LES ANNONCES DE LA SEINE Vendredi 31 août 2012 - Numéro 53 - 1,15 Euro - 93e année
Etats Généraux du Droit Administratif D.R.
2ème édition - 27 juin 2012 VIE DU DROIT Etats Généraux du Droit Administratif Champs émergents pour les avocats par Christian Charrière-Bournazel ....................................................... Améliorer le dialogue entre le Tribunal administratif et le Conseil d’Etat par Bernard Stirn.................................................................................. Le juge administratif et les actes et activités de droit privé par Jean-Marc Sauvé............................................................................
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4 6 AGENDA ......................................................................................5 JURISPRUDENCE
Tarif du gaz Conseil d’Etat - 10 juillet 2012 - nos 353356 et 353555 SA GDF Suez et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie.........................................................................................
VIE DU CHIFFRE
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Autorité des Marchés Financiers Rapport du Médiateur 2011 ............................................................ Passation de pouvoir .......................................................................
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ANNONCES LEGALES ...................................................16 DIRECT Conseil d'État Deux nouveaux Présidents de section .............................................
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orts du succès des premiers États Généraux du Droit Administratif, le Conseil National des Barreaux et le Conseil d’État ont organisé conjointement le 27 juin 2012 à la Maison de la Chimie, la deuxième édition de ces EGDA. Cette manifestation est devenue le rendez-vous annuel des professionnels ayant en commun leur intérêt pour cette matière et un lieu d'échanges entre avocats et magistrats de l'ordre administratif. Christian Charrière-Bournazel, Président du Conseil National des Barreaux a ouvert ces travaux en rappelant qu’il est « nécessaire de décloisonner "droit public" et "droit privé" et d'unifier les principes de droit pour sortir de cette "summa divisio" ancienne. » « Ces Etats Généraux y contribuent en favorisant les échanges, en familiarisant les avocats avec le droit administratif mais également en aidant à éclairer les personnes
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publiques sur des questions touchant au droit commun et sur lesquelles les avocats ont bien entendu un rôle à jouer », a-t-il ajouté. C’est Bernard Stirn, Président de la Section du Contentieux du Conseil d’Etat, qui a prononcé le discours officiel de la matinée de plénière organisée autour d’une table ronde sur le thème « Les actes et activités de droit privé et le juge administratif », représentant ainsi le Vice-président du Conseil d’Etat. Le Président Sauvé ayant été retenu à Madrid pour la réunion annuelle de l’ensemble des Conseils d’Etats et Cours Suprêmes de l’Union Européenne, il a ouvert les travaux de l’après-midi entièrement consacrés aux ateliers de formation pratiques autour des thèmes du droit du travail, de la construction et des travaux publics, de la concurrence et des propriétés publiques. Jean-René Tancrède
J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne
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Vie du droit
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Christian Charrière-Bournazel
Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05 Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède
Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appel Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International Publicité : Légale et judiciaire : Commerciale :
Champs émergents pour les avocats par Christian Charrière-Bournazel
Didier Chotard Frédéric Bonaventura
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2011
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Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.
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Comité de rédaction :
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e suis tout à fait heureux d'ouvrir ici cette journée consacrée aux actes et activités de droit privé appréhendés par le Juge administratif et n'étant pas aussi savant que vous l'êtes ici tous réunis, je voudrais tout de même vous dire ce que représente d'important ce colloque et cette réflexion que vous allez mener en commun sous l'égide des intervenants de prestige qui vont se succéder à la tribune. En réalité, nous avons changé de monde. Depuis l'arrêt Blanco qui a marqué une étape de notre évolution, on voit se dessiner un rapprochement intéressant entre les conceptions du Juge judiciaire et du Juge administratif. Je ne vais pas faire l'exposé qu'il revient à vous, les spécialistes, de faire. Mais tout de même je voudrais vous dire quel émerveillement a été de voir qu'en dehors de la sphère pénale le Juge civil a admis qu'il pouvait se prononcer sur des actes administratifs lorsqu'ils sont manifestement entachés d'illégalité ou qu'ils ne sont pas conformes au droit de l'Union Européenne, tandis que depuis l'arrêt du Tribunal des Conflits Société Green Yellow, le Conseil d'Etat s'engouffrant dans cette très passionnante brèche, a rendu son arrêt du 23 mars 2012, l'arrêt Fédération Sud SantéSociaux qui, de la même manière, estime pouvoir apprécier les conventions de droit privé. On sait que l'on ne transige pas sur les enjeux d'intérêt public, mais en ce qui concerne l'appréciation de rapports privés, dès lors qu'ils sont manifestement contraires à la loi ou contraires au droit de l'Union Européenne qui est notre socle commun, la juridiction administrative est fondée à les vérifier. Et, ce qui est intéressant, ce n'est pas de se dire que l'un empiète sur l'autre ou que l'on perd ses repères mais, au contraire, que l'on va vers l'unité. Ce sont les mêmes principes juridiques qui font la
sagesse de ceux qui sont appelés à juger et les conduisent vers ce qui paraît plus raisonnable, le manifestement illégal ou le socle commun européen étant nos piliers de référence. Il est donc tout à fait intéressant que sans se départir chacun de ce qui est son domaine, nos deux ordres judiciaires qui ne sont pas seulement une particularité française, montrent leur souci d'être cohérents et de pouvoir, dans l'intérêt même du progrès économique et du progrès social de l'entreprise, ne pas se renvoyer l'un à l'autre la balle, pour, finalement, faire en sorte que le temps n'entrave pas les progrès dont la société a besoin. Je me rappelle que ces débats, sans trahir le secret des délibérés, je les ai connus lorsque j'ai siégé au Conseil de la Concurrence où déjà ce mélange, au sens le plus pur du mot mélange, s'opérait lorsqu'il fallait se demander si telle disposition qui caractérise la propriété intellectuelle comme, par exemple, le droit de s'opposer comme auteur à ce que quelqu'un d'autre se serve de la création de l'autre pouvait être considéré comme une facilité essentielle ou une barrière à l'entrée. Ne devrait-on pas permettre à d'autres de se servir d'une création préalable, d'une numérotation, d'une nomenclature qui avait dans l'esprit public été la référence : il est tout à fait intéressant de voir comment le Juge concilie, et est amené à concilier en permanence, le respect de l'intérêt privé et les progrès nécessaires dans la société où nous ne sommes intelligents que les uns grâce aux autres, reprenant le mot de Valéry : « L'homme de génie est celui qui m'en donne ». Et c'est pourquoi je suis heureux, c'est ma transition Monsieur le Président Stirn, d'annoncer votre propre introduction, sachant quel magistrat vous êtes venant témoigner pour le Conseil d'Etat dont nous recevrons le VicePrésident cet après-midi, du souci que vous avez de cette justice à laquelle vous vous appliquez avec compétence, talent et humanité. Avec une ponctualité d'horloge, nous reprenons nos travaux à 14 heures 30 exactement. Je suis heureux de féliciter le public qui en est seul responsable, mais surtout Monsieur le Vice-
Les Annonces de la Seine - vendredi 31 août 2012 - numéro 53
Vie du droit
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Ces Etats Généraux permettent de mesurer et de prendre conscience des champs d'activités que les Avocats doivent investir, non pas dans l'esprit de s'enrichir, mais dans celui de servir et d'être utiles puisque, nous le savons, ce sont finalement trop peu d'Avocats qui s'intéressent au droit de l'environnement, de l'urbanisme, des collectivités Christian Charrière-Bournazel locales.
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au droit de l'environnement, de l'urbanisme, des collectivités locales. Il n'est pas question simplement du contentieux, mais aussi du conseil et des marchés publics, ainsi que l'assistance aux personnes publiques qui peuvent en avoir besoin. Tous ces champs qui s'ouvrent sont l'occasion, pour les Avocats, de faire preuve de leur compétence, de la conforter et de la mettre en pratique. En troisième lieu, ces Etats Généraux permettent d'échanger sur le fonctionnement de la justice administrative. Ce fut le cas des débats de ce matin qui furent tout à fait intéressants. C'est en même temps un lieu où l'on peut parler de la rédaction des écritures et des arrêts. L'effort de simplification qui a été accompli par les juridictions administratives est tout à leur honneur, la Justice se rapprochant, sans démagogie mais dans la plus grande clarté, de ceux qu'elle a mission de servir et au nom desquels elle est rendue. Enfin, je tiens à rappeler avec beaucoup de fermeté le souci qui a été celui du Conseil National des Barreaux d'intervenir dans la procédure actuellement pendante devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme de Strasbourg A propos du rapporteur public. Nous pensons que son évolution a été salutaire, à partir du moment où l'on a pu répondre à ses écritures ou à ses propos, où il ne délibère plus avec la juridiction dont il est membre. Ce n'est pas un procureur comme dans le judiciaire, à partir du moment où il est précisément là pour éclairer les parties sur ce qu'est sa position au lieu de la garder secrète dans le cadre d'un délibéré auquel il participerait. II est une garantie des droits de la défense et c'est la raison pour laquelle le Conseil National des barreaux en assemblée générale a décidé d'intervenir.
