LES
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AFRIQUE MAGAZINE
SÉRIES JANVIER 2019
CÔTE D'IVOIRE
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JANVIER
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C’EST DE A LE FUTUR
MAGAZINE
Élections, émergence, croissance, jeunesse, changements : cap sur 2020 et après !
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AFRIQUE
POUVOIR Les années ADO et les enjeux d'un scrutin annoncé START-UP NATION Comment le digital est en train de transformer le pays BUSINESS À la rencontre des nouveaux entrepreneurs SOCIAL L'inclusivité, un défi national
LES INTERVIEWS EXCLUSIVES DE www.afriquemagazine.com
◗ SIDI TIÉMOKO TOURÉ ◗ MARIE-LAURE
AKIN-OLUGBADE ◗ JOBST VON KIRCHMANN ◗ SALIMOU BAMBA ◗ MARIAM SY DIAWARA ◗ ASSITA KONE M 05529 - 11H - F: 5,90 E - RD
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ÉDITO
PAR zyad limam
MARCHE AVANT
À
Abidjan, et un peu partout dans le pays, on ne parle que de cela. De l’élection présidentielle d’octobre 2020. De la création du parti unifié Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), voulu par le président Alassane Ouattara. De la rupture de l’alliance avec l’historique Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et son chef Henri Konan Bédié, tenté semble-t-il par un hypothétique come-back, malgré ses 84 ans. Des possibilités d’un retour sur la scène quasi magique de Laurent Gbagbo. Des calculs habiles (trop habiles ?) de Guillaume Soro, jeune loup éternel de la politique ivoirienne. De la décision que doit prendre le président lui-même, des manœuvres des uns et des autres au sein du pouvoir ou dans les oppositions en mutation, pour se hisser, se rapprocher de ce fauteuil tant désiré. L’ambiance en ces premiers jours de 2019 est particulière : il y a du dynamisme, du changement positif, de la foi dans l’avenir. Ça vibre, ça bouillonne sur les bords de lagune, entre les tours rénovées et orgueilleuses d’Abidjan, la smart city ouverte sur le monde. Pourtant, l’anxiété est là avec le retour des divisions et des calculs au sommet de la classe politique, la rupture de l’alliance qui gouverne depuis dix ans. Avec cette sensation de revivre une même histoire, le même affrontement entre des personnalités qui occupent le devant de la scène depuis des décennies. Et puis, la mémoire d’un passé récent est encore vive, les tragédies de la quasiguerre civile et de la crise électorale de 2010-2011 ne sont pas si loin. La réconciliation nationale si durement gagnée, si fragile, paraît à nouveau frontalement menacée. Pourtant, rien n’est écrit d’avance. Le scénario du pire, dans lequel on se complaît assez facilement dans les dîners mondains de la capitale économique, n’est pas une fatalité. Après tout, tout cela est un peu normal. Difficile de se dire qu’une échéance majeure n’ira pas sans contradictions, sans tensions, sans compétitions. Certains se voient
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président depuis longtemps. D’autres rêvent de revanche historique. Des plus jeunes espèrent incarner une rupture générationnelle. C’est classique, propre à la vie politique d’un pays en évolution, d’une démocratie qui s’installe petit à petit. Et c’est aussi ce que les citoyens veulent : une élection, une compétition, avoir le droit de s’exprimer et de choisir. Il est aussi peut-être prématuré d’évaluer les futures forces en présence. L’élection est dans dix-huit mois, la politique permet tous les arrangements jusqu’à la dernière minute… Le président Alassane Dramane Ouattara garde ses options ouvertes. Et les cartes en mains. Il a appelé à un passage de flambeau, mais ne se décidera vraiment et visiblement qu’en fonction des événements. L’équipe qui l’entoure reste soudée. Le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, l’homme clé, l’homme de confiance, celui qui pourrait évidemment incarner une relève, tient fermement la barre du gouvernement, concentré sur les impératifs, sur la finalisation des chantiers de l’émergence. Le ministre d’État Hamed Bakayoko gère le champ militaire. Le ministre des Affaires présidentielles Birahima Téné Ouattara seconde activement son frère. En clair, la question de la succession dans le camp présidentiel n’est pas encore d’actualité, même si certains sont scrutés de près comme des « options ». La politique est rude, mais on sent aussi que la Côte d’Ivoire a passé un véritable cap, que la grande majorité de ses citoyens est soucieuse avant tout d’unité, de stabilité et de développement. Le corps social paraît plus structuré, mieux préparé pour affronter relativement sereinement une échéance politique majeure, avec une véritable compétition politique. 2020, c’est une élection, mais c’est surtout une véritable étape historique. Un test de maturité et d’évolution démocratique dans un pays qui, en dix ans, a profondément changé.
La politique est rude, mais on sent que le pays a passé un cap.
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ÉDITO Chacun peut avoir sa propre opinion politique, mais les années ADO ont dopé « l’Éléphant ivoirien ». Deux décades de recul, de stagnation, de confusion (1990-2010) ont été inversées. Le discours sur l’émergence, certes optimiste, n’est pas un simple argument de communication. La croissance est de retour, basée sur une ambitieuse politique d’investissements publics dans les infrastructures et la relance de secteurs stratégiques, comme l’agriculture. Des paliers de performance ont été atteints. La reconnaissance internationale a suivi, avec les grandes institutions financières, les investisseurs et les prêteurs, l’appui de la Banque mondiale, de la Banque africaine de développement (BAD) ou de l’Union européenne. Évidemment, les défis sont toujours là, multiples, inhérents à toute économie en voie de développement. Le monde rural reste bien loin, très loin des tours d’Abidjan. L’urgence sociale demeure. La véritable émergence aura besoin d’entreprises compétitives et ambitieuses pour prendre le relais. Malgré les investissements dans la santé et l’éducation, l’État a besoin d’une mise à niveau permanente. Et la lutte pour plus de transparence, contre la corruption, reste une priorité, même si la Côte d’Ivoire progresse. Dans le récent classement de l’Indice Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG), le pays grimpe de la 41e à la 22e place. Les années ADO, c’est aussi et surtout les années d’une sortie de crise nationale profonde. Le pays est engagé dans un processus complexe de construction et de reconstruction d’une identité ivoirienne à la fois multiple et forte. On peut discuter sur les conditions de la réconciliation, sur le chemin qui reste à parcourir. Mais les dures leçons de l’histoire, les drames ont transformé les Ivoiriens. Ils savent que l’unité est la seule option raisonnable d’avenir. C’est sur le terrain que le projet d’un parti unifié, le RHDP, peut réellement s’ancrer. Un parti qui, comme son nom l’indique, veut mobiliser plus largement que le Rassemblement des républicains (RDR). La rupture avec un PDCI soucieux de sa base, de son « historicité » montre que rien n’est gagné. Pourtant, au-delà de la mise en place d’une machine électorale, il y a bien dans le projet RHDP une proposition de reconfiguration séduisante du spectre politique, avec de nouveaux paradigmes. Un parti neuf qui incarnerait avant tout l’unité du pays, dans sa diversité, qui couperait à travers les fidélités, les raideurs ethniques et régionales traditionnelles qui paralysent la vie politique de la plupart
Le Président Alassane Ouattara et le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly au palais, en janvier 2017.
des pays africains. Un parti qui serait une sorte de maison commune pour ceux qui veulent avant tout, et au-delà de leurs différences, privilégier le progrès, la croissance, la bonne gouvernance. Tout le pari du Président Alassane Ouattara et de son Premier ministre Amadou Gon Coulibaly est là. Transcender les barrières, changer la donne politique. Il y a encore dix-huit mois pour poser des jalons suffisamment forts, affronter l’élection quelle que soit la « coalition » qui se présentera en face. Évidemment, le vieux monde fait la résistance. Les rapports de force ethno-régionaux imprègnent un terroir politique qui cherche à se structurer comme les quatre points cardinaux : le sud, le nord, l’ouest, l’est… Et c’est finalement plus simple de compter ses troupes, sans chercher à proposer un véritable projet de société, d’avenir. Mais là aussi, la croissance des années ADO a bousculé une fabrique identitaire et sociale longtemps figée. Sur le terrain, les choses évoluent. Les frontières intérieures s’affaiblissent petit à petit. Les gens bougent, sortent de leurs territoires habituels. Abidjan et les grandes villes sont des lieux de brassage et de mixité, d’une découverte relative de l’autre. Une petite classe moyenne, urbaine, émerge progressivement. Avec des préoccupations sociales affirmées, loin des vieilles lunes identitaires. L’État a réaffirmé sa présence dans le monde rural avec l’électrification des villages, l’alimentation en eau potable, la réhabilitation des grands axes… Il pose les jalons d’une structure d’aides et d’actions sociales. Et puis, il y a cette jeunesse qui sera au centre de tout. Ces enfants du siècle pour qui le référent historique et
Un parti neuf qui couperait à travers les fidélités, les raideurs ethniques et régionales traditionnelles.
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REUTERS/THIERRY GOUEGNON
l’houphouëtisme romantique sont un vague concept lointain. Les trois quarts des habitants ont moins de 35 ans. Beaucoup n’étaient que des enfants au moment de la fin de la présidence Gbagbo et de la crise électorale de 2010-2011. Cette jeunesse, connectée, perméable aux réseaux sociaux, cherche avant tout une éducation, des emplois, des perspectives. Elle est ouverte sur le monde, exigeante, elle voit ce qu’il se passe ailleurs. Elle cherche énergiquement, presque désespérément sa place dans l’émergence, dans le monde contemporain. « Ces électeurs de demain » sont comme beaucoup d’entre nous, attachés à leurs origines, à « leur village personnel », mais leurs motivations sont franchement pragmatiques : l’éducation, la formation, le travail, un logement accessible, plus de justice sociale, de la gouvernance, des opportunités… Les progrès d’un pays provoquent de nouvelles exigences de la part de citoyens plus autonomes et mieux informés.
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C’est le paradoxe de l’émergence. La Côte d’Ivoire avance vite, mais les paramètres sociaux (indice de pauvreté) restent toujours insuffisants par rapport au dynamisme de l’économie. Il faut faire entrer « l’autre » Côte d’Ivoire dans le progrès. Mobiliser les énergies sur les défis qui arrivent : changement climatique, développement durable, mutations technologiques… Sortir du sous-développement et de la précarité est un objectif long. Mettre en place des institutions démocratiques est une aventure collective difficile. L’objectif reste de maintenir, d’accroître, d’amplifier sur le long terme les politiques d’émergence. Et de privilégier les dirigeants et les dirigeantes, les femmes et les hommes qui auront une vision claire de l’avenir du pays, qui dépasseront l’évanescence des ambitions politiques. Et qui feront en sorte que ce nouveau miracle ivoirien perdure et soit accessible au plus grand nombre. ■ 5
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Marche avant
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par Zyad Limam
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par Ouakaltio Ouattara
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LES INTERVIEWS EXCLUSIVES DE Z SIDI TIÉMOKO TOURÉ Z MARIE-LAURE
INTERVIEWS 16
AKIN-OLUGBADE
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Z JOBST VON KIRCHMANN Z SALIMOU BAMBA Z MARIAM SY DIAWARA Z ASSITA KONE
MARIE-LAURE AKIN-OLUGBADE
« On peut parler de succès depuis la sortie de crise et la relance »
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POUR CONCLURE
Abidjan, c’est doux !
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JOBST VON KIRCHMANN
« Les défis ne se résument pas à l’élection présidentielle » 32
SIDI TIÉMOKO TOURÉ
« Nous sommes une nation jeune, avec de l’ambition et du talent » 38
SALIMOU BAMBA
« La croissance doit bénéficier à tous les citoyens »
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ANNONCEURS
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CIE p. 2 – Union européenne p. 8-9 – Groupe SNEDAI p. 22-23 – OCP p. 100. Un encart AM promo de 4 pages est inséré entre les pages 27 et 30.
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MARIAM SY DIAWARA
« Nous pouvons viser l’extraordinaire » ASSITA KONE
« Une destination idéale pour le bleisure »
p. 44 AFRIQUE MAGAZINE
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FONDÉ EN 1983 (35e ANNÉE) 31, RUE POUSSIN – 75016 PARIS – FRANCE Tél. : (33) 1 53 84 41 81 – fax : (33) 1 53 84 41 93 redaction@afriquemagazine.com
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Social : la nécessité d’inclure
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DÉVELOPPEMENT DURABLE
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ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO Lilia Ayari, Dounia Ben Mohamed, Alexandra Fisch, Annabelle Gasquez, Élise Lejeune, Issiaka N’Guessan, Ouakaltio Ouattara.
Agriculture : des villages connectés 50
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Transports : l’esprit 2020 56
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Carte blanche à… Édith Brou : l’Afrique sera numérique (ou ne sera pas !) INDUSTRIE
NABIL ZORKOT (2) - OLIVIER - NABIL ZORKOT (3)
Matières premières : la palme, toute une déclinaison ! 78
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Le made in Côte d’Ivoire sans complexe 88
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COMMUNICATION ET PUBLICITÉ Ensuite/AMC 31, rue Poussin - 75016 Paris Tél.: (33)153844181 – Fax: (33)153844193 GÉRANT Zyad Limam DIRECTRICE GÉNÉRALE ADJOINTE Emmanuelle Pontié regie@afriquemagazine.com CHARGÉE DE MISSION ET DÉVELOPPEMENT Élisabeth Remy AFRIQUE MAGAZINE EST UN MENSUEL ÉDITÉ PAR
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Banques : les classiques et les modernes 80
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Transformation numérique : le virage 3.0 est amorcé
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PERSPECTIVES
C’est déjà le futur 36
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TOURISME
Le Banco : la nature en ville AFRIQUE MAGAZINE
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31, rue Poussin - 75016 Paris PRÉSIDENT-DIRECTEUR GÉNÉRAL : Zyad Limam Compogravure : Open Graphic Média, Bagnolet. Imprimeur: Léonce Deprez, ZI, Secteur du Moulin, 62620 Ruitz.
Commission paritaire : 0219 D 85602 Dépôt légal : janvier 2019. La rédaction n’est pas responsable des textes et des photos reçus. Les indications de marque et les adresses figurant dans les pages rédactionnelles sont données à titre d’information, sans aucun but publicitaire. La reproduction, même partielle, des articles et illustrations pris dans Afrique magazine est strictement interdite, sauf accord de la rédaction. © Afrique magazine 2018.
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L’autonomisation des femmes et la création d’emplois, des priorités de l’Union européenne.
L’Union européenne et la Côte d’Ivoire : un partenariat durable Depuis 1961, l’Union européenne entretient des relations politiques et économiques privilégiées avec la République de Côte d’Ivoire. Seule partenaire du pays à être restée pendant la crise, très impliquée dans la relance du pays à partir de 2011, l’Union européenne a développé une relation solide avec la Côte d’Ivoire, qui se veut structurelle, permanente, et indépendante des changements et aléas politiques. Aujourd’hui, elle est un partenaire incontournable de la Côte d’Ivoire, qu’elle accompagne vers l’émergence. L’UNION EUROPÉENNE, PARTENAIRE POLITIQUE DE LA CÔTE D’IVOIRE Partenaire politique de la Côte d’Ivoire, l’Union européenne (UE) entretient un dialogue régulier avec le gouvernement sur les enjeux communs. La solidité de cette relation politique s’est notamment traduite par la tenue à Abidjan, fin 2017, du 5e Sommet Union africaine-Union européenne, organisé pour la première fois en Afrique
subsaharienne. Ayant réuni 83 chefs d’État et de gouvernement, ce sommet a marqué un tournant décisif dans le renforcement des liens politiques et économiques entre les deux continents. Il y a aussi des échanges fréquents entre les institutions de Côte d’Ivoire et celles de l’Union européenne, notamment entre le Parlement ivoirien et le Parlement européen, et entre le Conseil économique social, culturel et environnemental et le Comité économique et social européen.
L’UNION EUROPÉENNE, PARTENAIRE DU DÉVELOPPEMENT DE LA CÔTE D’IVOIRE Plus de la moitié de l’aide au développement internationale provient de l’Union européenne et de ses États membres, faisant de l’UE le premier donateur au monde et en Côte d’Ivoire. L’Union européenne soutient en particulier les efforts du pays en faveur de la création d’emplois et d’une
croissance inclusive. Pour la période 20162020, l’Union européenne intervient principalement dans les secteurs suivants, sélectionnés en accord avec le gouvernement ivoirien dans le cadre de son Plan national de développement :
Gouvernance, justice, société civile : L’Union européenne soutient les efforts du gouvernement ivoirien dans son action en faveur de la bonne gouvernance économique et de la justice. Elle va fortement s’engager en faveur de la modernisation de l’état civil. Elle appuie également la réforme des finances publiques et soutient la mise en place d’une approche budgétaire axée sur les résultats et le renforcement des statistiques économiques et sociales. La société civile bénéficie aussi d’un appui destiné à renforcer ses capacités, afin qu’elle puisse pleinement jouer son rôle d’acteur du développement.
