davantage de crédits qu'il ne détient de dépôts. Il présente un besoin structurel de refinancement, c'est à dire d'emprunt à court terme sur les marchés financiers, pour disposer de la liquidité nécessaire à leur activité de crédit. Ils sont de ce fait plus exposés aux soubresauts des marchés financiers. Quatrième fragilité : les entreprises ont connu une érosion progressive de leur rentabilité, qui a pesé sur leur capacité à dégager des profits. La France présente la plus faible part des profits dans la valeur ajoutée en Europe. Cette baisse tendancielle du taux de marge des entreprises pèse sur leur résultat, donc sur leur capacité à dégager elles-mêmes les ressources leur permettant d'investir. Le graphique qui s'affiche rapporte l'investissement à l'épargne dégagée. Il illustre la baisse régulière depuis 2000 du taux d'autofinancement des entreprises françaises. En 2011, le besoin de financement des entreprises s'est creusé pour atteindre 65 Md€, ce qui met en évidence leur dépendance par rapport aux financements externes. Or ce financement est en France essentiellement de nature bancaire pour les PME, celles-ci ayant un accès plus difficile aux autres formes de financement. En général, seules les grandes entreprises ont recours aux marchés d'actions ou aux émissions d'obligations. L'apport de fonds propres à des sociétés non cotées, ce qu'on appelle le capital-investissement, est encore peu développé et est concentré sur les seules entreprises les plus matures. Les opérations de capital- risque et de capital-développement, qui interviennent en début du cycle de vie d'une entreprise sont peu nombreuses et affichent des rentabilités faibles. Par manque de solutions alternatives, les PME indépendantes, les porteurs de projet et les collectivités territoriales de taille moyenne, se trouvent dans une situation de quasi-dépendance à l'égard du crédit bancaire. En ce qui concerne les entreprises, certaines peuvent se trouver ainsi prises dans un cercle vicieux de sous- investissement. Certaines de ces fragilités sont directement liées à l'action de l'État. En premier lieu, la fiscalité sur les entreprises et sur l'épargne n'est pas neutre ; elle contribue à accentuer les déséquilibres relevés: • les intérêts d'emprunts sont entièrement déductibles du revenu fiscal des entreprises, alors que les dividendes ne le sont pas, ce qui les incite à avoir recours au financement par endettement plutôt que par fonds propres; • la fiscalité des entreprises, en dépit de l'affichage d'un taux réduit d'impôt sur les sociétés pour les entreprises à chiffre d'affaires limité, défavorise au contraire les PME : le taux implicite d'imposition des entreprises de plus de 5 000 salariés est de 19 % alors que celui des PME de 10 à 249 salariés est de 37 % ;

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QUELQUES CHIFFRES

Position financière nette de l’économie française et comparaisons européennes

• enfin, les prélèvements obligatoires pèsent plus lourdement qu'en Allemagne nous le redisons dans ce rapport sur les facteurs de production, c'est à dire sur la masse salariale et sur le capital fixe. Cette forme de fiscalité pénalise l'autofinancement des entreprises • du côté des épargnants, la fiscalité des revenus privilégie l'épargne sans risque et l'immobilier: 42 % de l'épargne sans risque bénéficie d'un avantage fiscal contre seulement 12 % de l'épargne risquée. En second lieu, les administrations publiques, c'est à dire l'ensemble formé par l'État, ses opérateurs, les régimes de protection sociale et les collectivités territoriales, présentent un déficit récurrent. Plus de trente-cinq années de déficit annuel des administrations publiques ont entraîné un gonflement de la dette jusqu'à un niveau aujourd'hui proche de 90 % du FIB. Le déficit des administrations publiques, qui est aussi leur besoin de financement, a été de 103 milliards d’euros en 2011. Depuis de nombreuses années, les administrations publiques, non seulement ne parviennent pas à épargner, mais ne peuvent pas assurer le renouvellement du capital public dont elles ont la charge. L'importance de leur besoin de financement - 103 milliards d’euros - et son poids dans l'ensemble du financement de l'économie apparaissent quand on le compare à celui des entreprises du secteur productif, qui est de 65 milliards d’euros. Réciproquement, les autres acteurs de l'économie, banques assurances et ménages, ne parviennent pas à répondre à ces deux besoins de financement. Ainsi, l'économie française dans son ensemble présente un besoin de financement de 51 milliards d’euros, c'est à dire

que son investissement total, de 411 Md€ n'est pas finance par son épargne totale, de 360 Md€. Ce besoin de financement est apparu en 2005. Entre 1993 et 2004, la France avait, au contraire, dégagé une capacité de financement. C'est la dégradation concomitante de sa compétitivité et de ses finances publiques qui explique cette importante dégradation de sa balance courante, la mettant dans ['obligation de recourir chaque année à des financements venus du reste du monde, et sans cesse plus conséquents. Les nonrésidents, qui possédaient en 1998 moins d'un quart de la dette de l'Etat, en détiennent aujourd'hui les deux tiers. Cette situation place désormais l'économie française dans une situation débitrice par rapport au reste du monde. La différence entre ses actifs financiers, c'est à dire les biens qu'elle possède, et ses passifs financiers, c'est à dire les dettes qu'elle a contractées, est devenue négative depuis une dizaine d'années. Elle atteignait, selon les derniers chiffres disponibles, ceux de 2010, 233 milliards d’euros. D'une certaine façon, la France est débitrice à l'égard du reste du monde de cette somme importante, qui représente l'équivalent de 12 % de son FIB. L'Allemagne est à l'inverse dans une situation créditrice de 518 milliards d’euros. C'est à partir de 2001 que la France est devenue débitrice, sans bien le mesurer et sans en tirer les conséquences. J'en viens maintenant au deuxième message : la crise a aggravé ces fragilités et aura des conséquences durables sur le financement de l'économie française. On ne reviendra pas au statu quo ante. La crise économique amorcée en 2007 a profondément déstabilisé l'environnement

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Vie du chiffre économique et financier. Elle est venue sanctionner les limites d'un modèle excessivement fondé sur l'endettement et auquel la France elle-même a succombé. Entre 2000 et 2011, l'endettement global des agents non financiers est passé de 150 % de PIB à 210 %, alors qu'il restait stable Outre-Rhin. Je ne vais pas vous rappeler ici les causes et l'ampleur de cette crise. J'en viens directement aux conséquences sur le financement de l'économie française : le rapport en met deux en évidence. La première concerne la mise en place accélérée de nouvelles règles prudentielles et la seconde la réduction des capacités d'intervention de l'Etat. La crise a touché les offreurs de financement, malgré les mesures prises par la puissance publique : prêts, prises de participation, octroi de garanties. Ils doivent désormais se conformer à des normes prudentielles renforcées, pour mieux assurer la stabilité du système financier. II s'agit de Bâle Ill pour les banques et de Solvabilité ll pour les assureurs. Même si la pleine application de ces normes n'est prévue que pour 2019, leurs effets sont anticipés par