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Président du Conseil d'Etat qui est arrivé une minute avant l'heure et qui est donc ni en retard ni en avance, mais parfaitement ponctuel, ce qui donne l'exacte mesure de la perfection de la justice à laquelle il s'applique. Monsieur le Vice-Président, je suis particulièrement heureux de vous accueillir pour ces deuxièmes Etats Généraux du Droit Administratif qui remportent un succès réel puisque ce sont plus de 220 personnes qui étaient inscrites parmi lesquelles non seulement des conseillers d'Etat éminents, des Juges administratifs, des Professeurs de droit, mais aussi des Bâtonniers, des Avocats, des avocates, tous désireux d'approfondir leurs connaissances. Je voulais vous saluer avec une particulière déférence, non pas parce que je suis flagorneur
mais parce que vous n'êtes pas seulement haut, Monsieur le Vice-Président, vous êtes grand. Vous l'avez montré, en ayant le souci de présider une juridiction qui ne mélange pas les genres. On a observé, toutes ces années, le soin que vous avez pris de faire en sorte que ceux qui conseillent et ceux qui contrôlent ne soient pas ceux qui jugent; que les tribunaux du premier degré, auxquels vous vous êtes intéressé avec la même implication qu'à la plus haute juridiction, puissent évacuer le rôle trop encombré; vous avez raccourci les délais, bref je ne veux pas aller trop loin dans ce panégyrique qui ferait penser que je suis un flatteur et que j'essaie de capter par avance des faveurs que je ne mérite pas. Mais je voulais vous rendre cet hommage puisque c'est une occasion de le dire et que ce n'est pas la première fois que je vous vois. Ces Etats Généraux ont plusieurs objectifs et les remplissent puisqu'ils sont au fond la pépinière dans laquelle s'élaborent, ou le laboratoire dans lequel fermentent les idées et les projets. Il y a d'abord la formation des futurs avocats, ce qui est très important puisque grâce aux Avocats et Magistrats qui sont ici, on peut espérer une formation plus dense, plus intense, d'autant que vous recevez, et je tiens à vous en remercier, des stagiaires. Dans les juridictions administratives nos futurs confrères acquièrent une expérience qui est évidemment très audessus de tout cours magistral même si nos Professeurs sont remarquables. C'est une première réalité importante. La deuxième est que ces Etats Généraux permettent de mesurer et de prendre conscience des champs d'activités que les Avocats doivent investir, non pas dans l'esprit de s'enrichir, mais dans celui de servir et d'être utiles puisque, nous le savons, ce sont finalement trop peu d'Avocats qui s'intéressent
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Bernard Stirn
Améliorer le dialogue entre le Tribunal administratif et le Conseil d’Etat par Bernard Stirn ette année, le thème général choisi nous situe dans la réflexion historique et fait appel à l’analyse théorique. C’est en même temps un sujet tout à fait pratique, et vous l’avez souligné Monsieur le Président, que celui de l’appréciation par le juge administratif des actes et des activités de droit privé. On le constate en particulier dans les thèmes qui feront l’objet des ateliers de cet aprèsmidi, le droit du travail, le droit de la construction et des travaux publics, le droit de la concurrence, le droit des propriétés publiques. Dans ces domaines, la juridiction administrative est amenée à s’interroger sur des actes et sur des activités de droit privé. Les ateliers ne couvrent d’ailleurs pas la totalité du champ déterminé. Ainsi en matière de droit des étrangers, la situation individuelle, l’état civil, la validité d’un mariage, la portée de l’adoption sont également très souvent discutés devant le juge administratif. La dimension à la fois historique, théorique, et pratique de notre sujet laisse place néanmoins à un élément d’actualité tout à fait intéressant, là également le Président Charrière-Bournazel l’a souligné, puisque le Tribunal des conflits, par une décision du 17 octobre 2011, a rénové très profondément le cadre général dans lequel les questions préjudicielles doivent être posées entre les deux ordres de juridiction. Certes il ne s’agit pas de remettre en cause les principes historiques et constitutionnels sur lesquels reposent dans notre pays la séparation des ordres de juridiction. Ces principes s’inscrivent dans la longue histoire puisque,
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avant même les lois révolutionnaires des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, sous Louis XIII, peut-être sous la plume de Richelieu, l’é dit de Saint-Germain de février 1641 faisait déjà « très expresses inhibitions et défenses aux corps judiciaires de prendre à l’avenir connaissance d’aucunes affaires – c’était le français de l’époque - qui peuvent concerner l’Etat, l’administration et le gouvernement d’icelui ». La loi des 16 et 24 août 1790 s’est inspirée, y compris dans ses termes mêmes, de cet édit du roi Louis XIII. Ces principes, qui ont conduit au mécanisme des questions préjudicielles, conservent toute leur force, d’autant que le Conseil Constitutionnel a jugé, notamment dans sa décision “Conseil de la concurrence”, et vous l’avez rappelé Monsieur le Président, qu’ils avaient acquis valeur constitutionnelle, ce que la révision du 23 juillet 2008 a d’ailleurs expressément consacré. Si forts qu’ils soient, ces principes doivent néanmoins se conjuguer avec d’autres exigences. Ils ont en vérité commencé à le faire de longue date et la jurisprudence du Tribunal des conflits, avant même sa décision récente, avait apporté au mécanisme des questions préjudicielles un certain nombre d’assouplissements importants et parfaitement adaptés, en reconnaissant notamment la compétence du juge judiciaire pour apprécier la légalité des actes réglementaires portant une atteinte grave à la liberté individuelle ou au droit de propriété (TC, 30 octobre 1947, Barinstein) ou pour apprécier également la légalité des actes réglementaires en matière de fiscalité indirecte (TC, 7 décembre 1998, District urbain de l’agglomération rennaise c/ société des automobiles Citroën). La jurisprudence (TC, 5 juillet 1951, Avranches et Desmarets), puis, avec l’adoption du nouveau code pénal de 1994, la loi elle-même, ont en outre reconnu au juge pénal la plénitude de juridiction pour apprécier la légalité des actes administratifs. Il subsistait néanmoins des interrogations sur l’application
aujourd’hui des principes historiques issus de la décision du Tribunal des conflits Septfonds du 16 juin 1923. Il est intéressant d’observer, en ouverture de cette journée, que la récente décision du Tribunal des conflits, qui sera davantage commentée dans le long de la matinée, a combiné les principes traditionnels avec deux exigences nouvelles, d’un côté celle d’une bonne administration de la justice, et notamment d’un délai raisonnable de jugement des affaires, et d’un autre côté, là nous retrouvons l’Europe, les particularités du droit de l’Union européenne. La décision du Tribunal des conflits peut être située par rapport à la jurisprudence que la Cour de cassation avait antérieurement développée, en partant d’une certaine lecture de l’article 55 de la Constitution pour affirmer, à partir de la règle constitutionnelle de supériorité des traités sur les lois, la compétence du juge judiciaire pour apprécier la compatibilité d’un acte administratif avec le droit conventionnel ou avec le droit de l’Union européenne. Cette lecture de l’article 55 est condamnée par la décision du Tribunal des conflits qui rappelle que, une chose est la hiérarchie des normes établie par la Constitution, autre chose est la séparation des ordres de juridiction, principe qui s’ancre également au niveau constitutionnel. La hiérarchie entre les traités et les lois n’a donc pas d’incidence sur la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Mais le Tribunal des conflits, après avoir posé et rappelé cette position de principe, a redéfini les conditions dans lesquelles les deux ordres de juridiction sont mutuellement conduits à s’interroger par voie de question préjudicielle. Sa décision s’inspire de considérations tirées les unes de la bonne administration de la justice, les autres de la correcte application du droit de l’Union européenne. La bonne administration de la justice conduit le Tribunal à décider que, lorsqu’il apparaît manifeste au vu d’une jurisprudence établie qu’un acte administratif est entaché d’illégalité, le juge judiciaire peut le constater de lui-même sans avoir à poser une question préjudicielle au juge administratif. On voit d’ailleurs là peut-être un lien entre les deux thèmes de nos Etats Généraux puisque cette formule de jurisprudence établie évoque celle que le Conseil Constitutionnel a retenue dans le cadre de la question prioritaire de constitutionalité pour apprécier la conformité des lois aux droits et libertés garantis par la Constitution, compte tenu d’une jurisprudence établie du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation. Le Conseil d’Etat a fait sienne la jurisprudence du Tribunal des conflits dans la décision du 23 mars 2012, Fédération Sud santé, que vous avez également rappelée, Monsieur le Président, en la faisant jouer de manière réciproque pour l’appréciation par le juge administratif de la validité d’un acte de droit privé : dès lors qu’il résulte d’une jurisprudence établie de la Cour de cassation qu’un acte de droit privé est invalide, le juge administratif peut le constater de lui-même sans avoir à poser de question préjudicielle. Du point de vue de la bonne administration de la justice, c’est un progrès important que le Tribunal des conflits vient d’apporter. Le Tribunal des conflits ajoute que ces règles générales s’appliquent sous réserve des particularités du droit de l’Union européenne.
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Vie du droit Tirant toutes les conséquences de l’ordre juridique propre que constitue le droit de l'Union, il juge que lorsqu’est en cause la conformité d’un acte administratif et réciproquement d’un acte de droit privé au regard des exigences du droit de l’Union, tout juge peut constater de lui-même la méconnaissance éventuelle du droit de l’Union, sans qu’il y ait besoin d’une jurisprudence établie, sauf à poser, en cas de difficulté sérieuse, une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne. Chaque ordre de juridiction applique ainsi pleinement le droit de l’Union européenne, en épuisant totalement sa compétence, sous la seule réserve d’une difficulté d’interprétation ou d’appréciation de validité d’un acte de droit de l’Union, qui doit être renvoyée à la Cour de justice de Luxembourg. C’est une jurisprudence d’autant plus intéressante qu’elle s’inscrit elle-même dans un courant jurisprudentiel que le Conseil d’Etat a beaucoup développé ces dernières années et qui tire toutes les conséquences de l’ordre juridique intégré que constitue l’ordre de l'Union, de plus en plus distinct de l’ordre international. Au fond, il n’y a pas si longtemps, on regardait un petit peu le droit de l'Union comme un élément du droit international. De plus en plus, le droit de l’Union Européenne se
préjudicielle étant uniquement susceptible d’un appel devant le Conseil d’Etat. C’est l’une des rares compétences d’appel conservées par le Conseil d’Etat. Les cours administratives d’appel n’interviennent donc pas et la question préjudicielle est traitée à deux niveaux : le tribunal administratif et le Conseil d’Etat en appel. Quand le juge administratif interroge le juge judiciaire, il en va différemment. Toute la chaîne se déroule. On commence, par exemple, par le tribunal de grande instance, puis par la cour d’appel, et enfin par la Cour de cassation, éventuellement avec un renvoi après cassation à la cour d’appel. Le Président Arrighi de Casanova, qui va présider dans quelques minutes la première table ronde, a eu, quand il était président de la première sous- section, beaucoup d’exemples de questions préjudicielles par nature délicates en droit social ou en droit du travail. S’il y a question préjudicielle, c’est qu’il y a difficulté sérieuse, avec un risque réel que l’affaire se poursuive et dure longtemps, très longtemps, trop longtemps. Il faudrait donc adapter nos règles de procédure pour mettre en place un système à deux niveaux seulement dans chacun des ordres de juridiction. Le plus adapté serait probablement une décision d’un premier juge avec uniquement un pourvoi en cassation, ce qui conduirait, du côté administratif, à remplacer
Agenda
51ÈME CONGRÈS NATIONAL DES EXPERTS-COMPTABLES
Du chiffre à la lettre : l’expert-comptable de justice et la sincérité de l’information financière 20 et 21 septembre 2012 Centre des Congrès Pierre Baudis 11, esplanade Compans-Caffarelli 31000 TOULOUSE Renseignements : 01 44 90 30 00 www.notaires.fr 2012-606
77ÈME CONGRÈS DE LA CNA
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La bonne administration de la justice conduit le Tribunal à décider que, lorsqu’il apparaît manifeste au vu d’une jurisprudence établie qu’un acte administratif est entaché d’illégalité, le juge judiciaire peut le constater de lui-même sans avoir à poser une Bernard Stirn question préjudicielle au juge administratif.
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distingue du droit international général par des règles qui lui sont propres et dont le Conseil d’Etat a tiré beaucoup de conséquences. Mais ce serait là un thème pour les troisièmes Etats Généraux. Ces évolutions particulièrement intéressantes apportent un élément d’actualité aux débats qui vont se poursuivre tout au long de la journée. Je voudrais terminer en évoquant peut-être deux souhaits. Après tout, les Etats Généraux sont aussi une certaine forme de tribune et cela peut être l’occasion de lancer quelques idées ou quelques réflexions pour l’avenir sur le thème qui nous intéresse. Je crois que, après la très heureuse simplification que vient d’apporter le Tribunal des conflits, nous pourrions songer dans les années qui viennent à deux éléments procéduraux qui contribueraient à améliorer le cadre du dialogue nécessaire et confiant entre les deux ordres de juridiction. La première piste serait d’instituer des deux côtés un mécanisme à seulement deux niveaux. Tel est déjà le cas du côté du juge administratif, où les questions préjudicielles sont examinées en principe par les tribunaux administratifs, sauf si elles concernent un acte qui relève directement de la compétence du Conseil d’Etat, le jugement rendu par le tribunal administratif en réponse à la question
l’appel, d’ailleurs un peu désuet devant le Conseil d’Etat aujourd’hui en matière de question préjudicielle, par un pourvoi en cassation, et à prévoir du côté judiciaire, que le Tribunal saisi statue en dernier ressort avec uniquement un pourvoi en cassation. L’autre élément procédural d’amélioration, qui intéresse d’ailleurs directement les avocats, pourrait consister à ce que les questions préjudicielles, quand elles demeurent nécessaires, et éventuellement dans ce cadre juridictionnel simplifié, soient directement posées par le tribunal à la juridiction de l’autre ordre. Aujourd’hui, le juge qui s’arrête sur une question préjudicielle renvoie aux parties le soin de se pourvoir, ce qui est complexe pour les parties qui ne comprennent pas forcément la portée de la question, même bien éclairées par leurs avocats, et qui peuvent éprouver une difficulté pour déterminer quelle est la juridiction de l’autre ordre qu’il faut saisir. Cette médiation par les parties contribue à retarder la question préjudicielle et conduit parfois à l’enliser complètement, lorsque les parties restent passives. Un mécanisme dans lequel le juge de la question préjudicielle s’adresserait directement, et là aussi ce serait un élément de dialogue des juges, au juge de l’autre ordre de juridiction pourrait, là encore, simplifier notre dispositif.
Les nouveaux métiers de l’Avocat 11 au 13 octobre 2012 Opéra Comédie - 34000 MONTPELLIER Renseignements : 04 67 60 95 23 congres.cna.monpellier@gmail.com 2012-607
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Avocat : une profession unie dans sa diversité 27 au 29 septembre 2012 Hôtel Martinez - 06400 CANNES Renseignements : www.avocats-conseils.org mc.midavaine@avocats-conseils.org 2012-603
5ÈME COLLOQUE DE L’AMF
Commission des sanctions de l’AMF 4 octobre 2012 Palais Brongniart Place de la Bourse - 75002 PARIS Renseignements : 01 53 45 60 00 2012-604
COLLOQUE CYCLE HISTOIRE ET JUSTICE 2012 : LES ÉCRIVAINS EN JUSTICE
Responsabilité pénale de l’auteur et éthique de l’écrivain (XIXème - XXIème siècles) 4 octobre 2012 Cour de cassation - 75001 PARIS Renseignements : www.courdecassation.fr
Les Annonces de la Seine - vendredi 31 août 2012 - numéro 53
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Vie du droit administration de la justice et au bon fonctionnement de notre système dualiste. Si le juge administratif n'est en principe pas compètent pour connaitre d'actes de droit privé (I), les dérogations, nombreuses et justifiées, a ce principe (II) conduisent recommander une rationalisation des mécanismes de répartition des compétences juridictionnelles existants (III).
Jean-Marc Sauvé
I. Le juge administratif est, du fait même de son existence, par principe tenu de ne pas se prononcer sur des actes de droit privé
D.R.
