Edition du lundi 19 novembre 2012

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LES ANNONCES DE LA SEINE Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Lundi 19 novembre 2012 - Numéro 69 - 1,15 Euro - 93e année

Syndicat des Avocats de France 39ème Congrès - Caen 9 / 11 novembre 2012 VIE DU DROIT

Syndicat des Avocats de France

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Reconstruire le droit par Pascale Taelman.......................................... Les Entretiens Juridiques de Chartres ................................ Cercle Dalloz ................................................................................

Association Française d’Arbitrage L’attente des entreprises en matière d’arbitrage par Alexandre Job ............................................................................ Code de procédure pénale 2013 ..........................................

15 18 AGENDA ......................................................................................5 ENTRETIEN Sabine du Granrut......................................................................11 DIRECT Ministère de la Justice .............................................................14 VIE DU CHIFFRE Institut Français des Experts-Comptables et des Commissaires aux comptes

Un nouveau modèle de croissance pour les entreprises est-il possible en France ? par Françoise Savés .........................................................................

19 ANNONCES LEGALES ...................................................20 AVIS D’ENQUÊTE..............................................................26 DÉCORATION Nathalie Boucher, Croix d’Honneur de la Bundeswehr...32

’est dans la ville qui abritait il y a un millénaire la résidence de Guillaume le Conquérant que s’est déroulé le congrès annuel du Syndicat des Avocats de France, sa Présidente Pascale Taelman, inscrite au Barreau de Créteil, accueillait notamment la Ministre de la Justice Christiane Taubira et le Président du Conseil National des Barreaux Christian Charrière-Bournazel à l’Université de Caen ce vendredi 9 novembre 2012, puis le lendemain Pierre Joxe et Marylise Lebranchu. Pour cette 39ème édition, le thème choisi était « La justice, c’ est maintenant », l’occasion de placer la justice au centre des débats qui furent riches et nombreux. La Présidente Pascale Taelman, dans son rapport moral, a présenté une profession sinistrée et un état de droit mis à mal tant au niveau de l’accès au droit que de

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l’hospitalisation sous contrainte, de la rétention de sûreté, des peines planchers, des règles applicables en matière de récidive, de la délinquance financière, des contrôles d’identité, du droit d’asile, de la rétention des étrangers, du mariage homosexuel, de l’action de groupe, de l’avocat en entreprise, de l’accès à la profession et de l’action de groupe. Sa conclusion fut toutefois empreinte d’espoir puisqu’elle a exhorté la Garde des Sceaux à « oser une politique de gauche » afin de « redonner à l’avocat toute sa place dans la cité » et afin que « l’institution judiciaire retrouve sa fonction de régulation sociale » à partir de « choix législatifs nouveaux et courageux » après la mise en œuvre des moyens nécessaires pour que « la Justice soit, dans des délais raisonnables et cohérents, un facteur de paix et de justice sociale ». Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

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Vie du droit Pascale Taelman

Etablissements secondaires : 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUST Téléphone : 01 34 87 33 15 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNE Téléphone : 01 42 60 84 40 7, place du 11 Novembre 1918, 93000 BOBIGNY Téléphone : 01 42 60 84 41 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROI Téléphone : 01 45 97 42 05

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par Pascale Taelman

Didier Chotard Frédéric Bonaventura

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Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Reconstruire le droit adame le Garde des Sceaux, nous sommes très honorés de votre présence parmi nous, après… Marylise Lebranchu en 2001 à Nîmes, et, à titre personnel, je tiens à vous dire combien je suis fière de pouvoir vous accueillir. Nous connaissons vos convictions, nous savons votre détermination ; un certain nombre d’entre nous ont eu le plaisir de vous entendre lors de précédents débats parlementaires. Nous sommes donc convaincus de votre volonté. Néanmoins, à travers vous, c’est le gouvernement tout entier que nous souhaitons interpeller. Nous voulons vous dire qu’après avoir passé dix ans à nous épuiser à parer les mauvais coups, nous souhaitons vivement pouvoir au plus vite mettre notre énergie au profit de la construction du droit et de la Justice de notre pays. Nous serons à vos côtés aussi souvent que possible, mais sans complaisance et sans jamais renoncer à nos valeurs et nos convictions. La première moitié de cette année a été marquée par la nécessité de continuer à dénoncer et démontrer que la machine lancée ne pouvait que conduire à notre perte collective, sur le plan du droit comme ailleurs. Au mois de mai, nous avons été plein d’espoir… mais nous sommes aussi déjà déçus. Nous attendons de ce gouvernement qu’il ose une politique de gauche et que des décisions emblématiques fortes soient prises, dans le domaine qui nous occupe : la Justice. « Le changement c’est maintenant » et la Justice est une priorité, nous avait-on dit. Nous voulons sentir les effets de ce changement, concrètement, réellement. Or, un certain nombre de mesures phares n’ont pas été prises, sont différées, amendées ou même abandonnées.

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L’accès au droit Vous savez que, pour nous, c’est une question fondamentale et prioritaire. Il n’y a pas de droit sans effectivité du droit. Je vais formuler un lieu commun, mais il y a des évidences qu’il faut répéter : cette effectivité suppose l’accès à un avocat librement choisi, formé et en capacité d’exercer son mandat dans des conditions dignes, ce qui passe nécessairement par une rémunération décente lorsqu’il intervient dans le secteur assisté. De plus, la crise économique ne peut qu’augmenter le besoin de justice des citoyens et, tout particulièrement, celui de ceux susceptibles de bénéficier de l’aide juridictionnelle. La question de la rémunération digne de l’Avocat intervenant à ce titre est récurrente et n’a trouvé aucune réponse satisfaisante à ce jour. Ce n’était pas une priorité affichée du précédent gouvernement. C’était pourtant un engagement de Madame Lebranchu dans le protocole d’accord signé avec mon prédécesseur en décembre 2000. Nous comptons sur le nouveau gouvernement pour que cette question, essentielle pour la justice sociale, soit enfin prise à bras le corps et ne se voit pas seulement opposer la contrainte budgétaire. Nous avons bien noté, Madame le Garde des Sceaux, que vous aviez annoncé, dans la présentation du budget de la justice, que le nombre d’UV affecté à la défense des demandeurs d’asile devant la CNDA allait doubler (nous passerons de 8 à 16 UV, soit environ 360 euros). C’est un pas, tant il est vrai que l’indemnisation versée jusqu’à ce jour en cette matière en dit long sur la place dévolue à la défense devant cette juridiction nationale ! Un pas qui n’est cependant que symbolique car il pèse peu dans le budget de l’aide

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Vie du droit juridictionnelle en comparaison des contentieux de masse auxquels les avocats de proximité sont confrontés : Il ne faudrait pas que ce soit l’arbre qui cache la forêt. Les domaines dans lesquels la rémunération de l’avocat est indigne sont nombreux (l’hospitalisation sous contrainte - l’assistance d’un prévenu en correctionnelle - l’assistance éducative - la défense devant le tribunal pour enfants, etc.). Dans ces conditions ne serait-il pas temps de repenser globalement la question de la rémunération de l’avocat dans le secteur assisté ? Sans doute la remise à niveau de l’aide juridictionnelle avec l’augmentation de 16 % du budget de l’AJ, hors garde à vue, permettra-telle un pas. Mais, avec 16 %, nous sommes encore loin du compte. Nous parlions de doublement, voir de triplement, du budget de l’aide juridictionnelle ! Et puis nous avons entendu dire que votre Ministère n’envisageait, ni augmentation du nombre d’UV, ni augmentation de son taux… Dès lors, que pouvons-nous espérer ? Des solutions de financements complémentaires existent ; nous les avons déjà développées (taxation des actes juridiques, contrats d’assurance, ventes immobilières et cessions de fonds de commerce) ; l’application de la règle de subsidiarité, quand il existe un contrat de protection juridique, doit être généralisée, à la condition toutefois que la prise en charge financière par les compagnies d’assurance ne soit pas encore plus indigente que celle de l’aide juridictionnelle ; mais il ne saurait être question de rendre obligatoire une telle assurance qui représenterait incontestablement un coût non négligeable dans le budget des ménages et signifierait le désengagement de l’Etat, alors que le service public de la justice se doit d’être accessible à tous dans les meilleures conditions. Cette question ne peut, non plus, se régler par le développement du pro bono, bonne conscience des uns, pour lequel le Barreau de Paris a même cru devoir créer un prix ! Pas plus que par la déjudiciarisation du règlement des conflits. Le règlement alternatif des conflits à lui-même un coût certain, n’est pas exclusif de l’intervention d’un Avocat et induit fatalement sa rémunération, tout autant que dans le cadre judiciaire traditionnel.

L’accès au droit pour tous, c’est aussi la suppression de la taxe de 35 euros à laquelle s’ajoute celle de 150 euros en appel. Nous avons bien noté, Madame le Garde des Sceaux, votre engagement de la faire disparaître en 2014. Nous espérons ne pas voir retarder cette échéance. De plus, nous avions attiré l’attention de votre cabinet sur la nécessité d’annuler l’instruction donnée aux greffes, le 30 septembre 2011, de suspendre le cours des procédures pour les dossiers dans lesquels une demande d’aide juridictionnelle serait en instance, précisant que, « dans l’attente du retour de la décision du BAJ, pour plus de facilité, les actes de saisine doivent être classés « en attente » par le greffier ». En effet, au-delà même de la contribution, cette instruction induit une justice à deux vitesses et est contraire au texte réglementaire. Mais cet engagement date de plusieurs mois et pourtant nous n’avons, à ce jour, rien vu venir. Alors que l'article 62-4 du décret du 28 septembre 2011 prévoit, en matière d'aide juridictionnelle, un dispositif spécifique aux termes duquel, à défaut de décision rendue sur la demande d'aide juridictionnelle, la saisine est accompagnée d'une copie de celle-ci et précise que, lorsque l'aide juridictionnelle est rejetée, le demandeur doit justifier de l’acquittement de la contribution dans le mois suivant, l’instruction donnée aux greffes ajoute une condition supplémentaire de mise « en attente » des dossiers. Ainsi, compte tenu du fait que les bureaux d'aide juridictionnelle ne rendent leur décision, en moyenne, que plusieurs mois après leur saisine, le demandeur qui entend solliciter l'aide juridictionnelle voit son dossier bloqué par le greffe qui ne fixe aucune date d'audience. C’est pourtant une mesure d’urgence, avec une portée importante pour les justiciables concernés, que nous attendions de votre ministère…et que nous attendons toujours.

Les actions AJT Agents Judiciaires du Trésor Toujours dans le domaine de l’effectivité des droits, le SAF a été moteur sur un certain

nombre d’actions contre l’agent judiciaire du trésor (désormais de l’Etat), dénonçant le véritable déni de justice, en particulier en matière prud’homale, résultant des durées excessives de procédure. J’avais longuement évoqué cette action dans mon rapport moral de l’année dernière. Je n’y reviens que pour me réjouir de l’ensemble des décisions qui ont été rendues depuis lors, et qui, toutes, ont constaté le bien-fondé de l’action menée, y compris la recevabilité de l’intervention volontaire du SAF à titre accessoire. Je rappellerai, juste pour le plaisir, quelques attendus de principe : « Selon l’article L.141-1 du code de l’organisation judiciaire, l’Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice, sa responsabilité n’étant engagée que par une faute lourde, constituée par une déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi, ou par un déni de justice. Aux termes de l’article 6§1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial. En l’occurrence, il est constant que, saisi par requête du 18 juin 2009, le conseil de prud’hommes de Longjumeau a fixé l’affaire devant le bureau de conciliation à l’audience du 30 novembre 2009 et, en l’absence de conciliation, à l’audience du 20 janvier 2011. Ce double délai de 5 et 14 mois est anormalement long. Le délai de fixation à l’audience du conseil de prud’hommes en formation de départage, qui n’est pas connu à la date de l’audience, mais qui dépassera nécessairement 10 mois, ne respecte pas les dispositions de l’article L. 1454-2 du code du travail prévoyant un délai d’un mois. A ce jour, l’instance, commencée en juin 2009, n’est pas terminée. Il n’est pas contestable que les demandes de M. C requéraient un traitement d’une particulière célérité, notamment en ce qu’elles portaient sur une demande de dommages et intérêts à la suite d’un licenciement qu’il estime sans cause réelle et sérieuse.

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Christian Charrière-Bournazel, Pascale Taelman, Christiane Taubira, Philippe Duron, Ariane Weben et Nathalie Rivière

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Vie du droit

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Christiane Taubira

Il n’e st ni justifié ni même allégué que M. C a contribué par son comportement à l’allongement de la durée de l’instance. La procédure ne présentait pas un caractère de complexité particulière, l’obligation des parties de communiquer les pièces et écritures étant sans effet sur la date de fixation de l’audience, en l’absence de mise en état de la procédure orale du conseil de prud’hommes. L’éventuelle difficulté rencontrée par les magistrats dans l’appréciation des demandes à l’issue de l’audience de jugement n’e xplique pas plus la durée excessive entre l’audience du bureau de jugement s’étant mis en partage et la date de l’audience présidée par le Juge départiteur, le délai de fixation ne s’e xpliquant que par l’encombrement récurrent et ancien de ce tribunal. Pour autant, le nombre d’affaires dont cette juridiction est habituellement saisie et les difficultés d’organisation que cela ne peut manquer d’entraîner, comme la particularité de la procédure devant le conseil de prud’hommes, ne peuvent décharger l’Etat de sa responsabilité. Au contraire, ces éléments de fait ou de droit imposent à l’Etat l’obligation de prendre toutes les mesures utiles afin d’assurer aux justiciables saisissant le conseil de prud’hommes de Longjumeau, et notamment à M. C, la protection juridictionnelle effective qu’il doit, alors surtout que le législateur a prévu de répondre aux besoins des demandeurs saisissant la juridiction du travail en fixant des délais de traitement particulièrement brefs. L’agent judiciaire du Trésor ne rapporte pas la preuve que des mesures particulières ont été prises par le ministère de la justice ou la juridiction en cause, afin de rechercher une solution pérenne aux difficultés rencontrées par le conseil de prud’hommes de Longjumeau. Dès lors, la responsabilité de l’Etat est engagée. » S’agissant de la recevabilité du SAF : « les syndicats d’Avocats et de Magistrats dont les conditions fondamentales d’e xercice de leurs professions respectives sont en jeu ont un intérêt

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propre à agir aux côtés de la partie principale, dont les prétentions présentent un lien avec l’intérêt défendu par ces organisations syndicales ». Ce fut une très belle action, menée de main de maître par ceux d’entre nous qui s’y sont investis dans un travail collectif remarquable. Ils se reconnaîtront ! Bravo à eux. Notre action était alors soutenue par le parti socialiste ! Je rappelle cela aussi, parce que j’ai noté que, dans la présentation du budget 2013, vous insistiez, Madame le Garde des Sceaux, sur la nécessité de renforcer la réponse judiciaire au quotidien. Des emplois de magistrats et de fonctionnaires devraient être créés, des investissements dans la rénovation immobilière effectués. Souhaitons que ceci permette d’éviter que le SAF ne soit contraint, pour assurer le droit des GENS, à de nouvelles actions. Je crains néanmoins que « 142 emplois (2/3 greffiers et 1/3 de magistrats) pour les tribunaux d'instance et l'amélioration de la justice du quotidien », ne constitue qu’un emplâtre sur une jambe de bois, compte tenu de l’ampleur des retards accumulés, notamment en matière prud’homale. Vous le disiez vous-même, Madame le Ministre, la justice civile représente 70 % de l’activité judiciaire et sa situation est sinistrée. La médiation prud’homale, utilisée comme moyen pour gérer les stocks, n’est pas acceptable et le SAF ne l’acceptera pas. Il en est évidemment de même de l’expérience LEAN qui tend à standardiser et à minuter le travail judiciaire et aboutit au paradoxe selon lequel les juridictions sont auditées par des sociétés privées qu’elles sont par ailleurs amenées à juger et à condamner ! Vous nous avez invités, Madame le Garde de sceaux, lors de notre rencontre de septembre, à revenir vers votre ministère pour chaque problématique particulière nous préoccupant. Mes camarades de la commission sociale vous remettront tout à l’heure, si vous le voulez bien,

une lettre ouverte sur cette problématique spécifique des délais de procédures excessifs de la justice sociale. Nous attendons une réponse effective. Mais la commission sociale du SAF ne s’est pas limitée à ce type d’action. Les avocats du SAF qui, pour la plupart, défendent les salariés, les syndicats et les institutions représentatives du personnel, ont eu l’espoir immense, par l’arrêt de la cour d’appel de Paris VIVEO, de voir se construire une jurisprudence au travers de laquelle le juge dirait qu’il avait le droit de considérer comme nuls les licenciements qualifiés d’économiques, et donc de les interdire avant même qu’ils ne soient notifiés. Notre espoir a été de courte durée puisque la Cour de Cassation a considéré qu’aucun texte législatif ne permettait cette solution. Et pourtant, nombreuses sont les décisions judiciaires qui, à posteriori, indemnisent les salariés en sanctionnant pour licenciement sans cause réelle et sérieuse les entreprises qui ont procédé à de telles ruptures de contrat dans le seul souci d’augmenter le cours des actions, y compris artificiellement. Est-il raisonnable, en cette matière, de ne raisonner qu’en terme d’indemnisation ? N’est-il pas préférable d’éviter l’accident plutôt que d’indemniser les victimes ? Je sais que l’évidence de ce raisonnement fera de vous notre porte-parole auprès de vos collègues pour qu’intervienne enfin une loi prohibant les licenciements boursiers et donnant au juge toute sa place dans ce contrôle préalable.