Face à la crise, l'État est intervenu pour rétablir le bon fonctionnement du système bancaire par un plan de soutien, sous la forme essentiellement de prêts et de prises de participation minoritaires dans le capital des banques. Pour soutenir l'économie, un plan de relance a été mis en place par l'État, à hauteur de 34 milliards Didier Migaud d’euros.

les marches et les normes comptables, ce qui les érige, dès aujourd'hui, en standards de fait. Leur impact sur les banques françaises est d'autant plus important que celles-ci disposent structurellement de moins de liquidités que celles de certains autres pays. En effet, elles ne disposent pas de l'essentiel de l'épargne réglementée et les disponibilités des administrations publiques sont obligatoirement déposées auprès du Trésor public. Certains demandeurs de financement, en particulier ceux qui ne peuvent recourir à des financements non bancaires, sont donc de ce fait exposés à des tensions spécifiques et vraisemblablement durables : les PME indépendantes, les entreprises exportatrices en devises, les porteurs de projets d'infrastructures et les collectivités territoriales font face à un renchérissement du coût du crédit, à un durcissement des conditions d'octroi et à un raccourcissement des durées de prêt. Il est peu vraisemblable que les banques reprennent à terme une activité de financement comparable à celle des années 2000. La crise marque l'émergence d'une « nouvelle donne », dont l'État doit tirer les conséquences.

La crise a par ailleurs fait éclater au grand jour les problèmes préexistants de Dexia, dont une grande partie reste à régler. Cette situation met en cause le financement des collectivités territoriales qui repose à 97 % sur les banques et notamment à hauteur d'un tiers sur Dexia. Divers projets sont sur la table. Cependant, il sera inévitable qu'une part du financement ne soit plus assurée par les banques mais directement par les marchés ou auprès des épargnants, en tout cas pour les grandes collectivités. La seconde conséquence de la crise concerne l'État lui-même. Face à la crise, il est intervenu pour rétablir le bon fonctionnement du système bancaire par un plan de soutien, sous la forme essentiellement de prêts et de prises de participation minoritaires dans le capital des banques. Pour soutenir l'économie, un plan de relance a été mis en place par l'État, à hauteur de 34 milliards d’euros. A posteriori, les mesures prises présentent un bilan contrasté par rapport à leur coût : elles ont dégradé le déficit public de 1,1 % pour un effet stimulant sur la croissance d'un demi-point de PIB. L'accumulation de déficits publics nouveaux, à partir d'une situation structurellement dégradée, a accru le niveau d'endettement. Désormais, le niveau de la dette publique, que j'ai analysé devant vous il y a peu, en présentant le rapport de la Cour sur les finances publiques, est devenu un handicap pour le financement de l'économie française, notamment par l'instabilité qu'il fait peser sur les conditions à terme de son propre financement, et, par voie de conséquence, sur le financement d'ensemble de l'économie française. Cela montre qu'il n'est pas de bonne politique de financement de l'économie sans bonne politique des finances publiques. Vous le constatez, les évolutions intervenues depuis la crise n'ont pas toutes un caractère temporaire. La nécessité du désendettement, la mise en place de normes prudentielles plus dures, un moindre accès à des sources de financement venues du reste du monde constituent des évolutions durables. Elles invitent l'État à ne pas chercher à obtenir le rétablissement des conditions de fonctionnement antérieures du modèle traditionnel de financement de l'économie. Le troisième message de la Cour porte sur les leviers d'action dont dispose l'État pour intervenir dans le financement de l'économie. Les instruments de l'État sont nombreux: subventions accordées aux ménages, aux entreprises et aux collectivités territoriales ; dépenses fiscales ; prises de participation dans le capital d'entreprises ; prêts ; garantes ; cofinancements avec des investisseurs privés ; action via le secteur public financier et au premier chef via la Caisse des dépôts et consignations, auxquels s'ajoutent des instruments réglementaires ou prudentiels, grâce notamment aux autorités de supervision. Les montants financiers que ces instruments mettent en jeu, leurs modalités d'action sur l'économie française, les agents économiques qu'ils sont à même d'influencer, l'importance de l'effet de levier qu'ils autorisent, les risques auxquels ils exposent la puissance publique, la maîtrise que celle-ci possède de leur orientation et de leur pilotage sont très variables. Le rapport les resitue les uns par rapport aux autres, et met en perspective leurs évolutions.

Agenda

22ÈME JURIS’CUP RÉGATES ET COLLOQUES

La recherche d’une résolution efficace des litiges 13 au 16 septembre 2012 Maison de l’Avocat 51, rue Pierre Grignan 13006 MARSEILLE Renseignements : 04 91 54 07 85 www.juriscup.com

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51ÈME CONGRÈS NATIONAL DES EXPERTS-COMPTABLES

Du chiffre à la lettre : l’expert-comptable de justice et la sincérité de l’information financière 20 et 21 septembre 2012 Centre des Congrès Pierre Baudis 11, esplanade Compans-Caffarelli 31000 TOULOUSE Renseignements : 01 44 90 30 00 www.notaires.fr

2012-591

FORMATION PIDA - ICC

Arbitrage commercial international 24 au 27 septembre 2012 Chambre de Commerce Internationale 38, Cours Albert 1er 75008 PARIS Renseignements : 01 49 53 28 91 events@iccwbo.org

2012-592

TABLES RONDES ET DÉBATS

L’arbitrage institutionnel rénové 20 septembre 2012 CCIP 27, rue Friedland - 75008 PARIS Renseignements : 01 44 95 11 40 brenaudat@cmap.fr

2012-593

108ÈME CONGRÈS DES NOTAIRES DE FRANCE

La transmission 23 au 26 septembre 2012 Le Corum 34000 MONTPELLIER Renseignements : 01 44 90 30 00 www.notaires.fr

