Edition du jeudi 5 septembre 2013

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LES ANNONCES DE LA SEINE Jeudi 5 septembre 2013 - Numéro 51 - 1,15 Euro - 94e année

Conférence inter-Barreaux, Nîmes, 7 juin 2013 VIE

DU DROIT

L’avocat des femmes victimes de violences - Accompagner et protéger les femmes victimes par Karline Gaborit ............. - Zoom sur la directive européenne du 25 octobre 2012 ................................ - Le rôle décisif de l’Union européenne par Franck Proust ............................... - L’étude du phénomène à l’échelle départementale par Hugues Bousiges ... - Eliminer les discriminations faites aux femmes par Catherine Husson-Trochain ...........................................................................

Evolution législative renforçant la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes

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Les Entretiens du Barreau de Versailles par Michelle Liccioni .........................

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AGENDA

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Réforme pénale par Jean-Marc Ayrault .................................................... 28 .......................................................................................................

ANNONCES

LÉGALES ..................................................................... 10

ADJUDICATION

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- Cour d’Appel de Paris .................................................................................... - Tribunal de Grande Instance de Paris .......................................................... - Cour d’Appel de Versailles ............................................................................ - Tribunal de Grande Instance de Versailles .................................................

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INSTALLATION

SOCIÉTÉ

Université d’été du MEDEF - Bâtir un nouveau dynamisme économique pour notre pays ..................... - Faire gagner ensemble la France par Pierre Gattaz ...............................................................................................

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ENTRETIEN avec Christiane Féral-Schuhl ................................... 29

epuis la conférence de lancement du projet « L’avocat des femmes victimes de violences » le 7 mars 2011 à Montpellier les avocats des barreaux de Montpellier, Perpignan, Clermont-Ferrand, Avignon, (France), Figueras, Girone, Palma, Barcelone (Espagne), Viterbo (Italie), Timisoara (Roumanie) et les avocats de Nîmes se sont réunis et ont travaillé pendant deux ans pour atteindre des objectifs ambitieux puisqu’il ne s’agissait pas moins, outre l’examen des systèmes législatifs respectifs, de constituer à titre expérimental des plateformes d’assistance pluridisciplinaires, de renforcer leur compétence professionnelle par une formation interprofessionnelle, élaborer un guide à destination du grand public et des professionnels tout en disséminant sans relâche l’information sur la problématique des violences faites aux femmes. En ce sens, le projet devait répondre à six grands objectifs : prévention, sensibilisation, accueil et protection des victimes, dissémination, mesures répressives et autres. « Nous partions de loin » tant les quatre législations examinées étaient différentes : la loi espagnole (loi Rey 2004) proposant un modèle radical, contrairement à la loi italienne, de loin la plus modérée, quant aux lois françaises et roumaines, elles viennent d’adopter l’ordonnance de protection. Cependant, dès les premières rencontres interbarreaux, le constat sur la problématique de fond

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s’est avéré identique au delà les frontières et s’est notamment traduit par : ● une protection insuffisante de la femme victime (à l’exception de l’Espagne). ● un isolement de l’avocat trop souvent en marge des protocoles et des partenariats locaux existants. ● une méconnaissance de l’ampleur du phénomène faute d’observatoire national (sauf pour l’Espagne) et/ou européen. Le 7 juin, à Nîmes, était organisée, avec le soutien financier du programme Criminal Justice Commission européenne, Direction générale Justice, Liberté et Sécurité, la conférence de clôture de ce projet qui met en oeuvre une stratégie nouvelle de protection de la femme. Tous les avocats, qui ont participé à ce programme, ont profondément changé leur perception des violences conjugales et ont appris à travailler avec d’autres professionnels pour renforcer l’efficacité du soutien qu’ils pouvaient apporter aux femmes victimes. Espérons que ces initiatives se multiplient pour inciter les femmes à sortir du silence, les convaincre qu’elles ne sont pas seules et qu’il y a une issue au cycle de la violence. Un jour, le combat contre les violences faites aux femmes cessera, par l’évolution des comportements individuels et des relations humaines, dès que l’on admettra que, dans l’humanité, la femme est l’égale moitié de l’homme… Karline Gaborit, Coordinatrice Générale Bernard Delran, Chef de Projet

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : as@annoncesdelaseine.fr FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE

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“L’avocat des femmes victimes de violences”


LES ANNONCES DE LA SEINE

Vie du droit

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Accompagner et protéger les femmes victimes

Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05

par Karline Gaborit a directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité et remplaçant la décision–cadre 2001/220/JAI du Conseil de l’Europe, consacre de nombreuses dispositions aux femmes victimes de violences, considérées à juste titre comme une catégorie de victimes nécessitant une attention et un traitement particulier, par l’établissement de normes minimales communes à tous les Etats européens. C’est avec beaucoup de satisfaction que nous avons pris connaissance de ce texte qui rejoint toutes les préconisations de nos commissions de travail, qui, au terme d’un an et demi d’échanges constataient qu’au-delà d’une nécessaire harmonisation des dispositifs législatifs, le véritable enjeu se situe davantage sur le terrain : ● Par une meilleure connaissance de ce fléau grâce à la mise en place d’outils de mesure statistiques communs permettant la comparaison, ● Par un accompagnement pluridisciplinaire des femmes victimes et la formation préalable de tous

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Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède Comité de rédaction : Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Agnès Bricard, Présidente de la Fédération des Femmes Administrateurs Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Magistrat honoraire Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Chloé Grenadou, Juriste d’entreprise Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président Honoraire de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président d’Honneur du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International Publicité : Légale et judiciaire : Commerciale :

les professionnels susceptibles d’intervenir intégrant l’approche psychologique, médicale, juridique et le travail de réseau (les avocats ayant, de facto, pour les femmes victimes, un rôle de référent), ● Par des actions d’information, de communication, de sensibilisation laissées à l’initiative gouvernementale, mais également par des initiatives ciblées auprès des femmes et des enfants pour contribuer à long terme au changement des mentalités. Ce sont très exactement les objectifs de cette directive que nous avons anticipés, en l’appliquant à la problématique des violences conjugales, champ plus limité que les violences faites aux femmes.

Karline Gaborit

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Siège social : 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS R.C.S. PARIS B 339 349 888 Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr e-mail : as@annoncesdelaseine.fr

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 13 373 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

Zoom sur la directive européenne du 25 octobre 2012

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Les principes phares de cette directive, qui devra être transposée d’ici le 16 novembre 2015, sont :

Copyright 2013 Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Sauf dans les cas où elle est autorisée expressément par la loi et les conventions internationales, toute reproduction, totale ou partielle du présent numéro est interdite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal.

Une définition large des violences faites aux femmes Violence de genre : « la violence dirigée contre une personne en raison de son sexe, de son identité ou expression de genre ou la violence qui touche de manière disproportionnée les personnes d’un sexe en particulier est considérée comme de la violence fondée sur le genre. Il peut en résulter une atteinte à l’intégrité physique, sexuelle, émotionnelle ou psychologique de la victime ou une perte matérielle pour celle-ci.

Le journal “Les Annonces de la Seine” a été désigné comme publicateur officiel pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, par arrêtés de Messieurs les Préfets : de Paris, du 27 décembre 2012 ; des Yvelines, du 31 décembre 2012 ; des Hauts-deSeine, du 31 décembre 2012 ; de la Seine-Saint-Denis, du 27 décembre 2012 ; du Val-de-Marne, du 27 décembre 2012 ; de toutes annonces judiciaires et légales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procédure Civile et de Procédure Pénale et de Commerce et les Lois spéciales pour la publicité et la validité des actes de procédure ou des contrats et des décisions de justice pour les départements de Paris, des Yvelines, de la SeineSaint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine. N.B. : L’administration décline toute responsabilité quant à la teneur des annonces légales. - Tarifs hors taxes des publicités à la ligne A) Légales : Paris : 5,48 € Seine-Saint-Denis : 5,48 € Yvelines : 5,23 € Hauts-de-Seine : 5,48 € Val-de-Marne : 5,48 € B) Avis divers : 9,75 € C) Avis financiers : 10,85 € D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,82 € Hauts-de-Seine : 3,82 € Seine-Saint Denis : 3,82 € Yvelines : 5,23 € Val-de-Marne : 3,82 € - Vente au numéro : 1,15 € - Abonnement annuel : 15 € simple 35 € avec suppléments culturels 95 € avec suppléments judiciaires et culturels

La violence fondée sur le genre s’entend comme une forme de discrimination et une violation des libertés fondamentales de la victime et comprend les violences domestiques, les violences sexuelles (y compris le viol, l’agression sexuelle et le harcèlement sexuel), la traite des êtres humains, l’esclave ainsi que différentes formes de pratiques préjudiciables telles que les mariages forcés, les mutilations génitales féminines et les soi-disant « crimes d’honneur ». (§17) Violence domestique : « Lorsque les violences sont des violences domestiques, elles sont le fait d’une personne qui est l’actuel ou l’ancien conjoint ou partenaire de la victime ou un autre membre de sa famille, que l’auteur vive ou ait vécu en ménage avec la victime ou non. Cette violence pourrait être de nature physique, sexuelle, psychologique ou économique et pourrait causer une atteinte à

COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES NORMES TYPOGRAPHIQUES

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas

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Le droit à l’information et à l’accompagnement des victimes Renforcement de l’information et des conseils qui doivent être délivrés à la victime dans un « langage simple et accessible » (§21), et droit à l’information sur le cours de la procédure à tout moment et sur la situation de l’auteur en cas de «risque identifié de préjudice pour la victime» (§32). «Les services d’aide spécialisés devraient reposer sur une approche intégrée et ciblée qui prenne notamment en compte les besoins spécifiques des victimes, la gravité du préjudice subi (…) ainsi que la relation entre les victimes, les auteurs de l’infraction, les enfants et leur environnement social plus large. Une des principales tâches de ces services qui jouent un rôle important dans le soutien qu’ils apportent aux victimes pour qu’elles se rétablissent et surmontent l’éventuel préjudice ou traumatisme subi du fait de l’infraction pénale…dans un environnement qui les soutient et les traite avec dignité respect et tact. Les types de soutien que ces services d’aide spécialisés devraient proposer pourraient comprendre la mise à disposition d’un refuge et d’un hébergement sûr, d’une assistance médicale immédiate, l’orientation vers des examens médicaux et médico-légaux afin de rassembler des éléments de preuve en cas de viol ou d’agression sexuelle, l’assistance psychologique à court et long terme, les soins en traumatologie, les conseils juridiques, les services d’un avocat et les services spécifi ques de soutien aux enfants, victimes directes ou indirectes. » (§38) Rappel de la place de la victime dans les dispositifs de traitement des auteurs «Les services de justice réparatrice tel que la médiation entre la victime et l’auteur de l’infraction, la conférence en groupe familial et les cercles de détermination de la peine, peuvent être très

Vers un véritable observatoire européen des violences conjugales «La collecte systématique et appropriée des données statistiques est considérée comme un élément essentiel de l’efficacité du processus d’élaboration des politiques dans le domaine des droits énoncés dans la présente directive. Les Etats membres devraient communiquer les données utiles concernant les victimes, le nombre et le type des infractions dénoncées et leur âge et leur sexe. Les données statistiques utiles des données enregistrées par les autorités judiciaires et par les services répressifs, ainsi que, dans la mesure du possible, des données administratives recueillies par les services de soins de santé et de protection sociale et par les organisations publiques et non gouvernementales d’aide aux victimes ou les services de justice réparatrice et d’autres organisations venant en aide aux victimes de la criminalité ». (§64) La formation des praticiens «Les Etats membres veillent à ce que les fonctionnaires susceptibles d’entrer en contact avec la victime, par exemple les agents de la police et de la gendarmerie et le personnel des tribunaux, reçoivent une formation générale et spécialisée, d’un niveau adapté aux contacts qu’ils sont amenés à avoir avec les victimes, afin de les sensibiliser davantage aux besoins de celles-ci et leur permettre de traiter les victimes avec impartialité, respect et professionnalisme. Dans le respect de l’indépendance de la profession juridique, les Etats membres recommandent aux responsables de la formation des avocats de proposer une formation générale et spécialisée, afin de sensibiliser davantage les avocats aux besoins des victimes». (Ch. 5 – art 25). C’est le point d’orgue de cette directive qui tire les conséquences de l’analyse de la problématique des violences conjugales : elles ne doivent pas être traitées comme de simples violences et n’appellent pas

seulement une réponse judiciaire, mais au contraire un traitement d’ensemble dans la compréhension, l’accueil, la protection et la reconstruction de la femme victime pour lequel une réponse efficace passe par la formation pluridisciplinaire de tous les professionnels susceptibles d’intervenir dans le processus d’aide.

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La mise en œuvre d’une protection renforcée et spécifique «Les femmes victimes de violences fondées sur le genre et leurs enfants requièrent souvent un soutien et une protection spécifiques en raison du risque élevé de victimisation secondaire et répétée, d’intimidations et de représailles liés à cette violence» (§17). Les femmes victimes de violence doivent recevoir « un soutien et une protection juridique spécialisés » (§ 38). Le rappel préalable du respect de la présomption d’innocence dans toute procédure provisoire concernant l’auteur présumé de l’infraction (§12). Préconisation chère à nos commissions qui ont préalablement travaillé sur la présomption d’innocence en matière pénale (programme EUROMED AVOCATS 2009/2012), il ne s’agit pas tout à fait d’un voeu pieux, mais d’un équilibre difficile à trouver en cette matière où tout repose sur la parole de la femme, confrontée au manque de preuve, à la réticence de l’entourage. Nos Confrères espagnols sont les seuls à pouvoir reprocher à leur système le caractère systématique des mesures d’éloignement des conjoints auteurs de violence, sur simple dénonciation de la victime.

profitables à la victime mais nécessitent la mise en place de garanties pour éviter qu’elle ne subisse une victimisation secondaire et répétée, des intimidations et des représailles» (§36). Cette disposition recouvre toute une série de mesures visant à éviter les contacts répétés avec l’auteur (exemple dans les tribunaux), la réitération inutile des déclarations de la victime, la protection de sa vie privée avec dissimulation possible de son domicile, l’évaluation personnalisée de caractéristiques personnels de la victime pour mesurer le risque. (§53 à 58). Au moment où les initiatives se multiplient (notamment des parquets en France) afin d’éviter la récidive en traitant les auteurs pour contribuer à l’éradication du phénomène à long terme, la Directive rappelle que ces dispositifs ne doivent pas aboutir à reléguer la victime au second rang, alors que l’alternative à une sanction pénale proposée par ces traitements pourrait aboutir à nier la qualité même de victime à la femme qui a osé dénoncer les violences, et qu’elles ne doivent pas la mettre en danger, ni pendant la procédure, ni surtout après. Les avocats du programme s’accordent sur la nécessité de réserver ces traitements alternatifs aux cas lesmoins graves ou aux hypothèses dans lesquelles la victime elle-même manifeste une réelle volonté de reprendre la vie commune avec l’auteur des violences. Dans ces hypothèses, un temps et un accompagnement spécifique doivent être accordés à la victime, parallèlement et simultanément au traitement proposé à l’auteur.

Le rôle décisif de l’Union européenne par Franck Proust Député européen 'est avec un intérêt tout particulier que j'ouvre ces rencontres en tant que Député européen. Dans ce propos introductif, j'aimerais répondre à une question: en quoi l'Europe est-elle décisive dans la lutte contre les violences faites aux femmes ? Nous le savons : l'Europe s'est construite sur la base du droit, mais surtout sur un projet de paix. Or, l'égalité entre les hommes et les femmes est un droit fondamental de notre Union, incontournable pour préserver notre paix sociale. Et le nier, c'est le bafouer. C'est pour cela que l'Europe lutte corps et âmes en faveur de l'égalité entre les hommes et femmes et contre les discriminations qui y sont liées. La lutte contre les violences faites aux femmes constitue, par conséquent, l'un des piliers de cette politique. Ce n'est pas un secret que de dire cela : j'en veux pour preuve la raison qui nous réunit ici aujourd'hui ! Je tiens d'ailleurs à saluer le travail qui a été effectué par le projet « L'avocat des femmes victimes de violences » en si peu de temps, et qui se clôture par ce colloque et la remise d'un guide pratique pour les victimes et les professionnels. Ce projet synthétise ce qui caractérise la réussite des projets européens : le volontarisme, le professionnalisme, le pragmatisme et la coopération. A l'origine, ce projet a vu le jour grâce au soutien inconditionnel de l'Europe. Et c'est sur cela que je veux insister.