L’hospitalisation sous contrainte Comme sur les questions relatives à la présence de l’Avocat en garde à vue, le SAF a su se montrer moteur dans ce nouveau domaine du droit.

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Vie du droit C’est incontestablement une avancée que l’intervention du Juge et de l’avocat dans cette procédure de privation de liberté très particulière. Mais justement, la particularité du débat, la confrontation de deux mondes qui, jusqu’alors, s’ignoraient totalement, notre nécessaire intervention au nom d’une personne qui n’est pas toujours en situation de faire connaître clairement sa volonté, sont autant de difficultés qui requièrent une formation dépassant très largement la seule connaissance du droit. L’Avocat et le Juge doivent, certes, s’attacher à la forme, garantie majeure dans un état de droit contre l’arbitraire ; mais d’autres paramètres sont aussi en jeu : la santé, la survie même parfois du premier concerné, la personne privée de sa liberté contre son gré qui doit toujours pouvoir s’exprimer et avoir accès à son juge dans les meilleures conditions possibles. Cela suppose encore des moyens : - La visioconférence doit être absolument bannie de ce type de contentieux ; plus encore qu’ailleurs, elle serait un obstacle entre le justiciable et son juge, alors que l’audience concerne bien souvent une personne déjà emmurée dans son trouble. Seule l’audience dans une salle spécialement aménagée à cet effet dans le centre de soins semble être la solution la plus appropriée. Une fois n’est pas coutume ; c’est même l’exception qui confirme la règle : le SAF penche très sérieusement cette fois pour l’audience délocalisée ! - La défense digne et formée ne peut sérieusement se satisfaire d’une indemnisation à hauteur de 4 UV ! Ici encore, ce droit nouveau ne peut être effectif sans moyens. Les lois scélérates, telles que celles qui ont instauré la rétention de sûreté, les peines planchers, les règles applicables en matière de récidive…sont autant de textes dont nous aurions aimé fêter la disparition dès le début du quinquennat. Nous avons certes apprécié votre circulaire de politique pénale du 19 septembre dernier qui rappelle l’exigence d’individualisation de la peine à tous les stades de la procédure, et même lorsque la peine plancher est encourue ; qui souligne que la réponse pénale doit être lisible, adaptée et efficace, ni précipitée, ni trop lente ; qui insiste sur votre attachement aux respects des droits de la défense ; qui rappelle que l’incarcération ne doit intervenir que quand elle est absolument nécessaire et que les alternatives aux poursuites sont possibles ; qui insiste aussi sur la nécessité de privilégier les mesures de réinsertion, seul véritable moyen de lutter contre la récidive, et sur la nécessaire vigilance à l’égard de la surpopulation carcérale et ses conséquences si brillamment dénoncées par les rapports de Monsieur Delarue, Contrôleur Général des lieux de privation de liberté. Votre attachement à une justice des mineurs spécialisée ne nous a pas non plus échappé. Nous nous en félicitons. Mais on ne peut pas légiférer par voie de circulaires, et nous attendons donc avec une vive impatience la loi qui reconstruira notre droit pénal et sa procédure et abolira les lois liberticides du précédent quinquennat. Nous avons déjà eu l’occasion de vous le dire : nous sommes prêts à répondre à toute demande de

contribution que vous pourriez souhaiter de la profession. Nous sommes aussi parfaitement conscients de votre volonté de rompre avec l’empilement législatif précédent, sans aucun souci de cohérence. Le travail effectué au sein de la conférence de consensus sur la prévention de la délinquance en est la démonstration. Néanmoins, le temps presse et seule la loi peut rétablir l’état de droit et réparer les ravages causés par vos prédécesseurs Je me permettrai de vous citer et de reprendre, pour le compte du SAF, ce que vous avez si justement déclaré : « L'opinion a été intoxiquée par un discours sommaire, qui consiste à dire que chaque délinquant est un criminel en puissance qu'il faut enfermer. Est-ce que, dans ce pays, les gens ont renoncé au raisonnement et à l'intelligence ? » Christiane Taubira, Le Monde du 20 septembre 2012 Mais maintenant, au-delà de déclarations aussi pertinentes, il nous faut du concret ; il nous faut des lois qui ne renoncent pas au raisonnement et à l’intelligence, même si elles sont susceptibles de heurter une certaine opinion anesthésiée par les discours passés. Pour mémoire et à titre d’encouragement : nos combats pour la présence de l’avocat en garde à vue, promise par certains comme la fin des enquêtes, l'apocalypse dans la chasse au délinquant, n’ont pas entraîné le drame annoncé. Bien sûr, la réforme a du être arrachée au précédent gouvernement, et elle n’est pas encore parfaite ; mais elle a néanmoins été la démonstration de ce qu'une avancée significative, voire déterminante, des droits de la défense, ne rime ni avec laxisme, ni avec mépris pour les victimes... C’est en début de quinquennat que les « révolutions » sont possibles. N’attendez plus ! Madame la Ministre, nous ne serons pas de ceux qui, comme le Président du CNB, sans débat ni vote de l’institution, invoquent des priorités données à la justice pour s’indigner de la suppression, en 2013, du plafonnement des cotisations maladie des professionnels libéraux, c’est-à-dire de l’assujettissement des revenus des Avocats supérieurs à 180 000 euros par an. Notre profession doit aussi participer aux efforts de justice sociale. En revanche, nous serons intransigeants sur la restauration de l’état de droit et des principes républicains.

Agenda

VENTE AUX ENCHÈRES PUBLIQUES

Jean-Etienne-Marie Portalis 24 novembre 2012 Maison Leclere 5, rue Vincent Courdouan 13006 MARSEILLE Renseignements : 04 91 50 00 00

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CONFÉRENCE 150ÈME ANNIVERSAIRE DEUTSCHER JURISTENTAG 1870-2010

Histoire et actualité de l’influence des juristes sur la vie du droit 30 novembre 2012 Salle des Conseils 12, place du Panthéon 75005 PARIS Renseignements : slc@legiscompare.com

2012-792

LES MARDIS DE BEAUVAIS

Faut-il renouveler la gouvernance de la société anonyme ? 4 décembre 2012 Hotel de Beauvais 68, rue François Miron 75004 PARIS Renseignements : secretariatgeneraldesmardisdebeauvais@mardisdebeauvais.fr

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COLLOQUE PENAL

Prison française : prison modèle ?

La délinquance en col blanc Le précédent quinquennat a été marqué par l’abandon de la lutte contre la grande délinquance financière, la dépénalisation du droit des affaires et du droit du travail, comme si les exigences de probité et d’égalité de tous devant la loi s’étaient dissoutes dans la crise. Il est essentiel que les citoyens puissent retrouver confiance dans leurs représentants, les agents publics et les acteurs économiques publics ou privés. Ce retour à la confiance ne peut passer que par l’exigence d’exemplarité, prônée par le Président de la République, exigence qui ne supporte aucune complaisance à l’égard de la corruption, des détournements et des petits arrangements entre amis.

7 décembre 2012 Maison du Barreau - 2/4, rue de Harlay 75001 PARIS Renseignements : ntact@rentreedubarreau.org 2012-794

VIIÈME CONGRÈS SIHPA

Les avocats et les magistrats dans l’administration de la justice 13, 14 et 15 décembre 2012 Université Internationale de Catalogne Calle Immaculada, 22 08017 BARCELONE - ESPAGNE Renseignements : 00 34 650 451 738 j.l.gaineton.avocats@orange.fr

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Vie du droit L’enrichissement illicite doit être traqué, les dispositifs anti-corruption renforcés. Ceux qui bafouent les droits des salariés et de leurs représentants, ceux qui piétinent toutes les règles de sécurité doivent être poursuivis et sanctionnés. Il ne faut plus que nous soyons montrés du doigt par l’OCDE, comme ne mettant pas tout en œuvre pour lutter contre ce type de délinquance. C’est à ses choix de politique pénale que nous jugerons le gouvernement auquel vous appartenez.

Les contrôles d’identité Dans sa proposition n°30, le futur Président François Hollande s’est engagé à « lutter contre le délit de faciès » dans les contrôles d’identité, grâce à « une procédure respectueuse des citoyens ».

Cet engagement à haute portée symbolique est intervenu après des années durant lesquelles des organisations nationales et internationales ont publié de nombreux rapports mettant en lumière les dérives des contrôles d’identité en France, y compris le contrôle au faciès. Ces dérives dégradent la relation entre la police et la population et provoquent le sentiment, pour les victimes de ces contrôles, d'être considérées comme des citoyens de seconde zone. En outre, dans de nombreux cas, ils sont attentatoires à plusieurs libertés et droits fondamentaux : liberté d'aller et venir, droit à la sûreté, droit à la protection de la vie privée et à la non- discrimination. La proposition n°30 du Président représente un engagement de faire respecter l'état de droit et de rétablir un juste équilibre entre la capacité pour les agents de remplir leurs missions et la protection des libertés fondamentales. Il représente aussi un engagement de restaurer la sérénité entre police et population et d'améliorer, par là même, la sécurité de tous.

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Pascale Taelman et Christiane Taubira

La position exprimée par Manuel Valls dans son discours du 19 septembre 2012, relative aux mesures à mettre en place pour mener à bien cette réforme des contrôles d’identité, je la rappelle pour mémoire : « …Après discussions et échanges nourris, il me semble qu'il ne faut pas compliquer, de manière déraisonnable, le travail des policiers et des gendarmes sur le terrain. J'ai du respect pour la sincérité des promoteurs de la délivrance d'un récépissé à chaque contrôle d'identité. Je maintiendrai le dialogue avec eux. Mais, il me semble très difficile de retenir leur proposition, en définitive peu développée à l'étranger. Elle serait beaucoup trop bureaucratique et lourde à gérer, et porteuse de difficultés juridiques nouvelles en termes de traçabilité des déplacements et de constitution de nouveaux fichiers »… - est particulièrement regrettable et inquiétante. D’autant qu’elle intervient après un débat public réducteur, focalisé principalement sur les récépissés de contrôle, véhiculant de fausses idées sur ceux-ci et alors qu’aucune expérimentation n’a été menée dans notre pays. Pourtant, les expériences réalisées ailleurs ont clairement démontré la possibilité, à la fois de réduire la prévalence des pratiques discriminatoires et d'améliorer l’efficacité des contrôles de police. Elles sont même unanimement saluées par les polices étrangères qui les pratiquent. Pour réussir, un fort engagement politique, ainsi qu’un ensemble de mesures, sont nécessaires. Le ministre de la Justice ne doit pas abandonner ce terrain au seul ministre de l’intérieur. La délivrance d’un récépissé après un contrôle constitue en effet un élément important d’un dispositif visant à réduire les contrôles au faciès, mais elle ne sera pas suffisante. Une réforme plus globale est nécessaire : réforme de la loi encadrant les contrôles d’identité (article 78-2 du code de procédure pénale), suivi des contrôles par les superviseurs et cadres policiers, rencontres régulières entre les citoyens, la police et les élus pour discuter de la pratique des

REPÈRES

Pour les Avocats, la Justice c’est maintenant ! es Avocats du SAF ressentent au quotidien l’urgence du changement : - pour les travailleurs confrontés à la violence de la crise économique et à la précarité croissante ; - pour les locataires subissant l’augmentation du coût de l’énergie et du logement devenu insoutenable ; - pour les étrangers dont les droits élémentaires ne sont toujours pas respectés ; - pour les justiciables qui pâtissent du manque de moyens, de délais incompréhensibles et de l’accès restreint au droit ; - pour les citoyens qui se heurtent à une justice pénale où la réparation et la réinsertion restent secondaires au regard de la logique sécuritaire… Les élections de mai et juin 2012 ont clos l’expérience des années d’un pouvoir qui a brutalisé la

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société, servi les plus favorisés et dénaturé les valeurs républicaines par son idéologie sécuritaire, identitaire et xénophobe. Après 10 ans passés à parer les mauvais coups, l’exigence de construire une société de droits et de justice est vive, l’expectative du changement persistante. Pourtant, tout semble se dérouler comme si la nouvelle majorité n’avait pas pris la mesure de l’urgence. Si la justice semble épargnée par les coupes budgétaires, les efforts sont insuffisants, tant les besoins sont grands et les retards importants. L’abrogation des lois attentatoires aux libertés en matière pénale ou aux droits des étrangers ne coûte rien. Sauf à poursuivre les politiques antérieures, la réponse ne pourra pas se limiter à quelques annonces non suivies d’actes :

on ne légifère pas par circulaire ! Les réformes décisives ne se feront pas à la veille de nouvelles élections, lorsque la confrontation avec une droite populiste et xénophobe sera à son paroxysme. La gauche au pouvoir doit prendre des décisions emblématiques et assumer des choix généreux pour construire une France de liberté, d’égalité et de justice. Avocats de France, acteurs du changement pour une société plus juste, nous rappelons la majorité à ses engagements et nous resterons toujours mobilisés contre les atteintes aux droits et libertés. Nous serons force de propositions dans la conquête de nouveaux droits. Nous investirons de nouveaux champs d’action pour bâtir une profession qui permette à tous les justiciables d’avoir un égal accès au droit.