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Vie du chiffre Malgré cette diversité, les investigations menées par la Cour convergent vers une conclusion unique : quels que soient leurs points forts ou leurs faiblesses, tous les leviers d'action de l'État dans le financement de l'économie rencontrent aujourd'hui, à divers égards, parce qu'ils ont été tour à tour fortement sollicités, des limites qui ne peuvent être ignorées. D'un montant relativement stable en longue période (0,75 point de PIB), le versement d'aides à l'investissement a vu ses modalités profondément évoluer. Alors que l'État versait, il y a dix ans, une part importante des aides à l'investissement touchées par les ménages et les entreprises, il a progressivement réorienté ses versements vers les opérateurs et les collectivités territoriales, perdant ainsi la maîtrise des dispositifs d'aides directes à l'investissement, même s'il conserve encore indirectement une capacité à influencer leurs modalités. Ecartelé entre ses ambitions industrielles et les réalités de sa situation financière, l'État actionnaire a fortement ralenti le flux de ses opérations tant en termes de cessions que d'acquisitions. Pour agir, il a souvent été amené à recourir à divers expédients: non-libération de capital, co-financements avec la Caisse des dépôts ou des investisseurs étrangers, recours à des dotations budgétaires financées par l'endettement. Pour abonder ses recettes, il a maintenu une exigence forte de dividendes, 56% en moyenne, plus forte encore que celle de d'actionnaires privés, 50% pour la moyenne des entreprises du CAC40, ce qui a pesé sur

des risques, notamment en octroyant plus largement sa garantie. Plus généralement, la crise a vu le montant des engagements hors-bilan de l'État fortement augmenter, notamment sous l'effet de la progression considérable des encours de dette garantie (124 milliards d’euros en 2011), c'està-dire des engagements pris par l'État de se substituer à des emprunteurs publics ou privés qui viendraient à être défaillants. Or, bien qu'elle ne s'accompagne pas d'une sortie de ressources budgétaires (à court terme tout le moins), la dette garantie n'est pas sans impact sur les finances publiques. Elle influence notamment la perception qu'ont les investisseurs extérieurs de la solvabilité de notre pays. Alors même qu'elle est de plus en plus mobilisée par les développements de la crise des dettes souveraines (FESF, MES) et que les divers plans de restructuration de Dexia ont consommé une part importante des marges de manœuvre disponibles, la dette garantie ne peut plus être autant utilisée qu'autrefois. De même, le secteur public financier a été fortement mis à contribution : la Caisse des dépôts et consignations, le Fonds d'épargne, Oséo mais aussi le Fonds stratégique d'investissement ou La Banque Postale ont beaucoup fait pour faciliter les conditions de financement de l'économie française, que ce soit en accordant des prêts aux collectivités territoriales, en préservant la trésorerie des entreprises ou en soutenant la liquidité d'autres établissements financiers.

L'accroissement des interventions à opérer et la raréfaction des moyens disponibles exigent que l'État et le secteur public financier gagnent en efficacité, en gouvernance mais aussi en Didier Migaud maîtrise des risques à tous niveaux.

l'autofinancement et l'investissement des grandes entreprises publiques. Après avoir doublé en 5 ans pour atteindre environ 20 milliards d’euros par an, les dépenses fiscales en faveur de l'autofinancement des entreprises et de l'épargne financière ou immobilière des ménages font désormais face au butoir des déficits publics. Leur progression n'est plus soutenable, d'autant que, s'apparentant à des dépenses de guichet évaluatives, non encadrées par les lois de finances, elles ne présentent pas les mêmes garanties de maîtrise et de suivi que les crédits budgétaires, alors même que, souvent trop peu ciblées, leur efficacité globale s'avère discutable. Après avoir fait l'objet d'un usage intense, mais malheureusement pas toujours suffisamment maîtrisé, comme la Cour a eu l'occasion de le souligner, le recours au cofinancement s'essouffle. Dans le contexte actuel, marqué par la réduction de l'horizon temporel des investisseurs, les contrats de partenariats ou « partenariats public-privé » ne présentent plus la même attractivité pour le secteur privé. La puissance publique est en conséquence amenée à verser des loyers de plus en plus importants à ses partenaires et à porter une part plus grande

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Toutefois, ce recours intense au secteur public financier n'a pas systématiquement été accompagné d'un pilotage stratégique adéquat. La Caisse des dépôts elle-même n'a pas remis jour son plan stratégique depuis 2007, donc depuis la crise. CNP Assurances, dépendante de la collecte de l'assurance vie et des résultats de sa filiale brésilienne présente des fragilités. La gouvernance de la Caisse des dépôts s'est renforcée sur certains points mais elle continue de présenter des marges d'améliorations, de même que celle du Fonds stratégique d'investissement. Nombre d'entités du secteur public financier manquent de fonds propres eu égards aux risques qu'elles portent désormais, parfois à cause même de l'Etat qui, impécunieux, prélève une part trop grande de leur résultat pour leur permettre de constituer les réserves nécessaires. Par ailleurs, la cohérence des dispositifs publics s'avère, à bien des égards, insuffisante, si bien que leur lisibilité auprès de ceux qui recherchent des financements, demeure limitée. En définitive, alors même que le financement de l'économie française connait de longue date des fragilités importantes et que les effets de la crise financière en bouleversent profondément