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Aujourd'hui, en Europe, on estime qu'environ une femme sur quatre a été ou sera victime de violences physiques Franck Proust à l'âge adulte. Franck Proust

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l’intégrité physique ou mentale, une souffrance morale ou une perte matérielle. La violence domestique est un problème social grave et souvent dissimulé qui pourrait provoquer un traumatisme psychologique et physique systématique aux lourdes conséquences dans la mesure où l’auteur de l’infraction est une personne en qui la victime devrait pouvoir avoir confiance. » (§18)

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combien notre lutte ne peut souffrir d'aucun répit. Mais nous devons nous garder de simplement scander haut et fort de belles intentions, sans rien y mettre de concret derrière. Je veux dire par là qu'il faut traduire nos belles promesses en acte. Il faut mettre les moyens au service de cet objectif, et ne pas nous laisser dicter notre volonté par des cadres parfois trop rigides. L'Espagne a fait mouche en 2005, avec l'instauration d'une loi de lutte contre la violence de genre. En France, depuis l'an 2000, et plus particulièrement de 2004 à 2012, nous nous sommes dotés d'un éventail législatif qui constitue notre cadre actuel. L'une des plus grandes avancées demeure l'ordonnance de protection des victimes, instaurée en 2010. Désormais, toute femme en situation de dangers pourra bénéficier de mesures de protection, dans des délais très courts. Lutter contre la violence de genre, c'est un travail de longue haleine, qui requiert une étroite collaboration entre le préventif et le répressif, mais aussi entre les pouvoirs publics et les associations, seules à même d'accompagner aux changements sur le terrain. Mais toutes les avancées concrètes demeurent du monopole des Etats. Alors certains s'interrogent : n'est-ce pas maintenant à l'Europe de devenir décisive et incontournable, avec un cadre juridique contraignant et ambitieux ? C'est possible, mais il faut que les Etats membres lui en donnent les moyens. Car n'oublions pas la question que nous devons toujours nous poser : « et si la honte changeait de camp, cette fois? ». (1) Le 3ème volet de Daphné (2007-2013) finance le projet « l'avocat des femmes victime de violence ». (2) Progress : programme pour la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes.

L’étude du phénomène à l’échelle départementale par Hugues Bousiges Préfet du Gard

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e me réjouis de participer à cette importante conférence de clôture du projet « L'avocat des femmes victimes de violence ». En l'espace d'un an, portée par un ministère de plein exercice, la question des droits des femmes est devenue une politique publique à part entière. Vous le savez, franchir la porte d'un commissariat ou d'une gendarmerie est un premier pas décisif vers la fin du cycle infernal des violences conjugales. Les réponses qui sont alors données permettent - ou non - de trouver la force de mettre un terme à cette situation. Il est donc très important de les optimiser : c'est ce que le Gouvernement cherche à faire avec la formation des professionnels, l'amélioration de l'accueil et de l'accompagnement ou encore le développement de la présence d'assistants sociaux dans les commissariats et les gendarmeries. Le Premier ministre, accompagnée de la Ministre des Droits des Femmes, s'est rendu le 23 mai dernier à Evreux à la rencontre des acteurs de terrain réunis sur le thème des violences faites aux femmes. Il a été réaffirmé, en cette circonstance, que le dépôt de plainte, évidemment suivi de

l'action des procureurs, devait être la règle. Lorsqu'il n'y a pas de plainte déposée - cela arrive fréquemment - la main courante ne doit plus être synonyme de bouteille jetée à la mer. Cela sera inscrit dans une prochaine circulaire conjointe signée par les ministres de la justice et de l'intérieur: désormais, les mains courantes devront être systématiquement traitées, un rendez-vous avec un travailleur social donné, une ordonnance de protection éventuellement délivrée étendue de 4 à 6 mois. Il ne faut pas abandonner à leur sort les femmes qui ont tiré la sonnette d'alarme. Ce qui importe par-dessus tout est de faire en sorte que les dispositifs de protection expérimentés ça et là, dès lors qu'ils ont fait leur preuve, soient généralisés le plus rapidement possible. Ce sera le cas au 1er janvier 2014 pour le téléphone portable d'alerte, élément du dispositif « Femmes en très grand danger ». Il est en effet insupportable qu'une femme victime de violences ne puisse bénéficier d'une protection égale selon le département où elle habite. La mission interministérielle pour la protection des femmes est à l'œuvre depuis le mois de janvier : elle nous aide à concevoir l'ensemble des dispositifs de prévention, de protection mais aussi de suivi des auteurs qui figureront dans le projet de loi sur les droits des femmes qui sera présenté au parlement au mois de septembre 2013. La gravité et le nombre des violences faites aux femmes est impressionnant et insupportable: ● Au moins une fois par an une femme sur dix est victime de violences, ● 400 000 femmes ont subi des violences conjugales en deux ans (commises par le conjoint ou l'ex-conjoint), ● Une femme sur sept a été insultée au cours des deux dernières années. Dans plus de la moitié des cas, les injures utilisées sont à caractère sexiste, ● Une plainte n'est déposée qu'une fois sur dix. Les victimes sont souvent des femmes jeunes et de milieu modeste. Ces violences sont parfois irréparables : 122 femmes sont mortes en 2011 sous les coups de leur compagnon ou ex-compagnon. Et il convient de préciser que la première cause de passage à l'acte est la non-acceptation de la séparation.

Hugues Bousiges

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Tirons d'abord un constat: aujourd'hui, en Europe, on estime qu'environ 1 femme sur 4 a été ou sera victime de violences physiques à l'âge adulte. Ce chiffre est effarant ! On assiste aussi à une nouvelle forme de violence physique : la violence de rues. Et on parle, encore trop peu, de la violence sexuelle, notamment sur les mineurs (excision). Mais évoquer cela n'est pas suffisant. Aux violences physiques, celles qui se voient, nous devons y associer celles qui existent mais ne se voient pas, la violence psychologique et le harcèlement. Encore plus difficile à discerner, à identifier, elle mure les victimes dans un silence quasi-absolu. C'est un fait de société, qui transcende tous les pays. Et par conséquent, toute l'Europe. Nous l'avons, à maintes reprises, rappelé dans nos rapports et résolutions, et nous avons même créé une commission parlementaire spécialement chargée de veiller aux droits de la femme et à l'égalité des genres. Ne nous le cachons pas : toutes les sociétés ne sont pas égales face à la violence de genres. Ses causes en sont d'ailleurs tout aussi diverses (pauvretés, éducation), comme son ampleur (foyer, entourage proche, extérieur). Mais l'urgence et l'universalité du phénomène a poussé l'Union européenne à agir. L'Europe a été décisive, et le Parlement européen à l'avant-garde. D'abord, sur le volet répressif. C'est le résultat le plus palpable. Le 25 octobre 2012 est entrée en vigueur la directive visant à délivrer un minimum de droits communs à tous les Européens victimes d'actes criminels. Les Etats ont jusqu'en novembre 2015 pour la transposer dans leur législation. C'est un bond avant décisif, car les actes de violence n'ont malheureusement, parfois, aucune frontière. Et si on rajoute à cela la coopération policière et judiciaire de plus en plus réelle, on obtient un arsenal européen de lutte contre les violences faites aux femmes. Mais c'est sur le volet de la prévention et de la sensibilisation que l'Union européenne se distingue par dessus tout. Grâce aux différents programmes de cofinancement, comme «Daphné » créé en 1997, que vous connaissez bien(1), ou dans une moindre mesure « Progress »(2), mais aussi aux missions de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes, l'Europe a forgé un réseau gouvernemental et non-gouvernemental, à tous les niveaux (local, régional, national et européen) qui constitue aujourd'hui un réseau de relais de poids dans la lutte contre les discriminations et la violence de genres. Et ça fonctionne ! Par exemple, la Suède a été l'un des premiers pays à faire appel au programme Daphné. Et quelques mois après, les résultats étaient là : 40 % de la population avait été sensibilisée par la campagne nationale cofinancée par Daphné, et 80 % des femmes savaient qu'elles pouvaient faire appel à des foyers d'écoute et d'accueil en cas de problèmes. Je vous parle d'Europe, mais je tiens aussi à évoquer les autres organisations internationales qui ne sont pas en reste. D'abord, le Conseil de l'Europe s'est saisi depuis très longtemps de la question de la violence de genre et a mené un grand nombre d'études qui nous servent aujourd'hui de référence. Et au niveau onusien, les initiatives pour instaurer : ● la journée internationale de la femme, le 8 mars, ● mais surtout la journée internationale pour l'élimination de la violence faite aux femmes, le 25 novembre. Ces journées témoignent à elles seules que ce combat intéresse la terre entière. Les événements récents et très médiatisés en Inde nous rappellent

les violences sont parfois irréparables : 122 femmes sont mortes en 2011 sous les coups de leur compagnon Hugues Bousiges ou ex-compagnon

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Vie du droit Ce phénomène n'épargne pas le Gard. En 2011, deux femmes sont mortes victimes de la violence de leur conjoint ou ex conjoint. Depuis trois ans, les chiffres de la police et de la gendarmerie sont en augmentation : + 41 % pour la police, + 21 % pour la gendarmerie. Les plaintes liées à des agressions sexuelles sont en hausse de67%. Mais le département n'est pas resté inactif face à ce constat et dispose de réponses et d'outils opérationnels parfois novateurs. Dans un cadre législatif renforcé depuis 2006, des partenaires institutionnels et associatifs de proximité accueillent, écoutent, orientent et accompagnent l'ensemble des victimes qui se présentent. Depuis 2004, le Gard dispose d'un pôle de prévention et de prise en charge porté par le Centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) qui permet d'apporter une réponse concrète à la lutte contre la récidive. Depuis 2007, des travailleurs sociaux en police et en gendarmerie ont été recrutés pour atteindre depuis le 1er décembre dernier le nombre de quatre. Ces agents examinent et traitent toutes les affaires portées à la connaissance des forces de l'ordre qui relèvent de la sphère du champ social. Un récent bilan tiré par mes services a révélé que six affaires sur dix traitées ne sont pas connues des services de droit commun. Depuis 2009, un référent départemental «violences» a été créé et a accompagné 122 femmes. Un système de permanences téléphoniques : le 3919, assuré par l'association La Clède a été mis en place à Alès auquel s'ajoute un dispositif d'accueil d' urgence en nuitée d'hôtel avec des transports en taxi porté par le CIDFF et la Croix-Rouge (115). Enfin depuis décembre dernier, ont été crées un accueil de jour avec une implantation à Alès géré par l'association La Clède et à Nîmes, en lien avec le CHRS, Les Glycines ont été inaugurées. Ces lieux mettent en synergie des professionnels spécialisés (juristes, conseillers conjugal et familial, psychologues du CIDFF), consultés selon les besoins formulés par les victimes et qui permettent aux femmes de préparer un départ ou une séparation

dans un contexte sécurisé pour elle et leurs enfants. Beaucoup de ces actions reçoivent le soutien financier du fonds interministériel de prévention de la délinquance. Cette année, 107.803 € ont été mobilisés sur ce thème, soit presque le tiers de l'enveloppe départementale du Fonds interministériel de la prévention de la délinquance (FIRD). Les plaintes enregistrées en augmentation notable sont-elles le résultat d'une augmentation des violences ou de la mise en place de ces dispositifs qui rassurent les victimes ? Quoi qu'il en soit et malgré ce qui a été fait, des marges de progrès sont possibles et nous devons nous y consacrer. Il s'agit de : ● renforcer la communication et l'information des victimes sur leurs droits et les outils qu'elles ont à leur disposition, ● former plus régulièrement les professionnels et les acteurs à l'accueil et à l'accompagnement de ces femmes, ● renforcer la protection des femmes notamment dans la gestion du processus, de la séparation, ● étendre, approfondir et coordonner le réseau des professionnels et des acteurs. C'est pourquoi, le 28 mai dernier, j'ai réuni les membres de la commission de « Lutte contre les violences faites aux femmes» institué au sein du Conseil départemental de prévention de la délinquance. Il s'agissait de lancer les travaux d'élaboration d'un schéma départemental d'organisation définissant les conditions d'intervention des acteurs, notamment d'échange d'informations entre la police et la gendarmerie, les services hospitaliers, le parquet, les juridictions et les services sociaux. Cette volonté d'élaborer, dès à présent, ce schéma qui s'inscrit dans le troisième plan des droits des femmes issu du Comité interministériel du 30novembre 2012, témoigne de ma détermination de lutter contre toutes les formes de violence faites aux femmes. Je sais que des initiatives comme la vôtre participent de ce combat et contribuent à la dignité et au respect de la femme.

Éliminer les discriminations faites aux femmes par Catherine Husson-Trochain Première présidente de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, co-présidente du Conseil scientifique

e 7 mars 2011 à Montpellier étaient lancé officiellement les travaux du programme « L’avocat des femmes victimes de violences ». Ce programme aura simplement duré trente mois. Ce délai a été en soi un véritable challenge car le projet était ambitieux notamment en raison de la nécessaire recherche de données statistiques véritablement fiables et comparables et des voies d’investigation utiles pour réunir les informations et ainsi atteindre les objectifs escomptés définis dans le cahier des charges. Je les rappelle brièvement.

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Les travaux doivent comprendre : Une action d’information interne aux barreaux

Catherine Husson-Trochain

Zoom sur les législations en France, en Espagne, en Italie et en Roumanie France En 2003, l’article 222-13-6 du Code Pénal érige un délit spécifique pour les violences commises par le conjoint ou le concubin et prévoit une aggravation systématique de la peine pour toute infraction de violences commises par ce conjoint ou concubin. Par la loi du 4 avril 2006 cette circonstance aggravante vise désormais les anciens conjoints, concubins et partenaire d’un pacs. La loi du 9 juillet 2010 « relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein du couple et aux incidences de ces dernières sur les enfants » a renforcé le dispositif de protection existant en la matière et résulte de cette loi, six points essentiels : l’ordonnance de protection, la création du délit de harcèlement psychologique au sein du couple, la mise en place d’un dispositif de surveillance électronique mobile et la télé protection pour la victime, la circonstance aggravante en cas de mariage forcé, la prise en compte des violences conjugales pour l’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite et d’hébergement, et la protection des femmes victimes de violences en situation d’immigration. Ce dispositif de protection équilibré constitue une réelle avancée, mais l’application de l’ordonnance de protection reste encore insuffisante et réservée aux cas les plus graves, de sorte qu’il apporte une réponse

effet, la protection ne concerne que les femmes. Le système actuel, né de la Loi intégrale, est Espagne jugé trop rigide et interventionniste. Il est En 2004, une Loi Organique fondé sur le présupposé selon lequel les relative aux mesures de victimes de violence machiste sont des protection intégrale des victimes de violences femmes effrayées, faibles et totalement de genre est adoptée. Celle-ci vient mettre en incapables de prendre des décisions par ellesplace un régime spécifique et prévoit la mêmes. C’est donc un concept de création d’un tribunal spécifique pour une femme-victime qui nie son autonomie. infraction spécifique… On constate ainsi une prédominance des Ce dispositif concerne toutes les violences mesures de nature pénale, sans succès. exercées par les hommes sur les femmes au La définition de la violence proposée par cette sein de la relation sentimentale spécifique que loi est trop large puisqu’en pratique peuvent constitue la relation de couple ou la relation être concernés par sa protection par exemple, avec un ancien conjoint ou concubin. les infirmières, les femmes de ménage, etc… La protection de la femme qui porte plainte L’ordre d’éloignement, comme peine, est immédiate : l’auteur des violences est sans s’applique d’office s’il y a une condamnation délai convoqué par la Police qui l’interroge et pour violences conjugales, de sorte que la le renvoie à une audience devant le juge des reprise de la vie commune est impossible violences de genre à l’issue de la garde à vue. même avec la volonté de la femme. Le juge peut prendre une ordonnance de Et en cas de violation de sa part de l’ordre protection immédiate en prenant des mesures de protection, le mari sera condamné pénales (l’ordre d’éloignement qui est pour violation de cet ordre. automatique dès lors que les violences sont Malgré ces critiques qui appellent simplement constatées) et des mesures civiles (pension une adaptation de la loi, ce système constitue alimentaire pour les mineurs, garde des un réel progrès dans la lutte contre les enfants et usage du domicile conjugal violences conjugales. notamment). Même si cette loi est considérée Italie comme une référence pour les autres pays En Italie, en matière de violences son interprétation suscite des controverses. sexuelles le Code Pénal prévoit Une partie des professionnels de la justice considère ce texte comme discriminatoire. En une aggravation des peines. La plainte de la trop partielle face à l’ensemble des situations de violence.

victime est nécessaire pour que le parquet puisse poursuivre l’auteur. La victime peut demander un ordre de protection si elle démontre un préjudice grave pour son intégrité physique ou morale (Loi 2001). Du point de vue législatif il y a eu un renforcement de la protection de la femme, notamment par la loi du 23 février 2009 qui a intégré dans le langage juridique la notion de « harcèlement ».

Roumanie En Roumanie, le législateur a mis en place un dispositif de prévention et de lutte contre les violences au sein de la famille par une loi spéciale en 2003. Cette loi s’applique aux époux, aux concubins et aux fiancés. En 2012, une loi est venue renforcée ce dispositif en intégrant au droit positif l’ordonnance de protection. Désormais une femme victime de violences peut saisir le juge civil afin d’obtenir une protection de manière urgente si elle prouve l’existence d’une situation de risque pour son intégrité physique ou sa liberté. Cette loi de 2012 a défi ni de manière large les violences faites aux femmes en définissant le terme de la violence familiale qui « représente toutes actions physiques ou verbales commises avec intention par un membre de la famille ou par un autre membre de la même famille qui provoque une souffrance physique.