(RE)CONQUÉRIR DES DROITS Nous défendons un droit du travail qui ne doit pas être cantonné au terrain de l’indemnisation des licenciements économiques abusifs que les entreprises se contentent de provisionner. Le droit du travail doit au contraire permettre un contrôle judiciaire préventif et la mise en cause des responsabilités au niveau de la prise des décisions dans le cadre des groupes. La tentation de faire évoluer la négociation collective vers des accords qui permettraient de sacrifier le droit des salariés au respect de leur contrat de travail sur l’autel d’une compétitivité alléguée par les entreprises, sans contrôle, est alarmante. Un renforcement des sanctions des abus en matière de précarisation de l’emploi est en outre indispensable. La

jurisprudence n’offre en l’état actuel qu’une indemnisation très insuffisante et non dissuasive, alors que le maintien dans l’emploi doit s’imposer. Nous poursuivrons nos actions pour dénoncer l’indigence des moyens de la justice prud’homale, conduisant à des délais de procédure qui ont été jugés à maintes reprises, cette année, comme constituant un déni de justice et une faute engageant la responsabilité de l’Etat. Le budget pour 2013 ne permet aucune mesure de nature à remédier à cette situation pourtant urgente et critique. De l’accès au juge prud’homal dépend aussi l’application effective du code du travail. 1. En matière de consommation logement Le Droit Au Logement Opposable, incluant le droit à

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Vie du droit

contrôles, formation amenant les agents à réfléchir sur les objectifs des contrôles d'identité et à en user avec discernement. Après des années de chasse au chiffre, qui a incontestablement induit la multiplication des contrôles injustifiés, nous pouvions espérer la mise en place d’une politique différente et d’un dispositif approprié. Les récépissés de contrôle rendraient plus transparente la façon dont ceux-ci sont effectués, de même qu'ils permettraient d'en finir avec la situation anormale qui perdure à ce jour, à savoir l'absence de toute trace matérielle, de tout enregistrement physique des contrôles d'identité. Avec ces documents, conçus pour éviter tout fichage, l'institution policière disposerait aussi d’un élément objectif pour démontrer l'absence de discrimination ou de harcèlement dans l'exercice de ses pratiques, dans la mesure où ils pourraient confirmer les raisons objectives de chaque contrôle. Notons, avec satisfaction que, dans son rapport du 16 octobre 2012, le Défenseur des droits conclut, sur la base des expériences étrangères, que la mise en place de récépissés entraîne « une diminution quantitative des contrôles d’identité ... (et) ces contrôles moins nombreux se révèlent par contre beaucoup plus pertinents ». l’hébergement d’urgence, est un droit fondamental qui doit prévaloir sur les contraintes budgétaires, sans qu’il y ait lieu de justifier de la détresse de celui qui vit dans la rue. Le référé liberté doit nous permettre de conquérir de nouveaux droits. 2. En matière de droits des étrangers Malgré le retour de la gauche au pouvoir, la première mesure législative débattue, relative aux droits des étrangers, est l’instauration d’un régime d’exception de privation de liberté offrant moins de garanties qu’aux personnes soupçonnées d’infraction. Ce régime est inquiétant, notamment parce qu’il ne prévoit pas en l’état l’assurance de l’intervention d’une autorité judiciaire indépendante dans un délai permettant un contrôle effectif de la mesure de retenue. Nous dénonçons le manque de courage du gouvernement qui, prétendant abroger le délit de solidarité, a maintenu la possibilité de poursuivre les « aidants ».

Afin de développer un dispositif approprié, il est impératif que les divers acteurs concernés - associations, experts, élus locaux, magistrats et avocats, ainsi que le ministère de la Justice - soient consultés et impliqués. Le SAF entend rester particulièrement vigilant et actif sur cette question ; les actions portées devant le juge de la République, par des plaignants soutenus notamment par des avocats du SAF, en raison de contrôles au faciès humiliants et injustifiés, sont emblématiques de cet engagement.

L’asile Ce droit doit impérativement revenir sous la tutelle de votre ministère. La confusion volontairement entretenue par le précédent gouvernement entre asile et immigration a toujours été dénoncée par le SAF. L’asile est un droit, consacré par un texte international ratifié par la France, et doit le rester ; en tant que tel, sa mise en oeuvre et sa reconnaissance doivent relever de la Chancellerie, et pas du ministère de l’Intérieur. La procédure doit sans doute être toilettée, et nous avons déjà eu l’occasion d’insister auprès de votre ministère sur notre souhait d’être

3. En matière de lutte contre les discriminations L’abandon du récépissé du contrôle d’identité, destiné à lutter contre les contrôles au facies, pourtant expérimenté avec succès dans de grandes démocraties, est plus que regrettable. La mise en œuvre d’une véritable concertation nationale associant les syndicats et les associations afin de dégager un consensus sur la façon de restaurer les rapports policecitoyens, de faire cesser une discrimination raciale et de mettre en place des outils permettant de lutter efficacement contre les contrôles abusifs, en les plaçant sous l’égide et le contrôle des procureurs de la République et d’une commission nationale chargée de veiller au respect de la déontologie dans la police, est incontournable. La réforme du cadre juridique des contrôles d’identité, en les plaçant exclusivement sous le contrôle de l’autorité judiciaire, est indispensable.

4. En matière de droit de la famille La dégradation des moyens matériels et humains mis à la disposition de la justice familiale la prive de la capacité d'apporter un traitement global, qualitatif et durable aux conflits familiaux. L'approche exclusivement économique qui a présidé à la réorganisation de la juridiction familiale a par ailleurs conduit à l'explosion du contentieux, en rendant par exemple nécessaire la saisine complémentaire du juge des enfants, faute d'enquête sociale ou en entraînant des saisines récurrentes du juge aux affaires familiales. Nous relevons également les disparités préoccupantes de traitement des justiciables selon les ressorts (délais d'audiencement, délai d'expédition des décisions, accès aux expertises et aux traitements post-sententiels, réponse apportée aux violences conjugales et politique pénale familiale...). 5. En matière pénale Il est urgent d’abroger les lois liberticides, au premier rang

consultés avant la publication du futur décret issu du rapport Vigouroux. Les importantes difficultés rencontrées depuis plusieurs années au sein de la Cour Nationale du Droit d’Asile, et apparues au grand jour à l’occasion du mouvement de protestations des avocats en mai / juin 2012, ont conduites à la nomination d’un médiateur en la personne de Monsieur Jean-Marie Delarue. Ses constatations devraient, je l’espère, aboutir à ce que le dialogue puisse être réinstauré au sein de cette juridiction, la plus grande de France, entre les différents intervenants qui sont, chacun à leur niveau, indispensables au bon fonctionnement de l’état de droit, dans une matière particulièrement sensible et concernant les justiciables les plus vulnérables. Les avocats intervenant devant cette juridiction ne doivent, pas plus que devant une autre juridiction, être soumis à des pressions, intimidations ou procédures visant à brider leur liberté de défense. Les récentes festivités entourant le 60ème anniversaire de la Juridiction nous ont encore laissé un goût amer, tant la place de la défense y a été totalement ignorée, voire niée. Dans cette matière aussi, il est plus que temps de rappeler que le justiciable, en l’espèce le demandeur d’asile, et sa parole, doivent retrouver toute leur place. Néanmoins, tant que la question de l’asile restera étroitement liée à celle de l’immigration, considérée comme un « problème » pour nos sociétés et non comme un droit fondamental, les valeurs qui ont été la fierté de notre pays s’en trouveront gravement atteintes.

Aurore Martin La remise d’Aurore Martin aux autorités espagnoles : Madame le Garde des Sceaux, comment pourrions-nous admettre que ce soit un gouvernement de gauche qui livre l’une de

desquelles la loi rétention de sûreté ainsi que les lois sur la récidive, notamment les peines plancher, comme s’y était engagée l’actuelle majorité, sans attendre la mise en place ou les conclusions de groupes de travail. Il faut en finir avec la surpopulation carcérale et les conditions de détentions plus indignes que jamais. La majorité doit rompre définitivement avec l’emprisonnement comme pénalité de référence, concentrer les moyens sur les alternatives réelles à l’incarcération, faire de l’aménagement de peine un principe effectif, prendre en charge dignement les détenus… La remise d’Aurore Martin aux autorités espagnoles pour la seule manifestation d’une opinion démontre la nécessité impérieuse de prendre un moratoire sur la mise à exécution de tous les mandats d’arrêt européens par la France. L’harmonisation des incriminations dans l’espace européen est un préalable

indispensable à la mise en œuvre reposant sur une confiance mutuelle nécessaire entre Etats, à la condition sine qua non de s’accorder sur les faits constitutifs d’infractions pénales. L’EFFECTIVITÉ DES DROITS L’accès effectif au droit et à la justice des populations se heurtant aux difficultés sociales est un impératif de cohésion sociétale. Il impose une réforme de fond du système de l’aide juridictionnelle permettant aux avocats de répondre à cette mission en recevant une rémunération adaptée aux exigences d’écoute, d’organisation et de qualité que requiert ce public souvent fragilisé. L’engagement de l’Etat reste fondamental, mais le SAF n’est pas opposé à la recherche de financements complémentaires. Il prend acte de l’engagement du Garde des Sceaux de supprimer en 2014 la contribution pour l’aide juridique.

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Vie du droit ses citoyennes à un autre pays, pour des faits qui ne sont pas punissables en France ? Comment pourrions-nous admettre que ce que Claude Gueant n’a pas osé faire, ce soit Manuel Valls, puis, sous votre autorité, le parquet général près la Cour d’Appel de Pau, qui le fassent ? Pourtant, aux termes de l’article 695-22 du code de procédure pénale, l’exécution d’un mandat d’arrêt européen doit être refusée s’il a été émis dans le but de poursuivre une personne en raison, notamment, de ses opinions politiques ou qu’il peut être porté atteinte à sa situation pour cette raison. Je vous disais notre attachement au droit d’asile ; que peut-on penser d’un pays qui ne reconnaît même pas ce droit à ses propres ressortissants, dans son propre pays ? L’Europe ne peut tout excuser et ce type de compromission est, pour nous, inacceptable.

La retenue administrative et la rétention des étrangers en famille Le SAF s’était pris à rêver : le droit européen censure le droit interne au moment où une nouvelle majorité politique accède au pouvoir ; quelle plus belle occasion de repenser le droit des étrangers en France ? Mais il n’en sera rien. La Cour européenne des Droits de l’homme juge qu’on ne peut pas placer en rétention des familles avec enfants….Immédiatement, le

Ministre de l’Intérieur prend une circulaire pour mettre en place une alternative à peine moins coercitive, pour laquelle il est aussi décliné nombre d’exceptions. La Cour de justice de l’Union européenne juge que la garde à vue n’est pas possible du seul fait du séjour irrégulier qui ne saurait conduire à l’emprisonnement… Qu’à cela ne tienne, on présente un projet de loi qui crée une retenue administrative de 16 heures (10 heures selon un amendement du rapporteur du texte au Sénat, renouvelable pour 6 heures), sans les droits afférents à la garde à vue (l’Avocat ne pourrait pas assister aux auditions de la personne retenue !) et, cynisme absolu, on substitue au délit de séjour irrégulier celui d’entrée irrégulière, qui, par le jeu de la prescription, pourra être opposé pendant trois ans ! Elle est pas belle la vie ? Alors oui, Madame le Garde des Sceaux, le SAF est déjà bien déçu.

Le mariage homosexuel et l’homoparentalité Voilà un sujet de société sur lequel il nous appartiendra de prendre position. Si le mariage des homosexuels nous semble légitime dans une société démocratique fondée sur la liberté et l’égalité, l’adoption et la procréation médicalement assistée sont autant de questions complexes qui ne pourront plus

être éludées, mais ne font pas l’unanimité, même dans nos rangs. C’est le statut de l’enfant et non celui du droit à l’enfant qui doit être posé, ce qui peut nous conduire à repenser complètement la notion de l’adoption, non plus comme créatrice d’un lien de filiation, mais d’un lien de parentalité. L’examen du projet de loi ayant été reporté au mois de janvier 2013, il appartiendra au prochain conseil syndical, avec l’appui du travail de la commission « famille », de prendre position.

L’action de groupe Vous vous êtes déclarée, Madame le Garde des Sceaux, favorable à sa mise en œuvre dans notre droit positif. Depuis de nombreuses années, le SAF a fait entendre sa voix en faveur de ce nouveau champ du droit, permettant l’accès à un droit effectif, rééquilibrant le rapport de force entre les professionnels et les consommateurs, seul capable de contrer les transgressions à impact « mesuré ». Le SAF s’est prononcé en faveur de l’option « opt out », seule à même de permettre la réparation effective pour le plus grand nombre. Nous savons l’intérêt que vous portez à cette question. Nous attendons avec impatience le projet de loi annoncé et, ici encore, nous sommes à votre disposition pour apporter notre contribution.

REPÈRES

Budget 2013 : appel des professionnels de la justice aux parlementaires Le secteur de la justice a été défini par le gouvernement comme « prioritaire » et de fait ce budget est en progression de 4,3%, comportant des créations d’emplois, contrairement à la plupart des autres ministères. Compte tenu de l’état catastrophique du service public de la justice à la suite du précédent quinquennat (réduction des effectifs par la refonte désastreuse de la carte judiciaire, absence de crédits de fonctionnement, engloutissement des moyens dans la machine pénale et l’inflation carcérale) cette priorité ne fait que masquer la misère. Certes les projets de construction pharaoniques de 25 000 places de prison sont abandonnés et la place de la protection judiciaire de la jeunesse est (un peu) restaurée : mais les quelques emplois créés ne suffiront pas à rétablir un service public dévasté. Par ailleurs, la taxe de 35 euros est maintenue pour cette année… ous, fonctionnaires du ministère de la justice, surveillants et directeurs de prison, conseillers d’insertion et de probation, greffiers, éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, magistrats et avocats, représentés par les syndicats suivants : SNESPJJ, SAF, CGT JUSTICE PJJ, SNEPAP FSU, CGT PENITENTIAIRE, SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE, SNDP, SJA, SOLIDAIRES JUSTICE et ANJAP, rappelons l’état catastrophique du service public de la justice que nous dénonçons depuis des années ; nous demandons que la priorité reconnue aujourd’hui se traduise par un renforcement des effectifs et une prise en compte des besoins réels en frais de fonctionnement ; nous appelons le gouvernement et le parlement à faire des choix