A. Le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires et l'idée que le droit applicable aux personnes publiques est un droit spécifique sont aux fondements mémés de l'existence de la juridiction administrative et, par suite, du dualisme juridictionnel
Le juge administratif et les actes et activités de droit privé par Jean-Marc Sauvé(1) l n'y a pas, écrivait mon illustre prédécesseur, Edouard Laferrière, « de matières juridiques où la subtilité soit plus nuisible et la mobilité moins permise que les questions de compétence. Les solutions qui leur sont données doivent être facilement comprises, parce qu'elles sont destinées à guider les justiciables; elles doivent être stables, parce qu'elles tracent des règles aux juges et que ceuxci seraient moins portés à les suivre s'ils voyaient leurs auteurs s'en affranchir eux-mêmes »(2) La nécessaire stabilité des solutions en matière de compétence apparaît en effet comme un point cardinal d'équilibre d'un système juridique. Toutefois, les débats de ce matin, ainsi que l'introduction qu'a prononcée le président Stirn, conduisent d'emblée à s'interroger sur la capacité du système juridique français à proposer des solutions simples et stables en matière de répartition des compétences. La question particulière de la manière dont le juge administratif appréhende les actes et activités
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de droit privé, thème cette journée, peut donner corps à ces doutes. Il faut donc remercier les organisateurs de ce colloque de la poser et se féliciter d'une initiative qui voit, au cours de plusieurs débats et ateliers, des juges, des avocats et des représentants de la doctrine confronter leurs points de vue sur ce sujet. Le rapprochement dans le titre de ces Etats généraux des termes « juge administratif », d'une part, et « actes et activités de droit privé », d'autre part, relève de l'oxymore ou de la contradiction. Le juge administratif est en effet le juge qui, en principe, ne traite pas des actes et activités de droit privé, lesquels ressortissent à la compétence du juge judiciaire. Pourtant, ce juge est régulièrement confronté à de tels actes et activités, soit au principal, soit de manière incidente(3). De fait, tous les jours, dans chaque dossier contentieux ou presque, le juge administratif est amené à prendre en compte, d'une manière ou d'une autre, des actes de droit privé. II n'y a à cela rien que de très banal. La question devient toutefois bien plus ardue, des lors que, par exemple, la validité de l'acte de droit privé est contestée et que, de l'issue de cette interrogation, dépend la solution du litige au principal. La manière dont le juge administratif traite de telles questions est alors essentielle non seulement à la solution de certaines espèces, mais de manière plus générale à la bonne
La loi des 16-24 août 1790, « loi salique de notre droit administratif » disait le doyen Vedel (4), ainsi que le décret du 16 fructidor an III ont exclu, on le sait, de la compétence des tribunaux « ordinaires » les litiges relatifs aux fonctions administratives ou aux actes des administrateurs. Ainsi que l'ont montré notamment les travaux de Jacques Chevallier, la loi des 16-24 août ne préjugeait en réalité en rien de la question de l'existence d'une juridiction administrative (5) et, à tout le moins, il est possible, à la suite du doyen Vedel, de dire que l’article 13 de cette loi aurait pu, « sans infidélité patente », être interprété différemment (6).Il n'en reste pas moins que les détours de l'histoire en ont voulu autrement, créant ce paradoxe selon lequel « le principe de séparation des autorités administratives et judiciaire a été établi en quelque sorte sans qu'on l'ait voulu » (7). La juridiction administrative s'est ainsi progressivement affirmée comme autonome, appliquant un droit distinct du droit commun mis en œuvre par les tribunaux judiciaires, et donnant par suite naissance au principe de la liaison de la compétence et du fond consacré, entre autres, par l'arrêt Blanco (8). II ressort de ce qui précède un autre fondement au dualisme juridictionnel, qui repose sur l'idée d'exorbitance. Le droit public est exorbitant du droit commun, pour la simple raison que, selon les termes mêmes du commissaire du gouvernement David, « il nous semble impossible en bonne raison et en bonne justice d'assimiler complètement l'Etat à un simple particulier ». Et la reconnaissance de cette exorbitance, c'està-dire d'un droit distinct du droit conçu jusqu'alors comme commun, implique, dans l'histoire juridique française, l'existence de deux ordres de juridiction(9). Dans la ligne d'une partie de la doctrine et des conclusions de plusieurs rapporteurs publics, dont je partage entièrement l'analyse (10), si la loi des 16 - 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III édictent une prohibition pour l'ordre judiciaire, ni ces textes, ni aucun autre n'instaure une interdiction symétrique pour le juge administratif au regard des actes de droit privé. Cette asymétrie des fondements dont les raisons historiques sont évidentes - il n'y avait pas alors de juge administratif et le législateur
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Vie du droit révolutionnaire entendait d'abord protéger les pouvoirs publics de l'immixtion des juges - a été compensée par les évolutions historiques subséquentes et l'idée selon laquelle le juge judiciaire est le juge naturel des actes de droit privé. Dès lors, si les fondements de leurs compétences diffèrent, il n'en demeure pas moins que chaque ordre de juridiction apparaît comme devant, sauf exception, se dessaisir de toute contestation ne rentrant pas dans le champ de ses attributions, que celles-ci soient protégées par la Constitution ou la loi ou qu'elles procèdent de la spécialisation respective des ordres de juridiction. La situation semble dès lors plutôt claire et les empiètements du juge administratif sur les compétences du juge judiciaire, ou inversement, ne peuvent qu'être limités. Ainsi, comme l'a dit le Tribunal des conflits dans son déjà célèbre
nature » du juge judiciaire : état des personnes, nationalité, droit de la propriété et, bien sûr, atteintes à la liberté individuelle. La ligne de partage n'est pas aisée à tracer, même lorsque le législateur décide de l'attribution à un juge de certaines questions. Les après controverses générées par certaines solutions, comme en matière de sentences arbitrales internationales, ne doivent donc pas étonner (16) ; elles trouvent cependant toujours, d'une manière ou d'une autre, a finalement s'apaiser. Comme on le voit, la répartition des litiges entre les ordres de juridiction, que ces questions se posent par la voie de l'action ou de l'exception, est parfois complexe. l'importance du tribunal chargé de régler les conflits d'attribution entre les ordres de juridiction, créé par le Constituant de 1848 et rétabli par la loi du 24 mai 1872 (17). D'où l'importance, également, du mécanisme
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La manière dont le juge administratif traite de telles questions est alors essentielle non seulement à la solution de certaines espèces, mais de manière plus générale à la bonne administration de la justice et au bon fonctionnement de notre système Jean-Marc Sauvé dualiste.
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arrêt SCEA du Chéneau du 17 octobre 2011, dans sa première partie, avant le « Toutefois » qui en change substantiellement le cours, « en vertu du principe de séparation des autorités administratives et judiciaire [...] il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître des recours tendant à l'annulation ou à la réformation des décisions prises par l'administration dans l'exercice de ses prérogatives de puissance publique [...] De même, le juge administratif est en principe seul compétent pour statuer [...] sur toute contestation de la légalité de telles décisions, soulevée à l'occasion d'un litige relevant à titre principal de l'autorité judiciaire ». La compétence du juge administratif a de surcroît, on le sait, été constitutionnellement protégée par la décision du Conseil constitutionnel du 23 janvier 1987, celle du 28 juillet 1989 (12) ayant d'ailleurs censure une disposition législative instaurant un bloc de compétence qui ne respectait pas cette protection. B. Sauf exceptions, le principe est donc que le juge administratif est seul compétent pour connaitre des actes administratifs et que le juge judiciaire est compétent pour apprécier le sens ou la validité des actes de droit privé
Il en va ainsi lorsqu'il est nécessaire de porter une appréciation sur l'état ou la nationalité d'une personne (I3) ou encore, sur un titre de propriété (I4), même si le juge administratif a pu, dans certains cas, développer une jurisprudence innovante en donnant, par exemple, une réponse conditionnelle, c'est-à-dire en déclarant l'appartenance d'un bien au domaine public, sous réserve de la propriété par la personne publique (15). Ces exemples renvoient aux matières, évoquées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 23 janvier 1987, qui relèvent « par
des questions préjudicielles. Je reviendrai sur ces deux points. Dans tous ces cas, dès lors que se pose de manière incidente une question sérieuse relevant du juge judiciaire, nécessaire à la solution du litige, il appartient au juge administratif de surseoir à statuer jusqu'au règlement de celle-ci. En d'autres termes, pour reprendre une formule de Laferrière, l'idée selon laquelle le juge de l'action est le juge de l'exception « s'efface, en principe, devant la règle constitutionnelle de la séparation des pouvoirs » ’18). Il ne s'agit toutefois que d'un principe, qui souffre de nombreuses dérogations.
II. Les exigences de bonne administration de la justice, ainsi que l'évolution des sources du droit administratif, imposent au juge administratif de connaître, sous certaines conditions, d'actes de droit privé Deux considérations, de nature différente, conduisent à brouiller la frontière existante: le fait, d'une part, que certains droits transcendent les frontières tracées en interne (A) et, d'autre part, la nécessité d'une bonne administration de la justice (B). Certaines dérogations, sur lesquelles je ne reviendrai pas tant elles sont connues, résultent pour leur part de critères de compétence concurrents, tels que les matières réservées par nature à l'autorité judiciaire, comme l'emprise et la voie de fait par exemple.
A. Certaines dérogations tiennent à l'évolution des sources du droit
S'agîssant du droit administratif, la distinction entre droit privé et droit administratif a été progressivement repensée: il en découle sans aucun doute, ainsi que le souligne la doctrine, une certaine « banalisation du droit des personnes publiques » (19) « une publicisation du droit privé à laquelle répond une privatisation du droit public » (20) dont l'origine est ancienne, puisqu'elle remonte, pour les actes de gestion privée des personnes publiques, aux conclusions de David sur l'arrêt Blanco, de Romieu sur l'arrêt Terrier et à l'arrêt Société des Granits porphyroïdes des Vosges de 1912. L'arrêt du Tribunal des conflits Société commerciale de l'ouest africain a, dans le prolongement de ces arrêts engagé dès 1921 une mutation profonde du droit applicable aux services publics industriels et commerciaux dans leur ensemble et, partant, sur la compétence juridictionnelle. L'évolution des sources internationales et européennes conduit de son côté, dans des matières déterminées, à une certaine forme d'unification du droit applicable qui transcende la distinction entre les régimes juridiques différents, propres, selon le cas, aux personnes publiques et aux personnes privées. Ces sources européennes ne font, en effet, le plus souvent pas de distinction entre un travailleur de droit privé ou un fonctionnaire (21) ou entre une entreprise privée et une entreprise publique (22). Elles conduisent ainsi à estomper les critères organiques, en tant que ceux-ci gouvernent la détermination du droit applicable. De même, les sources constitutionnelles jouent un rôle, notamment en permettant expressément des dérogations législatives au principe de séparation des pouvoirs aux fins de créer des blocs de compétence (23). La décision SCEA du Chéneau (24), commentée par le président Stirn ce matin, met en exergue le cas spécifique du droit de l'Union européenne dont l'effectivité doit être assurée par les Etats membres, au besoin, pour le juge national, en laissant inappliquée toute disposition contraire. De même qu'une question incidente de constitutionnalité, fût-elle prioritaire au regard du droit national, ne peut faire échec à l'application immédiate du droit de l'Union ou à une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union (25), l'étendue en droit interne du contrôle juridictionnel par la voie de l'exception se trouve elle aussi affectée par le principe d'effectivité, puisque le juge saisi, même s'il n'est pas compétent au regard du principe de séparation, doit exercer pleinement son contrôle et, en cas de difficulté d'interprétation, saisir lui-même la Cour de justice de l'Union à titre préjudiciel ou, « lorsqu'il s'estime en état de le faire, appliquer le droit de l'Union », sans être tenu, dans chacune des deux hypothèses, de saisir, à titre préjudiciel, l'autre ordre de juridiction. Il existe ainsi une réelle harmonie et une grande unité d'inspiration entre les arrêts SCEA du Chéneau et Meiki et Abdeli qui limitent le nombre des questions incidentes en droit interne ou en relativisent la priorité pour les rendre compatibles avec le droit de l'Union. Des droits spécialisés contribuent également à estomper la distinction des droits applicables et des juges compétents. Cela est notamment
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Vie du droit le cas, par exemple, en ce qui concerne le droit de la concurrence, dont il sera question cet après-midi. Dans sa décision Ville de Pamiers, le Tribunal des conflits a ainsi réservé la compétence du juge judiciaire en ce qui concerne l'appréciation des pratiques anticoncurrentielles, pour autant que les personnes publiques se livrent à des activités de production, de distribution, de service. Mais lorsque ces personnes édictent un acte administratif en faisant usage de prérogatives de puissance publique, le juge administratif demeure compétent: c'est le cas, on le sait, pour les contrats administratifs (26), les actes de gestion du domaine public (27) ou encore les mesures de police administrative (28). C'est à ce juge qu'il revient de faire application des principes du droit de la concurrence. B. La bonne administration de la justice peut également conduire le juge à déroger à la séparation des autorités, administratives et judiciaires, telle qu'elle résulte de notre tradition législative et constitutionnelle
Cette notion est expressément énoncée dans la décision SCEA du Chéneau et « elle constitue [...] la matrice dont s'évincent les deux séries d'exceptions qui sont apportées à la règle de principe dégagée par la jurisprudence Septfonds » (29). Le Tribunal des conflits, tout en rappelant, je l'ai cite, le principe de séparations des autorités administratives et judiciaires, atténue la règle posée par la jurisprudence Septfonds, en soulignant que seules les questions sérieuses peuvent faire l'objet d'une question préjudicielle et qu’« il en va autrement lorsqu'il apparait manifestement, au vu d'une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal » (30). Deux mois plus tard, dans une décision “Société Green Yellow” (31), le Tribunal des conflits a fait une application positive de ce nouveau principe, en soulignant que la jurisprudence relative au principe de nonrétroactivité des actes administratifs étant bien établie, il apparaissait manifestement que la contestation pouvait être tranchée par le juge judiciaire. A dire vrai, certaines solutions antérieures à la jurisprudence du Tribunal des conflits étaient déjà dictées par la bonne administration de la justice et l'unité du procès. Il en va ainsi de solutions classiques. Le juge pénal est, par exemple, compétent pour apprécier la légalité des actes administratifs individuels comme réglementaires (32). Exemple moins souvent mis en exergue, le juge administratif accepte de vérifier la régularité des actes de représentation des personnes morales de droit privé, au regard de leurs statuts, sans qu'il n'y ait lieu, en cas de difficulté, de surseoir a statuer et d'interroger à titre préjudiciel le juge judiciaire. Le président Labetoulle expliquait cette jurisprudence « par l'idée d'une plénitude de compétence de tout juge pour apprécier la régularité de sa saisine » (33). Cette exception est de surcroît enserrée dans certaines limites (34). Les dérogations aux règles habituelles de la répartition des compétences, qui sont dictées par la bonne administration de la justice, ne sont pas unilatérales et peuvent ainsi conduire le juge administratif à s'introduire dans la sphère des rapports de droit privé. On en trouve un exemple lorsqu'une contestation sérieuse s'élève
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sur la validité d'un accord collectif ou de l'une de ses clauses (35). La très récente décision Fédération Sud Santé Sociaux(36) de la section du contentieux du Conseil d'Etat permet de combiner en cette matière les apports spécifiques de la jurisprudence SCEA du Chéneau avec une autre exception au principe de séparation, initiée depuis plusieurs années au sein de la juridiction administrative, selon laquelle, dans l'hypothèse où le législateur a prévu que les mesures prises pour l'application de la loi seront définies par un accord collectif conclu entre les partenaires sociaux, dont l'entrée en vigueur est subordonnée à l'intervention d'un arrêt ministériel d'extension ou d'agrément, il appartient au juge administratif, compétemment saisi d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre cet arrêté, de se prononcer lui-même sur les moyens mettant en cause la légalité de ce cet accord, compte tenu de sa nature particulière et alors même qu'il constitue un acte de droit privé. Ainsi que cela ressort nettement des conclusions de la rapporteure publique Claire Landais, cette solution est bien sûr dictée par l'exigence d'une bonne administration de la justice. En dehors de cette exception, doit en outre trouver à s'appliquer la jurisprudence SCEA du Chéneau pour les arrêtés d'extension d'accords collectifs : il n'y a pas lieu de poser une question préjudicielle si le juge administratif peut accueillir la contestation au vu d'une jurisprudence établie. Si le dualisme juridictionnel pousse à un certain cloisonnement des compétences, il impose donc aussi d'y déroger, le plus souvent pour des raisons de bon sens et de bonne justice. Cette question soulève, de manière plus générale, celle des mécanismes permettant la répartition des compétences ou le dialogue entre les ordres de juridiction, qui pourraient être rationalisés.