Agriculture, sécurité alimentaire : Compte tenu de l’importance du secteur agricole en Côte d’Ivoire, l’Union européenne a orienté son soutien vers les filières de production de bananes, de coton, de sucre et de vivriers, en vue d’améliorer la compétitivité des agriculteurs ivoiriens. Grâce à cet appui européen, la production ivoirienne de bananes exportées a augmenté de 18 % de 2000 à 2014, faisant du pays le premier exportateur africain de ce produit. L’Union européenne contribue non seulement à améliorer la compétitivité de ces filières de production agricoles, mais également à sécuriser le foncier rural, un chantier crucial pour la modernisation de l’agriculture, l’investissement et la cohésion sociale dans le pays.
Infrastructures (transports, eau et assainissement, énergie) :
L’énergie représente l’un des trois principaux domaines de coopération de l’Union européenne avec la Côte d’Ivoire pour la période 2016-2020. Ainsi, l’Union européenne contribue à ce que le secteur énergétique ivoirien assure la sécurité énergétique du pays de manière durable, afin de fournir une énergie fiable et à moindre coût. Son intervention dans ce secteur consiste notamment à soutenir l’électrification rurale, afin de permettre à un plus grand nombre d’Ivoiriens d’avoir accès à l’électricité, et en un appui au secteur des énergies renouvelables, avec notamment sa contribution à la construction de la première centrale solaire à Boundiali. Outre ces principaux secteurs, l’Union européenne soutient la formation professionnelle et la création d’emplois, la croissance inclusive et la protection de l’environnement, autant de sujets prioritaires pour la Côte d’Ivoire, compte tenu de la jeunesse de sa population et des défis mondiaux actuels.
L’UNION EUROPÉENNE, PARTENAIRE COMMERCIAL DE LA CÔTE D’IVOIRE Premier partenaire commercial de la Côte d’Ivoire, l’Union européenne achète 40 % des exportations ivoiriennes et fournit 32,5 % des produits importés par le pays. Les principales filières d’exportation vers le marché européen, à savoir le cacao, la banane et le thon, créent environ 750 000 emplois directs. En attendant l’avancement des négociations sur l’Accord de partenariat économique au niveau régional, la Côte d’Ivoire a ratifié un Accord de partenariat économique intérimaire avec l’Union européenne, entré en vigueur le 3 septembre 2016.
PUBLI REPORTAGE
Le 12 septembre 2018, lors de son discours sur l’état de l’Union, Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, a annoncé le lancement d’une nouvelle Alliance Afrique-Europe pour des emplois et des investissements durables. Destinée à insuffler une nouvelle dimension au partenariat entre les deux continents, cette alliance vise à encourager l’investissement, renforcer la participation du secteur privé, soutenir l’éducation et le développement des compétences afin qu’elles soient plus adaptées au marché du travail, et stimuler les échanges et améliorer le climat des affaires. Elle prévoit, entre autres, de contribuer à la création de 10 millions d’emplois en Afrique au cours des cinq prochaines années, de permettre à 105 000 étudiants africains de participer au programme Erasmus + d’ici à 2027, et à 750 000 personnes de bénéficier de formation professionnelle afin d’améliorer leurs compétences. Cette nouvelle Alliance garantira aussi l’accès d’environ 30 millions de personnes et d’entreprises à l’électricité, grâce aux investissements de l’UE dans les énergies renouvelables et au renforcement de la capacité de production de 5 GW.
AFRIQUE MAGAZINE
L’Union européenne a permis à près de 8 000 jeunes de bénéficier d’une formation professionnelle.
LA NOUVELLE ALLIANCE AFRIQUE-EUROPE POUR DES EMPLOIS ET DES INVESTISSEMENTS DURABLES
La Côte d’Ivoire, premier exportateur africain de bananes grâce à l’Union européenne.
PERSPECTIVES
C’EST DÉJÀ LE FUTUR
Si l’émergence reste parfois un concept abstrait pour le simple citoyen, le pays connaît des mutations profondes. Le contexte macroéconomique s’améliore rapidement. La digitalisation progresse, l’esprit d’entreprise aussi. Le tout porté par une jeunesse optimiste, exigeante et connectée. par Dounia Ben Mohamed
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ousculée par le développement du numérique, la société se digitalise. En attendant l’inauguration du « train du futur », le métro urbain d’Abidjan, en 2020, l’heure est à l’innovation et aux solutions made in Côte d’Ivoire. Tous les secteurs de l’économie sont concernés, de l’agriculture aux services en passant par l’immobilier et la banque. De quoi dessiner les contours d’un pays déjà entré dans le futur… C’est à peine perceptible. Beaucoup n’en ont pas encore conscience dans ce quotidien, où le citoyen lambda se bat encore entre la vie chère, les embouteillages, les logements, les infrastructures vétustes, l’emploi précaire et les pannes d’électricité. « On ne mange pas encore les fruits de la croissance », pour reprendre l’expression de la rue. Et pourtant,
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JACQUES TORREGANO/DIVERGENCE
Sur le campus de l’université Félix Houphouët-Boigny à Abidjan, une jeunesse connectée et nomade.
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si on y regarde de plus près, à petite échelle, la Côte d’Ivoire a changé. Si l’émergence, annoncée à l’horizon 2020, reste hors des champs de vision d’une grande partie de la population, des graines d’entrepreneuriat ont bien été semées. Et c’est la jeunesse de ce pays qui en bénéficie en premier lieu tout en étant l’actrice principale. « Notre génération passait son bac ou finissait ses études pendant la crise. On a alors compris qu’il fallait qu’on cherche à s’en sortir par soi-même », explique Ange Frederick Balma, CEO de LIFI-LED CI, figure de cette génération digitale. Formés à l’Institut national polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INP-HB), « l’école publique qui forme les élites du pays », ou en autodidacte sur YouTube, ces jeunes incarnent et portent fièrement le made in Côte d’Ivoire à travers des applications et des solutions numériques en tout genre, qui répondent aux problèmes du quotidien (accès aux soins, à l’éducation, aux transports, etc.).
Le quartier d’affaires du Plateau, à Abidjan.
Les TIC, catalyseurs du développement Ainsi, les incubateurs, co-lab, business angel, hackathon ou concours de start-up se multiplient à Abidjan mais également à travers le pays. La Côte d’Ivoire devient une terre d’innovation. Avec la numérisation de l’économie, on crée désormais un compte bancaire d’un simple clic ; on paye le péage avec une carte d’abonnement digitale ; on se fait livrer les courses et achats via les plates-formes d’e-commerce ; les bus sont connectés, l’administration adopte l’e-gouv… Le pays se rêve en 3.0 et sa capitale en smart city. « L’essor de l’économie numérique, c’est la quatrième révolution, celle qui va connecter les habitants. On ne pouvait pas rester en marge, a assuré le ministre Bruno Koné alors qu’il était encore en charge du numérique. Elle peut nous aider à nous développer plus rapidement, à créer des emplois, réduire les coûts et mieux gouverner. Il représente déjà 8 % de notre PIB. » En effet, en plus de contribuer à la croissance, le secteur a généré 20 000 emplois directs dans le secteur formel et 5 000 emplois indirects liés au seul secteur de la téléphonie mobile. « Le secteur des technologies de l’information et de la communication est devenu au fil des ans un volet important de l’économie et tout indique que cette tendance se renforcera au cours des prochaines années pour atteindre une contribution à hauteur de 15 % du PIB à l’horizon 2020 », promettait le vice-président Daniel Kablan Dunan alors à la Primature. Depuis, le virage a été pris, le secteur pèse désormais pour 9 % du PIB, et l’État s’est engagé à faire du secteur des TIC, un catalyseur de son développement économique. « Le secteur du numérique a su se hisser parmi les secteurs les plus performants », a indiqué en novembre dernier le ministre de l’Économie numérique et de la Poste, Claude Isaac Dé. 12
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NABIL ZORKOT
Ici, on rêve d’une économie 3.0 avec une smart city ouverte sur le monde.
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PERSPECTIVES
Un environnement « connecté » Encore fallait-il mettre en place l’écosystème adapté. Là encore, le processus est en cours avec l’amélioration de la connectivité, grâce à la mise en place de 7 000 km de fibre optique sur tout le territoire d’ici la fin de l’année. Il y a aussi la création d’institutions et d’outils destinés à accompagner la transformation numérique, parmi lesquelles l’Agence nationale de service universel de télécommunication (ANSUT) qui a vocation à assurer partout en Côte d’Ivoire, l’accès de tous à des services de télécommunications de bonne qualité et à un prix abordable. Au-delà de ces actions, il s’agit de participer à la mise en place d’un environnement « connecté ». Parmi les missions à accomplir : l’installation de la fibre optique sur tout le territoire national (13 000 km ont été installés depuis 2013 par l’ANSUT) ; l’accompagnement des structures étatiques qui veulent passer au numérique ; le développement de l’e-administration ; la fourniture sur l’ensemble du territoire national de services de téléphonie ; la transmission de données ; l’accès à l’Internet haut débit, et in fine, faire de l’État un modèle dans le bon usage du numérique. Rattraper le retard est un impératif, pour arriver au même niveau que le Maroc ou le Rwanda, qui se sont mis plus tôt à la révolution NTIC. « Les technologies de l’information et de la communication (TIC) et la généralisation de leurs usages sont un facteur de développement socio-économique, de compétitivité, de création d’emplois, de diffusion du savoir et d’amélioration de la fourniture des services électroniques », rappelle Euloge Soro-Kipeya, directeur général de l’ANSUT. Des progrès ont déjà été faits, comme le montre le classement Networked Readiness Index (NRI) qui évalue la maturité numérique de chaque pays. En effet, la Côte d’Ivoire gagne 14 places entre 2013 et 2016, où elle occupe la 106e place sur 139 pays classés. Aujourd’hui, plus qu’un acteur, l’État devient le moteur de cette transformation numérique. « Nous voulons faire en sorte que l’État devienne un utilisateur de ces outils modernes. Si l’État se positionne lui-même comme une entité, il va tirer vers le haut l’ensemble des entreprises et des individus, poursuit le directeur. Car, tous autant que nous sommes, individus comme entreprises, nous sommes appelés à traiter avec l’État. C’est une approche pour imposer le numérique dans toutes les transactions. » Et participer à l’avènement d’une « citoyenneté numérique. » Et pour atteindre l’objectif fixé, la Fondation jeunesse numérique, une structure qui booste l’usage du numérique auprès des jeunes, a été dotée d’une première enveloppe de 500 millions de francs CFA, tandis que le programme « Un citoyen, un ordinateur, une connexion Internet », destiné à équiper 500 000 foyers sur cinq ans a été déployé. 14
Avec un taux de 7,8 % en 2017, la Côte d’Ivoire reste en tête des pays champions de la croissance sur le continent. « C’est à nous, les jeunes de ce pays, de porter cette transformation » « Ce sont des initiatives intéressantes, mais c’est une goutte d’eau dans l’océan, déplore Audrey Ehouman, consultante en TIC et fondatrice d’AE Tech Consulting. Il faut faire encore et encore, voire réadapter ces programmes en les axant vers les cibles prioritaires, les étudiants et les femmes par exemple. » Alors que cette dernière a attaqué de front le problème en créant la plate-forme Women In Tech, qui initie les femmes au numérique, elle ajoute : « Nous ne sommes pas en retard, il y a juste besoin de changer de mentalité pour avancer. » À ce niveau, la mutation est en cours. La Côte d’Ivoire est entrée dans une nouvelle ère dans laquelle les jeunes anticipent, ils s’imposent et proposent des axes de changement. « C’est une tendance réelle. Il y a la crise bien sûr, mais aussi le fait que les jeunes voyagent, ont accès à l’information et donc sont ouverts sur le monde, tout cela fait que depuis 2000, ils manifestent plus de volonté d’autonomie. D’où une certaine pression. Ils ont évolué plus vite, parce que la technologie va très vite, plus que les politiques publiques », reconnaît Salimou Bamba, directeur de la jeune Agence CI PME, destinée entre autres à accompagner les jeunes entreprises vers la maturité. Selon lui, il y a un réel besoin de les accompagner en termes de formation. D’où l’importance de mettre en place des instruments nécessaires pour que, à la fin de leurs études, ces jeunes puissent en bénéficier. Dans cette optique, l’Agence CI PME travaille main dans la main avec l’Agence emploi jeune. L’Agence CI PME développe des réseaux de mentors, des incubateurs, pour que les start-up se professionnalisent et deviennent demain des PME matures, aux standards internationaux. Salimou Bamba croit en ces HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Communiquer, payer, réserver… Le smartphone s’est démocratisé, et devient indispensable.
« champions nationaux qui vont répondre aux défis de notre pays et porter cette émergence que nous attendons tous ». Même si pour Ives Konan, à la tête d’Ivinko : « C’est à nous, les jeunes de ce pays, de porter cette transformation qui répond à notre soif de changement. Il faut aller vers l’évolution technologique. Qu’on le veuille ou non, elle s’impose à nous. Aujourd’hui, Internet s’est démocratisé et les outils numériques se diffusent et sont utilisés à bon escient, pour apporter des solutions concrètes aux problèmes que nos communautés rencontrent au quotidien. La transformation passera par là, par chacun de nous. » Et pour porter la transition numérique, la santé économique est une nécessité.
