Edition du Lundi 12 décembre 2011

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LES ANNONCES DE LA SEINE Lundi 12 décembre 2011 - Numéro 70 - 1,15 Euro - 92e année

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Jean-Pierre Buyle, Viviane Reding, Fethi Terbil, Adil El Malki, Bertrand Favreau et Yves Oschinsky

Prix Ludovic Trarieux 2011 XVIème Prix International des Droits de l’Homme Bruxelles - 1er décembre 2011 DROITS DE L’HOMME Prix International des Droits de l’Homme Ludovic Trarieux 2011

2 4 5 8 AGENDA ......................................................................................5 VIE DU CHIFFRE

Fraternité et confraternité par Jean-Pierre Buyle ................................ Universalité des Droits de l’Homme par Yves Oschinsky .................... « Naisse l’été … » par Bertrand Favreau............................................. Reconnaissance par Viviane Reding.....................................................

Autorité des Marchés Financiers Optimisme et détermination par Jean-Pierre Jouyet...........................

DÉCORATION

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Denise René, Officier de la Légion d’Honneur .................11

JURISPRUDENCE

Loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles Conseil constitutionnel - 8 décembre 2011 - décision n°2011-641 DC ...

VIE DU DROIT Confédération Nationale des Avocats Internet, réseaux sociaux et communication de l’avocat ................

Société de Législation Comparée

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24 ANNONCES LEGALES ...................................................15 ADJUDICATIONS .....................................19, 21 et 23

Journée d’étude « Théorie et pratiques du référendum » ...............

a cérémonie de remise du Prix International des Droits de l'Homme « Ludovic Trarieux » 2011 s’est déroulée le 1er décembre dernier dans le prestigieux cadre de la salle des audiences solennelles de la Cour de cassation à Bruxelles. Créée en 1984 et décernée pour la première fois à Nelson Mandela qui était alors incarcéré depuis 23 ans en Afrique du Sud, cette récompense est « l’hommage des avocats à un avocat » qui, « aura illustré par son œuvre, son activité ou ses souffrances, la défense du respect des Droits de l'Homme, des droits de la défense, la suprématie du droit, la lutte contre les racismes et l'intolérance sous toutes leurs formes ». Devenu annuel en 2003, ce prix est attribué conjointement par l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bordeaux, l’Institut de Formation en Droits de l’Homme du Barreau de Paris, l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bruxelles, l'Unione Forense per la Tutela dei Diritti dell'Uomo (Rome) la Rechtsanwaltskammer de Berlin, le Barreau de Luxembourg, l'Union Internationale des Avocats (UIA) et l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens (IDHAE) . C’est Viviane Reding, vice-présidente de la Commission Européenne en charge de la Justice, des Droits Fondamentaux et de la Citoyenneté qui a remis ce 16ème Prix International des Droits de

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l'Homme « Ludovic Trarieux » à Fethi Terbil. Elle a rappelé à cette occasion que « les avocats sont la force de frappe des droits fondamentaux. Ils sont en première ligne sur le terrain pour en assurer le respect. Ils nous rappellent qu'il ne s'agit pas uniquement de rédiger et d'adopter des textes mais d'assurer leur application concrète. » Avocat libyen de 41 ans, le récipiendaire incarne la contestation contre Kadhafi. Arrêté à sept reprises, y compris en tant qu'étudiant, il a également pris le risque de représenter les familles des victimes de la mutinerie de la prison d'Abou Slim près de Tripoli, en 1996, épisode au cours duquel plus de 1 000 détenus ont péri sous la répression du régime dictatorial. « En lui nous honorons le militant avant la victime » a ainsi indiqué Bertrand Favreau le président du Jury composé de 28 avocats européens. Il a ajouté que « ce prix n’obéit pas à un effet de mode. C’est le 31 mai que le jury réuni à Rome a décerné ce prix à Fethi Terbil. A ce moment, là, certes, chacun connaissait ce "printemps qui commence », mais nul n’en connaissait l’issue. Et qu'il fût couronné de succès ou non, Fethi Terbil aurait reçu ce prix. » Non seulement héros du « printemps arabe, Fethi Terbil qui vient d’être nommé ministre de la Justice et des Sports du nouveau gouvernement libyen, est appelé à jouer un rôle déterminant dans l’instauration de l’Etat de droit. Jean-René Tancrède

J OURNAL O FFICIEL D ’A NNONCES L ÉGALES - I NFORMATIONS G ÉNÉRALES , J UDICIAIRES ET T ECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : as@annoncesdelaseine.fr FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE


LES ANNONCES DE LA SEINE

Droits de l’Homme

Siège social : 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS R.C.S. PARIS B 339 349 888 Téléphone : 01.42.60.36.35 - Télécopie : 01.47.03.92.15 Internet : www.annonces-de-la-seine.com e-mail : as@annonces-de-la-seine.com / as@annonces-de-la-seine.fr

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Jean-Pierre Buyle

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COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES NORMES TYPOGRAPHIQUES Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm. Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Fraternité et confraternité par Jean-Pierre Buyle* adame la Vice-présidente de la Commission européenne, c'est un grand honneur, que dis-je une joie, pour notre Barreau et les neuf hautes institutions organisatrices du Prix international des droits de l'homme Ludovic Trarieux de vous accueillir ici dans cette salle solennelle à l'occasion de la remise de cette 16ème récompense à l'un de nos confrères, un des héros du printemps arabe en Libye, Monsieur Fethi Terbil. Au sein de l'Union européenne, vous êtes en charge de la justice, des droits fondamentaux et de la citoyenneté. Qui d'autre de plus légitime que vous pouvait remettre au lauréat cette exceptionnelle haute distinction, ici au cœur de la capitale de l'Europe. L'Europe, qui était aux côtés de l'OTAN pour défendre des citoyens désarmés et insurgés face à une armée puissante d'un dictateur peu respectueux des droits fondamentaux, à Tripoli, à Benghazi ou à Misrata où certains voulaient noyer « les rats dans des rivières de sang ». On discutera sans fin et à raison du caractère justifié ou non de l'interventionnisme en Libye. Bernard Henri Levy, acteur important dans ce conflit, viendra nous en parler ici même à l'occasion de notre rentrée du mois de janvier. La guerre est-elle devenue le mode alternatif suprême des conflits ? La guerre de Libye marque-t-elle la victoire définitive du droit d'ingérence, légalisé pour la première fois par le conseil de sécurité de l'ONU ? Cette victoire par les armes sous le drapeau de la protection des populations civiles est-elle le début d'une autre façon d'écrire l'Histoire, celle d'une guerre qui se voudrait désespérément juste ? Même si les troupes alliées sont revenues sur nos terres sans perdre un seul homme, la Libye compte ses pertes. Entre 30 et 50 000 morts selon le Comité national de transition, sans que l'on ne fasse le tri entre les victimes des forces

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kadhafistes et celles des bombardements de l'OTAN. A quoi bon... Je voudrais m'adresser à notre confrère lauréat Monsieur Fethi Terbil et le féliciter chaleureusement d'abord pour ce merveilleux prix Ludovic Trarieux mais aussi pour sa nomination récente comme Ministre des sports, de la jeunesse et de la société civile. Vous faites partie désormais de ceux qui, demain, vont devoir reconstruire tout un pays. Réinventer les choses et ajouter au bonheur du monde... Si la Libye est membre des Nations-Unies depuis 1955, elle a, à ce titre, ratifié plusieurs traités qui permettent de préserver les droits fondamentaux. Mais l'adhésion aux traités n'entraîne pas nécessairement la bonne exécution de ces instruments universels, vous le savez. Qui s'étonnera de savoir qu'en 2007 et en 2010, le Comité des droits de l'homme qui surveille l'application du Pacte international des droits civils et politiques a émis des avis très sévères concernant la mise en oeuvre et l'application du Pacte par la Libye. Par contre, nous notons avec satisfaction que la Libye vient de s'engager à s'acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du droit international relatif aux droits de homme, à promouvoir et protéger les droits de l'homme, la démocratie et l'Etat de droit et à coopérer avec les mécanismes internationaux des droits de 1'homme compétents. Cela vous autorise à siéger à nouveau au Conseil des droits de l'homme des Nations-Unies, droit qui avait été suspendu en février 2011. Mais votre pays n'a pas encore adhéré à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées du 20 décembre 2006 et au deuxième protocole additionnel facultatif se rapportant au Pacte international des droits civils et politiques et prévoyant l'abolition de la peine de mort. Votre pays n'a pas encore reconnu l'autorité de la Cour pénale internationale. Je m'étais d'ailleurs demandé sur quelle base la Cour pénale avait délivré des mandats d'arrêt contre Messieurs Mouamar et Saïf al-Islam Kadhafi. Si en principe, la Cour n'est compétente que lorsque la personne poursuivie est un

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ressortissant d'un Etat membre ou si le crime a été commis sur le territoire d'un Etat membre, il existe toutefois une hypothèse exceptionnelle dans laquelle la Cour est reconnue compétente. Il s'agit du cas où la Cour est saisie par le conseil de sécurité lui-même, ce qui a été le cas pour la famille Kadhafi et ce qui justifie la compétence de la CPI sur ces ressortissants d'un Etat non partie au Traité, la Libye, pour des crimes commis sur le territoire libyen. Je n'ignore pas que votre pays souhaiterait que ce procès se tienne chez vous et cette requête est légitime. Demandons-nous si la justice aidera les victimes ou si elle servira la diplomatie. Sur le plan régional, la Ligue des Etats arabes a adopté la charte arabe des droits de l'homme en 1994. La Libye n'a pas encore signé ce Traité. Par contre, votre pays a ratifié en 1986 la Charte des droits de l'homme et des peuples adoptée par l'organisation de l'unité africaine devenue en 2002 l'Union africaine. Quant à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, rien n'empêche à un Etat non membre du Conseil de l'Europe d'y adhérer. Cher Monsieur Terbil, les enjeux de votre pays sont immenses. Les droits de l'homme ne sont pas de la morale, vous le savez. Ce sont des droits qui existent ou n'existent pas, qui sont appliqués ou violés : le droit de ne pas être torturé, l'accès à un procès équitable, l'égalité des hommes et des femmes. Vous avez de la chance de participer à une grande œuvre de justice et à l'émancipation de vos concitoyens. La reconstruction de votre système politique et judiciaire est un enjeu de taille. Avec vous, nous savons que votre grande Nation est en de bonnes mains. Parce que vous êtes avocat en votre âme et par votre serment, je ne doute pas qu'avec votre Ministre de la justice, vous serez attentif au respect des principes de base relatifs au rôle du Barreau adoptés par le 8ème congrès des NationsUnies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui s'est tenu à La Havane en 1990. Ces principes disposent que les pouvoirs publics prévoient des fonds et autres ressources suffisantes permettant d'offrir des services juridiques aux personnes les plus démunies. Les associations professionnelles d'avocats doivent collaborer à l'organisation et à la fourniture des services, moyens et ressources pertinents.

