Edition du lundi 1er octobre 2012

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LES ANNONCES DE LA SEINE Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Lundi 1er octobre 2012 - Numéro 58 - 1,15 Euro - 93e année

Barreau de Lille Rentrée solennelle - 14 septembre 2012 Laura Campisano, Thibaud Lemaitre, Mathieu Masse, Emmanuel Masson et Hélène Fontaine

RENTRÉE SOLENNELLE

Barreau de Lille

L’avocat institutionnel par Emmanuel Masson ...................................

VIE DU DROIT

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Budget de la Justice en 2013

8 AGENDA ......................................................................................5 JURISPRUDENCE

par Christiane Taubira..........................................................................

Corrida

Conseil constitutionnel - 21 septembre 2012 Décision n° 2012-271 QPC ...................................................................

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Pratique commerciale déloyale Cour de cassation - Première chambre civile - 12 juillet 2012 Arrêt n° 833 - Cassation partielle ....................................................

10 ANNONCES LEGALES ...................................................11 ADJUDICATIONS................................................................22 DÉCORATION Pierre Chatel, Officier du Mérite...........................................24 SUPPLÉMENT Rentrée Solennelle de la Conférence du Jeune Barreau de Lille

Rectificatif au numéro 47 du lundi 16 juillet 2012, page 1, lire : « Football » et non « Footballe » Rectificatif au numéro 57 du jeudi 27 septembre 2012, article 2012-644 page 40, lire : « Eryck Schekler » et non « Erick Schekler »

la Cité des Echanges de Marcq-enBaroeul, le Bâtonnier Emmanuel Masson a ouvert l’Audience Solennelle de Rentrée de la Conférence du Jeune Barreau de Lille. Tous les deux ans les lauréats du concours d’éloquence oratoire ont le privilège de discourir devant une prestigieuse assemblée composée notamment d’éminents représentants des juridictions locales au premier rang desquels, cette année, Eric Négron, Président du Tribunal de Grande Instance de Lille. Mathieu Masse, premier secrétaire de la Conférence 2012, a « joué » dans le rôle de « L’avocat est-il un comédien qui joue le scénario de son client ? » ; Thibaud Lemaître, deuxième secrétaire de la Conférence 2012, a « joué » dans le rôle « L’homme politique doit-il porter une robe ? » et la troisième secrétaire de la Conférence 2012, Laura Campisano, a « présenté » ses deux confrères. Préalablement aux interventions du Jeune Barreau lillois, le Bâtonnier Emmanuel Masson,

A

aux côtés d’Hélène Fontaine (Bâtonnier désigné), a dressé le bilan de sa « gouvernance » riche en projets et en évènements ; il a évoqué les perspectives de sa profession qui est victime de l’aide juridictionnelle dont le dispositif actuel est « à bout de souffle ». L’intervention de l’avocat doit être revalorisée estime Emmanuel Masson même en période de restriction budgétaire car l’accès à la justice est un droit a-t-il rappelé. Il a également affirmé que le secret professionnel devait être « érigé en principe général du droit supérieur à toute autre norme » . Entre un Barreau aujourd’hui morose et une justice en quête de modernité, le Bâtonnier Emmanuel Masson a exhorté ses confrères à « investir toute la société civile » et à se rendre « incontournables institutionnellement » afin de participer à des projets et à réfléchir à des améliorations pour créer « le monde idéal de l’avocat : un secret professionnel sanctuarisé, un périmètre préservé, le réflexe avocat institutionnalisé, des champs d’activités étendus et internationaux ». Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

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Rentrée solennelle

LES ANNONCES DE LA SEINE Siège social : 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS R.C.S. PARIS B 339 349 888 Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr e-mail : as@annoncesdelaseine.fr

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Emmanuel Masson

Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05 Directeur de la publication et de la rédaction : Jean-René Tancrède Comité de rédaction :

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Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet Bernards François-Henri Briard, Avocat au Conseil d’Etat Antoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Marie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droit André Damien, Membre de l’Institut Philippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne Bertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de Bordeaux Dominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Brigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appel Régis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Françoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassation Maurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - Entrepreneurs Jean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-Assas Christian Lefebvre, Président Honoraire de la Chambre des Notaires de Paris Dominique Lencou, Président du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice Noëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne Ministre Philippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-Assas Jean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptes Gérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassation Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPL Yves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris René Ricol, Ancien Président de l’IFAC Francis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de Paris Carol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

Commission paritaire : n° 0713 I 83461 I.S.S.N. : 0994-3587 Tirage : 12 511 exemplaires Périodicité : bi-hebdomadaire Impression : M.I.P. 3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

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L’avocat institutionnel par Emmanuel Masson

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- Tarifs hors taxes des publicités à la ligne A) Légales : Paris : 5,48 € Seine-Saint-Denis : 5,43 € Yvelines : 5,22 € Hauts-de-Seine : 5,48 € Val-de-Marne : 5,41 € B) Avis divers : 9,75 € C) Avis financiers : 10,85 € D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,82 € Hauts-de-Seine : 3,82 € Seine-Saint Denis : 3,80 € Yvelines : 5,22 € Val-de-Marne : 3,83 € - Vente au numéro : 1,15 € - Abonnement annuel : 15 € simple 35 € avec suppléments culturels 95 € avec suppléments judiciaires et culturels

(…) e discours de Rentrée est pour le Bâtonnier en exercice, un moment qu’il redoute, mais c’est également un espace de liberté où il lui est permis de rêver. Ce ne sont pas les rêveries d’un Bâtonnier solitaire, bien au contraire tant les liens qui l’unissent à ses confrères sont nombreux et intenses, mais plutôt un moment où l’on peut imaginer ce que pourrait être le monde idéal de la justice et des avocats. Alors laissons-nous aller et imaginons le Barreau de demain et la justice du futur.

L

Imaginons le Barreau de Lille ou d’ailleurs en France, uni mais pas uniforme.

1. Imaginer un Barreau uni mais pas uniforme

COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES NORMES TYPOGRAPHIQUES Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Un Barreau, pourquoi pas unique (je vous rassure, je ne vous parlerai pas de la Gouvernance) où la multitude de nos façons d’exercer, les différences de nos structures, la diversité de nos compétences, ne nous empêcheraient pas de parler d’une seule voix, dans un but unique : la satisfaction de nos clients par la qualité de nos prestations. Plus de querelle de clocher, de partage territorial par la postulation, plus de différence ou de

jalousie entre les grands, les moyens et les petits Barreaux. Les seules choses qui réunissent le spécialiste en fusion-acquisition ou en fiscalité internationale, à celui qui consacre son activité à la défense des particuliers les plus démunis en comparution immédiate ou aux audiences d’expulsion du Tribunal d’Instance, ce sont les valeurs de notre serment, notre déontologie et nos règles professionnelles. Elles doivent être le socle de notre unité, notre valeur ajoutée vis-à-vis des professions voisines ou concurrentes ou des braconniers du droit. Ne laissons pas se développer les comportements à la marge, combattons de façon efficace les atteintes au périmètre du droit. Je salue ici le travail de la commission de l’exercice du droit du Conseil National des Barreaux, pour la rédaction du vade-mecum sur le titre II de la loi de 1971 qui devrait devenir, à l’instar du Règlement Intérieur National ou du Damien, le livre de chevet des Bâtonniers et des Membres des Conseils de l’Ordre. Lille, soyons chauvin, en ce qui concerne le combat contre les braconniers, n’est pas en reste. Sa commission titre II a ouvert plus de 50 dossiers depuis le début de l’année 2011 à l’encontre de faux Avocats, de consultants en tout genre, d’experts auto-proclamés, de sites internet plus ou moins obscurs ou d’officine d’arrière boutique, avec des résultats plus que satisfaisants. Lorsque j’ai passé des après-midis complets en audition devant les Services de la Brigade Financière à la suite des plaintes déposées, je n’ai pas eu l’impression de perdre mon temps. Il y va de l’image de notre profession dans l’esprit du public, mais aussi dans les yeux de nos confrères.

Les Annonces de la Seine - lundi 1er octobre 2012 - numéro 58


Rentrée solennelle Il y va de l’intérêt de nos concitoyens qui prennent des risques inconsidérés à penser que faire appel à des pseudo professionnels leur permettra de faire des économies. L’un des fondamentaux de notre profession, c’est le secret professionnel. Garant de la confiance que nous accordent nos clients, pilier d’une démocratie qui se veut exemplaire, le secret professionnel est l’objet depuis des années d’attaques en règle qui dans un premier temps, nous venaient de l’Europe,

Ne laissons pas se développer les comportements à la marge, combattons de façon efficace les atteintes au périmètre du Emmanuel Masson droit.

un partenariat inédit, initié avec l’Institut Supérieur des Techniques de Communication. Ses étudiants en 5ème année, dans le cadre de leur projet de fin d’étude, ont travaillé sur la communication du Barreau de Lille. Plus récemment, nous avons collaboré avec Lille Place Juridique et l’EDHEC sur une étude de l’adéquation entre les besoins des entreprises du Nord-Pas-de-Calais et les offres des professionnels du droit. Que ressort-il de tout cela ? Du positif tout d’abord : Que nous sommes compétents, (en langage de statisticien, c’est l’ITEM qui est ressorti en premier) et c’est heureux, - que nous sommes à l’écoute, que nous sommes des professionnels emplis d’humanité, - que nous sommes les seuls défenseurs des libertés publiques et des droits fondamentaux, - que nous savons nous impliquer pour de grandes causes, que nous sommes indépendants et, - que notre déontologie est un avantage pour le client. Mais également du négatif : Que nous sommes inaccessibles, peu disponibles (l’image de l’Avocat qui reçoit en robe dans son bureau orné de dorure et qui est injoignable au téléphone sauf à franchir un barrage, une armée de secrétaires, est encore vivace), Que nous ne sommes pas transparents sur nos honoraires et que nous ne savons pas parler d’argent, Alors que faire ? Communiquons avant tout. Investissons toute la société civile. Sachons nous rendre disponibles, accessibles. Rendons obligatoire la Convention écrite d’honoraires et pas sous la forme, je cite, « d’un barème indicatif en matière de divorce pris par arrêté du Garde des Sceaux, après avis du Conseil National des Barreaux ». Multiplions les rencontres avec les autres professions, les représentants de la société civile, les associations, les collectivités locales. A Lille, nous tentons de le faire depuis plusieurs années.

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mais qui maintenant se développent auprès de nos plus hautes juridictions. Lorsque le secret professionnel est attaqué, ce ne sont pas les Avocats que l’on frappe, ce sont nos clients, nos concitoyens. Le secret professionnel ne nous appartient pas, il appartient à nos clients. Garantir le secret professionnel, l’ériger en principe général du droit supérieur à toute autre norme, ce n’est pas rendre l’avocat complice des confidences recueillies. Les derniers échos sur l’adaptation des directives anti-blanchiment sont inquiétants voire catastrophiques. Le Conseil National des Barreaux avait intitulé son dernier ouvrage sur la question « dissuader pour ne pas dénoncer ». J’ai lu que cette règle de conduite nous avait valu, dans le dernier rapport publié sur le sujet, un

satisfecit, dès lors qu’en 2010, aucune déclaration de soupçon n’a été déposée et qu’une seule l’a été en 2011. Mais ce « dissuader pour ne pas dénoncer » sera bientôt obsolète si les projets en cours se concrétisent, puisqu’il nous faudra saisir le Bâtonnier, même dans l’hypothèse où nous réussissons à faire renoncer notre client à l’opération litigieuse. Quelle confiance nos clients pourront-ils nous accorder si nous devenons des délateurs ? Plus encore, après l’Europe, c’est notre juridiction suprême qui met à mal le secret professionnel dans son arrêt Bettencourt du 31 janvier 2012. La Cour de Cassation reconnaît recevable comme moyen de preuve des enregistrements clandestins réalisés par un particulier, de conversations téléphoniques entre un Avocat et sa cliente. Pourtant expressément saisi de la question au vu des dispositions de l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, elle considère que cet enregistrement pirate constitue une pièce à conviction car « il ne procédait dans sa confection d’aucune intervention directe ou indirecte de l’autorité publique ». Autrement dit, cet enregistrement, à partir du moment où il n’est pas réalisé à la demande d’un juge d’instruction ou par des services d’enquête, est recevable, peu importe qu’il retranscrive des conversations client-avocat. Sidérant ! Il faut placer le secret professionnel au sommet de la hiérarchie des normes, au-dessus de tout. A défaut, comment allons-nous pouvoir exercer ? Délation et déloyauté, vont-ils devenir des normes ? Imaginons encore un monde où l’avocat serait partout et deviendrait un réflexe. Mon prédécesseur, le Bâtonnier Despieghelaere, avait lancé une étude sur l’image de l’avocat. Des particuliers, des entreprises, des collectivités, des personnalités avaient été sondés. Cette étude, qui nous a aidés à réfléchir sur notre communication pour les années futures et sur notre identité, a été complétée cette année par

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Rentrée solennelle Denis Lequai et le Doyen Joseph Deschepper