l'équilibre, l'Etat se trouve, et c'est là un paradoxe cruel, partiellement privé des moyens qui lui permettraient d'accompagner les évolutions en cours. Certes ce décalage entre l'ampleur des adaptations à conduire et la faiblesse des moyens dont dispose la puissance publique est préoccupant. II ne peut, et ne doit, toutefois, pas faire obstacle à l'action. Des marges de manœuvres existent qu'il convient d'exploiter résolument afin de soutenir les conditions de financement de l'économie et, in fine, de favoriser la croissance. Si j'achevais ici mon propos, vous pourriez en retirer une impression d'ensemble pessimiste. Je veux ce matin au contraire vous montrer et c'est mon quatrième message - que, même si ses marges de manœuvre sont plus faibles qu'elles ne l'auraient été autrefois, l'Etat conserve des moyens d'agir pour améliorer les conditions de financement de l'économie française. II peut, par exemple, redéployer les dépenses fiscales en faveur du financement de l'investissement productif. Le secteur financier public, en particulier le groupe Caisse des dépôts, dispose encore de marges de manœuvre, dès lors que sa stratégie serait mieux établie, sa gouvernance affermie et la maitrise de ses risques assurée. L'Etat doit, dans un environnement économique, financier et réglementaire qui demeure très instable, mettre en place une stratégie d'ensemble. Je voudrais vous présenter brièvement quels pourraient en être les principaux objectifs. En premier lieu, asseoir le financement de l'économie sur une épargne financière de long terme. La révision du cadre prudentiel applicable aux établissements financiers, en particulier les nouveaux ratios de liquidité dont la mise en œuvre est attendue à partir de 2015, combinée l'impact de la crise financière, risque de les contraindre à réduire la durée des prêts qu'ils distribuent. Maintenir l'accès à des financements de long terme pour financer à la fois des projets d'infrastructures, les investissements des collectivités territoriales et des entreprises, ainsi que l'innovation constitue donc un premier objectif. Nous formulons deux recommandations principales dans ce cadre : orienter l'épargne financière des ménages vers le long terme, en particulier dans le cadre de l'assurance-vie, et mieux utiliser les ressources du Fonds d'épargne qui s'élevaient à 222,5 milliards d’euros fin 2011. Le second objectif de la stratégie de l'État devrait être d'accompagner les PME et les collectivités territoriales. Des tensions spécifiques existent ou pourraient apparaître s'agissant de leur financement Les PME et les collectivités territoriales seront conduites à rechercher une diversification de leurs sources de financement. Cette évolution pourrait passer par les financements de marché, même si cela ne peut concerner qu'une partie limitée de leurs besoins. Ce recours accru au marché implique, de la part des pouvoirs publics, la mise en place d'un cadre réglementaire et d'une supervision appropriés. Accroître les interventions financières publiques peut paraître, à court terme, une solution permettant de résoudre les difficultés de financement de certains acteurs économiques.

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Vie du chiffre QUELQUES CHIFFRES

L’Etat emprunteur et financeur

Ce serait, en réalité, de peu d'effet sur le moyen terme, compte tenu à la fois de l'origine des problèmes, des difficultés de l'État et des masses financières en cause. L'action de l'État et de la sphère financière publique doit demeurer ciblée sur les défaillances de marché avérées afin de ne pas accroître encore les risques financiers qu'ils supportent et de ne pas favoriser une déresponsabilisation des acteurs privés. En tout état de cause, l'État ne peut se substituer au système financier; ce qu'il doit établir, ce sont les conditions permettant à ce dernier de jouer efficacement son rôle. Dans ce contexte, et s'agissant des entreprises, nous formulons des recommandations pour améliorer leurs conditions de financement par un redéploiement de leur fiscalité, pour faciliter le financement en fonds propres des entreprises en phase de création et de premiers développements, et pour favoriser l'accès des PME aux financements de marché. Enfin, la mise en œuvre efficace de cette stratégie d'ensemble implique de renforcer le pilotage par l'État et la maîtrise des risques. L'accroissement des interventions à opérer et la raréfaction des moyens disponibles exigent que l'État et le secteur public financier gagnent en efficacité, en gouvernance mais aussi en maîtrise des risques à tous niveaux. Cela passe par un renforcement du pilotage exercé par l'État, une adaptation de la Caisse des dépôts et consignation à la nouvelle donne et un renforcement des pratiques et moyens de la surveillance aux risques financiers actuels. Les constats effectués au fil du rapport sont, implicitement, autant de recommandations, mais il explicite 23 recommandations. Je vous en cite brièvement quelques-unes: élaborer un nouveau plan stratégique de la Caisse des dépôts, moduler les taux des prêts du Fonds d'épargne aux organismes du logement social en fonction des tensions dans l'offre de logement, réserver l'action publique

dans le domaine de l'immobilier, hors logement social, aux zones qui connaissent une pénurie de logements, éviter que la responsabilité financière de l'État puisse être engagée par la création éventuelle d'une agence de financement des collectivités territoriales, nous réitérons aussi les recommandations que nous avions formulées en janvier sur l'assurance-vie. Je ne vais pas pouvoir détailler chacune d'entre elles. Je vais me concentrer sur celles qui sont les plus saillantes ou les plus actuelles. En effet, des réformes sont envisagées par le gouvernement, dont certaines d'entre elles concernent directement le financement de l'économie: j'ai en tête le doublement du plafond du livret A et du livret de développement durable et le projet de mise en place d'une banque publique d'investissement. Les modalités précises de mise en œuvre de ces réformes restent à déterminer. L'Etat, dans les choix qu'il opèrera, devra veiller aux conséquences de ses décisions sur les différents produits et acteurs financiers concernés en raison des multiples interconnexions qui existent entre eux. Dans ce contexte, la Cour entend jouer son rôle de conseil du gouvernement, en éclairant les implications des réformes envisagées et les précautions dont leur mise en œuvre doit s'entourer. En ce qui concerne, en premier lieu, le doublement du plafond du livret A et du livret de développement durable, cette mesure présente des avantages. Elle confèrerait des possibilités d'intervention rapide aux pouvoirs publics en augmentant les ressources centralisées au Fonds d'épargne, clans un contexte °Ça existe une forte pénurie de logements sociaux dans certaines zones, d'une part, et où le cadre prudentiel applicable aux établissements financiers risque de pénaliser les financements de long terme, d'autre part. Néanmoins, cette mesure peut avoir d'autres conséquences. Elle pourrait entrainer des