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Droits de l’Homme REPÈRES

A propos de Fethi Terbil Prix Ludovic Trarieux 2011 ethi Terbil, (‫)لابرت يحتف‬, âgé de 41 ans et demeurant à Benghazi, avocat spécialisé dans les Droits de l'Homme, incarne la contestation contre Kadhafi. Il a été arrêté à sept reprises, y compris en tant qu'étudiant. Fethi Terbil, l'avocat par qui la révolte anti-Kadhafi est arrivée, a été l'avocat des familles des victimes de la répression de la mutinerie de la prison d'Abou Slim, près de Tripoli, en 1996 dans laquelle ont péri quelque 1 200 détenus. Le 28 juin 1996, en fin d'après-midi, des détenus d'Abou Selim se sont échappés de leurs cellules pour réclamer de meilleures conditions de détention, un procès équitable et le droit à des visites. Au cours de la répression qui a suivi, les forces de sécurité ont abattu environ 1 200 prisonniers, selon des organisations de Droits de l'Homme, dont un des frères, le cousin et le beau-frère de Fethi Terbil. Pendant des années, les dirigeants libyens ont nié que ce meurtre de masse ait eu lieu. Les familles mettront des années avant de connaître les circonstances de leur mort. Elles voulaient connaître la vérité et le lieu où les corps ont été enterrés. Et elles se sont associées à un avocat qui était prêt

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à prendre le risque de les représenter auprès du régime. Le 15 février 2011, une vingtaine de membres des forces de sécurité intérieure (Amn al Dakhili) lourdement armés ont fait violemment irruption à son domicile à 15 heures 30 alors qu'il se trouvait en compagnie de son épouse et de ses enfants. Ils avaient emporté son ordinateur portable et téléphone mobile ainsi que les téléphones des autres membres de la famille. Ils n'avaient pas présenté de mandat d'arrêt et avaient refusé d'indiquer les raisons de son arrestation. Il a été conduit devant le responsable de la sécurité personnelle de Kadhafi, qui se trouvait à Benghazi. La nouvelle s'est répandue parmi les familles des victimes qui ont décidé de manifester pour sa libération. L'arrestation de Fathi Terbil a donné le signal de l'insurrection à Benghazi. Apprenant la nouvelle, des proches des victimes d'Abou Selim se sont rassemblés devant le quartier général de la police, à Benghazi. La manifestation a grossi. D'après les reportages, les familles des victimes des massacres ont commencé à protester contre l'incarcération de Terbil, et a commencé à réclamer la fin du régime. La manifestation, qui

Notre Ordre, qui a une expertise dans la matière, coopère déjà avec d'autres Barreaux africains relativement à une telle organisation. Que ce soit au Congo, au Tchad ou au Sénégal. Nous sommes à votre disposition pour vous

comptait jusqu'à 2 000 personnes, a duré toute la nuit. La police, tirant avec des balles en caoutchouc, et des éléments pro-gouvernement ont violemment dispersé la foule. Fethi Terbil a été relâché le 16 février à l'aube, en raison de la forte mobilisation devant le siège de ces services de sécurité. Mais depuis, l'insurrection qui s'est déclarée à Benghazi le 17 février, s'est propagée à toute la Libye. Fethi Terbil, qui a été arrêté à sept reprises, y compris en tant qu'étudiant, incarne la contestation contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi. « Je veux qu'il soit traduit en justice, dans un procès équitable ». En tant que défenseur des Droits de l'Homme il informe régulièrement les procédures spéciales de l'ONU des violations des Droits de l'Homme commises en Libye. Il coopère depuis plusieurs années avec Alkarama.

et aient connaissance des idéaux et de la déontologie de leur profession ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. N'hésitez pas à faire appel, comme la Tunisie, à nos Barreaux et à nos Instituts pour que nous

Vous avez de la chance (Fethi Terbil) de participer à une grande œuvre de justice et à l'émancipation de vos concitoyens. La reconstruction de votre système politique et judiciaire est un enjeu de taille. Avec vous, nous savons que votre grande Nation est en Jean-Pierre Buyle de bonnes mains.

aider dans la mise en place d'une telle structure. Les principes de base ONUsiens prévoient aussi que les pouvoirs publics et les associations professionnelles d'avocats promeuvent des programmes visant à informer les justiciables de leurs droits et devoirs au regard de la loi et du rôle important que jouent les avocats quant à la protection de leurs libertés fondamentales. Les instituts, associations et barreaux organisateurs de ce Prix Ludovic Trarieux sont à la disposition de votre pays pour vous seconder dans cette mission. Les principes prévoient enfin que les Pouvoirs publics et les Associations professionnelles d'avocats veillent à ce que les avocats reçoivent un enseignement et une formation appropriés

puissions vous faire partager nos connaissances et notre expérience en la matière. La fraternité qui nous lie et la confraternité qui nous soude nous feront voyager ensemble en pays de connaissance. Cher Monsieur Terbil, le prix que vous allez recevoir est la reconnaissance par vos pairs de votre action courageuse et exceptionnelle, celle d'un résistant à une dictature, celle d'un avocat respectueux des droits de l'homme et des droits de la défense. Quel insigne honneur de vous remettre cette décoration à un homme de robe, combattant pour les libertés. * Jean-Pierre Buyle est Bâtonnier de l'Ordre français du barreau de Bruxelles

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Droits de l’Homme

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Yves Oschinsky

Universalité des Droits de l’Homme par Yves Oschinsky

«

e n’était pas seulement d’ailleurs la cause isolée d’un homme qui était à défendre, c’était, derrière cette cause, le droit, la justice, l’humanité ». Ainsi s’exprimait, à l’occasion de l’affaire Dreyfus, le Bâtonnier Ludovic Trarieux, Fondateur de la Ligue des Droits de l’Homme et du Citoyen et c’est ce message qui nous porte aujourd’hui, en remettant le prix Ludovic Trarieux à notre confrère Fethi Terbil car, en effet, sa cause est bien celle du droit, de la justice et de l’humanité. Cette humanité qui nous réunit, au-delà des frontières, et qui, en un paradoxe cruel, est tellement absente dans trop de lieux aux pouvoirs autoritaires dont le seul objectif est de se renforcer eux-mêmes, au prix des violations constantes des Droits de l’Homme et de la privation des libertés. C’est le combat des meilleurs d’entre nous, c’est cette défense courageuse de ces valeurs humaines fondamentales par des avocats du monde que, depuis sa création, en 1984, le « Prix International des droits de l’Homme - Ludovic Trarieux » soutient, en le décernant à « un avocat sans distinction de nationalité ou de barreau, qui aura illustré par son œuvre, son activité ou ses souffrances, la défense du respect des Droits de l’Homme, des droits de la défense, la suprématie du droit, la lutte contre les racismes et l’intolérance sous toutes leurs formes ». L’attention du monde s’est particulièrement tournée, en 2011, depuis cette qualification qui restera dans l’histoire du « printemps arabe » et qui, aujourd’hui, a permis de dégager, selon le terme révolutionnaire, quatre pouvoirs en place qui, pourtant, paraissaient indélogeables. Au sein de ces révolutions qui sont celles de ces peuples déterminés, les avocats sont présents, dans leur rôle de défenseurs des droits et des libertés, dans leur combat pour l’instauration de la démocratie et de la bonne gouvernance et dans leur opiniâtreté à constituer, à côté

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d’autres intellectuels, un contre-pouvoir sans concession. Les avocats du monde sont à leurs côtés, avec respect, humilité et admiration. Ils soutiennent leurs combats, ils relaient leurs voix et ils réagissent aux alertes internationales. Ainsi, je voudrais évoquer les actions menées par les organisations qui assurent la dotation du Prix Ludovic Trarieux : l’Institut en formation des Droits de l’Homme du Barreau de Paris, l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bordeaux, l’organisation italienne Unione Forense per la Tutela dei Diritti dell’Uomo, l’Institut des Droits de l’Homme des avocats européens, la Rechtsanwaltskammer de Berlin, l’Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg et l’Union internationale des avocats, dont je salue les représentants en les remerciant très amicalement de leur présence. Permettez-moi de citer le comité de vigilance de l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bruxelles et ses actions d’intervention internationale menées en faveur d’avocats privés de

Nioré, du Barreau de Paris, qui a organisé les missions menées à Istanbul dans le cadre du soutien apporté à la défense des parties civiles dans le difficile procès des assassins présumés du journaliste arménien Hrant Dink. Le rôle des avocats dans les révolutions arabes doit être particulièrement souligné et c’est dans cette perspective qu’après le prix récemment décerné par le Conseil des Barreaux européens à Maître Kilani, en sa qualité de bâtonnier du Barreau de Tunisie - et je salue tout particulièrement le Président du CCBE, le Bâtonnier Georges-Albert Dal, également Président d’honneur de l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bruxelles - c’est à présent notre confrère libyen Maître Fethi Terbil que nous honorons aujourd’hui. Je voudrais adresser des remerciements forts à ceux qui ont permis de mener à bien la remise de ce prix : tout d’abord aux membres de l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bordeaux, pour la description des candidatures soumises aux délibérations du jury du Prix ; à Maître Mario Lana, Président de l’Institut italien, qui a accueilli à Rome la délibération du jury et qui a œuvré avec succès aux formalités complexes ayant permis la présence aujourd’hui de notre lauréat à Bruxelles, avec l’aide efficace des services consulaires italiens ; au Bâtonnier Bertrand Favreau pour l’efficacité de l’organisation du jury du Prix et pour son indispensable apport pour l’organisation de cette cérémonie ; à Maître Thierry Bontinck et Maître Frédéric Krenc, respectivement Vice-président et Secrétaire général de l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bruxelles, pour leur efficace organisation du colloque de cet aprèsmidi et de la cérémonie de remise du Prix ; au Bâtonnier de Bruxelles, à son cabinet, en particulier Maître Pierre Winand, et à son secrétariat, pour toute l’aide apportée à l’organisation pratique de cette journée ; à notre confrère Maître Adil El Malki, qui assure l’accueil de notre lauréat et la traduction des propos échangés.

En effet, tant Internet que les réseaux sociaux ont permis à la fois le rapprochement des populations au sein des révolutions ainsi que la communication internationale indispensable à la prise de conscience globale. Il existe ainsi une globalisation et une Yves Oschinsky mondialisation des Droits de l’Homme.

leur parole d’avocat et de leur liberté, actions très souvent conduites conjointement avec la commission des Droits de l’Homme de l’Union internationale des avocats, grâce à la compétence et à la disponibilité de l’avocate bruxelloise Maître Julie Goffin. Ou les actions de l’Institut des Droits de l’Homme des avocats européens, à travers ses lettres et ses publications, grâce à l’infatigable énergie de son président, le Bâtonnier Bertrand Favreau. Ou encore les missions conjointes d’observation judiciaire menées conjointement par les Barreaux de Paris et de Bruxelles et je salue Maître Vincent

Je voudrais dire à Madame la Vice-Présidente de la Commission européenne, Madame Viviane Reding, Commissaire européen notamment aux Droits de l’Homme, combien nous sommes honorés de sa présence et à quel point nous lui sommes reconnaissants de contribuer à l’importance de ce prix en ayant accepté de le remettre ; Vous assurez ainsi, Madame le Commissaire, une valeur tant réelle que symbolique à l’attribution du Prix Ludovic Trarieux. Soyez très chaleureusement remerciée d’ainsi souligner l’universalité des Droits de l’Homme.