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Nous organisons les « Rencontres du Barreau » dans des lieux différents sur des sujets où l’on n’attend pas les avocats, avec un croisement de deux mondes : le Grenelle de l’environnement à la Maison de l’Architecture, la gestion pour autrui à l’Institut Pasteur, l’identité numérique à Euratechnologie, le traitement social du surendettement dans les locaux d’une banque. Nous institutionnalisons nos relations par la signature de Conventions, avec le monde associatif, le monde des collectivités, le monde de l’entreprise (une parenthèse : le choix du lieu où nous nous trouvons ce soir, n’est pas anodin, la Cité des Echanges, Entreprises et Cités : les Avocats sont au cœur du monde de l’entreprise par leur présence ici ce soir, mais également au quotidien). Se rendre incontournable institutionnellement, c’est participer à des projets, réfléchir ensemble à des améliorations. Nous avons conclu des partenariats avec la Maison des Associations, la Chambre des Métiers, les Ruches d’Entreprises du Nord, la CCI Grande Lille. Nous développons avec l’ADIL, l’ARS, Lille Métropole Communauté Urbaine et les Bailleurs Sociaux, un projet de lutte contre l’habitat insalubre. Nous avons des compétences multiples, faisons les connaître, allons où l’on ne nous attend pas, étonnons, montrons que nous avons du cœur. Nous avons organisé pour la première fois avec nos amis les Notaires et les Experts-Comptables, une soirée et une journée sportive caritative interprofessionnelle dont tous les bénéfices ont été reversés aux banques alimentaires du Nord. Je vous assure que lors de ces manifestations sur le terrain de foot ou lors de la course des foulées du Barreau, nous n’avons jamais évoqué l’acte d’Avocat ou le périmètre du droit. Démontrons que nous savons sortir du Palais, de nos cabinets, prendre des bouffées d’air, nous intéresser à d’autres choses que le juridique ou le judiciaire. Affrontons sur un terrain de foot les Notaires, les Experts-Comptables, les Pharmaciens, les Policiers, le Barreau de Rouen (mon cher Marc, Bâtonnier de Rouen, souviens-toi du 9 juillet 2011 où sur tes terres, les ch’tis ont terrassé les normands).

pour nous (merci Madame le Maire pour nous avoir permis de découvrir l’exposition Saatchi, la route de la soie). Cultivons nos relations internationales. Lille est au cœur de l’Europe, une heure de Bruxelles, une heure de Londres, deux heures de l’Allemagne, une heure des Pays-Bas. Le Barreau le plus proche géographiquement du Barreau de Lille n’est pas un Barreau français, mais un Barreau Belge : celui de Tournai. Nous avons fêté cette année les dix ans du jumelage entre Tournai, Courtrai et Lille. J’ai eu le plaisir d’intervenir lors de la Convention Nationale des Avocats organisée par l’Ordre Néerlandophone des Avocats à Courtrai. Cela faisait suite à nos nombreuses séances de formations, de colloques, sur des problématiques transfrontalières. Nous réfléchissons actuellement avec nos amis belges à la création d’une structure qui

Nous organisons les « Rencontres du Barreau » dans des lieux différents sur des sujets où on n’attend pas les avocats, avec un croisement de deux mondes : le Grenelle de l’environnement à la Maison de l’Architecture, la gestion pour autrui à l’Institut Pasteur, l’identité numérique à Euratechnologie, le traitement social du Emmanuel Masson surendettement dans les locaux d’une banque. Créons une équipe féminine de rugby du Barreau et affrontons à l’occasion de la journée de la femme, deux équipes professionnelles. Ecoutons l’orchestre national de Lille sous la direction de Jean-Claude Casadesus donner un concert dans la salle des pas perdus du Palais de Justice (merci Monsieur le Président Negron pour cette initiative en partenariat avec l’Ordre des Avocats, la Chambre des Huissiers et la Chambre Départementale des Notaires). Visitons des expositions spécialement ouvertes

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permettrait, pour la première fois en Europe, la mise en place d’un Barreau transfrontalier, celui de l’Euro-métropole. Je salue ici les Bâtonniers de Courtrai et de Tournai, les remercie de leur présence et leur assure de la poursuite de notre collaboration de façon assidue pour les années futures. Le 26 octobre prochain, j’aurai le plaisir de jumeler le Barreau de Lille avec celui de Gand qui est à moins d’une heure de chez nous et de taille similaire.

Je salue ici Didier Goeminne son Bâtonnier. Ces trois partenariats, rassembleront plus de 3 000 avocats de nos 4 Barreaux. Il faudra compter à l’avenir sur ce grand Barreau transfrontalier. Avec nos amis du Barreau du Kent, nous organisons, au mois de Novembre prochain, une journée de formation croisée sur le thème de la rupture du contrat de travail. Je salue ici John Pitt, Président de la Kent Law Society. Les échanges de stagiaires continuent par ailleurs avec le Barreau de Buffalo et le Barreau de New York qui nous font le plaisir de leur présence ce soir. Nos relations sont toujours aussi suivies avec le Barreau de Marrakech avec lequel nous organiserons, en collaboration avec l’IXAD, une journée de formation dans les prochains mois. Cette sensibilité internationale, nous devons la développer dans nos cabinets. Ces jumelages et ces partenariats, peuvent et doivent nous y aider. Dans ce monde des Avocats idéal, imaginons un instant que les nouveaux champs d’activité qui nous sont ouverts prennent enfin leur essor. Nous avons attendu longtemps, trop longtemps, les textes sur l’acte d’avocat. Je ne suis pas certain que nous nous en soyons suffisamment emparés alors qu’il s’agit là d’un moyen extraordinaire de faire valoir nos compétences et de sécuriser les actes pour nos clients. Nous avons attendu longtemps les textes sur la procédure participative. Ayons maintenant le réflexe de l’utiliser. L’utilisation des MARC, MARL, des procédures dites douces, supposent une véritable révolution des esprits dans notre profession. La médiation, la conciliation, le droit collaboratif, l’arbitrage, doivent devenir un réflexe culturel pour l’avocat. Cela suppose un changement radical de notre façon d’exercer, de nos mentalités, et une formation solide.

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Rentrée solennelle C’est à ce prix que nous prendrons notre place dans ces nouveaux champs d’activité qui sont nécessairement amenés à se développer en raison de la déjudiciarisation galopante. Il est difficile de se dire au bout de 5, 10 ou 20 ans d’activités, qu’il va falloir réfléchir à se former à nouveau, abandonner nos vieux réflexes et envisager d’aborder une nouvelle clientèle. Il nous faudra le faire. Nous devons être accompagnés. Il n’y a aucune raison que nous ne puissions pas bénéficier de conseils de professionnels en gestion de carrière, en restructuration, en marketing, en nouvelles structures. Arrêtons d’imaginer que nous pouvons régler toutes nos difficultés d’expansion ou de développement en restant uniquement entre nous, sans apport extérieur. Correspondants informatique et liberté, agents sportifs, médiateurs, mandataires en transaction immobilière, est-ce suffisant ? Le Conseil National des Barreaux a réfléchi il y a quelques mois à la notion de l’Avocat audit de la situation des particuliers. Le Barreau de Paris lance une étude sur l’Avocat commissaire au droit dans les entreprises. L’action de groupe, la class action à la française devrait voir le jour dans les prochains mois. Continuons à étendre nos champs d’activités mais ne lâchons rien au judiciaire, notre cœur de métier. Voilà ce que pourrait être un monde idéal pour l’Avocat : un secret professionnel sanctuarisé, un périmètre préservé, le réflexe avocat institutionnalisé, des champs d’activités étendus et internationaux. Mais pour cela, il faut également imaginer, rêver un nouveau monde de la justice.

II. Rêver un nouveau monde de la justice Dans ce domaine, il ne faut pas forcément avoir une imagination débordante. Il suffit de repartir ne serait-ce que deux ans en arrière (le mal est plus ancien et a déjà été dénoncé par tous mes prédécesseurs lors de leur discours de Rentrée). Repartir donc deux ans en arrière et imaginer tout le contraire de ce qui s’est réellement passé. Tous les sujets s’y prêtent. La garde à vue tout d’abord, tous les Bâtonniers qui ont pris leur fonction le 1er janvier 2011 seront d’accord avec moi, nous avons passé sur le sujet une bonne partie de notre première année de mandat. Quelle aurait été la situation idéale ? Rêvons encore : une loi, élaborée dans la concertation, respectant les standards européens, promulguée dans des délais raisonnables. Des décrets d’application qui sortent en même temps que la loi, qui facilitent les droits de la défense et prévoient une juste rémunération pour les avocats. Des modalités pratiques qui tiennent compte du caractère libéral de notre profession. Au lieu de tout cela, qu’avons-nous eu ? Des pouvoirs publics qui pendant des années ont été sourds aux appels de la Cour

Européenne des Droits de l’Homme, allant même jusqu’à déclarer que ses arrêts rendus contre la Turquie ou la Russie n’étaient pas applicables en France. Une loi où il suffit de lire les débats parlementaires pour s’apercevoir qu’il s’agissait d’une avancée à minima et qui a été élaborée dans un souci de défiance inacceptable vis-à-vis des avocats. Une réforme qui s’applique avant la date d’entrée en vigueur prévue par la loi à la suite d’arrêt de la Cour de Cassation et du Conseil constitutionnel, situation inédite en France. Le 14 avril 2011, tous les Bâtonniers de la Conférence des Cent étaient réunis à Bordeaux. A 14 heures 30, coup de tonnerre, les arrêts de la Cour de Cassation tombent, les téléphones sonnent de toutes parts. C’est parti. A compter de cette heure, les avocats participent réellement aux gardes à vue. Nous avions tous prévus ces arrêts, tous les Barreaux étaient prêts, toutes les organisations étaient opérationnelles. Le décret prévoyant une indemnisation (pas une rémunération) ne sortira que le 6 juillet. Les avocats se sont mis en ordre de bataille sans même savoir s’ils seraient un jour payés de leurs interventions. La mobilisation à Lille comme ailleurs a été formidable. Nous avons bien fait car nous avons été récompensés de tous ces efforts par ce Décret du 6 juillet : une indemnisation indigne, pas de majoration de nuit, pas d’indemnité de déplacement, des modalités de règlement au dernier Avocat intervenu ingérables, des subventions au Barreau pour gérer cette nouvelle organisation qu’il a fallu quémander. Arrêtons-nous un instant sur ces subventions : Prévues par les Décrets et destinées à régler au Barreau les frais liés aux nouvelles organisations mises en place : frais de personnels, de téléphone, de coordinateurs. Il a fallu négocier, j’allais dire comme des marchands de tapis, pied à pied, avec la Chancellerie pour la persuader que cette organisation avait un coût, qu’il était anormal de laisser à la charge des Ordres et donc des Avocats. Je pense qu’il n’est pas difficile de comprendre que comme à Lille, prévoir un coordinateur de permanence 24 heures, qui reçoit entre 60 et 100 appels par jour des commissariats, des gendarmeries et des permanents, que mobiliser 10 avocats de permanence pendant 24 heures sur 44 points de garde à vue et que gérer des centaines de formulaires issus des missions pour prévoir ensuite les paiements, a un coût. Et bien la Chancellerie a eu du mal à comprendre. Une fois qu’elle a compris, il a fallu surmonter tous les obstacles administratifs et textuels, faire signer trois conventions, les faire suivre par la voie hiérarchique. A Lille, nous avons eu de la chance, nous avons été l’un des quatre premiers Barreaux à avoir un dossier complet (certains autres Barreaux n’ont pas encore franchi la première étape de ce parcours du combattant). Le montant de nos demandes a été âprement discuté avec le Ministère et nous sommes tombés d’accord sur un chiffre pour la subvention 2011 et sur un chiffre pour la subvention 2012.