transferts depuis l'assurance-vie, dans un contexte où il est nécessaire d'encourager l'épargne longue. En effet, le taux de rémunération du livret A et du LDD est aujourd'hui plus favorable que le taux de rendement après fiscalité d'autres produits d'épargne, notamment parce qu'ils ne sont soumis ni à prélèvement social, ni à prélèvement fiscal. Cette mesure pourrait donc également se traduire par des mouvements à partir des livrets bancaires fiscalisés, alors que le système bancaire français se caractérise déjà par un déséquilibre entre l'encours des prêts et les dépôts collectés. En augmentant les ressources centralisées au Fonds d'épargne, elle impliquerait un renforcement de ses fonds propres dans un contexte où ceux-ci sont déjà insuffisants. Elle provoquerait également une augmentation du niveau de la garantie accordée par l'Etat au Fonds d'épargne au titre des sommes déposées par les épargnants sur les livrets d'épargne réglementée. Cette réforme intervient dans un contexte cat le Fonds d'épargne dispose, aujourd'hui du moins, d'une liquidité abondante : le surplus de liquidité de ce Fonds serait de l'ordre de 52 Md€. Enfin, seuls 9 % des livrets A atteignant le plafond. Ce relèvement du plafond du livret A et de celui du livret de développement durable ne profiterait pas, ou seulement indirectement clans la mesure où les sommes centralisées au Fonds d'épargne sont employées en priorité au financement du logement social, aux catégories les moins aisées de la population. Les recommandations que nous formulons sont donc les suivantes : - en premier lieu, soumettre aux prélèvements sociaux tous les revenus tirés dépôts pour leur partie supérieure aux plafonds actuels afin d'éviter de renforcer une niche sociale bénéficiant aux ménages les plus aisés et maintenir une hiérarchie des rémunérations entre épargne courte et épargne longue ; - en second lieu, répartir sur plusieurs années le relèvement du plafond afin d'éviter de déstabiliser le marché de l'assurance vie et d'accentuer le besoin de liquidité des banques françaises; - en troisième lieu, viser une allocation optimale des ressources du Fonds d'épargne. Les difficultés que pourraient rencontrer les PME à se financer ont conduit le gouvernement prévoir la mise en place d'une banque publique d'investissement. Je souhaite attirer l'attention sur les précautions dont devrait s'entourer la mise en place de cette réforme. Pour être utiles, les ressources de cette banque devront être ciblées sur les défaillances de marché avérées. Nous identifions, à cet égard, un enjeu important : faciliter le financement en fonds propres des entreprises en phase de création et de premiers développements, en particulier les entreprises innovantes, qui rencontrent aujourd'hui des difficultés pour lever les capitaux nécessaires à leur développement. Concernant l'organisation de la future Banque publique d'investissement, l'existence de nombreux canaux de financement des entreprises (Oséo, Fonds stratégique d'investissement, CDC Entreprises, etc.) intervenant sur des segments souvent très proches, voire identiques, soulève, à l'évidence, la question de leur rationalisation. Si elle est

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Vie du chiffre QUELQUES CHIFFRES

Actifs et passifs financiers fin 2010

nécessaire, celle-ci doit s'entourer de précautions. En particulier, le métier d'investisseur en fonds propres, pour lequel la Caisse des dépôts et consignations est aujourd'hui chef de file, et celui de prêteur, rôle que joue l'actuel groupe Oséo, sont distincts. Ils doivent le rester afin d'éviter les conflits d'intérêt (qui se manifesteraient par exemple si un même intervenant était simultanément actionnaire et créancier d'une même entreprise). Par ailleurs, un schéma qui regrouperait l'ensemble des dispositifs au sein de la Caisse, en plaçant un établissement bancaire, Oséo, au sein de cette dernière, ne sera possible que si elle dispose de fonds propres suffisants. Or, elle risque de devoir en mobiliser une part importante dans le cadre de la restructuration de Dexia. En tout état de cause, nous recommandons de procéder à la rationalisation de chacun des

métiers de financement des entreprises au sein du groupe Caisse des dépôts et d'Oséo. A cet égard, les relations entre le Fonds stratégique d'investissement et CDC Entreprises doivent être clarifiées afin de garantir une plus grande coopération entre ces deux entés. Il convient, par ailleurs, d'améliorer, en région, la lisibilité des dispositifs vis-à-vis des entreprises. S'il paraît difficile de créer un guichet unique qui délivrerait toutes les interventions (participations au capital, prêts, etc.), il est, en revanche, nécessaire de créer un point d'entrée unique. La formule la plus adaptée aux réalités actuelles peut être un portail Internet commun. Le gouvernement envisage une réforme fiscale. Dans ce contexte, afin d'améliorer la capacité des entreprises à se financer en fonds propres et de soutenir davantage les PME, la Cour

En conclusion, ce rapport permet une analyse d'ensemble d'un sujet complexe, au carrefour des disciplines économique, financière, comptable, fiscale et administrative. Cette vue large montre les limites de leviers d'action de l'État, mais met en évidence d'autres modalités d'action qui permettent de répondre à des besoins manifestes de financement du tissu productif, de l'innovation, ainsi que des collectivités locales. Ce rapport ouvre donc des possibilités pour contribuer au relèvement de la croissance potentielle de notre pays. Cette action suppose des précautions sur lesquelles j'ai déjà insisté. En assurant le désendettement du secteur public, la constitution d'une épargne longue et orientée davantage vers le financement du secteur productif, en facilitant le refinancement des banques et leur stabilité, en favorisant l'autofinancement des PME et des collectivités et en leur ouvrant des possibilités nouvelles de financement non bancaire, l'Etat peut apporter une contribution déterminante à la mise en place d'un cycle vertueux d'investissement productif et de stimulation de la croissance. L'importance de ces enjeux collectifs mérite l'attention de tous les citoyens, que ce soit en tant que contribuables, qu'épargnants, qu'entrepreneurs ou qu'investisseurs.

Synthèse du rapport public thématique

temps, à contourner la contrainte budgétaire en utilisant activement des leviers d'action extrabudgétaires. Ses marges de manœuvre de plus en plus faibles l'ont conduit à faire davantage appel au secteur financier public, en particulier au groupe Caisse des dépôts et consignations, mais l'action de ce dernier rencontre à divers égards des limites. Depuis le déclenchement de la crise financière, et plus encore aujourd'hui, l'action de l'Etat s'inscrit dans un contexte de profonde mutation des conditions de financement de l'économie. En premier lieu, la crise des dettes souveraines se traduit par un fort mouvement de renationalisation des marchés de capitaux: des investisseurs, du moins dans les circonstances actuelles, se replient sur leur marché national, ce qui pourrait réduire la possibilité dont a

largement usé l'économie française, ces dernières années, de recourir à des financements externes à taux réduit. En second lieu, le système bancaire français ne pourra, dans les prochaines années, contribuer au financement de l'économie dans les mêmes conditions qu'avant la crise financière. Celle-ci a entraîné un resserrement des conditions de financement des banques que les nouvelles règles prudentielles en matière de liquidité devraient accentuer. A court terme, les interventions exceptionnelles de la Banque Centrale Européenne contribuent à soutenir la liquidité du secteur financier mais elles sont présentées, à ce stade, comme temporaires. Or le besoin de liquidité du secteur financier est une réalité plus durable. Certes, l'économie française bénéficie d'un taux d'épargne des

epuis le début des années 2000, et plus encore depuis le début de la crise financière, les pouvoirs publics ont accru leurs interventions en faveur du financement de l'économie. L'Etat a eu recours à des instruments divers, parfois nouveaux. Ils ont été mobilisés de manière croissante, pour agir en faveur du financement des entreprises, et notamment des PME, comme de celui des collectivités territoriales. Ils se sont ajoutés à des dispositifs destinés à favoriser et orienter l'épargne des ménages. Limité par son déficit budgétaire et par le niveau de sa dette, l'Etat a cherché, dans un premier