Les Annonces de la Seine - Lundi 12 décembre 2011 - numéro 70


Droits de l’Homme Cette universalité procède de la nature même des Droits de l’Homme. Elle est amplifiée et favorisée par les moyens de communication actuels. En effet, tant Internet que les réseaux sociaux ont permis à la fois le rapprochement des populations au sein des révolutions ainsi que la communication internationale indispensable à la prise de conscience globale. Il existe ainsi une globalisation et une mondialisation des Droits de l’Homme. Puisse cette globalisation induire plus d’effectivité des Droits de l’Homme. Les révolutions arabes ont suscité, au sein des pays européens, une énorme vague d’enthousiasme et d’espoir et, aussi, des questionnements. Vers quel type de régime se dirige-t-on ? La montée au pouvoir de partis politiques religieux, fussent-ils modérés, peut-elle se situer

dans une cohérence avec les objectifs des révolutions ? L’instauration de la charia est-elle compatible avec l’instauration des principes de démocratie et de libertés ? N’y a-t-il pas un risque de confiscation des révolutions par la prise de pouvoir de militaires ou d’islamistes ? Voici quelques questions qui constituent les enjeux d’aujourd’hui et de demain. Je termine en vous disant, mon très cher Confrère Fethi Terbil, toute l’admiration et le soutien du Barreau de Bruxelles et des autres Barreaux et organisations d’avocats présents, pour votre action courageuse d’avocat et pour vos combats. Nous sommes à vos côtés dans votre travail en vue de l’instauration de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance de votre pays ainsi que de l’indépendance du Barreau libyen.

Bertrand Favreau et Fethi Terbil

Agenda

FORMATION CONTINUE

Droit et techniques de l’expertise des œuvres d’art Janvier 2012 Université Panthéon-Assas - Paris 2ème Centre de formation permanente - Paris 6ème

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Julie Goffin (à l’arrière plan)

Renseignements : 04 78 24 56 35 www.artdroit.org

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CROISIÈRE JURIDIQUE

Italie, Sicile, Tunisie, Espagne, France 13 / 20 mai 2012 Renseignements : 03 85 42 83 63 cperraud@escales-marines.com

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39ÈME CONGRÈS

Skilex International

« Naisse l’été … » par Bertrand Favreau «

’e spoir vivant en nous comme une citadelle Le printemps prendra chair sous nos pas de clarté… »(1) écrivait David Diop, ce poète, chantre de la liberté de l'Afrique, né à Bordeaux et disparu à jamais dans les eaux de la mer océane, si jeune, à 33 ans à peine, il y a quelques cinquante ans. Lui ne connut pas ce printemps. Mais ses « pas de clarté » l’annonçaient pour d’autre. Ce prix n’obéit pas à un effet de mode. C’est le 31 mai que le jury réuni à Rome a décerné ce prix à Fethi Terbil. A ce moment-là, certes, chacun connaissait ce « printemps qui commence », mais nul n’en connaissait l’issue. Et qu'il fût couronné de succès ou non, Fethi Terbil aurait reçu ce prix. Ici, nous ne nous préoccupons pas de la gloire future des lauréats. Nous laissons toujours à d’autres le soin de célébrer leur succès. Nous ne leur demandons pas compte de ce qu'ils sont devenus puisque c'est pour ce qu'ils ont fait avant que nous les honorons. C'est l'instant de ce combat fondateur que nous célébrons ici.

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Nous guettons les prémices, d’autres se contentent d’attendre les issues. Nous en conservons seulement la fierté, fut-ce au prix de quelques vanités, d’avoir accompagné nos lauréats sur un chemin pavé de souffrances. Car ce sont les souffrances que nous exaltons ici. Nous célébrons le courage, leur courage, lorsqu’ils sont seuls et que nul ne se soucie d’eux. Nous sommes toujours heureux de leur gloire, toujours pléthoriquement entourée, mais nous savons alors qu’ils n’ont plus besoin de nous sinon par la persévérance d’une amitié ancienne aux jours les plus durs. Ce « chant du printemps », nous l’avons célébré, à défaut de l’avoir suffisamment anticipé peutêtre. Ainsi, nous avons célébré en son temps Nelson Mandela, détenu dans une prison d’Afrique du sud, alors que rien n’annonçait qu’il pourrait en sortir un jour. Ainsi avons-nous célébré aussi ce « printemps arabe », déjà en germe, en 1996, avec Nejib Hosni, non seulement parce qu’il était en prison. Mais surtout pour les vraies raisons de son emprisonnement, celles pour lesquelles il avait accepté de faire le sacrifice de sa liberté. Nous l'avions aussi par anticipation défendu en soutenant Mohamed Abbou, Radhia Nasraoui et tant d'autres.

du 29 janvier au 5 février 2012 Maribor (Slovénie) Renseignements : www.skilex.eu

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38ÈME CONGRÈS

Skilex France du 12 au 15 janvier 2012 Belle Plagne (Savoie) Renseignements : 01 53 92 08 46 virginie.heylliard@a-h-avocats.com www.skilex-france.com

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COLLOQUE DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE

Le marché intérieur : concurrence, consolidation des acquis et nouvelles perspectives 2 février 2012 Cour de cassation - Paris 1er Renseignements : www.courdecassation.fr 2011-659

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Droits de l’Homme

Bertrand Favreau Nous aurions tant voulu l'annoncer, pour ces pays qui connaissent encore l'hiver rigoureux de la répression, dès 2004, en remettant, ici même, ce même prix à Aktham Naisse, condamné à 9 ans de prison pour avoir demandé la fin de l'état d'urgence en Syrie et lutté pour l’instauration d’une société civile démocratique. Ou en lançant d'inlassables appels pour Ryad al-Turk, Anouar Bounni, Mohammad Al Hassani, Haytham Al- Maleh ou en songeant en cet instant, aux 116 avocats emprisonnés depuis le début du printemps en Syrie, dont le nom « Surya » signifie « soleil ». Nous aurions voulu le prédire, en Iran, avec Mehrangiz Kar ou en menant campagne pour Nasrin Sotoudeh, Abdolfattah Soltani, Mohammad Mostafaei, Mohammad Ali Dadkhah ou Khalil Bahramian… Nous songeons aussi et nous le répétons à tous les avocats kurdes de Turquie, emprisonnés ou menacés de lourdes peines. Mais, il est vrai, nous n’avions jamais rien dit de la Lybie, jamais ou presque. Pourquoi ? C’est parce que là-bas la dictature - autant que cela soit possible - y était plus dure. Point de faux semblant. Point d’embryon de société civile. Point de simulacre de justice, qui offre parfois à l’avocat courageux de rares occasions de dénoncer et de défendre, bien sûr au prix de son droit à exercer sa profession et de sa liberté, perdus pour une seule cause trop bien défendue. « En ce temps-là Les vautours construisaient à l’ombre de leurs serres Le sanglant monument de l’ère tutélaire »(2) Déjà, ce qu'il est désormais convenu d'appeler le printemps arabe avait commencé en Tunisie et en Egypte puis s’était étendu à Bahreïn en Jordanie, en Syrie et au Yémen… Dans toutes les dictatures, ainsi que Gandhi le disait, la liberté se conquiert d’abord dans les prisons. On ne sait jamais avant quand une révolution a déjà commencé. Tocqueville datait de septembre 1788, l’apparition du véritable "esprit de la révolution « française ». François Furet avait voulu le faire remonter au début de 1787… En Lybie, l’esprit de la révolution libyenne a commencé à Abou Salim, le sanglant monument de l’aire Kadhafi Abou Salim, la

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prison de haute sécurité de Tripoli. Certes, les massacres dans les prisons avaient commencé dès 1971, Fethi Terbil l’atteste. Un jour de 1996, dans la sinistre citadelle, plusieurs centaines de prisonniers assemblés y furent massacrés en deux ou trois heures. Comme tous les détenus d’Abou Salim, ils étaient jeunes et opposants au régime. Ils représentaient le pire des dangers. Ils manifestaient mais quelles étaient leurs exigences premières ? Des conditions dignes en prison, un droit de visite, un procès équitable pour ses opposants au régime la plupart détenus sans être jugés. Que demandaient-ils en réalité ? Le respect des droits fondamentaux. En un mot, la fin du régime. Combien sont morts ? Nul ne le sait et ne le saura jamais. 1 270 a dit Human Rights Watch. Moins de 1 000 pour d’autres. 14 pour le régime libyen…On discutera sans doute toujours leur nombre. On révisera même peut-être. Mais, ils étaient plus de 1 000 assurément. Selon un témoin, les cadavres furent entassés sur des chars à roues et dans des camions frigorifiques et incinérés dans des fosses communes. On ne les retrouvera jamais. Le régime a nié la survenance du massacre. Selon lui, il ne s’agissait que d’un évènement banal, un affrontement avec un groupe islamique. Les familles n’eurent aucune information. Ce n'est que plusieurs années après, que, peu à peu, on leur a annoncé le décès de leurs proches. En 1996, Fethi Terbil n’avait que 25 ans. Sans doute était-il personnellement concerné. Il avait dans sa chair payé un lourd tribut. Dans ce massacre, son frère, Ismail Osma Terbil, qui allait obtenir son diplôme d’ingénieur aéronautique, son cousin Khaled, qui était un commerçant paisible et son beau-frère Jamal Muftah Al Rebaa ont été assassinés. Cinq de ses camarades d’université étaient morts au même instant. Concerné, mais avocat, son premier engagement d’avocat fut d'œuvrer pour obtenir la vérité et d’obtenir justice. Il est devenu l'avocat des victimes d’Abou Salim. Il n'était pas seul, mais il fut le coordonateur de toute la défense, demandant inlassablement que l’on rende publiques les circonstances exactes de cet assassinat de masse et que les familles aient connaissance du lieu de sépulture de leurs

parents. En termes de droits fondamentaux, cela s’appelle pour le moins une enquête effective et la reconnaissance d'un droit à réparation. Dans un pays qui vit depuis quatre décennies sans loi fondamentale, accepter de représenter les familles des victimes exigeait un incomparable courage. On connaît la suite. Fethi Terbil a connu à six reprises la prison, mais d’enquête, il n’y eut point, ni interne, ni internationale. Les gouvernements dits occidentaux ont choisi d’ignorer l’évènement. Le leader l’avait annoncé clairement à la télévision d’Etat aux familles des victimes : « Considérez-les comme s’ils étaient atteints d’un cancer incurable : oubliez-les ! ». Mais les familles ont refusé d’oublier. En 2011, alors que ce printemps précoce, né à l'entrée de l'hiver, avait embrasé la Tunisie et l'Egypte, Abou Salim va se rappeler au souvenir du tyran en émoi. Déjà Facebook et Tweeter appelaient à une manifestation pour le jeudi 17 février. Ce serait le « jour de rage ». Deux jours avant, le tyran s’est souvenu de celui qui ne cessait depuis des années d’exiger la justice et la vérité. Premier d’acte du régime finissant : le mardi 15 février, vingt membres des services de sécurité ont envahi le domicile de Fethi Terbil, à Benghazi, pour l’arrêter et le conduire dans les bâtiments de la police. Mais aussitôt le bouche à oreille a fonctionné. Ce sont des avocats et des juges d'abord qui se sont rassemblés devant les locaux de la police, pour exiger sa libération. Puis des femmes, Des mères, des épouses, des sœurs des victimes d’Abou Salim. Puis toutes les familles de Benghazi les ont rejoint. L’attente aura duré un jour entier. Au soir, ils étaient plusieurs centaines, et selon certains même plus de 2 000. La foule s’est renforcée d’heure en heure et a appelé tous les habitants de Benghazi au soulèvement. Des chants lointains s’élevaient dans la nuit : « Réveille-toi Benghazi ! Debout ! Le jour tant attendu est arrivé ! ». Plusieurs milliers de personnes se sont mises en marche vers la place centrale de la ville. Ils ont parcouru près de dix kilomètres. Sur Al Jazeera en langue arabe, l’é crivain Mesmeri annonçait en direct que la police chargeait sur les manifestants. La liaison fut interrompue brutalement et Mesmeri arrêté peu après. Il est près de minuit lorsque Abdallah Sanoussi, le chef du renseignement de l'ancien régime, le beau-frère du dictateur, venu en personne, demande à s’entretenir avec Fethi Terbil. Il ne sait que lui dire. Il est confus. Il le relâche le lendemain matin. Mais le mouvement ne s’arrêtera plus. Le 17, ils seront des milliers dans les rues. Vingt mille devant le tribunal de Benghazi. On a parlé de 104 morts… Le 21, l'aviation du régime lâchera sa mitraille et ses bombes…(3) Puis le vent du printemps a balayé les côtes de la Méditerranée. Le mouvement du Jasmin était bien un mouvement de la liberté. Son échos a traversé les mers et les montagnes, il a franchi la route de la soie jusqu’en Chine. C’est au cri de ralliement de Jasmin que tant d’avocats chinois ont accepté d’être épiés, traqués, arrêtés, emprisonnés. Certains ne sont pas encore revenus. Six mois plus tard, au mois d'août, symbole d’une victoire irrésistible qui s’annonçait, les portes de la prison d’Abou Salim, encore pleine,