Agenda

CONFÉRENCE DE L’ASSOCIATION DES JURISTES FRANCO-BRITANNIQUES

La prestation compensatoire en France et au Royaume-Uni 5 octobre 2012 Maison du Barreau - 75001 PARIS Renseignements : 01 44 09 79 00 ajfb.france@wanaddo.fr - www.ajfb.org 2012-663

13ÈME

ÉDITION DE TREMPLIN ENTREPRISE

De la strart-up innovante à l’entreprise de croissance d’ambition internationale 8 octobre 2012 Sénat - 75006 PARIS Renseignements : 01 34 43 28 26 renoud@essec.fr

2012-664

COLLOQUE SOCIÉTÉ DE LÉGISLATION COMPARÉE

Autorités administratives, droit fondamentaux et opérateurs économiques 12 octobre 2012 Conseil d’Etat - 75001 PARIS Renseignements : 01 44 39 86 28 caroline.lafeuille@legiscompare.com

XIXÈME

2012-665

CONGRÈS DU CNCEJ

L’expertise dans le procès équitable, principe et pratique de la contradiction 12 et 13 octobre 2012 Palais des Congrès 78000 VERSAILLES Renseignements : 01 45 74 50 60 nathalie@cncej.org - www.cncej.org

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25ÈME ANNIVERSAIRE DE L’ASSOCIATION NATIONALE DES AVOCATS POUR LA SAUVEGARDE DES ENTREPRISES ET DE LEUR DÉVELOPPEMENT

Assemblée Genérale ANASED 12 octobre 2012 Opéra Comédie 34000 MONTPELLIER Renseignements : 01 42 25 30 22 avocat@socquet-clerc.fr - www.anassed.fr

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Et bien la Chancellerie a annoncé, au mois d’avril dernier, que seule la subvention 2012 était mise en paiement (nous en avons reçu le règlement au mois d’août) et que la subvention pour l’année 2011 ne serait pas réglée en raison du contrôleur budgétaire du Ministère qui refuse de signer dès lors qu’il s’agit d’un montant prévu pour 2011, année budgétaire clôturée. Il s’agit là, et c’est inadmissible, d’un manquement de l’Etat à sa parole et je ne compte pas en rester là. Cette parole reniée, ce n’est pas la première fois que nous y sommes confrontés. Souvenez-vous du protocole de l’an 2000 dans lequel les pouvoirs publics prenaient l’engagement de réformer en profondeur l’aide juridictionnelle. Il n’est toujours pas respecté. Les 74 procédures que nous avons engagées à Lille devant le Tribunal Administratif à l’encontre de l’Etat, sont toujours pendantes. Nous finalisons actuellement notre mémoire en réponse. Je n’ose ici vous révéler les arguments du Ministère pour s’opposer à nos demandes, je ne veux pas vous gâcher la soirée. Tout aurait donc pu être idéal dans le cadre de la réforme de la garde à vue. Tout aurait pu se passer idéalement également pour la réforme des hospitalisations d’office. Une réforme voulue par le Conseil constitutionnel, souhaitée par tous les intervenants, indispensable pour le respect des droits des patients hospitalisés. On aurait pu rêver d’une loi qui ne serait pas datée du 5 juillet, prévoyant une application au 1er août (il est vrai qu’à cette date, les effectifs des établissements de santé, des Greffes, des Magistrats et des Avocats sont au complet). Une loi qui aurait prévu des moyens supplémentaires pour ce nouveau contentieux, une loi dont le décret d’application ne sortirait pas 10 jours avant sa date d’entrée en vigueur, et la circulaire, 4 jours avant. Une loi qui aurait évité de faire de la publicité des audiences la règle. Une loi qui éviterait que certains établissements présentent systématiquement les certificats médicaux contre-indiquant la présence du patient à l’audience faute de moyens pour les transporter ou s’organiser. Une loi qui aurait prévu, encore une fois, que l’intervention de l’avocat a un coût. Il a en effet fallu attendre le mois de mars de cette année pour que le décret sur l’aide juridictionnelle prévoit cette nouvelle intervention et indemnise l’avocat de 92 euros pour : se rendre à l’hôpital, rencontrer le patient, étudier le dossier, rédiger des conclusions, plaider à l’audience, rencontrer le patient après l’audience et le conseiller sur un éventuel appel. Une étude que nous avons menée à Lille fixe la rémunération minimale à 550 euros par dossier pour tenir compte de la viabilité économique d’un cabinet. Je me refuse à mettre en péril l’é quilibre économique des confrères qui se sont investis avec passion et compétence dans ce nouveau contentieux et depuis le 7 février dernier, je ne désigne plus d’office pour les audiences du Juge des Libertés et de la Détention. C’est de ma responsabilité. J’ai alerté la Chancellerie, le Conseil National des Barreaux, la Conférence des Bâtonniers, j’ai

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Rentrée solennelle

Laura Campisano, Thibaud Lemaître et Mathieu Masse saisi le Défenseur des Droits, le Contrôleur Général des Lieux de Privation de Libertés. En vain pour l’instant. Devons-nous continuer à accepter que l’accès au droit pour tous repose sur les avocats, alors qu’il s’agit d’une mission régalienne de l’Etat ? Ce combat pour une rémunération juste dans le cadre de la défense des patients hospitalisés est emblématique de notre combat pour la réforme de l’aide juridictionnelle en général. Ces patients constituent le public le plus défavorisé économiquement mais aussi socialement et psychologiquement. Ce sont les plus démunis des plus démunis. Devons-nous accepter de leur donner une défense au rabais, alors qu’ils ont le droit, comme tous nos concitoyens, à une défense de qualité. C’est exactement la même chose en droit des étrangers. Une loi qui rentre en application un 18 juillet, qui intervertit l’ordre d’intervention du Juge Administratif et du Juge Judiciaire et qui met donc à mal les protocoles de défense de qualité dit de l’article 91. En effet, seules les interventions devant le Juge des Libertés et de la Détention peuvent y être intégrées alors qu’elles ne sont plus que résiduelles. Une loi, qui aurait pris en compte que les procédures sont devenues maintenant éminemment complexes, qu’il faut faire des recours contre 5 décisions, que les mémoires font en moyenne une quinzaine de pages et que les jugements de même et qui aurait dû modifier l’indemnisation des confrères pour tenir compte de cette charge de travail supplémentaire énorme mais qui ne modifie rien, absolument rien. Là encore, le Barreau de Lille s’est investi, a alerté, a saisi les Instances, j’ai rencontré le VicePrésident du Conseil d’Etat, rien. Ne croyez pas que vous avez en face de vous un Bâtonnier désespéré. Ce n’est pas dans les gênes du Barreau de Lille. Non, je continue à avoir l’espoir que le monde de la justice s’améliore. Je continue à rêver que le droit de péage de 35 euros soit supprimé, le droit de péage qui, quoi qu’en dise le Conseil constitutionnel, est un frein et un obstacle pour certain justiciables et les empêche de faire valoir leur droit.

Là encore, la mise en place de cette taxe a été synonyme d’imprévision et d’impréparation. Je me souviens m’être rendu, accompagné d’un huissier, le 28 septembre 2011, deux jours avant l’entrée en application de la loi à la Direction Générale des Finances Publiques, pour leur demander des timbres de l’article 1635 Q bis du Code Général des Impôts. Je vous laisse imaginer le désarroi que j’ai lu dans les yeux de la personne qui nous a accueilli pour ensuite m’entendre dire que ces timbres n’existaient pas et que ce devaient être des timbres fiscaux, mais sans assurance aucune. De quoi, vous plaignez-vous me direz-vous ? Cette taxe est destinée à financer les nouvelles interventions de l’avocat en garde à vue. Mensonge. Cette taxe abonde le budget général de l’aide juridictionnelle et a rapporté quatre fois moins que prévu depuis son entrée en application. Supprimons-la, et écoutons enfin les propositions de la profession sur l’instauration d’un pourcentage minime prélevé sur l’ensemble des actes soumis à enregistrement. Ce sont ces actes qui génèrent le contentieux. Financer les procès générés par ces actes par une ponction lors de l’enregistrement n’est pas inique. Lorsqu’au sortir des Etats Généraux de l’aide juridictionnelle organisés par le Barreau de Lille nous avions proposé cette réforme. La Chancellerie nous avait ri au nez ! Comment ? Une nouvelle taxe déterminée par un pourcentage sur les actes enregistrés ? Vous n’y pensez pas ! Ce n’est pas moderne ! Vous n’allez quand même pas nous proposer la mise en place d’un droit de timbre ! Et quelques mois après, je faisais la queue chez mon buraliste pour acheter des timbres fiscaux à 30 et à 5 euros que je colle soigneusement sur mes requêtes et mes assignations ! Si cette méthode est moderne, autant rétablir la gabelle. S’il y a bien un domaine où la modernité est entrée dans le monde judiciaire, c’est celui de la dématérialisation. Tout le monde doit s’en féliciter. C’est écologique (sauf lorsqu’on nous demande d’imprimer notre dernier jeu de conclusions ou le justificatif des accusés de réception électroniques de nos notifications car le

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Rentrée solennelle été terminé l’année d’é diction du décret les réglementant. Cela fait maintenant plus de deux ans que nous dansons d’un pied sur l’autre sans savoir quel sort lui sera réservé. Travaux de réhabilitation pendant trois ans, d’un coût de 68 millions d’euros avec déménagement intégral, installation provisoire puis réaménagement. Ce coût est démentiel, surtout qu’il faut y ajouter le montant du déménagement et réemménagement et celui des installations provisoires pour un bâtiment dont tout le monde sait qu’il est trop petit, puisque le Tribunal d’Instance n’y loge plus, pas plus que le Conseil des Prud’hommes ou le Tribunal de Commerce. La Solution ? Gagner de la place en boutant les avocats hors du Palais. Le guide de programmation des Palais de Justice prévoit que les Ordres peuvent bénéficier de 81 m2, pas un de plus. Voilà ce qui nous est proposé par l’agence pour les programmes immobiliers de la justice qui n’a jamais répondu à l’un de nos courriers. Nous disposons actuellement d’environ 300 m2, qui sont tous justes suffisants pour loger les Services Ordinaux. Je rappelle que le Barreau de Lille compte 1100 avocats et que l’Ordre emploie 13 salariés. Notre place ne serait donc plus au cœur du Palais ? N’en déplaise au Conseil d’Etat, les Ordres remplissent des missions de Service Public et d’intérêt général. A ce titre, leur occupation gratuite de locaux suffisamment vastes est parfaitement légitime. Ce n’est pas la taille du Bureau du Bâtonnier au sein du Palais de Justice qui me préoccupe, mais

bien la place que doivent occuper les avocats dans leur seconde maison. Alors nous l’avons rêvé : rêvé de la construction d’une véritable cité judiciaire, accessible, fonctionnelle, vaste, adaptée à cette agglomération immense qu’est Lille, Roubaix, Tourcoing. A Lille, nous n’avons pas de quartier des Batignolles, mais les emplacements ne manquent pas. Fives, Lille-Sud, Euralille (non, pas Euralille), le Carrefour Pasteur. Tiens, le carrefour Pasteur au bout de l’avenue du Peuple Belge, disposant de vastes terrains dont certaines propriétés de l’Etat par l’intermédiaire du Ministère de la Défense. Mon Général, Général Poch, Gouverneur Militaire de la place de Lille, vos relations avec le monde de la justice ont toujours été très étroites et fructueuses, et vous nous faites toujours l’honneur de votre présence à nos manifestations, ne voudriez-vous pas qu’elles se ressèrrent encore ? Notre Palais n’est plus digne, je ne parle pas architecturalement parlant, mais il n’est plus digne d’une ville telle que Lille. Construisons cette Cité Judiciaire, nous avons jusque 2020 pour le faire. C’est loin, mais c’est aussi très court. Ne tardons pas ! Redescendons maintenant du monde de l’imaginaire vers la réalité. Il me faut conclure. Tous ces rêves ne sont pas inaccessibles. Aristote disait que l’espérance est le songe d’un homme éveillé. Mesdames, Messieurs, Mes Chers Confrères, les temps sont moroses, l’attentisme est inquiétant, mais l’espoir a les yeux brillants. 2012-660

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Magistrat n’y a pas accès sur son propre PC, seul le Greffe le pouvant, mais avec interdiction d’imprimer). C’est économique (sauf depuis que le grand défi est de faire en sorte que le coût de l’impression soit reporté sur notre interlocuteur). C’est rapide (sauf lorsque vous recevez un dossier d’instruction de 4 000 côtes sous forme de PDF unique et que vous devez toutes les faire défiler sans possibilité de recherche élaborée). Et puis, qui a eu cette idée extraordinaire d’instaurer à la même date la mise en place de la procédure dématérialisée devant la Cour, la réforme de la procédure d’appel et la suppression des Avoués. C’est vrai que c’était plus simple de bouleverser la forme, le fond et les personnes chargées de la mise en œuvre de la forme et du fond dans le même temps. Je dois dire qu’ici à Douai (pardon, je voulais dire Lille, nous ne sommes pas Barreau de Cour), la collaboration et la concertation entre les Magistrats, les personnels de Greffe de la Cour et les Barreaux ont été remarquables et que nous avons su éviter de grandes difficultés, mais tout n’est pas encore réglé. Je rêve donc d’une justice moderne, dématérialisée, certes, mais pas sans rapport humain et où la forme ne doit jamais être le prétexte à ne pas aborder le fond. C’est le risque que nous courons, il nous faut l’éviter à tout prix. Puisque nous en sommes à évoquer la modernité, il y a un lieu qui, à Lille, respire la modernité : notre Palais de Justice, moderne certes, mais il y a 40 ans. Il est devenu obsolète, trop étroit et dangereux. C’est un immeuble de grande hauteur, qui n’est pas aux normes des Bâtiments IGH pour avoir

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Vie du droit

Budget 2013 de la Justice Paris - 28 septembre 2012 Vendredi dernier, Christiane Taubira a présenté à la Chancellerie, le budget 2013 du Ministère de la Justice, l’occasion pour Madame le Garde des Sceaux de réunir, magistrats, syndicats et journalistes. Par les moyens financiers obtenus tout en respectant l’effort collectif de redressement budgétaire du Gouvernement, les priorités fixées par François Hollande lors de la campagne présidentielle seront tenues : renforcer la justice civile, rendre plus efficiente la justice des mineurs, prévenir la récidive, développer les aménagements de peine, l’accès au droit et l’aide aux victimes. Jean-René Tancrède

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Christiane Taubira

ans un contexte marqué par le redressement des comptes publics de la France, la Justice bénéficiera d’un effort tout particulier en 2013. Alors que les dépenses de l’Etat restent en 2013 au niveau de la loi de finances pour 2012, en son sein les dépenses consacrées à la Justice augmentent de 4,3%. Par ailleurs si les effectifs de l’Etat demeurent stables, ceux de la Justice augmentent de 500 emplois (480 pour le ministère de la Justice et 20 pour la justice administrative).