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Vie du droit Mise en œuvre d’une stratégie nouvelle de protection de la femme Objectifs du projet* Destiné à protéger les femmes victimes et les soutenir au cours du processus judiciaire, il s’adresse aux avocats, praticiens du droit en général, et aux organismes responsables de la formation initiale et continue, avec volonté d’intégrer tous les acteurs impliqués, outre les Ordres des avocats et leurs centres de formation. Le projet met en œuvre une stratégie nouvelle de protection de la femme fondée sur une approche pluridisciplinaire en amont (méthode curative) et en aval (accompagnement de la victime jusqu’au procès) en créant une compétence nouvelle pour l’avocat. Sa conception prend, au fur et à mesure, en compte les résultats d’une méthode fondée sur l’échange de connaissances et la confronta tion d’expérience et de savoir faire transnationaux existants. En ce sens, le projet doit répondre à 6 grands objectifs : prévention, sensibilisation, accueil et protection des victimes, dissémination, mesures répressives et autres.

Description du projet Cette durée est divisée en 4 périodes de six mois, chacune correspondant aux objectifs du projet (état des lieux / sensibilisation – stages / expérimentation – module de formation et plateforme

d’assistance / conceptualisation – dissémina tion/diff usion des résultats).

D.R.

Résultats du projet ● une action d’information interne

aux Barreaux associés et participants, qui permettront d’établir des données nationales et comparatives, ● l’organisation de 7 stages et d’auditions de tous intervenants dans le processus Phase 4 : Phase de finalisation et de de protection des femmes victimes de dissémination des résultats : actions violences servira de base à la création éducatives en partenariat avec les d’un module de formation spécialisée, établissements scolaires tests – à destination des avocats, création de la base de données internet – ● les conférences et séminaires, qui ont conférences-séminaires auprès permis de détecter les bonnes pratiques des publics cibles. Six mois. et initiatives pilotes, pour créer un mode Toutes ces phases ont été réalisées et le point de traitement commun pluridisciplinaire d’orgue de la phase de dissémination des du phénomène de violences, résultats aura lieu le 7 juin 2013 pour ● la mise en place d’un réseau de la Conférence de clôture, avec la publication professionnels et l’alimentation d’un site Phase 2 : des stages d’observations en d’un guide destiné aux femmes victimes Internet dédié, France et en Espagne d’un pays à l’autre et aux professionnels. ● la mise en place d’une plateforme permettront de détecter les bonnes d’assistance aux femmes victimes Activités pratiques à retenir dans le cadre de de violences, qui se décline, selon les l’élaboration du dispositif commun de protec Elles se sont déroulées dans les villes Barreaux (Figueras et Nîmes), par des barreaux partenaires et en fonction tion des femmes victimes de violence. une permanence bimensuelle et un des demandes et besoins dans les villes (Etude d’un ou plusieurs dossiers avec un numéro d’appel d’urgence, des partenaires associés. Les travaux ont avocat sur place, ● un programme d’action éduca tive, ● Auditions des responsables du parquet, eu notamment pour cadre les locaux des est initié à destination des établissements des centres d’hébergement d’urgence et ordres, des palais de justice, des maisons scolaires, d’associations de défense de femmes.). de l’Europe et des maisons des professions ● le guide grand public sur le dispositif Six mois. libérales en fonction des opportunités locales. législatifs, les actions régionales et les Phase 3 : Cette partie du programme sera Ce projet d’une durée de 24 mois a débuté démarches à effectuer est diff usée dans les consacrée à la mise en place des instruments le 21 février 2011, a obtenu une prorogation lieux privilégiés de diff usion (ordres, servant à la plate forme d’assistance exceptionnelle de quatre mois et s’achèvera commissariats, municipalités, préfectures, etc). pluridisciplinaire, dont notamment un le 21 juin 2013. * “L’avocat des femmes victimes de violences” Phase 1 : Une première période de six mois ponctuée de réunions de travail afin d’établir les états des lieux et un état comparatif des législations. Cette période est incontournable pour permettre aux participants d’horizons professionnels, de langues et de cultures juridiques différentes de confronter leurs points de vue et rechercher des formes de pratiques communes existantes ou à créer. Pendant cette phase, il sera essentiel de repérer les problématiques différentes en fonction des origines culturelles, religieuses et sociales des femmes victimes.

associés et participants, qui permettront d’établir des données nationales et comparatives, ● L’organisation de conférences et de séminaires permettant de détecter les bonnes pratiques, ● La mise en place d’un réseau de professionnels et l’alimentation d’un site dédié, ● La mise en place d’une plate-forme expérimentale d’assistance aux femmes victimes de violences, ● Un programme d’action éducative initié à destination des établissements scolaires, ● Une brochure grand public sur le dispositif législatif, les actions régionales et les démarches à effectuer, ● L’organisation de stages et d’auditions de tous intervenants dans le processus de protection des femmes victimes de violences permettant la création d’un module de formation. Au cours de ce programme le Conseil scientifique s’est réuni à 5 reprises : à Viterbo, Timisoara, Barcelone, Figueras et encore aujourd’hui à Nîmes.

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protocole de traitement de la violence. Le module de formation professionnelle sera élaboré après auditions de tous les acteurs évoqués (magistrats, médecins, policiers, centres d’hébergement, associations de femmes, etc.) Six mois.

Comme vous le savez, le rôle du Conseil scientifique, organe indépendant et extérieur aux initiateurs de l’action, consiste à évaluer la qualité des travaux par rapport aux objectifs affichés. L’observation sur place et l’examen des documents permettent au Conseil scientifique de mieux appréhender l’état d’avancement des travaux, analyser les difficultés et enfin déterminer si les orientations prises empruntaient la bonne voie. Ainsi, il a été conduit à faire des observations sérieuses lorsque par exemple à Timisoara il a constaté un retard assez important dans la réalisation et la production des études comparées. Il est encore intervenu lorsqu’à Barcelone il a souhaité qu’une demande de prorogation de délai pour terminer le programme soit présentée à la Commission, délai qui sera accepté. Mais tout au long du programme des membres ont aussi assisté aux travaux de quelques réunions interbarreaux dans différents pays notamment en Espagne, en Roumanie ou en Italie. Ils ont pu participer, assister aux conférences et observer le sérieux des réunions en commission ou visiter avec eux un centre d’hébergement pour femmes battues comme à Timisoara. Je vous rassure les membres ont gardé toute leur indépendance comme leur mission l’exige. Proximité ne signifie pas connivence. Le Conseil scientifique a donc porté ponctuellement au cours du programme une attention particulière sur le degré d’atteinte des objectifs par rapport aux engagements pris auprès de la Direction générale Justice, Liberté et Sécurité de la Commission européenne par le demandeur, en l’espèce l’Association Carta EUROPEA, et aussi sur la conformité des actions conduites avec les politiques communautaires. Il s’est aussi assuré que la parité homme / femme dans les travaux ou leur participation aux conférences répondait à cet équilibre voulu par la Commission européenne entre les personnes de sexe différent. A cet égard ces derniers objectifs ont été remplis

très largement. En effet alors qu’il n’était prévu qu’environ 750 participants sur le programme, il y en a eu plus de 1 100 dont 64 % de femmes pour 46 % d’hommes en cela non compris les Conférences de Lancement et de Clôture qui ont rassemblé plus de 200 personnes comme le prouve la nombreuse assistance de ce jour. Je ne vous cacherais pas que le Conseil scientifique a eu des craintes en ce qui concerne le recueil des statistiques des violences faites aux femmes dans la mesure où les pays ne disposaient pas d’outils concordant et fiables et c’est du reste un des enjeux majeurs futurs concernant la collecte des données pour permettre d’évaluer par ailleurs les actions de prévention ou de répression. Il a aussi exprimé une certaine inquiétude relative aux contraintes du programme en ce qui concerne l’exacte définition et traduction des mots dans différentes langues et la comparaison des législations qui d’un pays à l’autre ressemblait à du sable mouvant tant ici ou là elles étaient évolutives sous la pression des gouvernants et surtout de l’Union européenne, vigilante à juste titre de l’application de ses directives ou recommandations. Enfin il a eu des doutes quant à la réalisation d’une plate-forme pluridisciplinaire dans les délais requis et de la production des documents promis. Force est de constater qu’en ce 7 juin 2013 les résultats attendus sont au rendez-vous notamment en ce qui concerne les stages pratiques de grande qualité en droit comparé, le module de formation et le Guide à l’Usage des Victimes et des professionnels pour ne citer que ces deux exemples. En guise de conclusions permettez-moi tout simplement de reprendre ce que j’ai écrit en avantpropos dans le Guide précité qui me semble résumer notre préoccupation commune. « De la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme(DUDH), à la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), du Conseil de l’Europe au Parlement européen depuis de nombreuses années, des définitions des violences

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Vie du droit interfamiliales ont été données, des recommandations approuvées, des résolutions votées, des directives transposées pour lutter dans le monde, dans tous les continents, en Europe contre les violences faites aux femmes, contre les violences conjugales. Dans son rapport en date du 16 septembre 2004, le Conseil de l’Europe soulignait que la violence domestique, à l’encontre des femmes « ne connait ni frontière géographique, ni limite d’âge, ni race, et concerne tout type de relations familiales et tout type de milieu social ». Des instruments juridiques internationaux et nationaux sont votés ; des plans d’action européens ou propres à chaque pays sont lancés ; à cet égard la France a bâti trois plans interministériels depuis 2005 dont le dernier couvrant la période 20112013 s’est donné pour objectif de développer les notions de protection, de prévention et de solidarité. En suite de la Directive 2012/29/UE du Parlement Européen et du Conseil du 25 octobre 2012, par exemple, en France le Comité Interministériel aux droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes, réuni le 30 novembre suivant sous la présidence du premier ministre, constatant que « les violences faites aux femmes sont l'une des premières pathologies de la société et qu’elles doivent être abordées comme telles » a pris un certain nombre de mesures afin « de préparer et de mettre en œuvre un plan global pour les femmes victimes de violences visant à la fois à informer et accompagner les victimes ». Plus récemment encore le 15 mars 2013, à l’issue de la 57e session annuelle de la Commission de l'ONU sur le statut de la femme, Michelle Bachelet, directrice exécutive de ONU Femmes, a pu qualifier la réunion d’« historique », car les 193 Etats membres ont reconnu que les pays doivent « traiter et éradiquer en priorité les violences domestiques », et ont accepté qu’un paragraphe, soulignant qu'« aucune coutume, tradition ou considération religieuse » ne pouvait justifier de telles violences, soit inséré dans le texte finalement adopté. C’est ainsi que le royaume d’Arabie-Saoudite a publié le 29 avril 2013 sa première campagne de publicité contre les violences domestiques. Cette publicité montre une femme portant un hijab laissant voir seulement ses yeux dont l’un est au beurre noir. La photo est accompagnée du slogan : « Certaines choses ne peuvent être couvertes – Combattons ensemble les violences faites aux femmes. » Cependant la prise de conscience est lente nonobstant le fait que depuis 1999, les Nations Unies décidaient de dédier chaque année une journée mondiale à la lutte contre les violences

faites aux femmes - le 25 novembre et qu’à cette occasion une grande campagne d’information est lancée, des slogans faisant prendre conscience au public sont diffusés, des photos chocs sont publiées. Si les instances étatiques sont mobilisées, les associations nationales ou locales permettent une prise en charge des victimes de violences conjugales cependant le travail en réseau est peu développé et la présence de l’avocat en tant que premier contact est souvent absent ou son intervention demeure tardive. Grâce aux travaux initiés par les Barreaux partenaires agissant dans le cadre du programme Daphné, une approche pragmatique et différente a conduit à la rédaction de ce « Guide à usage des victimes et des professionnels » qui a pour objectif de donner localement et simplement pour ceux qui l’utiliseront les éléments essentiels pour réagir ou intervenir d’une manière efficiente et efficace. Les concepts clés à la problématique des violences faites aux femmes sont définis, les typologies énoncées, leur nature différenciée, les conséquences physiques ou psychologiques expliquées, les outils juridiques sont répertoriés. L’analyse des statistiques et de cas sur le terrain a permis de placer la victime de violences au cœur d’une multitude d’interactions commandant une prise en charge globale et pluridisciplinaire qui s’appuie sur des services spécialisés locaux. Cela a mis en évidence l’importance de la coordination à travers la constitution d’une plate-forme lisible et identifiée, d’un réseau ou d’un maillage local de qualité et qualifié. Ainsi le module de formation réalisé dans le cadre du programme VFF vise non seulement à sensibiliser aux enjeux du phénomène de violences faite aux femmes mais aussi il est un véritable outil méthodologique pour les professionnels du droit et plus généralement pour ceux et celles qui se trouveront à un moment donné sur le parcours de prise en charge de la victime de violence. Formons le souhait, comme le titre du guide l’indique qu’il puisse par son approche stratégique globale permettre « d’Agir ensemble pour en finir » des violences faites aux femmes, et que de nombreux avocats adhérents au protocole d’assistance des Femmes victimes que les travaux ont définis. Il me reste juste à vous remercier de votre attention et à remercier Karline Gaborit pour sa pugnacité, sa détermination, pour ses exigences salutaires qui se sont traduites dans vos commissions et réunions et aussi pour son implication sans faille dans son rôle de Coordinatrice Générale et Bernard Delran, citoyen européen et inlassable défenseur du droit européen et pourfendeur des législations qui s’en écartent. 2013-623

Agenda

ASSOCIATION INTERNATIONALE DES JEUNES AVOCATS - AIJA 51ème congrès Du 17 au 21 septembre 2013 Hôtel Hilton Avenue Macacha Guemes 351 BUENOS AIRES - ARGENTINE Renseignements : 01 45 02 38 38 taballea@artuswise.com

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INSTITUT FRANÇAIS DES EXPERTSCOMPTALES ET COMISSAIRES AUX COMPTES Salon de la transmission de Cabinet 2013 Le 20 septembre 2013 Hôtel Palladia 271, avenue de Grande Bretagne 31300 TOULOUSE Renseignements : 01 42 56 83 19 ifec@ifec.fr

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INSOL EUROPE ANNUAL CONGRESS To restructure, or to liquidate ? That is the question Congrès du 26 au 29 septembre 2013 Hyatt Regency Paris Etoile 3, place du Général Koenig 75017 PARIS Renseignements : 01 40 78 38 13 e.lemarc@aimgroup.eu 2013-626

CONSEIL SUPÉRIEUR DU NOTARIAT Journées notariales du patrimoine Les 30 septembre et 1er octobre 2013 Université Paris-Dauphine Place du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny 75016 PARIS Renseignements : 01 44 90 31 79 meriam.barka.csn@notaires.fr 2013-627

Daphné : prévenir et combattre toutes les formes de violences à l’encontre des femmes Daphné est un programme communautaire créé en 2000 et destiné à prévenir et à combattre toute forme de violence survenant dans la sphère publique ou privée à l’encontre des femmes, des adolescents et des enfants. Il vise également à parvenir à un niveau élevé de protection de la santé, de bienêtre et de cohésion sociale. Le programme Daphné III couvre la période du 1er janvier 2007 au

31 décembre 2013 et se fonde sur les politiques et objectifs déjà fixés dans les programmes Daphné (2000- 2003) et Daphné II (2004-2008).

AVOCATS CONSEILS D’ENTREPRISES Les entretiens de la fiscalité le 10 octobre 2013 Maison du Barreau 2, rue de Harlay 75001 PARIS Renseignements : 01 47 66 30 07 ace@avocats-conseils.org

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Vie du droit

Evolution législative renforçant la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes Les Entretiens du Barreau de Versailles - 31 mai 2013 L’Assemblée Générale des Nations Unies a défini la violence à l’égard des femmes comme tout acte portant un préjudice physique, sexuel ou psychologique, dans la sphère privée comme dans la sphère publique et pouvant constituer un frein à l’égalité des chances dans les domaines juridique, social, politique et économique. Les violences faites aux femmes comprennent les violences conjugales mais également, le mariage forcé, la traite des femmes, les mutilations, le harcèlement sexuel et moral. es pouvoirs publics ont depuis une vingtaine d’années pris conscience de la gravité et de l’ampleur du phénomène des violences faites aux femmes notamment dans la sphère familiale pour tenter d’y apporter des réponses adaptées.