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Droits de l’Homme ont été ouvertes. Peu importe la date, le 19 ou le 24, tous les prisonniers d’Abou Salim ont été libérés. « Auprès de toi j’ai retrouvé la mémoire de mon sang Et les colliers de rires autour des jours Les jours qui étincellent de joies renouvelées. » (4) Ils ont choisi le mouvement. C’est une armée de martyrs qui s’est levée, les martyrs du passé et les martyrs futurs, offerts au sacrifice. Nous avons toujours choisi ceux qui se lèvent, ceux qui marchent. Nous avons décerné ce prix à Fethi Terbil non pas parce qu’il avait donné par son arrestation, le signal de la marche. Mais parce qu’il avait, précurseur, commencé bien avant depuis 1992. Et qu’il l’avait entamé en sa qualité d’avocat. Mais en lui, nous honorons le militant avant la victime. Soudain, ce printemps célébré sous toutes les attitudes, devrait nous inquiéter ? A ceux qui se livreraient à des procès d’intention, nous déclarons fermement qu’ils ont tort. Qu’ils doivent laisser les peuples vivre. Que l’expérience des uns ne sert jamais aux autres. Qu’il y a un prix à payer pour finir par retrouver la liberté. Comme le disait François Furet « il n’y a pas de circonstances révolutionnaires, il y a une révolution qui se nourrit des circonstances »(5). Laissons là les sophistes de la prospective qui croient qu’en politique mieux vaut garder un dictateur déjà là - et que pour cela on connaît déjà - plutôt que de s’exposer à celui, protéiforme, qui viendrait ou qui viendra nécessairement. Ces modernes Cassandre, le plus souvent démentis mais jamais repentis, je les connais bien. En 1984, ils me fustigeaient déjà lorsque j'ai remis ce même prix à Nelson Mandela, annonçant le bain de sang qui allait s'ensuivre si…Nelson Mandela était libéré. Courte vue que celle de ce printemps qui cacherait déjà mal les froidures d’un hiver sans fin. Nous avons choisi de soutenir le vent de la révolte, le vent de ceux qui se sont levés, parce qu’ils étaient couchés, la voix de ceux qui se sont mis en marche, de l’Est vers l’Ouest, puis de l’Ouest vers l’Est, pour faire plus que conquérir, embrasser les millions de leurs semblables et leurs rendre l’Espérance. Sans doute faut-il se remémorer et faire nôtre, le mot d'Olympe de Gouges : « Le sang, même celui des coupables, versé avec cruauté et profusion, souille éternellement les révolutions »(6) Mais à tous ceux qui n’auraient pas compris, que, comme le disait Clémenceau, la révolution est un bloc, nous demandons de ne pas juger, comme les émigrés de 1793, les principes de la Révolution française que nous nous honorons de célébrer aujourd'hui encore, à l’aune des massacres de Septembre ou de la Terreur. Mais, la règle de ce prix est invariable et, si, comme dans un cycle fatal, revenaient alors les vieux démons qui viennent parfois corrompre les meilleures intentions de ceux qui ont accédé au pouvoir, nous recommencerions à dénoncer. Nous ne voulons pas avoir à décerner à nouveau ce prix à un tunisien ou à un autre libyen, dans quelques années lorsqu’il n’aura pas la liberté à son tour de défendre. Nous devrons dénoncer le mal, toujours tapi dans l’ombre, qui viendrait à ressurgir. Car l’ignorance, l’oubli ou le mépris de ce noyau dur

des valeurs qui s’attachent à la dignité de l’homme, est intangible. Oui, nous sommes des militants de l'universalisme. Nous croyons et nous professons que ces principes sont universels. La dignité de l’être humain appartient à toutes les cultures. Ils sont universels ou ils ne le sont pas. Rien sinon eux-mêmes ne saurait les contenir ou les confiner. C'est pourquoi jamais ils ne sauraient s'assimiler à des droits octroyés par un gouvernement ou un monarque ou issus d'une puissance divine. C'est pourquoi, aussi, ils portent, en eux et en creux, les devoirs que l'on voudrait parfois leur opposer ou leur associer, de façon presque pléonastique, comme pour mieux les limiter. Le droit naturel de l’être humain à être un homme et à le demeurer, est premier. Il ne cède devant aucune autre loi, devant aucune autre révélation. Il n’est pas de religion qui puisse l’ignorer, l’occulter ou la dominer. John Locke – qui a tant inspiré les principes de notre Déclaration du 26 août - ne manquait pas d'affirmer : « Il n'y a personne qui soit né

Iran, qui invoquent l'universalité des Droits de l'Homme contre ceux qui les violent au nom du respect du à un autre principe. Car, en la matière, il n’existe qu’une seule vérité, et Jürgen Habermas l’a bien précisé : « Les droits de l'homme ne sont pas accordés ou refusés, mais garantis ou bafoués »(9). Nous voulons pouvoir scander longtemps le vers de Paul Éluard : « Notre printemps est un printemps qui a raison ». Ce printemps avait raison. C'est ce que l'on dira après. Nous sommes au nombre de ceux qui attendent dans l'espérance et avec confiance cet après qui viendra. Cet après qui n'est peut être - hélas ! - pas demain mais qui s'appelle un jour. Fethi Terbil avait prédit au printemps 2011 « Je crois que nous allons voir une nouvelle Lybie où nous pourrons honorer les victimes. Nous lirons des poésies et rebâtirons le pays. La Lybie d’aujourd'hui a un rendez-vous avec l’histoire et elle ne manquera pas cette opportunité »(10) L'heure annoncée par Fethi Terbil est venue. Lisons donc des poésies. Attendons désormais la saison qui viendra.

Nous avons décerné ce prix à Fethi Terbil non pas parce qu’il avait donné par son arrestation, le signal de la marche. Mais parce qu’il avait, précurseur, commencé bien avant depuis 1992. Et qu’il l’avait entamé en sa qualité d’avocat. Mais en lui nous honorons Bertrand Favreau le militant avant la victime.

membre d'aucune église »…(7) Quelle confession dès lors saurait lui imposer une norme contraire à l'un de ses droits inaliénables et imprescriptibles ? Le pacte des vertueux (Hilf-al-fudul), conclu entre des tribus arabes, vers 590 avant notre ère, est aujourd'hui encore considéré comme l'une des premières alliances pour les droits de l’homme. Mieux que tout autre, Amartya Sen a ainsi démontré que les prétendues valeurs occidentales de liberté et de libération présentées comme le legs de l'occident antique ou des valeurs dominatrices ne sont ni particulièrement anciennes ni d'origine exclusivement occidentale et que la tolérance devant inclure tout le monde sans exception pouvait se trouver aussi bien chez Platon, chez Confucius, que dans l'Islam. Il a rappelé qu' Akbar le grand, musulman et empereur mongol du 16ème siècle, alors que l'Inquisition faisait encore des ravages en Europe, avait rassemblé autour de lui, des juifs, des chrétiens, des parsis, des nestoriens, des bouddhistes afin de donner le jour à la « religion de la lumière », unifiant le Coran, la Bible et les textes hindous, afin de faire connaître à son royaume l'éclatante clarté de la tolérance. Voltaire expliquait que si Saladin, par son testament, avait voulu léguer une part de sa fortune en parts égales aux pauvres musulmans, chrétiens, juifs, c'est parce qu'il voulait « faire entendre que tous les hommes sont frères et que pour les secourir, il ne faut pas s'informer de ce que les hommes croient, mais de ce qu'ils souffrent »(8). Les défenseurs des Droits de l'Homme de toutes les religions et sous toutes les latitudes le savent bien, en Chine comme en

Célébrons, ce soir, le principe de Hölderlin, cette constante de l'histoire des hommes, que l'on traduit en français par : « Là où croît le danger, croît aussi ce qui sauve »(11). Et partageons plus que jamais en cet instant, ceux, parmi les vers à jamais engloutis de David Diop, qui sont parvenus jusqu'à nous. Ils chantent la liberté des peuples et renforcent en nous cette « Certitude », qui ne doit jamais nous abandonner : « A ceux qui s’engraissent de meurtres Et mesurent en cadavres les étapes de leur règne, Je dis que le jour et les hommes, Que le soleil et les étoiles Dessinent le rythme fraternel des peuples. Je dis que le cœur et la tête Se rejoignent dans la ligne droite du combat Et qu’il n’est pas de jour, Où quelque part ne naisse l’été »(12)

Notes : 1 - David Diop, Les Vautours, in Coups de pilon, Présence Africaine, p 10. 2 - David Diop, Coups de pilon, Présence Africaine, p. 10. 3 - Le Monde, 23 octobre 2011. 4 - David Diop, Coups de pilon, Présence Africaine, p. 22. 5 - François Furet, Penser la Révolution française, Paris, Folio, 1985, p. 105. 6 - Olympe de Gouges, Écrits politiques, Paris, 1993, tome II. 7- John Locke, Lettre sur la Tolérance, Mille et une Nuits, p. 20 8 - Voltaire, Histoire des Croisades, Mille et Une nuits, 2006, p. 51. 9 - Jürgen Habermas, L'intégration républicaine, Essais de théorie politique, trad. R. Rochlitz, Paris, Fayard, 1998, p. 190. 10 - Interview par Abeer Maghribi, Libya TV, 29 juin 2011. 11 - Wo aber Gefähr ist, wächst, Das Rettende auch. (Patmos -Au landgrave de Hombourg, 1803-1806). 12 - David Diop, Certitudes in Coups de pilon, Présence Africaine, p. 26

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Droits de l’Homme

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Viviane Reding et Fethi Terbil

Reconnaissance par Viviane Reding e suis très honorée de l'invitation qui m'est faite de remettre le « Prix International des Droits de l'Homme - Ludovic-Trarieux » à Monsieur Fethi Terbil. Ce prix qui récompense des hommes et des femmes qui perpétuent la longue tradition des avocats défenseurs des droits, porte le nom d'un homme qui a joué un rôle important lors de l'Affaire Dreyfus pour la défense des droits de l'individu. Monsieur Terbil rejoint aujourd'hui la liste des avocats éminents à qui ce prix prestigieux a été décerné pour leur action courageuse en faveur de la défense des Droits de l'Homme, parmi lesquels figure Nelson Mandela. Les avocats sont la force de frappe des droits fondamentaux. Ils sont en première ligne sur le terrain pour en assurer le respect. Ils nous rappellent qu'il ne s'agit pas uniquement de rédiger et d'adopter des textes mais d'assurer leur application concrète.