III. Les mécanismes de dialogue et de répartition des compétences entre les juridictions pourraient être rationalisés Les questions préjudicielles, comme la technique des blocs de compétence, ont été le moyen principal de faire fonctionner dans la durée un dualisme juridictionnel « tempéré et, en quelque sort, accueillant a écrit le professeur Chapus. Sur ces points, comme en ce qui concerne le fonctionnement du Tribunal des conflits, des évolutions peuvent être envisagées, dictées là encore par le souci d'une bonne administration de la justice, tenant notamment au délai raisonnable de jugement et à la simplicité des solutions pour le justiciable. De telles simplifications peuvent être le fait tant du législateur que de la jurisprudence. A. L'organe répartiteur des litiges entre les ordres de juridiction, le Tribunal des conflits, pourrait tout d'abord faire l'objet d'évolutions
Je me suis déjà exprimé sur ce sujet en d'autres temps et d'autres lieux (38) et je ne ferai donc que reprendre rapidement deux propositions. En premier lieu, je ne pense pas qu'il soit possible
de faire l'économie d'une réforme de la présidence de ce tribunal, qui est susceptible de faire débat au regard de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Cette présidence devrait être assurée alternativement par un membre du Conseil d'Etat et un membre de la Cour de Cassation, comme c'est le cas pour la Vice-présidence du Tribunal des conflits. En remplacement du Garde des Sceaux, sans doute serait-il possible d'envisager la désignation d'un jurisconsulte qualifié, dont les compétences comme l'indépendance ne souffriraient pas de discussion et qui pourrait siéger soit en permanence, soit uniquement en cas de partage des voix. En ce qui concerne la saisine du tribunal, il serait utile de réfléchir à l'extension de la procédure, non pas obligatoire mais facultative, de renvoi au Tribunal des conflits par une juridiction souveraine, telle qu'elle a été instaurée par le décret du 25 juillet 1960, lorsque cette juridiction est confrontée à une difficulté sérieuse de compétence. Il pourrait ainsi être envisagé d'étendre cette procédure à l'ensemble des juridictions, en instaurant une question préjudicielle de compétence qui ferait intervenir ou non, comme filtre, le Conseil d'Etat ou la Cour de Cassation. Une telle ouverture, même mesurée, impliquerait de doter le Tribunal de nouveaux moyens. Mais elle limiterait les cas de prolongation du délai de règlement de la question de compétence qu'une intervention précoce et beaucoup plus en amont du juge des conflits permettrait d'éviter. B. Simplifier la répartition des compétences suppose également de rationnaliser la technique des blocs de compétence
Cette pratique, consistant à octroyer a un ordre de juridiction la compétence pour statuer, par dérogation aux règles traditionnelles de répartition des compétences, et dans le respect des principes constitutionnels gouvernant celleci, sur tous les litiges concernant un champ particulier, existe depuis longtemps : ainsi de la loi du 5 avril 1937 et de celle du 31 décembre 1957, qui confient respectivement au juge judiciaire le traitement des litiges relatifs à la responsabilité des enseignants (39) ou aux dommages causés par des véhicules, cette dernière loi dérogeant expressément à l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 ; ainsi également de la loi du 28 pluviôse an VIII qui réserve le contentieux des travaux publics au juge administratif. Même dans le domaine constitutionnellement protégé des compétences de la juridiction administrative, domaine qui est bien circonscrit, la décision du Conseil constitutionnel du 23 janvier 1987 a prévu la possibilité, dans l’intérêt même d'une bonne administration de la justice, d'unifier les règles de compétence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intéressé. Le Conseil d'Etat ne s'est jamais oppose à la constitution de tels blocs de compétence, dès lors qu'elle permet de garantir une meilleure administration de la justice. Ainsi, ces dernières années, a-t-il acquiesce à l'instauration d'un bloc de compétences au profit du juge judiciaire en matière de contrôle de l'homologation ou de refus d'homologation de la rupture conventionnelle du contrat de travail (41), afin d'éviter d'inextricables problèmes de compétence entre les deux ordres de juridiction.
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Vie du droit II a également proposé l'instauration d'un tel bloc au profit du juge judiciaire pour connaître des sanctions infligées par la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet, dans la mesure l'appréciation de la légalité des sanctions pouvait conduire à rechercher si les règles du code de la propriété intellectuelle, en particulier celles définissant le délit de contrefaçon, avaient été méconnues (42). Il semble toutefois que d'autres blocs de compétence, tels qu'ils ont pu être envisagés, ne soient pas justifiés. En matière de droit de la consommation, des amendements parlementaires déposés en 2011 ont ainsi propose de transférer au juge judiciaire
administratif, dont les compétences et le rôle en matière économique ne sont pas toujours correctement appréhendés. C - Enfin, il conviendrait de faire évoluer le droit applicable aux questions préjudicielles
Si les questions préjudicielles n'ont pas toujours existé en France (44) et si tous les ordres juridiques ne connaissent pas les questions préjudicielles, celles-ci tendent toutefois à se développer, en particulier compte tenu de l'entrecroisement de différents systèmes juridiques. Le succès de la question préjudicielle devant la Cour de Justice de l'Union européenne, comme celui de la question prioritaire de constitutionnalité en France, en
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Les dérogations aux règles habituelles de la répartition des compétences, qui sont dictées par la bonne administration de la justice, ne sont pas unilatérales et peuvent ainsi conduire le juge administratif à s'introduire dans la sphère des rapports de droit privé. On en trouve un exemple lorsqu'une contestation sérieuse s'élève sur la validité d'un accord collectif ou de l'une de ses Jean-Marc Sauvé clauses.
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témoignent. Ces questions font toutefois l'objet d'appréciations nuancées, entre « utile collaboration » et « inutile complexité », qui ont fort bien été synthétisées et sur lesquelles je ne reviendrai pas (45). Outre les simplifications apportées par la récente décision SCEA du Chéneau, déjà largement commentée, je souhaiterais saisir cette occasion où des représentants de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif sont réunis en présence de la doctrine et du barreau, pour souligner la nécessité de remédier à deux difficultés. La première tient à la dissymétrie qui existe entre les deux ordres de juridiction en ce qui concerne les voies de recours contre la décision rendue en première instance en
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l'intégralité du contentieux des sanctions énumérées à l'article L.141-1 du code de la consommation (43). Un tel contentieux oppose la puissance publique à un opérateur privé : il est de l'essence même de la mission du juge administratif que celui-ci le tranche. La juridiction administrative est en outre parfaitement apte, par son organisation, ses méthodes de travail et ses délais de traitement, à exercer un contrôle pertinent et efficace des sanctions prononcées en cas de manquement des opérateurs économiques aux règles qui pèsent sur eux au titre du droit de la consommation. Ce transfert ne semblait donc pas opportun. Il révélait, au contraire, une forme de réserve injustifiée à l'égard du juge
matière préjudicielle. Si les appels formés à l'encontre des jugements rendus par les tribunaux administratifs en réponse à une question préjudicielle posée par le juge judiciaire relèvent directement du Conseil d'Etat, il n'en va pas de même dans l'ordre judiciaire: la cour d'appel y demeure compétente en appel et la Cour de cassation peut être ultérieurement saisie -avec le risque supplémentaire de renvoi à une cour d'appel, même s'il est très éventuel. - Il me semble que les voies de recours contre les jugements rendus à la suite de questions préjudicielles devraient, dans les deux ordres, être unifiées et simplifiées afin de permettre de prévenir le risque de procès déraisonnablement longs. Dans ce cadre, il serait plus efficace que le Conseil d'Etat devienne juge de cassation des questions préjudicielles renvoyées à l'ordre administratif et, dans l'ordre judiciaire, que les jugements des tribunaux de grande instance ne puissent plus être frappés que d'un pourvoi en cassation, devant la Cour de cassation, à l'exclusion de tout appel. Il me semble également regrettable, et c'est mon second point, qu'il revienne aux parties d'accomplir les diligences nécessaires lorsque le juge du principal sursoit à statuer et pose une question préjudicielle. Il serait hautement souhaitable, pour des raisons de sécurité juridique, de simplicité d'accès à la justice et de délai raisonnable de jugement, que le Juge du fond saisisse directement le Juge compétent pour connaître de la question préjudicielle. Un Juge est tout de même plus qualifié qu'un justiciable pour déterminer le juge qui est compétent pour répondre à la question préjudicielle qu'il a lui-même identifiée. Et ce faisant, sa première décision ne se bornerait pas à déterminer le champ et les motifs de son incompétence ; elle désignerait le juge compétent et ferait ainsi d'une pierre, deux coups. L'existence même d'un juge spécialisé de l'administration conduit ce juge à se tenir l'écart des actes de droit privé : il n'est tout simplement pas légitime pour en connaitre. Vis-à-vis du juge administratif, le principe révolutionnaire de la
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Les actes de droit privé relèvent évidemment bien sûr du juge judiciaire, comme les actes administratifs relèvent, selon une autre logique, du juge administratif. Les évolutions récentes du droit administratif conduisent toutefois à apporter des dérogations nouvelles aux exceptions déjà existantes à ce Jean-Marc Sauvé principe.