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1/ LA RÉPRESSION La Loi du 23 décembre 1980 réprimant le viol, a eu pour mérite de donner une définition précise du viol, qualifié de crime et jugé pour cela devant la Cour d’Assises. Le viol est passible de quinze ans de réclusion criminelle. Pour le viol et les agressions sexuelles, la Loi relative à la prescription de l’infraction a considérablement évolué, si les faits sont commis sur des mineurs. En matière criminelle, la prescription est de dix ans à compter des faits ou du dernier acte de poursuite. S’agissant d’un viol commis sur un mineur, la prescription est portée à 20 ans à compter de la majorité de la victime. S’agissant d’un délit la prescription est de trois ans, en principe à compter des faits ou du dernier acte de poursuite. En matière d’agression sexuelle sur mineur, la prescription est portée à 20 ans et court à compter de la majorité de la victime. L’allongement de la prescription s’explique par le fait que les victimes d’agression sexuelle se trouveraient souvent dans l’impossibilité durant des années d’évoquer les faits dont elles ont été victimes, notamment en cas d’inceste. En ce qui concerne le viol entre époux, ce n’est que par une décision en date du 11 juin 1992 que la Cour de Cassation a permis la poursuite pénale d’un époux qui s’était rendu coupable de viol à l’égard de son épouse. Le Juge d’Instruction avait refusé d’ouvrir une enquête à la suite de la plainte de la victime, au motif que les époux vivaient ensemble, sans qu’aucune procédure de séparation n’ait été engagée et que les actes sexuels accomplis contre le gré de l’épouse « qui n’aurait fait état d’aucune violence caractérisée autre que la pénétration sexuelle », « entre dans le cadre du mariage tel qu’il est traditionnellement admis ». La Cour de Cassation a retenu le principe selon lequel si l’on pouvait présumer a priori que l’épouse avait accepté la relation sexuelle, cette présupposition pouvait néanmoins être combattue par la preuve contraire. La Loi du 22 juillet 1992, a prévu le principe que la qualité de conjoint ou de concubin de la victime constitue une circonstance aggravante des atteintes volontaires à la personne et même s’ils n’ont entrainé

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aucune incapacité totale de travail, ces faits de violence sont constitutifs d’un délit et donc passibles d’être déférés devant le Tribunal Correctionnel. La Loi du 4 avril 2006 a renforcé la présomption et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. Ainsi, le champ d’application de la circonstance aggravante a été étendue à des nouveaux auteurs (PACSE et concubins) et à de nouvelles infractions (meurtres, viols, agressions sexuelles). L’éloignement de l’auteur de l’infraction du domicile de la victime a été facilité. Le vol entre époux relatif aux objets et aux documents indispensables à la vie quotidienne a été reconnu (il est donc faux de continuer à prétendre qu’il n’existe pas de vol entre époux…). Cette Loi a inscrit la notion de « respect » dans les devoirs des époux (les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance…). Les infractions qui tiennent compte de la circonstance aggravante sont les suivantes : ● meurtre : réclusion criminelle à perpétuité, ● torture ou acte de barbarie : 20 ans de réclusion criminelle, ● violences ayant entrainé la mort sans intention de la donner : 20 ans de réclusion criminelle. ● violences ayant entrainé une mutilation, une infirmité permanente : 15 ans d’emprisonnement et 150.000€ d’amende, ● violences ayant entrainé une incapacité totale de travail de plus de huit jours : 5 ans d’emprisonnement et 75 000€ d’amende, ● viol : 20 ans de réclusion criminelle, ● Agressions sexuelles autres que le viol : 7 ans d’emprisonnement et 100 000€ d’amende. Même en l’absence de circonstance aggravante, les faits suivants sont susceptibles de sanction : ● appels téléphoniques malveillants réitérés ou agressions sonores : 1 an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende, ● menaces : de 6 mois à 5 ans d’emprisonnement et 7 500 à 75 000€ d’amende, ● séquestration : 20 ans de réclusion criminelle ou 7 ans d’emprisonnement et 75 000€ d’amende si la personne séquestrée est libérée volontairement avant 7 jours. Etc. La Loi du 9 juillet 2010 a prévu, outre un important élargissement du pouvoir du Juge aux Affaires Familiales, 3 nouveaux délits : ● le délit de violences psychologiques (art 222-14-3), ● le délit de harcèlement au sein du couple (art 22233-2-1), ● le délit de violences habituelles au sein du couple (art 222-14),

2/LES MESURES DE PROTECTION : L’éloignement de l’auteur présumé des violences : Action devant le Juge pénal : La Loi du 4 avril 2006 renforce l’efficacité de la mesure d’éloignement en étendant l’interdiction du domicile commun aux pacsés et aux concubins et en prévoyant à tous les stades de la procédure pénale une sanction immédiate en cas de non respect de l’interdiction. Le Procureur de la République peut imposer dans le cadre des mesures alternatives aux poursuites (médiation et composition pénale) à l’auteur des violences de résider hors du domicile du couple et même de l’empêcher de paraître à ses abords immédiats. Ce type de mesures à l’égard de l’auteur faisant l’objet d’une convocation par Officier de Police Judiciaire devant le Tribunal, peut également être prise dans le cadre d’un contrôle judiciaire, dans l’attente de l’audience. Outre la surveillance électronique du conjoint violent, il a été mis en place l’expérimentation d’un dispositif électronique destiné à assurer la protection des femmes victimes de violences conjugales (protection anti-rapprochement, « téléphone grand danger » remis à la victime…). Cette expérimentation est voie d’être généralisée sur l’ensemble du territoire, dans les mois à venir. Action devant le Juge aux Affaires Familiales : La Loi du 26 mai 2004 relative au divorce a instauré la possibilité pour les couples mariés de demander la mise en place de mesures urgentes : autorisation de résider séparément, notamment, dans l’attente de l’ordonnance de non conciliation. ●

Les violences faites aux femmes ont été déclarées par François Fillon, Premier Ministre, « grande cause nationale pour l’année 2010 ». ● La Loi du 9 juillet 2010 a prévu diverses mesures, notamment celles qui modifient l’entrée et le séjour des étrangers, l’obligation faite au gouvernement de remettre un rapport sur la formation spécifique en matière de prévention et de prise en charge des violences faites aux femmes, l’organisation de cession d’information au sein des établissements scolaires et encore la création d’une journée nationale de sensibilisation aux violences faites aux femmes fixée au 25 novembre de chaque année (25 novembre 1960 : assassinat des trois sœurs Mirabal, militantes dominicaines, par la dictature de Rafael Trujillo). Au cœur des mesures prises par cette Loi se trouve l’Ordonnance de protection qui peut être rendue par

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Vie du droit

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Olivier Fontibus, Michelle Liccioni et Jean-Marc Ben Kemoun

le Juge aux affaires familiales, qui a la possibilité de l’appliquer aux concubins et pacsés jusqu’alors oubliés. La mesure de protection peut être rendue : ● En cas de violences au sein du couple, ● En cas de menace de mariage forcée, concernant une majeure. Mesures susceptibles d’être ordonnées : Résidence séparée des époux, ● Modalité de prise en charge des frais afférents au logement, ● Attribution de la jouissance du logement et de la résidence à celui qui n’est pas l’auteur des violences, ● Modalités d’exercice de l’autorité parentale, ● Contribution aux charges du mariage voire aide matérielle pour les partenaires d’un PACS, ● Contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants. ● Pour la personne menacée de mariage forcée : interdiction temporaire de sortie de territoire, qui sera inscrite au fichier des personnes recherchées par le Procureur de la République. ● La partie demanderesse peut être autorisée à dissimuler son domicile ou sa résidence et à élire domicile chez son avocat, ● Interdiction à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignée par le Juge ou d’entrer en relation avec elles. ● Interdiction à la partie défenderesse de détenir une arme, de porter une arme, ● Interdiction temporaire de sortie de territoire, etc. ●

Les sanctions de la violation de l’Ordonnance de protection sont inscrites dans le Code Pénal : Le fait pour une personne faisant l’objet d’une ou plusieurs obligations ou interdictions de ne pas s’y conformer, est passible d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 15.000€ d’amende. 3/LE HARCÈLEMENT SEXUEL ET MORAL : La Loi du 22 juillet 1992 a institué le délit de harcèlement sexuel dans le Code Pénal et celle du

2 novembre 1992 a complété ce dispositif par un volet social sanctionnant les répercussions du harcèlement sexuel sur le plan professionnel. Trois Lois ultérieures ont affiné le dispositif : La Loi du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle, ● La Loi du 17 janvier 2002 dite de modernisation sociale complétée par celle du 3 janvier 2003 sanctionnant l’abus d’autorité du supérieur et condamnant le harcèlement émanant d’un collègue. ●

L’aménagement de la charge de la preuve : C’est à l’employeur de prouver que les agissements incriminés ne constituent pas un harcèlement. Après l’abrogation de l’article 222-33 du code pénal par le Conseil Constitutionnel, de nouvelles dispositions ont été prises par la Loi du 6 août 2012, donnant une définition plus précise et plus large du délit de harcèlement sexuel. 4/LES FEMMES IMMIGRÉES Pour les femmes entrées en France en tant que conjointes de français ou conjointes d’étranger dans le cadre d’un regroupement familial : Se verra délivrer une carte de séjour temporaire, en cas de violence conjugale commises avant la délivrance du premier titre de séjour (Loi du 20 novembre 2007). Si les violences ont été commises à son égard après la délivrance du titre de séjour, la rupture de la communauté de vie en raison de violences conjugales n’entrainera pas le retrait du titre de séjour (Loi du 24 juillet 2006). 5/MARIAGE FORCÉ, TRAITE DES FEMMES ET MUTILATIONS Plusieurs dispositions ont été prises afin de prévenir le mariage forcé. Notamment la Loi du 4 avril 2006 a aligné l’âge légal du mariage pour les filles sur celui des garçons, c'est-à-dire 18 ans, a porté de un à

cinq ans le délai de demande de nullité du mariage et il est désormais prévu par l’article 180 du Code Civil que « l’exercice d’une contrainte sur les époux ou sur l’un d’entre eux, y compris par la crainte révérentielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage ». A noter également que l’Ordonnance de protection instaurée par la Loi du 9 juillet 2010 contient des dispositions aggravant la répression en cas de mariage forcé. En ce qui concerne les mutilations sexuelles féminines, depuis 1979, un certain nombre de procès ont été engagés à l’encontre de parents dont les enfants sont morts sur le territoire français à la suite d’excision, incriminant également les exciseuses. Ces pratiques ont été jugées en correctionnelle jusqu’en 1983, date à laquelle la Cour de Cassation a établi qu’il s’agissait d’une mutilation au sens du Code Pénal. Les mutilations génitales sont donc désormais sanctionnées en tant qu’action criminelle au titre soit : ● De violences ayant entrainé une mutilation ou une infirmité permamente : infraction punie de dix ans d’emprisonnement et de 150.000€ d’amende et de 15 ans de réclusion criminelle lorsque ces violences sont commises à l’encontre de mineur. ● De violences ayant entrainé la mort sans intention de la donner passible de 15 ans de réclusion criminelle et de 20 ans de réclusion criminelle lorsqu’il s’agit de mineur. L’arsenal judiciaire semble aujourd’hui protecteur Cependant, alors que les femmes victimes de violences conjugales sont souvent dans un état de dépendance financière qui les paralyse, sans travail, sans logement, avec les enfants à charge, les délais pour obtenir une décision de justice restent importants, ce qui reste un problème majeur... 2013-629 Michelle Liccioni

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Installation

Audiences solennelles d’installation du 2 septembre 2013 Cour d’Appel de Paris En application des décrets des 1er juillet et 6 août 2013, des arrêtés des 10 juin, 25 juin et 15 juillet 2013, ainsi que des procès-verbaux d’installation par écrit des magistrats et fonctionnaires désignés par décrets des 19 décembre 2012, 15 avril 2013, 24 avril 2013 et 26 juin 2013 et par arrêtés des 10 juin, 25 juin et 15 juillet 2013, ont été nommés : Présidents de chambre - Régine Bertrand-Royer - Nicolas Bonnal - Nicole Boucly-Girerd - Nelly Le Denmat-Delfosse - Claudine Menais-Porcher - Sophie Portier - Jean-Marc Heller - Dominique DesvergnesDos Reis Pereira - Philippe Prudhomme - Catherine Gouée-Le François - Marie-José AuffretThevenot - Patrice Labey - Jean-Louis Cleva - Mireille Maubert-Loeffel - Frédéric Charlon - Marie-Pierre MalignerPeyron

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Président de chambre de l’instruction - Michel Vannier Conseillers - Odette-Luce Bouvier - Catherine Brunet - Michèle Picard - Olivier Douvreleur - Damien Mulliez - Marie-Annick - Prigent-Lefeuvre - Annick Heubes - Ghislaine Jaillon - Dominique - Salvary-Nomblot - Gérard Caddeo - Muriel Josié - Sylvie Kerner-Menay - Christophe Estève

- Sophie Le Maout-Grall - Marie-Anne Baulon

- Clément Herbo - Claire Hulak

Vice-Présidents placés auprès du Premier Président - Jean-Marie Denieul - Isabelle Roques - Aline Batoz - Yann Daurelle - Laure Comte - Franck Kessler

Avocats Généraux - Hélène Delobeau-Catton - Gilles Charbonnier

Juges placés auprès du Premier Président - Bertrand Mazabraud - Marc Pinturault - Alexandre Baillon - Emmanuelle Gendre

Vice-Procureure de la République placée auprès du Procureur Général - Magali Josse Substituts du Procureur Général - François Jessel - Olivier L’Etang - Lionel Bounan

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Substitutes placées auprès du Procureur Général - Anne-Cécile Méric - Lila Cedrone-Sehim Directrice de greffe - Dominique Le Baut Greffier en chef - Philippe Pasquiet Greffières - Catherine Magot - Joselita Coquin - Véronique Rayon


Installation Tribunal de Grande Instance de Paris Par décrets du Président de la République en date des 24 avril 2013, 10 juin 2013, 21 juin 2013, 1er juillet 2013 et 6 août 2013, ont été nommés : Première vice-présidente - Marie-Hélène Poinseaux, Conseillère à la Cour d'appel de Versailles.

Vice-Présidents - Joël Espel, Vice-Président au Tribunal de grande instance de Nice. - Jelena Kojic, Vice-Présidente au Tribunal de grande instance de Créteil. - Christian Ghigo, Premier Vice-Président adjoint au Tribunal de grande instance de Marseille. - Pierre-Emmanuel Culie, Vice-Président au Tribunal de grande instance de Créteil. - Sophie Rey, Vice-Présidente chargée du Secrétariat général au Tribunal de grande instance de Bobigny. - Carole Chegaray, Vice-Présidente au Tribunal de grande instance d'Evry. - Camille Garros-Lignières, Vice-Présidente au Tribunal de grande instance de Bobigny. - Laurence Guibert, Vice-Présidente placée auprès du Premier Président de la Cour d'appel de Paris. - Xavier Blanc, Vice-Président placé auprès du Premier Président de la Cour d'appel de Paris. - Sonia Lion, Vice-Présidente placée auprès du Premier Président de la Cour d'appel de Paris. - Marie Girousse, Vice-Présidente, est déchargée du service du Tribunal d'instance du 17e arrondissement. - Patrice Jamik, Vice-Président au Tribunal de grande instance d'Evry. - Dominique Bousquel Mangialavori, Conseillère à la Cour d'appel d'Amiens. - Claire-Marie Horeau, Vice-Présidente chargée du Secrétariat général au Tribunal de grande instance d'Evry. - Patrick Ramael, Vice-Président, est, à compter du 1er septembre 2013, déchargé des fonctions de l'instruction.

Photo Thierry Le Boité

Premier Vice-Président chargé de l'instruction - Renaud Van Ruymbeke, premier Juge d'instruction audit Tribunal.

- Virginie Van Geyte, Vice-Présidente placée auprès du Premier Président de la Cour d'appel de Paris. - Aude Buresi, Magistrate du premier grade placée en position de service détaché. Vice-Présidents chargés de l'application des peines - Ludovic Fossey, Vice-Président chargé de l'application des peines auTribunal de grande instance de Créteil. - Emilie Thubin, Vice-Présidente chargée de l'instruction au Tribunal de grande instance de Bobigny. - Sophie Lecarme-Meunier, Magistrate du premier grade placée en position de congé parental. - Martine Hercouet, Vice-Présidente chargée de l'application des peines au Tribunal de grande instance de Créteil. Vice-Président chargé du service du Tribunal d'instance du 8e arrondissement - Gérard Morel, Premier Substitut à l'administration centrale du Ministère de la justice. Vice-Président chargé du service du Tribunal d'instance du 10e arrondissement - Stéphane Meyer, Vice-Président au Tribunal de grande instance de Bobigny.

Vice-Présidente chargée des fonctions de juge des enfants - Anne-Julie Paschal, Vice-présidente placée auprès du Premier Président de la Cour d'appel de Paris.

Vice-président chargé du service du Tribunal d'instance du 11e arrondissement - Bernard Kajjaj, Vice-Président au Tribunal de grande instance de Bobigny chargé du service du Tribunal d'instance de Bobigny.

Vice-Présidentes chargées de l'instruction - Sylvie Mouchel, Vice-Présidente placée auprès du Premier Président de la Cour d'appel de Paris.

Vice-Présidente chargée du service du Tribunal d'instance du 17e arrondissement - Françoise Thubert, Vice-Présidente

au Tribunal de grande instance de Perpignan chargée du service du Tribunal d'instance de Perpignan. Vice-président chargé du service du Tribunal d'instance du 19e arrondissement - Pascal Lacord, Vice-Président au Tribunal de grande instance de Bobigny.

de grande instance de Bobigny. - Gérard Pitti, Juge au Tribunal de grande instance de Bobigny. - Lydie Reiss, Substitute à l'administration centrale du Ministère de la justice. - Dominique Ligneul, du 27 août 2013 au 26 août 2016.