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Nous sommes réunis aujourd'hui pour témoigner notre reconnaissance à Monsieur Fethi Terbil, avocat libyen de familles et proches de nombreuses victimes de l'oppression de l'ancien régime libyen, qui, avec témérité et courage, n'a eu de cesse de défendre les valeurs et les principes de la justice à laquelle il aspire

et lorsque les Etats membres mettent en œuvre le droit de l'Union. Toutes ces actions visent à créer une véritable culture des droits fondamentaux au niveau de l'Union européenne. La remise de ce prix revêt une importance toute particulière à l'heure où l'Union européenne s'est engagée à renforcer les garanties procédurales pour les personnes suspectes ou accusées, notamment en leur assurant la possibilité de bénéficier de la présence d'un avocat dès le début de la procédure. En conformité avec la Charte des droits fondamentaux et la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme, la proposition que j'ai présentée au Parlement européen et au Conseil fixe des exigences minimales communes pour le droit des suspects et des accusés en Europe, en garantissant l'accès à un avocat pour toute personne suspecte ou accusée. L'action de l'Union en matière de droits fondamentaux s’étend au delà de ses politiques internes. La Charte s'applique aussi à l'action extérieure de l'Union et, conformément à l'article 21 du Traité sur l'Union Européenne, l'action de l'Union sur la scène internationale vise à promouvoir la démocratie, l'État de droit, l'universalité et l'indivisibilité des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, en se fondant notamment sur le respect des principes de la charte des Nations unies et du Droit international. Dans son action extérieure, l'appui de l'Union aux défenseurs des droits de l'homme est essentiel. Je ne dois pas vous convaincre de l'importance d'un système judiciaire efficace et indépendant. Mais nous savons que cela ne suffit pas. Il faut une véritable culture de protection des droits

Les avocats sont la force de frappe des droits fondamentaux. Ils sont en première ligne sur le terrain pour en assurer le respect. Ils nous rappellent qu'il ne s'agit pas uniquement de rédiger et d'adopter des textes mais d'assurer leur application concrète.

Viviane Reding

pour son pays. Monsieur Fethi Terbil a notamment pris le risque de représenter les familles des victimes de la mutinerie de la prison d'Abou Slim. C'est à ce titre qu'il représente le meilleur des exemples d'un avocat à la recherche de la justice. Le respect des droits fondamentaux dans la vie quotidienne est au cœur de mes préoccupations. Avec le Traité de Lisbonne, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne est devenue juridiquement contraignante. Pour rendre ces droits effectifs la Commission européenne a adopté une stratégie sur la mise en œuvre de la Charte et présente, chaque année, un rapport annuel sur les progrès accomplis. La Commission a notamment renforcé l'analyse de l'impact de ses propositions législatives sur les droits fondamentaux et nous sommes déterminés à veiller au respect de la Charte tout au long du processus législatif au Parlement européen et au Conseil,

fondamentaux, fondée sur la présence d'acteurs déterminés à les mettre en œuvre, notamment dans les enceintes judiciaires. Les avocats, comme les juges, sont des acteurs clés du système de protection des droits, et c'est ainsi, grâce à vous, que sont réalisées les grandes avancées dans la protection des droits. Cher Monsieur Terbil, vous êtes précisément un acteur clé de la défense des droits fondamentaux. Grâce à votre courage, vous avez été au centre des événements qui ont permis au peuple libyen de tourner la page vers une nouvelle Libye. Votre parcours, Monsieur, et le chemin parcouru, parfois au péril de votre vie, depuis les prisons de l'ancien dictateur Kadhafi sont impressionnants. Cher Monsieur Terbil, la raison d'être du prix Ludovic Trarieux est de rendre "l'hommage des avocats à un avocat". C'est avec beaucoup d'émotion que je joins mon hommage à celui de vos confrères.

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Vie du chiffre

Autorité des Marchés Financiers VIIIème Edition des Entretiens - Palais Brongniart, Paris - 24 novembre 2011 La VIIIème édition des Entretiens de l’AMF se sont déroulés le 24 novembre dernier au Palais Brongniart dans une conjoncture économique difficile. L’occasion pour le Président Jean-Pierre Jouyet de faire un point sur les réformes réglementaires en cours en matière de régulation des marchés mais aussi d’é voquer les améliorations structurelles à apporter à l’organisation du financement de nos économies. Le Ministre de l’Economie, François Baroin qui a honoré de sa présence la clôture des travaux a rappelé qu’ « il ne peut pas y avoir de responsabilités puissantes sur le plan économique sans qu'il y ait, lorsqu'il y a erreur, des sanctions adaptées à l'impact de la réalité de ce qu'il s'est passé ». Jean-René Tancrède Jean-Pierre Jouyet

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1. Commençons donc en premier lieu par un rapide point d’étape sur les réformes de la régulation des marchés

vail, car il pose les bonnes questions et réaffirme que les marchés doivent fonctionner sur les trois piliers que sont la transparence, l’efficience, et l’intégrité. Malheureusement, les réponses apportées ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux. 1.1. En ce qui concerne la transparence

Optimisme et détermination par Jean-Pierre Jouyet ’est la troisième fois que j’interviens devant vous aux Entretiens de l’AMF. Trois ans, c’est aussi à peu de choses près la durée écoulée entre d’un côté la crise des subprimes qui a culminé avec la chute de Lehman Brothers, et de l’autre la crise de la dette souveraine européenne à laquelle nous sommes actuellement confrontés. Si, en 2008, la crise de confiance des investisseurs était marquée par ces chocs systémiques privés amplifiés par la fraude Madoff, elle se prolonge aujourd’hui dans la défiance à l’égard des titres de dette souveraine européenne. Dans le même temps, la conjoncture économique reste difficile. Cet environnement rend d’autant plus nécessaire la mise en place des mesures de régulation financière adoptées par le G20. Il est encore à l’évidence trop tôt pour tirer le bilan des réformes réglementaires en cours. Il est cependant d’ores et déjà possible de porter un jugement sur ce qui a été fait, et ce qui reste à faire, en matière de régulation des marchés et de financement de l’économie.

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Le chemin parcouru est indéniable. Un édifice réglementaire imposant est en train de prendre forme au niveau européen. Agences de notation, fonds spéculatifs, système européen de régulation financière, renforcement des fonds propres bancaires, rémunération des opérateurs de marché, régulation des ventes à découvert : les réformes engrangées sont nombreuses. En parallèle, les travaux se poursuivent. Je pense en particulier à la régulation des marchés de dérivés de gré à gré, avec une exigence d’enregistrement et de compensation des transactions qui devrait prochainement voir le jour. Ces chantiers n’avancent bien sûr pas aussi vite qu’on le souhaiterait, et le résultat de ces imposants travaux n’est toujours pas tangible pour les opinions publiques. La raison en est simple. Le temps de la réflexion, de la négociation (surtout au niveau européen), et de la démocratie, n’est pas le temps des marchés. Entre les premières réflexions européennes d’un côté, et l’entrée en vigueur d’un texte après sa transposition dans chacun des Etats membres, 5 ans peuvent s’écouler. Ainsi les trois grandes agences de notation que sont Moody’s, S&P et Fitch ne sont-elles supervisées que depuis le 31 octobre, date de finalisation de leur processus d’enregistrement. Les obligations d’enregistrement des fonds alternatifs ne prendront effet qu’à compter de 2013. Mais surtout, la régulation des marchés euxmêmes est encore à l’état d’ébauche. Il nous manque la pièce centrale du puzzle que constitue la révision de la Directive sur les Marchés d’instruments financiers. La Commission européenne a présenté un premier projet le 20 octobre. L’enjeu de la révision de la Directive sur les Marchés d’instruments financiers est simple : il s’agit de réaffirmer le rôle des marchés transparents multilatéraux comme outil de formation des prix, au service du financement de l’économie et des entreprises. Le premier projet mis sur la table par la Commission constitue une bonne base de tra-

La première version de la MIF avait créé les systèmes multilatéraux de négociation. L’objectif était notamment d’attirer sur ces plates-formes les transactions auparavant réalisées de gré à gré. L’échec fut total. Non seulement la part des transactions réalisées de gré à gré n’a pas baissé, mais les systèmes multilatéraux de négociation ont été utilisés pour créer les désormais fameux dark-pools. En un mot, les transactions ont glissé des platesformes multilatérales transparentes vers des plates-formes multilatérales opaques. Aujourd’hui, nous rejouons la même scène. Le projet de texte envisage la création de nouvelles plates-formes, appelées OTF. L’idée peut sembler séduisante : il s’agirait d’inscrire dans un cadre réglementaire clair les systèmes d’appariement d’ordres aujourd’hui connus sous le nom de crossing networks, en espérant ainsi augmenter la transparence du marché. On peut cependant se demander quel sera l’apport réel pour le fonctionnement des marchés d’action de la création de cette nouvelle catégorie de plates-formes de négociations. La conséquence la plus logique de la création de ces OTF pourrait bien être de poursuivre le glissement des marchés vers l’opacité et les modes de négociations discrétionnaires. La solution est claire. - Premièrement, il faut inciter à la négociation sur les plates-formes les plus transparentes. Il n’est pas raisonnable de mettre sur un pied d’égalité les différentes catégories de platesformes prévues par la Directive. Il faut créer une hiérarchie claire entre les différentes catégories de plates-formes. La négociation sur des marchés transparents doit être privilégiée. Paradoxalement, le nouveau texte impose que les instruments dérivés liquides soient négociés sur des plates-formes de négociation, mais il est silencieux pour les autres instruments. Il serait étrange que la révision de la Directive MIF conduise à des progrès en matière de transparence des marchés dérivés et un recul en matière de transparence des marchés d’actions.

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Vie du chiffre - Deuxièmement, il faut renforcer les exigences de transparence pesant sur les plates-formes de négociation. A titre d’exemple, les exemptions au principe de transparence pré-négociation telles qu’elles sont prévues dans le projet de texte laissent encore la part belle aux dark pools pour les années à venir. - Et troisièmement, il faut assurer la consolidation de l’information post-négociation sur les transactions effectuées. Le texte actuel ne garantit aucunement la consolidation de toutes les données par un organisme unique. Il ne remédie que très partiellement à la fragmentation actuelle de l’information. 1.2. J’en viens maintenant au deuxième pilier du fonctionnement des marchés : l’efficience

Les marchés doivent être le lieu où se rencontrent acheteurs et vendeurs, sur le fondement de leur analyse de la valeur des titres. Aujourd’hui, le développement excessif du trading à haute fréquence a mis en péril le fonctionnement des marchés en remettant en cause ce postulat.