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cohérents au regard de l’insuffisance du budget alloué, par exemple en cessant de vouloir donner une réponse pénale à toute infraction et en revenant à l’individualisation des peines. S’agissant des juridictions judiciaires, la création annoncée de 142 emplois de magistrats et fonctionnaires ne peut compenser les suppressions d’emplois de magistrats de ces dernières années (121 uniquement pour les magistrats entre 2009 et 2011). Dans le même temps sont entrées en vigueur des réformes importantes pour les libertés comme le contrôle de l’hospitalisation d’office sans aucune création réelle d’emplois. Les juges des tutelles ne parviennent pas à faire la

révision des mesures de protection des majeurs qui doit intervenir avant le 31 décembre 2013. La situation des parquets est devenue plus critique encore depuis l’indispensable réforme de la garde à vue alors même que la France n’a que 3 procureurs pour 100 000 habitants, pour 6,4 en Allemagne, 7,7 en Belgique, ou 13,9 au Portugal… Les 812 recrutements prévus pour les fonctionnaires excèdent à peine les 760 départs en retraite attendus dans l’année, alors que l’effectif réel global des fonctionnaires a été réduit de 173 entre 2009 et 2012. La pénurie de personnel va donc continuer à entraîner des réductions des horaires d’ouverture au public, des délais

de notification trop importants et des conditions de travail insupportables pour les fonctionnaires confrontés en première ligne à l’impatience des usagers. Le montant des frais de justice impayés (experts, enquêteurs sociaux…) s’est accru bien au delà de la légère augmentation prévue pour ce poste, et les crédits de fonctionnement sont totalement insuffisants au regard des besoins : depuis octobre, bon nombre de juridictions n’ont plus de papier pour imprimer leurs jugements… A la Protection Judiciaire de la Jeunesse, après la suppression de 600 emplois, 75 au maximum seront recréés en 2013. Si ces emplois restent bienvenus, ils ne vont pas bouleverser le fonctionnement des services

malmenés depuis longtemps. Ces nouveaux emplois devraient servir en partie, à répondre au raccourcissement des délais de prise en charge en milieu ouvert ramenés à cinq jours par la loi d’exécution des peines. Ce délai est actuellement de 11 jours en moyenne, ce qui permet de mesurer le niveau actuel de surcharge des services. De plus, la priorité au Milieu Ouvert annoncée par le ministère est contredite par une ventilation contestable des emplois opérée par la direction de la PJJ. Alors que le bilan des CEF est en cours, 7 vont encore ouvrir dont 6 par transformation de foyers éducatifs avec 3 en 2013. En plus de ces ouvertures qui vont mobiliser des emplois d’éducateurs, la direction de la PJJ annonce la généralisation à tous les CEF publics du label

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Pascale Taelman, Christiane Taubira et Philippe Duron

L’avocat en entreprise Madame le Garde des Sceaux, Monsieur le Président du CNB, nous n’en voulons résolument pas, pas plus que nous ne voulons de l’interprofessionnalité d’exercice. Et ce n’est pas parce que nous ne saurions pas épouser les évolutions sociétales ; c’est parce que nous sommes attachés aux principes fondateurs de notre profession, que nous l’aimons et que nous ne voulons pas la voir sacrifier sur l’hôtel de la rentabilité et du marché. « santé mentale », une partie des emplois crées de psychologues sera donc utilisée à cet effet ainsi que la moitié des mesures catégorielles sous forme de primes aux personnels. Pour ce qui concerne le fonctionnement, les crédits en augmentation de 18 Millions d'Euros sont absorbés par le remboursement des impayés cumulés depuis des années, en particulier aux Services Associatifs Habilités et à la poursuite du programme immobilier des CEF. Le fonctionnement quotidien sera donc bien moins financé qu'en 2012 : la priorité à l’éducation reste donc sans moyens, ce qui ne permet absolument pas de garantir l’efficacité et la qualité de l’exercice des missions éducatives.

Monsieur le bâtonnier Castelain ne revendique pas d’autre légitimité à ce glissement qu’il appelle de ses vœux. Encore récemment, au congrès de l’ACE, il nous expliquait que, dans la mesure où les deux tiers du chiffre d’affaires de la profession viendraient du « conseil », il n’y aurait finalement pas lieu à discussion. L’interprofessionnalité capitalistique et de structures s’imposerait à nous, tout comme l’avocat en entreprise. Pourtant, la majorité de la profession a déjà eu l’occasion de se prononcer à de nombreuses reprises contre ce projet. Et ce ne sont pas seulement les avocats du judiciaire, ces gagne-

(par exemple le projet de loi relatif à la retenue pour vérification du droit au séjour et le projet de décret réaménageant le contentieux social des juridictions administratives). Les délais de jugement devraient, dans ces conditions, se dégrader. La surcharge de certaines juridictions, notamment celles qui ont un ou plusieurs centres de rétention administrative dans leur ressort, va s’aggraver. Cela intervient dans un contexte où la remise en cause du rôle du rapporteur public constitue déjà une dégradation des standards de qualité de la juridiction administrative.

S’agissant de la juridiction administrative, le budget 2013 prévoit la création de 40 emplois et une quasi stagnation des crédits de fonctionnement. Cela ne permettra pas de faire face à la forte augmentation du contentieux relatif à la situation des étrangers, consécutive à la dernière loi sur l’immigration du 16 juin 2011, et aux autres contentieux dits « de masse » tels que ceux relatifs au droit au logement, aux prestations sociales ou au permis de conduire. Cela permettra encore moins d’anticiper les charges juridictionnelles supplémentaires qui se profilent

S’agissant de la défense, le budget consacré à la défense des plus démunis est notoirement insuffisant, et ce d’autant plus que chaque année, les avocats doivent assurer de nouvelles missions de défense à moyens constants. Ainsi en est-il de la réforme de l’hospitalisation d’office, de la procédure disciplinaire dans les lieux de détention par exemple. L’indemnisation des missions de défense est si indigente qu’elle ne permet pas aux avocats d’exercer convenablement leurs missions, créant ainsi une justice à deux vitesses. La réforme de la garde à vue qui permet enfin aux justiciables d’être assistés d’un avocat lors de leurs auditions souffre elle aussi d’un budget insuffisant et n’est pas correctement financée. Si nul n’ignore les contraintes

budgétaires qui pèsent aujourd’hui sur le Gouvernement, il est indispensable qu’il propose enfin une grande réforme de l’aide judiciaire, notamment pour une modification des seuils d’octroi de l’aide juridictionnelle dont sont exclus aujourd’hui bon nombre de justiciables aux ressources modestes. Concernant l’administration pénitentiaire, les syndicats sont inquiets de constater un décalage entre les engagements de campagne électorale du candidat Hollande devant les Français et le budget proposé qui ne permettra pas de tenir les orientations souhaitées. Si nous sommes en accord avec une politique visant à diminuer le nombre de personnes détenues par le recours à plus d’alternatives à l’incarcération et d’aménagements de peines, le niveau d’emploi proposé pour l’administration pénitentiaire ne permettra pas dans le cadre d’une loi de finances sur trois ans, de suivre en milieu ouvert les personnes jugées mais non incarcérées, ni d’impulser une politique résolument orientée vers la préparation à la sortie dans les établissements : aucun emploi nouveau pour le renforcement des organigrammes existants des personnels de surveillance – administratifs et techniques ; et seulement 41 emplois supplémentaires dans la filière insertion et probation. Sauf à recourir à toujours plus

petit qui ne représentent qu’un tiers du chiffre d’affaires de la profession qui y sont opposés ; ce sont tous ceux qui ont encore une idée éthique de la profession et pas exclusivement commerciale ; ce sont ceux qui pensent que le conflit d’intérêt peut devenir insurmontable quand on est salarié de son seul client, ce sont ceux pour qui l’indépendance intellectuelle et matérielle est une condition absolue de l’exercice de la profession d’Avocat. Non, les principes d’indépendance, de liberté, de déontologie… que nous revendiquons et qui sont incompatibles avec l’Avocat en entreprise, ne sont pas des combats d’un autre temps. Certains prétendent que l’Avocat collaborateur ne serait pas plus indépendant des exigences de son patron que le futur avocat en entreprise ne le serait de l’entreprise qui l’emploie. Excusez-moi, mais la différence est de taille ; l’Avocat collaborateur d’un autre Avocat, si tant est qu’il vive une certaine dépendance, voit celleci circonscrite au sein de l’avocature, encadrée par les règles de la profession, sous le contrôle du bâtonnier. La dépendance vis-à-vis d’une entreprise, qui serait notre unique employeur, est de toute autre nature et avec de toutes autres conséquences. Rappelons la résolution adoptée par le CNB le 12 décembre 2008 : « L’indépendance de l’Avocat est une exigence de l’état de droit qui garantit un accès effectif aux conseils juridiques et à la préservation des droits, en assurant un conseil et une défense libres. L’indépendance de l’avocat est pour lui un devoir et pour son client un droit …

d’externalisation de missions sans autre réflexion sur l’articulation des politiques publiques – ce que dénoncent les syndicats signataires –, nous voyons mal comment augmenter davantage les ratios de prises en charge déjà intolérables. Nous sommes par ailleurs étonnés de constater en parallèle qu’aucune déflation pénale ne soit à ce jour envisagée ainsi qu’un retard soit pris à l’égard des engagements d’abroger certaines lois adoptées par le précédent gouvernement : peines planchers, peines de sûreté, restrictions d’octroi de la libération conditionnelle… Enfin, nous déplorons le peu de contraintes imposées aux procureurs par une circulaire de politique pénale très éloignée de la « révolution » que certains ont annoncée. S’agissant du parc immobilier de l’administration pénitentiaire, les syndicats signataires se félicitent du choix de suspendre le projet du précédent gouvernement qui créait encore plus d’usines carcérales, et ceci dans le cadre de partenariats publics privés amputant le budget Justice de manière totalement irresponsable. Enfin, si nous sommes satisfaits de ce choix fait par la ministre, nous sommes impatients de connaître la vision de Madame TAUBIRA sur la cartographie pénitentiaire en

lien avec la politique pénale qu’elle entend mener. Il reste en effet un certain nombre d’établissements vétustes à remplacer, et une réflexion de fond à avoir sur l’implantation et l’architecture des futures structures. Les syndicats constatent ensuite qu’inscrit dans un cadre budgétaire national extrêmement contraint, le projet de loi de finances pour 2013 ne permettra pas de marges de manoeuvre sur le volet statutaire et indemnitaire pour répondre à la question prégnante du pouvoir d’achat des fonctionnaires pénitentiaires. Malgré un budget d’austérité, la ministre aurait pu et du donner des signes clairs de changement sur un ensemble de thématiques qui ne coûtent rien : rénovation des pratiques de management, réflexion sur les missions, les formations initiales et continues, les rythmes de travail, les pratiques professionnelles, l’abrogation de dispositifs pris par le précédent gouvernement et rejetés par les personnels, etc. Elle ne l’a pas fait, participant ainsi à une nouvelle vague de démobilisation professionnelle et de doute envers nos gouvernants. Aucune claire perspective de changement n’est proposée. De ce point de vue, il n’y a plus de temps à perdre, des actes forts doivent être pris.

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Vie du droit

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Christian Charrière-Bournazel, Pascale Taelman et Christiane Taubira

L’Avocat doit préserver une indépendance absolue, aussi bien matériellement qu’intellectuellement, exempte de toutes pressions et notamment de celles résultant de ses propres intérêts ou d’influences extérieures … L’Avocat doit refuser toutes instructions contraires à ses propres critères professionnels quelle qu’en soit l’origine. L’Avocat ne peut exercer nulle autre profession ou activité de nature à porter atteinte à son indépendance. » Doit-on considérer que ceci est dépassé ? Non, c’est le fondement de notre statut professionnel. Ne l’oublions jamais. Les juristes en entreprise qui revendiquent le titre d’Avocat nous disent : « n’ayez pas peur, nous ne plaiderons pas ». Mais nous n’avons pas peur, nous disons simplement qu’un Avocat est un tout ; qu’il n’est pas question de voir diviser la profession en Avocats de plein exercice et en Avocats avec des attributions différentes (pas de plaidoiries, pas le même secret professionnel, pas d’indépendance, pas de contrôle ordinal absolu…). Si le renforcement de la place du droit et donc de l’Avocat dans l’entreprise ne fait pas débat, ou plus exactement fait consensus, c’est la façon d’y parvenir qui clive. « Aucune règle de droit ni de déontologie ne s’oppose aujourd’hui à ce qu’un avocat libéral et indépendant consacre l’essentiel de son temps et de son activité aux besoins juridiques d’une entreprise et mette au service de celle-ci la plénitude de ses attributions, de ses compétences, de son indépendance, de sa déontologie et de sa responsabilité, contre le règlement d’honoraires librement négociés. Rien ne s’oppose à ce que l’avocat en question représente son cliententreprise dans quelque négociation juridique que ce soit, y compris au niveau européen, ni à ce qu’il participe activement et étroitement à la stratégie juridique de l’entreprise » : ce n’est pas de moi, ce n’est pas même du SAF, c’est de Benoit Van de Moortel, ancien Bâtonnier de Rouen, ancien membre de la commission « règles et usages » du CNB, dans sa contribution aux débats du CNB, le 26 mars 2010. Je vous invite tous à relire cette excellente contribution, dans laquelle nous nous retrouvons pleinement. Alors, non, nous ne voulons pas devenir des commerçants, nous ne voulons pas du « one

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stop shopping », nous ne voulons pas être salariés de commerçants, nous voulons rester Avocats, au sein d’une seule profession, unie dans sa diversité, avec une seule déontologie, un seul secret professionnel reposant sur notre indépendance et notre réglementation spécifique.

Numerus clausus, accès à la profession et formation Ces trois questions sont intimement liées. Madame le bâtonnier de Paris, vous avez, cet été, dit votre préoccupation de voir arriver de nouvelles recrues dans la profession alors que, dans le même temps, la profession se paupérise. Sans évoquer ouvertement le numerus clausus, vous avez dit votre souhait de trouver une solution pour limiter l’accès à la profession, au moins provisoirement. Vous avez renouvelé cette préoccupation lors du congrès de l’ACE. Le SAF a toujours été opposé au numerus clausus et nous n’avons pas changé d’avis. Toutes les professions qui s’y sont essayé ont pu constater que c’était un échec ; à bref délai, des déserts géographiques sont susceptibles de se créer et l’accès au droit pour tous gravement compromis. De la même manière, vous avez saisi madame le Garde des Sceaux pour lui demander d’abroger le décret passerelle du 3 avril 2012. Le SAF s’est toujours déclaré favorable à l’ouverture de notre profession dès lors qu’un certain nombre de critères clairement définis étaient remplis. Ainsi, si nous avons été très choqués de la date à laquelle ce décret a été pris, à la veille de changements importants dans la vie politique de notre pays, de son caractère « opportuniste », nous pensons que, dès lors que des critères précis garantissent la formation et la maîtrise de nos règles déontologiques, la profession n’a pas à être repliée sur elle-même. C’est dans cette logique que pour notre part, nous souhaitions que le décret « passerelle » soit, non pas abrogé, mais modifié en ce que seuls les anciens députés, sénateurs et ministres, titulaires d’une maîtrise en droit, ayant réellement participé à l’élaboration de la loi et se soumettant à un examen de déontologie, puissent accéder à la profession d’avocat. Cela

est chose faite, nous nous en réjouissons. Par contre, nous ne comprenons pas que des docteurs en droit puissent être exemptés du cursus normal d’accès à la profession. S’il est légitime de disposer d’une « filière pratique » (passerelles) avec examen de déontologie, la filière universitaire doit être la même pour tous. Reste encore la question de la formation du futur avocat. Les champs d’apprentissage doivent être étendus et diversifiés ; de nouveaux domaines doivent être explorés et mieux exploités : le droit de l’entreprise, l’action de groupe, la réparation des préjudices corporels, le droit des étrangers, le droit rural qui pourrait accompagner certains mouvements de retour à la terre sont autant de domaines pour lesquelles la culture générale, et donc la curiosité du futur avocat, n’est pas assez développée. La suppression du stage post CAPA a aussi été une erreur. Je le dis d’autant plus tranquillement que le SAF y avait été favorable. Cependant, force est de constater que cette suppression, souhaitée pour éviter que de jeunes confrères ne se retrouvent sur le pavé, sans stage, a conduit à des installations dans des conditions à la limite de la dignité, sans véritable contrôle de nos ordres, et nuit gravement à la formation de terrain et à la transmission des valeurs de notre profession. Enfin, la question de la transmission de nos cabinets, notamment par l’intégration des collaborateurs, est une question cruciale pour notre avenir. Au lieu de multiplier les petites structures, sans infrastructures ni moyens de développement, la mutualisation, au sein de structures à taille humaine mais assurant la pérennité des cabinets et leur viabilité dans de bonnes conditions, est une garantie de développement pour chacun. En un mot comme en cent, c’est la culture de l’avocat qu’il faut promouvoir mais ça ne semble pas dans l’air du temps !