Juges d'instruction - Emmanuelle Masson, Substitute à l'administration Juges centrale du Ministère de la justice. - Catherine Leclercq-Rumeau, Juge au Tribunal de grande instance - Anne de Pingon, Juge d'instruction de Bordeaux chargée du service du au Tribunal de grande instance Tribunal d'instance de Bordeaux. de Versailles. - Jeanne De Lalande De Calan-Pernias, - Marion Potier, Substitute Juge de l'application des peines à l'administration centrale au Tribunal de grande instance du Ministère de la justice. de Melun. - Morgane Jumel, Juge au Juge de l'application des peines Tribunal de grande instance - Sara Chaudier, Juge au Tribunal de Bobigny chargée du service du de grande instance de Pontoise. Tribunal d'instance de Saint-Denis. - Alice Perego, Juge au Tribunal Juge chargée du service de grande instance de Meaux. du Tribunal d'instance - Amélie Pison, Juge au Tribunal du 10e arrondissement de grande instance de Créteil. - Karima Gassem, Juge au - Anaïs Tabeling, Juge placée Tribunal de grande instance auprès du Premier Président d'Evry chargée du service du de la Cour d'appel de Paris. Tribunal d'instance de Palaiseau. - Sophie Valensi, Substitute - François Behmoiras, Juge du Procureur de la République au Tribunal de grande instance près le Tribunal de grande de Cahors, chargé du service instance de Pontoise. du Tribunal d'instance de Figeac. - Laurence Basterreix, Juge au Tribunal de grande Juge chargée du service instance de Bobigny. du Tribunal d'instance - Claudie Lefeuvre, Substitute du 19e arrondissement à l'administration centrale - Anne Rosenzweig, juge au Tribunal du Ministère de la justice. de grande instance de Compiègne. - Véronique Petereau, Juge au Tribunal de grande Procureur de la République instance de Meaux. adjoint - Julien Richaud, Juge au Tribunal - Serge Macköwiak, Premier de grande instance de Bobigny. Substitut à l'administration centrale du Ministère de la justice. - A compter du 16 septembre 2013, Astrid Granoux, Magistrate du second grade placée Premier Vice-Procureur en position de congé parental. - Raphaël Grandfils, Vice-Procureur de la République près le Tribunal - Nastasia Dragic, Juge des de grande instance de Grenoble. enfants au Tribunal

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Installation Vice-Procureurs de la République - Laure Vermeersch, Première Substitute à l'administration centrale du Ministère de la justice. - Camille Hennetier, Magistrate du premier grade placée en position de service détaché. - Claire Malaterre, Vice-Procureure de la République près le Tribunal de grande instance de Versailles. - Arnaud Feneyrou, Vice-Président au Tribunal de grande instance de Belfort.

- Solène Dubois, Vice-Procureure de la République placée auprès du Procureur Général près la Cour d'appel de Paris. - Laëtitia Dhervilly, Substitute du Procureur de la République près ledit Tribunal. Substituts du Procureur de la République - Anne Fournet, Substitute placée auprès du Procureur Général près la Cour d'appel de Paris.

- Guillaume Michelin, Substitut placé auprès du Procureur Général près la Cour d'appel de Paris. - Arnaud De Laguiche, Substitut placé auprès du Procureur Général près la Cour d'appel de Paris. - Louise Neyton, Substitute placée auprès du Procureur Général près la Cour d'appel de Paris. - Aude Duret-Montpeyroux, Substitute à l'administration centrale du Ministère de la justice. Par arrêté de la Garde des Sceaux, Ministre de la justice, en date

du 15 juillet 2013, vu l'avis émis par la commission administrative paritaire réunie les 4 et 5 juin 2013. Directeur de greffe du Tribunal de grande instance de Paris - Colette Renty est nommée à compter du 1er septembre 2013.

Cour d’Appel de Versailles En application du décret du Président de la Répiublique en date du 1er juillet 2013 et d’un décret à venir, ont été nommés :

Conseillers - Caroline Derniaux épouse Jarrousse - Denis Ardisson - Christel Langlois épouse Sarrazin - Marie-Hélène Masseron

par décret à venir - Sylvie Fetizon - Serge Guittard Juge placé auprès du Premier Président - Caroline Botschi Avocat général - Emmanuel Gérard par décret à venir - Alain Philibeaux, Substitut du Procureur Général par décret à venir - Pierre Rossignol

D.R.

Présidents de chambre - Jean-Baptiste Avel - Marie-Laure Belaval épouse Vital par décret à venir - Jean-Michel - Permingeat - Catherine Bezio - Patrick Wyon

Tribunal de Grande Instance de Versailles En application des décrets du Président de la République en date des 12 avril 2013, 1er juillet 2013 et de l’arrêté du 25 juin 2013 ont été nommés :

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Vice-Président - Gilles Croissant

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Premier Vice-Président - Michel Petitdemange Vice-Président chargé de l'instruction - Etienne Lesaux Vice-présidente chargée du service du Tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye - Françoise Simon-Suisse Juge - Emmanuelle - Pierucci-blanc

Juge chargé du service du Tribunal d’instance de Poissy - Frédérique MaillotBartouilh de Taillac Magistrate à titre temporaire - Sophie Grasset Vice-Procureur de la République - Emmanuel Grandsire Substituts du Procureur de la République - Maud Lacroix-Delage - Xavier Clemence - Julien Betolaud Greffière en chef par décret à venir - Annie Soula

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Société

Université d’été du MEDEF 14ème édition, Campus d’HEC, Jouy-en-Josas - 28/30 août 2013 Pierre Gattaz

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Bâtir un nouveau dynamisme économique pour notre pays par Pierre Gattaz Président du MEDEF

J

e voudrais remercier tout d’abord PierreAntoine Gailly de nous accueillir comme chaque année sur le campus d’HEC et donc sur ses terres, et le remercier pour son discours d’accueil très chaleureux. Chers amis, merci de votre présence et merci d’être venus aussi nombreux pour ces Universités d’été 2013. Je voudrais aussi remercier tous les intervenants qui viendront, durant ces trois jours, débattre avec nous. C’est un moment important pour notre Mouvement, car il permet de se retrouver, d’échanger, de réfléchir collectivement, de s’interroger sur notre rôle et notre apport dans la société française. C’est aussi la première Université depuis mon élection en juillet dernier, et je suis ravi de vous accueillir aujourd'hui avec toute mon équipe, c'est à dire mes neuf présidents de pôle : Patrick Bernasconi, Geoffroy Roux de Bézieux, JeanFrançois Pilliard, Jean-Claude Volot, Anne-Marie Couderc, Thibault Lanxade, Jean-Pierre Letartre, Emmanuèle Perron, et Bernard Spitz que je remercie d’avoir accepté de s’être engagés à mes côtés à la tête de notre Mouvement. Les présidents de Commission viennent également d’être validés ce matin par le Conseil Exécutif. Le MEDEF est donc en ordre de marche. Pour rentrer directement dans le vif du sujet, le titre de l’Université d’été cette année est basé sur un idéogramme chinois « crise » qui est composé de deux symboles signifiant « danger » et « opportunité ». D’où le titre : « Crise : du danger à l’opportunité ». Pourquoi cela ? Mais tout simplement parce que la situation actuelle de notre pays est grave. Notre pays est en crise ! Mais face à cette crise, nous avons deux attitudes possibles. Soit nous restons tétanisés par les menaces, sans bouger, sans nous remettre en cause. Soit nous réalisons que la crise, quand on la regarde en face, est un formidable vecteur d’opportunités, de changements, de progrès. Les Chinois l’ont bien compris, et c’est pourquoi, ils sont depuis des années des formidables compétiteurs : ils ont certes des coûts moindres, mais ils ont aussi une attitude de confiance d’enthousiasme, une capacité de rebondir pour l’avenir. C’est tout ce qui nous manque, nous qui, en France, avons surtout des charges, des taxes et une complexité délirante qui anesthésient toute volonté de se développer, de se battre, de créer… Cet idéogramme résume aussi le programme du MEDEF pour les années qui viennent : regarder la réalité en face, dire la vérité, mais expliquer également comment rebondir, comment faire gagner notre pays.

Commençons par dire la vérité : la France est à la croisée des chemins. Je le crois profondément. Et le choix devant nous est simple : - Soit renoncer, se laisser aller à la facilité de l’habitude, et continuer à glisser doucement vers le gouffre des 12 ou 13% de chômage en poursuivant les mêmes politiques qui, depuis 30 ans, rendent obèse notre sphère publique, asphyxient et ligotent nos entreprises. - Soit accepter enfin sans retenue et sans complexe, les règles de l'économie de marché, et tirer profit de la mondialisation en modernisant et réformant notre pays. On nous dit : « le pays est sorti de la récession car nous avons une croissance de 0,5 % au dernier trimestre !» Qui, parmi vous ose expliquer à ses actionnaires : « Tout va bien, nous avons eu au dernier trimestre une croissance de 0,5% du chiffre d'affaires » ? Soyons sérieux et cessons de nous raconter des histoires : notre pays est bloqué, encalminé comme un bateau dans la vase. Il ne retrouve pas la croissance et il est échoué, attendant qu'une vague plus forte que les autres le bouge légèrement. Mais nous ne pourrons pas retourner en haute mer en attendant passivement la marée. Il faut alléger le bateau, il faut que nous acceptions de nous délester pour retrouver une ligne de flottaison normale. Puis, il faudra retrouver aussi un cap au bateau France. Quand je dis cela, je ne fais pas de politique. Je ne dis pas que c'est la faute de ce Gouvernement, que tout va plus mal depuis un an. Non ! C'est la faute de tous les gouvernements qui se sont succédé depuis 30 ans. Cela fait 30 ans qu'ils laissent les dépenses publiques filer, et, pour financer cette course en avant, alourdissent les impôts et taxes des entreprises. Cela fait 30 ans que nos gouvernements successifs n'ont eu de cesse d'augmenter le nombre de fonctionnaires, d'accroître les contraintes et réglementations contre les entreprises, aboutissant au résultat désespérant suivant.

Quelques chiffres à retenir : - Nos dépenses publiques représentent 57 % duPIB, alors que la moyenne européenne est à 49 % et que l'Allemagne est à 45 %. - Notre taux de prélèvements obligatoires atteint 46 % du PIB, contre 38% pour la moyenne européenne. - Notre pays a le plus grand nombre de fonctionnaires par 1 000 habitants puisque depuis 10 ans, on a embauché 400000fonctionnaires dans les territoires. - On ne travaille pas assez en France, pas assez longtemps, ni par semaine, ni par année, ni sur toute une vie. Et cette situation désastreuse nous coûte très cher puisqu'il y a 100 milliards d'euros de prélèvements de plus sur les entreprises françaises comparées à la moyenne européenne. Cherchez l’erreur ! En conséquence, (mais qui en est encore surpris ?), tous nos indicateurs économiques sont dans le rouge: le chômage frôle les 11 %, le commerce extérieur est déficitaire autour de 65 Milliards d’euros, le déficit public sera encore autour de 4 % en 2013, et la dette atteint 92 % du PIB… Ma seule question est donc : quel choix veut-on pour la France ? Veut-on retrouver en France une dynamique de création d'emplois ? Veut-on réellement redonner un avenir à notre jeunesse, à toute notre jeunesse dans sa diversité et pas seulement à ceux qui ont les moyens de bâtir leur futur en dehors de notre pays ? En un mot : veut-on enfin faire dans ce pays le choix de l’entreprise et des entrepreneurs ? Car qui crée de l'emploi ? Ce sont les entreprises ! Nous, chefs d'entreprise et entrepreneurs, sommes le moteur de notre société. C'est nous qui bâtissons notre pays, qui lui permettons d'intégrer les jeunes, les minorités, qui donnons du travail et de la dignité à nos concitoyens, qui formons, inspirons, innovons,

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investissons, imaginons le futur et le façonnons. Sans entreprises florissantes, sans entrepreneurs motivés et reconnus, notre pays n'a plus d'avenir. Mais pour créer de l'emploi, il faut de la croissance. Et pour créer de la croissance, il faut des entreprises compétitives, innovantes, qui ont confiance dans leur pays et dans leurs pouvoirs publics. Et pour que les entreprises soient compétitives il faut que le terreau France leur soit favorable. Cette logique implacable : emplois / entreprises / croissance / compétitivité et donc compétitivité coût (travail, fiscalité, énergie) qui sont les facteurs que nous subissons. Cette logique implacable devrait être l'obsession de notre Gouvernement, sa ligne de conduite : pour créer durablement de l’emploi, il faut rendre nos entreprises compétitives et qu’elles n’aient pas peur d'embaucher ! Il y a un lien direct entre l’emploi et la compétitivité coût. Là encore, cessons de jouer sur les mots, de parler « d'emplois aidés », financés par les impôts. Le seul emploi qui vaille, le seul qui soit pérenne, le seul qui rapporte et non pas qui coûte à la collectivité, est un emploi créé par le marché, par les clients, donc par l'entreprise. Un emploi qui soit lui-même créateur de richesses, non pas un emploi financé par nos impôts et par nos charges. On me demande souvent : quelle va être la ligne de conduite du MEDEF dans les prochaines semaines, sa grille d'analyse ? Moi, je n’ai qu’une seule obsession : l’emploi, l’emploi, l’emploi. Et nous jugerons les initiatives des pouvoirs publics à cette aune : - pour tout ce qui favorisera la création d'emplois et donc la compétitivité, nous applaudirons, - pour tout ce qui conduira à renforcer les contraintes ou les charges sur les entreprises, donc défavorisera l'emploi, nous le dénoncerons. Avec fermeté. C'est ma seule ligne de conduite. Quand, sur la réforme des retraites, on me dit « il n'est pas possible de toucher à l'âge légal » ou « on va renforcer les contraintes sur la pénibilité », je dis qu’avec ce type de dogme, le Gouvernement choisit le chômage au détriment de l'emploi, qu’il refuse de porter une véritable réforme de fond que, pourtant, les Français attendent et sont prêts à accepter. Alourdir les charges ou les contraintes sur les entreprises, c'est faire le jeu du chômage au détriment de l'emploi ! Taxer, ce n'est pas réformer. Surtaxer, c'est créer des chômeurs. En faisant le choix d’une non-réforme, en refusant d’avoir un discours de réalité et de clarté vis-à-vis des Français, le Gouvernement ne répond pas à l’urgence de la situation alors que le déficit cumulé du système de retraite sera de 200 milliards en 2020. On ne règle rien. Pire, tout le monde sait qu’on va devoir revenir sur cette réforme dans quelques mois. Car comment croire que seules les cotisations des entreprises et des salariés vont pouvoir combler les 200 milliards de déficit ? En cédant une fois de plus à la facilité de la hausse des cotisations, le Gouvernement obère la relance et donc l’emploi. Quand, sur la transition énergétique, on choisit d'encourager des logiques suicidaires de « décroissance » au lieu de miser sur nos points forts technologiques et d'en développer de nouveaux, je dis qu'on choisit le déclin à l'ambition. Oui, la transition énergétique est indispensable : il faut consommer moins, polluer moins, être plus vertueux, mais cela ne veut pas dire retourner à la bougie, vivre moins bien, avec moins de confort. Nous ne pouvons pas choisir le retour en arrière et le déclin !