Car quel est le rôle des plates-formes de négociation de titres ? Il n’est pas de financer les entreprises, rôle dévolu aux marchés primaires. Il est de fournir d’une part de la liquidité aux détenteurs de titres financiers, et d’autre part des références de prix précieuses pour le fonctionnement des marchés primaires. En un mot, leur rôle est de donner aux investisseurs confiance dans leur capacité à céder leurs titres de façon ordonnée et à des prix prévisibles lorsqu’ils en ont besoin. Or, les techniques de négociation à haute fréquence encombrent les marchés d’ordres éphémères, diminuent la profondeur du marché, et sapent ainsi la confiance des investisseurs dans le prix affiché, dans le mécanisme même de confrontation des ordres. Un marché secondaire jugé erratique ou peu lisible par les investisseurs, c’est un marché secondaire qui devient peu à peu inutile, et qui affecte négativement le dynamisme et la qualité du marché primaire. Pour remédier à cette situation, il faut que l’ESMA ait la possibilité de fixer des règles précises de fonctionnement des marchés, en particulier sur les temps de latence ou les tarifs appliqués par les plates-formes. C’est en ce sens que la proposition de la Commission doit être enrichie. 1.3. Troisième pilier du fonctionnement des marchés : l’intégrité

Au sens strict, ce n’est pas la Directive sur les Marchés Financiers qui traite de l’intégrité du marché, mais la Directive Abus de Marchés, qui fait également l’objet de travaux de révision. Mais la Directive MIF fournit au régulateur les outils pour surveiller la complexité croissante des marchés. L’instrument est connu. Il s’agit de faire un rapport des transactions au régulateur. Malheureusement, le projet actuel ne prévoit

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pas d’obligation de transmission par les platesformes des carnets d’ordres, données essentielles pour détecter d’éventuelles manipulations de cours. L’Europe est en retard, car j’observe que la SEC a proposé de son côté de mettre en place un reporting bien plus exhaustif. En résumé, le but de ce chantier de re-régulation est avant tout d’assurer le bon fonctionnement des marchés, au service du financement de l’économie. La complexité des marchés, l’é volution considérable de la finance et de ses utilisations appellent à aller plus loin, à conduire une démarche plus profonde de refondation, invitant à revisiter les éléments de base du fonctionnement de l’économie.

2. Au-delà du renforcement de la régulation des marchés, il est donc indispensable, surtout en ces temps de crise, de mieux organiser le financement de l’économie Naturellement, les marchés attendent surtout à court terme des réponses sur le plan de la consolidation budgétaire et de la gouvernance européenne. Mais cela dépasse le cadre des débats de ce jour et notre responsabilité, en tant que régulateur de marché, est de contribuer aux réflexions sur les améliorations structurelles à apporter à l’organisation du financement de nos économies. 2.1. Le premier axe de travail consiste à voir comment banques et fonds d’investissement contribuent au financement de l’économie

S’agissant du financement bancaire, les pressions des marchés poussent à court terme à une transition accélérée, de façon sans doute excessive, vers les nouvelles règles dites de Bâle III. La vigilance des pouvoirs publics est nécessaire : - Vigilance sur les modalités par lesquelles les banques entendent rehausser leurs fonds propres et restructurer leurs bilans. - Vigilance sur l’accès des PME au crédit bancaire via la Médiation du Crédit, qui revêt un caractère particulièrement important compte tenu de la plus forte dépendance des PME et TPE vis-à-vis du financement bancaire. - Vigilance enfin sur les conditions de l’accès des PME et ETI aux marchés financiers. A plus long terme, les règles prudentielles doivent être renforcées pour assurer la solidité des acteurs. Mais dans leur formulation, ces règles ne doivent pas pénaliser les activités de financement de l’é conomie par rapport aux activités de marché. S’agissant du financement de l’économie par les fonds d’investissement et plus particulièrement le capital investissement, la France peut s’appuyer sur une industrie du capital investissement bien établie. Les efforts menés par la Commission européenne pour renforcer cette industrie seront bien entendus appuyés par l’AMF. Il nous faudra disposer d’un véhicule juridique de capital investissement européen efficace. L’industrie française devra en la matière faire valoir son modèle, et en particulier le

véhicule internationalement reconnu qu’est le Fonds commun de placement à risques. 2.2. Le deuxième axe de travail porte sur l’incidence des normes comptables.

Aujourd’hui, la prise en compte excessive des valeurs de marché dans les règles comptables confère à ces règles un impact procyclique néfaste. Peut-on raisonnablement considérer qu’à chaque instant, les marchés ont « raison », et définissent le juste prix ? Pour certains actifs, comme les titrisations subprime ou les CDS, l’existence d’un marché est discutable. Sur les CDS souverains, avons-nous même un marché lorsque nous conjuguons opacité, illiquidité et absence de profondeur ? Plus généralement, pour les investisseurs de long terme qui ne souhaitent pas céder leurs actifs dans l’immédiat, la valeur de marché ne peut constituer que l’un des éléments de valorisation de leur portefeuille. Sa répercussion directe dans les comptes conduit à défaut à une volatilité des résultats peu représentative de la réalité économique. Elle peut également être préjudiciable au financement de l’économie si les investisseurs de long terme en viennent à délaisser certains actifs pour assurer une relative stabilité de leurs résultats. Le recours à des modes de valorisation alternatifs doit donc être possible, en particulier lorsque la notion de valeur de marché n’a pas de sens, et sous réserve d’une transparence totale sur les modalités et hypothèses sur lesquelles repose la valorisation des actifs. La pertinence des règles comptables doit être appréciée au regard de leur impact sur le financement de l’économie. Il nous faudra, dans le cadre des travaux de convergence entre les référentiels comptables international et américain, être particulièrement vigilants sur ce point. Mieux vaut l’absence de convergence qu’une convergence néfaste. 2.3. Le troisième axe de travail que j’évoquerai aujourd’hui est celui du renforcement des pratiques de gouvernance.

La seconde table ronde abordera ce thème. Le financement de l’économie n’est efficace que si les entreprises sont correctement gérées, évaluent de façon adéquate les risques qu’elles prennent ou que prennent leurs salariés pour leur compte. Durant la crise, les dispositifs de gouvernance ont montré leurs limites. Ainsi, les organes de gouvernance de certains établissements bancaires n’ont pas su gérer leurs risques de façon adéquate ou limiter les incitations à la prise de risque des structures de rémunération. Les pouvoirs publics ont dû intervenir pour encadrer les rémunérations des opérateurs de marché. La crise financière a d’une certaine façon favorisé la participation des autorités publiques aux débats sur la gouvernance et légitimé la fixation de nouvelles normes, qui ne se limiteront pas aux seuls établissements bancaires. La Commission européenne a également apporté sa pierre à l’é difice via ses récents livres verts sur la gouvernance des établissements de crédit et des sociétés cotées, propositions qui seront sans doute évoquées dans la matinée. L’existence de principes de gouvernance adaptés apparaît de plus en plus comme un élément clef de la solidité des acteurs régulés. C’est le cas notamment pour les agences de

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Vie du chiffre notation où les règlements européens encadrent la composition des conseils, la compétence des administrateurs, ou leur indépendance. Dans les sociétés cotées, la gouvernance devient un outil essentiel de contrôle des risques,

refondation de la régulation des marchés. Il nous faudra créer un ensemble de règles favorable au financement des entreprises. La diversité d’horizon des participants à nos tables rondes nous permettra, j’en suis persuadé, de couvrir ces sujets sous tous leurs angles.

Assurer le bon financement de l’économie demande beaucoup plus que la seule refondation de la régulation des marchés. Il nous faudra créer un ensemble de règles favorable au financement des Jean-Pierre Jouyet entreprises.

comme le montrent les travaux menés par le groupe de travail d’Olivier Poupart-Lafarge sur le fonctionnement des comités d’audit. La qualité de la gouvernance devient, en partie pour cette raison, un critère de plus en plus important aux yeux des investisseurs. Une meilleure gouvernance est le corollaire indispensable du retour à la confiance. Vous le voyez, assurer le bon financement de l’économie demande beaucoup plus que la seule

Pour conclure, il est certain que nos efforts ne doivent pas être relâchés aussi longtemps qu’ils n’auront pas été couronnés de succès. Cette détermination a parfois été un peu perdue de vue, lorsqu’une embellie passagère a fait croire que la crise était derrière nous. Pour ma part, je suis optimiste sur notre capacité à mener à bien ces chantiers de régulation financière. La principale raison de mon optimisme, c’est la réappropriation de ce thème par la sphère politique et publique. Depuis mon

arrivée dans ces fonctions, j’ai pu mesurer le chemin parcouru. En 2007, la finance était un métier de spécialistes et de techniciens. Depuis 4 ans, ces spécialistes ont été convoqués devant les commissions parlementaires, devant les journalistes. Lorsque vous ouvrez un journal, c’est pour voir exposés les projets de réforme de la Directive sur les Marchés Financiers sur une double page, ce qui aurait été impensable il y a quelques années. Les gouvernements et parlementaires, nationaux ou européens, ont ouvert le capot de la voiture, et ils ne pourront pas le refermer tant que le moteur ne fonctionnera pas correctement. Ils en ont reçu le mandat de nos opinions publiques, qui ne se satisferont pas de promesses en la matière. Nous avons désormais une obligation de résultat et non de moyens. Enfin, nous avons surtout une obligation de diligence, compte tenu de l’urgence de la situation. La course contre la montre engagée entre les autorités publiques et les marchés doit nous pousser à faire aboutir le plus rapidement ces réformes indispensables au bon fonctionnement des marchés et au financement de nos économies. 2011-660

Décoration

Denise René, Officier de la Légion d’Honneur Paris - 18 octobre 2011 rédéric Mitterrand, Ministre de la Culture et de la Communication, a remis, mardi 18 octobre 2011, les insignes d’Officier dans l’Ordre de la Légion d’Honneur à Denise René. De prestigieuses personnalités se sont rassemblées au 3, rue de Valois pour féliciter la récipiendaire et lui témoigner leur profonde admiration. Cette femme, véritable pionnière de l’abstrait fut la grande galeriste de l’art contemporain reconnue au plan national et international. Généreuse et exigeante, la carrière de Denise René reflète son goût pour l’art abstrait géométrique et cinétique. Sa vision internationale de l’art est à l’image de sa personnalité et de sa passion pour relever les défis auxquels le monde de l’art est confronté. Denise René a ainsi contribué au prestige de la France et nous lui adressons nos chaleureuses félicitations. A la suite de cette cérémonie, Frédéric Mitterrand a inauguré in situ la commande publique “Carré aux seize disques” réalisée par Felice Varini.

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

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Jean-René Tancrède

Denise René et Frédéric Mitterrand Les Annonces de la Seine - Lundi 12 décembre 2011 - numéro 70

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Jurisprudence

Loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles Conseil constitutionnel - 8 décembre 2011 - décision n°2011-641 DC Le Conseil constitutionnel a jugé que l'article 27 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles, qui a pour objet principal d'étendre la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) à divers délits conforme à la Constitution. En revanche, il a censuré plusieurs dispositions ne présentant pas de lien avec le projet de loi initial : les articles 17 (acte de naissance), 18 (détermination de la mairie compétente pour célébrer un mariage), 37 (inscription sur la liste des experts), 54 (obligation pour les sociétés d'établir des comptes consolidés), 57 (prérogatives de certains agents des douanes) et 71 (réforme du Code de la consommation par ordonnances). Le Conseil constitutionnel 1. Considérant que les requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles ; qu'ils estiment que les dispositions des articles 38 à 46 n'ont pas leur place dans cette loi et qu'en tout état de cause les articles 39 et 46 sont contraires à l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; qu'ils contestent également la conformité à la Constitution de l'article 27 de la loi ; - Sur les articles 38 à 46 de la loi : . En ce qui concerne la place des articles 38 à 46 dans la loi déférée : 2. Considérant qu'aux termes de la seconde phrase du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis » ; 3. Considérant que le projet de loi comportait vingt-sept articles lors de son dépôt sur le bureau du Sénat, première assemblée saisie ; que les dispositions de ses chapitres Ier, III, IV et VII sont relatives à l'organisation et à la spécialisation de certaines juridictions ; que celles de son chapitre V portent transfert et répartition de compétences entre juridictions ; que celles de ses chapitres II, VI et VIII modifient diverses procédures juridictionnelles ; que son chapitre IX procède, « en matière militaire », à des aménagements de compétences juridictionnelles ainsi qu'à des modifications de procédure et apporte des précisions sur le régime de certaines sanctions ; que son chapitre X, d'une part, habilite le Gouvernement à actualiser par ordonnance les dispositions législatives relatives au droit pénal et disciplinaire de la marine marchande et notamment celles relatives aux tribunaux maritimes commerciaux, et, d'autre part, fixe les conditions d'entrée en vigueur de la loi ; 4. Considérant que les articles 38 à 46 ont été introduits à l'Assemblée nationale en première lecture ; qu'ils portent diverses dispositions relatives à l'organisation et aux compétences des juridictions financières, ainsi qu'aux procédures applicables devant elles ; qu'ainsi, ils présentent un lien avec le projet de loi initial ; qu'ils ont été adoptés selon une procédure conforme à la Constitution ; . En ce qui concerne les articles 39 et 46 : 5. Considérant que l'article 39 de la loi déférée, qui donne une nouvelle rédaction de l'article L.211-2 du Code des juridictions financières, a pour objet d'étendre le champ des organismes soumis au régime de l'apurement administratif de leurs comptes ; qu'en particulier, l'apurement administratif est étendu, à compter de 2013, aux comptes des communes dont la population est comprise entre 3 500 et 5 000 habitants ou dont le montant des recettes ordinaires figurant au dernier compte administratif est inférieur à un million d'euros pour l'exercice 2012 et trois millions d'euros pour les exercices ultérieurs ; que la même procédure est étendue aux comptes des établissements publics de coopération intercommunale dont la population est comprise entre 3 500 et 5 000 habitants pour