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recommande de plafonner la déductibilité des intérêts d'emprunts, qui crée aujourd'hui un biais en faveur du financement par dette plutôt que par fonds propres. Un tel plafonnement permettrait, par les économies réalisées, la mise en place de mesures fiscales favorables aux PME, qu'il s'agisse du taux ou de l'assiette de l'impôt sur les sociétés, ou de l'allègement des charges qui pèsent sur les facteurs de production. Enfin, s'agissant du financement des Collectivités Territoriales, un axe majeur est de renforcer l'autofinancement de l'investissement. Les efforts de maîtrise de la dépense locale devront être favorisés par la rationalisation des compétences des différents niveaux de Collectivités Territoriales, y compris dans les interventions en faveur du développement économique. A cet égard, la réforme des lois de décentralisation annoncée par le gouvernement devrait intégrer un objectif explicite de recherche de l'efficience de l'organisation territoriale.

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Vie du chiffre ménages élevé et demeure attractive pour les capitaux étrangers. Cependant, elle connaissait avant la crise des fragilités structurelles et des déséquilibres globaux. Le recours croissant aux capitaux extérieurs pour financer la dette publique, s'il permet d'éviter les effets d'éviction, fragilise l'Etat et l'ensemble du financement de l'économie. La compétitivité dégradée des entreprises pèse sur leurs marges. Leur faible autofinancement les contraint structurellement à rechercher des financements externes, essentiellement auprès

des premières responsabilités de l'Etat est de favoriser la sortie progressive de la logique d'endettement dans laquelle se trouve aujourd'hui la France. L'économie du pays est globalement trop endettée, la dette publique et privée ayant progressé de 150% à 210% du PIB entre 2000 et 2011. Cette hausse s'est double, dans la période récente, d'une dégradation de sa position financière nette vis-à-vis du reste du monde, qui atteignait, fin 2010, 233 millions d’euros, soit environ 12% du PIB. Dans le même temps, l'économie allemande présentait un

Face à une « économie d'endettement » qui a atteint ses limites, la réflexion de l'Etat doit s'orienter vers la mise en place des fondements d'une « économie de fonds propres », et pour ce qui concerne plus particulièrement la sphère publique, d'autofinancement. Cette évolution ne peut intervenir sans que Didier Migaud soient maîtrisées les finances publiques. des banques. Leur investissement se trouve ainsi influencé par les conditions des marchés financiers, plaçant de fait l'économie réelle française dans la dépendance de la sphère financière. Dans le même temps, l'épargne des ménages s'oriente vers l'immobilier ou, du fait de l'intermédiation de sa gestion, vers l'étranger. Elle ne bénéficie plus autant aux entreprises résidentes. La fiscalité pérennise et aggrave certaines de ces fragilités. Dans ce contexte, accroître les interventions financières publiques peut paraître, à court terme, une solution permettant de résoudre les difficultés de financement de certaines catégories d'acteurs économiques, comme les entreprises ou les collectivités territoriales. Ce serait, en réalité, vain sur le moyen terme. Pour assurer une allocation efficace des flux financiers, l'Etat doit mettre en place une stratégie d'ensemble. L'une

solde excédentaire de 518 millions d’euros. Face à une « économie d'endettement » qui a atteint ses limites, la réflexion de l'Etat doit s'orienter vers la mise en place des fondements d'une « économie de fonds propres », et pour ce qui concerne plus particulièrement la sphère publique, d'autofinancement. Cette évolution ne peut intervenir sans que soient maîtrisées les finances publiques. Alors même que les règles prudentielles l'avantagent par rapport aux autres emprunteurs, l'Etat doit éviter de prélever une part excessive des ressources disponibles pour la canaliser vers les besoins de la sphère publique. II doit s'efforcer d'allouer les flux financiers vers les besoins de financement de long terme des différents acteurs de l'économie. Il n'est pas de bonne politique de financement de l'économie sans bonne politique des finances publiques. Face aux évolutions que connait

PASSATION DE POUVOIR - 27 JUILLET 2012

Gilles Johanet succède à Jean-François Bénard

illes Johanet, conseiller maître, a été nommé Procureur général près la Cour des comptes en Conseil des ministres du 18 juillet 2012. Il succède à Jean-François Bénard, qui est parti à la retraite le 27 juillet 2012.

G

Le Procureur général près la Cour des comptes dirige le Parquet général. Gardien des procédures et de la jurisprudence, le Parquet général est chargé de veiller à l’exécution des lois, d’éclairer la Cour de ses avis, de l’aider à mettre en oeuvre ses décisions. Il veille également au bon exercice du ministère public près les chambres régionales et territoriales des comptes, confié aux procureurs financiers qu’il choisit. Ancien élève de l’ENA (1977, promotion André Malraux), conseiller maître à la Cour des comptes, Gilles Johanet était, jusqu’à sa nomination en tant que Procureur général près la Cour des comptes, président du comité économique des produits de santé depuis février 2011. Il a été directeur de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (1998-2002), délégué du

président des Assurances générales de France AGF (2003-2006) puis directeur général adjoint des Assurances générales de France (2006-2009). Il est chevalier de l’Ordre National du Mérite et Officier du Mérite Maritime. Source : Communiqué de la Cour des Comptes du 18 juillet 2012

Jean-François Bénard Photo © Jean-René Tancrède

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Gilles Johanet

l'environnement financier international, l'Etat doit rester attentif à ce que le système bancaire français continue d'exercer son rôle d'intermédiation et de transformation des flux d'épargne. Il lui appartiendra, en lien avec la Banque de France et l'Autorité de contrôle prudentiel, de demeurer vigilant sur le sujet de la liquidité des banques françaises afin qu'il n'ait aucun impact systémique. Dans le même temps, l'Etat doit également réorienter l'épargne vers le long terme, dans un contexte où le cadre prudentiel applicable aux établissements financiers risque de les contraindre à réduire la durée des prêts qu'ils distribuent. Un réaménagement des mécanismes d'incitation financière est nécessaire, dans le cadre notamment de l'assurance-vie, afin de répondre aux besoins du cycle de vie des ménages et de soutenir l'investissement de long terme des entreprises et des collectivités territoriales. Il implique, pour être efficace, de maintenir une hiérarchie des rémunérations entre les livrets d'épargne réglementée, qui représentent une épargne liquide de court terme, et l'épargne longue. De même, l'encouragement à une épargne financière longue doit conduire à reconsidérer, hors logement social et zones de forte pénurie de logement, les incitations publiques résiduelles dont bénéficie l'immobilier. Les ressources dégagées devraient être redéployées en faveur du financement de l'investissement productif. L'Etat doit, enfin, assumer pleinement ses responsabilités de régulateur et de superviseur. Le recours accru aux marchés financiers par des acteurs (PME, collectivités territoriales) qui avaient l'habitude de se reposer principalement sur le financement par crédits bancaires, impliquera une vigilance particulière. Les orientations de cette stratégie