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Pierre Gattaz, Anne-Marie Idrac, Miriem Bensalah Chagroun et Christophe de Margerie Là encore, faisons le pari de la science, de la recherche, de l'innovation, des entreprises pour régler ces problèmes techniques. Donnons-nous au moins la possibilité d’étudier, sur le plan de la recherche, les gaz de schistes et leur exploitation. Si, dans les années 60, nous avions écouté les opposants au gaz de Lacq, nous n'aurions pas développé cette magnifique filière technologique, nous n'aurions pas enrichi toute une région, et nous n'aurions développé ni Elf Aquitaine, ni Vallourec, ni tous leurs fournisseurs... Quand, sur le PLF 2014, le gouvernement envisage de taxer de manière supplémentaire les entreprises de 3 milliards d'euros, je dis là encore : on choisit de détruire de l'emploi ! Arrêtons d’inventer de nouvelles taxes. Notre pays va dans le mur. Nous le savons tous. Tous les Français. Mais on applique toujours la même recette depuis 30 ans : j'ai un déficit, un problème de logement, d’environnement, de retraite, de chômage… alors je taxe. Les entreprises, les particuliers. Qu'importe, je taxe. Puis, je me rends compte que cela freine l’activité, augmente le chômage, alors je crée le dispositif fiscal qui adoucira l’impact de la nouvelle taxe, un crédit d’impôt par exemple. Mais je me demande comment financer cette exception, alors… je crée une nouvelle taxe. En résumé : je taxe, je crée l’exception pour corriger la taxe et je retaxe pour financer l’exception… Tout cela est ubuesque, ridicule, dramatique ! Et on se retrouve dans la situation qu’on connaît aujourd'hui. Nous avons 100 milliards d'euros de charges en trop sur les entreprises par rapport à la moyenne européenne. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est le rapport Gallois, ce sont tous les rapports qui se sont succédé depuis 10 ans. Et on sait qu'il y a 50 milliards de trop sur les cotisations sociales, d’un côté, et 50 milliards de trop sur les impôts qui dégradent l'exploitation, de l’autre. Quand je dis qu’il faut 100 milliards de baisse de charges sur 5 ans, c'est 20 milliards par an, c'est une diminution de 1,7 % du budget de l'Etat. 1,7 % ! N'importe qui, dans son entreprise, ou même dans son foyer est capable de gérer 1,7 % de baisse des charges. Mais pas les pouvoirs publics ? Allons, de qui se moque-t-on ? Les pouvoirs publics nous promettent aujourd’hui une baisse possible du coût du travail, notamment pour compenser la hausse annoncée hier des cotisations sur la retraite. Cela ne suffit pas. Ce que les entreprises attendent, c’est bien une dynamique

de baisse massive, rapide et un calendrier précis de mise en œuvre. Je ne demande pas 50 milliards en 2014, on connaît la situation des dépenses publiques, mais il faut que la dynamique de baisse sur 5 ans soit clairement engagée et aille au-delà d’une simple compensation des hausses. Et qu’on arrête de me parler de « cadeau aux entreprises » il s’agit-là d’un cadeau aux Français, d’une bonne nouvelle pour l’emploi. Enfin, je voudrais parler de la règlementation. En France, pour être sûr que « l’animal », entreprise ou particulier, soit non seulement asphyxié par les taxes mais ligoté par la loi, je rajoute des textes à n’en plus finir. Cela fait 30 ans que cela dure. Nous faisons exactement le contraire de ce qu’il faut ! Nos entreprises ont besoin d'un environnement que j’appelle « 5S », c'est-à-dire simplifié, stabilisé, souple socialement, serein fiscalement et sécurisé juridiquement. Il doit de plus être lisible et compétitif sur les plans territoriaux, sociaux et fiscaux notamment par rapport à nos partenaires européens. C'est un travail de long terme, qui doit être effectué avec une détermination sans faille mais il faut avoir des idées et des objectifs simples que je suggère aux pouvoirs publics. Par exemple : - Pour la simplification : Diminuons tous les codes de 5 % par an (et nous en avons 85 dont 3 de plus de 3000 pages et 400000 normes). Supprimons deux textes quand on veut en créer un. C'est ce qu'ils font en Angleterre avec leur principe du « one in, two out ». - Pour la stabilisation : Adoptons un moratoire sur toutes les normes et règlements imposés par l'administration pendant 4 ans. Réduisons les strates administratives : il existe trop d’échelons, chacun ayant sa volonté de créer sa règle ou sa méthode. - Pour la sérénité fiscale : Enclenchons une baisse des impôts tous les ans, en nombre et en valeur, en même temps que la baisse des dépenses publiques. Supprimons aussi les impôts « symboles » qui ne servent à rien sauf à décourager les investisseurs et les actionnaires, qu'ils soient français ou étrangers. Supprimons l'ISF, supprimons la taxe à 75 % sur les hauts revenus qui font tant de dégâts en France, en Europe et à l'international pour l’attractivité de notre pays...

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Société


Société - Pour la souplesse sociale : Refondons la durée légale du travail en réglant le sort définitivement de nos 35 heures. Améliorons encore la flexibilité pour davantage d'adaptation dans ce monde qui est en perpétuelle évolution tout en développant une meilleure employabilité de nos salariés pour qu’ils n'aient plus peur de changer d'employeur. - Pour la sécurisation juridique : Cessons de considérer les chefs d'entreprise comme des délinquants. Diminuons l'insécurité juridique sur les PSE (Plan de Sauvegarde de l’Emploi) ou sur les fermetures d'entreprises. Cessons l'ingérence de la justice sur les affaires économiques procédant de la vie normale des entreprises. Je ne continuerai pas cette litanie, je pense que vous m'avez compris. Ce sont les dangers du mot crise. Qu’en est-il des opportunités ? Reste-t-il de l’espoir pour notre pays ? Oui, évidemment, car si la situation est grave, elle n'est pas encore désespérée. La France reste un grand pays, avec des atouts immenses. Nous avons encore tout ce qu'il faut pour bâtir notre futur, pour conquérir le monde et rester parmi les grandes puissances mondiales. Mais il nous faut tracer un cap ambitieux et enthousiasmant pour notre pays et son économie, en Europe et dans le Monde. Et mettre ce plan à exécution. Cette ambition économique, sociale et sociétale, les entrepreneurs de notre pays vont l'affirmer dans les mois qui viennent. C'est l'objet de l'initiative «2020, faire gagner la France » que je vais lancer cet après-midi, et dont l'animation a été confiée à Jean-Pierre Letartre. J’invite d’ailleurs chacun d’entre vous à passer sur le stand correspondant et à y poster une idée, un commentaire, une contribution ! Ce projet novateur vise à présenter, d'ici quelques mois, une vision à moyen et long terme pour la France en Europe à horizon 2020, porteuse d'espoir et d'enthousiasme. Il vise aussi à éclairer et donner du sens aux actions à mener à court terme pour atteindre cette ambition, et à permettre aux chefs d'entreprise de porter dans leur environnement, la vision et les messages communs, d'une France et d'entrepreneurs bâtisseurs et conquérants. Il permettra enfin de faciliter les réformes structurelles profondes dont la France a tant besoin en donnant un sens à ces réformes qui devraient être ainsi mieux acceptées par nos concitoyens, nos salariés et nos partenaires sociaux. Donner un sens, montrer un Cap pour réformer ! Cette initiative « 2020 » associera largement au-delà du MEDEF toutes les forces vives du pays qui le souhaitent. Elle se veut ouverte, collaborative, dynamique. Je souhaite qu’elle s’intègre dans les propres réflexions du gouvernement, qu’elle en soit le cœur et la dynamique. Car l’avenir économique doit d’abord être défini par les entreprises, bâti par les entrepreneurs, avec l’aide de leurs équipes, pour faire gagner notre pays collectivement. Ne revenons pas aux chimères d’une France colbertiste, aux stratégies définies par le gouvernement ou par quelques hauts fonctionnaires ! Tous les défis qui nous font face, qu'ils soient écologiques, démographiques, sociétaux ou technologiques peuvent être relevés par les entreprises de notre pays. Encore faut-il leur laisser la possibilité et la liberté de le faire et surtout leur faire confiance. Car les solutions viendront, non pas de l'illusion d'une décroissance suicidaire, ou du mirage d'une

économie administrée, mais bien de l'émergence d'une nouvelle croissance économique, plus vertueuse, plus solidaire, plus humaine, basée sur les entreprises comme cellule de base de construction de cet avenir. Aux entreprises et à nous Medef de dessiner l'avenir à construire à partir de la France. Au gouvernement de dessiner l'environnement social, fiscal, économique et règlementaire pour que nous puissions réaliser ce projet et relever ces défis à partir de France. Quel rôle doit avoir le MEDEF dans les années qui viennent ? C'est simple, je veux que le MEDEF ait un discours d'enthousiasme, et de vérité. Et je veux que ce soit l'ensemble des entreprises et des entrepreneurs qui puissent le tenir, qu’ils soient proches de la CGPME, de l’UPA ou de toute autre organisation patronale, car nous devons être unis dans la situation actuelle. Depuis mon élection, j'ai continué à aller dans les territoires, à rencontrer des fédérations, à parler avec leurs adhérents et, partout, je constate que notre mouvement est vivant, vivace, passionnant et passionné. Le MEDEF n'est nulle part dans une démarche d'opposition stérile, il est partout dans une approche d'explications, de propositions, de motivation, et d'enthousiasme. Car c'est aussi notre nature, nous, chefs d'entreprise, que de croire en l'avenir, que d'oser, de tenter, de vouloir réussir, de prendre des risques. Oser, c'est souvent la différence entre celui qui gagne, et celui qui perd. Ou entre celui qui gagne et celui qui ne fait rien, même si celui qui ne fait rien est beaucoup plus intelligent ou talentueux... Partout dans les territoires et les fédérations, je suis impressionné par la volonté de mes pairs, leur détermination à agir, non pas de manière égoïste pour leur propre intérêt, mais de manière collective, pour faire avancer notre pays au travers d'initiatives concrètes. Nous pouvons citer quelques exemples: - le rapprochement écoles / entreprises avec des initiatives comme « Vis ma vie » qui permet à un enseignant et un chef d’entreprise d’échanger leur travail durant une journée, ou encore les programmes « Classe en entreprises » qui permettent à des classes et leurs enseignants de passer trois jours en entreprise, ou encore «les Boss invitent les Profs » qui donne l’occasion à des chefs d’entreprise d’inviter des enseignants à déjeuner ou dîner de façon conviviale. - il y a aussi la valorisation de l’insertion aux travers d’initiatives comme Les trophées de l’Insertion ; - nous agissons également pour la valorisation des chercheurs, par des initiatives comme « le prix de l'innovation » ; - mais aussi pour la promotion du mécénat culturel, pour le développement de l’alternance et de l’apprentissage, pour les rencontres avec le grand public au travers d’une multitude d’initiatives. Je n’en dirai pas plus car cela me prendrait l’heure entière de lister toutes les initiatives présentes dans nos territoires et nos fédérations. Mais ce sera notre travail de sélectionner les meilleures d’entre elles, de les formater pour pouvoir les généraliser et les déployer sur le plan national dans tout le réseau Medef. Il est fondamental que vous, chefs d'entreprise, puissiez-vous impliquer dans l'action collective du MEDEF comme vous le faites dans les territoires et les Fédérations. Car vous êtes l'esprit et la force de notre mouvement, à la fois son inspiration et son bras armé. Et si nous souhaitons que les choses bougent dans notre pays, il faut que nous soyons

ensemble, unis, regroupés, engagés comme une armée d’ambassadeur de l’économie. Pour cela, soyez-en à nouveau remerciés. Je veux aussi en profiter pour rendre hommage aux permanents et experts de nos organisations : sans eux, rien ne serait possible. J'ai pu le mesurer chaque jour, ils ne ménagent pas leur peine, leurs efforts, et accompagnent les adhérents avec enthousiasme et détermination. Conclusion En synthèse de ce discours introductif, je dirai que nous entrepreneurs, chefs d’entreprise, nous sommes prêts à relever les défis, à travailler ensemble, avec les pouvoirs publics, les partenaires sociaux et avec toutes les bonnes volontés pour bâtir un nouveau dynamisme économique pour notre pays. Mais ces efforts ne serviront à rien si les pouvoirs publics ne font pas enfin le choix de l’entreprise donc de la compétitivité, donc de l’emploi. La France est à un tournant. Nous ne pouvons plus attendre des décisions qui sont repoussées depuis 30 ans. Monsieur le Président de la République, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, si vous ne prenez pas les bonnes décisions, la France s'enlisera dans le marasme, verra ses jeunes et ses talents continuer de quitter le pays, ses entrepreneurs et ses forces vives se désespérer. Le chômage continuera de grimper, et notre pays sera relégué en deuxième voire en troisième division. Ce qu’il faut faire en urgence est connu et je veux le rappeler encore une fois en quelques mots : 1- la fiscalité des entreprises doit baisser de 50 milliards d’euros par le biais d'une action rigoureuse sur les dépenses publiques, pour retrouver de la compétitivité. 2- les cotisations sociales des entreprises doivent baisser de 50 milliards d’euros également par un transfert de charges vers des mécanismes type CSG et TVA, pour alléger notre coût du travail. 3- la simplification de notre environnement règlementaire et législatif doit enfin devenir une réalité avec des objectifs clairs, constants et suivis, pour que le site France redevienne attractif. C’est tout ! Si déjà, ces trois actions sont enclenchées, les entreprises et les entrepreneurs seront au rendezvous de notre histoire. Monsieur le Président de la République, Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs les Ministres, faites confiance aux entrepreneurs et à leurs équipes, faites le choix de l'entreprise. Il y a urgence, car tous les autres pays du monde avancent et ont déjà fait ce choix. La France ne peut plus attendre. Osez !

Faire gagner ensemble la France

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'aimerais pour commencer citer un grand auteur français, Antoine de Saint Exupéry « Fais de ta vie un rêve et de ton rêve une réalité ». Nous clôturons aujourd'hui nos 14èmes universités d'été du MEDEF. Les débats ont été d'une très grande richesse, grâce aux intervenants venus de tous les horizons, et grâce à vous qui êtes venus cette année encore plus nombreux que les années précédentes. Et d'ailleurs, je peux vous le confier aujourd'hui, hier, vous étiez près de 4 000.

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Société Mais si ces universités d'été se terminent, notre combat commence. Je voudrais m'adresser à vous avec gravité. La situation de notre pays, vous le savez, nous l'avons redit au cours de ces trois jours, est très préoccupante. La France ne peut plus continuer à décrocher ainsi en termes de compétitivité, dans le concert des Nations. Notre pays est aujourd'hui à l'heure des choix: soit il décide de s'endormir définitivement dans un déclin inexorable. Soit il décide de réagir et d'affronter avec courage la réalité pour se réformer et se réinventer. Je veux aujourd'hui lancer un appel à la mobilisation pour l'entreprise et pour l'emploi. Depuis plus de 30 ans, les gouvernements successifs de notre pays ont conduit la France à la situation économique et sociale dans laquelle nous nous trouvons: absence de croissance; taux de chômage élevé, notamment pour les jeunes ; perte de compétitivité; poids de la dette qui pèse et pèsera sur nos générations futures; absence de courage dans les réformes structurelles; absence de vision stratégique pour l'avenir; absence d'investissements de long terme, d'innovations, d'ambition... Le déclin est-il définitif ? Non ! Nous l'avons vu au cours de ces Universités d'été : la crise, c'est le danger, mais c'est aussi l'opportunité. Or, les opportunités existent pour notre pays et elles sont nombreuses. Car la France a une grande histoire et d'immenses savoir-faire et atouts, scientifiques, culturels, démographiques, industriels et financiers. Elle est au coeur même de l'Europe, qui est le premier marché mondial. Elle peut et doit, aux côtés de l'Allemagne, partir à la conquête de l'économie qui se mondialise à une vitesse effrénée. Avec ses atouts, la France peut répondre aux défis qui nous font face, ceux de la santé, des transports, de la sécurité, du tourisme, de la transition énergétique, du numérique, des services, de la construction, de l'agro-alimentaire...

Les secteurs porteurs, où la France peut exceller, ne manquent pas. Il y 4 milliards d'individus à équiper dans les pays émergents et 500 millions de consommateurs en Europe. Je vous le redis : la mondialisation est une chance. Si le gouvernement allège le poids des prélèvements et de la réglementation comme il nous l'a promis, et crée un terreau favorable aux entreprises, notre pays peut alors redevenir conquérant. Et le chômage pourra tomber sous les 7 % en 2020. Car je le rappelle, je le martèle: mon combat, c'est l'emploi. Et pour gagner ce combat, la solution, c'est l'entreprise. Je dirais surtout que l'entreprise est LA solution aux problèmes du pays. L'entreprise, ce sont avant tout des hommes et des femmes. Ce sont des jeunes qu'il nous faut former, mobiliser, motiver et écouter. Il faut que nous soyons unis dans notre combat commun. Lors de ces universités d'été, nous avons ainsi parlé d'esprit d'équipe. Les intervenants nous ont rappelé comment l'esprit d'équipe, l'esprit de corps, l'unité, l'engagement, étaient vitaux pour affronter les dangers, les difficultés, les crises. Mon appel s'adresse donc à vous tous qui êtes ici présents, entrepreneurs, ingénieurs, cadres, salariés, citoyens. Je vous appelle à nous rejoindre autour d'une double ambition. Notre première ambition doit être de définir ensemble comment Faire gagner la France en 2020. C'est la mission confiée à Jean-Pierre Letartre. L'implication de chacune et de chacun d'entre vous, pour proposer des idées et des initiatives est cruciale. Le projet France 2020 est déjà sur internet. Il va également se déployer en région dans les semaines qui viennent pour que tous puissent

participer, proposer, imaginer. Il nous faut bâtir la France du 21e siècle, celle qui rayonne dans l'Europe et dans le monde. Notre seconde ambition est que nous devenions les ambassadeurs de l'entreprise auprès de tous les Français. La réforme ne se fera pas depuis Paris, elle ne se fera pas depuis les ministères. La réforme viendra du terrain, de vous, de tous les créateurs de richesses. Nous, entrepreneurs, avons une responsabilité à prendre dans l'avenir de notre pays. Je veux mobiliser pour la France. J'invite donc tous ceux qui ne veulent pas être les observateurs passifs d'une France en déclin à venir nous rejoindre au MEDEF, dans les territoires et les fédérations, pour participer à l’ambition collective que nous voulons incarner. Car l'ambition que je donne au MEDEF, que je nous donne à tous, est d'arriver à remettre la France en mouvement, à redonner un espoir à chaque Français. Et pour cela, il faut d'abord que nous entreprenions ce combat de la pédagogie et de t'explication de l'économie aux femmes et aux hommes politiques, à tous les élus, à tous les Français. Notre mouvement va se réformer dans les semaines qui viennent grâce au projet que nous avons appelé « Les Assises du MEDEF ». Il va développer des éléments, des outils pédagogiques, tout ce qui vous permettra d'agir concrètement sur le terrain. Allez à la rencontre de tous ! Expliquez! Débattez! Argumentez! Ce n'est qu'en unissant nos voix et nos forces que nous pourrons convaincre celles et ceux qui nous gouvernent qu'il est encore temps de prendre des mesures fortes Et je voudrais livrer à votre réflexion cette phrase du grand romancier américain Mark Twain : « ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait ». Tous ensemble, nous ferons gagner la France. 2013-631