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l'exercice 2012 et 10 000 habitants pour les exercices ultérieurs et dont le montant des recettes ordinaires est inférieur à deux millions d'euros pour l'exercice 2012 et cinq millions pour les exercices ultérieurs ; 6. Considérant que l'article 46 de la loi déférée donne une nouvelle rédaction de l'article L.212-1 du même code ; que le premier alinéa de cet article limite à vingt le nombre des chambres régionales des comptes et renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer leur siège et leur ressort ; 7. Considérant que, selon les requérants, le relèvement des seuils permettant l'apurement administratif des comptes et la diminution du nombre de chambres régionales des comptes aboutiront à une atténuation significative du contrôle de celles-ci sur les comptes publics des collectivités territoriales et des organes qui en émanent ; que les citoyens seraient ainsi privés de leur droit fondamental de demander des comptes aux agents publics en méconnaissance de l'article 15 de la Déclaration de 1789 ; qu'en outre, le législateur serait resté en deçà de sa compétence en renvoyant au Gouvernement le soin de fixer le nombre minimal de chambres régionales des comptes ; 8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 15 de la Déclaration de 1789 : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration » ; qu'en transférant, des chambres régionales des comptes aux autorités administratives de l'Etat, la compétence pour l'apurement de certains comptes publics, le législateur n'a pas méconnu cette disposition ; 9. Considérant, en second lieu, que, si l'article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer « les règles concernant la création de nouveaux ordres de juridiction », la détermination du nombre, du siège et du ressort de chacune des juridictions créées dans le cadre des principes définis par la loi, est de la compétence réglementaire ; que, par suite, en renvoyant au décret le soin de déterminer le nombre de chambres régionales des comptes, le législateur n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence ; 10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les articles 39 et 46 de la loi déférée sont conformes à la Constitution ; - Sur l’article 27 de la loi : 11. Considérant que l'article 27 de la loi déférée apporte deux modifications à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ; que, d'une part, le 1° de cet article permet le recours à cette procédure à l'issue d'une instruction préparatoire ; qu'à cette fin, il insère, dans le Code de procédure pénale, un article 180-1 dont le premier alinéa dispose : « Si le juge d'instruction estime que les faits constituent un délit, que la personne mise en examen reconnaît les faits et qu'elle accepte la qualification pénale retenue, il peut, à la demande ou avec l'accord du procureur de la République, du mis en examen et de la partie civile, prononcer par ordonnance le renvoi de l'affaire au procureur de la République aux fins de mise en œuvre d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité conformément à la section 8 du chapitre Ier du titre II du livre II » ; que, d'autre part, le 2° de l'article 27, qui modifie l'article 495-7 du même code, étend la possibilité de recourir à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité à « tous les délits, à l'exception de

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Jurisprudence ceux mentionnés à l'article 495-16 et des délits d'atteintes volontaires et involontaires à l'intégrité des personnes et d'agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du Code pénal lorsqu'ils sont punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à cinq ans » ; 12. Considérant que, selon les requérants, en étendant la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité à tous les délits quelle que soit la peine encourue, alors que cette procédure ne peut conduire à une peine d'emprisonnement supérieure à un an, les dispositions de l'article 27 instituent une procédure manifestement inappropriée au but poursuivi ; qu'en outre, cette extension et la possibilité de recourir à cette procédure à l'issue d'une instruction méconnaîtraient tant la compétence de l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, que l'exigence de publicité des débats ; qu'en particulier, elles porteraient atteinte à « l'intérêt de la société à connaître non seulement des peines prononcées mais aussi des circonstances qui ont conduit à ce prononcé » ; 13. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant la procédure pénale » ; qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine qui lui est réservé par la Constitution, d'adopter, pour la réalisation ou la conciliation d'objectifs de nature constitutionnelle, des modalités nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité, dès lors que, dans l'exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ; 14. Considérant, d'une part, qu'il résulte de la combinaison des articles 6, 8, 9 et 16 de la Déclaration de 1789 que le jugement d'une affaire pénale pouvant conduire à une privation de liberté doit, sauf circonstances particulières nécessitant le huis clos, faire l'objet d'une audience publique ; que, d'autre part, l'article 66 de la Constitution confie à l'autorité judiciaire la protection de la liberté individuelle ; 15. Considérant que la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité a été introduite dans le Code de procédure pénale par l'article 137 de la loi du 9 mars 2004 susvisée ; qu'elle constitue une procédure particulière de jugement de certains délits ; qu'elle est mise en œuvre par le procureur de la République, d'office ou à la demande de l'intéressé ou de son avocat, lorsque la personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés ; que, lorsque cette personne accepte, en présence de son avocat, les peines que le procureur de la République lui propose d'exécuter, le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui est saisi d'une requête en homologation de ces peines ; que la personne est alors présentée devant ce magistrat, qui, après l'avoir entendue, ainsi que son avocat, et après avoir vérifié la réalité des faits et leur qualification juridique, se prononce sur la requête en homologation ; 16. Considérant que, comme le Conseil constitutionnel l'a jugé au considérant 107 de sa décision du 2 mars 2004 susvisée, si la peine est

NOTE ans sa décision n°2011-641 DC du 8 décembre 2011, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles dont il avait été saisi par plus de soixante sénateurs. En premier lieu, les requérants estimaient que les articles 38 à 46 de la loi relatifs à l'organisation et aux compétences des juridictions financières, ainsi qu'aux procédures applicables devant elles, n'avaient pas de lien avec le projet de loi initial et devaient donc être censurés comme étant des « cavaliers législatifs ». Le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions avaient un lien direct avec les dispositions initiales du projet de loi relatif à l'organisation,

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aux compétences et aux procédures juridictionnelles. Il a également jugé que les articles 39 et 46, relatifs aux pouvoirs et au nombre des chambres régionales des comptes, contestés sur le fond par les requérants, sont conformes à la Constitution. En deuxième lieu, les requérants contestaient l'article 27 de la loi qui a pour objet principal d'étendre la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) à divers délits. Cependant, la procédure de la CRPC demeure inchangée par rapport à celle que, dans sa décision du 2 mars 2004, le Conseil constitutionnel a jugée conforme à la Constitution avec une réserve d'interprétation qui préserve la compétence du président du tribunal de grande

instance pour apprécier s'il y a lieu ou non d'homologuer la procédure. Sous la même réserve, le Conseil constitutionnel a donc jugé l'article 27 de la loi déférée conforme à la Constitution. En troisième lieu, conformément à sa jurisprudence constante, le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions qui, faute de lien avec le projet de loi initial, n'ont pas leur place dans la loi déférée. Il a, à ce titre, censuré les articles 17 (acte de naissance), 18 (détermination de la mairie compétente pour célébrer un mariage), 37 (inscription sur la liste des experts), 54 (obligation pour les sociétés d'établir des comptes consolidés), 57 (prérogatives de certains agents des douanes) et 71 (réforme du Code de la consommation par ordonnances).

proposée par le parquet et acceptée par l'intéressé, seul le président du tribunal de grande instance peut homologuer cette proposition ; qu'il lui appartient à cet effet de vérifier la qualification juridique des faits et de s'interroger sur la justification de la peine au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ; qu'il peut refuser l'homologation s'il estime que la nature des faits, la personnalité de l'intéressé, la situation de la victime ou les intérêts de la société justifient une audience correctionnelle ordinaire ; qu'il ressort de l'économie générale des dispositions du Code de procédure pénale relatives à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité que le président du tribunal de grande instance peut également refuser d'homologuer la peine proposée si les déclarations de la victime apportent un éclairage nouveau sur les conditions dans lesquelles l'infraction a été commise ou sur la personnalité de son auteur ; que, sous cette réserve, le Conseil constitutionnel a déclaré que la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ne porte pas atteinte au principe de séparation des autorités chargées de l'action publique et des autorités de jugement ; 17. Considérant que, sous la même réserve, les dispositions contestées, qui étendent le recours à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité sans modifier les articles 495-8 et suivants du Code de procédure pénale relatifs à cette procédure, ne méconnaissent pas l'article 66 de la Constitution ; 18. Considérant qu'il ressort du second alinéa de l'article 495-9 du Code de procédure pénale que la procédure d'homologation « se déroule en audience publique » ; qu'il appartient au président du tribunal de grande instance ou au juge du siège délégué par lui de veiller à l'effectivité de cette garantie ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe de publicité des débats manque en fait ; 19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sous la réserve énoncée au considérant 16, les dispositions de l'article 27 de la loi déférée sont conformes à la Constitution ; - Sur la place d’autres dispositions dans la loi déférée : 20. Considérant que l'article 17 de la loi déférée, qui modifie l'article 58 du Code civil, supprime la référence à l'acte de naissance provisoire en cas d'accouchement secret ; que l'article 18, qui modifie l'article 74 du même code, assouplit les règles relatives à la détermination de la mairie compétente pour célébrer un mariage ; 21. Considérant que l'article 37, qui modifie l'article 2 de la loi du 29 juin 1971 susvisée, impose la motivation des refus d'inscription initiale d'un expert judiciaire sur une liste de cour d'appel et sur la liste nationale ; 22. Considérant que l'article 54, qui insère dans le Code de commerce un article L.233-17-1, exempte certaines sociétés commerciales de l'obligation d'établir des comptes consolidés ; 23. Considérant que l'article 57, qui modifie les articles 28-1 et 28-2 du Code de procédure pénale, porte sur les prérogatives et obligations de certains agents des douanes et des services fiscaux ; 24. Considérant que l'article 71 habilite le Gouvernement à refondre le Code de la consommation par voie d'ordonnances ; 25. Considérant que ces dispositions, insérées en première lecture, ne présentent pas de lien avec les dispositions du projet de loi initial ; qu'elles ont donc été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution ; que, dès lors, les articles 17, 18, 37, 54, 57 et 71 doivent être déclarés contraires à cette dernière ; 26. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution, Décide : Article 1er.- Les articles 17, 18, 37, 54, 57 et 71 de la loi relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles sont déclarés contraires à la Constitution. Article 2.- Sous la réserve énoncée au considérant 16, l'article 27 de la même loi est déclaré conforme à la Constitution. Article 3.- Les articles 39 et 46 de la même loi sont déclarés conformes à la Constitution. Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 décembre 2011, où siégeaient : Jean-Louis Debré, Président, Jacques Barrot, Guy Canivet, Michel Charasse, Renaud Denoix de Saint Marc, Valéry Giscard d'Estaing, Jacqueline de Guillenchmidt, Hubert Haenel et Pierre Steinmetz. 2011-662