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L’embellie macroéconomique, toujours au rendez-vous Avec 7,8 % en 2017, la Côte d’Ivoire reste en tête des pays champions de la croissance sur le continent (la Côte d’Ivoire se classe 15e au rang africain et 114e sur 140 dans le classement du Forum économique mondial). L’embellie macroéconomique se confirme donc, avec un déficit budgétaire et un niveau de dette toujours sous contrôle, un taux d’inflation officiel inférieur à 1 % par an, et une balance commerciale excédentaire. Ce, malgré la contraction des cours mondiaux des produits agricoles et des tensions sociales traversées (mutinerie des militaires ; grèves au sein de la fonction publique ; HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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etc.), signes de la résilience de l’économie. Résultat, partenaires institutionnels comme investisseurs internationaux continuent de miser sur la destination ivoirienne et de l’accompagner dans sa quête d’émergence. La Banque africaine de développement (BAD), entre autres, a quintuplé ses appuis financiers en cinq ans en Côte d’Ivoire, passant entre 2013 et 2017, de 152,2 milliards de francs CFA (231 millions d’euros) à 802,6 milliards de francs CFA (1,2 milliard d’euros), dont près de 56 % sont destinés aux infrastructures routières. « La Côte d’Ivoire enregistre aujourd’hui plus de 650 millions de dollars d’investissements directs étrangers, contre 150 millions de dollars il y a sept ans », a annoncé Emmanuel Essis, directeur du Centre de promotion des investissements en Côte d’Ivoire (CEPICI) il y a quelques jours. Une conjoncture qui a eu un impact sur le taux d’investissement public, qui est passé de 2,6 % en 2011 à 6,8 % en 2017, tandis que le taux d’investissement privé atteignait 14,3 % en 2017 contre 6,3 % en 2011. La feuille de route destinée à faire du pays une nation émergente à l’horizon 2020 – le Plan national de développement (PND) – connaît une certaine accélération. Et désormais, tout se concentre sur un objectif : la croissance inclusive. Ce défi reste majeur, mais la Côte d’Ivoire a enregistré un récent succès très motivant : la plus grande progression du continent (+12 points) dans le dernier Indice Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG). ■ 15
INTERVIEW
MARIE-LAURE AKIN-OLUGBADE « ON PEUT PARLER DE SUCCÈS DEPUIS LA SORTIE DE CRISE ET LA RELANCE » La directrice générale du bureau régional de développement et de prestation de services pour l’Afrique de l’Ouest livre les grands axes du partenariat entre la BAD et la Côte d’Ivoire. Ainsi que son regard sur le chemin parcouru et les priorités de l’émergence. propos recueillis par Dounia Ben Mohamed
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artenaire privilégiée de la Côte d’Ivoire depuis son retour à Abidjan, la Banque africaine de développement (BAD) a multiplié par six, entre 2013 et 2018, ses engagements en faveur du pays, passant de 235 millions à 1,53 milliard d’euros. Interview de Marie-Laure Akin-Olugbade, directrice générale du Bureau régional de développement et de prestation de services pour l’Afrique de l’Ouest. AM : Avant de parler de la Côte d’Ivoire et des projets que mène la BAD pour accompagner son émergence, comment se passe sa réintégration à Abidjan ? Marie-Laure Akin-Olugbade : Comme vous le savez, après plus de dix ans de délocalisation en Tunisie, nous sommes de retour à Abidjan depuis septembre 2014. Le retour de la BAD à son siège historique a été solennellement célébré au cours des assemblées annuelles de mai 2015, en même temps que les manifestations de son cinquantenaire, différées à cette date. Selon le bilan dressé par la présidence de la Banque en son temps, le retour au siège s’est déroulé comme prévu : bonne logistique, perte de personnel inférieure à 7 %, coût financier maîtrisé, sans aucun dépassement budgétaire, et surtout, pas d’impact négatif sur nos opérations. Bien au contraire, l’année 2014 a enregistré l’une des meilleures performances de notre institution depuis 2008. Il faut aussi préciser que ce retour a bénéficié du soutien sans réserve des gouverneurs, administrateurs et du personnel. La coopération étroite de la Côte d’Ivoire et de la Tunisie et la politique de décentralisation mise en œuvre y ont grandement contribué. Quatre années après le retour officiel de la Banque à Abidjan, on peut dire que la phase de réintégration est terminée. Elle a bien pris ses marques sur le plan institutionnel, administratif et opérationnel et entreprit sa grande réforme structurelle, à travers le nouveau modèle de développement et de prestation de services de la Banque (DBDM), ainsi que les documents de politiques de décentralisation, notamment la feuille de route de la décentralisation. La Côte d’Ivoire vise l’émergence à l’horizon 2020. Pour l’atteindre, elle s’est dotée d’une feuille de route, le Plan national de développement (PND), dont la deuxième phase a démarré en 2016. Quel bilan peut-on en dresser à mi-parcours ? La Banque soutient les ambitions d’émergence de la Côte d’Ivoire, et nous en avons fait un objectif stratégique de notre coopération. Comme c’est le cas dans tous les pays, les stratégies et interventions de la Banque en Côte d’Ivoire sont en cohérence avec le PND que le gouvernement a adopté. C’est 18
« Nous sommes convaincus que le développement de l’emploi des jeunes passe par la promotion des PME dans l’agriculture et l’agro-industrie. » ainsi que les piliers du Document de stratégie pays (DSP) pour la période 2018-2022, approuvé par le Conseil d’administration de la Banque en septembre 2018, ont été définis en relation avec les axes du PND 2016-2020. Il appartient aux autorités de dresser le bilan du PND, mais la Banque en a fait une analyse qui, globalement, souligne que la Côte d’Ivoire est un cas de succès depuis son relèvement de la crise et sa relance. Nous pensons que les grands projets phares que la Banque a financés ou cofinancés ces dernières années, le soutien aux réformes, ainsi que les impacts de notre portefeuille actif, ont fortement contribué au fort retour de la croissance économique du pays. Comment la BAD accompagne la Côte d’Ivoire dans ses ambitions d’émergence ? Comme je le disais, le DSP est notre principal instrument d’intervention en Côte d’Ivoire. Les deux piliers du DSP 2018-2022, adopté le 26 septembre 2018 par le Conseil d’administration, sont alignés sur le PND 2016-2020 : à travers le renforcement des infrastructures structurantes et de la gouvernance, et notamment le développement des infrastructures de transport, d’énergie, de TIC (Technologies de l’information et de la communication), afin d’améliorer la compétitivité des sites de production et de faciliter l’accès au marché ; ainsi que le développement des chaînes de valeurs agro-industrielles pour soutenir une montée en gamme dans les processus de transformation agroindustrielle afin de diversifier les sources de croissance et créer de nombreux emplois, notamment pour les femmes et les jeunes. La Banque s’efforce également d’intégrer les questions transversales, telles que le changement climatique et la croissance verte, l’économie bleue, la dimension genre, l’emploi des jeunes, etc. Ceci passe parfois par exemple HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Une plantation de palmiers à huile appartenant au groupe industriel privé SIFCA, à Irobo, dans le sud-est du pays. par le financement d’activités ciblées d’autonomisation des femmes, comme c’est le cas dans les projets de développement de zones de production et de transformation agricoles, ou même certains projets d’infrastructures routières. L’agriculture est le secteur prioritaire pour le gouvernement, comme pour vous manifestement… Il est vrai que le secteur agricole recèle un énorme potentiel en matière de diversification de l’économie, de sa transformation structurelle et de nombreuses créations d’emplois. La Banque a beaucoup investi dans ce secteur dans le passé, mais il représente uniquement environ 10 % du portefeuille actif en ce moment. Dans le cadre de sa stratégie « Nourrir l’Afrique », la Banque a financé dans les régions est et centre de la Côte d’Ivoire trois projets, pour un montant d’environ 110 millions d’unités de compte (UC, soit l’équivalent d’environ 134 millions d’euros), qui portent sur le développement des infrastructures agricoles en matière d’amélioration du capital productif, le développement des chaînes de valeur et le développement d’un pôle agro-industriel. Les impacts du projet de développement des infrastructures agricoles dans l’Est (région de l’Indénié-Djuablin) sont visibles sur les conditions de vie socio-économique des bénéficiaires. On peut citer par exemple : l’amélioration de la productivité des produits agricoles, tels que le riz et le maïs, une nette amélioration de la couverture des besoins en céréales, un meilleur accès à l’eau potable, l’amélioration des conditions HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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d’évacuation des produits agricoles à travers les pistes rurales réhabilitées, etc. Le projet de pôle agro-industriel dans la région du Bélier (financement de la Banque à hauteur de 80 millions d’UC, soit environ 97 millions d’euros) vise à contribuer à l’accroissement de la sécurité alimentaire et nutritionnelle à travers une dynamisation des filières agricoles porteuses et une implication accrue du secteur privé, des jeunes et des femmes. Ces projets apportent en outre un appui institutionnel à plusieurs partenaires d’exécution nationaux et régionaux qui ont signé des conventions dans le cadre de la mise en œuvre des activités de ces projets. Cette approche de partenariat constitue un avantage dans l’appropriation de ces projets et dans la durabilité des résultats et effets à long terme. La BAD s’est également investie dans le désengorgement des transports à Abidjan, en attendant le fameux métro. Et à l’intérieur du pays ? Vous avez raison. Les infrastructures de transport comptent pour près des deux tiers (65 %) du portefeuille de la Banque en Côte d’Ivoire. Celle-ci a beaucoup investi dans le désengorgement de la capitale économique, avec notamment la construction du pont Henri Konan Bédié (financée à travers le guichet du secteur privé) ou encore le projet de transport urbain d’Abidjan, avec un quatrième pont reliant les communes du Plateau et de Yopougon. Nous savons que les difficultés d’accès aux bassins de production engendrent 19
d’importantes pertes post-récolte et affectent la compétitivité du secteur agricole. Dans les interventions dans le secteur des transports, un accent particulier est mis sur les activités connexes incluant les pistes rurales et les infrastructures de production et de commercialisation, afin de libérer totalement le potentiel du secteur agricole. Cependant, les interventions prévues dans le nouveau DSP sont diversifiées, avec des opérations également à l’intérieur du pays. Il y a les projets de la région de l’Indénié-Djuablin et du Bélier : l’aménagement de 923 ha de bas-fonds ; la réhabilitation de 620 km de pistes rurales ; la construction d’infrastructures de commercialisation. L’effet induit sera la création d’environ 40 000 emplois. Le désenclavement des zones transfrontalières et agricoles figure également au nombre des priorités de la nouvelle stratégie pour la Côte d’Ivoire, qui, du fait de l’important poids économique (40 % du PIB de la région UEMOA – Union économique et monétaire ouest-africaine), pourrait stimuler les économies des pays voisins si les liaisons routières avec ces derniers étaient bien aménagées. Ce programme est également une priorité de l’UEMOA. À cet effet, le Conseil vient d’approuver un projet portant sur le bitumage de la route Boundoukou-frontière du Ghana (11,4 km), laquelle relie le nord-est de la Côte d’Ivoire au Ghana voisin et permettra
LES ENGAGEMENTS DE LA BAD S DANS LE PAYS La Banque a augmenté té ses engagements au cours de ces dernières années. ées. C’est ainsi que son portefeuille en Côte d’Ivoire a enregistré, fin novembre 2018, unn total d’engagements de 1,53 milliard d’euros. os. Ils ont été multipliés par six entre 2013 et 2018, 2018, passant de 235 millions d’euros à 1,53 milliard d’euros. Les financementss sont dans le secteur public national (65 %),, des opérations régionales qui impliquent uent un ou plusieurs autres pays ays (17 %) ainsi que le secteur privé rivé (18 %). La répartition sectorielle ielle du portefeuille indique ue une prédominance Akinwumi Adesina, des infrastructures président de la de transport (65 %), Banque africaine de développement. suivi de l’énergie (24 %) %) et de l’agriculture (9 %). ■ D.B.M.
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de faire passer le volume du commerce intrarégional de 10 à 15 %. Les phases ultérieures de ce programme prévoient l’aménagement des routes transfrontalières dans l’Ouest, l’Est et le Nord, notamment les routes Danané-frontière du Libéria (25 km), Zuénoula-Mankono (80 km), Bouna-Vonkoro (35 km), Téhini-Varalé (49 km), Odienné-frontière de Guinée (95 km), et Odiénné-frontière du Mali. Toutefois, nos interventions dans le domaine de la gouvernance sont beaucoup moins visibles que celles liées aux transports, mais non moins importantes, avec l’appui dans l’élaboration du schéma directeur des réformes des finances publiques, qui a été adopté en 2014, suivi d’un prêt de plus de 14 milliards de francs CFA pour sa mise en œuvre (Projet d’appui à la gestion économique et financière, PAGEF) ; le soutien à la mise en place du cadre de gestion de la dette à moyen terme, l’assistance technique pour soutenir les efforts de mobilisation des revenus domestiques et la préparation des partenariats public-privé ; le soutien à l’amélioration du climat des affaires en Côte d’Ivoire, et plus spécifiquement à la participation du pays à l’initiative Compact with Africa du G20. Créer des emplois pour les jeunes, c’est le défi majeur pour la Côte d’Ivoire, comme pour les autres pays du continent. Quel est le modèle de partenariat institué par la BAD pour encourager la création d’emplois et de start-up ? L’emploi des jeunes est une dimension transversale dans toutes les opérations sectorielles depuis l’adoption par p la Banque de la stratégie pour l’emploi des jeunes en Afrique. question à travers trois axes princiElle intervient sur cette ques paux. Concernant le premier, premier nous intégrons ces questions dans le dialogue stratégique ssur les réformes qui contribuent à la promotion de l’emploi d des jeunes. C’est ainsi qu’un programme d’appui budgétaire en faveur de l’employabilité des jeunes a été adopté en 2015-2016 pour soutenir les réformes 2015suivantes : structuration des branches professionnelles en secteur afin d’anticiper les besoins en compétences du secteur privé ; développement des travaux à haute intensité de main-d’œuvre dans les inten collectivités locales ; amélioration de la pertinence du système éducatif. Pour le l deuxième axe, l’emploi est intégré ccomme un objectif des projets d’infrastructures et d’énergie. Dans d’infra région ouest, l’impact des projets la rég routiers sur l’emploi est estimé à routi 600 000 emplois. Le secteur de l’énergie, en plus des projets de l’éne développement des infrastructures dévelo d’énergie, d’énergi appuie le développement HORS -SÉRIE AFR AFRIQUE MAGAZINE
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Le siège de la BAD, à Abidjan.
d’un centre de formation d’excellence régionale dans l’énergie à Abidjan, en collaboration avec l’Agence française de développement (AFD). Enfin, depuis 2016, le troisième passe par la transformation du secteur agricole. Notre ambition est de faire de l’agriculture un secteur attractif pour une jeunesse qui souhaite s’investir pour moderniser et y ajouter de la valeur. C’est ainsi que la Banque appuie le développement du pôle agro-industriel du Bélier, qui inclue des actions en faveur de la formation de 800 jeunes (dont 50 % de femmes), au sein d’écoles spécialisées et de centres d’apprentissage qui seront réhabilités par le projet. Celui-ci prévoit l’appui à l’entrepreneuriat de 120 PME agricoles portées par les jeunes et l’aménagement de 80 ha de terre pour l’incubation agricole. La Banque va également mettre en œuvre l’initiative Enabe Youth, laquelle vise la formation des diplômés de l’enseignement supérieur pour en faire des « agripreneurs ». Nous sommes convaincus que le développement de l’emploi des jeunes passe par la promotion des PME dans l’agriculture et l’agro-industrie, dont les effets vont au-delà des emplois directs créés. Une récente étude réalisée par la Banque au Sénégal a montré que l’investissement dans ce secteur crée un effet indirect double dans les autres secteurs d’activité. Outre des activités d’incubation à l’entrepreneuriat, la Banque est en train d’étudier d’autres modèles de création d’emplois pour les jeunes, notamment dans les HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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« Nous cherchons à intégrer des questions transversales, comme la croissance verte et le changement climatique. » activités à haute intensité de main-d’œuvre, comme dans le secteur routier, l’énergie, l’agriculture et l’économie bleue. Si, sur le plan macro, la Côte d’Ivoire brille, les questions sociales restent sensibles. Quelles sont les solutions que vous préconisez ? Nous appuyons les actions visant à rendre la croissance plus inclusive afin de réduire les inégalités spatiales et la pauvreté, qui était de 46,3 % en 2015 (contre 48,9 % en 2008). L’impact de la baisse drastique des cours du cacao en 2017 a montré que l’économie ivoirienne reste assez dépendante de cette filière, et donc vulnérable à ses chocs. Accélérer la diversification de l’économie permettrait de la rendre moins fragile aux chocs externes. ■ 21
INTERVIEW
JOBST VON KIRCHMANN « LES DÉFIS NE SE RÉSUMENT PAS À L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE » propos recueillis par Dounia Ben Mohamed
Anciennement en charge de l’Afrique australe et de l’Océan Indien à Bruxelles, le nouvel ambassadeur de l’Union européenne à Abidjan a une feuille de route précise. Le diplomate allemand souhaite consolider les relations entre l’institution et la Côte d’Ivoire, et se concentrer sur les perspectives d’avenir.