Conclusion Ce rapport n’a pas la prétention d’être exhaustif, mais j’ai promis de ne pas être trop longue, souhaitant que le débat puisse trouver sa place et le temps est donc venu pour moi de tirer ma révérence et de laisser la place au congrès, puis au nouveau conseil syndical et bureau qui en sortiront élus. Je voudrais toutefois ajouter que les membres du SAF ont voté, lors des dernières élections, pour un gouvernement de gauche, capable, nous l’espérions, de rompre avec la logique du tout sécuritaire et de redonner à l’avocat toute sa place dans la cité, sa fonction sociale. Le Syndicat des Avocats de France souhaite qu’à partir de choix législatifs nouveaux et courageux, l’institution judiciaire retrouve sa fonction de régulation sociale en répondant, de manière effective et différenciée, aux différends d’ordre privé et aux troubles à l’ordre public. Nous voulons que les moyens soient mis en œuvre pour que la Justice soit, dans des délais raisonnables et cohérents, un facteur de paix et de justice sociale. C’est une philosophie du vivre ensemble qu’il faut reconstruire à travers l’état de droit. Nous espérons vivement ne pas être déçus.

Les Annonces de la Seine - lundi 19 novembre 2012 - numéro 69

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Entretien

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Sabine du Granrut

Sabine du Granrut Jean-René Tancrède : Quelles sont les principales actions que vous entendez mener au cours de votre mandat si vous êtes élue ? S.D.G : Si je suis élue, c'est en qualité de Vice-

Bâtonnier aux cotés de Frédéric Sicard en qualité de Bâtonnier. Dans le cadre de la campagne pour l'élection, nous proposons sur le plan institutionnel une répartition en cohérence avec les textes d'ores et déjà applicables et ceux qui entreront en application le 1er janvier 2014. Plus particulièrement, le Vice-Bâtonnier ne siègera au Conseil de l’Ordre qu'avec voix consultative. Aux termes des textes, le Bâtonnier est chargé de représenter l'ensemble du Barreau tant en France qu'à l'Etranger il est également depuis quelques années Vice-Président de droit du Conseil National des Barreaux, il est également autorité de poursuite. De fait, il apparaît que pour un barreau de 25 000 membres, le Bâtonnier ne peut plus être effectivement le « premier confident » des confrères et ce d'autant que l'arrêt de la Cour de Cassation du 22 septembre 2011 a jugé qu'un courrier échangé entre un Avocat et les autorités ordinales (sans pour autant préciser qui est l'autorité ordinale) n'est pas couvert par la confidentialité des échanges entre Avocats. C'est pourquoi nous proposons que le ViceBâtonnier soit ce premier confident nécessaire, en charge des avis qui sont donnés aux confrères, que ce soit en déontologie ou en toute autre matière dès lors que le confrère sollicite un conseil ou un avis. Cette structuration est conforme aux textes existants et ne nécessite aucune modification textuelle. Elle permettra de rapprocher l'ordre des Confrères puisqu'il ne sera pas là seulement pour sanctionner mais aussi pour accueillir et conseiller en toute impartialité,

ce qui est une exigence indispensable pour moi, l'ordre n'est pas là pour quelques confrères qui croient y avoir leurs entrées, il est au service du Barreau dans son ensemble. Cette répartition des fonctions nous paraît essentielle pour la pérennisation de l'existence du Vice-Bâtonnier à Paris. La déontologie est et doit demeurer ce qui constitue notre identité propre. Quelque soit l'activité que nous exercions, conseil, contentieux, la déontologie est la même et c'est ce qui fonde l'unité de notre Barreau. Auprès de nos clients, notre compétence c'est notre crédibilité, la déontologie c'est la sécurité que nous leur offrons. Que ce soit dans le conseil ou le contentieux, nous délivrons une prestation indépendante, en dehors de tout conflit d'intérêt et couverte par le secret professionnel. Cette spécificité, qui est celle des seuls Avocats, conduit à reconnaître que nous délivrons de véritables « biens de confiance ». La déontologie doit être au cœur de notre activité et constitue un véritable avantage concurrentiel par rapport à nos concurrents potentiels. Nous devons en avoir une parfaite maîtrise et la faire connaître, c'est pourquoi nous proposons la création à Paris d'un institut de « déontologie » en charge de l'enseignement, l'écriture d'un support de cours, de la doctrine et de la publication de la jurisprudence. Pour être incontestable, notre déontologie doit avoir une constance qui s'inscrive dans la durée et l'impartialité. Certaines règles et notamment celles du conflit d'intérêt doivent être clarifiées et le secret professionnel, édicté au seul profit de nos clients, doit être clairement défini pour être utilement défendu. Il y a à Paris un creuset exceptionnel constitué par les 5 000 avis déontologiques rendus chaque année, le comité d'éthique devra également participer à ces travaux. Notre programme riche de mesures concrètes est aussi et surtout tourné vers l'emploi des collaborateurs. Nous sommes la dernière profession réglementée qui ne dispose d'aucune statistiques d'emploi des confrères : où sont-ils ? Que font-ils ? Nous ne disposons que d'éléments chiffrés très parcellaires : on sait que 40,9 % des Avocats parisiens sont collaborateurs, ce qui démontre que la collaboration libérale se poursuit au-delà des 5 premières années d'exercice, or notre RIN ne prévoit rien à ce titre. Il est indispensable de construire le statut de la collaboration senior qui est une réalité de notre profession. De plus pendant cette période économique difficile il appartient à l'Ordre aussi de promouvoir l'emploi. Nous proposons de centraliser à l'Ordre l'ensemble des demandes et offres de collaboration afin de mettre un terme à leur éparpillement actuel. Non seulement cet outil sera immédiatement utile aux confrères, mais permettra également

d'avoir une photographie exacte de l'activité de notre profession avec une connaissance des secteurs qui recrutent et de ceux qui sont saturés, de la durée exacte de la non activité d'un confrère qui change de collaboration, ce qui offrira la possibilité, au regard de chiffres tangibles de proposer une modification del la durée de la couverture assurance perte de collaboration. Des mesures pratiques, utiles immédiatement, et indispensables à long terme. J-R.T : Le secret professionnel est indispensable aux droits de la défense, comment voyez-vous son avenir ? Votre confrère Pascal Saint Geniest, Bâtonnier de Toulouse, l’a évoqué lors de la Rentrée de son Barreau ce 12 octobre 2012 (voir Les Annonces de la Seine du 22 octobre 2012). S.D.G : Comme l'a justement rappelé le Bâtonnier

Saint Geniest lors de la rentrée du Barreau de Toulouse, le secret professionnel est indispensable aux droits de la défense et pas seulement dans le cadre du contentieux, les droits de la défense existent également lorsque nous délivrons des conseils à nos clients. Il doit être défendu, sans concession, à l'heure de la négociation de la quatrième directive antiblanchiment. J-R.T : Quelles sont les incidences du RPVA dans les relations quotidiennes entre Avocats et Magistrats ? S.D.G : Le RPVA est un nouvel outil

indispensable au regard des nouvelles technologies de communication, il a pour inconvénient de « virtualiser » les relations avec les Magistrats et également avec les confrères. Rien ne peut remplacer le contacte humain entre professionnels de la justice et l'ordre devra y veiller par l'organisation régulières de rencontres à vocations professionnelles mais aussi quelque peu festives, les commissions ouvertes sont un vecteur indispensable au maintien de ces contacts. J-R.T ; Que proposez-vous aux Avocats pour élargir leur champ d’activités ? S.D.G : Depuis plusieurs années, les champs

d'activités ont été étendus, il ne me semble pas souhaitable de les étendre plus au regard de notre déontologie. Il faut renforcer nos compétences et investir les domaines qui nous sont naturels où nous sommes absents. Par exemple à la Cour de Justice de l'Union Européenne 90 % des dossiers impliquant la France sont traités par nos Confrères Belges. Il est indispensable que nous soyons présents devant cette juridiction et nous proposerons, si nous sommes élus, de créer un bureau de la DBF à Luxembourg pour en faciliter l'accès à nos confrères parisiens ou non. Propos recueillis le 13 novembre 2012 par Jean-René Tancrède

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Vie du droit

Les Entretiens Juridiques de Chartres Hôtellerie Saint-Yves - 16 novembre 2012 Dominique Baudis, Défenseur des Droits, était vendredi dernier l’invité d’honneur de la Bâtonnière chartraine Sylvie LeroyNomblot, ce prestigieux invité a présenté l’Autorité Constitutionnelle, chargée de veiller à la protection des Droits et des Libertés et de promouvoir l’Egalité, qu’il préside pour six ans depuis le 23 juin 2011 . Son intervention a suscité l’intérêt des participants qui lui ont posé de nombreuses questions. Madame la Bâtonnière peut être fière d’avoir mieux fait connaître à ses confrères cette belle Institution qu’est le Défenseur des Droits qui tient désormais une place importante dans le respect des équilibres démocratiques de notre pays. Jean-René Tancrède

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Sylvie Leroy-Nomblot

Entre défense et droits par Sylvie Leroy-Nomblot

e vous remercie de l'intérêt que vous portez à notre Barreau qui se traduit par votre présence aujourd'hui. Monsieur le Défenseur des droits, notre Barreau est très honoré de votre présence et je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Le Barreau de Chartres est riche de la diversité de ses 140 Avocats judiciaires et juridiques. C'est un Barreau jeune avec une moyenne d'âge de 42 ans composé de 79 femmes et 61 hommes. J'arrive au terme de mon mandat de Bâtonnier. Je vous remercie, chers confrères, de m'avoir accordé votre confiance il y a deux ans, j'ai essayé de répondre à vos attentes et de vous accompagner dans cette période de réformes et d'évolution de notre profession qui se modernise et s'adapte à cette course législative.

J

La détermination du Barreau a permis, dès le 15 avril 2011, le lendemain de la nouvelle loi relative à la garde à vue d'être présent. Je tiens à souligner à propos de cette réforme, la qualité de la collaboration que le Barreau entretient avec Monsieur le Procureur et les Magistrats du Parquet ainsi qu'avec les Officiers

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de police judiciaire et de gendarmerie du département. Les Avocats ont fait face à une autre réforme importante, celle de la Cour d'Appel : au 1er janvier est effectivement intervenue la suppression des Avoués après la réforme de la procédure devant la Cour d'Appel par le décret Magendie du 9 décembre 2009 applicable au 1er janvier 2011. Les Avocats et Juges de la Cour d'Appel réalisent un parcours du combattant compte tenu de la complexité des délais multiples et de la complexité de cette procédure. Pendant l'année 2011 les Bâtonniers des 4 Barreaux de la Cour ont été reçus par Monsieur le Premier Président pour anticiper les significations et échanges des actes par réseaux dématérialisés prévus au 1er janvier 2013 et faciliter la cohérence de cette nouvelle procédure. Au mois de janvier 2012 nous étions prêts mais la Chancellerie, qui une fois encore a démontré qu'elle n'apportait pas les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de ses réformes, a fait savoir que toute convention serait nulle Mais nous persistons Magistrats, Greffiers et Avocats à travailler ensemble à travers des échanges intéressants, parfois fermes mais toujours dans l’intérêt des justiciables. Ces rencontres, Monsieur le Premier Président, ont été très enrichissantes. Je vous remercie de votre écoute quant aux difficultés rencontrées par les Avocats qui sont bien conscients des moyens insuffisants de la justice mais s'adaptent.

En Eure et Loir les Tribunaux d'Instance et de Grande Instance ont dû faire face aux postes vacants de magistrats et de Greffiers. Les échanges entre Juges, Greffiers et Avocats ont ainsi permis que soit toujours rendue une justice de qualité, résultat d'une compréhension mutuelle. Madame la Présidente, Monsieur le Procureur, le Barreau vous a donc attendu, suite aux départs simultanés de Monsieur le Procureur Peyroux et Monsieur le Président Seither au printemps 2012, avec autant d'impatience et d'espoir que les Magistrats et les Greffiers. Je vous remercie de la qualité de nos échanges depuis votre arrivée et le Barreau partage votre volonté de favoriser une justice humaine car les moyens technologiques ne doivent être qu'un outil d'amélioration au bon fonctionnement de la Justice. Je regrette de terminer mon mandat car j'aurai aimé collaborer plus longtemps avec vous mais mon successeur Christian Mercier, qui a déjà été Bâtonnier, possède des qualités à hauteur de son expérience et le souci que progresse l'institution judiciaire. Je tiens à souligner que nous avons toujours eu la chance à Chartres que les Avocats et les Magistrats assurent, chacun leur fonction, dans le respect et la courtoisie. Mes prédécesseurs ont été toujours favorables à ces bonnes relations et je suis sûre qu'elles perdureront.