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Les moyens obtenus permettront de porter les réformes et les priorités du Gouvernement : renforcer la justice civile, rendre plus efficiente la justice des mineurs en réaffirmant sa spécificité, développer les aménagements de peine et l’insertion pour prévenir la récidive, objet de la conférence de consensus installée le 18 septembre 2012 et développer l’aide aux victimes et l’accès au droit. La Justice ne s’exonérera pas pour autant de l’effort collectif de redressement budgétaire du Gouvernement :

• la politique d’achat sera rationalisée ; • la politique immobilière sera réexaminée et les projets non financés abandonnés ; • des redéploiements d’emploi permis par la modernisation des outils informatiques du ministère accompagneront les créations d’emplois pour en démultiplier l’effet ; • les opérateurs du ministère (ENM, ENG, ENAP, APIJ…) participeront à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. Source : Plaquette du Ministère de la Justice (septembre 2012) 2012-661

PRINCIPAUX CHIFFRES BUDGET TOTAL 2013 7,70 milliards d’euros (augmentation de 4,3 %) 77 542 emplois (1 500 emplois créés sur 2013-2015 dont 500 en 2013)

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JUSTICE DES MINEURS 791 millions d’euros 8 470 emplois (+ 205)

SERVICES JUDICIAIRES 3,068 milliards d’euros 31 455 emplois (+ 142 emplois)

PÉNITENTIAIRE 3,195 milliards d’euros 35 700 emplois (+ 133)

AIDE AUX VICTIMES ET ACCÈS AU DROIT 340 millions d’euros

MODERNISATION DU MINISTÈRE, ET ACCOMPAGNEMENT DES PERSONNELS 301 millions d’euros

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Jurisprudence

Corrida Conseil constitutionnel - 21 septembre 2012 - Décision n° 2012-271 QPC

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 21 juin 2012 par le Conseil d’État (décision n°357798 du 20 juin 2012), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’association « Comité radicalement anti-corrida Europe » et l’association « Droits des Animaux », relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 521-1 du code pénal. Le Conseil constitutionnel, Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 521-1 du code pénal : Le fait, publiquement ou non, d’exercer des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. « En cas de condamnation du propriétaire de l’animal ou si le propriétaire est inconnu, le tribunal statue sur le sort de l’animal, qu’il ait été ou non placé au cours de la procédure judiciaire. Le tribunal peut prononcer la confiscation de l’animal et prévoir qu’il sera remis à une fondation ou à une association de protection animale reconnue d’utilité publique ou déclarée, qui pourra librement en disposer ». « Les personnes physiques coupables des infractions prévues au présent article encourent également les peines complémentaires d’interdiction, à titre définitif ou non, de détenir un animal et d’exercer, pour une durée de cinq ans au plus, une activité professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l'infraction. Cette interdiction n’est toutefois pas applicable à l’exercice d'un mandat électif ou de responsabilités syndicales ». « Les personnes morales, déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, encourent les peines suivantes » : - l’amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal ; - les peines prévues aux 2°, 4°, 7°, 8° et 9° de l’article 131-39 du code pénal. « Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée. Elles ne sont pas non plus applicables aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie ». « Est punie des peines prévues au présent article toute création d’un nouveau gallodrome ». « Est également puni des mêmes peines l’abandon d’un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, à l’exception des animaux destinés au repeuplement » ; 2. Considérant que, selon les associations requérantes, en prévoyant pour les courses de taureaux une exception à la répression pénale instituée par le premier alinéa de l’article 521-1 du code pénal, les dispositions du septième alinéa de ce même article portent atteinte au principe d’égalité devant la loi ;

législateur tient de l’article 34 de la Constitution ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l’article 8 de la Déclaration de 1789 l’obligation de fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l’arbitraire ; 5. Considérant que le premier alinéa de l’article 521-1 du code pénal réprime notamment les sévices graves et les actes de cruauté envers un animal domestique ou tenu en captivité ; que la première phrase du septième alinéa de cet article exclut l’application de ces dispositions aux courses de taureaux ; que cette exonération est toutefois limitée aux cas où une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ; qu’en procédant à une exonération restreinte de la responsabilité pénale, le législateur a entendu que les dispositions du premier alinéa de l’article 521-1 du code pénal ne puissent pas conduire à remettre en cause certaines pratiques traditionnelles qui ne portent atteinte à aucun droit constitutionnellement garanti ; que l’exclusion de responsabilité pénale instituée par les dispositions contestées n’est applicable que dans les parties du territoire national où l’existence d’une telle tradition ininterrompue est établie et pour les seuls actes qui relèvent de cette tradition ; que, par suite, la différence de traitement instaurée par le législateur entre agissements de même nature accomplis dans des zones géographiques différentes est en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ; qu’en outre, s’il appartient aux juridictions compétentes d’apprécier les situations de fait répondant à la tradition locale ininterrompue, cette notion, qui ne revêt pas un caractère équivoque, est suffisamment précise pour garantir contre le risque d’arbitraire ; 6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité doit être rejeté ; que la première phrase du septième alinéa de l’article 521-1 du code pénal, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclarée conforme à la Constitution, Décide : Article 1er - La première phrase du septième alinéa de l'article 521-1 du code pénal est conforme à la Constitution. Article 2 - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. – La première phrase du septième alinéa de l’article 521-1 du code pénal est conforme à la Constitution.

3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur la première phrase du septième alinéa de l’article 521-1 du code pénal ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ; que le

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 septembre 2012, où siégeaient : Jean-Louis Debré, Président, Jacques Barrot, Claire Bazy Malaurie, Guy Canivet, Michel Charasse, Renaud Denoix de Saint Marc, Jacqueline de Guillenchmidt, Hubert Haenel et Pierre Steinmetz. Rendu public le 21 septembre 2012.

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Jurisprudence

Pratique commerciale déloyale Cour de cassation - Première chambre civile - 12 juillet 2012 Arrêt n° 833 - Cassation partielle Demandeur(s) . La société Hewlett Packard France Défendeur(s) : L'association Union fédérale des consommateurs Que Choisir ; et autre Sur le moyen unique : Vu l'article L. 122-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, interprété à la lumière de la Directive 2005/2910E du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005 ; Attendu que sont interdites les pratiques commerciales déloyales; qu'une pratique commerciale est déloyale si elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen qu'elle atteint ou auquel elle s'adresse, ou du membre moyen du groupe particulier de consommateurs qu'elle vise; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société américaine Hewlett Packard fabrique des ordinateurs sous son nom et sous la marque Compacq dont la distribution est assurée en France par la société Hewlett Packard France (la société), sur le site Internet www .hp.com. ; que faisant valoir que cette dernière expose à la vente des ordinateurs prééquipés d'un logiciel d'exploitation, l'association de défense des consommateurs UFC Que Choisir, soutenant que cette pratique commerciale contrevenait à l'article L. 122-1 du code de la consommation, l'a assignée aux fins de la voir condamner à cesser de vendre sur son site des ordinateurs prééquipés du logiciel d'exploitation Windows sans offrir à l'acquéreur la possibilité de renoncer à ce logiciel moyennant déduction de la fraction du prix correspondant au coût de la licence d'exploitation et à indiquer le prix des logiciels d'exploitation et d'utilisation préinstallés et vendus en ligne; Attendu que pour juger que la vente d'ordinateurs prééquipés d'un logiciel d'exploitation sans possibilité offerte au consommateur d'acquérir le même ordinateur sans le logiciel d'exploitation, constitue une pratique commerciale déloyale et interdire à la société de vendre sur son site Internet des ordinateurs avec logiciels d'exploitation préinstallés sans offrir à l'acquéreur la possibilité de renoncer à ces logiciels moyennant déduction de la fraction du prix correspondant au coût de leur licence

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d'utilisation, l'arrêt retient d'une part, que cette pratique est contraire aux exigences de la diligence professionnelle puisque la société, qui prétend n'être que distributeur, se trouve toutefois en lien direct avec le constructeur lequel s'il n'a que des droits d'utilisation tirés de la licence qui lui a été concédée conserve un intérêt à adapter sa concession de licence à la demande en s'adressant à l'éditeur du logiciel d'exploitation, que la société ne peut justifier l'absence de proposition d'ordinateurs sans préinstallation puisqu'elle les propose aux professionnels et qu'il n'existe pas d'obstacle technique à l'absence de proposition sans préinstallation, ni à la désactivation lors de la vente, d'autre part, que cette pratique est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen auquel elle s'adresse puisque l'absence d'information sur la valeur d'éléments substantiels comme le prix du logiciel d'exploitation réduit ses choix en ce qu'il ne peut comparer leur valeur avec d'autres propositions, que surtout il se trouve privé de la possibilité d'acquérir sans logiciel et peut être ainsi amené prendre une décision à propos de l'achat d'un ordinateur qu'autrement ii n'aurait pas prise ; Qu'en se déterminant ainsi, tout en constatant que la société soulignait, sans être démentie, que le consommateur pouvait en s'orientant sur le site &die aux professionnels trouver des ordinateurs "nus", mais que l'installation d'un système d'exploitation libre restait une démarche délicate dont elle ne pourrait pas garantir la réussite, la cour d'appel qui s'est fondée sur des motifs desquels ne résulte pas que la vente litigieuse présentait le caractère d'une pratique commerciale déloyale, a violé le texte susvisé ; Par ces motifs : Casse et annule, sauf en ce qu'il a déclaré recevables l'action de l'association UFC Que Choisir et l'intervention accessoire de la société Droit du Marketing, l’arrêt rendu le 5 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris. 2012-671

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(*) Règlement à la réception de la facture

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Décoration

Pierre Châtel, Officier du Mérite

Pierre Châtel ans la plus stricte intimité de la salle à manger « Gaston Moore » du 12 Place Dauphine à Paris, Pierre Châtel a convié ses amis à participer à la cérémonie au cours de laquelle Alain Pouchelon lui a remis les insignes d’Officier dans l’Ordre National du Mérite en s’exprimant notamment en ces termes :

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« C'est un honneur pour moi, avec une émotion évidente parce que nous partageons tellement de souvenirs, de valeurs, d'être votre parrain pour cette remise des Insignes d'Officier dans l'Ordre National du Mérite. Vous avez choisi que cette cérémonie se déroule dans cette salle Gaston Moore, lieu d'histoires de notre Conférence, en présence essentiellement des Membres du Bureau de la Conférence des Bâtonniers de France et d’Outre-Mer. Pierre Châtel, la République, bonne fille, comme se plait à le rappeler l'ancien Bâtonnier de Paris Jean-René Farthouat, n'a pas été ingrate à votre égard. Je peux dire à cet instant que parmi les Membres du Bureau de la Conférence, vous avez été très remarqué. Les palmes académiques en 1991, pour récompenser votre engagement dans l'insertion du handicap dans la vie scolaire, Chevalier dans l'Ordre National du Mérite en 1998, au titre du Ministère de l'emploi et de la solidarité, Chevalier de la Légion d'Honneur en 2008, alors que vous étiez Bâtonnier en exercice du Barreau de Montpellier, vous avez reçu cette distinction à l'issue d'un éloge talentueux de notre Président honoraire de la Conférence des Bâtonniers, Monsieur le Président François Bedel de Buzaringues, si combatif pour la profession, qui, en fonction, avait osé dire lors de l'Assemblée