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AM : Vous avez été nommé à la suite d’un épisode délicat – la fuite d’un rapport des chefs de mission de l’Union européenne (UE) en Côte d’Ivoire –, ce qui a causé le départ de votre prédécesseur… Jobst von Kirchmann : Dès ma nomination d’ambassadeur en Côte d’Ivoire en mai dernier, comme vous pouvez l’imaginer, j’ai commencé à suivre l’actualité du pays avec une grande attention. En me préparant pour mon nouveau poste, je me suis plongé dans l’histoire de notre relation, établie formellement dès 1961. Je n’avais aucun doute sur le fait que cette longue relation, qui a perduré même pendant les crises, ne pourrait être affectée par des tensions temporaires. Nous voulons désormais aller de l’avant et nous concentrer sur notre avenir commun. Les entretiens que j’ai pu avoir jusqu’à présent avec les autorités ivoiriennes, dont le président Ouattara, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly et de nombreux ministres et chefs d’institutions, m’ont confirmé que HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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nous allons avancer ensemble sur les principaux sujets qui nous préoccupent, tels que l’investissement, la création d’emplois ou la gouvernance démocratique. Quelle est la particularité de votre mission par rapport à vos postes précédents ? Auparavant, j’étais en charge de l’Afrique australe et de l’Océan Indien au sein des institutions européennes. J’avais donc une bonne connaissance générale de l’Afrique, mais je n’avais pas encore eu l’occasion de me familiariser avec les spécificités de l’Afrique de l’Ouest, et en particulier de la Côte d’Ivoire. Cela fait une grande différence d’être à Bruxelles en charge de multiples pays ou d’être le représentant de l’Union européenne dans un seul. Après trois mois, je commence à mieux comprendre la Côte d’Ivoire, en particulier son rôle de « locomotive » économique dans la région. D’un point de vue plus personnel, j’apprécie beaucoup le pays. Les gens sont chaleureux, ce qui rend la relation plus facile. Je suis convaincu que nous allons bien travailler ensemble. Vous avez annoncé, lors de la présentation de vos lettres de créance, vouloir consolider le « mariage » entre votre institution et la Côte d’Ivoire, qui dure depuis « très longtemps déjà ». Concrètement, quels sont votre feuille de route, vos ambitions, vos challenges ? Je conçois notre relation comme un mariage car c’est une relation inscrite dans la durée, basée sur la confiance mutuelle, et qui repose sur bien plus que de simples intérêts financiers. Nous partageons une histoire, une culture, des valeurs et une vision commune sur un grand nombre de sujets, comme la nécessité de développer l’emploi des jeunes et d’atteindre une croissance inclusive, l’investissement durable, la protection de l’environnement ou encore l’égaHORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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lité femmes-hommes. C’est d’ailleurs le cœur de la nouvelle Alliance Afrique-Europe pour des emplois et des investissements durables, annoncée le 12 septembre dernier par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. La croissance de la Côte d’Ivoire est haute : près de 8 % ces dernières années. L’ambition que l’Union européenne partage avec le gouvernement ivoirien est maintenant d’« approfondir » cette croissance pour la rendre pérenne : créer des emplois, mais des emplois qualifiés, qui produisent de la valeur pour le pays, développer les infrastructures, mais en préservant l’environnement, accueillir les investisseurs, mais dans un cadre juridique fiable et équitable. La jeunesse et les femmes se trouvent au cœur de nos préoccupations, et nous allons poursuivre ce que nous avons déjà entrepris en matière de formation professionnelle, dont ont bénéficié plus de 8 000 jeunes Ivoiriens au cours des dernières années. Et votre regard sur la Côte d’Ivoire ? À peine nommé, vous avez assisté aux élections locales. C’est l’occasion d’une première évaluation… Les élections locales constituaient, aux yeux de tous, une sorte de « répétition générale » des scrutins prévus en 2020, dont la présidentielle. Nous avons suivi avec attention ce scrutin par une veille impliquant l’ensemble des États membres. Nous avons considéré qu’il s’était bien déroulé dans l’ensemble, malgré un taux de participation plutôt faible et certains incidents locaux. Au-delà de ces élections locales, nous soutenons le projet du gouvernement de réformer la Commission électorale indépendante, conformément à ce que le président Ouattara a déclaré, car la confiance des électeurs dans les résultats qui seront annoncés en 2020 constitue un paramètre central pour la paix et la stabilité du pays. L’Union européenne coorganisait avec l’Union africaine, il y a un an, le cinquième Sommet UE-UA à Abidjan. Quel bilan en a-t-il été dressé ? Ce sommet – le premier organisé sur le sol africain – a marqué un tournant dans les relations entre l’Union européenne et l’Union africaine, en tant que partenaires égaux, en renforçant leur dialogue et leur coopération. À l’issue de ce sommet, qui était consacré à la jeunesse, les 83 chefs d’État et de gouvernement présents ont adopté une déclaration commune exposant les priorités du partenariat entre l’Union européenne et l’Union africaine. Elles sont axées autour de quatre domaines stratégiques : les perspectives économiques pour les jeunes, la paix et la sécurité, la mobilité et la migration, ainsi que la coopération sur la gouvernance. 25
INTERVIEW/JOBST VON KIRCHMANN
Un an après ce sommet, la collaboration entre les deux organisations se poursuit. Et ce sommet a aussi changé notre approche en Côte d’Ivoire : nous essayons de focaliser notre coopération sur les quatre axes que je viens de mentionner. L’UE demeure le premier partenaire commercial de la Côte d’Ivoire. Alors que 2020 est dans tous les esprits, comment comptez-vous accompagner la Côte d’Ivoire dans cette transition, et plus largement dans sa volonté d’atteindre l’émergence ? Comme vous l’avez relevé, l’Union européenne est le premier partenaire commercial du pays. Elle absorbe 40 % des exportations ivoiriennes et fournit 32,5 % des produits importés. L’UE, c’est aussi 60 % des investissements directs étrangers et plus de 500 entreprises présentes sur le territoire. Il est indéniable que l’élection présidentielle de 2020 est dans tous les esprits, et nous y accordons évidemment de l’importance. 26
Mais pour autant, les défis de la Côte d’Ivoire ne se résument pas à cette échéance électorale, aussi décisive soit-elle. Il reste tant de challenges à relever, notamment en matière d’emploi, d’accès à l’énergie, de sécurité… Nous sommes le premier partenaire au développement du pays en ce qui concerne les subventions, et comme elle l’a toujours fait, l’Union européenne se tiendra aux côtés de la Côte d’Ivoire pour l’aider à atteindre une croissance durable et inclusive. Cela se traduira, par exemple, par nos appuis au secteur de l’électricité, à la sécurisation du foncier rural, à la formation professionnelle, au retour et à la réintégration des migrants, ou encore à la réforme de l’état civil. Nous n’oublions jamais que, derrière les projets que nous soutenons, il y a des hommes et des femmes : les citoyens des 28 pays de l’Union européenne qui souhaitent soutenir la Côte d’Ivoire d’un côté, et les entrepreneurs, les jeunes, les femmes et les citoyens de la Côte d’Ivoire de l’autre. ■ HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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L’ambassadeur et son épouse lors de la présentation de ses lettres de créance, le 13 novembre dernier, aux côtés du président Alassane Ouattara.
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Abidjan, la capitale économique.
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La Côte d’Ivoire maintient son cap et renforce sa place de championne de la croissance régionale et continentale, avec +7,8 % en 2017. Une destination privilégiée pour les entrepreneurs internationaux.
investir en COTE D IVOIRE Abidjan, porte d’entrée des investisseurs
ÉCONOMIE RÉGIONALE « LA PLUS ATTRACTIVE », LA CÔTE D’IVOIRE SÉDUIT LES BAILLEURS DE FONDS AUTANT QUE LES OPÉRATEURS PRIVÉS. AUX PARTENAIRES TRADITIONNELS VIENNENT S’AJOUTER DE NOUVEAUX ACTEURS, QUI ONT CHOISI LA CAPITALE ÉCONOMIQUE POUR IMPLANTER LEUR ENTREPRISE SUR LE CONTINENT.
Le président Alassane Ouattara à la conférence G20 compact with Africa à Berlin, le 30 octobre dernier.
L’
attractivité de la capitale économique ivoirienne n’a jamais été aussi forte. Celle-ci est portée par les performances économiques d’un pays qui, avec un taux de croissance de 9 % et une hausse du PIB par habitant supérieure à 7 % sur la période 2012-2017, fait figure de champion régional et représente également une destination privilégiée des investissements directs étrangers, passés de 150 millions de dollars il y a sept ans à 650 millions de dollars aujourd’hui. Richesses agricoles, potentiel énergétique, démographie marquée notamment par l’essor de la classe moyenne, nouvelle dynamique industrielle, boom du digital… sont autant de facteurs attractifs pour la Côte d’Ivoire, qui par ailleurs, grâce au développement de la logistique et des infrastructures régionales, renforce sa position de hub pour les pays de l’hinterland, Burkina Faso et Mali en tête. Mais pas seulement. Premier pôle économique de l’UEMOA et troisième de la CEDEAO, derrière le Nigeria et le Ghana, elle s’impose comme l’un des hubs privilégiés pour les investisseurs en quête d’opportunités d’affaires en Afrique de l’Ouest… et bien au-delà sur le continent.
4,6 MILLIARDS D’EUROS D’INVESTISSEMENTS ALLEMANDS DANS LES ÉNERGIES RENOUVELABLES Aux investisseurs traditionnels, français, marocains, chinois s’ajoutent de nouveaux partenaires. Turcs, indiens, brésiliens, portugais, américains, qataris, koweïtiens, allemands… Ces derniers, qui organisaient une rencontre ivoiro-allemande à Abidjan en novembre dernier, prévoient par ailleurs d’injecter 4,6 milliards d’euros dans les énergies renouvelables. Alors même que la banque allemande de développement DEG (Deutsche Investitions und Entwicklungsgesellschaft) ouvrait un nouveau bureau régional à Abidjan. Ce qui devrait augmenter le volume d’échanges entre les deux pays, qui représentent un milliard d’euros à l’heure actuelle. L’Allemagne, faisant déjà partie des dix premiers partenaires commerciaux, est par ailleurs le quatrième client de la Côte d’Ivoire. Les Britanniques également se manifestent et prospectent dans le pays. « Les indicateurs de la Côte d’Ivoire sont positifs et le pays est le moteur économique de l’Afrique de l’Ouest. Il est donc très important pour nous d’y être présents », indiquait récemment l’ambassadrice de Grande-Bretagne en Côte d’Ivoire, Joséphine Gault. Un point de vue désormais partagé par tous, y compris par les investisseurs africains. Les anglophones notamment, de plus en plus nombreux à venir prospecter en terre francophone. Signe de ce nouvel intérêt : la visite de Paul Kagamé, destinée à booster la coopération économique entre le Rwanda et la Côte d’Ivoire, deux pôles économiques majeurs du continent.
LE NOUVEAU HUB L’aéroport international Félix Houphouët-Boigny, qui a accueilli 3,475 millions de visiteurs en 2017.
Le rendez-vous « business »
© ACTION PRESS/REX/SIPA, NABIL ZORKOT, ACCOR/GILLES TRILLARD
LE CLIM MAT T DES AFFAIRES S ET LES RÉFO ORMES Po ourr re enfo orcer son atttracttivité é, la Côte d’’Ivo oire e po ourrsuitt so on ch hanttier de réfformes duu cllimat dess afffairres. Déjà, le e dernier ra app portt Doin ng Busin nesss 20 019 de la Banque mondia ale tra aduiit la pro ogre essio on du pays, le equel figuure parmi less dix nations où amé élio ora ation de l’é écon nom mie a été la a plus l’a se enssible. Elle e pa asse e ain nsi de la 138e place 2e, grâce nota amm ment à une dizzaine à lla 122 de e ré éfo orm mes.. Alo ors que e le payss doit se doter d’’un no ouve eauu co ode dess inve estissseme ents prrévvoya antt de es mesuuress inccitattives et de es e exo oné érattion ns fisca ales desttiné à, selon Em mman nue el Esssiss, se ecré étairre d’É État chargé de e l’Invvesttisssem mentt priivé, « rép pondrre à trois exxigenccess, à savvoir opttimisser la dép pense ale,, cib bler de es se ecte eurss et donne er fissca de e la a va aleuur au conttenuu loccal »..
L’embellie économique de la Côte d’Ivoire s’est également traduite par une ruée vers Abidjan. D’autant que la ville a pris un coup de jeune grâce à de nouvelles infrastructures (routes, ponts… 65 millions d’euros sont en train d’être injectés pour réhabiliter les principaux axes routiers de la ville) et des sites d’accueil et de loisirs diversifiés. Tandis que les hôtels « historiques » font peau neuve (l’hôtel Ivoire, le Pullman Abidjan…), d’autres chaînes hôtelières s’implantent, dont l’Azalaï, le Seen et bientôt le Noom du groupe Mangalis. Et après le Radisson Blu d’Abidjan a été annoncé un Radisson Red. Sans compter les nombreuses résidences-hôtels qui poussent comme des champignons dans la rue des Jardins et autres artères chics de la capitale, qui seront ainsi en mesure d’accueillir les 3,475 millions de visiteurs comptabilisés en 2017 (soit une hausse de 12,7 % par rapport à 2016). La Côte d’Ivoire s’est ainsi
classée à la troisième place parmi les destinations plébiscitées par le tourisme d’affaires sur le continent africain, après le Nigeria et le Maroc. Les autorités, qui visent également le hub touristique, à travers « Sublime Côte d’Ivoire », la stratégie de développement et de promotion touristique à l’horizon 2025, s’attendent d’ici là à recevoir entre 4 et 5 millions de touristes. Ce qui a valu à l’aéroport international d’Abidjan de connaître des travaux d’extension et de modernisation : 42 milliards de francs CFA ont été insufflés pour accroître ses capacités. La tour de l’hôtel Ivoire.
investir en COTE D IVOIRE
La centrale d’Azito.
Énergie
Le soleil brille ! DANS LE CADRE DE SA VOLONTÉ D’AUGMENTER LA PART DES ÉNERGIES RENOUVELABLES DANS SON MIX ÉNERGÉTIQUE, LE PAYS ACCUEILLE DE NOUVEAUX INVESTISSEMENTS. DANS LE SOLAIRE, NOTAMMENT.
Vue aérienne de Bingerville.
L
a Côte d’Ivoire aime les projets ambitieux, à l’image de cette première centrale électrique solaire flottante d’Afrique. « Les installations se feront sur des plans d’eau, lagune ou mer, abondants en Côte d’Ivoire », a annoncé le 3 décembre dernier l’ancien ministre de l’Énergie, Thierry Tanoh. Ce projet est financé à hauteur de 80 millions d’euros par un prêt de l’Agence française de développement (AFD), qui s’inscrit dans le cadre de la volonté des autorités nationales de faire passer les énergies renouvelables à 11 % de son mix énergétique d’ici 2020, puis à 16 % en 2030. Le défi pour le pays est d’atteindre l’autosuffisance d’ici 2020, en doublant sa capacité énergétique, passant de 2 000 à 4 000 MW (mégawatts). En misant notamment sur le solaire. Si pour l’heure l’électricité est assurée à 75 % par les centrales thermiques au gaz naturel, la Côte d’Ivoire envisage de générer 150 MW d’énergie solaire d’ici 2020. Les premiers chantiers sont en cours. Le Français Engie œuvre à la construction d’une centrale solaire d’une capacité de 150 MW à Bouaké, et la première centrale de 25 MW, construite à Korhogo par une filiale de Nova Power, basée au Maroc, sera opérationnelle avant la fin de l’année. Trois autres sont déjà annoncées. Afin de permettre au pays de demeurer le hub énergétique de la sous-région, deux nouvelles centrales de production d’énergie seront bâties à Azito (Yopougon) et Jacqueville pour générer respectivement 253 MW et 390 MW d’énergie. Azito phase 4, estimée à 225,8 milliards de francs CFA, débutera début 2019 avec 2 000 emplois en phase de construction. À Jacqueville, Ciprel 5 permettra d’atteindre 2 876 MWh de fourniture énergétique. Pour rappel, avec plus de 5 000 km de lignes à haute tension et une puissance installée de 2 200 MW, la Côte d’Ivoire est la première bourse énergétique d’Afrique de l’Ouest. En attendant, le solaire entre dans les mœurs. Depuis peu, des taxis roulent au solaire à Jacqueville.
L’amélioration de la sécurité à l’intérieur du pays, de même que la réhabilitation des routes et autoroutes, participent également à l’essor d’autres villes. Si Abidjan reste le principal pôle d’attractivité, d’autres cités telles que Bingerville, Jacqueville ou encore Korhogo suscitent un nouvel intérêt. Ainsi, tandis que « la classe moyenne sup » construit et pose ses valises à Jacqueville, pour des
terrains plus grands et moins chers que ceux des beaux quartiers d’Abidjan, la ville accueille de nouveaux projets d’envergure. Dont une future centrale thermique d’un coût de 430 millions de dollars pour une capacité de 390 MW, un projet porté par le groupe Eranove, lequel a également fait le choix d’une autre ville qu’Abidjan, en l’occurrence Bingerville, pour y installer son Centre des métiers
de l’électricité (CME). C’est également ici que la Chambre de commerce, de développement et d’intégration du Brésil a décidé d’implanter son bureau local. Des chantiers sont aussi en cours à San-Pédro. Après la réhabilitation de son Palais de justice, la fin des travaux d’extension du Port autonome, en attendant la construction d’une université publique.
Enfin, Korhogo, quatrième ville de la Côte d’Ivoire en matière de population et d’économie, fait elle aussi peau neuve. Après la mairie et le centre hospitalier, la construction d’un stade en vue d’une prochaine CAN et ses nouvelles artères routières, dont le boulevard dit « Alassane Ouattara », attirent les habitants. Une ville nouvelle en somme, desservie par les avions d’Air Côte d’Ivoire.