REPÈRES

J’ai encore rêvé d’elle* (extraits) J'ai encore besoin d'elle Deux ans, c'est triste mais elle s'en va Moi je ne voyais qu'elle, J’n’étais qu'un jeune avocat, Tout plein d'espoir Juste pour ce soir On est monté sur scène Il ne manquait que toi Une soirée pleine d'émotions Grâce à ta subvention Si je pouvais être convié, à déjeuner Une pizza à partager Un jeudi par mois Just' entre elle et moi A la, maison de l'avocat Pour se dire, gnangnan et blablabla

J'avais voté pour elle T'avais pas le choix (2 groupe aigu) Elle était tellement belle C'est donc pour ça (2ène groupe aigu) Je kiffe Maître Leroy J'en connais trois (2 groupe aigu) Aujourd'hui elle s'en va Mais remets-toi (2 groupe aigu) Tout plein d’espoir Juste pour ce soir Si tu pouvais me relooker, d'la tête au pied Dans tout le perche tu es enviée J'aime ton brushing, Tes bottes cloutées A Nogent, oui la mode c'est toi Et demain (…) * par le Jeune Barreau de Chartres

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Vie du droit

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Dominique Baudis, Christian Mercier, Sylvie Leroy-Nomblot, Patrice Ollivier-Maurel, Françoise Barbier-Chassaing, Alain Nuée et Elisabeth Gayet

Deux années de Bâtonnat c'est une parenthèse dans une carrière d'Avocat. On s'endort et on se réveille en pensant à son Barreau. Ce sont deux années riches avec des moments exceptionnels, d'autres douloureux car notre Barreau est une grande famille et nous partageons nos peines. Je souhaite ajouter qu'en ma qualité de Bâtonnier j'ai beaucoup apprécié les échanges que j'ai eu avec les Autorités de ce département, les responsables des Chambres des Huissiers, des Notaires, des Experts Comptables, notamment et chacun de leurs membres ainsi qu'avec la Chambre de commerce ou des Métiers dont nous sommes partenaires. Merci encore aux anciens Bâtonniers et aux membres du Conseil de l'Ordre pour votre participation active et précieuse, à nos secrétaires, à vous tous mes Chers Confrères. C'est grâce à toutes nos forces réunies que notre Barreau vit avec un tel dynamisme. Les Avocats sont conscients que leur compétence est liée à une nécessité de formation. Le nombre important de Confrères présents aujourd'hui démontre notre volonté d'être des acteurs dynamiques dans notre Société confrontée à une crise économique sans précèdent et à des mutations profondes. Les Avocats, face à cette évolution s'ouvrent à de nouveaux champs d'activité et confrontés à la déjudiciarisation s'organisent pour proposer des modes de règlements alternatifs aux conflits auxquels sont confrontés nos clients. Avocats de Province, nous constatons aussi que la précarité s'aggrave. Notre profession a toujours été présente pour assister les plus démunis et nous sommes intéressés de mieux

connaitre cette nouvelle institution du Défenseur des droits. Votre nom, Monsieur le Défenseur des droits est composé de deux mots chers aux Avocats : défense et droits. La défense, c'est l'essence de notre Profession. Avec vous, Monsieur Baudis, nous avons donc un point commun : assurer la défense. L'Avocat, auxiliaire de Justice assure la défense de tous dans le respect de notre déontologie, des valeurs essentielles de notre Profession, particulièrement dans le respect de l'indépendance, du secret professionnel et de la probité. Comme votre Institution, nous aidons les plus démunis en dépit de moyens trop souvent insuffisants. L'Avocat ne mène pas des combats corporatifs mais doit être le garant des droits et des libertés. La profession s'est félicitée de la loi du 14 avril 2011 permettant l'assistance de l'Avocat aux côtés des personnes privées de liberté tout au long de la garde à vue qui constitue une grande avancée. Certes, cette loi mérite d'être encore améliorée. L'Avocat a vocation d'être aux côtés des citoyens chaque fois qu'ils subissent une atteinte à leurs droits ou à leur liberté. Et, les Avocats sont soucieux d'assurer aussi une défense de qualité aux justiciables qui bénéficient de l'accès au Droit. Force est de constater que le système de l'aide juridictionnelle est aujourd'hui à bout de souffle. Pourtant, il est essentiel dans un Etat de droit de maintenir l'accès à la Justice pour tous. L'autre mot composant votre nom c'est « Droits ». Dans notre société, de plus en plus mercantile où le droit tend à devenir une marchandise,

l'Avocat, profession réglementée, permet la sécurisation des relations contractuelles tant pour les entreprises que pour les particuliers. L'Avocat est là pour conseiller, apporter ses compétences en tous domaines. La vocation du Défenseur des Droits est également de veiller à la défense des droits des citoyens démunis face à une société de plus en plus hostile pour les plus faibles tels les enfants, les victimes de discrimination. La loi organique du 29 mars 2011 a créé le Défenseur des Droits, issue de la fusion de 4 autorités existantes : Médiateur de la République, Défenseur des Enfants, Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité. Dans votre rapport de 2011, Monsieur Baudis, vous avez insisté sur la nécessité pour la République d'offrir à chacun un nouveau moyen de mieux faire respecter ses droits et ses libertés grâce à cette nouvelle institution ouverte à tous, dotée de pouvoirs juridiques plus étendus. Vous constituez, Monsieur le Défenseur des Droits, un espoir et je vous remercie vivement de nous exposer aujourd'hui vos actions ainsi que les modalités d'intervention du Défenseur des Droits dans chaque département et comment les Avocats pourraient utilement intervenir à vos côtés. La Profession a en effet réalisé avec votre institution une convention signée avec le Conseil National des Barreaux le 3 mars 2012. Cependant, j’ai pu constater que le Défenseur des Droits était une institution encore trop méconnue.

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Vie du droit

Cercle Dalloz Dîner inaugural - Paris, 15 novembre 2012

e 15 novembre 2012, Charles Vallée a présidé le diner inaugural du « Cercle Dalloz » qui s’est déroulé dans les salons de l’Hôtel Lutétia-Concorde à Paris, pour célébrer la fondation de cette Association régie par la loi du 1er juillet 1901 qui a pour but « le partage et la diffusion des savoirs et des expériences juridiques ». Son invité d’honneur était le Procureur Général près la Cour de Cassation qui est intervenu sur le thème de « L’avenir du Parquet à la française ». Sa brillante intervention a suscité l’intérêt des prestigieux invités conviés par les deux cofondateurs Charles Vallée et Luc Barbier. Ce fut l’occasion pour Jean-Claude Marin de rappeler que « par son statut de magistrat, le Ministère Public, dans sa mission d’individualisation de façon impartiale de l’application de la loi et de la garantie des libertés individuelles, est soumis à un impératif éthique et déontologique supérieur » et que « nonobstant le fait que les magistrats du Ministère Public soient placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du Garde des Sceaux, ils conservent, dans le respect du devoir de loyauté, leur liberté de parole à l’audience et de classement dans les dossiers. » C’est parce que le Ministre de la Justice dispose du pouvoir de mettre en œuvre la politique pénale qui a pour finalité d’arrêter les priorités que commande l’intérêt général, « qu’il est

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C

Jean-Claude Marin et Charles Vallée légitime que le Parquet, compte tenu de son rôle dans le maintien de l’ordre public, juridique, économique et social, connaisse une hiérarchie spécifique destinée à assurer la cohérence de ses interventions. »

Les débats avec la salle furent riches car le statut et le rôle complexes du Parquet à la française sont constamment sources d’interrogations sur le fonctionnement de la justice française. 2012-798 Jean-René Tancrède

Direct

Ministère de la Justice Mont-de-Marsan - 19 novembre 2012

hristiane Taubira, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et Alain Vidalies, Ministre délégué auprès du Premier Ministre, chargé des Relations avec le Parlement ont été aujourd’hui en déplacement à Mont-de-Marsan. A cette occasion, la Ministre de la Justice a annoncé la construction d’un nouveau Tribunal de Grande Instance à Mont-de-Marsan, qui se situera sur un terrain acquis par le Ministère de la Justice il y a une vingtaine d’années. Le budget consacré au projet est estimé à 22 millions d’euros.

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Christiane Taubira

Le calendrier prévisionnel du lancement :

2013 : Reprise des études préalables et lancement d’un concours d’architecture 2014 : Choix d’un maitre d’oeuvre 2015 : Lancement des appels d’offres de travaux 2016 : Début des travaux 2017-2018 : Livraison Source : Communiqué du 19 novembre 2012

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Vie du droit

Association Française d’Arbitrage Conférence annuelle - Paris, 10 septembre 2012

Le colloque annuel de l’Association Française d’Arbitrage (A.F.A.), présidée par Geneviève Augendre, s’est déroulé dans les salons de l’Espace Cambon à Paris ce 10 septembre 2012, ce fut l’occasion de débattre sur les attentes des entreprises face aux sentences arbitrales.

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Alexandre Job et Geneviève Augendre

L’attente des entreprises en matière d’arbitrage Alexandre Job e souhaite d’abord remercier l’Association Française d’Arbitrage (AFA), et plus particulièrement Geneviève Augendre, Noël Melin et le Professeur Charles Jarrosson d’avoir invité la Direction Juridique du groupe Total à participer à son colloque annuel. Malgré l’impossibilité pour Peter Herbel, Directeur Juridique du groupe Total, de participer à ce colloque, Total, en retour de l’invitation qui lui avait été faite, a souhaité y être représenté et tenir l’engagement pris à l’égard de l’AFA. « Pacta Sunt Servanda » dirais-je pour employer un adage cher à l’arbitrage ! Je souhaite également remercier les organisateurs de ce colloque de leur confiance : Ouvrir la tribune qu’offre l’AFA à la Direction Juridique du groupe Total pour y exprimer ses attentes, préoccupations et, le cas échéant, ses critiques à l’égard de l’arbitrage est le signe d’une grande ouverture d’esprit et de la volonté de cette institution de s’intéresser à ses justiciables et d’être en prise directe avec eux. En ce sens, la démarche de l’AFA mérite d’être saluée. Elle est aussi intéressante, car si l’on a l’habitude de voir avocats et arbitres s’exprimer sur le sujet, la parole de l’entreprise se fait rare alors même qu’elle en est la première utilisatrice.

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Enfin, si je ne parlerai bien évidemment pas au nom de Peter Herbel, les réflexions que j’entends partager avec vous reflètent néanmoins une préoccupation générale de la Direction Juridique du groupe Total. A titre liminaire, et afin de répondre une demande qui m’a été faite par le Professeur Jarrosson, quelques éléments d’information vous seront donnés concernant la pratique de l’arbitrage au sein du groupe Total. Tout d’abord, on trouve fréquemment dans les contrats commerciaux conclus par des entités du groupe Total des conventions d’arbitrage notamment dans les contrats pétroliers, dans les contrats d’acquisition ou de cession ou encore dans les contrats maritimes, etc. L’arbitrage institutionnel est généralement privilégié; le choix se porte plutôt sur les principales institutions internationales et, plus rarement, sur des institutions régionales. A ce titre, la multiplication démesurée des institutions arbitrales, certaines à vocations internationales, d’autres régionales, certaines généralistes, d’autres sectorielles, est source de complication pour l’entreprise. Il n’est pas toujours aisé de s’y retrouver dans cette offre pléthorique. Pour sortir de cet état de confusion, il serait utile de faire un travail de recensement mais aussi d’évaluation de ces différents centres sur la base de critères objectifs à définir entre les acteurs de référence pour aider les entreprises à y voir plus clair et apprécier s’ils disposent tous de l’autorité morale, intellectuelle et économique que doit posséder tout centre qui prétend vouloir administrer des arbitrages.

L’arbitrage ad hoc conserve une certaine vigueur à travers le choix des règles d’arbitrage de la CNUDCI. Ensuite, l’arbitrage représente 6% des litiges recensés par le groupe Total dont l’enjeu financier dépasse 1 million d’euros ; les autres contentieux relèvent de la compétence des juridictions étatiques ou sont soumis à la médiation. Si ce pourcentage est faible, il est faut reconnaître que les contentieux soumis à l’arbitrage emportent des enjeux financiers ou patrimoniaux importants. Enfin, la convention d’arbitrage s’insère traditionnellement dans un processus contractuel plus large de résolution des litiges. Ainsi, le lancement d’une procédure d’arbitrage est généralement le constat de l’échec des phases de négociations amiables ou de médiation stipulées entre les parties. C’est un lieu commun de dire que l’arbitrage international a connu un fort développement durant ces trente dernières années au point de s’imposer comme un mode usuel de règlement des différends internationaux. Les raisons de ce succès sont connues de vous tous. Il n’y a pas lieu d’y revenir, sauf peut-être pour souligner que : - d’une part, l’arbitrage est la méthode la mieux acceptée pour le règlement des différends commerciaux internationaux dès lors que les parties ne souhaitent pas soumettre un éventuel litige aux juridictions nationales de l’une d’entre elles. Un arbitrage vaut souvent mieux qu’un procès en terre inconnue ! - d’autre part, seul l’arbitrage ouvre la possibilité aux entreprises de faire trancher leurs litiges selon une procédure adaptée aux particularismes juridiques, culturels et économiques en jeu ce, par des juges prenant naturellement en compte les usages du commerce. Si l’on en croit les statistiques récentes de quelques centres d’arbitrages tels la CCI, la LCIA, la SCC, pour ne citer que ceux-là, il semble que ce succès perdure. La CCI, par exemple, a enregistré 796 demandes d’arbitrage nouvelles en 2011. Ce chiffre est légèrement supérieur à celui de l’année précédente. Dans le même temps, ce sont 508 sentences qui ont été rendues, ce qui constitue, à ce jour, un record pour cette institution. Les autres grandes institutions internationales connaissent de semblables progressions. L’arbitrage donc se porte bien ! Et cela devrait encore continuer faute d’alternative crédible offerte aux opérateurs du commerce international. D’ailleurs, les sondages récents

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Vie du droit faits auprès des Directions Juridique d’entreprise sont clairement fixés en ce sens. Pourtant, on peut légitimement s’interroger sur les raisons de ce succès. Aujourd’hui près de la moitié des entreprises qui ont recours à l’arbitrage se déclare déçue par la manière dont les arbitres se sont acquittés de leur mission. Et depuis près d’une décennie se sont multipliés les articles, colloques ou rapports dénonçant ce que certains ont qualifié de « dérives arbitrales ». Les critiques portent principalement sur les questions de coûts et de délais de la procédure d’arbitrage. Ces deux sujets sont, et c’est un fait incontestable, au cœur des attentes de l’entreprise. D’ailleurs, en cas de litige, les premières questions qu’un opérationnel va poser au juriste d’entreprise sont les suivantes : Combien de temps va durer la procédure ? Combien va-t-elle coûter ? Mais limiter les attentes de l’entreprise en matière d’arbitrage à des considérations de coûts et de délais serait réducteur. Le juriste d’entreprise que je suis attend de l’arbitrage qu’il soit un mode équitable, efficace, flexible, discret de résolution des litiges dont le dénouement doit intervenir dans un délai compatible avec le rythme de vie de l’entreprise et pour un coût économiquement raisonnable. Aussi, je vous propose de passer en revue un certain nombre de ces attentes que l’on peut articuler autour de deux thèmes : Efficacité (I), d’une part, la confiance et la transparence (II), d’autre part.

I. L’efficacité du processus arbitral Deux points seront ici abordés : - D’abord, les délais et les coûts(a) ; - Ensuite, la flexibilité de la procédure (b).

a. Les délais et les coûts Il convient de se féliciter de la reconnaissance par le droit français de l’arbitrage du principe de célérité, expressément consacré par le récent Décret du 13 janvier 2011, qui s’impose tant aux arbitres qu’aux parties. Il faut également saluer les initiatives qui ont été prises par un certain nombre de centres d’arbitrage, dont l’AFA avec son nouveau règlement, pour permettre aux procédures conduites sous leur égide de gagner en efficacité et en proposant même parfois aux arbitres des techniques de Case Management. L’heure du bilan viendra et c’est à ce momentlà que l’impact réel et effectif de ces mesures pourra être évalué et débattu. A ce titre, les entreprises ont un devoir de vigie. Cette exigence d’efficience ne repose d’ailleurs pas que sur les seuls arbitres et institutions d’arbitrage, mais également sur les avocats et les entreprises qui doivent aussi prendre leur part de responsabilité et adapter leur pratique de gestion des litiges en conséquence. La maîtrise des délais et coût doit être une préoccupation permanente de tous. Pour autant, ce serait une erreur de croire que ce qui a été fait est suffisant et qu’il convient de s’en satisfaire.