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statutaire : « Monsieur le Ministre, revoyez votre copie ». Je le salue. Palmes académiques, Mérite National, Légion d'Honneur, aujourd'hui vous allez devenir Officier dans l'Ordre National du Mérite ; c'est bien parce que vous avez dans votre engagement, jamais ménagé votre temps au service des autres dans la société, dans la profession. L'essentiel de votre parcours, ce sont les valeurs auxquelles vous êtes si attaché, que vous voulez partager parce que vous êtes de ceux qui croit que chaque être humain, à quelque place qu'il soit dans la Société, peut s'améliorer par la réflexion, par le travail. (…) Vous êtes élu membre du conseil de l'Ordre du Barreau de Montpellier, avec deux mandats de trésorier de 1984 a 1987 et de 1992 a 1995, et réélu de 2006 jusqu'à ce jour. Votre Bâtonnat fut flamboyant ; vous avez été à l'écoute des membres de votre Barreau, vous avez apporté votre pierre à la construction de ce grand Barreau, reconnu sur le plan national, mais aussi par des jumelages ambitieux au delà de nos frontières. Contrairement à ce que se plaisent à dire certains, pour vous remercier vos confrères n’ont pas été ingrats, ils vous ont offert une très belle réélection au sortir du mandat. Vous avez été Président de la CARPA de 1984 à 1990, fondateur avec Maître Espeillac et Cottalorda, de I'ENADEP à Montpellier, diplômé de l'Institut de Médiation et à ce titre membre fondateur de l'Association Nationale de Médiation des Avocats de Compagnie d'Assurances. Vous avez été Président de l'Association Nationale des Avocats de Compagnies d'Assurances et praticiens du droit de la responsabilité ; vous êtes chargé d'enseignement à la faculté de droit de Montpellier, Juge expert de la délégation française au Conseil des Barreaux Européens, membre du comité pédagogique de la Compagnie des Experts de Justice près la Cour d'Appel de Montpellier, membre fondateur du Comité d'Ethique de la

faculté de médecine de Montpellier, co-président du conseil scientifique au sein de CARTA EUROPEA dans le cadre du programme DAPHNE et du projet « l'avocat des femmes victimes de violences », co-président du comité ordinal régional en Languedoc Roussillon, qui réunit les responsables ordinaux des professions libérales. Tous ces investissements expliquent pourquoi vous choisissez les hôtels près des lignes TGV. Ces engagements multiples n'altèrent pas votre charge au sein de la Conférence des Bâtonniers, Vice Président de notre Conférence et Président de la commission de déontologie, vous ne comptez pas votre temps ; avec célérité vous répondez aux Bâtonniers. Dans les grands débats vous portez, sous le contrôle du Président Forget, la position de la Conférence. J'en veux pour preuve le dossier débattu, devant le Conseil National des Barreaux, vous avez par un travail très pédagogique, permis, avec le soutien efficace de notre Président, que soit adopté un texte qui renforce ce qui couvre notre secret professionnel et ce qui est du domaine de la confidentialité ». Pierre Châtel a commencé sa brillante carrière en prêtant serment en 1978, engagé au service des autres dès son plus jeune âge, ce grand juriste est apprécié pour ses qualités intrinsèques au premier rang desquelles loyauté et humanisme. Homme de confiance et d’honneur, grand travailleur, il a su porter haut les couleurs syndicales et ordinales de sa profession. Fidèle en amitié, l’attachante personnalité du récipiendaire reflète des qualités d’esprit qui rivalisent avec celles de son cœur. Nous présentons nos chaleureuses et amicales félicitations à celui qui conjugue avec talent modestie et droiture. Jean-René Tancrède

Alain Pouchelon et Pierre Châtel

Les Annonces de la Seine - lundi 1er octobre 2012 - numéro 58

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Paris - 21 septembre 2012


LES ANNONCES DE LA SEINE Supplément au numéro 58 du lundi 1er octobre 2012 - 93e année

Conférence du Jeune Barreau de Lille

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Rentrée Solennelle - 14 septembre 2012

Laura Campisano, Thibaud Lemaître et Mathieu Masse ccueillies par le Bâtonnier Emmanuel Masson et Hélène Fontaine son Dauphin, les personnalités locales ont assisté au concours d’éloquence oratoire des jeunes avocats lillois qui se déroule tous les deux ans. Pour la Conférence 2012, les lauréats ont été présentés par la troisième secrétaire Laura Campisano : Thibaud Lemaître (deuxième secrétaire)

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dans le rôle de « L’avocat est-il un comédien qui joue le scénario de son client ? » et Mathieu Masse (premier secrétaire) dans le rôle de « L’homme politique doit-il porter une robe ? » Nous félicitons chaleureusement les orateurs qui perpétuent la tradition d’excellence orale et portent les valeurs du serment d’avocat transmis de génération en génération. Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : as@annoncesdelaseine.fr FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE


Rentrée solennelle

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Joseph Deschepper, Emmanuel Masson et Laura Campisano

Présentation des deux “Secrétaires 2012” par Laura Campisano (…) ette année, la rentrée solennelle est exceptionnelle. Il y a deux ans, notre invité, après avoir dû lutter contre Maître Lebas et Maître Hammouch a compris quelle était la puissance éloquente du jeune Barreau de Lille et a passé le mot à tout l’échiquier politique, leur expliquant qu’il valait mieux éviter de venir se mesurer à nous ! A leur tour, la peur les gagnant, ils ont passé le mot sans doute sur un plateau télé, à l’ensemble de la famille des acteurs, comédiens, humoristes. Tel l’é quipage des vikings dans un album d’Uderzo, les invités ont préféré couler euxmêmes leur embarcation plutôt que de se confronter à nous. C’est pourquoi ce soir nous ne recevrons pas Nadine Morano, elle l’a d’ailleurs déjà écrit sur Twitter.

Voilà ce que sans nul doute ont redouté les plus vaillants orateurs que compte le pays. (…)

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Hélas, nous ne recevrons pas non plus Lionel Jospin, retenu à une pêche aux crabes sur le secteur de Royan. Nous ne recevrons pas non plus Madonna, qui me disait encore tout à l’heure au téléphone, qu’elle préférait éviter à nouveau d’être huée, surtout si elle devait se mesurer à nos deux gigantesques 1er et 2ème secrétaires. Car savons nous bien qui sont les deux titans qui vont s’exprimer devant vous dans quelques instants ? Laissez-moi vous en dire quelques mots, brefs, car le talent n’a nul besoin d’être commenté longuement. Mon premier est un très jeune Avocat, qui semble sérieux et timide, mais qui n’hésite pas à dévoiler sa personnalité lors de soirées arrosées organisées par l’Ordre, mais on me dit dans l’oreillette que ce n’est pas dans mon script, OK Monsieur Davaine, désolée, je m’égare. Féru de chiffres et de droit des affaires, il sait parfaitement doser au gramme près, les sauces qui accompagnent les plats qu’il concocte pour sa petite famille.

Quelle destinée pour celui qui, à l’âge où l’on se destine pour une carrière de cosmonaute, vouait un véritable culte aux bêtes. Fervent défenseur du droit au retour à l’enfance, notre Premier Secrétaire est un père attentionné qui se nourrit en cachette de petits pots carotte - topinambour ce qui lui donne ce visage de poupon. Il n’hésite pourtant pas à pratiquer l’humour noir, parfois aussi noir que le café qu’il s’injecte chaque matin à la machine de son bureau, un peu grinçant parfois, mais toujours avec finesse, notamment en période d’élections. Peu porté sur la chose politique, mais bien plus sur la haute couture, il s’essaie néanmoins, sait on d’une source proche du barreau, à définir les contours d’une matière qui le fait plus rire que pleurer. Mon second est également un très jeune avocat, mais cache au fond de lui de nombreux atouts, ainsi que le démontre cette incursion américaine où il a tenu un rôle majeur, non pas à Broadway, mais dans un cabinet d’avocats. Fan absolu d’Ally Mc Beal, il ne résiste pas à entamer quelques pas de danse de la non moins célèbre chorégraphie dans les toilettes du Cabinet Brochen où il est collaborateur. Amoureux de musique, il l’est aussi de la défense aussi bien sur un terrain que dans les conseils de prud’hommes, où prenant la voix de Woody Allen, il parvient à détourner le cerveau de ses adversaires en deux temps trois mouvements, les contraignant à sourire et à lui donner raison. Secrètement amateur de comédies romantiques, il se plait à rêver qu’il écrira un jour, pour changer, le scénario que joueraient ses clients pour lui, devant un parterre de juges médusés. Vous l’aurez compris, nul ne saurait se mesurer à ces deux esthètes de la langue de Molière. Adaptant le ton à l’auditoire, revêtant le costume ajusté de celui qui se lève pour déclamer. Une chose est sûre, au cinéma, en politique, et dans l’avocature, comme le disait Paul Valéry, « Le grand triomphe de l'adversaire est de vous faire croire ce qu'il dit de vous. »

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Rentrée solennelle

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Thibaud Lemaître

L’avocat est-il un comédien jouant le scénario de son client ? par Thibaud Lemaître ’est avec un plaisir non dissimulé que j’ai souhaité aborder, en ce jour de rentrée du jeune barreau, un tel sujet. Rien de très solennel, j’en conviens, mais, après tout, mon excellent confrère Mathieu Masse ayant ambitionné de traiter le thème, on ne peut plus brûlant, des « hommes politiques devenant avocat (par l’opération du Saint Esprit) », je me suis dit qu’il fallait, en amont, détendre, un tant soit peu, l’auditoire. Quelque part, « l’avocat-comédien », c’est un sujet intemporel, tout à la fois une image d’Epinal et, je le pense, une croyance populaire, sincère, presque touchante. Cette croyance découle en partie du stéréotype largement véhiculé, selon lequel l’avocat, je cite, « déguise ou exagère l'effet, il cite faux, il calomnie, il épouse la passion et les haines de ceux pour qui il parle et - estocade finale - il est de la classe de ces orateurs dont le proverbe dit qu'ils sont payés pour dire des injures ». Non. Non, la citation ne provient pas d’un « synergique » syndicat d’officiers de Police, ni même d’un non moins célèbre « Institut Pour la Justice », mais de Jean de La Bruyère et date de la fin du 17ème siècle. Il est vrai que toute une section de son œuvre majeure « Les caractère ou les mœurs de ce siècle » est consacrée aux effets pervers de l’éloquence. Au fond ce dernier reprenait, peu ou prou, l’idée de Montaigne selon laquelle les avocats n’étaient que « conscience de louage ». Aujourd’hui, lire, ou entendre, « Avocat » et « Comédien » dans une même formule fait froncer les sourcils ou, pour les moins susceptibles, fait lever les yeux aux ciels des robes noires. Mais, paradoxalement, le barreau est fier, et friand, des plus belle joutes, des plus délectables plaidoiries, des plus grands moments d’oralité,

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usant des ficelles les plus éculées, de l’art théâtrale. Alors l’avocat serait-il acteur, simple porteparole de son client ? Ou bien est-il un austère technicien, mais authentique stratège ? Cette opposition mérite bien quelques développements. Assimiler comédien à avocat est, nous l’avons déjà souligné, assez répandu dans l’imaginaire collectif. Et c’est d’ailleurs peut être cette raison qui le pousse à vouloir s’affranchir de cette encombrante étiquette. Car l’avocat semble avoir le plus grand mal à assumer la comparaison et à intégrer sa part de théâtralité : Comme si, reconnaître cela, revenait à disqualifier, discréditer sa mission ; voire même à sacrifier l’image du juriste érudit au profit de celle du baveux. Et il faut reconnaître que nul ne se prive d’opposer le sérieux et le discret de l’avocat conseil, dont l’étiquette de juriste à su être sauvegardée aux yeux de tous, avec la résonnance et le bouillonnement de l’avocat plaideur, idéalement pénaliste, dont on dit d’ailleurs, à tort, qu’ils font deux métiers différents. J’irai plus loin encore : c’est une réaction quasiépidermique : de nombreux et illustres confrères ont déjà évoqué ici et là, cette prétendue proximité, en la rejetant avec force. Récemment, à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Jean Racine, notre confrère Christian Charrière-Bournazel, actuel président du CNB, estimait que « Rien n’est plus approximatif, inexact même, que d’assimiler l’avocat à l’acteur. » Vous l’avez compris, l’avocat ne se voit donc pas comédien. Il n’est pas rare a contrario d’entendre des comédiens déclarer, qu’il aurait pu ou voulu être avocat : faisant constat de la proximité, selon eux, évidentes, entre les deux métiers. Inutile de chercher dans la Gazette du Palais, vous lirez aisément ces déclarations dans Paris Match ou autre Télé 7 Jours. Pour preuve - s’il en fallait -, je me souviens de l’hommage rendu à notre profession par Pierre Richard après avoir incarné un avocat tourmenté dans le film « Le Serpent » d’Eric Barbier. Il y exposait notamment, au détour d’une entrevue, sa fascination pour notre métier et son désir, jamais avoué, de porter la robe. En retour, Je n’oublie rien de l’hommage que ne manque jamais de rendre à Pierre Richard, le jeune avocat lors de sa première plaidoirie, en y interprétant, souvent avec talent, « La Chèvre ». Un juste retour des choses, en somme. Le comédien Kyan Khojandi, à la célébrité naissante grâce à la mini-série « Bref » a lui aussi touché du doigt notre profession. Longtemps hésitant entre le monde de la Justice et celui du théâtre, son choix fut arrêté définitivement lorsque l’un de ses professeurs de Droit aborda le délicat sujet des servitudes qui comme il le rappele lui-même, avec humour : « sont discontinues lorsque elles ne peuvent s’exercer qu’avec une intervention renouvelée de l’homme et qu’elles restent telles ; quand bien même elles seraient rendu artificiellement permanente au moyen d’un outillage approprié, des lors que cet outillage ne peut fonctionner sans l’activité quotidienne de l’homme ».