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Vie du droit

Confédération Nationale des Avocats Internet, réseaux sociaux et communication de l’avocat Paris - 24 octobre 2011 Lundi 24 octobre dernier, le premier syndicat historique des avocats, la CNA section Paris a organisé un petit déjeuner à la Maison du Barreau sur le thème de l’« Internet, les réseaux sociaux et la communication de l’avocat » sous la présidence de Madame le Bâtonnier désigné du Barreau de Paris, Christiane Féral-Schuhl. Les avocats tant du Barreau de Paris que des autres Barreaux étaient nombreux ce matin-là pour échanger sur ce sujet d’actualité qui les préoccupe d’autant plus qu’il n’existe pas réellement de règles spécifiques s’appliquant pour la communication des avocats sur le Web. Jean-René Tancrède

omment s’y retrouver sur la toile ? Comment communiquer ? Combien une communication sur le Web coûte ? Et surtout comment établir une stratégie de communication en respectant les règles déontologiques ? Toutes ces questions ont été soulevées dans les propos introductifs du président de la CNA, section Paris, Vincent Lejeune, qui était le médiateur de ce petit déjeuner réussi. Il a souhaité faire intervenir tout d’abord, Anne-Katel Martineau, avocate intervenant en droit des technologies de l’information et de la communication, afin de faire un retour d’expérience de sa stratégie de communication mise en place lors de son installation fin 2007. Anne-Katel Martineau a démontré la nécessité d’être présent sur Internet mais de garder à l’esprit la nécessité de préserver son eréputation en faisant, d’une part, le choix des contenus et, d’autre part, en ne mélangeant pas sa vie privée et sa vie professionnelle surtout sur les réseaux sociaux où la tentation peut être grande. La diffusion d’informations et d’images privées sur un profil ou un réseau peut avoir des conséquences désastreuses. Si l’homme d’affaires américain Warren Buffett disait « Il faut 20 ans pour construire une réputation, 5 minutes pour la détruire », elle ajoute « et seulement 5 secondes sur Internet ». Les relais humains communiquent très vite sur Internet et on ne peut tout maîtriser même si le référencement peut aider à noyer certaines informations sans pour autant les faire disparaître. Anne-Katel Martineau a mis en avant le fait qu’une telle communication peut sembler chronophage pour certains avocats et que d’autres pourraient ne pas avoir envie de s’y atteler. C’est pourquoi, elle a choisi de faire intervenir un community manager, Bruno

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Fridlansky, co-fondateur de la société Up2Social, afin d’illustrer ce qu’il est possible de faire pour améliorer sa communication sur Internet. Les avocats souhaitant externaliser leur stratégie de communication ou former en interne ceux qui souhaiteraient communiquer plus régulièrement sur Internet peuvent s’adresser à ces professionnels. Ensuite, Heidi Rançon Cavenel, ancien membre du Conseil de l’Ordre et première viceprésidente de la CNA est intervenue sur les

questions du respect de la déontologie et des principes essentiels qui se posent particulièrement sur Internet en commençant par rappeler bien entendu le serment de l’avocat qui doit s’appliquer 24h/24 et 7 jours/7. Heidi Rançon Cavenel a notamment insisté sur le fait que le droit à l’oubli n’existe pas sur Internet, les propos diffusés peuvent être repris à tout moment et ressortir sur les moteurs de recherches, une vigilance de chaque instant s’impose donc. Comme elle le soulignait très justement « Internet et les réseaux sociaux peuvent être à la fois des inventions diaboliques et magnifiques. Ils doivent nous inciter à la plus grande prudence ». Elle a enfin rappelé les règles de publicité et de démarchage, ce dernier étant bien évidemment prohibé.

Puis, Maxime Lambert, de la société SITEO, a pris la parole pour expliquer son travail accompli en partenariat avec la CNA en créant notamment son site Internet. Monsieur Vincent Berthat, président de la CNA, nous a fait part quant à lui de son retour d’expérience concernant l’utilisation des nouvelles technologies au service des combats syndicaux. Ce dernier en a profité pour dire quelques mots de la campagne de la CNA au CNB et en a rappelé les thèmes de campagne : - Gouvernance : referendum d’initiative professionnelle et maintien des Ordres ; - Refus d’un statut de l’avocat salarié en entreprise ; - Défense de l’honoraire libre et modernisation de la répétibilité. Madame le Bâtonnier désigné, Christiane Féral-Schuhl, pionnière en droit des nouvelles technologies et auteur d’un ouvrage de référence en la matière Cyberdroit a clôturé les interventions en attirant particulièrement l’attention sur l’usage des réseaux sociaux par les avocats. Elle pense qu’il est évidemment nécessaire de communiquer sur Internet mais plus que jamais dans le respect des règles fondamentales qui régissent la profession d’avocat. De nombreuses questions ont été posées à l’issue de cette présentation. Les échanges entre les intervenants et la salle auraient pu se poursuivre si le temps ne nous avait pas obligé à clôturer le débat. Le sujet est inépuisable et fera sans doute l’objet d’autres rencontres. En attendant, la CNA section Paris mettra à disposition un livre blanc faisant la synthèse de l’intervention et développant les questions survolées compte tenu de la contrainte temporelle. Le livre blanc sera téléchargeable sur le site Internet de la CNA : http://www.cnaavocats.fr/, début novembre. 2011-663

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Chambre des Commissaires-Priseurs Judiciaires de Paris Session 2011/2012

a Chambre des CommissairesPriseurs Judiciaires de Paris vient de désigner son Bureau, ainsi composé pour la session 2011/2012 : Maître Marielle Digard, président, Ghislaine Kapandji, syndic, Maître David Kahn, rapporteur, Maître Jean-Jacques Poëtte, secrétaire, Maître Olivier Lasseron, trésorier. Deux femmes ont été élues par leurs pairs pour occuper les fonctions de président et syndic, une première à la

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Compagnie des commissaires-priseurs judiciaires de Paris. Maître Marielle Digard a été nommée commissaire-priseur judiciaire à Paris en 2001, après avoir exercé pendant 10 ans sa profession à Saint-Germainen-Laye. Elle dirige par ailleurs une société de ventes volontaires qui organise de nombreuses ventes à Drouot. Membre de la Chambre des commissaires-priseurs judiciaires de Paris depuis 2006, elle y a très vite pris d’im-

portantes responsabilités occupant successivement les fonctions de trésorier puis de syndic. Maître Ghislaine Kapandji a créé en 2004 la société de ventes volontaires Kapandji-Morhange. Elle a été nommée commissaire-priseur judiciaire à Paris en 2008, après avoir assuré la suppléance de son office pendant 3 ans. Dès 2009 elle entre à la Chambre des commissaires-priseurs judiciaires de Paris, occupant le poste

de Rapporteur pour la session 2010/2011. Elle vient d’être désignée syndic. Marielle Digard se réjouit que deux femmes et un bureau jeune et dynamique viennent donner un nouvel élan à la représentation de cette profession inconditionnellement liée au droit de la famille des Français.

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Société de Législation Comparée Journée d’étude « Théorie et pratiques du référendum » Conseil d’Etat, Paris - 4 novembre 2011

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Le Groupe « Droit constitutionnel » de la Société de Législation Comparée, animé par Philippe Lauvaux, Professeur à l’université Panthéon-Assas Paris II et à l’Université libre de Bruxelles et par Jean Massot, Président de section honoraire au conseil d’Etat, a organisé le vendredi 4 novembre 2011, en partenariat avec le Centre d’études constitutionnelles et politiques de l’Université PanthéonAsssas Paris II et l’Institut Cujas, dans la salle d’assemblée générale du Conseil d’Etat et avec également le soutien du Conseil constitutionnel, une journée d’étude consacrée à la théorie et à la pratique du référendum. Jean-René Tancrède

Francis Hamon, Jean-Marie Denquin, Philippe Lauvaux, Marc Guillaume et Denys de Béchillon e Vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé, dans une introduction remarquée, a posé clairement le problème de la réconciliation entre les conceptions de la démocratie représentative selon Montesquieu et de la démocratie directe selon Rousseau. Sans méconnaître le caractère démocratique de la consultation du peuple, il a aussi souligné la nécessité d’en encadrer l ‘exercice pour en éviter les dérives hier plébiscitaires et aujourd’hui populistes. En ouvrant la séance du matin, Jacques Massot a rappelé que le choix de ce thème avait été dicté, il y a quelques mois, par la perspective de la mise en place en France de la nouvelle procédure prévue par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Tout laissait espérer, à l’époque, que la loi organique nécessaire à la mise en œuvre du referendum sur l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales, aurait été adoptée et que la comparaison avec des expériences étrangères prendrait tout son sens. Si cela n’a finalement pas été le cas, puisque le texte est encore en première lecture à l’assemblée nationale, un autre événement est venu donner au sujet une actualité brûlante,

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c’est évidemment le projet avorté du gouvernement grec de recourir au referendum sur la crise monétaire. L’intérêt pour les solutions adoptées dans d’autres pays demeure entier. La première demi-journée a donc été consacrée à trois expériences étrangères, en premier lieu celle fort ancienne de la Suisse, présentée par Denis Giraux, maître de conférences à l’Université Panthéon-Assas Paris II, puis celle des Länder allemands par Stéphane Schott, maître de conférences à l’Université de CergyPontoise et enfin celle des États fédérés des Etats-Unis par Gwénaële Calvès, professeur dans la même université. Sans pouvoir résumer ici ces interventions très riches, on peut relever que, dans ces trois pays, l’usage très répandu du referendum d’initiative populaire prend des formes diverses selon qu’il peut ou non se combiner avec une intervention parlementaire, selon qu’il porte sur une proposition de loi ordinaire ou de révision constitutionnelle à l’échelon d’un Canton, d’un Land ou d’un Etat fédéré, selon enfin que le recours au vote électronique est autorisé ou non. Dans tous les cas se pose le problème du contrôle de la sincérité des signatures. L’après-midi a été consacrée aux aspects français de la question. D’une part, le professeur Jean-Marie Denquin (Université de Paris Ouest Nanterre La

Défense) a analysé l’esprit des referendums sous la Vème République du double point de vue de leur origine « génétique » dans la pensée du Général de Gaulle et de leur usage conjoncturel sous les présidents successifs, usages algériens, constituants, européens et néo-calédonien. D’autre part, le Professeur Francis Hamon, professeur émérite de l’Université Paris Sud 11, a déploré le caractère inachevé du statut du referendum sous la Vème République, en l’absence de textes permanents de niveau législatif. Le Professeur Denys de Béchillon, professeur à l’Université de Pau, a donné des informations de première main sur la genèse complexe de la réforme de 2008. Enfin, Marc Guillaume, Secrétaire Général du Conseil constitutionnel, a analysé les problèmes qui devraient être résolus par la loi organique en cours de discussion, notamment quant au contrôle nouveau exercé par le Conseil constitutionnel. Au total, cette journée qui a réuni un auditoire de plus de soixante personnes a été très enrichissante pour les participants comme l’a montré une discussion animée avec la salle. Les actes complets seront prochainement publiés par la Société de Législation Comparée.

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