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Vie du chiffre d'ensemble sont décisives afin d'assurer une allocation efficace des flux financiers et contribuer au redressement du potentiel de croissance de l'économie française. En dépendent la possibilité de financer des besoins collectifs clés tels les projets d'infrastructures, le développement des PME et des entreprises de taille intermédiaire ou l'investissement des collectivités territoriales. Pour mettre en œuvre efficacement cette stratégie d'ensemble, plusieurs conditions sont nécessaires. L'accroissement des interventions à opérer et la raréfaction des moyens disponibles exigent que I 'Etat et le secteur public financier gagnent en efficacité, gouvernance mais aussi maîtrise des risques à tous niveaux. L'Etat doit être capable de mieux connaître les évolutions en cours et de mettre en œuvre les régulations nécessaires; il doit pouvoir s'adapter, avec une grande réactivité, à des évolutions désormais parfois brusques. Il doit se mettre en mesure à la fois de lutter contre le surinvestissement et d'orienter les ressources vers les poches de sous-

investissement critiques telles que les infrastructures et l'innovation afin de soutenir le potentiel de croissance de l'économie. Le groupe Caisse des dépôts, de son coté, doit également mieux définir sa stratégie, identifier ses priorités et renforcer sa gouvernance. Compte tenu des faibles marges de manœuvre dont dispose l'Etat et des nombreux engagements que porte déjà la sphère financière publique, et en particulier le groupe Caisse des dépôts, l'action de l'Etat en faveur du financement de certaines catégories d'acteurs économiques doit aujourd'hui être cantonnée aux défaillances de marché caractérisées et peu susceptibles d'être réglées à bref délai par d'autres moyens. Certaines voies sont inopérantes dans les conditions actuelles, comme la recherche, à grande échelle, de partenariats public-privé ou l'apport de la garantie de l'Etat a une « agence » de financement des collectivités territoriales. Elles doivent donc être, momentanément du moins, écartées. L'Etat n'en conserve pas moins des moyens d'agir, par exemple en réduisant la

dépense fiscale et en la ciblant mieux vers l'investissement productif. Le secteur financier public dispose également encore de marges de manœuvre. Le groupe Caisse des dépôts est et sera conduit à jouer un rôle majeur dans le contexte actuel, même s'il ne saurait à lui seul satisfaire l'ensemble des besoins. Enfin, pour être efficace, cette stratégie d'ensemble doit être lisible pour les entreprises. En particulier, les dispositifs de financement mis en place doivent leur être facilement accessibles, notamment pour les PME. Au-delà de ses effets sur l'activité du pays, le financement de l'économie représente un enjeu collectif pour ensemble de la communauté nationale. Il intéresse tous les citoyens, que ce soit en tant que contribuables, qu'épargnants, qu'entrepreneurs ou qu'investisseurs. Par bien des aspects, il concerne en outre les générations futures et engage le rapport de notre société à l’avenir. II appartient à l'Etat de faire émerger, à l'échelle nationale, une prise de conscience de ces enjeux.

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Direct

Premier Ministre ean-Marc Ayrault, Premier Ministre, prend acte de la décision du Conseil constitutionnel rendue le 9 août 2012, qui vient de déclarer que le traité sur la coordination, la stabilité et la gouvernance, signé à Bruxelles le 2 mars 2012, ne comportait aucune clause contraire à la Constitution. Il engage immédiatement la préparation du projet de loi autorisant la ratification du traité et du projet de loi organique qui seront présentés au Parlement. Le Premier ministre a également pris connaissance de la décision du Conseil Constitutionnel relative à la loi de finances rectificative pour 2012 qui déclare conforme à la Constitution l’essentiel de ses dispositions. Il se félicite de cette décision, qui valide la première étape du redressement dans la justice des comptes publics, garantissant le respect par notre pays de ses objectifs en matière de réduction du déficit, et mettant en œuvre les engagements pris par le Président de la République devant les Français. Conformément à l’engagement du Président de la République, le Gouvernement adoptera sans délai les mesures réglementaires permettant de confirmer la baisse de 30% de la rémunération du Président de la République, du Premier ministre et des membres du Gouvernement depuis leur prise de fonctions.

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Source : Communiqué du 9 août 2012

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Ministère de la Justice hristiane Taubira, Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a abordé, comme elle l’a déjà fait à plusieurs reprises, notamment lors de son intervention devant la commission des lois de l’Assemblée Nationale le 5 juillet 2012, la mise en oeuvre de l’engagement du président de la République de doubler le nombre de centres éducatifs fermés (CEF). Elle a porté le débat sur la manière de réaliser ces CEF en démontrant l’incohérence de l’ancienne majorité, qui avait transformé des foyers ouverts en centres « fermés ». Elle rappelle qu’elle a choisi l'addition, en créant des CEF en plus des centres ouverts, et non la substitution (des centres ouverts hâtivement transformés en CEF). La transformation des structures existantes (foyers en milieu ouvert) en CEF serait contreproductive par l’affaiblissement du nombre de places et la réduction de la palette éducative nécessaire. La ministre a d’ores et déjà lancé une mission d’inspection pour expertiser l’outil et prévoir des CEF adaptés aux besoins. En 2012, quatre CEF seront ouverts. Dans le cadre du budget triennal à venir les nouveaux CEF seront ouverts par « création ».