Vous l’avez compris, lui comme d’autres quittèrent finalement les bancs des Facultés de droit pour les planches. Le comédien se verrait donc bien défendre la veuve et l’orphelin. Car, vous l’avez compris, je ne vous parle pas de celui qui rêve, du plus profond de son être, de plaider la nullité d’un cautionnement, mais plutôt de celui qui se rêve en Perry Masson au discours nourri « d’objections », de « votre honneur » et, plus généralement, de coup de théâtre délicieux. A ce propos toujours, la préparation de ce sujet m’a amené à faire des découvertes plus surprenantes les unes des autres et, notamment, que le comédien vedette du soap opéra « Plus Belle La Vie » désirait ardemment, lui aussi, entrer dans notre profession. Heureux soit le Barreau. Attendu que ; dans la série, il noue une relation équivoque avec une jeune fille qui s’est avérée être sa nièce cachée, elle-même complice de l’assassinat de son père qu’il pensait, à tort, responsable de la disparition de son frère jumeaux ; on espère tous qu’il ne se lancera pas dans le droit de la famille. Trêve de plaisanteries. Alors l’avocat, un comédien jouant le scénario du client ? Cette question j’ai souhaité la débattre contradictoirement. Puisque l’avocat se refuse comédien et que le comédien se verrait bien avocat, voyons les arguments de chacune des parties. J’ai développé ma thèse – celle de l’Avocat bien sûr - en premier, suffisamment confiant en mon argumentation pour penser qu’elle n’appellerait aucune réponse du comédien. L’avocat, simple comédien servile ? Certainement pas ! L’interrogation appelle une réponse sèche et sans nuance de l’avocat : il n’est pas un comédien au service du scénario de son client. Disons le haut et fort ! Au fond, me direz-vous, c’est frappé au coin du bon sens. L’acteur a pour objectif élémentaire d’épouser au mieux le rôle qu’on lui assigne. Cela a un sens : il entre pleinement dans son personnage, au point, parfois, d’entretenir une forme de confusion entre celui qu’il a représenté et celui qu’il est réellement. A l’inverse, l’avocat doit nécessairement se distancier de celui qu’il représente. Il s’écarte pour rester ce qu’il est, pour maintenir une objectivité – ou un semblant d’objectivité, pour se protéger, pour pratiquer son métier dans les meilleures conditions, en somme. Au fond, le comédien se garde bien de travestir ou de métamorphoser son personnage. Le scripte doit être observé et le personnage doit être interprété fidèlement. L’avocat est, quant à lui, un sculpteur. Sculpteur qui va se permettre de modifier la perception que l’on a de l’individu qu’il défend. La défense n’implique aucun mimétisme bien au contraire, elle nécessite audace, singularité, authenticité. Enfin, et ce n’est pas la moindre différence, l’avocat se voit confier un rôle dans le fonctionnement même d’une institution régalienne. Avec tout le respect que l’on doit au 7ème art, le comédien ne porte pas sur son dos le poids d’une telle responsabilité. Lorsque l’acteur ne rencontre pas le succès, il ne compromet que son ego.

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Rentrée solennelle Sa carrière en prendra un coup ou se verra brusquement freinée. Son aura, sa couverture médiatique, fonderont comme neige au soleil. Mais c’est tout. Le texte qu’il a mal soutenu, le personnage qu’il n’a pas su incarner lui survivent ; Le personnage d’Astérix a survécu à Christian Clavier. L’avocat qui se rate lui compromet avant tout son client : le comédien lui, n’a jamais engagé sa responsabilité. Voilà ! Il n’y a donc rien à voir, rien à entendre, Mesdames, Messieurs vous pouvez tous partir : l’avocat n’est pas comédien et bien entendu, il joue sa propre partition. Démonstration imparable. Nous sommes tous convaincus. A cet instant, j’ai le sentiment jubilatoire d’avoir terrassé mon adversaire comédien. Bon prince, et pour la forme, je laisse la parole à la défense, avec cette sensation d’avoir convaincu l’auditoire. La partie était assez facile, il est vrai. Le comédien me regarde l’œil amusé, le sourire taquin : il se lance et affirme ou plutôt assène que l’avocat est un acteur et que, bien plus, qu’il ne s’agit au fond que d’un « Mercenaire affamé de scène », un mercenaire au service des scénarios élaborés par son client ». Ce faisant, il se jette, à son tour, dans sa démonstration, dont je me permets de vous faire, aujourd’hui et devant vous, lecture fidèle. Voici donc Le comédien :

L’actualité récente a largement nourri l’idée que l’avocat est simple comédien mettant en forme un scénario. On a largement débattu, dans la presse notamment, du procès de Jérôme Kerviel. Que l’on soit en accord ou en désaccord avec la stratégie adoptée, l’ensemble des commentateurs et chroniqueurs judicaires - Pascale Robert-Diard, du « Monde », en tête - ont relevé le caractère particulièrement spectaculaire, au sens premier du terme, de la défense, validant mot pour mot le scénario du prévenu. De plus, son conseil a joué fidèlement la partition de son client, même si d’aucuns s’accordaient à penser qu’il ne s’agissait pas de la stratégie la plus opportune. L’objectif poursuivi était simple : coller, au mieux, aux souhaits du client mais aussi, disons-le, aux souhaits du public, au plus grand dam de la juridiction dont la Présidente s’était d’ailleurs exclamée en pleine plaidoirie de la défense « Maître, on n’est pas au spectacle ici !» C’est une réalité. Et, pour tout dire, ça ne date pas d’hier. L’analyse des grandes plaidoiries modernes ne laisse pas de place au doute ! L’avocat contemporain est une « bête de scène ». Le barreau né au début du 20ème siècle a fait naître des plaidoiries percutantes, moins sensibles, se fondant sur la démonstration et une présence à l’audience parfois proche de celle du comédien. Cette nouvelle conception, plus offensive, plus démonstrative, a donné naissance à de véritables artistes du prétoire… Il suffit de se reporter aux biographies des plus illustres avocats pour s’en convaincre : L’immense René Floriot « à l’allure à la fois bourrue et paysanne, à la manière de Jean

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Gabin ». Ce même René Floriot qui, oh surprise ! fut aussi scénariste et comédien, pour le cinéma. L’inévitable Maurice Garçon « sarcastique et faussement colérique ». Maurice Garçon jamais avare de frasques en tout genre. Qui, à l’époque, aurait eu l’audace de servir lors d’un dîner de notables des carafes d'eau dans lesquelles tournoyaient des poissons rouges ? Maurice Garçon qui fut par ailleurs membre du conservatoire de l'Humour, Président du Club du Cirque et avocat du syndicat français de la prestidigitation, art qu'il pratiquait ! Que dire d’Henry Torres « cette merveille d’Avocat méridional au geste théâtral : ample et généreux », rappelant un personnage archétypique de Marcel Pagnol. Mais j’aurais aussi pu citer Emile Pollack, Jacques Vergès et bien d’autres… Nous sommes dans le registre de la comédie pure, du théâtral. D’ailleurs, plusieurs de ces Avocats ont eu un moment ou un autre une proximité avec le monde de la comédie et du spectacle ! Rassurez-vous. mon raisonnement ne se base pas uniquement sur cette compilation de personnalités exceptionnelles. Une journée passée au tribunal, à épier, à écouter, a fini d’achever ma conviction. Regardez-vous plaider ! Ecoutez-vous convaincre ! Lorsque tous les moyens de la rhétorique sont mis au profit de votre expression, la sensation d’avoir un comédien en face de soit n’en est que plus forte. D’abord le regard ! C’est celui du comédien ! Parfois fuyant, parfois perçant, esquivant cherchant au sol ou au ciel, il est souvent la première expression du corps. En fait, cette expression se voit surtout quand l’Avocat se tait, et précisément quant il doit écouter religieusement la partie adverse. Sans parole, contraint de rester muet, son regard se dirige, entre ciel et terre, le sourcil se fronce sur l’adversaire, se relâche vers le Magistrat et, comme pour conclure ce ballet oculaire, se soulève légèrement à la vue du client C’est déjà une première parade de séduction. Ensuite, la parole. La parole, c’est de la musique ! Lorsqu’un acteur en possession d’une voix bien entrainée et d’une technique vocale magistrale dit son texte, nous sommes complètement emportés par son art. S’il y a du rythme, nous sommes involontairement entrainés par ce rythme et si le ton des paroles est juste, nous sommes profondément remués. C’est rigoureusement le même sentiment pour l’avocat. Un avocat qui marmonne ou étouffe le son de sa voix aura peu de chance d’être entendu. Nous pourrions tout autant disserter sur le port de la robe, équivalent au costume des comédiens. Sur l’usage de la chorégraphie : de l’art de régler les gestes des mains, et plus généralement des mouvements du corps qui sont des éléments fondamentaux de l’action rhétorique. Enfin, prestance et charme scénique font aussi parti des armes et qualités que se partagent avocat et comédien : Celle ou celui qui joue, produit souvent sur son auditoire une fascination ou a contrario une répulsion. « La prestance, la beauté naturelle, le défaut

physique, la laideur participent à ce que le théâtre appelle le « charme scénique ». L’audience n’y échappe pas ! J’en veux pour preuve le procès du Maréchal Pétain. Quand son défenseur Maître Jacques Isorni se lève : il est blanc, il est livide ! (en réalité dû à un malaise lors de la suspension d’audience): il lui avait suffit de paraître – anémique et grave devant tous - pour que la cause paraisse à moitié gagnée ! Comme au théâtre, un Avocat provoque par sa seule présence toute la crédibilité dans ce qu’il dit. Prestance toujours: comment ne pas évoquer ici le fabuleux Vincent de Moro-Giafferi, qui fût parlementaire sous la troisième et la quatrième république et surtout un avocat d’exception, décrit par Albert Naud comme « improvisateur de génie se laissant divaguer au rythme de ses humeurs ». Ce dernier était coutumier des mises en scène purement théâtrales, offrant au spectateur une tranche de comédie se glissant au sein des procès les plus lourds et difficile. Une célèbre anecdote mérite d’être relevée : Se trouvant aux assises : Moro-Giafferi se leva et monta un monocle. Il regarda fixement l’un des jurés lors du tirage au sort de ces derniers. Appelé, l’homme se leva pour prendre sa place de premier juré. Le sourcil de moro Giafferi s’abaissa comme pour une visée, puis le sourcil se releva fortement, faisant tomber le monocle dans sa main et Moro Giafferi d’hurler : « récusé » !, qui retentit comme un coup de feu tiré à bout portant. L’homme regagna son banc et son petit visage poilu disparut derrière le dos courbé des autres jurés : puis Moro-Giafferi murmura à lui-même, assez fort pour que chacun puisse comprendre : un assureur (ton consterné et méprisant) non , et un barbu. Le rire éclata et l’effet fut parfait : Par la suite, chaque juré esquissa un sourire aimable en passant devant Moro-Giafferi lorsque celui-ci avait la bonté de ne pas les passer au grill, et donc, forcement flattés, de passer entre les mailles du filet « Moro ». Voilà l’Avocat-comédien ! C’est, du reste, la position défendue par beaucoup et notamment par le metteur en scène britannique Gordon Mc Call, récemment choisi pour dispenser des cours de théâtre aux avocats du barreau de Montréal. Selon lui : l’avocat est un acteur : que ce soit en salle d’audience ou au cours d’une négociation, l’avocat est amené tôt ou tard à revêtir un masque, une posture, une attitude. Comme un comédien sur une scène. Je me permets, de le citer : « Dans une salle d’audience, l’Avocat est comme sur scène. Leur public, ce sont le juge et le jury. Tous n’ont pas conscience de l’importance de leur interprétation. Le jury ou les juges, observe l’Avocat bien plus qu’on ne le croit. Souvent les avocats sont tellement impliqués dans leur plaidoirie qu’ils ne voient pas ce qui se passe autour d’eux. » « L’avocat doit être formé comme un comédien. » L’Avocat est donc ce comédien qui s’ignore ou, plutôt qui se refuse. Ainsi, si tel est le cas, il doit pouvoir s’approprier n’importe quel scénario.