Réforme pénale Palais de l’Elysée, Paris - 30 août 2013 e Président de la République et moimême venons de rendre les arbitrages sur les grands principes de la réforme pénale. La Garde des Sceaux consultera à compter du 30 août sur ce projet les organisations syndicales de magistrats et de l’administration pénitentiaire. Le texte sera ensuite transmis au Conseil d’Etat pour être adoptée par le Conseil des ministres début octobre. L’objectif de cette réforme pénale est de renforcer la sécurité des Français, d’assurer le respect de la

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loi partout et pour tous et par tous. Une personne qui n’a pas respecté la loi doit être sanctionnée, c’est la règle de base que mon gouvernement entend bien appliquer avec la plus grande fermeté quelle que soit la gravité de l’infraction. Une justice efficace, c’est une justice qui prononce les sanctions fermes et appropriées et prévient la récidive. C’est une justice qui répare le tort fait à la société, c’est une justice qui protège les droits des victimes. Les nombreuses lois successives de la précédente majorité ont été inefficaces pour faire reculer

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Vie du droit


Vie du droit durablement la délinquance et la récidive. 80 % des détenus qui sont aujourd'hui en prison sans aucune mesure de contrôle, ni de suivi, voilà la réalité et voilà les conséquences. Les conséquences, c’est la récidive et la question centrale, c’est comment stopper la progression de la récidive que nos concitoyens n’acceptent pas. La réforme pénale comportera quatre mesures principales : 1. Les peines automatiques ont démontré leur inefficacité car le juge doit pouvoir proportionner la peine qu’il prononce à la gravité du délit. Les peines planchers seront donc supprimées. 2. Mais l’automaticité est tout aussi dangereuse dans le cas de l’exécution de la peine, il n’y aura donc plus de libération conditionnelle automatique ou de révocation automatique des sursis. Le projet de loi met en place un nouveau dispositif de libération sous contrainte pour un retour progressif et encadré à la liberté. Les sorties sèches justement dénoncées doivent être supprimées. Le projet de loi reviendra également sur des mesures laxistes votées par la précédente majorité. La possibilité qui était donnée aux juges d’aménager les peines de moins de deux ans sera ramenée à un an pour les primo-délinquants et à six mois pour les récidivistes.

3. Par ailleurs le projet de loi crée une nouvelle peine sans en supprimer aucune, cette nouvelle peine, c’est la contrainte pénale applicable à tous les délits punis d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 5 ans. Il s’agit d’élargir l’arsenal dont dispose la justice pour sanctionner avec efficacité. La contrainte pénale permettra d’imposer des obligations et des interdits dont le juge ne dispose pas aujourd'hui. La montée en puissance de la contrainte pénale et de la libération sous contrainte ira de paire avec un nécessaire renforcement des moyens. Le recrutement dans les services chargés du suivi des condamnés, les Services pénitentiaires d’Insertion et de protection (SPIP), sera amplifié. Les services pénitentiaires d’insertion et de probation puisque c’est leur nom augmenteront dès cette année et l’année prochaine ils augmenteront encore avec plus de 300 recrutements. Et cette progression se poursuivra dans les années à venir avec un objectif, c'est de limiter au maximum 40 dossiers par agent chargé du suivi des personnes concernées. Et puis le recrutement des magistrats de l’application des peines et de l’exécution des peines se poursuivra et le recrutement des personnels de l’administration pénitentiaire également.

4. Enfin le projet garantit l’intégralité des droits des victimes tout au long de l’exécution des peines. La réussite de cette réforme suppose d’accroître les moyens de la police et de la justice, c’est ce que nous avons entrepris conformément aux engagements du Président de la République alors que nos prédécesseurs avaient supprimé des milliers et des milliers de postes de gendarmes et de policiers. Ils n’avaient pas non plus prévu le remplacement des magistrats partant à la retraite. Cette politique de l’affichage et du laxisme est terminée, c’est pour cela que nous allons donc amplifier le renforcement des personnels de suivi, je l’ai dit. Mais aussi nous allons poursuivre la construction de places de prison, 6 500 sont prévues pour 2014, 2015, 2016, donc c’est un plan qui est financé. Mais également sur le terrain il faut poursuivre ce qui a été entrepris, c'està-dire une meilleure coordination de l’action de la police et de la gendarmerie et de la justice. Ce sont les zones de sécurité prioritaires, elles donnent des premiers résultats particulièrement encourageants. Le gouvernement lance également la préparation d’un code de l’exécution des peines pour là encore renforcer l’efficacité de la peine et de la lutte contre la récidive. Tels sont les principes de la réforme pénale, ceux que nous avons arrêtés ce matin avec le Président de la République. Ils incarnent la doctrine de sécurité qui est celle de mon gouvernement, fondés sur la fermeté, la clarté, la responsabilité et l’efficacité. 2013-632

Entretien

Christiane Féral-Schuhl Bâtonnier du Barreau de Paris - 21 août 2013 ous sommes en septembre 2013, quel premier bilan faîtes-vous, à date, de votre mandat qui s’achèvera à la fin de l’année ? Christiane Féral-Schuhl. A mes yeux, le temps du bilan n’est pas encore d’actualité. Maintenant il est possible de jeter un œil dans le rétroviseur et de rappeler ce qui a été fait. En préambule, il m'apparaît important de rappeler que mon bâtonnat aura été marqué par un environnement de crises multiples : économique, financière, politique, voire institutionnelle et professionnelle. Cette actualité très riche nous a mobilisés. Elle continue à le faire. Le temps politique est particulier, long ou lent selon les cas, et nécessite une concentration de chaque instant sur plusieurs fronts. Les avocats ont été très attaqués, malmenés et il a fallu à plusieurs reprises monter au créneau pour faire prévaloir nos différents points de vue. Cela n'a pas été vain et nous avons réussi à redonner au Barreau de Paris une voix forte et très écoutée auprès des pouvoirs publics. Enfin, mon mandat a été marqué par deux bouleversements forts. Le déménagement de l'École de Formation des Barreaux, concrétisé en mars dernier. L'École accueille aujourd'hui près de 2 000 élèves avocats dans un cadre exceptionnel. Et

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la perspective confirmée d’un déménagement plus compliqué encore : celui du Palais de Justice. Des négociations sont en cours pour assurer aux avocats un accueil optimal dans les locaux de ce futur Palais. Vous parlez d’un contexte difficile. Qualifieriez-vous ainsi vos relations avec les pouvoirs publics ? C.F.S. Je me dois de souligner la qualité des relations avec notre ministre, Madame Christiane Taubira, et ses équipes. L’Ordre des avocats de Paris a bien entendu réagi au fil des différentes propositions qui ont pu être faites et n'a pas hésité à exprimer son opposition lorsque cela s'imposait. J'en prends pour exemple notre forte mobilisation pour obtenir la suppression du décret-passerelle ou encore le projet de taxe sur le chiffre d'affaires pour financer l'aide juridictionnelle. S’agissant des projets de loi relatifs aux actions collectives et à la fraude fiscale, nous nous battons tous les jours pour faire entendre notre voix. Au chapitre des préoccupations, deux sujets me paraissent fondamentaux. Le premier concerne le secret professionnel pour lequel le Conseil de l'Ordre a pris position pour proposer un renforcement du dispositif existant. Or, le projet de loi sur la fraude fiscale nous semble être un retour

en arrière. Nous en avons bien évidemment discuté avec les pouvoirs publics et le dialogue se poursuit. Le secret professionnel est un moyen de protéger les citoyens. Le droit au secret est un droit fondamental qu’il faut absolument préserver dans une démocratie et ce principe est souvent bafoué au détriment des justiciables qui n’en prennent malheureusement pas suffisamment conscience. Le deuxième concerne les actions collectives. Il est très regrettable pour le justiciable que le choix ait été de donner une exclusivité aux associations de consommateurs pour gérer les actions collectives, car elles n’auront pas les moyens de financer de telles actions. L’exclusion des avocats provoquera une inégalité des armes entre les consommateurs et les entreprises, ce qui entraînera un effet contraire au but recherché. Cette réforme est donc contreproductive, mais les pouvoirs publics ne veulent pas l’entendre. Nous sommes en ce moment en train de mobiliser des parlementaires qui ont compris les enjeux de cette question. Comment ce contexte de crises multiples a influé sur votre action ? C.F.S. Ces crises ont justifié ma volonté de me concentrer sur la mise en œuvre de solutions qui

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Entretien permettraient aux 25 000 avocats du Barreau de Paris d'affronter le mieux possible des temps difficiles. Pour cela, j'ai souhaité encourager la démarche entrepreneuriale propre à la profession d’avocat et, à ce titre, proposer des mesures pour la création et le développement des cabinets. Dans une société irriguée par les technologies du numérique, il m'est également apparu indispensable de faire en sorte que l'avocat se positionne – enfin - comme un acteur à part entière, maîtrisant et sachant se servir de ces outils. Par ailleurs, le développement de la place des avocats aux plans européen et international a constitué une préoccupation permanente pour encourager la conquête de nouveaux marchés et de nouveaux horizons. Enfin, l’évolution sociologique de notre profession ne pouvait être ignorée avec la place prépondérante prise par les femmes qui représentent plus de 50% de notre Barreau. Cette mutation s’est confondue avec un thème qui m’est cher, celui de l'égalité. En tant que membre du Haut Conseil à l'Égalité, il m’a été donné la chance de faire avancer ce sujet. Concrètement, quels ont été les objectifs des solutions « de crise » que vous avez souhaité mettre en œuvre ? C.F.S. J’ai souhaité privilégier toutes les voies qui se traduiraient, pour nos confrères, par une absence d’augmentation de leurs cotisations et la possibilité pour eux de réaliser, dans le cadre de leurs activités, des économies structurelles significatives. Mon mandat est court : deux ans. Il ne s’agissait donc pas pour moi de mettre en place des solutions complexes, mais bien d’aller à l’essentiel en privilégiant tout ce qui peut faciliter la pratique professionnelle quotidienne de nos confrères avec la contrainte de ne pas augmenter les cotisations, tout en garantissant un retour à l’équilibre de nos comptes et son maintien. Quelques exemples concrets de cette approche originale ? C.F.S. Dès mon dauphinat, j’ai eu pour objectif de renégocier les contrats de prévoyance des avocats parisiens. La renégociation de nos contrats d’assurance et de prévoyance, sans toucher aux garanties, nous permet d’économiser, de façon récurrente et annuelle, 3,8 millions d'euros. D’autre part, les frais de mission et de réception ont été réduits de 31%. Cette action, comme bien d'autres portant sur les charges de l'Ordre, a généré, là aussi de façon naturelle et récurrente, une économie de près de 2,5 millions d'économies annuelles. Il m'a dès lors été possible de ne pas augmenter les taux de nos cotisations, tout en assurant une qualité de services inchangée à nos confrères et en montrant à ces derniers que l’Ordre se voulait exemplaire dans une situation où tous nous devions accepter de nous « serrer la ceinture ». La mesure la plus « concrète » ne seraitelle pas Praeferentia ? C.F.S. Oui, évidemment. Cette centrale de référencement est une grande fierté pour moi. Aujourd’hui, sur Paris, plus de 9 000 avocats peuvent bénéficier de réductions de leurs charges allant de 20% à 30%. Ma grande réussite est que, désormais, sous le nom de Praeferentia Corefrance, cette initiative a pris une dimension nationale en partenariat avec la Conférence des Bâtonniers. Depuis le mois de juin, 39 000 avocats appartenant à 53 barreaux peuvent y adhérer. Cette centrale de référencement a pour moi une

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dimension politique très forte, car, au-delà d'une solution pragmatique et d'un intérêt économique certain, elle démontre que nous pouvons fédérer les avocats de France autour d'un grand projet utile pour tous. Cette réussite a été rendue possible grâce au travail réalisé en commun avec le Président JeanLuc Forget, au service de l’ensemble de la profession. Nous poursuivons dans cette voie avec la conservation de l’acte d’avocat, un projet porté par la Conférence des Bâtonniers qui devrait permettre à l’acte d’avocat de prendre toute la place qu’il mérite. Nous avons à cœur, avec le Président Jean-Luc Forget, de démontrer que les Ordres sont à même d’inventer et d’innover au service de notre profession. La garantie perte de collaboration est-elle aussi une réussite à vos yeux ? C.F.S. C’est une autre mesure phare de mon mandat. Son objectif est de permettre aux collaborateurs de souscrire cette assurance pour envisager leur avenir avec plus de sérénité. Il y a actuellement plus de 1 400 adhésions, soit près de 14 % des 10 000 collaborateurs parisiens. Assurément, ce pourcentage a vocation à augmenter, car cette garantie répond à un besoin fort. Je suis certaine que d’ici quelques années elle apparaîtra comme une « évidence » pour un Barreau qui souhaite attirer et fidéliser de jeunes talents, au même titre qu’une centrale de référencement est une évidence. On a beaucoup parlé aussi du barreau entrepreneurial. Pouvez-vous nous en dire quelques mots et expliquer en quoi il consiste ? C.F.S. Le barreau entrepreneurial, c’est la constatation que les avocats sont des chefs d’entreprise qui souvent s’ignorent et qui parfois ne maîtrisent pas l’ensemble des règles et techniques qui permettent de créer, de développer et de pérenniser une entreprise. Cela va de la gestion comptable à celle des ressources humaines, du choix de ses locaux à celui de son mode d’exercice. Trop souvent, les confrères se lancent sans filet dans leur activité et se heurtent ainsi à des difficultés, sources de désillusions. Or, la plupart pourraient être évitées avec un minimum de formation. Aussi, dans le contexte de crise qui est le nôtre, j’ai souhaité renforcer et organiser (et nous avons réussi) tous les services de l'Ordre, pour accompagner les avocats qui choisissent de s'installer, les orienter et les former afin qu'ils puissent construire leur projet dans un véritable esprit d'entreprise, le plus sereinement possible. Sur le plan des nouvelles technologies, vous avez été très active… Code de déontologie en ligne, les applis iPhone et Androïd... Avez-vous d'autres projets et cela est-il en ligne avec vos préoccupations de développement économique de la profession ? C.F.S. Oui, bien sûr, la maîtrise des nouvelles technologies est indissociable du développement de notre profession et de sa capacité à résister à la concurrence. « Avoclé » tout d'abord. Il s'agit d'une solution logicielle développée par le Barreau de Paris qui permet la délégation de la clé e-barreau au sein des structures. En d'autres termes, la possibilité pour un avocat de déléguer à un membre du cabinet de son choix l'accès au RPVA pour tout ou partie de ses dossiers sans prêter son code ni sa clé. Une petite révolution très attendue par nos confrères ! C'est un travail qui a été fait avec l'aide de plusieurs

cabinets pour nous assurer de son efficacité et de coller au plus près aux attentes des avocats. La Chancellerie nous a donné son accord. Seule la décision du CNB se fait attendre… J'ai donc décidé de lancer l'application pour tous les e-services du Barreau de Paris. L'organisation du cabinet s'en trouve facilitée, en plus d'une meilleure maîtrise des données, par une gestion sécurisée. Par ailleurs, pour encore mieux intégrer au quotidien les nouvelles technologies pour faire que l'avocat soit un acteur incontournable de la société du numérique, nous sommes en train de lancer l'école du barreau numérique avec toute une série de formations éligibles au crédit d'heures de formation : stratégie de communication en ligne pour les avocats, faire ses recherches en ligne, le cabinet en ligne, les logiciels de cabinets, l'organisation informatique du cabinet. La première séance aura lieu le 12 septembre. Enfin, il faut mentionner le lancement de plus de 80 modules e-learning destinés à faciliter au quotidien leur formation continue. Nous avons d’autres projets qui vont se concrétiser au cours de l’automne, mais certains d’entre eux sont très stratégiques et nous ne pourrons vous en parler qu’au moment de leur lancement. Développer l’activité oui, mais vous avez également souhaité la protéger, notamment contre les pratiques illégales du droit ? C.F.S. C'est une priorité. Face au développement de l'Internet, nous constatons la multiplication des pratiques illégales qui sont préjudiciables pour le justiciable. Nous avons donc commencé notre opération coup de poing par une réelle information des justiciables et des avocats sur nos actions. Il y a d’abord eu le lancement d’un site dédié www.garantieavocat.org. L’objectif est de sensibiliser le grand public et de lui donner les clefs lui permettant de détecter les sites internet des pirates du droit. 25 000 visiteurs uniques se sont connectés depuis le lancement du site en mars 2013 et chaque jour nous recevons de nombreux mails et courriers. La traque des braconniers donne de bons résultats : souvent nous obtenons la fermeture du site illicite à réception de notre lettre recommandée et, en cas de nécessité, nous adressons des signalements au Parquet. Plus de 300 dossiers sont actuellement ouverts. Nous venons d’apprendre que la DGCCRF a lancé une grande enquête à ce sujet et nous en sommes très heureux. Nous travaillons également sur ce chantier avec d'autres professions, notamment avec les experts-comptables et les agents immobiliers, avec lesquels nous avons signé des accords de partenariat pour lutter ensemble contre l'exercice illégal. Vous savez, en général, quand vous identifiez un braconnier du chiffre, il est également braconnier du droit et vice-versa. Et puis, c'est aussi un moyen d'établir avec les autres professions un dialogue permanent et de dénoncer les dérapages de nos membres respectifs. Les marchés publics sont-ils concernés par ce dispositif ? C.F.S. Oui, dans la mesure où les règles applicables aux marchés publics sont souvent bafouées, voire ignorées. Avec l'Observatoire des marchés publics, nous réagissons à tous les signalements de nonconformité au Code des marchés publics. Les résultats sont ici encore probants. Les nombreux courriers adressés aux acheteurs publics mettent en avant les irrégularités, conduisant souvent les personnes publiques à recommencer la mise en