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Dans la continuité de ce qui a déjà été mis en œuvre, les centres d’arbitrage pourraient développer plus encore, des sessions de formations en matière de Case Management et de sensibilisation des arbitres aux techniques de gestion de la procédure. Car n’est pas un Case Manager qui veut ! En pratique, il n’est pas rare de constater que certains arbitres ne sont pas suffisamment armés et pas suffisamment formés pour gérer efficacement une procédure de bout en bout et sous tous ses aspects : juridique, matériel, organisationnel et humain. Si cela est inné pour certains, ce n’est pas le cas pour tous ! Mais il ne faudrait pas que ces exigences d’efficacité et de célérité conduisent à des excès inverse à ceux dénoncés. Il ne faut pas confondre célérité et précipitation et faire de l’arbitrage une justice expéditive. La mission première de l’arbitre est de rendre une sentence arbitrale, méticuleusement motivée à l’issue d’une procédure conduite de manière équitable et juste. C’est l’essence même de sa fonction juridictionnelle. Le devoir – que l’on peut qualifier d’administratif - qui incombe à l’arbitre d’agir avec célérité doit le conduire à être attentif aux délais de la procédure mais cela ne doit pas se faire au détriment du professionnalisme qui est attendu de lui, ni de la qualité et de la rigueur de la décision qui sera rendue. Il y a un équilibre à trouver entre célérité et qualité. Dans la recherche de cet équilibre, l’arbitre se doit de garder à l’esprit que l’é coute est, en matière d’arbitrage, une attente primordiale des entreprises car c’est véritablement « un plus » qu’offre l’arbitrage par rapport à la justice étatique où les débats oraux sont généralement réduits à leur plus simple expression, où les témoignages sont quasi-inexistants et où les parties n’ont pas toujours le sentiment d’avoir eu l’occasion d’exposer pleinement leurs positions. Cette exigence d’é coute se traduit aussi par le souci de l’entreprise de faire comprendre à l’arbitre ses contraintes opérationnelles, commerciales ou économiques, ce à quoi le juge étatique n’est pas toujours sensible, centré qu’il est sur l’application objective de la règle de droit et ne mesurant pas toujours bien de la réalité de la vie des affaires. De même, l’arbitre gagnerait à rappeler aux parties, au tout début de la procédure, l’importance qu’il entend donner au devoir de coopération loyale des parties à l’arbitrage. Il s’agirait en quelque sorte de moraliser la procédure et de rappeler à l’attention de tous les conséquences que pourraient avoir toute tentative de l’une ou l’autre des parties de présenter des demandes dilatoires pour faire dériver la procédure. L’arbitre a ici une arme pour sanctionner ces dérives, avec la répartition des frais dans la sentence finale. Un effort supplémentaire pourrait également être conduit pour assurer une meilleure prévisibilité des coûts à exposer par l’entreprise en cours de procédure : - les avocats devraient, de manière plus systématique, proposer des prévisionnels d’honoraires pour tout ou partie de la procédure (peut-être les entreprises devraient-elles aussi le demander plus fréquemment), - les arbitres et les centres d’arbitrage devraient aussi donner à leurs utilisateurs une meilleure visibilité sur les coûts à venir. Il serait bon que les parties soient très tôt informées du coût

prévisionnel des frais et honoraires d’arbitrage en leur donnant soit des indications sur l’indice minimum ou maximum du barème de frais et honoraires applicable ou, lorsque le montant des honoraires est fonction du temps passé, un estimatif du temps que l’arbitre estime devoir consacrer à l’instruction du litige compte tenu de ses caractéristiques propres. Cela est difficile à mettre en œuvre en pratique, car le temps nécessaire à l’instruction d’un dossier dépend beaucoup du comportement des parties, du volume des écritures, de leur nombre, de l’importance du nombre des pièces communiquées, etc. ; mais la difficulté n’est pas une raison suffisante pour se dérober devant l’obstacle. Outre l’intérêt purement comptable et budgétaire pour l’entreprise, ces données financières, recouvrent deux avantages supplémentaires : - d’une part, du point de vue de l’efficience de la procédure, ce travail oblige à une implication rapide de l’arbitre dans la prise de connaissance des éléments de la procédure, - d’autre part, en termes d’opportunité, cela permettrait aux entreprises de faire, au plus tôt, une évaluation la plus complète possible du litige dans toutes ses dimensions : factuelles, juridiques, temporelles, financières dont la mise en perspective avec l’enjeu réel du litige et la nécessité de préserver une relation commerciale établie peut conduire à un règlement amiable. - la rationalisation des coûts passe enfin par une plus grande implication de l’entreprise dans la gestion de ses litiges. Cela impose donc une autre façon de travailler pour le juriste d’entreprise. Pour les dossiers les plus complexes, la procédure doit être gérée de la même manière que l’entreprise gère ses projets industriels, c'està-dire en « mode projet ». De la sorte, le juriste d’entreprise vient prendre une part plus active dans le suivi, la coordination et l’animation de la procédure d’arbitrage et valider l’ensemble des actions à prendre et fixer les objectifs à atteindre. Le contentieux n'étant que la poursuite de la stratégie d'entreprise par d'autres moyens, le juriste d’entreprise doit en être le garant pendant toute la durée de la procédure.

b. La flexibilité : l’ouverture vers des solutions alternatives L’une des caractéristiques de l’arbitrage est sa flexibilité. Ainsi, l’arbitrage plus que toute autre procédure, permet d’ouvrir des passerelles vers des solutions négociées. L’arbitre ne peut plus se contenter aujourd’hui de sa casquette de « juge » ; il doit aussi savoir se coiffer de celle d’un « facilitateur ». Plus qu’aux parties (qui pour des raisons tactique ne le feront pas toujours d’elles-mêmes par crainte de voir une telle proposition perçue comme un signe de faiblesse), c’est à l’arbitre de savoir proposer, au moment opportun et lorsque que les circonstances s’y prêtent, une tentative de conciliation ou de médiation en cours d’arbitrage. Cette proposition peut intervenir à tout stade de la procédure. A cet égard, le prononcé de sentences partielles, sur certains points clés d’un litige, peut constituer des évènements déclencheurs pour ouvrir de telles passerelles. Dans un contexte de « judiciarisation » de l’arbitrage un recours plus fréquent à ce type de passerelles rend à l’arbitrage une part de sa

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Vie du droit flexibilité perdue. Cette attente s’inscrit dans la recherche par le groupe Total, sauf en cas de contentieux de principe, de solutions plus orientées sur la préservation de ses intérêts commerciaux. L’arbitrage n’est pas une fin en soi pour l’entreprise. C’est un moyen d’atteindre un objectif : trouver une solution à litige donné. Si l’arbitre peut prendre l’initiative de proposer aux parties, dans les dossiers qui le justifient, des ouvertures vers une possible conciliation, il ne doit pas pour autant porter ces deux casquettes en même temps. Il n’y a rien de pire que l’arbitre qui pousse à tout prix les parties à transiger lorsque celles-ci ne le souhaitent pas. Cela peut conduire à des dérives, comme par exemple des sentences partielles qui statueraient sur le principe de la responsabilité - mais pas sur le quantum - en étant davantage inspirée par la volonté d’inciter les parties à transiger, en les renvoyant dos à dos, là où juridiquement une solution plus rigoureuse s’imposerait en termes de partage de responsabilité. Il doit donc y avoir dans l’arbitrage un temps pour envisager la solution transactionnelle, au besoin à l’initiative de l’arbitre, mais aussi un temps pour dire le droit et juger avec toute la rigueur qu’impose la mission de l’arbitre. C’est d’autant plus important que parfois, c’est parce que l’arbitre sera allé jusqu’au bout du processus arbitral, et aura rendu une sentence juste et rigoureuse en droit, que les parties prendront mieux conscience des droits et obligations que le contrat litigieux faisait peser sur elles. Cela sera susceptible d’aider les parties à régler leur conflit, autrement dit à dé cristalliser les positions irrationnelles de chaque partie qui sont souvent à l’origine de ce conflit.

II. Confiance et transparence Face à certains errements de la pratique arbitrale, l’ensemble des acteurs de référence doivent s’interroger sur les nouveaux défis que doit relever l’arbitrage pour s’assurer de la confiance des entreprises et de leur adhésion à ce mode de règlement des litiges. C’est la légitimité même de l’arbitrage qui est alors en question. Et les attentes de l’entreprise sont fortes en la matière. Faute de temps, je n’aborderai ici que deux points. - D’une part : la confiance dans l’arbitre (a), - D’autre part, la confiance dans les décisions rendues en cours de procédure arbitrale (b).

a. La confiance dans l’arbitre Le choix de l’arbitre est, pour l’entreprise, un moment clé du processus arbitral. Et le groupe Total y accorde une attention particulière. Comme on a coutume de le dire « Tant vaut l’arbitre, tant vaut l’arbitrage ». Au-delà des qualités juridiques, scientifiques, techniques, linguistiques normalement attendues des arbitres, les entreprises accordent une grande importance à leur professionnalisme, leur expérience, leur disponibilité, mais aussi leur part d’humanité, et last but not least à leur indépendance et leur impartialité

La mission de l’arbitre est noble. L’arbitre est un juge. En tant que tel, il doit, aux yeux des justiciables, être irréprochable. Or, on a assisté ces dernières années à un développement du contentieux de la récusation et de l’annulation. C’est le signe d’une crise de confiance. Quant à la jurisprudence, on le voit, elle se montre de plus en sévère et exigeante pour apprécier l’indépendance et l’impartialité des arbitres. Exigeantes, les entreprises le sont aussi en ce domaine. L’enjeu est d’importance puisque le manquement de l’arbitre à ces qualités essentielles peut conduire à l’annulation pure et simple de la sentence et partant, mettre à néant plusieurs années de procédure, sans compter l’argent et le temps perdus pour l’entreprise. L’indépendance et l’impartialité de l’arbitre s’apprécient au travers de l’obligation de révélation à laquelle il est astreint tout au long de la procédure. La révélation est l’instrument de vérification dont disposent les parties pour mesurer, jauger l’indépendance de l’arbitre. La révélation est la clef de la confiance des parties envers l’arbitre, élément essentiel au processus arbitral. C’est justement l’honnêteté de l’arbitre, sa capacité à jouer la transparence et sa sérénité à révéler aux parties tout élément de nature à lever un doute légitime dans l’esprit des parties sur son indépendance, qui va contribuer à lui permettre de gagner leur confiance. Or c’est bien souvent d’une révélation imparfaite, incomplète ou « perlée », pour emprunter l’expression du Professeur Thomas Clay, que va naître le doute dans l’esprit d’une partie. Dans les faits, l’abstention de révéler crée souvent une présomption (irréfragable) de doute. En ce domaine l’attente des entreprises est simple : Il faut tout révéler des liens que l’arbitre peut entretenir avec l’une des parties, l’un des conseils à la procédure et/ou avec l’un des co-arbitres. Exerçant une fonction juridictionnelle, l’arbitre doit être indépendant à l’égard de chacune des parties mais aussi à l’égard des autres membres du tribunal arbitral et cela, pour conserver sa liberté de jugement. L’excès de prudence est un péché véniel sans conséquence. L’inverse, lui, ne l’est pas. Les centres d’arbitrage ont aussi un rôle à jouer en adoptant, par exemple, des chartes éthiques ou guides de bonne conduite s’imposant aux arbitres siégeant sous leur égide et en proposant aux arbitres des outils pour leur permettre d’identifier plus aisément les situations de conflits d’intérêts potentiels. Ils doivent également adapter le fonctionnement de leurs organes internes à cette exigence de transparence. Quant aux entreprises, elles peuvent aussi apporter leur pierre à l’é difice en créant des bases de données internes recensant le nom des arbitres auxquels elles ont eu recours au fil du temps afin de prévenir le risque de désignations répétitives. De même, l’intervention sur le marché de l’arbitrage de tiers financeurs doit conduire les entreprises qui ont recours à ce type de financement à en dévoiler l’existence afin de permettre à l’arbitre de faire une révélation aussi exacte que possible car l’on ne peut a priori exclure le cas de conflits d’intérêts entre un arbitre et le tiers financeur. Pour autant, il ne faut pas inverser les rôles. C’est

à l’arbitre qu’il incombe de révéler et non pas à l’entreprise d’investiguer. Enfin, les entreprises sont à la recherche d’une certaine harmonie dans la manière dont les différents centres d’arbitrage traitent les questions d’indépendance et d’impartialité lorsqu’elles sont saisies de recours en récusation. Il est difficilement compréhensible pour une entreprise de voir une même situation appréciée de manière différente selon que le centre d’arbitrage se situe à Paris ou dans le nord de l’Europe. De telles contradictions nuisent à la prévisibilité attendue des entreprises. Un travail de concertation et d’uniformisation entre les centres d’arbitrage serait louable (tout en respectant les particularités de chacun) ; et il me semble que la Fédération des Centres d’Arbitrage (FCA), dont l’existence doit beaucoup à l’AFA et à Geneviève Augendre en particulier, a assurément un rôle moteur à jouer dans la réalisation de cette tâche et qu’elle gagnerait à y prendre toute la part qui lui revient.

b. L’exigence de transparence face à la motivation des sentences arbitrales et des décisions de récusation d’arbitre Les entreprises expriment le souhait d’un effort dans la motivation de sentences arbitrales. Si l’on voulait être un peu piquant, on pourrait dire qu’en pratique la motivation des sentences est trop souvent encore inversement proportionnelle à la longueur de la sentence ! Or la motivation est la base de l’acceptation de la sentence par les parties, gagnante comme perdante. Une décision bien motivée, dont les parties comprennent la rationalité, est le gage d’une exécution spontanée et participe, en conséquence, à l’efficacité même du processus arbitral. Par ailleurs, la question de la motivation des décisions de récusation se pose aujourd’hui avec acuité. A ce jour, seule la London Court of International Arbitration (LCIA), parmi les grandes institutions internationales, motive les décisions de récusation. Une telle situation n’est plus acceptable pour les entreprises utilisatrices de l’arbitrage qui ont besoin de comprendre « le pourquoi du comment » de la décision rendue. L’absence de motivation est bien souvent source d’incompréhension, de frustration et partant, de rejet. On peut certes convenir que les décisions en matière de récusation sont parfois difficiles à motiver en ce qu’elles portent sur des questions de personnes, mais si le juge d’appui se prête à l’exercice on ne voit pas bien pourquoi les centres d’arbitrage ne trouveraient pas le courage de le faire aussi. A l’heure où l’arbitrage est devenu un mode de règlement des litiges à la fois de plus en plus courant et de plus en plus technique et procédurier, il n’est pas inutile de lui redonner une certaine forme d’humanisme. Autrement dit, il s’agit de replacer l’humain au cœur du processus arbitral. Cela passe par une meilleure perception par les arbitres des attentes des parties sur le fond de leur litige, mais aussi par davantage de rigueur, de transparence, voire de moralité, de la part de celui auquel les parties accordent leur confiance et confient cette difficile mission de juger.