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Thibaud Lemaître, Emmanuel Masson et Benoît Rivaux

Souvenez-vous de ces acteurs qui ont su transcender, sublimer par leurs prestations des scénarios pourtant sans originalité particulière : Coluche dans « Tchao Pantin », Tahar Rahim dans « Un Prophète », Patrick Bruel dans (silence), ah non excusez-moi, pas Patrick Bruel. L’avocat doit aussi pouvoir sublimer le scénario banal ou bancal, souvent les deux, il est vrai. Il est vrai toutefois que le privilège de l’acteur doué et reconnu est de pouvoir choisir son scénario ; quelque part : il en est de même pour l’avocat. Les Musset, Molière ou Corneille, ne sont-ils pas les auteurs favoris des pensionnaires de la Comédie Française ? Les grands Avocats, comme les grands comédiens, choisissent les grands scénarios. A défaut de pouvoir choisir son scénario, avocats et comédiens peuvent, à tout le moins refuser ceux qu’ils ne sont en mesure d’assumer. Ce refus est susceptible de se fonder sur des critères définis, sans pour autant que le fond du scénario ait à être examiné. En premier lieu, ils doivent l’un comme l’autre avoir une certaine affinité avec le sujet et bien évidement le texte doit relever de sa compétence. Il y a d’excellents scénarios qu’ils sont bien incapables de jouer En second lieu, et c’est un critère plus objectif, il faut que le scénario, bon ou mauvais, laisse de la place à la mise en scène : La thèse doit laisser un peu d’air, préserver le côté « ambigu » et « indécidable » des choses. Une chose n’est pas triste ou gaie, rapide ou lente, effrayante ou rassurante, et tout ne doit pas aller dans le même sens. La réalité n’est pas un jeu de piste avec des flèches. Le scénario non plus. Il en est de même pour la thèse que soutiendra in fine l’Avocat. Donc peu importe le scénario : à l’instar de l’art culinaire, la recette compte autant que sa préparation : donc cuisinez le script avec audace, ajoutez-y du rythme, n’omettez pas le rebond, une pincée de risque, des interactions savoureuses et le tout servi dans une atmosphère appropriée. Avec une telle définition du scénario : oui, l’Avocat-Comédien peut se contenter du

scénario de son client, car le scénario doit laisser de l’air ! Comédien comme Avocat doivent juste accepter ou refuser le scénario qu’on leur propose en fonction de ces critères de qualité. S’ils l’acceptent, ils doivent le jouer en adaptant juste la mise en scène. Voilà pour la démonstration du comédien. Argumentée. Implacable C’est sur ces mots et cette histoire que mon contradicteur comédien termine sa plaidoirie, non sans panache. On pourrait presque en conclure qu’être sociétaire de la comédie française est, au fond, une bien meilleure garantie qu’être secrétaire de la conférence pour plaider et défendre. Définitivement convaincu par cette brillante démonstration du comédien, je trépignais de voir le comédien, le vrai, qui sommeillait en moi faire du Moro-Giafferi ou du Maurice Garçon partout, tout le temps. Prendre le scénario du client, le mettre en scène et jouer la pièce. Les trois coups et le levé de rideau. Comme au théâtre. C’est alors que je me suis souvenu. Je me suis souvenu de ces dossiers, de ces théories, de ces scénarios que l’on m’avait déjà soumis ou proposés. De ces innombrables moments où la thèse que l’on nous suggère de soutenir, de la pièce que l’on nous prie de jouer ne serait pas plus vraisemblable qu’un Teddy Riner dans « Casse noisette ». Je me suis souvenu de cette authentique affaire concernant un homme renvoyé devant le tribunal correctionnel pour menace de mort réitéré sur une douzaine d’employés d’administrations d’une paisible bourgade. Une affaire banale, comme on en lit régulièrement dans la presse régionale. Bien avant, ce dernier avait déposé plainte entre les mains du Doyen des juges d’instruction pour… « acte de sorcellerie » commis par les mêmes fonctionnaires qu’il avait menacé : un peu moins banal, en fait. Ce dernier expliquait, dans une interminable plainte, être victime de l’administration française coupable de - je cite : « maltraitance, acte de

torture et barbarie par envoûtement, manipulation mentale, sorcellerie, campagne calomnieuse et diffamatoire, atteinte à la dignité, asservissement, atteinte aux libertés individuelles et cerise sur cet apétissant gâteau : machination. ». Quelque part, je me suis dit qu’il avait probablement décompensé en tentant d’envoyer un colis de la poste de Roubaix Centre, un mardi à 15 heures, et que son sentiment général était de s’être senti ensorcelé par cette force mystique capable de recréer à volonté des files d’attentes au gré des fermetures de guichets. Sentiment que l’on a tous connu, J’étais presque d’accord avec lui. Ce dernier proposait une thèse d’une précision redoutable et donnait à chacune des personnes citées dans sa plainte un rôle bien précis dans son envoûtement. Le scénario était limpide et audacieux. La CAF était à l’origine de ses nausées. L’assurance maladie de ses échecs sentimentaux. Enfin, le Pôle Emploi manipulait son esprit, durant son sommeil. Je ne pouvais que prendre le scénario, ayant moi-même, comme nombre de mes confrères fait l’objet, d’une « maltraitance bafouant ma dignité» pour reprendre les termes de mon client de la part, du R.S.I. Nous nous comprenions. Hélas, respectant les préceptes de l’AvocatComédien, j’aurai alors dû plaider l’authenticité de la sorcellerie. Bien que la mise en scène eut été soignée et le jeu aussi convaincant que Linda Blair dans l’Exorciste, j’aurais eut à insulter l’intelligence du tribunal. Il était fou me direz-vous ! Si seulement le mensonge éhonté était l’apanage des aliénés ! Car tant de scénarios concoctés avec soin par nos clients nous amusent, attristent ou exaspèrent : Tous ces mensonges que l’on entend habituellement pour lesquels l’avocat dit non: car il ne peut pas et ne veut mentir de la sorte. Je vous parle là, du plus banal quotidien, à tout le moins, il est vrai de celui du pénaliste. Combien de fois avons-nous entendu ces « classiques » du scénario : Untel ne comprends pas, il n’avait certes pas le permis de conduire mais c’était bien la première fois qu’il prenait son véhicule parce qu’il fallait : - Conduire sa femme à la maternité, réponse A - Emmener son fils aux urgences, réponse B - Aller voir son père sur son lit de mort, réponse C Il est aussi possible de combiner les réponses au gré de l’audace du client. Un autre a fait des découvertes surprenantes : En ouvrant sa porte il a trouvé, avec bonheur, une enveloppe contenant 3 000 euros, sur son pallier, qu’il s’est contenté de ramasser ». Un autre ne paye plus son loyer parce que le propriétaire « ne fait jamais l’effort de venir récupérer son chèque ». Et son alter ego bailleur d’affirmer : « qu’il ne savait pas que le logement qu’il a mis en location devait avoir l'eau courante et l’électricité» J’en passe, peut-être des plus pathétiques, certainement des bien plus savoureuses. Mais, voilà pour ce que l’on nous soumet.

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Rentrée solennelle Mesdames, Messieurs, Il est temps de conclure ce faux débat La soumission au scénario du client, l’abaissement au rôle du joli porte parole, est juste la négation de notre métier. Etre un comédien déférent revient à se détacher de tout : de notre mission originelle, de notre fonction d’auxiliaire de Justice. La différence fondamentale entre l’Avocat et l’Acteur est bien le respect de certaines règles à commencer par l'obligation de ne pas corrompre sciemment la vérité. De ne pas discréditer sa parole, et par ricochet, de ne pas ruiner celle de son client Ses règles sont en opposition absolue avec ce rôle de « mercenaire servile » que serait l’avocat simple comédien, récitant son script avec diligence. L'un de nos plus illustres prédécesseurs l'exprimait sans ambiguïté ni ambages : « tout défenseur qui affirme des faits qu'il sait inexacts peut être un rhéteur habile, un orateur éloquent, mais ce n'est pas un avocat » C’est Fernand Labori, Défenseur entre autre

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Mathieu Masse

L’homme politique doit-il porter une robe ? par Mathieu Masse « La robe d’une femme doit être comme une plaidoirie : assez longue pour couvrir le sujet, suffisamment courte pour être suivie ». esdames et Messieurs, je respecterai dans toutes ses coutures ce précepte tiré des constatations d’un observateur resté anonyme. J’essaierai donc de ne pas vous assommer d’un trop long discours, le champagne que nous boirons tout à l’heure ensemble, à la discrétion de Monsieur le Bâtonnier, s’en chargera sans doute.

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d’Alfred Dreyfus qui affirmait ce principe avec force. Cette éthique, car il s’agissait initialement d’une question de morale chrétienne, s’est muée en véritable déontologie professionnelle. Cette obligation est contenue dans notre serment d’Avocat Car « la probité, l'amour de la vérité. est la base de notre (leur) état », ainsi que le précisait le Décret du 14 décembre 1810 rétablissant l'Ordre des Avocats après la période révolutionnaire. Faire respecter les droits de la défense, même avec passion et acharnement, ne signifie pas pour autant cautionner crime ou malhonnêteté. Et quelle image, du reste, donnerions-nous ainsi à nos clients de la Justice ? Car notre état d'auxiliaires de justice nous fait en effet participer à ce service public. Et cette mission ne serait que singerie si l'Avocat, simple mercenaire servile du justiciable, plaidait sans vergogne le faux pour le vrai. L’avocat strict porte-parole et « metteur en forme » n’est pas.

L'avocat n'est pas plus cet écran trompeur. En revanche, il est un miroir qui reflète au Juge l'image qu'il a perçue de son client. Il aide ainsi ce dernier à se faire comprendre du Magistrat et, réciproquement, à le comprendre. Il s'efforce par là à contribuer à la recherche d'une solution juste. Il doit donc refuser le scénario, abandonner une thèse lorsque cette dernière risque de contribuer à bâtir une issue néfaste. La prohibition du mensonge éhonté, du scénario improbable loin d'être une obligation formelle vide de sens, est dès lors un garant - au même titre que le secret professionnel - de l'effectivité du rôle qu'il nous appartient de tenir. De même que nul n'irait plus se confier à un prêtre, consulter un médecin - ou un avocat - s'il pouvait en craindre la divulgation du secret confié ; de même le recours à l'avocat serait-il vain si sa parole, connue pour être mensongère, ne rencontrait, demain, plus aucun crédit. L’avocat doit être le garant de l’image, de la parole, de la crédibilité de son client et cette mission ne relève en rien de la comédie. Merci.

Je ne broderai pas inutilement pour habiller mon exposé que je tenterai néanmoins de tailler impeccablement pour éviter les faux plis. Et je bannirai tout effet de manche pour traiter clairement cette question aussi cocasse que surprenante : « L’Homme politique doit-il porter une robe ? ». N’ayez crainte, cette question n’est pas qu’une simple réflexion sortie de mon esprit tortueux. Voyez-vous, les femmes politiques ont depuis de nombreuses années adopté le tailleur. On se souvient des tailleurs roses bonbon de Roselyne Bachelot, ou des tailleurs haute couture de Rachida Dati. Désormais, Cécile Duflot arbore même un jean au Conseil des ministres. Et si l’égalité des sexes devait passer par l’échange des tenues ? Et si nos élus masculins devaient montrer l’exemple pour atteindre ce but ? Ce serait intéressant, et particulièrement ambitieux. Faisons un effort d’imagination. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, serait digne, j’en suis sûr, dans une robe portefeuille, grise, et austère, triste comme notre situation budgétaire, mais exemplaire dans sa sobriété et son dénuement. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, serait majestueux dans une robe de gaulle en mousseline, comme les marquises du 18ème siècle. Et admettez d’ailleurs qu’une robe de gaulle pour le redressement productif, ce serait de rigueur. Notre Président, François Hollande, se gainerait aisément dans une robe de Miss France. Par le prisme de sa tenue pailletée, il projetterait au monde entier la lumière de notre patrie. Plus généralement, nos députés et sénateurs ronronneraient, placides et sereins, dans leur robe de chambre, robe de chambre parlementaire évidemment. Mais vous l’avez compris, je ne vous parle pas de cela. Il n’est pas question ici de savoir si nos représentants politiques doivent se travestir pour être dans le coup.

Mon sujet ne s’intéresse pas à cette robe, instrument du charme féminin et arme de séduction massive. D’ailleurs, Mesdames, j’imagine que pour vous préparer en prévision de cette soirée, et pour être toutes si gracieuses et élégantes, vous avez dû passer de longues minutes à décintrer vos robes, à les enfiler, puis, avec une moue boudeuse, à les trier pour ne retenir que la plus belle. Vous auriez pu choisir la première à portée de main. Mais vous avez sciemment préféré celle qui révélerait vos plus beaux atouts, et qui saurait capter les regards, parfois pesants, rarement lubriques, jamais vulgaires, et toujours charmants, de ces galants hommes qui peuplent aujourd’hui la cité des échanges. A ce sujet, je dois préciser, pour ceux qui auraient fantasmé sur l’intitulé de cet endroit qui nous accueille ce soir, la cité des échanges, qu’il ne s’agit pas d’un salon dédié au speeddating. Je préfère le préciser car certains de mes amis célibataires ne sont venus ce soir que dans l’unique but de rencontrer des cœurs à prendre chez nos jeunes consœurs. Mais mettons les choses au clair, les seuls échanges permis ce soir sont ceux de gens bien élevés, venus célébrer le jeune barreau de Lille, représenté modestement par Laura, Thibaud, et votre serviteur. Cet aparté refermé, je dois vous faire une confidence. J’aurais aimé vous parler de ce tissu de flanelle, de coton ou de soie. De cette étoffe fragile. De ce rempart vulnérable. Quel plaisir immense c’eut été pour moi de vous parler de la robe féminine. Elle est souvent l’objet d’un spectacle amusant : les hommes espèrent, à l’ombre de leurs femmes, apercevoir chez une inconnue, une passante, une portion d’anatomie secrète : un genou glabre, ou mieux encore, une cuisse nue qui se dévoile au passage d’un courant d’air impétueux et complice.