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Source : Communiqué du 7 août 2012

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Chronique

Capter une clientèle en ligne par l’utilisation de mots clés

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Une conception libérale d’inspiration communautaire par Aurélie Dantzikian-Frachon

Aurélie Dantzikian-Frachon logs, sites, forums… autant de possibilités de contenus illicites diffusés sur internet. Toutefois, à l’exception des contentieux relatifs à la contrefaçon sur internet, le rapport entre le nombre de ces pages et le nombre de contentieux en découlant est plutôt faible. Plus récemment, le contentieux en ce domaine s’est orienté sur la question de l’usage de la marque comme mot clé dans les moteurs de recherche. Au niveau français, et en dehors du cadre spécifique d’internet, l'article L. 713-6 du Code de la Propriété Intellectuelle permet à un opérateur d’utiliser une marque enregistrée par un autre comme référence nécessaire pour indiquer la destination d’un produit dès lors qu’il n’y a aucune confusion quant à l’origine de ce produit. Dans ce cadre, les titulaires de droits sur des marques comme les professionnels du référencement ont pu s’interroger sur le point de savoir si l’usage de la marque d’autrui comme mot clé afin de permettre aux internautes d’identifier des sites promouvant et/ou commercialisant des produits revêtus de cette marque était ou non légal. Il a tout d’abord été jugé au niveau communautaire que toute reproduction ou tout usage de la marque d'autrui par un lien hypertexte, dans le cadre de la vie des affaires (CJCE, 12 nov. 2002, Arsenal Football Club), était susceptible d'être condamné sur le terrain de la contrefaçon, s'il n'avait pas été autorisé par voie contractuelle. Il en résultait une position assez restrictive. Puis, l’arrêt « Interflora » du 22 septembre 2011 (CJUE, 22 sept. 2011.) a apporté un net tempérament à cette autorisation contractuelle préalable à l’usage de la marque en tant que mot

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clé. En effet, cet arrêt est venu affirmer la liberté d’utilisation de mots clés reprenant une marque déposée pour autant que cet usage ne porte pas atteinte à une fonction essentielle de la marque, étant rappelé qu’il y a atteinte à la fonction d’indication d’origine de la marque lorsque l’internaute ne peut pas aisément savoir si les produits revêtus de la marque proviennent de son titulaire, d’une entreprise liée économiquement ou d’un tiers. C’est ensuite au juge national d’apprécier au cas par cas le degré de confusion de l’internaute quant à son éventuelle méprise sur l’origine des produits portant ou non atteinte à la fonction essentielle de la marque, ce que le juge français n’a pas manqué de faire. Dans un arrêt rendu le 27 mars 2012, le Tribunal de Grande Instance de Paris s’est ainsi prononcé sur l’usage d’une marque comme mot clé dans le cadre de ventes en ligne et sur ses conséquences au niveau du droit des marques et du droit de la concurrence. En l’espèce, une société commercialisait des produits sous une marque déposée dont elle était titulaire. Sans lui demander son accord, l’un de ses concurrents a ensuite réservé des termes identiques à la marque pour l’utiliser à titre de mot clé dans le cadre d’un moteur de recherche afin de générer un lien commercial par la saisie de ce mot clé dans le formulaire de requête du moteur de recherche, permettant l’accès au site du concurrent. Concernant l’action en contrefaçon de marque par le titulaire de cette marque, le Tribunal la rejette pour cause de déchéance, considérant que la marque n’était pas utilisée par son titulaire pour identifier les produits qu’il vendait. Pour autant, le Tribunal profite de cette affaire pour se prononcer sur la réservation de marques comme mots clé pour le référencement des produits sur internet, notamment quant à son caractère ou non déloyal, en appliquant le raisonnement posé dans l’arrêt Interflora susvisé. Le Tribunal reprend ainsi à son compte la position de principe de la CJUE en constatant de manière très factuelle que « la présentation des liens commerciaux à droite de l'écran de l'ordinateur pour ce qui est du cas d'espèce ou au-dessus des résultats naturels, sous la bannière «liens commerciaux», permet aux internautes moyennement attentifs et normalement avertis de distinguer les annonces publicitaires des résultats naturels de sorte que le seul emploi de la dénomination sociale comme mot clé ne suffit pas à démontrer un acte de concurrence déloyale. » En outre, afin d’écarter le risque de confusion, il poursuit en considérant que les termes employés dans l’annonce étaient génériques, le

slogan publicitaire était banal, les termes utilisés étaient neutres, et enfin que le texte de l’annonce était suivi immédiatement de l’adresse du site internet de la société concurrente de sorte que l’internaute comprenait parfaitement qu’en cliquant sur le lien il n’arriverait pas sur le site du titulaire de la marque. Via ce faisceau d’indices, le Tribunal en conclut que l’internaute était en mesure d’établir l’identité du vendeur à partir du lien commercial qui apparaît clairement soit au-dessus des résultats naturels, soit, comme c’est le cas dans cet arrêt, comme une annonce publicitaire. Au vu de cette position, en ligne avec la jurisprudence communautaire, il convient donc pour une société qui utilise la marque d’un tiers comme mot clé pour référencer son site de commercialisation des produits régulièrement acquis, de veiller au respect des critères mis en avant dans les décisions susvisées, et ce afin de ne pas tomber sous le coup d’une action en contrefaçon et/en concurrence déloyale. De leurs côtés, les titulaires de marque doivent se montrer particulièrement vigilants quant à l’utilisation qui est faite de leurs marques comme mot clé sur internet en appréciant de manière très concrète les atteintes susceptibles d’être considérées comme contrefaisantes et/ou déloyales. Enfin, s’agîssant du rôle des moteurs de recherche, il est intéressant de constater que la Cour de Cassation, dans un arrêt du 12 juillet 2012, vient récemment d’affirmer que les outils de suggestion au moyen de mots clés doivent être en mesure de participer à la protection des droits de propriété intellectuelle sur internet. Il était ainsi reproché à la fonctionnalité Google Suggestions de suggérer systématiquement d’associer, à la saisie de requêtes, des mots clés relatifs à des sites dont le contenu était contrefaisant. En considérant que la suggestion de mots clés ne conduit pas nécessairement l’internaute à se rendre sur des sites aux contenus illégaux mais qu’il appartient à celui qui les suggère (en l’espèce, le moteur de recherche) de contribuer à la suppression de pratiques illégales « en rendant plus difficile la recherche des sites litigieux, sans pour autant qu’il y ait lieu d’en attendre une efficacité totale », la Cour de Cassation vient renforcer le rôle desdits moteurs de recherche, et ce en autorisant les mesures ordonnant la suppression des termes qu’ils suggéraient. Face à une technologie en constante (r)évolution, la règlementation doit s’adapter progressivement afin de tenter de concilier les droits des uns et les libertés des autres : un défi permanent pour tous les acteurs des nouvelles technologies ! 2012-589

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