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séparation des pouvoirs est certes inopérant : c'est la logique de spécialisation et une certaine idée de la légitimité juridictionnelle qui prévalent en l’espèce. Par conséquent, les actes de droit privé relèvent évidemment bien sûr du juge judiciaire, comme les actes administratifs relèvent, selon une autre logique, du juge administratif. Les évolutions récentes du droit administratif conduisent toutefois à apporter des dérogations nouvelles aux exceptions déjà existantes à ce principe. Il semble notamment que la formule de Laferrière selon laquelle « dans le doute, le juge doit [...] exagérer plutôt que restreindre sa déférence pour les pouvoirs d'un autre juge » soit de moins en moins vraie (46). Les juges doivent, c'est de plus en plus leur responsabilité, interpréter et apprécier la validité d'actes qui ne relèvent pas de leur compétence ordinaire. C'est une autre manière, qui n'est pas inconnue dans d'autres ordres juridiques, de faire vivre le dialogue des juges. à cet égard, l’arrêt SCEA du Chéneau fait immanquablement songer, pas seulement à la décision Melki et Abdeli, mais aussi à la décision Cilfit (47) de la CJUE qui mentionne expressément, parmi les limites a l'obligation de renvoi préjudiciel, la notion de jurisprudence établie de la Cour, voire même l’arrêt Foto-Frost (48) sur l'étendue et les limites de l'appréciation par les juridictions nationales de la validité du droit de l'Union. Dans l'ordre interne, comme dans celui de l'Union, s'imposent à tous les juges le respect des compétences des autres juridictions, mais aussi le service de la bonne administration de la justice, le respect de délais raisonnables de jugement et l'exigence de coopération loyale entre juges concernés par le règlement d'un même litige. Sur des thématiques anciennes — car l’arrêt Septfonds a près de 90 ans —, nous découvrons ainsi année après années les nouvelles facettes de la responsabilité des juges. Les ateliers de cet aprèsmidi permettront, je n'en doute pas, d'explorer et d'éclairer, dans des champs multiples du droit, les zones d'ombre qui subsistent mais aussi de mettre en évidence les réponses qui peuvent leur être apportées. Je forme a leur intention des vœux chaleureux de succès.
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Note : 1) Texte écrit en collaboration avec M. Olivier Fuchs, conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, chargé de mission auprès du vice-président du Conseil d'Etat. 2) E. Laferrière, Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, Paris, Berger-Levrault, 1887, tome 1, préface, p. XIII.1 3) Des personnes privées peuvent aussi dans le cadre de leurs activités, édicter des actes administratifs. Je n'aborderai pas ce cas qui relève d'une logique différente et qui conduit A qualifier les actes pris par ces personnes, dès lors qu'ils révèlent l'utilisation de prérogatives de puissance publique dans l'exercice d'une mission de service public, d'actes administratifs, rapprochant de fait ces activités d’ « activités publiques ». 4) Le doyen Vedel écrivait que la loi des 16-24 août 1790 « est comme la loi salique de notre droit administratif » : non seulement car ce texte « est reçu comme proclamant une illégitimité ou, si l'on préfère, une incompétence qui toucherait à l'usurpation », mais de surcroit du fait des « doutes que l'on peut élever quand la pertinence de l'interprétation qu'il a reçue » (G. Vedel, « La loi des 16-24 août 1790: Texte ? Prétexte ? Contexte ? », RFDA, 1990, p. 698). 5) J. Chevallier, L'élaboration historique du principe de séparation de la juridiction administrative et de l'administration active, Paris, LGDJ, 1970 ; J. Chevallier, « Du principe de séparation au principe de dualité », RFDA, 1990, p. 712. 6) G. Vedel, op. cit., p. 13. 7) P. Delvolvé, « Paradoxes du (ou paradoxes sur le) principe de séparation des autorités administratives et judiciaires », in Mélanges Chapus, Paris, Montchrestien, 1992, p. 135. 8) TC, 8 février 1873, Blanco, Rec. 1r sup. 61, conci. David; GAJA n°1. 9) Jean Rivero n'écrit pas autre chose lorsqu'il dit que «bien plus que la mythologie de la séparation des pouvoirs, c'est l'idée que deux droits, différents par leurs règles, leur technique, leur esprit, seront mieux appliqués par deux ordres de juridiction donc chacun se consacre à l'un de ces droits qui donne aujourd'hui sa justification à la dualité des juridictions » (« Le juge administratif, gardien de la légalité administrative ou gardien administratif de la légalité? », in Mélanges Marcel Waline, Paris, LGDJ, 1974, p. 701). Sur ce fondement, voir E. Saillant, L'exorbitance en droit public, Paris, Dalloz, 2011, p. 481-485. 10) Y. Gaudement, « Les questions préjudicielles devant les deux ordres de juridictions », RFDA, 1990, p. 764; voir aussi les éclairantes conclusions de C. Landais, sous CE, sect., 23 mars 2012, Fédération Sud Santé Sociaux, n° 331805. 11) Voir TC, 17 octobre 2011, SCEA du Chéneau, n° 3828, à paraître au Recueil ; AJDA, 2012, note M. Guyomar et X. Domino, p. 27. 12) Décision n°86-224 DC du 23 janvier 1987 ; décision n° 89-261 DC du 28 juillet 1989. 13) Récemment, le juge des référés a rejeté comme ne relevant pas de sa compétence les questions « sur l'état des personnes », des lors qu'un doute sérieux existe sur celles-ci, ni, par suite, la possibilité « d'ordonner des mesures d'expertise ou d'instruction propres a établir, le cas échéant, un lien de filiation, telles que celles prévues notamment à l'article 1611 du code civil » (CE, 11 mars 2010, M Niombo, n° 336326, Rec. p. 693). 14) CE, sect., 16 novembre, 1960, Commune du Bugue, n° 44537, Rec. p. 41; TC, 18 décembre 1995, Préfet de la Meuse, n° 02992, Rec. p. 504. 15) Le premier article du dispositif de l' arrêt Consorts Marquassuzaa (CE, 29 juin 1990, n° 77011, Rec. p. 188) spécifie ainsi qu'il « est déclaré que le talus et la murette servant d'assise à l'avenue Benjamin Dulau situés sur la parcelle revendiquée par les Consorts Marquassuzaa font partie du domaine public de la commune de Cauterets s'ils appartiennent à cette commune ». 16) TC, 17 mai 2010, Institut national de la santé et de la recherche médicale c. Fondation Letten F. Saugstad, n°3754, Rec. p. 580. Voir notamment, sous cet arrêt, les notes de P. Delvolvé (RFDA, 2010, p. 971), P. Cassia (AJDA, 2010, p. 1564) et E. Gaillard (JCP, 2010, n° 585). La solution retenue par le Tribunal des conflits consacre largement la compétence judiciaire en matière de recours a l'arbitrage pour les litiges impliquant des personnes publiques qui mettent en jeu les intérêts du commerce international. Le Tribunal des conflits réserve toutefois les recours dirigés contre de telles sentences, des lors qu'ils impliquent le contrôle de la conformité de cette sentence au regard des « règles impératives du droit public français », qui sont relatives « à l'occupation du domaine public ou à celles qui régissent la commande publique et applicables aux marches publics, aux contrats de partenariat et aux contrats de délégation de service public, ces contrats relevant d’un régime administratif d'ordre public ». En application du principe de la liaison de la compétence et du fond, le recours dirigé contre la sentence arbitrale relève, dans un tel cas, de la compétence du juge administratif. Cette solution est pleinement en accord avec les principes constitutionnels déjà mentionnés. Elle n'est par ailleurs pas susceptible de porter atteinte au bon fonctionnement de l'arbitrage en France, en particulier parce qu'elle repose sur des critères clairs, précis et délimités débouchant sur des solutions prévisibles. Au demeurant, la remise en cause de cette ligne de partage des compétences comporterait, en cas de recours a l'arbitrage, un risque élevé de contournement des règles impératives du droit public et, notamment, de celles de la commande publique. 17) R. Drago, « La loi du 24 mai 1872 », EDCE, 1973, p. 18) E. Laferrière, op. cit., p. 447. 19) J.-B. Auby, «Le mouvement de banalisation du droit des personnes publiques et ses limites », in Mélanges Auby, Paris, Dalloz, 1992, p. 3. 20) G. Eckert, «Droit administratif et droit civil », in P. Gonod, F. Melleray, P. Yolka, Traité de droit administra4f, Paris, Dalloz, 2011, t. 1, p. 608.
21) Voir par exemple CJCE, 9 septembre 2003, aff. C-285/01, Burbaud; CEDH, 19 avril 2007, Vilho Eskelinen c. Finlande, n° 63235/00. Toutefois l'assimilation entre travailleur relevant du droit privé et fonctionnaire public trouve sa limite pour les titulaires des emplois dont les attributions ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté ou comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique de l'Etat ou des autres collectivités publiques. Dans un premier temps, la CJCE a en effet jugé que les emplois dans l'administration publique étaient entendus comme ceux qui « comportent une participation, directe ou indirecte, à l'exercice de la puissance publique et aux fonctions qui ont pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l'État ou des autres collectivités publiques » (voir, notamment, 2 juillet 1996, Commission/Belgique, aff. C-173/94). En second lieu, la Cour a précisé que la dérogation à la libre circulation des travailleurs ne saurait être justifiée par le seul fait que des prérogatives de puissance publique sont attribuées par le droit national aux titulaires de l'emploi en cause. Ces prérogatives doivent être effectivement exercées de façon habituelle par lesdits titulaires, et ne doivent pas représenter une part très réduite de leur activité (voir, notamment, 30 septembre 003, Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Espanola, aff. C-405/01). 22) Ainsi, en droit de l'Union européenne, la nature de l'activité reste le critère déterminant pour la qualifier ou non d'activité économique, qu'elle soit assurée par une personne publique ou une personne privée; voir notamment CJCE, 27 avril 1991, aff. C-41/90, Höfner. 23) Décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987. Voir également les décisions n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001; n° 2001-451 DC du 27 novembre 2001 ; n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005 ; n° 2011-631 DC du 9 juin 2011. 24) TC, 17 octobre 2011, SCEA du Chéneau, n° 3828, à paraître au Recueil; AJDA, 2012, note M. Guyomar et X. Domino, p. 27. 25) CJUE, gde chambre, 22 juin 2010, Aziz Melki et Selim Abdeli, aff. jtes C-188/10 et C-189/10. 26) CE, sect., 3 novembre 1997, Société Million et Marais, n° 169907, Rec. p. 406. 27) CE, sect., 26 mars 1999, Société Hertz France c. Aéroports de Paris, n° 202256, Rec. p. 96. 28) CE, avis, 22 novembre 2000, Société L&P Publicités, Rec. p. 526. 29) M. Guyomar, X. Domino, op. cit., p. 27. 30) Arrêt SCEA du Chéneau précité. 31) TC, 12 décembre 2011, Société Green Yellow et autres, n° 3841, à paraitre au Recueil. 32) Article 111-5 du code pénal : « Les juridictions pénales sont compétentes pour interpreter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis ». Comme on le sait, le Tribunal des conflits (5 juillet 1951, Avranches et Desmarets, Rec. p. 638) et la Cour de cassation (Crim., 21 décembre 1961, Dame Leroux, Bull. n° 551, p. 1053) se sont opposés sur la question, le premier refusant la possibilité au juge pénal d'apprécier la légalité des actes individuels, au contraire du second qui le permettait si de tels actes servaient de base à la poursuite, mais non s'ils étaient invoqués en défense. 33) Conclusions sur CE, sect, 17 octobre 1975, Institut supérieur de droit et d'économie d'aménagement et de l'urbanisme, Rec. p. 515. 34) Sur ce dernier point voir Les grands arrêts du contentieux administratif, n° 31, § 15. 35) Pour une analyse détaillée, voir M. Guyomar, X. Domino, op. cit., p. 31 ainsi que les conclusions de C. Landais sous CE, sect., 23 mars 2012, Fédération Sud Santé Sociaux, n° 331805. 36) CE, sect., 23 mars 2012, Fédération Sud Santé Sociaux, n° 331805, à paraitre au Recueil, cette décision faisant suite, sur le contrôle d'un accord collectif étendu, aux décisions notamment aux décisions Union nationale de coordination des associations de militaires et autres (18 mai 1998, Rec. p. 196), Medef (11 juillet 2011, Rec. p. 363) Guillot (28 décembre 2009, aux tables) et Syndicats des agences de presse photographiques d 'information et de reportages (SAPHIR) (18 juin 2010, à publier au Rec). 37) R. Chapus, op. cit., p. 743. 38) J.-M. Sauvé, « La procédure. Introduction », in P. Gonod, L. Cadiet (dir.), Le Tribunal des conflits. Bilan et perspectives, Paris, Dalloz, col: Thèmes et Commentaires, 2009, p. 53. 39) Article L.911-4 du code de l'éducation, issu de la loi du 5 avril 1937 modifiant les règles de la preuve en ce qui concerne la responsabilité civile des instituteurs et l'article 1384 du code civil. 40) Loi du 31 décembre 1957 attribuant compétence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur les actions en responsabilité des dommages causés par tout véhicule et dirigés contre une personne de droit public. 41) Article L.1237-14 code du travail issu de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008. 42) Rapport public pour 2009, p. 93-94. 43) Projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs, qui n'a pas été définitivement adopté sous la XIIIème législature. 44) B. Seiller, « Questions préjudicielles », Répertoire de contentieux administratif, Dalloz, § 4-8. 45) Ibid., § 10. 46) E. Laferrière, op. cit., p. 451. 47) CJCE, 6 octobre 1982, Sarl CILFIT et Lanificio di Gavardo Sp A c/ Ministère de la Santé, aff C-283/81, Rec. f•. 3415 48) CJCE, 22 octobre 1987, Foto-Frost c/ Hauptzollamt de Lubeck-0st, aff. 3/4/85, Rec. p. 4199. 2012-568
Les Annonces de la Seine - vendredi 31 août 2012 - numéro 53
Jurisprudence
Tarif du gaz Conseil d’Etat - 10 juillet 2012 - nos 353356 et 353555 SA GDF Suez et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie Le Conseil d’État annule l’arrêté du 29 septembre 2011 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel. Depuis 2009, les tarifs réglementés de vente du gaz naturel pour les ménages et les entreprises sont fixés en utilisant une formule qui repose sur les coûts payés par les fournisseurs pour s’approvisionner sur le marché. Lors de la révision annuelle des tarifs, le Gouvernement doit appliquer cette formule, dont il peut éventuellement corriger les résultats en fonction des évolutions des coûts déjà intervenues et de celles qui sont prévisibles. En septembre 2011, l’application de cette formule aurait dû aboutir à une hausse de 10% environ. Le Gouvernement a toutefois décidé de geler les tarifs des ménages et de borner à moins de 5% la hausse pour les entreprises, sans que l’écart avec les résultats de la formule tarifaire soit justifié par une surévaluation initiale des tarifs ou par la baisse prévisible des coûts. Les conséquences de cette annulation seront réduites. Le Gouvernement est tenu de reprendre un arrêté de révision des tarifs, et les opérateurs pourront facturer le complément de prix correspondant. Mais les sommes en cause resteront limitées. En effet, le juge des référés du Conseil d’État avait très vite suspendu l’arrêté tarifaire en raison de doutes sérieux sur sa légalité, et un nouvel arrêté était entré en vigueur peu après. L’arrêté que le Gouvernement doit reprendre à la suite de l’annulation prononcée par le Conseil d’État ne portera donc que la période du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012. Il reviendra à l’avenir au Gouvernement, s’il estime que la formule tarifaire aboutit à des évolutions qu’il n’estime pas correctes, de modifier celle-ci ; mais tant qu’elle est en vigueur, il doit l’appliquer, pour ne pas fausser les règles de la concurrence. Par deux requêtes distinctes, la société GDF Suez et l’association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), regroupant plusieurs fournisseurs « alternatifs » de gaz, tels que les sociétés Altergaz, Direct Energie, Gaz de Paris et Poweo, demandaient au Conseil d’État l’annulation de l’arrêté du 29 septembre 2011 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez. La première contestait cet arrêté en tant qu’il n’avait pas fixé l’augmentation des tarifs à un niveau permettant de couvrir ses coûts complets, tandis que la seconde attaquait l’arrêté dans sa totalité.