© NABIL ZORKOT (2)
BING GER RVIL LLE,, JAC CQU UEV VILLE E, KOR RHOG GO… LE ES OPP POR RTU UNIT TÉS DE DEMAIN
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INTERVIEW
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SIDI TIÉMOKO TOURÉ « NOUS SOMMES UNE NATION JEUNE, AVEC DE L’AMBITION ET DU TALENT » Le ministre de la Communication et des Médias, porte-parole du gouvernement, souligne les priorités : inclusivité et modernité. propos recueillis par Dounia Ben Mohamed
NABIL ZORKOT
AM : Aujourd’hui, en Côte d’Ivoire, du moins à Abidjan, on ouvre un compte bancaire d’un simple clic, on se fait livrer plats et achats, des drones surveillent les plantations et permettent d’anticiper sur les aléas climatiques… Le pays est-il entré dans l’ère du numérique ? Sidi Tiémoko Touré : La Côte d’Ivoire, à l’instar des autres nations, a embrassé les opportunités du numérique et des sociétés de l’information. Le gouvernement tout entier, et plus particulièrement le
ministère en charge de l’Économie numérique, est à l’œuvre. Force est de constater que les résultats sont au rendez-vous. Internet et les technologies numériques sont devenus une nécessité vitale pour nos populations. Leur omniprésence dans notre quotidien en fait l’outil de communication et d’interaction par excellence. La convergence permanente des sphères et des enjeux économiques, sociétaux, politiques et technologiques oblige à la considération croissante de 33
INTERVIEW/SIDI TIÉMOKO TOURÉ
l’Internet, à la fois comme vecteur de développement et facteur de risque. C’est donc tout naturellement que le gouvernement a fait des technologies de l’information et de la communication l’un des piliers majeurs du développement économique de la Côte d’Ivoire. Cette transformation numérique est essentiellement portée par toute une génération d’Ivoiriens, qui pensent smart, innovent et transforment le pays de l’intérieur. Est-ce là l’émergence de l’« Ivoirien nouveau », si cher au président Alassane Ouattara ? La Côte d’Ivoire est un État jeune, plein d’ambitions et pétri de talents. Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, à l’écoute des populations, n’a de cesse de développer les gages d’une économie inclusive, porteuse de valeurs et de savoirs. Rappelons que notre pays s’est fixé pour objectif de compter parmi les pays émergents, et ce d’ici 2020. Nous nous sommes successivement dotés des Plans nationaux de développement 20122015 et 2016-2020, retrouvant dès lors une croissance forte et pérenne, créant des millions d’emplois et développant le socle d’une prospérité retrouvée.
le gouvernement. Il en est de même pour les adultes, à l’aide des programmes de formation professionnelle. Il s’agit, comme vous le soulignez, de développer grâce aux technologies tous les pans de notre société, et ce en stimulant l’employabilité de la population, le niveau de qualifications, de même que les besoins dits primaires, tels que la santé, la protection sociale, l’habitat… Où en est la Côte d’Ivoire dans le processus de modernisation de son administration ? Êtes-vous également entré dans l’ère de l’e-gouvernement ? Depuis 2012, le gouvernement met en œuvre un programme de maturité numérique pour l’ensemble de la population, lequel vise à développer les réseaux de télécommunications/TIC et les services dématérialisés pour l’ensemble de la population. Par une utilisation accrue du numérique, l’objectif est, entre autres, d’améliorer l’offre de service public, de renforcer la participation citoyenne et de promouvoir l’interaction entre les citoyens et l’administration. Comme pour tous les projets nationaux technologiques, une collaboration étroite entre les acteurs est de rigueur. Les projets e-gouv, e-démarches ou e-santé démontrent l’omniprésence de la démarche stratégique du gouvernement. Et les derniers classements des index Doing Business ou Mo Ibrahim nous confortent dans les choix que notre pays a faits. Reste que les jeunes expriment un certain nombre de demandes, légitimes. Comment les accompagnez-vous ? Au cours de mes précédentes fonctions au sein du gouvernement, nous avons initié la Politique nationale de la jeunesse (PNJ) 2016-2020, politique qui a l’ambition d’apporter une réponse adaptée aux attentes des jeunes en matière d’autonomisation, de protection, d’insertion et d’emploi. Au-delà de cette politique sectorielle, le gouvernement accentue des efforts autour de l’entrepreneuriat des jeunes, de l’auto-emploi, du volontariat et du bénévolat. Dans ces domaines, vous en conviendrez, il n’existe pas de frontière. En tant que ministre de la Communication et des Médias, je veille à ce que les stratégies quinquennales que nous développons autour de la presse, l’audiovisuel, la communication publicitaire ou les nouveaux médias intègrent naturellement l’employabilité, au même titre que le développement de compétences et la prospective en vue de l’essor des nouveaux métiers inhérent à la société de l’information dans laquelle nous vivons. Au-delà, plusieurs structures de l’État, telles
« Tous autant que nous sommes, on se doit de donner l’exemple, d’aider les plus jeunes en leur apportant des éléments de repère. » L’Ivoirien nouveau, tel que vous le décrivez, fait partie intégrante du développement stratégique de notre nation. Il participe à l’accélération du développement du capital humain et du bien-être social, de même qu’à l’accélération de la transformation structurelle de l’économie par l’industrialisation. Comprenez que le gouvernement développe et continuera de développer les actions de formation, base du développement social et économique durable de nos populations. Les jeunes générations, nos enfants, mais aussi nous-mêmes y œuvrons déjà. Nos petits-enfants doivent bénéficier de la politique d’enseignement et de scolarisation mise en œuvre par 34
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Plusieurs structures ont été créées par l’État pour accompagner la jeunesse dans la formation et la recherche d’emploi. Ici, les locaux d’une entreprise de doublage, à Abidjan.
que l’Agence emploi jeunes ou la Fondation jeunesse numérique, ont été créées pour accompagner la jeunesse dans la formation, l’innovation, l’entrepreneuriat et la recherche d’emploi. Des experts de grande qualité accompagnent les bénéficiaires dans leurs différentes dynamiques, ou via un processus d’incubation. Vous considérez-vous, en tant que jeune ministre et porteparole du gouvernement, comme la voix de cette jeunesse ? Tous autant que nous sommes, et peut-être plus particulièrement la jeunesse en responsabilité, on se doit de donner l’exemple, d’aider les plus jeunes en leur apportant des éléments de repère, une boussole. Mes précédentes fonctions m’ont en effet permis de développer des programmes spécifiques de création et de recherche d’emploi, ainsi que des cursus de formation, de remise à niveau et de réinsertion sur le marché du travail, soit par le biais de l’employabilité, soit par l’auto-emploi, en stimulant la création d’entreprises. Si l’essor du numérique est réel dans le pays, comment accélérer la cadence et passer à la transformation numérique de l’économie, tout en évitant le risque d’un développement inégal ? Entre Abidjan et le reste du pays, les populations privilégiées et les plus démunies, entre ceux qui sont « connectés » et les autres, la fracture est réelle… et pas seulement numérique, n’est-ce pas ? La Côte d’Ivoire, ne l’oublions pas, a connu une récente période de crise. Il serait opportun d’analyser les inégalités dont vous parlez au regard d’une période. L’aspect social est au cœur de l’action gouvernementale en Côte d’Ivoire. Ces actions visent principalement les populations issues des communautés vulnérables ou des zones rurales. Cela s’illustre par exemple avec le programme Électricité pour tous, qui consiste pour ces populations à souscrire à un abonnement d’électricité, le tout pour un montant symbolique de 1 000 francs CFA par mois, pendant dix ans. HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Par l’intensification des programmes devant garantir l’épanouissement et le développement harmonieux des populations, le gouvernement, avec son plan d’action prioritaire, déploie des efforts significatifs pour le développement et la mise à niveau des infrastructures de base – santé, éducation, assainissement, protection sociale –, mais aussi pour la facilitation de l’accès à l’eau potable, à l’électricité et à des logements décents à moindre coût. Dans le secteur de la santé, plusieurs centres hospitaliers à Abidjan et à l’intérieur du pays, notamment le CHU d’Angré et le premier centre d’oncologie et de radiothérapie de Côte d’Ivoire, ont démarré leurs activités. Le gouvernement intensifie par ailleurs le renforcement et la réhabilitation des infrastructures hospitalières sur l’ensemble du territoire national. Cela va de pair avec la protection sociale de nos concitoyens et la couverture maladie universelle (CMU), lancée il y a un peu plus d’un an aujourd’hui. La CMU sera généralisée en 2019. Nous pourrions évoquer tous les programmes relatifs à l’eau potable, les logements sociaux, l’éducation, les transports… Notons que tous ces efforts et ces réformes ont permis à la Côte d’Ivoire d’améliorer ses performances dans de nombreux classements internationaux de bonne gouvernance, notamment le Millenium Challenge Corporation (MCC), l’Open Government Partnership (OGP), l’Évaluation des politiques et des institutions (CPIA) de la Banque mondiale, les indicateurs Mo Ibrahim, ainsi que ceux des agences de notation. Toutefois, le gouvernement ivoirien reste conscient des axes d’amélioration continus, en recherchant l’efficacité de sa démarche, de façon inclusive et pérenne. Le mot de la fin : 2020, c’est dans un peu plus d’un an. L’émergence de la Côte d’Ivoire ne sera-t-elle alors plus seulement virtuelle ? C’est l’objectif du gouvernement, et nous nous y attelons. ■ 35
INNOVATION
PME ET ENTREPRENEURIAT
L’EMPLOI EN MODE «START-UP» Dream Factory, le premier incubateur public du pays, a ouvert ses portes début août à Abidjan. Il vient renforcer un écosystème destiné à accompagner les entreprises. Et lutter ainsi contre le chômage des jeunes.
par Lilia Ayari
«S
elon les statistiques, sur 10 entreprises créées sans accompagnement, au moins sept cessent d’exister au plus tard à la troisième année de leurs activités. C’est pourquoi la mise en service de cet incubateur vient comme une réponse pour encadrer les PME en phase de création et leur permettre de démarrer sur des fondements solides et durables », a indiqué à la presse Souleymane Diarrassouba, le ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Promotion des PME le 9 août dernier, jour de l’inauguration de Dream Factory. Dédié à l’innovation, celui-ci accueille et accompagne à la fois les start-up et les PME. « Nous développons en propre des programmes d’incubation et d’accélération sur des secteurs traditionnels de l’économie et sur des technologies innovantes : FinTech, Smart City, EdTech, e-santé. Aussi, grâce à notre espace de coworking et à nos services administratifs partagés, nous créons un environnement de travail parfait pour abriter d’autres programmes d’incubation »,
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indique Salimou Bamba, directeur de l’Agence Côte d’Ivoire PME, en charge de la gestion de l’incubateur [voir p. 38]. Par ailleurs, Dream Factory va œuvrer en faveur de l’intelligence collective à travers des séances d’information et de formation. L’objectif est que les PME se mettent à niveau sur des technologies avancées et des compétences à forte valeur ajoutée. Enfin, l’établissement livre une série de services aux entreprises, de la domiciliation au coworking, de l’assistance marketing à la comptabilité et la stratégie, etc.
Au service de l’émergence « L’ambition de Dream Factory est de hisser Abidjan parmi les 10 meilleures villes start-up en Afrique et d’en faire la première ville start-up de l’Afrique francophone subsaharienne, résume Salimou Bamba. Pour structurer les écosystèmes, l’incubateur sera un bassin dynamique d’innovation et un pôle d’attraction pour les entrepreneurs de Côte d’Ivoire ainsi qu’un pôle d’opportunités pour tous les investisseurs, venture capitalists, à la recherche d’un environnement porteur en HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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DR
Inauguration le 9 août dernier par (au premier rang, de gauche à droite) Arthur Coulibaly, conseiller du Premier ministre, Salimou Bamba, en charge de la gestion de l’incubateur, Belmonde Dogo, vice-présidente de l’Assemblée nationale, Félix Anoblé, secrétaire d’État chargé de la Promotion des PME, Souleymane Diarrassouba, ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Promotion des PME, Solange Amichia, directrice générale adjointe du Centre de promotion et des investissements de Côte d’Ivoire, Essay Wouadja, président du conseil de surveillance de l’Agence Côte d’Ivoire PME, et Robert van den Dool, ambassadeur des Pays-Bas. Afrique francophone. » Former les jeunes ainsi que les PME aux métiers de demain, c’est aussi l’un des objectifs suivis par la feuille de route gouvernementale, qui vise à atteindre l’émergence à l’horizon 2020. D’ici là, 2 millions d’emplois devront être créés. Même si plus d’un million d’emplois ont déjà été créés entre 2011 et 2015, notamment en milieu rural grâce à la redynamisation des filières agricoles, et que sur l’année 2017, on dénombre 95 000 nouveaux emplois dans le secteur formel, la cadence ne va pas assez vite. D’où la nécessité de créer un cadre adapté à l’émergence de start-up et à la consolidation des PME. « L’entrepreneuriat et l’innovation comptent, à juste titre, parmi les remèdes les plus efficaces pour lutter contre le chômage des jeunes et la pauvreté, juge Félix Anoblé, secrétaire d’État en charge de la Promotion des PME. Avec le lancement officiel des activités de cet incubateur, nous donnons une chance de plus à notre jeunesse pour matérialiser ses rêves en exprimant son ingéniosité. Nous lui offrons ainsi des raisons d’espérer et des moyens d’entreprendre et de s’épanouir dans ce monde en mutation HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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où l’effet accélérateur de l’innovation est un puissant facteur de création d’emplois. » Une jeunesse qui a déjà adopté la culture de l’entrepreneuriat. Selon les statistiques du Centre de promotion des investissements en Côte d’Ivoire (CEPICI), 7 145 nouvelles sociétés ont été créées de janvier à juin 2018 – soit 67 par jour – contre 6 267 l’année dernière à la même période. Parmi les entrepreneurs, il y a une forte propension de moins de 40 ans. Reste à les accompagner et les consolider. « En Côte d’Ivoire, le taux de disparition des entreprises est de 70 à 80 % lorsqu’elles ne sont pas accompagnées. C’est pour cette raison que nous avons mis en place ce centre, pour faire baisser ce taux autour de 20 à 30 % », a indiqué le ministre Souleymane Diarrassouba. Trois autres incubateurs sont prévus à Yamoussoukro, Bouaké et San Pedro. En attendant, Dream Factory, conçue comme une « usine de transformation ou de réalisation des rêves » selon Salimou Bamba, a démarré ses activités. ■ Pour en savoir plus : agencecipme.ci
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INTERVIEW
SALIMOU BAMBA « LA CROISSANCE DOIT BÉNÉFICIER À TOUS LES CITOYENS » Directeur général de l’Agence Côte d’Ivoire PME depuis septembre 2017, il annonce ses ambitions pour faire de cette structure l’un des acteurs de la future « Abidjan start-up ». propos recueillis par Dounia Ben Mohamed
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epuis décembre 2016, l’Agence Côte d’Ivoire PME a vocation à accompagner les start-up, les très petites entreprises (TPE) ainsi que les petites et moyennes entreprises (PME) vers la maturité. Ce hub public d’innovation est au service des entrepreneurs et travaille sur trois axes : l’incubation, l’accompagnement technique et l’accès au financement. À l’occasion de cette première année en tant que directeur général, Salimou Bamba dresse le bilan de sa structure. AM : La création de l’Agence CI PME émane d’une volonté politique de doter le pays d’institutions et d’outils pour accompagner
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les PME locales, les mêmes qui vont asseoir l’émergence du pays… Salimou Bamba : Dans le cadre du Plan national de développement (PND), qui vise l’émergence de notre pays à l’horizon 2020, 60 % du financement doit être pris en charge par le secteur privé. Or, 98 % du secteur privé est constitué de PME. Donc nous sommes tous d’accord sur le fait que les PME sont des acteurs essentiels, qui contribuent d’ailleurs à 20 % de la richesse nationale. En comparaison, les PME en assurent 40 % en Amérique latine et 50 % en Union européenne. L’objectif n’est pas seulement d’en augmenter le nombre, mais aussi d’avoir des PME compétitives pour permettre la HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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INTERVIEW/SALIMOU BAMBA
création de richesse. Sur les cinq dernières années, le pays a connu une très belle croissance, et les autorités, soucieuses que cette croissance bénéficie à tous les citoyens, veulent qu’elle soit plus inclusive et durable. Les PME y participent. Dans son processus de réforme de l’économie, l’État a décidé, en 2014, de revoir sa politique de soutien aux PME. À partir des résultats d’une étude de la Banque mondiale, il a été décidé de mettre en place une institution unique, sous laquelle seraient rassemblés tous les instruments destinés aux PME. De là est née l’Agence en 2014, avec la parution du décret qui l’institue en décembre 2016. Sous la tutelle du ministre du Commerce, de l’Industrie et des PME, nous avons été dotés d’un budget d’un milliard de francs CFA pour la première année, avec l’objectif, en 2019, d’augmenter les ressources.
opinions des chefs d’entreprise, les dernières réformes, etc. Le troisième instrument en place est la Dream Factory, un incubateur public, avec un premier programme d’incubation, destiné à lancer des entrepreneurs et accompagner ces entreprises vers la création. Nous travaillons sur ce projet avec une ONG américaine, Junior Achievement, logée au sein de la Dream Factory. Son autre atout, c’est de favoriser l’intelligence collective, avec des séances de formation, des ateliers organisés avec le secteur privé, et l’accès à des consultants internationaux. On ne veut pas que la jeunesse rate le train de l’innovation numérique. Or, souvent, quand on baigne dans un univers francophone, l’innovation, qui vient essentiellement du monde anglophone, nous échappe à cause de la barrière linguistique. Enfin, l’incubateur soutient l’administration d’entreprise. On souhaite que les start-up qui se créent puissent domicilier leur entreprise au sein de l’incubateur. Ce qui sera possible à partir de février 2019. Vous travaillez donc sur plusieurs volets, dont l’accès au financement, qui reste le nerf de la guerre… Certes, mais il y a deux éléments à distinguer. Quand un jeune entrepreneur décide de fabriquer des produits de grande consommation, il a beaucoup plus de chances de se faire financer par les banques traditionnelles. En revanche, si une jeune start-up repose sur une idée qui n’a pas encore fait ses preuves, aucune banque ne lui fera confiance. C’est là que le fonds intervient ; c’est un fonds d’appui à l’innovation. Le rôle de l’État est alors de rassurer l’écosystème à travers les business angels, qui sont souvent des sociétés de capital-risques. Il faut favoriser la mise en place de ces structures pour participer à l’épanouissement des start-up. Ce qui passe par la création d’un cadre juridique et réglementaire adapté, ainsi que par la mise en place d’un fonds de l’innovation. Un projet dont les études sont en cours. Il faut savoir que l’État a pu négocier avec les banques un montant de 5 milliards de francs CFA destiné au fonds pour la promotion des PME et de l’entrepreneuriat féminin, notamment grâce au partenariat avec la Banque Atlantique. Le 6 décembre dernier, il a remis des chèques à 180 femmes, pour un montant de 2,5 milliards de francs CFA. On continue de discuter avec les banques afin d’élargir le panier, en faveur des PME de l’agroalimentaire notamment. Des négociations sont prévues entre janvier et février prochains pour des fonds destinés à chacun des secteurs. Ainsi, nous travaillons sur le volet du conseil, mais également sur l’accès au financement.