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Entretien concurrence, cette fois sur des bases conformes. A défaut de réaction, nous engageons des procédures devant les juridictions administratives. Notre objectif est de lutter contre les prestataires nonavocats qui sont amenés à assurer des prestations juridiques, agissant ainsi en dehors du périmètre du droit, et aussi contre les prix « anormalement bas » qui pénalisent les avocats spécialistes. Pour agir encore plus efficacement, nous allons rendre public un document qui rappelle les règles de la commande publique, qui sera accessible sur le site de l'Ordre des avocats du Barreau de Paris. Y a-t-il un lien entre votre volonté de développer l’activité économique des avocats et la médiation qui est également un des éléments phares de votre bâtonnat ? Oui, je souhaite que les avocats soient de plus en plus familiarisés et formés à la médiation, grâce notamment au support de l’École de la Médiation du Barreau de Paris qui a vu le jour à la fin de l’été. Cette école consiste à sélectionner et former des avocats qui obtiendront la qualification « médiation Barreau de Paris ». Nous voulons une école d’excellence de façon à ce que les avocats du Barreau de Paris portent le message, avec un savoir-faire et une éthique irréprochables, de la performance de l’outil médiation comme mode alternatif de règlement des conflits. Je ne comprends pas que la médiation puisse avoir d'aussi bons résultats au Canada et piétine autant en France, alors même que c'est une volonté forte et déclarée de notre Président de la République, suivi en cela par les justiciables. C'est en tous les cas un sujet sur lequel j'entends rester très active dans les mois à venir. Médiation, arbitrage… Est-ce dans le même esprit que vous avez institué un Centre de règlement des litiges ? C.F.S. Oui, il s’avérait nécessaire de centraliser et uniformiser le traitement des litiges, qu'il s'agisse des litiges de la collaboration ou des litiges entre avocats en raison de leur exercice professionnel, que ce soit au stade de la conciliation, de la médiation, ou de la juridiction du bâtonnier en cas d'échec de la procédure de conciliation ou de médiation. Ce centre a vocation à gérer le traitement de tout conflit professionnel civil que les parties conviendraient de lui soumettre, qu’il implique ou non un avocat. Une Charte d’éthique viendra compléter ce dispositif qui se veut exemplaire. Vous parlez de difficultés et de désillusions chez vos confrères. L’Ordre s’est-il donné les moyens d’aider les avocats en difficulté ? C.F.S. L’Ordre est aussi là pour cela, bien évidemment, et je ne parle pas que du point de vue de l’exercice professionnel. Les avocats sont des hommes et des femmes qui sont eux aussi confrontés aux « accidents » de la vie (perte d'un proche, maladie, stress, etc.). Je considère qu'il est du devoir de l'Ordre de les accompagner dans ces périodes difficiles. Outre le travail effectué par les services de l’Ordre, nous avons mis en place un numéro bleu (0800 242 240) donnant accès à un service d'assistance téléphonique qui offre, de façon anonyme, de l'aide, une écoute et un soutien par des psychologues professionnels. Nous avons également créé la Commission Qualité de Vie qui travaille sur l'axe « conciliation vie professionnelle - vie personnelle » en

proposant des formations au développement professionnel et personnel, des bilans de compétence, des groupes de pratiques professionnelles. Enfin, nous avons organisé la première Journée du Bonheur qui a été une vraie réussite avec plus de 500 participants. Deuxième femme bâtonnier du Barreau de Paris, est-ce que les femmes ont été au cœur de vos préoccupations ? C.F.S. Le bâtonnier est celui de tous les avocats, sans distinction, mais je ne pouvais pas ne pas tenir compte du fait que notre profession est majoritairement féminine, cette tendance ne faisant que se confirmer chaque année. Il était donc nécessaire de considérer cette évolution professionnelle et sociologique pour y adapter notre profession dans ses structures et son mode d’exercice. Ceci étant, tout déséquilibre étant mauvais, l’objectif est, je pense, celui de l’égalité entre les femmes et les hommes. Comment cela s’est-il traduit dans les faits ? C.F.S.Mon bâtonnat m'a permis de mesurer les attentes des avocates, qui constituent aujourd’hui 52% des effectifs du Barreau de Paris et, tout particulièrement, des plus jeunes d’entre elles, sur le thème de l'égalité professionnelle. Le 8 mars 2012 aura été marqué par de petits gestes de communication qui ont eu de grands effets en termes de prises de conscience : le déploiement de la bâche de 600 m² sur les murs de la Conciergerie avec comme slogan « Et si la femme était (aussi) l'avenir du droit », un colloque sur « les femmes et le pouvoir » et le lancement du premier Observatoire de l’égalité. Je voulais, pour le 8 mars 2013, une démarche différente, mais aussi « marquante ». Outre la deuxième et parlante édition de l’Observatoire de l’égalité, j'ai choisi de rendre hommage à 20 femmes avocates à travers le monde dans le livre « Ces femmes qui portent la robe » dont les droits d’auteur sont reversés au Fonds de dotation Barreau de Paris Solidarité. Cinq de ces héroïnes sont venues à Paris, le 8 mars 2013, pour témoigner de leurs combats, parmi lesquelles Madame Shirin Ebadi, prix Nobel de la paix. L’un des moments les plus émouvants de mon bâtonnat, d'autant que j'ai souhaité décerner à cette occasion la médaille du Barreau de Paris à Malala Yousafzai, cette jeune Pakistanaise qui a affronté les talibans de sa région pour revendiquer le droit à l'éducation des petites filles. Je tiens également à signaler la mobilisation du Barreau autour de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes du 25 novembre. Cette manifestation est l'occasion depuis deux ans de travailler en étroite collaboration avec le Procureur de la République. Donc, quand on pense que vous portez la cause des femmes, c’est en fait un engagement pour favoriser l'égalité entre les hommes et les femmes ? C.F.S. Oui, le Barreau a tout d’abord signé le Pacte pour l’Égalité. C’est le seul ordre professionnel à l’avoir fait. Puis, il m’est apparu essentiel de faire adopter par le Barreau de Paris un certain nombre de mesures qui permettront concrètement de faire bouger les lignes en matière d’égalité : la création d’une Commission « Egalité professionnelle » et la création d’une période d'immunité de deux mois pour la collaboratrice à son retour de maternité, interdisant au cabinet de mettre fin au contrat de collaboration pendant cette période. Mais, il reste encore beaucoup à faire et je travaille sur des mesures concrètes que je souhaite proposer aux cabinets afin de les aider à mettre en place l’égalité professionnelle dans leurs structures.

Qu’en est-il de la Charte des bonnes pratiques de la collaboration ? C.F.S. L'objectif poursuivi avec cette charte est de clarifier et mieux encadrer les droits et les obligations des avocats collaborateurs et des cabinets. Là aussi, la charte a vocation à évoluer et à tenir compte de la réalité de terrain et des attentes des uns et des autres. Le constat est simple : le collaborateur ou la collaboratrice qui exerce dans des conditions satisfaisantes apporte davantage à son cabinet, car l'envie du développement du cabinet est partagée. Pour l'instant, une centaine de cabinets a adhéré à cette charte. J’ai décidé de les réunir à la rentrée pour faire le point et bien sûr écouter les collaborateurs de ces cabinets pour vérifier sa bonne application. Vous insistez beaucoup sur le fait que les avocats parisiens doivent regarder, voire plus, vers l’international… C.F.S. En effet, si nous ne le faisons pas, d’autres le feront à notre place. Ce serait d’autant plus regrettable que l’avocat parisien, et par extension français, a toute sa légitimité à être présent sur des marchés internationaux où sa pratique du droit est un atout indéniable. A mes yeux d’ailleurs, l’international commence par l’Europe. Souhaitant développer le « réflexe européen », nous avons créé en étroite collaboration avec la Délégation des Barreaux de France (DBF) des modules de formation avec pour objectif de susciter chez chaque avocat la conscience de la dimension européenne de chaque dossier. Par ailleurs, je reviens de Bruxelles où je suis allée à la rencontre de hautes personnalités, notamment Françoise Le Bail, Directrice générale Justice au sein de la Commission européenne. J’ai pu à cette occasion évoquer les grands sujets qui nous préoccupent et sur lesquels nous travaillons avec la DBF depuis plusieurs mois : secret professionnel, données personnelles, les ABS… Il faut rappeler que le Barreau de Paris a mené une action importante pour l'implantation de la juridiction européenne des brevets à Paris, en étroite collaboration avec le ministre des Affaires européennes. Et au-delà de l'Europe ? C.F.S.Nous avons eu de nombreuses actions qui ont toujours été menées avec le souci de l’efficacité et de la rigueur budgétaire. Il y a eu, d'une part, la création du Comité de stratégie de politique européenne et internationale et, d’autre part, celle de commissions pilotes bilatérales – et elles sont nombreuses : ParisNew-York, Paris-Québec, Paris-Londres, Paris-Liban, Paris-Hanoï, etc. Les responsables de ces commissions ont adhéré à une charte et travaillent en lien avec un avocat référent installé localement qui apporte souvent une grande valeur ajoutée. Par ailleurs, les travaux se font dans une approche transversale aussi souvent que possible. Les soirées « Afrique(s) » et « Brésil », la journée « Asie » en septembre sont autant d'occasion de célébrer les actions du Barreau de Paris dans les régions concernées. Et, bien-sûr, il faut mentionner la création du premier Campus International. Campus international a-t-il un lien avec Campus ? C.F.S. J'ai souhaité que le Barreau de Paris aille à la rencontre des centaines d’avocats du Barreau installés à l'étranger. Ils sont les meilleurs ambassadeurs de notre droit. Les objectifs de Campus international vont au-delà de la formation continue. Il s'agit de choisir une zone géographique différente d'une année sur l'autre, d'inciter les avocats de Paris à venir découvrir cette

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Entretien

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Christiane Féral-Schuhl

zone, sa culture juridique, les avocats installés dans la région et les avocats des barreaux locaux de manière à favoriser les échanges et de faciliter l'installation ou le déploiement d'une activité dans cette zone. Enfin, il s'agit d’encourager une approche de droit comparé. Je suis convaincue que la maîtrise du droit local est une force et que cela renforce la maîtrise de nos propres règles de droit. Pourquoi avoir choisi le Vietnam comme première destination ? C.F.S. 2013 est l'année France-Vietnam. Cette année suit de près la décision regrettable prise par la France fin 2012 de fermer la Maison du droit vietnamofrançaise où ont été formés tant de jeunes étudiants à la culture juridique française. C'était donc l'occasion de rappeler les liens forts entre la France et le Vietnam, de renouer des partenariats avec le Barreau de Hanoï. Pour cette première opération, nous avons pu nous adosser au Forum d’affaires organisé par Ubifrance et nous avons, du coup, pu bénéficier de la présence de Madame Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur. Cela a également été l'occasion de rencontrer le ministre de la Justice à Hanoï pour évoquer avec lui une difficulté liée à l'interprétation d'un amendement qui vise à réduire le périmètre d'intervention des cabinets d’avocats étrangers exerçant au Vietnam puisqu'il leur interdit de rédiger des « legal documents ». Le ministre a bien voulu préciser que cette interdiction était limitée aux seuls actes notariés, ce qui est aujourd’hui confirmé dans le projet de loi qui va être prochainement voté. Cette opération est un très beau succès. Vous avez évoqué les droits de l'Homme et les actions que poursuit le Barreau de Paris. Des actions spécifiques à nous faire partager ? C.F.S. Comme mes prédécesseurs, j'ai veillé à ce que le Barreau de Paris soit présent et apporte son concours dans la défense des droits de l'Homme. Plus particulièrement, j'ai souhaité que, chaque fois

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qu'un avocat était menacé, torturé ou tué, le Barreau de Paris s'exprime pour dénoncer ces actes odieux et rappeler que la parole de l'avocat doit rester libre. Une lettre adressée à un haut dirigeant ou à un politique apparaît comme une goutte d'eau dans un océan, mais, parfois, cela fait bouger les lignes et j'ai pu, à plusieurs reprises, mesurer l'importance de la voix du Barreau de Paris. Je me suis déplacée à Tunis pour rendre hommage à Chokri Belaïd en février dernier, homme politique et avocat assassiné. Au nombre des autres manifestations fortes du Barreau de Paris, notre présence en Turquie, aux côtés du Bâtonnier d'Istanbul, menacé d'une peine de prison pour avoir rappelé haut et fort que la parole de l'avocat doit rester libre pour défendre son client. Enfin, le Barreau de Paris s'est fortement mobilisé pour sensibiliser l'opinion publique internationale sur l'abolition de la peine de mort en signant, avec le Barreau de Beyrouth, une résolution à laquelle ont, à ce jour, adhéré 79 barreaux et associations d'avocats à travers le monde. Vous avez créé le Fonds de dotation Barreau de Paris Solidarité. Quel est l’intérêt de promouvoir le pro bono ? C.F.S. L'objectif de ce Fonds est de mutualiser les initiatives solidaires du Barreau de Paris et celles des cabinets d'avocats pour mieux les faire connaître. Il y a 10 ans, un dispositif d’accès au droit basé sur le bénévolat a été mis en place par l’Ordre des avocats de Paris. Le Fonds poursuit cet élan. «Barreau de Paris Solidarité » est également présent aux côtés d’associations, en soutenant financièrement les actions de promotion de l’accès au droit et de la défense des droits de l’Homme, en France et à l’international. De nombreux avocats s’investissent sans compensation financière dans des projets, ou soutiennent financièrement des actions. Le Fonds participe à la mise en lumière de ces actions pro bono, dont nous devons être fiers. L'image de l'avocat est malmenée, alors même que beaucoup de nos confrères donnent de leur temps et

s'investissent pour les autres. Nous devons le faire savoir. Par ailleurs, comme l'avocat est avant tout un citoyen qui a toute sa place et son utilité dans la société, nous avons créé une opération en partenariat avec la Mairie de Paris : l'Avocat dans la Cité. Pendant une semaine, les avocats vont à la rencontre des Parisiens et dispensent des consultations gratuites sur le parvis de l'Hôtel de Ville et aux quatre coins de la capitale pour répondre gratuitement à leurs questions. (NDLR : En octobre 2012, plus de 500 avocats ont donné plus de 2 500 consultations au total). Tous les jours, des avocats du Barreau de Paris se rendent également dans les écoles primaires pour faire connaître le métier d’avocat et sensibiliser à l’importance du droit dans la société. Enfin, c'est l'occasion de faire connaître les initiatives bénévoles des avocats, qu’ils exercent en individuel ou au sein de structures, en remettant des Trophées Pro bono à l'Hôtel de Ville. Cet automne, nous rééditons l'Avocat dans la Cité, avec les mêmes actions, en y ajoutant des consultations pour les entrepreneurs de TPE-PME et avec pour objectif d'atteindre les 5 000 consultations. Vous avez installé à la Maison du Barreau une œuvre d’art éphémère. Quel était l'objectif et quel avenir pour cette innovation ? C.F.S. Mon successeur décidera. Je sais que la Fondation Ricard est d'accord sur le principe de poursuivre ce partenariat. L'objectif était de créer un espace où puissent s'exprimer de jeunes artistes et qui fasse réagir les avocats. Que l'œuvre plaise importe peu. Ce que je voulais, c'était susciter le commentaire. Et cela, c'est réussi. La dernière œuvre éphémère sous mon bâtonnat sera installée dans quelques semaines. Ce n'est que l'un des nombreux projets réalisés dans le cadre de la Commission Culture. J'ai aimé mélanger l'héritage des anciens avec la culture contemporaine. Cela participe, à mon sens, du maintien de ce « fil » qui relie le passé et l'avenir. 2013-633 Propos recueillis par Jean-René Tancrède

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