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Vie du droit Notes : 1 - Le style oral de l’intervention a été conservé. 2 - J. Paulsson, E. Kleiman, Arbitrage International : La construction de sa légitimité, En Temps Réel, cahier n°47, septembre 2011. 3 - Voir par exemple : http ://www.arbitrationonline.org/research/ArbitrationInstitStat/index.html ; http://www.lcia.org/LCIA/Casework_Report.aspx ; http://www.sccinstitute.com/hem3/statistik-2.aspx. 4 - A. Job, J. Rosell, Rapport statistique 2011 de la Chambre de Commerce Internationale (ICC) en matière d’arbitrage ; lemondedurdroit.fr, 28 juin 2012 ; A. Mourre, L’arbitrage ICC consolide en 2011 sa place de première institution mondiale d’arbitrage, Echanges Internationaux, n°93, 2012, p. 11. Voir également : http://www.iccwbo.org/Products-and-Services/Arbitration-andADR/Arbitration/Introduction-to-ICC-Arbitration/Statistics/. 5 - Voir International Arbitration : Corporate attitudes and practices 2006 : Queen Mary School of Arbitration - PricewaterhouseCoopers, disponible sur http://www. arbitrationonline.org 6 Voir 2010 International Arbitration Survey – Choices in International Arbitration : Queen Mary School of Arbitration, disponible sur http://www. Arbitrationonline.org. 7 - A. Clarke, International Arbitration: Current Corporate Concerns, Bulletin de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI, 20/2, 2009 ; J-C Najar, Inside Out: A User's Perspective on Challenges in International Arbitration, Arbitration International, Volume 25 (4), p. 515. M. Mc Ilwrath and R. Schroeder, The View from an International Arbitration Customer: In Dire Need of Early Resolution, Arbitration - The Journal of the Chartered Institute of Arbitrators (2008) 74 ; P. Hobeck, V. Mahnken and M. Koebke, Time for Woolf Reforms in International Construction Arbitration, (2008) Int. A.L.R., Issue 2, p. 84. Pour d’autres dérives et abus affectant l’arbitrage (mais qui ne relèvent pas du champ de la présente étude) : M. de Boisséson, L’arbitrage et la fraude (à propos de l’arrêt Fougerolle, rendu par la Cour de cassation le 25 mai 1992), Rev.arb., 1993 p. 3 ; B. Hanotiau, Misdeeds, wrongful conduct and illegality in arbitral proceedings, ICCA Congress Series, 2003, n°11; J.S. Boedels et V. Ferré, En finir avec les abus de l'arbitrage international, Les Echos, 24 septembre 2012 ; E. Loquin, L'arbitrage face à la corruption et à la fraude, RTD com., 1994, p. 703. 8 - Selon des statistiques internes au groupe Total qui remontent aux années 2006/2007, la durée moyenne des arbitrages dont il a eu à connaître se situe entre 3 et 5 ans ; Quant au coût moyen de ces procédures, il se situe entre 3 et 5 millions d’euros. Des données plus récentes mettent en évidence une hausse sensible des délais et des coûts. Pour une étude sur les coûts en matière d’arbitrage, CIArb Costs of International Arbitration Survey 2011, http://www.ciarb.org/conferences/costs/2011/09/28/CIArb%20costs%20o f%20International%20Arbitration%20Survey%202011.pdf.

9 - Article 1464 al. 3 du Code de procédure civile : « A moins que les parties n'en soient convenues autrement, le tribunal arbitral détermine la procédure arbitrale sans être tenu de suivre les règles établies pour les tribunaux étatiques ». Toutefois, sont toujours applicables les principes directeurs du procès énoncés aux articles 4 à 10, au premier alinéa de l'article 11, aux deuxième et troisième alinéas de l'article 12 et aux articles 13 à 21,23 et 23-1. « Les parties et les arbitres agissent avec célérité et loyauté dans la conduite de la procédure. Sous réserve des obligations légales et à moins que les parties n'en disposent autrement, la procédure arbitrale est soumise au principe de confidentialité. ». Pour une présentation de la réforme du droit français de l’arbitrage, P. Duprey, Présentation du nouveau décret sur l'arbitrage in : L’arbitrage : principes et pratiques, Les Cahiers du Conseil National des Barreaux, 2011, p. 14. Th. Clay (Dir), Le nouveau droit français de l'arbitrage, Lextenso, 2011 ; E. Gaillard, P. de Lapasse, Le nouveau droit français de l'arbitrage interne et international, D. 2011, Chron. 175. 10 - Voir, par ex. : Techniques pour maîtriser le temps et les coûts dans l'arbitrage, Bulletin de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI Vol. 18 N° 1, p. 23. Christine Lecuyer-Thieffry, Le règlement d'arbitrage 2012 de la CCI : efficience et transparence accrue, Gazette du Palais, 5-7 février 2012, p. 12. 11 - http://www.afa-arbitrage.com, Pour un commentaire du nouveau règlement d’arbitrage de l’AFA, D. Kühner, The new AFA arbitration rules, Journal of International Arbitration, 28 (5), 519 - 534, 2011. 12 - Lors du prononcé d’une sentence partielle ou intérimaire, l’arbitre pourrait décider de statuer sur la répartition des coûts liés à cette phase de la procédure. M. E. Schneider, Lean Arbitration: Cost Control and Efficiency Through Progressive Identification of Issues and Separate Pricing of Arbitration Services, Arbitration International, Vol. 10, No. 2, 1994. Dans cet article, l’auteur suggère que la répartition des frais et honoraires soit faite demande par demande afin de responsabiliser les parties afin de limiter le risque de demandes frivoles. 13 - Pour un exemple propre au groupe Total : Après deux années de pourparlers infructueux sur l’interprétation des stipulations d’un contrat d’opérateur industriel, un arbitrage est engagé sous l’égide de l’AFA. A deux mois, des plaidoiries sur le fond, les parties se sont accordées pour soumettre leur différend à la médiation. Un médiateur est rapidement désigné. En une semaine, un procès-verbal de médiation a été signé entre les parties qui c’est par la suite concrétisée par la formalisation d’un accord transactionnel. 14 - P. Tercier, La légitimité de l’arbitrage, Rev. arb. 2011, p. 653. 15 - P. Lalive, Le choix de l’arbitre, in : Mélanges Jacques Robert, « libertés », Montchrestien, Paris 1998, pp. 353-363 ; E. Robine, Le choix des arbitres, Rev. arb., 1990, n°2, pp. 315-336. Selon lui, les parties souhaitent avoir la plus grande liberté dans le choix des arbitres. 16 - Is Arbitration Only As Good as the Arbitrator?, ICC Publication No. 714, 2011. 17 - M. Henry, Le devoir d'indépendance de l'arbitre, LGDJ 2001 ; J-D Bredin, La révélation, Remarques sur l'indépendance de l'arbitre en

droit interne français, in : Etudes de procédure et d'arbitrage en l'honneur de Jean-François Poudret, p. 349 (Faculté de droit de l'Université de Lausanne, 1999) Independence de l'arbitre, Bulletin de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI, Supplément Spécial, ICC Publication No. 690, 2008. M. Danis, C. Dupeyron, Arbitrage et impartialité de l'arbitre, lemondedudroit.fr, 18 septembre 2012. Th. Clay, L'indépendance et l'impartialité de l'arbitre et les règles du procès équitable, in J. van Compernolle et G. Tarzia (sous la dir. de) : L’impartialité du juge et de l’arbitre. Étude de droit comparé, Bruylant, 2006, p. 199. 18 - S. Lazareff, De l’immoralité présumée de l’arbitre, Les Cahiers de l’arbitrage, Vol. V, p. 12. 19 - Th. Clay, La disparition de l’obligation d’indépendance au profit de l’obligation de révélation, note sous Paris 12 février 2009, Rev. arb., 2009, p. 186. 20 - CA Paris, 12 février 2009, n°07/22164 : « l’arbitre doit révéler aux parties toute circonstance de nature à affecter son jugement et à provoquer dans l’esprit des parties un doute raisonnable sur ces qualités d’impartialité et d’indépendance qui sont l’essence même de sa fonction arbitrale ». Voir également, CA Paris, 10 mars 2011, no 09/28540, EURL Tesco – CA Paris, 10 mars 2011, no 09/28826, Nykcool AB – CA Paris 1er juillet 2011, no 10/10402, SA Sobrior – Cass. 1ère civ., 29 juin 2011, no 09-17346, Papillon Group Corporation. 21 - Th. Clay, L’application perlée du règlement d’arbitrage pour la révélation des liens entre arbitre et conseil, note sous Reims 2 novembre 2011, Paris Journal of International Arbitration 2011, p. 1109. 22 - B. Moreau, L’Ethique dans l’arbitrage : l’exemple de l’Association Française d’Arbitrage : http://www.afa-arbitrage.com/IMG/pdf/11-1209_ L_ETHIQUE_DE_L_ARBITRAGE_9_DECEMBRE_2011.pdf 23 - Voir par exemple, 1re Civ., 20 octobre 2010, Bull. 2010, I, no 204, pourvoi no 09-68.131 ; 1re Civ., 20 octobre 2010, Bull. 2010, I, no 204, pourvoi no 09-68-997. 24 - La Fédération des Centres d’Arbitrage (FCA) a été constituée le 5 avril 2012, entre l’AFA – Association Française d’Arbitrage, le CMAP – Centre de médiation et d’arbitrage de Paris, la CAMP – Chambre arbitrale maritime de Paris, le CCFA – Centre de médiation et d’arbitrage de la Chambre de commerce franco-arabe, la Chambre régionale d’arbitrage d’Aix-en-Provence, le Centre d’arbitrage et de médiation de Bretagne de Rennes, la CAREN – Cour d’arbitrage et Centre de médiation de l’Europe du Nord de Lille, la CEA – Cour Européenne d’Arbitrage, ayant son siège à Strasbourg et Valencia, la Chambre de conciliation et d’arbitrage de Toulouse Midi-Pyrénées, l’IEMA – Institut euroméditerranéen d’arbitrage de Nice, l’ABA – Association bretonne d’arbitrage de Rennes, le CEFAREA – Centre français d’arbitrage de réassurance et assurance de Paris, l’IEAM – Institut d’expertise, d’arbitrage et de médiation de Paris. 25 - Arbitration International, vol. 27, no. 3, 2011. 2012-800

Code de procédure pénale 2013

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25ème édition - LexisNexis

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jour au 1er Avril 2012, des dispositions législatives et réglementaires, des années 2011 et 2012 : du décret du 12 octobre 2011, à celui du 16 janvier 2012, qui font suite à ceux des 25 mars, 5 et 13 avril, 4 et 7 mai 2012, cette 25ème édition de 2297 pages(1) est chaque année plus volumineux. Il est l’instrument de travail irremplaçable des praticiens en particulier Magistrats, Avocats et Universitaires. Comme les précédentes éditions - il est divisé en quatre parties : L’accès à cette documentation d’une telle richesse est facilitée par : - Une table des matières de quarante-deux pages, - Une table des textes modifiés de cinquantesept pages, - Une table de ceux non modifiés depuis 1903 de onze pages, et enfin d’un index de vingt-neuf pages.

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Gilbert Azibert

Ces tables sont le fil d’Ariane d’une législation délirante de ces dernières années - Ce travail de mise à jour, de la part de l’auteur force notre admiration(2). A ce code est joint celui de sécurité intérieur de cent vingt-deux pages complété également par un index exhaustif. A. Coriolis Notes : 1. En 2009 - 1169 pages 2. Rappelons que Monsieur Gilbert Azibert aujourd’hui 1er Avocat Général de la Cour de Cassation, fût Secrétaire Générales du Ministère de la Justice, Procureur Général de la Cour d’Appel de Bordeaux et Président de L’E.N.M.

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Vie du chiffre

Institut Français des Experts-Comptables et des Commissaires aux comptes - IFEC

Photo © Inès Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Colloque au Cercle de l’Union Interalliée - Paris, 8 novembre 2012

Françoise Savés

Un nouveau modèle de croissance pour les entreprises est-il possible en France ? Françoise Savés

’est au pied du mur qu’on voit le mur ! La France dévisse, 15ème sur les 17 pays de la zone euro, bien loin de l’Italie, de la Suède ou de l’Allemagne… Le rapport Gallois dénonce et propose, mais

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combien de rapports depuis 10 ans sont demeurés sans suite ! L’essentiel de celui-ci est peut-être dans l’introduction : Un Pacte de Confiance. « Toute nouvelle disposition législative ou réglementaire significative, toute nouvelle politique lancée par l’État devrait être accompagnée d’un document précisant son impact sur la compétitivité industrielle et les moyens d’en réduire les effets négatifs éventuels ». Mesurer les impacts de nos décisions sur l’ensemble des parties prenantes, et surtout pas uniquement à court terme, est le fondement d’une démarche de Responsabilité Sociétale des Organisations (RSO) et des Entreprises (RES). Piloter la stratégie et les projets en prenant en compte les impacts économiques, sociaux et environnementaux, suppose de mettre en œuvre rapidement des outils opérationnels et de faire en sorte que l’ensemble des parties prenantes soient mobilisées autour de ce que le rapport Gallois appelle dans sa 6ème partie, le nouveau Pacte Social. Depuis deux ans l’IFEC (Institut Français des Experts-comptables et des Commissaires aux comptes) s’est engagé dans une démarche en faveur de l’utilité d’intégrer la RSE dans la gestion des entreprises. Tordre le cou à des idées reçues, comme : « c’est une opération de marketing, un simple slogan, une bonne action qui plait aux médias », ou au contraire : « c’est une contrainte supplémentaire, un concept inadapté quand la vision est bloquée aux fins de mois difficiles », voilà l’objet des colloques qu’organise l’IFEC en mettant autour

de la table des dirigeants, des enseignants, des professionnels, des assureurs, des banquiers, des représentants de l’État… L’IFEC a mis au point, à l’usage de ses adhérents, des guides et des formations pour accompagner les entreprises dans la mesure des actifs immatériels et dans la mise en place d’indicateurs de données extra-financières au sein des tableaux de bord et dans l’évaluation d’entreprise. Les experts-comptables peuvent également intégrer la RSE dans la politique d’investissement et d’innovation des entreprises (ISR). Fondamentalement, les entreprises ne peuvent plus ignorer la démarche RSE car ce sont leurs clients consommateurs et les salariés, leurs forces vives, qui la réclament. Internet aujourd’hui fait et défait les marques en quelques secondes. Certes le facteur prix reste déterminant mais la compétitivité des entreprises est aussi dans le hors-coût, la qualité, la pertinence de la gamme. La réputation n’est plus seulement un actif, c’est un enjeu clé de la gestion du risque. Alors, c’est peut-être cela que le rapport Gallois appelle le nouveau Pacte Social où chacun « s’y retrouve ». La confiance est un terrain de jeu habituel pour la Profession Comptable qui entretient ce lien avec les entreprises comme une seconde nature. Nous sommes favorables au développement de ces pratiques prometteuses et fédératrices et prêts à accompagner nos clients dans cette voie. 2012-802

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Annonces légales

Décoration

Nathalie Boucher, Croix d’Honneur de la Bundeswehr Préfecture des Yvelines, Versailles - 18 novembre 2012

Photo © Inès Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Susanne Wasum-Rainer, Nathalie Boucher et Michel Jau

l’occasion de la journée du « Deuil allemand » des gerbes de fleurs ont été déposées hier dans la partie allemande du cimetière des Gonards puis au Monument du Souvenir Français par le Préfet des Yvelines, Monsieur le Maire de Versailles François de Mazières et Madame l’Ambassadeur d’Allemagne en France Susanne Wasum-Rainer accompagnée de délégations étrangères (Canada, Australie, Royaume-Uni et Etats-Unis). Après ces émouvants recueillements, Michel Jau accueillait dans les salons de la Préfecture ses invités de marque pour une autre cérémonie au cours de

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laquelle Susanne Wasum-Rainer a décoré Madame le Commandant Nathalie Boucher (Officier Supérieur Adjoint) de la Croix d’Honneur (niveau argent) de la Bundeswehr (armée allemande). Nous présentons nos chaleureuses félicitations à cette femme, entrée en 1988 à l’école des sous-officiers de Saint Maixent (Deux Sèvres) qui fut promue lieutenant en 1991 « sur titres » en raison de ses diplômes (licence d’allemand, certificat d’allemand délivré par l’Institut Goethe, …). C’est en 2011 que Nathalie Boucher est nommée Chef du Cabinet du Général de Division Pascal Vandenbussche,

deux années après avoir été promue au grade de Commandant. Nous saluons les mérites de la récipiendaire qui ont été légitimement reconnus tant pour son travail qu’elle réalise avec passion que pour la qualité des liens qu’elle entretient avec l’Ecole du Matériel d’Aix-la-Chapelle mais aussi pour la façon exemplaire dont elle représente la France en Allemagne notamment au 4ème Bataillon de la Logistique à Roding ou au 210ème Régiment du Matériel à Volkach.

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