La réglementation prévoit la fixation par un arrêté interministériel d’une formule tarifaire pour déterminer le coût moyen de fourniture du gaz naturel. En vertu du code de l’énergie, les tarifs réglementés de vente du gaz naturel, qui s’appliquent aux fournisseurs historiques de gaz, principalement à GDF Suez, lorsque leurs clients n’ont pas exercé la faculté de se fournir auprès du fournisseur de leur choix, sont définis en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures. Ils doivent couvrir l’ensemble de ces coûts. Le décret du 18 décembre 2009 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel prévoit en effet que ces tarifs couvrent les coûts d’approvisionnement en gaz naturel et les coûts hors approvisionnement. Ce décret précise que, pour chaque fournisseur, une « formule tarifaire » traduit la totalité des coûts d’approvisionnement en gaz naturel et des coûts hors approvisionnement et permet de déterminer le coût moyen de fourniture du gaz naturel, à partir duquel sont fixés les tarifs réglementés de vente, en fonction des modalités de desserte des clients concernés. Cette formule tarifaire est fixée par les ministres chargés de l’é conomie et de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Par ailleurs, le même décret prévoit que, pour chaque fournisseur, un arrêté des ministres chargés de l’économie et de l’énergie, pris après avis de la CRE, fixe les barèmes des tarifs réglementés, qui sont
DECISIONS NUMEROS 353356 et 353555 Le Conseil d’Etat Vu 1°, sous le n° 353356, la requête, enregistrée le 13 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la SA GDF Suez, dont le siège est 1 place Samuel de Champlain à Courbevoie (92400), représentée par son président-directeur général en exercice ; la SA GDF Suez demande au Conseil d’Etat : 1°) d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 29 septembre 2011 du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et du ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez, en tant qu’il n’a pas fixé l’augmentation de ces tarifs au niveau calculé par la Commission de régulation de l’énergie et nécessaire pour couvrir les coûts complets moyens de GDF Suez ; 2°) d’enjoindre aux ministres compétents de prendre, dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 000 euros par jour de retard, un arrêté fixant rétroactivement l’évolution des
tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez à partir du 1er octobre 2011 conformément aux exigences de l’article L. 4453 du code de l’énergie ; 3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu 2°, sous le n° 353555, la requête, enregistrée le 21 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), dont le siège est 1 boulevard Malesherbes à Paris (75008) ; l’ANODE demande au Conseil d’Etat : 1°) d’annuler l’arrêté du 29 septembre 2011 du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et du ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez ; 2°) d’enjoindre aux ministres compétents d’adopter un nouvel arrêté conforme aux règles
applicables et couvrant les coûts supportés par la société GDF Suez pour la fourniture du gaz ; 3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; ; 1. Considérant que les requêtes de la SA GDF Suez et de l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie sont dirigées contre un même arrêté ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; Sur les conclusions aux fins d’annulation de l’arrêté attaqué : 2. Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens des requêtes de la SA GDF Suez et de l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie ; 3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 445-3 du code de l’énergie, reprenant le II de l’article 7 de la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l’électricité et au service public de l’énergie : « Les tarifs réglementés de vente du gaz naturel sont définis en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures. Ils couvrent l’ensemble de ces
coûts à l’exclusion de toute subvention en faveur des clients qui ont exercé leur droit prévu à l’article L. 441-1 (…) » ; que selon ce dernier article : «Tout client qui consomme le gaz qu’il achète ou qui achète du gaz pour le revendre a le droit, le cas échéant, par l’intermédiaire de son mandataire, de choisir son fournisseur de gaz naturel » ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 3 du décret du 18 décembre 2009 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel : « les tarifs réglementés de vente du gaz naturel couvrent les coûts d’approvisionnement en gaz naturel et les coûts hors approvisionnement » ; qu’aux termes de l’article 4 de ce décret : « Pour chaque fournisseur, une formule tarifaire traduit la totalité des coûts d’approvisionnement en gaz naturel et des coûts hors approvisionnement et permet de déterminer le coût moyen de fourniture du gaz naturel, à partir duquel sont fixés les tarifs réglementés de vente de celuici, en fonction des modalités de desserte des clients concernés (…) / La formule tarifaire est fixée par les ministres chargés de l’économie et de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie, à partir,
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le cas échéant, des propositions faites par le fournisseur (…) » ; qu’aux termes de l’article 5 du décret : « Pour chaque fournisseur, un arrêté des ministres chargés de l’économie et de l’énergie pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie fixe les barèmes des tarifs réglementés à partir, le cas échéant, des propositions du fournisseur. / Ces barèmes sont réexaminés au moins une fois par an et révisés s’il y a lieu en fonction de l’évolution de la formule tarifaire et compte tenu des modifications intervenues à l’initiative du fournisseur en application de l’article 6 du présent décret (…) » ; que l’article 6 du décret permet au fournisseur, sous le contrôle de la Commission de régulation de l’énergie et sauf disposition contraire prise par l’arrêté mentionné à l’article 5, de modifier, à titre conservatoire et jusqu’à l’intervention d’un nouvel arrêté tarifaire, les barèmes de ses tarifs réglementés en y répercutant les variations des coûts d’approvisionnement en gaz naturel, telles qu’elles résultent de l’application de sa formule tarifaire ; 5. Considérant que, par un arrêté du 9 décembre 2010, la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et le
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Jurisprudence ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique ont, en application de l’article 4 du décret du 18 décembre 2009, fixé la formule tarifaire, en fonction de laquelle sont déterminés les tarifs réglementés de vente hors taxes du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de la société GDF Suez, à partir d’un calcul de ses coûts d’approvisionnement en gaz naturel ; 6. Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que, s’il appartient aux ministres chargés de l’économie et de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie, de modifier la formule tarifaire prévue par l’article 4 du décret du 18 décembre 2009, dès lors qu’elle ne traduit plus correctement les coûts du fournisseur, et notamment ses coûts d’approvisionnement en gaz naturel, il leur incombe en revanche, lorsqu’ils révisent les barèmes des tarifs réglementés de vente du gaz naturel, en application de l’article 5 du même décret, de s’assurer que le niveau des tarifs qui en résulte permet de couvrir le coût moyen complet de fourniture du gaz naturel, tel qu’il est déterminé par l’application de la formule fixée par arrêté et, le cas échéant, de compenser l’écart, s’il est significatif, qui s’est produit entre tarifs et coût, au moins au
cours de l’année écoulée, en vérifiant en outre s’il y a lieu de prendre en compte une estimation de l’évolution de ce coût sur l’année à venir, en fonction des éléments dont ils disposent à la date de leur décision ; 7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et notamment de l’avis rendu par la Commission de régulation de l’énergie le 29 septembre 2011, que l’application de la formule tarifaire, fixée par l’arrêté du 9 décembre 2010, faisait apparaître une augmentation du coût d’approvisionnement en gaz naturel qui aurait conduit en moyenne, au 1er octobre 2011, à une hausse des tarifs variant, à structure tarifaire inchangée, de 8,8 % à 10 % selon les tarifs ; qu’il suit de là que les auteurs de l’arrêté du 29 septembre 2011, en maintenant au niveau fixé depuis le 1er avril 2011 les tarifs réglementés applicables aux clients résidentiels et aux petits clients professionnels et en augmentant en moyenne de 4,9 % les tarifs réglementés applicables aux autres clients, sans que la différence entre cette évolution des tarifs et celle des coûts soit justifiée par une surévaluation initiale des tarifs ou par la baisse prévisible des coûts, et au lieu, s’ils l’estimaient nécessaire au regard des évolutions constatées des coûts
d’approvisionnement, de modifier préalablement la formule tarifaire, ont entaché leur décision d’une erreur de droit ; que l’arrêté en litige doit dès lors être annulé ; Sur les conséquences de l’illégalité de l’arrêté attaqué : 8. Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment à la faible durée d’application de l’arrêté annulé du 29 septembre 2011, suspendu par le juge des référés puis remplacé par d’autres dispositions trois mois après son entrée en vigueur, que son annulation soit de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits que des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur ; qu’ainsi, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de limiter les effets de l’annulation de cet acte ; Sur les conclusions aux fins d’injonction : 9. Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision,
réexaminés au moins une fois par an, et révisés s’il y a lieu en fonction de l’évolution de la formule tarifaire et compte tenu des modifications intervenues à titre conservatoire à l’initiative du fournisseur en raison des variations des coûts d’approvisionnement. Le Conseil d’État relève que les ministres concernés doivent en principe, lorsqu’ils révisent les barèmes des tarifs réglementés de vente du gaz naturel, appliquer la formule tarifaire qu’ils ont préalablement fixée. Le Conseil d’État juge qu’il résulte de ces textes que les ministres doivent, lorsqu’ils révisent les barèmes des tarifs réglementés de vente de gaz naturel, s’assurer que le niveau des tarifs ainsi fixé permet de couvrir le coût moyen complet de fourniture du gaz naturel, tel qu’il est déterminé par l’application de la formule tarifaire fixée préalablement par arrêté. Ils ne peuvent s’écarter du niveau des tarifs ainsi obtenu qu’aux fins de compenser l’é cart, s’il est significatif, qui se serait creusé entre tarifs et coût, au moins au cours de l’année écoulée, et de prendre en compte une estimation de l’évolution de ce coût sur l’année à venir, au regard des éléments dont ils disposent au moment où ils procèdent à la révision des barèmes. Enfin, le Conseil d’État précise que, dès lors que la formule tarifaire ne traduit plus correctement les coûts du fournisseur, et notamment ses coûts d’approvisionnement en gaz naturel, il appartient aux ministres chargés de l’é conomie et de l’énergie, après avis de la CRE, de la modifier. Cette modification doit toutefois, pour être prise en compte dans la révision des barèmes, être préalable à celle-ci. Tirant les conséquences de ces principes, le Conseil d’État juge que l’arrêté du 29 septembre 2011 est entaché d’erreur de droit, en ce qu’il fixe les tarifs à un niveau très inférieur à celui qui aurait résulté de la formule tarifaire alors en vigueur, sans que cet écart soit justifié. Le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique avaient fixé la formule tarifaire en fonction de laquelle sont déterminés les tarifs réglementés de vente hors taxes du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez par un arrêté du 9 décembre 2010. Le Conseil d’État relève que l’application de cette formule tarifaire faisait apparaître une augmentation du coût d’approvisionnement en gaz naturel qui aurait conduit en moyenne, au 1er octobre 2011, à une hausse des tarifs variant, à structure tarifaire inchangée, de 8,8 % à 10 % selon les tarifs.