« Il a été décidé de mettre en place une institution unique, sous laquelle seraient rassemblés tous les instruments destinés aux PME. » Concrètement, comment répondez-vous à leurs besoins ? Dans la pratique, on fonctionne avec différents instruments, et essentiellement trois. Le premier est un guichet unique au service des PME, qui permet de soutenir directement les entreprises. Elles y sont accueillies, y reçoivent des informations sur les dispositifs qui existent, les sources de financement… À côté de cela, l’Agence a mis en place, il y a deux mois, l’Observatoire des PME. C’est un centre de gestion des informations qui permet d’avoir accès à des données fiables, lesquelles existent déjà à travers différentes structures étatiques mais non centralisées et non accessibles. L’objectif de l’Observatoire est de comprendre comment fonctionne le secteur des PME, d’identifier les secteurs florissants, d’évaluer la productivité et la compétitivité de nos entreprises par rapport aux standards internationaux. À partir de janvier, l’Observatoire publiera des notes mensuelles avec des analyses économiques sur les tendances des secteurs, les 40
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JOAN BARDELETTI/PICTURETANK
le BTP, le tourisme, les infrastructures… À chaque fois qu’on Un cadre juridique et réglementaire existe lance un projet, on devrait se demander comment il va bénédéjà aujourd’hui, mais est-il adapté aux besoins ficier à ces entreprises. Par exemple, si je veux prendre une réels des start-up et des PME ? PME pour construire mon métro et que je ne trouve pas les Quand l’on parle de transformation de l’économie, cela compétences, le rôle de l’Agence est d’anticiper et de délivrer passe par de grands défis, et le fait est que nos politiques des formations sur les compétences demandées. publiques ne sont pas toujours adaptées en Afrique. Il faut Un plaidoyer que l’on mène aujourd’hui. repartir en arrière, l’État doit investir dans cette phase. Quand l’État investit dans une start-up, il donne un signe très fort. Il faut des États forts, pour que le secteur privé puisse émerger, mais tout cela a un coût. L’État, de la même manière qu’il investit dans la santé ou l’éducation, doit investir dans la prise en charge de ce dispositif d’accompagnement des PME. D’où la création de l’Agence. L’État s’est engagé, dans tous ses marchés publics, à réserver une partie aux PME locales. Est-ce effectif ? Pour beaucoup de PME, le problème reste l’accès au financement. Les jeunes se lancent aujourd’hui dans l’entrepreneuriat, mais sans financement. Or, pour nous, le premier besoin est le renforcement des capacités. On a besoin de formaliser leur structure, comprendre ce qu’est le métier d’entrepreneur. Les petites et moyennes entreprises, à l’image de ce local de photocopies à Abidjan, Faire appel à des valeurs, du coucréent 20 % de la richesse nationale. rage, et ne pas forcément tout Au terme de votre première année en tant attendre de l’État. Dans aucun pays au monde, on ne vous que directeur général, quel bilan dressez-vous ? signe un chèque en blanc en vous disant : « Allez-y, créez En matière de référencement, l’Agence a prouvé sa crédiune start-up. » Là où l’on doit encore travailler, c’est dans le bilité auprès de tous les acteurs : PME, start-up, partenaires renforcement des capacités. institutionnels… Au début, il est vrai, il y avait un peu de Au-delà des questions macroéconomiques, la question méfiance : on devait se dire encore une machine adminisde l’accès au marché public demeure. Nous en sommes trative qui ne sert à rien. Mais on a pu rassurer et mettre conscients. Depuis 2015, il y a en effet un décret qui prévoit en place des programmes. Aujourd’hui, le bilan est positif. que 20 % des marchés publics aillent aux PME. Mais deux Les gens savent que le guichet est mis en place. Quand des problèmes se présentent : soit celles-ci n’ont pas la capacité partenaires financiers viennent et font le tour de la ville, on de répondre à l’appel d’offres, soit – quand elles le font – elles les oriente vers nous. Mais il nous incombe d’aller plus loin. n’ont pas les moyens de l’exécuter. L’Agence doit pouvoir les Notre défi est d’offrir des packs de service qui vont permettre accompagner, par exemple, dans le cadre des grands chanà ces PME de s’adapter aux standards internationaux. Là, tiers en cours. Il y a le principe intéressant du « penser métier nous serons en mesure d’avoir des résultats. Comme dit préd’abord », déjà en vigueur dans l’Union européenne, qui fait cédemment, les PME créent 20 % de la richesse. Ce chiffre que dans tout projet de développement économique, il est doit doubler. Pour cela, elles doivent être accompagnées, demandé au gestionnaire de mesurer l’impact sur les PME. structurées. Et nous faisons partie de la solution. ■ Les PME, vous les trouvez aujourd’hui dans l’agrobusiness, HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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RÉPARTITION
SOCIAL LA NECESSITE D’INCLURE
Transposer les chiffres de la croissance en réalités tangibles dans le quotidien des populations fragiles reste le défi des autorités. Le Projet filets sociaux productifs (PFSP) est l’un des programmes qui luttent activement contre la pauvreté.
par Lilia Ayari
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n montant non négligeable, 50 millions de dollars (soit 25 milliards de francs CFA), a été décaissé par la Banque mondiale en faveur des populations les plus démunies pour mettre en œuvre le Projet filets sociaux productifs (PFSP). Une initiative du gouvernement avec l’appui technique et financier de la Banque mondiale inscrite dans le cadre de la Stratégie nationale de protection sociale (SNPS). « Le but du projet est de contribuer à la réduction du taux de pauvreté actuel » annonce Koné Kipeya, coordonnateur du PFSP. Un taux qui tourne autour de 46 % selon l’Institut national de statistique (INS). Près d’un Ivoirien sur deux est concerné, dont la plupart résident en zone rurale, loin de la capitale et du boom économique qu’elle connaît. « La gestion rigoureuse de notre économie et la redistribution des fruits de notre croissance sont au cœur de nos priorités. Depuis 2011, nous avons amélioré les infrastructures de base et les services sociaux, afin de garantir l’épanouissement et le développement harmonieux des populations. Au niveau de la santé, d’importants projets de construction d’infrastructures sanitaires ont pu être menés à leurs termes en 2017 », rappelait le président Alassane Ouattara le 1er janvier dernier lors de ses vœux à la Nation. Un vaste programme social qui
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comprend aussi l’éducation gratuite, l’électrification de tous les villages de plus de 500 habitants d’ici fin 2019, l’assainissement, l’accès à l’eau potable pour tous et la construction de 250 000 logements sociaux et économiques dans les cinq prochaines années… Et il ne faut pas oublier l’aide en faveur des plus démunis. « Il est du devoir de la République de leur tendre la main, de leur manifester la solidarité de la Nation en leur offrant une aide sociale temporaire, en attendant qu’ils trouvent une activité génératrice d’un minimum de revenus. » Des mesures dites pro-pauvres leur donne accès gratuitement aux soins de santé, à l’éducation des enfants et propose aux mères de famille les plus pauvres le financement d’actions génératrices de revenus.
35 000 ménages bénéficiaires Ce projet vise surtout le monde rural qui accuse 58,6 % de taux de pauvreté, contre 35,9 % en milieu urbain. Le gouvernement accompagne les ménages les plus isolés, en octroyant gracieusement, jusqu’en 2020, une allocation trimestrielle de 36 000 francs CFA à 35 000 ménages identifiés comme étant les plus pauvres. Ils se trouvent principalement dans les zones Centre, Nord et Ouest. En marge de ces transferts monétaires, HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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MARTIN COLOMBET/HANSLUCAS.COM
Les familles les plus modestes bénéficieront de mesures d’accompagnement et de 36 000 francs CFA chaque trimestre.
le projet prévoit des mesures d’accompagnement visant à faciliter l’inclusion sociale de ces foyers avec des mesures de sensibilisation qui renforcent leur qualité de vie et leur autonomisation par la promotion de l’inclusion productive. Financés depuis près de deux ans par la Banque mondiale, les Filets sociaux ont été prolongés à l’issue de sa phase pilote qui a montré des premiers résultats très positifs. Le gouvernement a obtenu pour cela de la Banque mondiale une enveloppe de 100 millions de dollars (soit 50 milliards de francs CFA) supplémentaires à travers l’Association internationale de développement (IDA). « Il est nécessaire de développer un système de protection sociale de manière à orienter plus efficacement et plus équitablement vers les ménages les plus pauvres les ressources dont ils ont tant besoin, juge Ousmane Diagana, directeur des opérations de la Banque mondiale pour la Côte d’Ivoire. Des systèmes de protection sociale bien ciblés et bien conçus, tel que le système soutenu par ce projet, peuvent atténuer la pauvreté, réduire les inégalités, encourager les investissements dans le capital humain et améliorer la productivité individuelle pour aider les familles à échapper à la précarité. » La décennie de crise ayant participé à une détérioration généralisée du niveau de vie, le projet proposé vise à soutenir le programme de transferts monétaires « plus » de l’État, qui va établir un nouveau système de ciblage, un registre des ménages pour les programmes de protection sociale, un mécanisme de paiement systématique et un système de suivi et d’évaluation fiable. « Dans des pays aussi divers que le Brésil, l’Éthiopie et le Bangladesh, les programmes de transferts monétaires ont montré qu’ils avaient des effets bénéfiques sur la pauvreté et le capital humain à court terme tout en atténuant la transmission de la pauvreté entre les générations à long terme. Ce projet s’inspire des meilleures pratiques internationales pour créer un système de couverture sociale bien ciblé présentant un bon rapport coût-efficacité », poursuit Azedine Ouerghi, chef d’équipe du projet au sein de la Banque mondiale. Dans certaines régions, les ménages pauvres comptant des enfants de moins de 15 ans ou des femmes enceintes parmi leurs membres recevront un numéro d’identification unique, ils seront inscrits au registre des ménages et bénéficieront de transferts monétaires destinés à stimuler leur consommation. Dans les régions ciblées, 105 000 ménages supplémentaires recevront aussi cet identifiant et bénéficieHORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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ront de mesures complémentaires. « Ce projet a pour objectif de promouvoir l’inclusion sociale et d’accroître les moyens de subsistance des ménages défavorisés des communautés rurales. Il aidera les enfants des familles pauvres à bénéficier, sur le long terme, de meilleures perspectives en matière de santé et d’éducation ainsi qu’au plan économique », précise Heba Elgazzar, co-cheffe d’équipe du projet.
« Dans le train de l’émergence, aucun concitoyen ne doit rester à quai » Cette seconde phase va concerner 12 régions. « Après avoir enquêté auprès de 92 640 ménages dont 73 576 sont éligibles au projet, 35 000 ménages ont été retenus dans 540 villages, soit 48 %, et vont percevoir régulièrement jusqu’en 2020 les transferts monétaires à une fréquence trimestrielle de 36 000 francs CFA ainsi que des mesures d’accompagnement », indique Koné Kipeya, par ailleurs directeur de cabinet adjoint du ministre de l’Emploi et de la Protection sociale. Celui-ci se réjouit des initiatives spontanées constatées dans les ménages en matière d’établissement de pièces d’identité, d’extraits d’acte de naissance pour ceux qui n’en avaient pas. Selon lui, « c’est un bon signal de voir les efforts faits pour faciliter cette inclusion sociale, cette identité sociale de populations pauvres qui revendiquent aujourd’hui leur droit à la citoyenneté. La lutte contre l’extrême pauvreté est un impératif d’équité et de justice sociale qui consiste à faire en sorte que dans le train de l’émergence, aucun de nos concitoyens où qu’il se trouve, ne reste à quai ». ■ 43
SANTÉ
AU NOM DE LA MÈRE Lors de la pose de la première pierre de l’édifice, le 29 juin 2013, certains étaient sceptiques. Mais le résultat est bel et bien là : un hôpital de niveau III, au top de la pyramide sanitaire ivoirienne, dédié à la mère et l’enfant. Unique dans la sous-région !
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’Hôpital mère-enfant de Bingerville (HMEB) est un tour de force pour la Première dame, Dominique Ouattara, à l’origine du projet, tout autant qu’une bénédiction pour la population qui afflue depuis son ouverture il y a neuf mois. Les fastes de l’inauguration sont passés, et les patients ont rapidement trouvé refuge dans ce temple moderne de la santé. À l’origine, la fondation Children of Africa a réalisé cet établissement privé à but non lucratif en faisant appel aux dons de généreux mécènes. Cette réalisation majeure a coûté au total 25 milliards de francs CFA (38 109 756 euros). Situé dans la commune de Bingerville, près d’Abidjan, il est équipé de matériels de dernière génération. 130 lits, sept salles opératoires, cinq salles d’accouchements (dont une consacrée aux césariennes),
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un bloc néonatal avec 16 places équipées de couveuses : la structure est performante. Autant que les 475 employés qui la font tourner et bénéficient d’une formation continue. Attentive à chaque détail, Dominique Ouattara a confié sa gestion aux professionnels de la fondation et à ceux de l’ONG française La Chaîne de l’espoir. Le tandem Frédéric du Sart, directeur général, et la professeure Sylvia da Silva-Anoma, directrice scientifique et médicale, est aux commandes. En moyenne, 250 patients sont accueillis chaque jour. Pour les personnes sans ressources et sans assurance maladie, la facture est symbolique : 9 000 francs CFA (14 euros) quels que soient les actes médicaux dispensés ou la durée d’hospitalisation. Cela représente 25 % de la patientèle. Une façon d’offrir « un autre avenir pour les enfants d’Afrique. » ■ HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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par Alexandra Fisch
L’hôpital a été inauguré le 16 mars 2018. Sur la photo de droite, la Première dame, Dominique Ouattara, entourée des enfants de sa fondation.
SERVICE COMMUNICATION FONDATION CHILDREN OF AFRICA - OLIVIER (2)
Au-dessus et ci-contre, les équipements high-tech et les personnels hospitaliers attentifs du nouvel établissement.
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La population du village de Donvagne vit une révolution grâce à la lumière.