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Rentrée solennelle

Regardez-les, ils ont peine à boutonner leur robe et à fixer correctement leur rabat. On dirait de jeunes oiseaux, gênés par les plumes qui ont remplacé leur duvet. Des amis leur viennent en aide. Ils leur apportent des gestes concentrés et maîtrisés. Ils leur murmurent, au creux de l’oreille, les compliments de circonstance. Des paroles douces comme une caresse. Des mots émus comme un aveu. Certains, plus sensibles, essuient même une larme de joie.

Mathieu Masse, Emmanuel Masson et Eric Négron

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C’est vrai, parler de cette robe m’était aisé. J’aurai d’ailleurs profité des 50 ans de la disparition de Marilyn Monroe pour vous remémorer la scène mythique du film culte 7 ans de réflexion. Souvenez-vous amis cinéphiles. Cette ingénue exposait à son partenaire un décolleté insolent, si outrageant qu’il aurait fait friser l’œil sévère et suspicieux de n’importe quel procureur. Rappelez-vous, cette pin-up peroxydée, cette blonde mouchetée passant au-dessus d’une grille d’aération. Voilà que sa robe, blanche et plissée, se soulève et ondule sous l’effet de l’haleine de catacombe d’un métro new yorkais qui crachait dans la rue ses miasmes tièdes d’activité souterraine, et détruisait de son souffle les derniers remparts d’une pudeur juvénile à jamais dissipée. Malheureusement Mesdames, j’en suis désolé Messieurs, mais mon sujet est plus sobre, et la robe dont je vais vous parler est plus sombre. Cette robe est celle de l’avocat. Elle a pour nous tous une histoire, elle est un symbole. Nous la respectons car elle n’est pas qu’une relique moyenâgeuse, ni la simple coquetterie d’une élite nostalgique. Elle couvre bien plus que notre personne. Elle enveloppe une profession, un ordre, des principes. Pour ces raisons, nous devons la protéger des accrocs, et des déchirures. Elle ne doit pas être taillée à la demande, pour être le passe-droit de personnes qui deviennent avocats par des équivalences artificielles, créées de toute pièce, et sans concertation. Mais avant de développer ce point, j’aimerais d’abord vous raconter une histoire. Il est 9 heures. De jeunes adultes tremblent d’émotion dans leur chemise d’une blancheur immaculée. Ils se sont levés aux aurores. De toute façon, ils n’ont presque pas dormi. Après quelques préparatifs fiévreux, ils se sont enfuis, en avance ou en retard, vers l’évènement qui restera à tout jamais gravé au plus profond de leur mémoire. Et voilà, ils sont tous là, à la Cour d’appel, nombreux, stressés, agars et excités. Désormais, ils attendent. Ils discutent bien sûr, mais leurs paroles sont superflues, leur esprit est ailleurs, ils comblent laborieusement le temps qui les sépare de cet instant où ils prêteront serment. Les yeux tournés vers les spectateurs, ils cherchent leur famille, et haussent le menton lorsqu’ils trouvent enfin, dans le regard fier de leurs parents, la jouissance qu’apporte cet instant exceptionnel et solennel. Mais comme ils sont maladroits ces jeunes gens.

Ces instants de réconfort passés, les élèvesavocats sont enfin prêts. Blancs comme des cierges dans cette chapelle laïque, vêtus de leur habit noir, ils communieront dans quelques minutes, ensemble, et entreront enfin, triomphants, dans cette confrérie qu’ils ont tant courtisé. Dans cette salle d’honneur, dans ce lieu feutré, toutes ces robes sombres forment un seul groupe, un amas dense de jeunesse et d’énergie, un atome solide d’espérance et d’insouciance. Les magistrats, pourpres et herminés, entreront bientôt pour recevoir leurs serments. L’essaim de jeunes adultes se tait soudain. Le brouhaha qui résonnait entre les murs devient bientôt un écho s’étouffant dans les velours de la chambre solennelle. Les têtes se tournent. Les mains se figent. Les regards se croisent timidement et s’interrogent. Un homme vient d’entrer en scène. Il est en retard, mais n’en est pas tourmenté. Il est plus âgé et porte la robe d’avocat. Il n’est pas Bâtonnier. Il n’est pas membre du Conseil de l’ordre. Il porte des gants blancs. Un nœud papillon l’étrangle. Lui aussi vient donc prêter serment. Personne ne l’a jamais aperçu au centre de formation, et pourtant, tout le monde le connaît. Cet homme, qui traverse la foule des familles interloquées et qui s’installe dans les rangs, parmi les acteurs de cette journée mémorable, est un ancien ministre. Et il va devenir avec eux, ce jour-là, avocat. Personne ne l’accompagne pour l’occasion. Son épouse est en ville. Ses parents sont en croisière. Ses enfants dévalisent les boutiques branchées avec l’argent indécent qui remplit leurs poches et comble depuis longtemps l’absence de leurs parents. En vérité, quelle importance. De toute façon, ce n’est pas un moment de gloire pour lui, il en a eu d’autres, et des plus illustres. Il ne posera pas non plus, sur son bureau de style Second Empire, une photographie de cet évènement.

Cette mise en scène, cette prestation de serment d’avocat n’est pas un aboutissement, pour lui. Ce n’est qu’une formalité administrative supplémentaire. Après avoir juré d’exercer ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité, il s’enfuira et boudera les petits fours et le champagne commandés par l’Ordre pour l’occasion. Seule une poignée de journalistes le retiendra, retardant l’éclipse totale de cet astre solaire. Il leur avouera, en confidence, qu’être avocat est un rêve d’enfant qui se réalise, qu’il est fier d’entrer dans cette confrérie, et qu’il honorera, dans son exercice, les termes du serment qu’il vient de prêter. Mais, ce qu’il oublie de mentionner, c’est qu’un décret du 3 avril 2012 a permis sa reconversion sans trop d’encombres. Et voilà le cœur de mon exposé. A cet instant, je le crains, vous allez vous tasser profondément dans votre chaise, ouvrir le programme, et vérifier que le début du cocktail est bien à 20 h15, conscients que les minutes qui vont suivre s’annoncent particulièrement longues et fastidieuses. Mais je ne peux cependant pas faire l’impasse sur l’évocation de ce décret créé dans l’urgence des échéances électorales et des revers annoncés. Plus précisément, l’article 97-1 rédigé pour la circonstance a profondément meurtri notre profession. Il a nourri un fleuve de commentaires d’incompréhension et de suspicion chez les observateurs extérieurs, qu’ils soient journalistes ou simples citoyens. Ecoutez par exemple ce titre du Point : « Battu aux élections ? Devenez avocats ! » Affligeant, n’est-ce pas ? Pour comprendre ma colère, laissez-moi vous lire cet article 97-1 : « Les personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi sont dispensées de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat. »

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Rentrée solennelle

Voilà cet enfant de l’angoisse. Cette tâche d’encre qui éclabousse notre déontologie. Cette mite logée dans notre robe. Quel est le cursus de ces personnes qui viendront pantoufler au Barreau ? Nul ne le sait. Ce qui est certain, c’est qu’ils n’auront pas besoin de se former à notre métier, pour tout vous dire, beaucoup n’auront même pas une maîtrise de droit. Que signifie l’exercice de responsabilités publiques ? Est-ce une prime à toutes ces personnes qui ont une tendance plus forte à la pusillanimité qu’à l’action ? Et la participation à l’élaboration de la loi ? Cette notion elliptique est-elle réellement suffisante pour donner un gage de crédibilité à tous ces impétrants ? J’ai honte J’ai honte, car je chéris tant cette profession que je n’admets pas qu’on la ternisse de la sorte. Je dénonce, comme tant d’autres, cette accession à double vitesse à la profession, car c’est bien de cela dont il s’agit. D’un côté, des hommes et des femmes compétents, diplômés, expérimentés doivent montrer patte blanche pour devenir avocat cette situation est normale. De l’autre, des représentants politiques à bout de souffle vont entrer au Barreau en passant par la chatière…cette situation est intolérable. Voilà où nous en sommes. C’est vrai, notre confrère Charrière-Bournazel a raison, la profession d’avocat a toujours été encline à accueillir des profils variés, des praticiens expérimentés. Notre profession peut s’enorgueillir de compter dans ses rangs d’anciens fonctionnaires talentueux et des juristes éprouvés au droit. Ils amènent un souffle de renouveau et des idées intéressantes. Il ne s’agit donc pas de fermer les vannes de l’avocature. Une profession qui se ferme est semblable à la maison d’une vieille fille, elle est propre, tout est à sa place, le feu dort dans l’âtre de la cheminée, mais elle manque cruellement d’audace et de fantaisie, et l’avenir ne s’y envisage que dans l’éternel recommencement de l’ennui. Toutefois, ce décret va bien au-delà d’une ouverture salutaire.

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Il n’apporte pas un souffle salvateur à notre profession, il crache à notre figure un relent nauséabond d’opportunisme mâtiné de mépris. Pour paraphraser Michel Rocard, la profession d’avocat ne peut pas accueillir toute la misère du monde politique. Et pourtant, nous devons admettre que ce décret a créé une brèche pour des personnes dont les compétences peuvent être remises en question. Cet article 97-1 est d’abord un sésame pour les mis au rebut de la scène politique. Pour toutes ces personnes qui n’ont plus su convaincre. C’est ensuite, et plus généralement, une passerelle entre deux mondes qui ont, il est vrai, historiquement, des liens privilégiés. Rappelez-vous ces tribuns révolutionnaires : Robespierre, Danton, Merlin de Douai. Souvenez-vous de notre IIIe République, et de ses thuriféraires : Raymond Poincaré, Léon Gambetta, Jules Grévy. Plus récemment, comment ne pas évoquer le combat victorieux de Robert Badinter devant le Parlement, en 1981. Tous ces hommes étaient des avocats. Ils ont été des élus, des décideurs, des élites. Mais ils ont travaillé le droit avant de le façonner. Comme un potier prépare sa glaise avant de la sculpter, ces hommes d’envergure ont fait leur apprentissage. La situation actuelle est toute autre. Elle est ubuesque. Elle revient, sans trop grossir le trait, à accorder à un boucher charcutier l’é quivalence pour devenir chirurgien, sous prétexte qu’il a le geste prompt à découper la viande. Je refuse que notre profession, sous prétexte de l’élargir à la médiation, l’arbitrage ou le lobbying, devienne la terre d’asile de personnes qui n’ont, incontestablement pas les bagages suffisamment remplis de science juridique mais qui comblent ce vide par un épais carnet d’adresse. Je n’évoque même pas les conflits d’intérêts qui pourraient poindre aussi, on me traiterait alors de paranoïaque, ou plus cyniquement peut-être, de rabat-joie. Vous l’avez compris, je suis bien amer depuis avril, mais je ne doute pas que la détermination de notre profession, par ses organes représentatifs et ses syndicats dynamiques, puisse venir à bout de cette ineptie. Mon énervement est nourri par la fierté qui me stimule depuis 4 ans, et qui m’enchante d’être aujourd’hui parmi vous.

Tout n’est pas toujours rose, et notre métier est rude. Les désillusions se succèdent, gommées souvent par les enchantements d’une victoire, ou d’une reconnaissance témoignée. Malgré tout cela, je suis fier, c’est vrai, ce soir, de porter devant vous cette robe qui m’accompagne au quotidien, cintrée dans l’activité studieuse de mon bureau, ou que j’endosse, comme une armure, avant de me livrer à mes batailles judiciaires. Elle garde d’ailleurs quelques stigmates de mes précipitations audiencières, des déchirures discrètes, à peine visibles, semblables aux cicatrices d’un combattant convalescent. Ma robe est sans doute, après la vie, le cadeau le plus précieux que m’ont offert mes parents. Il y a eu aussi, c’est vrai, ma première voiture, celle qui m’a transporté d’escapades entre amis en voyages improvisés. Mais finalement, ces deux récompenses parentales ont un point commun. Elles ont été les instruments de mon indépendance et de ma liberté. C’est sans doute d’ailleurs pour cela surtout que je refuse que ma robe, ce symbole si fort qui remplit mon esprit de souvenirs émus, ce qu’elle représente, devienne désormais un simple prêt à porter pour des personnes qui ne seront jamais prêtes à plaider. Mais, finalement, peut-être ai-je tort, peut-être est-il préférable de les laisser connaître, à ces nouveaux confrères, après leurs revers politiques, les désillusions qu’apportera probablement une carrière d’avocat chancelante quand, privés de leur influence, le téléphone ne sonnera plus, et les soirées de gala brilleront alors en leur absence. Nus comme des nouveau-nés, ils se sentiront alors vulnérables, démunis, et sans expertise du droit, une décision implacable s’imposera, celle d’un retour salutaire en politique. Avant de faire demi-tour, ils sortiront peut-être de leur placard cette robe qu’ils ne pensaient revêtir qu’une seule fois, et ils s’en couvriront alors pour cacher cette nudité honteuse. J’espère alors qu’en se mirant dans leur psyché, ils se trouveront beaux, et qu’ils garderont, comme ultime consolation, la fierté de pouvoir dire qu’un jour ils ont été Avocats. 2012-669

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