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cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution » ; 10. Considérant que la présente décision implique nécessairement que soit pris un nouvel arrêté relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez pour la période du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012, date d’entrée en vigueur des tarifs fixés par l’arrêté adopté le 22 décembre 2011 ; qu’il suit de là qu’il y a lieu de prescrire aux ministres chargés de l’économie et de l’énergie de prendre, dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision, un nouvel arrêté fixant une évolution des tarifs conforme aux principes énoncés par la présente décision ; qu’il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte ; Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : 11. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 3 000 euros à la SA GDF Suez, d’une part, et d’une somme d’un même montant à l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, d’autre part, sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Décide : Article 1er : L’arrêté du 29 septembre 2011 relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez est annulé. Article 2 : Il est enjoint au ministre de l’économie, des finances et du commerce extérieur et à la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, de prendre dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision, un nouvel arrêté fixant une évolution des tarifs conforme aux principes énoncés par la présente décision. Article 3 : L’Etat versera respectivement à la SA GDF Suez et à l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 7611 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SA GDF Suez, à l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, au ministre de l’économie et des finances et à la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Or, l’arrêté interministériel du 29 septembre 2011, attaqué par la société GDF Suez et par l’ANODE, avait maintenu à l’identique les tarifs réglementés applicables aux clients résidentiels et aux petits clients professionnels, et augmenté en moyenne de 4,9 % les tarifs réglementés applicables aux autres clients, mais sans que la différence entre cette évolution des tarifs et celle des coûts soit justifiée par une surévaluation initiale des tarifs ou par la baisse prévisible des coûts. Le Conseil d’État juge que, en procédant ainsi, les ministres concernés ont commis une erreur de droit. Si les ministres estimaient que les évolutions constatées des coûts d’approvisionnement rendaient nécessaire une modification de la formule tarifaire, il leur appartenait en effet de procéder à cette modification avant de réviser les barèmes. Le Conseil d’État ne limite pas les effets rétroactifs de cette annulation et enjoint aux ministres concernés de prendre un nouvel arrêté de fixation des tarifs pour la période du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012. Pour mémoire, le juge des référés du Conseil d’État avait déjà suspendu l’exécution de l’arrêté litigieux près de deux mois après son adoption, par une ordonnance du 28 novembre 2011, prise sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative. A la suite de cette suspension, les ministres chargés de l’économie et de l’énergie ont pris, le 22 décembre 2011, un nouvel arrêté relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez. Cet arrêté a fixé de nouveaux barèmes qui se sont appliqués à compter du 1er janvier 2012. Dans ces conditions, le Conseil d’État estime que l’annulation de l’arrêté du 29 septembre 2011 n’est pas de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits que des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur, et qu’il n’y a donc pas lieu de limiter les effets dans le temps de l’annulation de cet acte. En effet, ce n’est qu’à titre exceptionnel qu’il peut être dérogé au principe de l’effet rétroactif des annulations contentieuses. Le Conseil d’État juge que l’annulation qu’il prononce implique en revanche nécessairement l’adoption d’un nouvel arrêté relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez pour la période du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012, date d’entrée en vigueur des tarifs fixés par l’arrêté adopté le 22 décembre 2011. Il enjoint donc aux ministres chargés de l’économie et de l’énergie de prendre, dans un délai d’un mois, un nouvel arrêté fixant une évolution des tarifs 2012-584 conforme aux principes énoncés dans sa décision.
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Autorité des Marchés Financiers Rapport du Médiateur 2011 - Paris, 29 juin 2012
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recommandations comptables adaptées. Cette vigilance explique aussi que, sur les 78 enquêtes lancées l’année dernière, une part nettement plus importante que d’habitude a été consacrée à l’information financière. Parallèlement, nous avons visé 584 opérations financières ; - enfin, nous avons dû réagir rapidement à l’épisode de tension extrême que nous avons connu l’été dernier sur les valeurs financières, en interdisant temporairement les ventes à découvert, et en lançant des enquêtes. 2. Deuxièmement, l’AMF a continué à être très investie dans le vaste mouvement de réforme de la régulation financière au plan français, européen et international
La crise de la dette par Jean-Pierre Jouyet* Je vous présente pour la 4ème fois le rapport annuel de l'A MF depuis ma prise de fonction en décembre 2008. Aujourd’hui, la crise de la dette est devenue une crise politique qui menace notre continent dans ses fondements. Les bouleversements que nous connaissons depuis 2008 sont peut-être le signe que nous entrons dans une ère nouvelle que le régulateur, à son échelle, s’efforce d’appréhender au mieux notamment au niveau de l’identification des risques. Avant de vous parler des enjeux à venir, permettez-moi de vous brosser un tableau rapide du bilan de l’année 2011. Je voudrais retenir trois points essentiels :
D’abord nous avons mis en œuvre plusieurs réformes d'importance, notamment : - le régime de transparence des ventes à découvert ; - le transfert de la supervision des agences de notation à l’ESMA, après leur agrément par l'AMF ; - la réforme des OPCVM monétaires puis la transposition de la directive OPCVM IV (nous
aboutissons d’ailleurs ces jours-ci avec l’entrée en vigueur au 1er juillet du fameux document d’information-clé pour les investisseurs) ; - la modification du régime des OPA avec le passage du seuil de déclenchement de 33 à 30%. Ensuite, les négociations européennes. Nous avons largement progressé en 2011 dans la négociation de deux textes européens fondamentaux : le règlement européen sur la compensation des dérivés (EMIR) et la révision de la directive MIF. Autrement dit, la régulation de l’ensemble des dérivés de gré à gré, et la future organisation des marchés en Europe. Je veux souligner ici l’influence que nous avons su déployer : - ainsi, nous nous sommes battus pour que l’Europe affiche une position de négociation ferme vis-à-vis des Etats-Unis dans la régulation des dérivés. D'une manière générale, nous souhaitons que l'Europe et ses partenaires agissent sur une base de réciprocité et de reconnaissance mutuelle dans ce domaine comme dans d'autres ; - de même avons-nous obtenu que les sujets qui nous tiennent à cœur figurent à l’agenda de la
QUELQUES CHIFFRES
Origine des demandes en 2011
I. Bilan de l’année 2011 1. Premièrement, la crise a continué de marquer de son empreinte notre activité en 2011
- nous avons dû organiser la surveillance rapprochée d’une centaine de sociétés de gestion fragilisées par la crise, tout en agréant 39 nouvelles sociétés et plus de 1000 OPCVM ; - la transparence étant une condition essentielle du rétablissement de la confiance, nous avons renforcé encore notre vigilance quant à l’information financière des émetteurs, notamment sur le fondement de
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révision de la MIF, avec un seul objectif : des marchés au service du financement de l’économie. 3. Troisièmement, l’AMF a renforcé son action de protection des épargnants et ainsi que le contrôle et la surveillance des marchés
Concernant la protection des épargnants, nos efforts ont porté sur les trois axes suivants : 1°) Un renforcement de l’information du grand public pour une meilleure compréhension des mécanismes de commercialisation des produits financiers. 2°) Une clarification des exigences à l’égard des distributeurs de produits financiers, en termes de transparence sur les frais notamment et de gestion des conflits d’intérêts, en s’assurant que la primauté du client soit assurée en permanence. 3°) Un renforcement des dispositifs d’aide aux victimes des manquements boursiers et de la mauvaise commercialisation de produits financiers, sujet peu pris en considération par le droit boursier. Nous y avons fait droit en renforçant les moyens d’actions du médiateur de l'AMF, Marielle Cohen-Branche. Nous intégrons aussi plus systématiquement les problématiques de réparation des préjudices dans le cadre de nos procédures de supervision, de transaction ou de sanctions. L’A MF a d'ailleurs quelques pistes à proposer en la matière. Concrètement, en 2011 : - la plateforme Epargne Info Service a permis de répondre à plus de 10 000 questions de nos concitoyens, inquiets ou interrogatifs dans le contexte actuel. Contexte qui explique sans doute la légère remontée du nombre de demandes de médiation ; 578 ont été menées à terme l’année dernière contre 520 en 2010 ; - les visites mystères ont atteint un rythme de croisière, nous permettant progressivement le recul nécessaire pour pointer l’é volution des pratiques de commercialisation ; - nous avons désormais une organisation en place pour assurer la plus grande vigilance dans la commercialisation des produits d’épargne. Elle nous a permis, en 2011, d’examiner - et
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souvent de faire corriger – 850 documentations commerciales et environ 3 000 publicités. Outre l’amélioration de l’information des épargnants, cette veille permet l’appréhension rapide des risques dans ce domaine : ainsi en va-t-il des produits Forex, ou nous agissons avec nos partenaires, Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et Autorité de régulation des professionnels de la publicité (ARPP), pour que l'information du public sur ces produits risqués ne soit pas trompeuse et qu'ils ne fassent pas l'objet d'une publicité disproportionnée. En matière de surveillance des risques, des contrôles des acteurs et de l’application de sanctions efficaces l’AMF est désormais dotée d’un Comité des risques qui s’efforce d’identifier les tendances et les grandes évolutions des marchés financiers et de prévenir les risques émergents. Ce comité nous force à remettre sans cesse nos missions sur le métier en nous posant la question du périmètre des marchés et des entités à réguler. Cette méthode a permis à l’AMF d’intervenir le plus en amont possible et de faire porter ses messages sur des sujets qui sont montés en puissance depuis comme la finance parallèle ou la régulation des marchés de matières premières. Ce dernier sujet est d’ailleurs le signe de l’extension du périmètre d’intervention de l’A MF. D’une surveillance historiquement centrée sur les marchés actions français, l’AMF a progressivement étendu son dispositif de collecte des données aux transactions financières de gré à gré, aux marchés obligataires
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procéder à des analyses plus macro-financières. Autre processus maintenant bien établi : la filière répressive dans ses nouvelles formes. En 2011, nous avons initié les premières transactions, 8 à ce stade dont 2 sont en attente de publication, et plus récemment, nous avons fait usage du droit de l'AMF de former un recours à l'encontre de certaines décisions de la Commission des sanctions.
II. Les nouveaux enjeux de l’Autorité des Marchés Financiers Permettez-moi d’en venir maintenant aux enjeux qui attendent l’Autorité des marchés financiers. 1. La gouvernance d’entreprise
Actionnaires et investisseurs institutionnels font de plus en plus attention à la qualité de la gouvernance comme un élément de la performance sur la durée. Or, en ce domaine il y a une exception française par rapport au monde anglo-saxon qui doit être corrigée. En France, comme vous le savez, la loi prévoit que les sociétés cotées sur un marché réglementé peuvent appliquer un référentiel de gouvernance. Force est de constater que les codes français sont aujourd’hui rédigés par des associations d’entreprises pour des entreprises. De leur côté, en réponse, les investisseurs ont développé leur propre référentiel. Il en résulte
L’an dernier, ne serait-ce que sur les marchés actions, c’est plus de 3 milliards d'ordres et environ 143 millions de transactions que nous avons examinés, pour nourrir les enquêtes ou procéder Jean-Pierre Jouyet à des analyses plus macro-financières.
et enfin aux instruments dérivés y compris, comme je le disais, sur les matières premières. Sans cette adaptation indispensable, les réponses apportées à la sophistication croissante des marchés, à la complexité des moyens utilisés par les intervenants et aux abus de marchés seraient intervenues trop tardivement au regard du temps des marchés. Le renforcement de notre capacité de contrôle et de surveillance des acteurs de marché prend ici tout son sens. La surveillance des marchés s’est largement étendue en 2011 comme nous l’avions décidé, grâce notamment à l’appui indispensable de nos équipes informatiques. Cette surveillance porte sur : - plus d'un millier de titres de capital, - plus de 2 500 titres obligataires, - près de 10 000 warrants et certificats, - et près d'un millier d'établissements financiers. L’an dernier, ne serait-ce que sur les marchés actions, c’est plus de 3 milliards d'ordres et environ 143 millions de transactions que nous avons examinés, pour nourrir les enquêtes ou
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une sorte de morcellement qui ne me paraît pas le plus propice à favoriser un dialogue efficace entre les deux parties. Il m’apparaît que la définition des règles de gouvernance appliquées par les entreprises gagnerait à être rédigée avec une participation plus grande des investisseurs, des actionnaires et plus largement de l’ensemble des parties prenantes. Je crois au volontarisme politique et réglementaire sur ce sujet. En effet, il apparait clairement que sans l'impulsion du régulateur et celle du législateur, la diversification de la composition des conseils d'administration n'aurait pas connu le coup d'accélérateur que l’on a constaté. Concernant le vote consultatif des actionnaires sur les rémunérations des dirigeants, le Say-onPay en bon français, nous ne pourrons faire l’économie de ce débat. On ne peut demander aux entreprises publiques seules de se remettre en question. Pour ma part, je crois qu’il faut la transparence la plus large possible des rémunérations, des conventions réglementées à l’égard des assemblées générales.