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AGRICULTURE DES VILLAGES CONNECTES Énergie solaire, drones… Des outils innovants apportent de la modernité dans les campagnes, accroissant la productivité et la compétitivité. par Lilia Ayari
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novembre 2018. C’est jour de fête à Donvagne, petit village du département de Tanda, dans le Nord-Ouest. Aujourd’hui, celui-ci va être connecté. Et plusieurs personnalités de marque sont attendues : Thierry Tanoh, le ministre du Pétrole, de l’Énergie et du Développement des énergies – remplacé depuis le 10 décembre par Abdourahmane Cissé –, Rémy Rioux, le directeur général de l’Agence française de développement (AFD), Gilles Huberson, l’ambassadeur de France, Gilles Vermot Desroches, le directeur Développement durable de Schneider Electric, ainsi que Patrick Sekongo, le directeur Côte d’Ivoire de l’Institut européen de coopération et de développement (IECD). Cette histoire commence en mars, lors du premier sommet de l’Alliance solaire internationale HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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à New Delhi. Marina Kra Affaoua, la représentante des Solar Mamas, un groupement d’entrepreneuses de Donvagne, interpelle le président français, Emmanuel Macron, pour avoir son soutien sur des projets d’entrepreneuriat et d’accès à l’électricité dans son village. Neuf mois plus tard, celui-ci tient sa promesse. Une centaine de kits solaires et de lampes portables est distribuée à des ménages défavorisés, tandis que la coopérative de femmes est dotée d’un moulin, d’un pétrin et de réfrigérateurs alimentés par un mini-grid solaire de 25 kWc. C’est « une véritable révolution technologique qui sortira ce village du désenclavement, à travers un saut technologique qualitatif et quantitatif », explique Ange Frederick Balma [voir p. 66], fondateur de LIFI-LED, la start-up porteuse de la solution qui va « connecter » Donvagne. 47
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« LIFI-LED CI est la première entreprise africaine spécialisée dans l’intégration des solutions LIFI [pour Light Fidelity, ndlr], d’éclairage intelligent [Smart Lighting], de contenus dynamiques et de supports de communication digitale, souligne Ange Frederick Balma. Nos activités visent d’une part, à réduire le problème du déficit énergétique et de l’accès à l’électricité pour tous, et d’autre part, à résoudre la problématique d’une connectivité à Internet haut débit. » Et de préciser : « Il ne s’agit pas de vendre des luminaires ou des sources lumineuses, mais des systèmes et des solutions utilisant l’éclairage comme un service de communication sans fil et d’Internet très haut débit. Avoir la volonté de numériser le continent africain commence par le doter d’infrastructures. » C’est ainsi que l’entrepreneur a été sélectionné afin de participer au projet collectif porté par la France à Donvagne. « Notre solution combine énergie, connectivité et contenu multimédia, poursuit-il. Le LIFI repose sur l’envoi de données par la modulation d’amplitude des sources de lumière selon un protocole de communication sans fil. Il permet la transmission des données entre Internet, ordinateurs, smartphones, tablettes… » Concrètement, la start-up a déployé son dispositif LIFI dans le village avant de connecter au LIFI un bâtiment et une salle multimédia spécialement aménagée. « Avec une population de plus de 6 000 personnes, ce projet entend impacter toute une communauté, voire des générations entières », assure Ange. Et le dispositif va permettre des formations à des cours d’initiation à l’informatique, au codage, aux réseaux sociaux… Une meilleure maîtrise des réseaux sociaux va permettre aux villageois de faciliter la commercialisation de leurs récoltes et, au-delà, d’ouvrir une fenêtre sur le monde extérieur à tout un village. Car en plus de l’accès à la lumière, la technologie LIFI permet de diffuser des contenus éducatifs et agricoles « afin de révolutionner la vie quotidienne en zone rurale ».
Mettre l’innovation numérique à la portée du monde paysan, avec en priorité 6 millions de petits exploitants.
de l’agriculture. « Fort de ces performances, le pays a connu un boom économique dans les années 1970 et 1980 que l’on a appelé “le miracle ivoirien”. Près de trente ans après, il s’est engagé sur la route de l’émergence à l’horizon 2020 et cela passe notamment par la modernisation, mieux, par la digitalisation du secteur », analyse Jean-Delmas. Son projet Lôr Bouôr (« excellente plantation » en langue lobi) est une plate-forme virtuelle qui permet de regrouper sur un même espace différentes offres et demandes de produits agricoles. Il met à la disposition du monde paysan des solutions simples qui répondent à des problèmes quotidiens. Son autre application, Gelico, est une SaaS (« logiciel en tant que service ») de gestion pour les coopératives agricoles par Web, mobile ou SMS. ICT4DEV digitalise les informations relatives aux activités des paysans pour leur permettre d’être plus efficaces, et donc plus productifs. La plate-forme est également dotée d’un virtual market (« marché virtuel ») pour faciliter la vente des produits des paysans et contourner les difficultés actuelles qu’ils rencontrent dans l’écourenco lement de leurs produits, comme le cacao, le café ou l’anacarde. En Des villages « intelligents » plate-forme permet aux outre, la plate-f pour une agriculture 3.0 connaissance paysans de prendre pren à travers l’apCréer des villages « intelligents », c’est également ment l’ambides prix homologués homolog Djori (« combien » en tion du ministère de l’Économie numérique et dee la Poste qui plication Djori Dj malinké) et dispense une organisait, en août dernier, un hackathon destiné né à encouralangue malinké formation agricole par ger les jeunes à proposer des solutions pour le Projet format de solutions numériques pour le désenclavement nt des SMS grâce au service Agri-conseil. « L’agrizones rurales et l’e-agriculture (PSNDEA). Il faut Agri culture, c’est environ semer les graines d’une agriculture moderne, plus lus cult Mamadou productive et compétitive, selon le leitmotiv de d 40 % de l’économie Sangafowa ivoirienne en matière Jean-Delmas Ehui [voir p. 65], consultant sur lee ivo Coulibaly, de PIB, d’où la nécesprojet et fondateur de la start-up ICT4DEV, qui ministre de l’Agriculture. sité s’investit dans le développement technologique si de multiplier ce
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VINCENT FOURNIER/JEUNE AFRIQUE-REA
Se connecter par la lumière
À Donvagne, une salle multimédia a été aménagée et connectée à Internet grâce au dispositif LIFI.
Ange Frederick Balma (à gauche) présente sa création, le pack LIFI.
genre d’initiative si l’on veut que l’agriculture se modernise et que le monde paysan devienne une classe puissante de la société comme il devrait l’être, exhorte Jean-Delmas. Et ce n’est pas le ministre de l’Agriculture Mamadou Sangafowa Coulibaly qui dira le contraire, lui qui veut faire du secteur agricole l’un des piliers de l’émergence du pays à l’horizon 2020. »
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Un projet e-agriculture L’agriculture numérique occupe une place importante sur la feuille de route du ministre. Un projet, tout simplement intitulé « e-agriculture », est porté et financé par la Banque mondiale, à hauteur de 70 millions de dollars. Il est destiné à mettre l’innovation numérique à la portée du monde paysan, du moins pour quelque 6,1 millions de petits exploitants, qui représentent près d’un quart des 23,7 millions d’habitants que compte le pays. L’objectif est d’accroître leur productivité et de faciliter leur accès aux marchés. « Alors que l’agriculture est l’un des piliers de l’économie ivoirienne, ce secteur n’a eu que peu d’impact sur la hausse des revenus et la réduction de la pauvreté en milieu rural ces dernières décennies, car il est trop exposé aux aléas des cours internationaux, explique Pierre Laporte, directeur des opérations de la Banque mondiale pour la Côte d’Ivoire. Ce projet permettra aux agriculteurs d’accéder rapidement à des informations clés pour leur activité, comme notamment les prix sur le marché des semences. Quant aux autorités, elles disposeront de données pour mieux piloter leurs politiques et leurs stratégies en faveur de l’agriculture et du monde rural. » En attendant, on aperçoit déjà des drones survoler les champs. Plusieurs start-up locales proposent ainsi leur service, comme CI Drone. « Cette entreprise née en 2017 est spécialisée dans la conception de drones sur mesure, HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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indique Titiana Bouabi, le responsable marketing. Ce sont les premiers drones made in Côte d’Ivoire. » Même si certains composants, forcément, ont été importés, la conception est locale. Et parmi ses activités, une grande partie s’adresse directement au monde agricole : « On fait de la cartographie aérienne ; la collecte, le traitement, l’exploitation et la livraison des données aériennes prises par drone, avec une couverture allant jusqu’à 180 ha en 40 minutes, en utilisant différents types de capteurs, déployés sur des drones d’une portée allant jusqu’à 40 km. » CI Drone propose un service en particulier, l’agriculture de précision. La jeune société, qui travaille pour des grands groupes tels que MTN, la SOGB CI, ou encore Marchica – la société marocaine qui travaille sur l’aménagement de la lagune – a récemment mené une mission sur une plantation de 800 hectares, composée essentiellement d’hévéas et de palmiers à huile dans la région d’Alépé. « Le propriétaire souhaitait avoir une vue aérienne sur son exploitation agricole, ainsi qu’une idée sur l’état de santé de sa plantation », raconte Titiana Bouabi. Ces précieuses données vont permettre par la suite de détecter les maladies, d’évaluer les besoins en engrais, en eau, et in fine d’améliorer ses rendements. ■ 49
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Parmi les ambitieux travaux d’aménagement de la lagune d’Abidjan, un pont va relier le quartier de Cocody à celui du Plateau.
TRANSPORTS L’ESPRIT 2020
Dans le contexte de la politique d’émergence, les chantiers se multiplient autant dans la capitale économique qu’à l’intérieur du pays. Les transports sont au centre de la stratégie gouvernementale. Sur terre, dans les airs et sur mer ! par Issiaka N’Guessan, à Abidjan
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mesure que l’attractivité du pays se renforce, les besoins en infrastructures se font ressentir, en premier lieu à Abidjan qui sature en cette fin de novembre. Certes, certains diront « on ne mange pas la route » mais l’impératif de développement du secteur des transports est bien là ! Désengorger le poumon économique du pays, au même titre que réhabiliter et moderniser les grands axes du pays restent la priorité du président Alassane Ouattara. Le chemin n’est plus très long, et le temps file. Avec le concours de partenaires financiers, le pays s’est engagé dans une folle course à l’édification de lourdes infrastructures.
Routes et autoroutes, à toute allure Le 29 novembre, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly était à Bouaké, carrefour économique régional, pour le lancement des travaux de prolongement de l’autoroute du Nord. Longue de 95 km, la section Tiébissou-Bouaké est l’un des tronçons de l’axe stratégique Abidjan-OuagadougouBamako. Cet ancien rêve de Félix Houphouët-Boigny va se concrétiser, l’autoroute du Nord méritera enfin son nom ! Ce 52
projet routier va contribuer au renforcement de l’intégration économique régionale entre la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Mali et le Niger. D’un coût global de 167 milliards de francs CFA, les travaux de cette section vont durer 36 mois. La remise en état des infrastructures routières donne le vertige, 33 000 km sont concernés et le coût est estimé à 1 500 milliards de francs CFA (2,29 milliards d’euros). Les chantiers sont multiples, ils ont commencé par les axes N’douci-Gagnoa-Issia, Yamoussoukro-Daloa et Duékoué-Man sans oublier la voie internationale Bouaké-Ferkessédougou. Le financement se fait dans le cadre de la coopération française, grâce au contrat de désendettement et de développement (C2D), pour un montant de 224 millions d’euros. Le tronçon Bouaké-Ferkessédougou est divisé en deux lots : l’axe Bouaké-Kanawolo d’une distance de 125 km et Kanawolo-Ferkessédougou de 95 km. Plusieurs entreprises sont chargées de la réhabilitation : Bouygues Travaux Publics, DTP (filiale de Bouygues Construction), Colas Afrique, Colas Project, RAZEL et SOGEA SATOM. Mais le projet phare du président de la République reste le métro d’Abidjan, lancé en novembre 2017. La ligne reliant Anyama à Port-Bouët sera opérationnelle en 2022 et transportera alors 530 000 passagers par jour. De quoi fluidifier les trajets des 5 millions d’Abidjanais. Déjà, les autorités planchent sur le plan de réalisation de la ligne 2. HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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SIMON ROBERTS
Le président Alassane Ouattara a effectué avec son homologue français, Emmanuel Macron, un trajet symbolique entre le Plateau et Treichville, lors du lancement des travaux du métro d’Abidjan le 30 novembre 2017.
Autant que possible, les travaux de réhabilitation sont réalisés sans interrompre la circulation et les échanges. Ici, près de Ferkessédougou.
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La remise en état des infrastructures routières donne le vertige, 33 000 km sont concernés et le coût est estimé à 1 500 milliards de francs CFA. HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Air Côte d’Ivoire assure les liaisons intérieures avec Bouaké, San-Pédro, Korhogo, Man et Odienné, en plus de 18 destinations sur le continent.
Déjà il y a un an, le Premier ministre lançait un autre chantier colossal, les travaux d’extension de l’aérogare Sud de l’aéroport Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan, pour un coût de 42 milliards de francs CFA. Les travaux prévus entre 2017 et 2019 présentent trois composantes : accueillir plus de compagnies aériennes, construire un terminal d’aviation d’affaires (FBO) et assurer l’accueil de 10 millions de passagers d’ici à 2025, soit cinq fois plus qu’aujourd’hui. Depuis août 2017, 35 000 m2 d’espace ont été bitumés, des hangars et des halls construits. De 15 parkings, cet aéroport en comptera désormais 26. De quoi placer Abidjan comme LA platef-orme aéroportuaire de l’Union économique monétaire ouest-africaine (UEMOA). D’autant plus que l’aéroport a obtenu le précieux certificat de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) en 2017 lui assurant une ouverture mondiale. Au niveau local, des travaux de réfection de l’aéroport de San-Pédro ont été effectués et livrés pour un montant de 14,5 milliards de francs CFA, concédés par la Banque ouest-africaine de développement (BOAD). Ces travaux visaient « à mettre aux normes sécuritaires » cet aéroport pour avoir la sûreté aéronautique nécessaire et ainsi désenclaver la région, porte de sortie du cacao et prometteuse destination touristique. À Abidjan, les travaux d’extension et de modernisation du port sont en cours, annoncés pour être livrés en 2019. Le groupe chinois China Harbour Engineering Company (CHEC) s’emploie à agrandir le canal de Vridi, aménager et moderniser le port de pêche, offrir plus de hangars pour 54
les débarquements. « Ces travaux permettront d’accueillir tout type de navire d’ici à 2020, notamment ceux de plus de 260 m qui ne pouvaient accoster à Abidjan à cause de l’étroitesse du canal de Vridi », a précisé André Kouadio, directeur de l’ingénierie et de la maîtrise d’ouvrage. Sur les 560 milliards de francs CFA de coûts des travaux, 85 % sont apportés par la banque chinoise Exim Bank, les 15 % restants relevant de l’État ivoirien. À la fin des travaux, le terminal roulier sera long de 500 m, avec deux postes à quai et un terre-plein de 8 ha.
Chemin de fer, accroissement du fret et création d’emplois L’axe ferroviaire, tout aussi stratégique, n’a pas été oublié. 853 km de chemin de fer doivent relier Abidjan-Ouagadougou-Kaya. Sitarail, le concessionnaire d’exploitation entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire a recruté, après leur formation, 50 jeunes conducteurs. La première phase des travaux, 2018-2021, coûtera 85 milliards de francs CFA pour la rénovation du réseau ferroviaire et 70 milliards de francs CFA pour l’acquisition, la modernisation des équipements, locomotives et wagons. À terme, il s’agira de faciliter le transport de 2 millions de marchandises générales, 3 millions de minerais et 800 000 passagers. Dans la même veine, le gouvernement vient de signer avec la Chine un accord de prêt pour la réalisation du port sec de Ferkessédougou visant à « désengorger et rapprocher le port d’Abidjan de ses partenaires ». Parce que demain se prépare aujourd’hui, toutes les routes convergent vers l’émergence à l’horizon 2020. ■ HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Redevenir la plate-forme aéroportuaire de l’UEMOA
Accueillir tout type de navire d’ici à 2020, notamment ceux de plus de 260 m. HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Le port d’Abidjan s’agrandit avec la construction d’un second terminal à conteneurs. 55
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E-sport, e-agriculture, e-commerce… La Côte d’Ivoire, comme le reste du continent, est prise par la frénésie de l’innovation technologique. Une digitalisation de l’économie qui crée de nouvelles niches, dont une génération de cyber-entrepreneurs s’est saisie.