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Vie du chiffre 2. La commercialisation des produits d’investissement aux investisseurs de détail
Il nous faudra aussi conduire une réflexion sur la problématique du conseil en investissement et de régulation de la distribution de produits financiers, qui pourrait déboucher sur une remise à plat des conditions d’exercice, de rémunération et de régulation du métier de conseillers financier, qu’il soit exercé en grand réseau ou par des établissements indépendants. De même, l’AMF a formulé un certain nombre de propositions visant à la réparation des préjudices financiers, dont certaines nécessitent des aménagements législatifs. Tel est le cas du développement des clauses d’actions collectives encadrées « à la française ». 3. Mettre les marchés au service du financement à long terme de l’économie
Le débat sur la séparation des activités bancaires et sur la structure des banques aurait dû être ouvert dans notre pays, comme dans les autres, depuis 2010. Les règles prudentielles ou fiscales jouent un rôle non négligeable dans l’allocation de l’épargne et doivent être impérativement pensées à l’aune de leur contribution au financement de l’économie et des besoins des clients. Il importe donc que ces règles soient adroitement calibrées pour permettre le financement de la croissance et que les réformes
financières en cours assurent à la fois la disponibilité du crédit bancaire et l’animation des marchés, deux sources de financement des entreprises. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni sont en train d’adopter des réformes touchant l’organisation des banques. En Europe, le groupe Liikanen est chargé de proposer des recommandations d’ici la rentrée sur d’é ventuelles réformes structurelles pour renforcer la stabilité financière et améliorer l’efficience du système financier et la protection des consommateurs. Alors quelle approche adopter ? Une approche à la Vickers, avant tout prudentielle, n’aborde pas les questions de prise de risque excessive et de conflits d’intérêt, pourtant à l’origine de la crise de 2007-2008. Une approche à la Volcker cherche, en revanche, à identifier les activités utiles aux clients et au financement de l’é conomie, tout en interdisant ou en contraignant les activités qui exposent les banques à des conflits d’intérêt ou à des risques trop élevés. Il faudra bien mettre en balance ces deux aspects lorsque le débat se présentera. En outre, il faut apporter une attention particulière aux normes comptables, la comptabilisation en valeur de marché sur un champ très large induit une plus grande sensibilité des bilans des institutions financières aux fluctuations à court terme des marchés, et
aux règles prudentielles au sens où certains aspects des réformes de Bâle III et Solvabilité II risquent de pénaliser la constitution d’une épargne de long terme. Quoiqu’il en soit, ayons conscience que l’on ne pourra pas développer une place financière au service d’un financement à long terme de notre économie, de sa croissance, que si les règles fiscales et les instruments de réglementation et de régulation apparaissent suffisamment stables et lisibles pour les investisseurs, notamment étrangers, qui contribuent de plus en plus au développement de nos entreprises et de notre économie. Vous le constatez, notre travail, en dépit du chemin parcouru est encore dense et notre vigilance doit être renforcée. Je dois ajouter, de manière prosaïque, que si le Parlement n’avait pas voté les mesures nécessaires d’augmentation de nos ressources, nous ne pourrions pas mener à bien toutes ces missions. J’ai toujours voulu que l’Autorité soit combative, audacieuse. Qu’elle fasse entendre sa voix quitte à s'emparer de sujets qui pouvaient apparaître, à première vue, hors de son champ. Je crois bien que le pari est en passe d’être gagné ! * Directeur Général de la Caisse des Dépôts et Consignations depuis le 10 juillet 2012
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Passation de pouvoir
Autorité des Marchés Financiers Gérard Rameix succède à Jean-Pierre Jouyet* - Paris, 3 août 2012
Gérard Rameix
Gérard Rameix, 60 ans, diplômé d’Etudes Supérieures de droit public et de l’Institut d’études politiques de Paris est un ancien élève de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) (promotion Pierre Mendès France, 1978).
DR
Il commence sa carrière à la Cour des comptes comme Auditeur (1978) puis Conseiller référendaire (1982). Détaché en qualité de Chargé de bureau à la Direction du budget du ministère des Finances, Gérard Rameix réintègre la Cour des comptes en 1984, puis est nommé Conseiller technique au cabinet du Premier Ministre de 1986 à 1988.
Gérard Rameix a été nommé président de l'Autorité des Marchés Financiers par décret du Président de la République en date du 1er août 2012.
Directeur des affaires industrielles (1989) puis des opérations financières et des investissements (1990) à la société Hottinguer Finances, il devient Président de la société Fi index en 1990. En 1993, Gérard Rameix est nommé Directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés
puis devient, en 1997, Directeur adjoint du cabinet du Premier Ministre. Directeur Général de la Commission des opérations de bourse en 1997, il est nommé Secrétaire Général de l'Autorité des Marchés Financiers à sa création en 2003, poste qu'il occupera jusqu'en 2009. Depuis, Gérard Rameix était Médiateur National du Crédit aux entreprises. 2012-602
*Directeur Général de la Caisse des Dépôts et Consignations depuis le 10 juillet 2012.
Source : communiqué AMF du 3 août 2012
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Direct
Conseil d'État Deux nouveaux Présidents de section
ernard Pêcheur, conseiller d'État, est nommé Président de la section de l'Administration du Conseil d'État. Diplômé de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, titulaire d'une maîtrise de droit public, Bernard Pêcheur débute sa carrière en 1976 à la sortie de l'ENA (promotion Guernica) comme Administrateur Civil puis Chef de Bureau à la Direction du Budget au Ministère de l'Economie et des Finances. Nommé Maître des requêtes au tour extérieur en novembre 1985, il exerce ses fonctions au Conseil d'Etat comme Rapporteur à la Section du Contentieux et à la Section des Finances puis comme Assesseur à la Section du Contentieux (de 1997 à 2000 puis à nouveau de 2003 à 2008) il était depuis 2008 Président Adjoint de la section de l’administration.
D.R.
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Bernard Pêcheur a exercé une partie de sa carrière à l'extérieur du Conseil d'État : Conseiller Technique du Ministre Délégué au Budget (19821983), puis Directeur Adjoint du Cabinet du Ministre de l'Industrie et de la Recherche (1983-1984), il rejoint ensuite le Cabinet du Premier Ministre en tant que Conseiller auprès du Premier Ministre (1984 novembre 1985). Conseiller social à la Présidence de la République de 1988 à 1989, il occupe ensuite les fonctions de Directeur Général de l'Administration et de la Fonction Publique de septembre 1989 à décembre 1993 et parallèlement de Président du Comité de la Gestion Publique de l'OCDE (1990 - 1993). Il a exercé ultérieurement les fonctions de Secrétaire Général du Ministère de l'Economie des Finances et de l'Industrie d'avril 2000 à août 2002 avant de réintégrer le Conseil d'État. Parallèlement à ses activités au Conseil d'État, Bernard Pêcheur a exercé diverses missions extérieures à celui-ci : - Rapporteur Général de la Commission Supérieure de Codification (1997 - 2000) - Président de l'Ecole Nationale Supérieure de la police (de 1998 à 2010), - Président de l'Institut National des Etudes Démographiques (de 1999 à 2008), - Membre de la Commission du Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité Nationale (2007 et 2008).
Il est membre de la Cour de Discipline Budgétaire et Financière (depuis 2005) et Président Suppléant du Haut Comité d'Evaluation de la Condition Militaire (depuis 2010). La Section de l'Administration est l'une des cinq sections consultatives du Conseil d'État, chargée d'examiner les projets de texte du Gouvernement - lois, ordonnances et décrets - relatifs à la défense, l'organisation et la gestion de l'administration, les fonctionnaires et agents publics ainsi que le domaine et la commande publics. Le Conseil d'Etat, Juge administratif suprême et conseiller des pouvoirs publics. Le Conseil d'État est le juge suprême de l'ordre juridictionnel administratif. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1987, il exerce, à titre principal, un rôle de Juge de Cassation des décisions rendues par les Cours Administratives d'Appel et les Tribunaux Administratifs. II est également Juge de premier ressort pour les actes administratifs les plus importants comme les décrets. Le Conseil d'État est le conseiller des pouvoirs publics. Le Conseil d'État est le Conseiller Juridique du Gouvernement pour la préparation des projets de loi, d'ordonnance et des principaux décrets. Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, il peut aussi être le Conseiller du Parlement pour les propositions de loi. II traite également les demandes d'avis du Gouvernement sur les questions de droit, réalise des études sur des questions administratives ou relatives aux politiques publiques. Cette mission de conseil s'organise dans le cadre de cinq sections spécialisées (la section de l'Intérieur, la section des Travaux Publics, la section des Finances, la section Sociale et la section de l'Administration) et d’une section généraliste (la section du rapport et des études).
Philippe Martin, nouveau Président de la section des Travaux Publics Philippe Martin, Conseiller d'État, précédemment Président Adjoint de la section du Contentieux, est nommé Président de la section des Travaux Publics du Conseil d'État. Diplômé de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris et d'Etudes approfondies de Droit des Affaires (Université Paris 2), Philippe Martin a été nommé Auditeur au Conseil d'État en 1981 à sa sortie de l'ENA (promotion « Droits de l'Homme »). Commissaire du Gouvernement près l'Assemblée du Contentieux et les autres
formations de jugement du Conseil d'État de 1985 à 1996, puis Président de la 9ème soussection du Contentieux de 1999 à 2004, il était depuis 2004 Président Adjoint de la section du Contentieux.
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Bernard Pêcheur, nouveau Président de la section de l'Administration
Il a été Membre du Tribunal des conflits (2005-2007) et VicePrésident du Tribunal des conflits de 2008 à 2010. Philippe Martin a également exercé à l'extérieur du Conseil d'État les fonctions de Conseiller Technique auprès du Secrétaire Général du Gouvernement (1989-1992) Membre de la Commission des participations et des transferts depuis 2008, il est en outre Membre du Conseil des prélèvements obligatoires depuis 2010. La section des Travaux Publics est l'une des cinq sections consultatives du Conseil d'État, chargée d'examiner les projets de texte du Gouvernement - lois, ordonnances et décrets - relatifs à la protection de l'Environnement, au Logement, à l'Urbanisme et à la Ville, à l'Energie, aux Communications, aux Mines et aux Transports, à la Propriété et au Domaine publics, aux Travaux Publics, à l'Utilité publique et à la Sécurité publique, à l'Agriculture, la Pêche et la Chasse. Le Conseil d'Etat, Juge Administratif suprême et conseiller des pouvoirs publics. Le Conseil d'État est le Juge Suprême de l'Ordre Juridictionnel Administratif. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1987, il exerce, à titre principal, un rôle de Juge de Cassation des décisions rendues par les Cours Administratives d’Appel et les Tribunaux Administratifs. Il est également Juge de premier ressort pour les actes administratifs les plus importants comme les décrets. Le Conseil d'État est le Conseiller des pouvoirs publics. Le Conseil d'État est le Conseiller Juridique du Gouvernent pour la préparation des projets de loi, d'ordonnance et des principaux décrets. Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, il peut aussi être le Conseiller du Parlement pour les propositions de loi. Il traite également les demandes d'avis du Gouvernement sur les questions de droit, réalise des études sur des questions administratives ou relatives aux politiques publiques. Cette mission de conseil s'organise dans le cadre de cinq sections spécialisées (la section de l'Intérieur, la section des Travaux Publics, la section des Finances, la section Sociale et la section de l'Administration) et d'une section généraliste (la section du rapport et des études). 2012-574 Source : Communiqué de presse du Conseil d’Etat du 19 juillet 2012
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