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par Dounia Ben Mohamed
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LE VIRAGE 3.0 EST AMORCE
Au Palais de la culture de Treichville, lors de l’Africa Web Festival (AWF), fin novembre. HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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u’est-ce que le codage ? » interroge Éric M’Boua, maître de cérémonie exalté de l’ouverture officielle de la seconde édition du Festival de l’électronique et du jeu vidéo d’Abidjan (Feja) qui se tenait du 23 au 25 novembre dernier. « Ce sont les outils utilisés pour créer des interfaces entre l’homme et la machine, répond sans hésitation un jeune de l’assistance. On estime qu’il va révolutionner notre façon de travailler. » Ce qui est déjà le cas en Côte d’Ivoire…
Le jeu vidéo : l’avenir de l’Afrique ? Alors qu’une quarantaine de joueurs professionnels du continent étaient réunis au Palais de la culture de Treichville, transformé pour l’occasion en salle de jeux géante, écoliers, lycéens, étudiants et autres étaient invités à découvrir l’univers de l’e-sport (autre nom du jeu vidéo en ligne). « C’est une fierté de voir autant de personnes ici parler du jeu vidéo, confie Sidick Bakayoko, PDG de Paradise Game et organisateur du Feja, avant d’assurer : L’avenir de l’Afrique, c’est vous, les jeunes, et le jeu vidéo ! » C’est le leitmotiv qui sera martelé tout au long de la manifestation dont la vocation, au-delà des compétitions de Just Dance, FIFA, Street Fighter, Fortnite ou encore Candy Crush, est de sensibiliser les jeunes, et tout particulièrement les plus jeunes, aux opportunités qu’offre ce secteur en plein essor. « Le thème de cette édition, c’est le jeu vidéo créateur d’emploi. Les jeunes doivent regarder les jeux vidéo comme un moyen de changer leur vie. C’est pourquoi nous avons invité des experts pour leur parler du sujet et des moyens d’en faire un métier. Pour qu’ils le disent à leurs amis, leurs parents. Si le jeu vidéo à l’international génère plus d’argent que l’industrie du cinéma et de la musique réunis, c’est que c’est possible chez nous, en Côte d’Ivoire et en Afrique ! »
Le marché de l’e-sport : 107 milliards de dollars dans le monde fin 2017… 1 milliard en Afrique Parmi les experts présents, le Français David Téné est une référence pour les passionnés de gaming. Ce journaliste est aussi l’auteur de nombreuses publications dont le Guide du jeu vidéo, premier annuaire des professionnels français du jeu vidéo. « Il ne suffit pas d’être un bon joueur pour travailler dans le jeu vidéo. Et il n’y a pas que les métiers de la création, souligne David Téné avant de poursuivre. Depuis peu, on 58
« C’est bien de jouer, mais vous avez le devoir de vous informer sur ce qui se fait dans le monde. » peut gagner sa vie en jouant ou autour du jeu. Agent, manager, organisateur de compétition, commentateur, streameur qui va diffuser en ligne… Ce sont autant de voies possibles pour ceux qui veulent travailler dans le secteur même s’ils n’ont pas l’âme d’un créateur. » Le directeur stratégie digitale et numérique de Stay Connect, Serge Thiam, qui est aussi à l’initiative des trois plus grandes compétitions panafricaines d’e-sport (l’Orange Football Club eSport, l’Africa Game Show et l’Orange Esport Experience) va même plus loin. « À l’ère du digital, nous devons stopper cette fracture numérique entre l’Europe, l’Amérique, l’Asie, et l’Afrique. Alors, c’est bien de jouer, mais vous avez le devoir de vous informer sur ce qui se fait dans le monde. Le marché mondial du gaming aujourd’hui c’est 107 milliards de dollars fin 2017 dont 1 milliard en Afrique. »
Le gaming pour accélérer la croissance d’Internet et de la culture numérique Si à ce jour, l’Afrique pèse encore peu dans ce business, avec 1 % du marché mondial, la marge de progression est importante à en croire Serge Thiam. Il y a plus de 500 millions de joueurs contre 23 millions en 2014, grâce à la forte progression de ventes de smartphones. « En Afrique, on attendait en 2020, un milliard de clients mobiles. Un chiffre déjà atteint fin 2017. La croissance d’Internet et plus largement du numérique sera portée par le gaming. » Et, citant l’aventure de Kiro’o Games, un jeu 100 % camerounais, Serge Thiam lance : « Voilà les opportunités que vous avez, vous les jeunes, avec l’e-sport ! Derrière votre passion il y a des métiers. » HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Sidick Bakayoko, l’organisateur du Feja, le grand rendez-vous des gameurs du continent.
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Et à Abidjan, ces opportunités apparaissent. Des créateurs de jeux vidéo aux concepteurs de solutions solaires, en passant par des applications en tout genre, l’innovation made in Côte d’Ivoire est au rendez-vous de la révolution numérique que vit le continent. Elle est portée par une génération de jeunes gens, hommes comme femmes, qui pensent, vivent et consomment smart. « Si vous observez les gens autour de vous, qu’est-ce qu’ils font tous les jours, qu’il pleuve ou qu’il neige, malgré les guerres et les crises ? Ils mangent, ils se déplacent, ils communiquent. Donc, quel que soit le projet
monté par un jeune dans la consommation, le transport ou les télécommunications, il aura du succès ! », assure Évariste Akoumian [voir p. 70], cofondateur de Solarpak, qui conçoit des cartables solaires, distribués gratuitement aux écoliers du pays. Pour Ange Frederick Balma, CEO de LIFI-LED CI [voir p. 66], c’est la crise qu’a connue la Côte d’Ivoire qui nourrit la créativité de sa génération. « Notre génération a passé son bac pendant la crise. Aussi, nous avons vite compris que nous devions prendre notre destin en main et apporter des réponses à nos propres problèmes. »
3 questions à… SERGE THIAM « Faire éclore les talents du jeu vidéo » Directeur stratégie chez Stay Connect depuis un an, Serge Thiam a auparavant passé dix-huit ans chez Orange. Spécialiste dans le secteur des télécommunications, il a porté la stratégie e-sport d’Orange. Et il a notamment été à l’initiative des trois plus grandes compétitions panafricaines, à savoir l’Orange Football Club eSport, l’Africa Game Show et l’Orange Esport Experience.
AM : Vous faites partie de cette
à Dakar les 5 et 6 décembre 2018. En parallèle, je dirige Stay Connect, et j’accompagne et conseille quelques start-up africaines évoluant dans l’univers du contenu et du gaming. Dans le cadre du Festival de l’électronique et du jeu vidéo d’Abidjan (Feja), vous avez présenté aux jeunes les opportunités de l’e-sport en Afrique. C’est un marché en plein essor ? Complètement ! Les audiences classiques que nous avons sur le football en général sont en train de converger vers le gaming et l’e-sport. Il y a actuellement plus de 2 milliards de gameurs dans le monde dont les deux tiers sont connectés à Internet. Les jeunes consomment de plus en plus le contenu vidéo issu du gaming. Les cash prize (les gains remportés lors d’une compétition) vont crescendo et grâce à la fibre qui commence à être disponible sur notre continent, les e-sportifs africains commencent à se démarquer ayant désormais accès à une connexion en ligne très rapide.
Quelle place occupe la Côte d’Ivoire sur ce marché ? Est-ce que les acteurs de l’e-sport, et plus largement du numérique, émergent ? C’est encore difficile d’en juger. Notre souci majeur reste l’informel. À cela, il faut ajouter le fait que la plupart des amateurs s’équipent ou profitent du déplacement d’un proche vers l’Europe pour acheter des jeux et des consoles. Vous comprendrez donc assez rapidement qu’il est difficile d’avoir des chiffres précis sur la part du chiffre d’affaires que cela génère. Nous devons évoluer vers des compétitions plus professionnelles, aller au-delà des salles de jeu, et surtout monter des ligues avec l’organisation de compétitions régulières. Il y a des associations, comme Gamer CI, qui font un travail considérable et ont besoin de plus d’accompagnement par des marques fortes comme Orange, très impliqué sur l’e-sport. Le Feja permet également de faire éclore les talents encore cachés. ■ Propos recueillis par D.B.M. DR
génération qui a vécu les premières heures de l’arrivée d’Internet sur le continent… Parlez-nous de votre parcours. Serge Thiam : J’ai vécu l’arrivée d’Internet en Afrique et en Europe dans les années 1990. En 2000, j’ai été lauréat du Centre d’excellence en télécommunications de la Belgique. Grâce à mon diplôme en génie informatique et en gestion de projet multimédia, j’ai été engagé chez Orange, où j’ai pu travailler à l’internationale. Cela m’a permis d’acquérir une solide expérience dans la mise en place et la stratégie d’offres et services de contenus multi-écrans sur la zone Afrique et Moyen-Orient. Adorant le multimédia et les jeux vidéo, j’ai conçu et porté la stratégie e-sport d’Orange en Afrique, avec notamment trois manifestations qui se jouent sur le continent : l’Orange Football Club eSport 2016-2017, l’Africa Game Show 2017 et l’Orange Esport Experience qui s’est tenue
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Soutenir ces jeunes qui créent de la valeur Depuis 2010, il y a une ruée vers l’entrepreneuriat. Combiné à la démocratisation d’Internet et au développement des nouvelles technologies, il en résulte des solutions technologiques qui apportent des réponses concrètes à des problèmes du quotidien. Cela crée au passage de nouvelles niches et participe à la transformation de l’économie. Signe de cette mutation, la multiplication des incubateurs, co-lab et autres « boîtes à outils » à start-up. Parmi lesquels, l’Orange Fab Côte d’Ivoire, le premier accélérateur de croissance de start-up du groupe Orange en Afrique, implanté à Abidjan dès 2014. « Comment consolider la paix si on n’est pas innovant ? » interroge Sadamoudou Kaba, directeur d’Orange Fab Côte d’Ivoire, pour lequel le défi aujourd’hui est d’« entreprendre pour offrir les meilleures solutions au monde. Nous, ce qu’on fait, c’est mettre nos ressources, à la fois techniques, commerciales et financières, à disposition de ces jeunes qui entreprennent, innovent et créent de la valeur ». L’objectif affiché, leur trouver des investisseurs. Car cela reste le préalable à tout déploiement de start-up une fois « incubée ». Ce qui est, entre autres, la vocation de l’Africa Web Festival (AWF), ce projet fou lancé par Mariame Sy Diawara il y a cinq ans. « J’ai entendu dire, rapporte-t-elle, que l’Afrique 1.0 c’était l’Afrique des colonies ; 2.0 celle des indépendances ; et 3.0 celle d’aujourd’hui, une Afrique qui bouge, innove et transforme nos pays comme notre continent. » Une Afrique 3.0 qui s’était elle aussi donné rendez-vous à Abidjan, fin novembre, pour la cinquième édition d’AWF. Aux côtés des entrepreneurs de toute la scène francophone, se trouvaient les opérateurs de télécoms, les régulateurs et les responsables publics, les partenaires institutionnels… « Tous les acteurs de cette transformation numérique », résume Mariame Diawara.
« Le défi est d’adapter l’outil Internet à nos problématiques » Parmi ces acteurs, Habib Bamba, le directeur de la transformation et du digital chez Orange Côte d’Ivoire, était présent et nous explique : « Le défi est d’adapter l’outil Internet à nos problématiques. Par exemple, nous avons mené un projet en partenariat avec le gouvernement ivoirien, qui répond aux problèmes de la circulation en donnant des indications sur les mouvements de population et les points où les autorités doivent mettre en place un nouveau pont, des routes secondaires, plus de bus… C’est ce type d’initiative, que l’on retrouve dans tous les secteurs, qui participe à la vraie transformation numérique. » Cette transformation est celle des sociétés, des institutions et in fine de l’économie. Les autorités ivoiriennes sont aujourd’hui décidées, à travers une feuille de route ambitieuse avec une politique HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Trouver des investisseurs, cela reste le préalable à tout déploiement de start-up une fois « incubée ». e-gouv, e-agriculture, e-transport, etc., à faire des technologies de l’information et de la communication (TIC), un catalyseur du développement socio-économique. « Le secteur du numérique a su se hisser parmi les secteurs les plus performants avec une contribution au PIB estimé à 9 % », a récemment rappelé le ministre de l’Économie numérique et de la Poste, Claude Isaac Dé, soulignant que l’ambition de l’État est de porter ce taux à 15 % dans les cinq prochaines années.
Aller encore plus vite, faire mieux Encore faudrait-il augmenter un taux de connectivité encore faible (27 % en Côte d’Ivoire), alors que seuls 2 % des foyers dans les zones rurales ont accès à l’Internet, contre 16 % en zones urbaines. L’arrivée de nouveaux opérateurs, dont l’Émirati Yahsat qui a lancé récemment Yahclick, un service Internet par satellite à haut débit, devrait participer à la compétitivité du marché ivoirien, animé jusque-là par trois opérateurs, le Français Orange, le Sud-Africain MTN et Moov (filiale du groupe émirati Atlantique Télécom). De même, la mise en place du quatrième câble international sous-marin, par la société nigériane Main One bientôt installée au village des technologies de l’information et de la biotechnologie (VITIB) de Grand-Bassam, devrait démocratiser davantage l’accès à la Toile et à ses multiples opportunités… « Tout ça c’est bien. C’est sûr que sur ces cinq dernières années, l’écosystème ivoirien a évolué. Mais ce n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan. Il faut aller encore plus vite, faire mieux, voire réadapter certains programmes, estime Audrey Ehouman, CEO d’AE Tech Consulting et fondatrice de Women Techmakers. Je ne dis pas qu’on est en retard, mais si on veut vraiment parler de transformation numérique, il va falloir changer de mentalité pour avancer. » Avancer vers la construction de cet écosystème dans lequel ces jeunes pousses vont éclore et au-delà poser les jalons d’une Côte d’Ivoire 3.0 ! ■ 61
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MARIAM SY DIAWARA « NOUS POUVONS VISER L’EXTRAORDINAIRE » Présidente de l’Africa Web Festival, businesswoman active convertie à la modernité, elle souligne le véritable enjeu : le numérique doit créer des emplois pour la jeunesse. propos recueillis par Dounia Ben Mohamed
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uand ils la croisent, les jeunes l’appellent affectueusement « Maman Diawara ». Ils savent que cette infatigable businesswoman les soutient. Présidente de la Maison de l’Afrique-Mandingo, elle a à son actif la création de plusieurs entreprises à travers son groupe de communication Univers mais aussi l’organisation à Abidjan du salon du livre ou du salon des loisirs et du tourisme. C’est donc une femme expérimentée et moderne qui a lancé en 2014 la première édition de l’Africa Web Festival dans la capitale économique. AM : Lors de la dernière édition de l’Africa Web Festival, les jeunes ont participé activement aux débats, exprimant une série de demandes… Mariam Sy Diawara : Et ça, c’est l’Afrique ! Il y a en effet des jeunes avec de nombreuses attentes parce qu’il y a tout à faire. Et les États n’ont plus les moyens. Déjà, la Banque mondiale estime que les budgets alloués à l’éducation et à la jeunesse sont trop lourds. Ce sont des problématiques difficiles à résoudre. C’est pourquoi tout le monde doit s’y mettre et, avec ses propres moyens, il faut apporter sa pierre à l’édifice. 62
Même si l’Africa Web Festival coûte cher, il nous faut trouver les financements. Surtout nous, qui avons déjà élevé nos enfants. Il vaut mieux contribuer au développement de son pays plutôt que de leur laisser des caisses d’argent en héritage. Vous avez créé ce salon en 2014, vous êtes une pionnière dans ce domaine. Croyez-vous toujours à l’impact du digital ? Je souris parce que tout le monde pense que je suis une pionnière. Mais pour être honnête avec vous, je ne comprends pas le tiers de ce dont les jeunes qui m’entourent parlent. En revanche, je suis une pionnière dans la communication, et aussi dans l’entrepreneuriat, mais surtout dans le mentorat. En tant qu’entrepreneuse, j’ai très tôt eu à cœur d’accompagner les jeunes. Et ma démarche dans le numérique s’inscrit dans cet objectif : créer des emplois ! Parce qu’il est là le défi pour notre pays, pour notre continent. Quel est le pari de l’Africa Web Festival ? Est-ce de réunir l’écosystème, ces acteurs qui vont accompagner cette jeunesse et l’aider à s’épanouir en bénéficiant des opportunités qu’offre le numérique ? Tout à fait, c’est bien résumé. Il y a aussi l’idée d’attirer, d’année en année, le maximum de jeunes. Et en particulier HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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des étudiants, parce que personne ne leur parle du quotidien et du réel, des formations qui existent, des nouveaux métiers qui se développent. Ils finissent leurs études et ne savent pas où aller parce qu’ils ne connaissent pas ces nouveaux métiers. Il faut donc arriver à leur ouvrir l’esprit, à leur faire découvrir de nouveaux horizons. C’est pourquoi depuis l’année dernière nous invitons des lycéens. Il faut les sensibiliser en leur apprenant à coder. C’est la raison pour laquelle ce festival est gratuit, pour toucher un maximum de jeunes. L’année dernière nous avions 7 500 participants. Et depuis que nous avons démarré, j’ai près d’une vingtaine de jeunes qui me disent que, quand ils sont sortis du festival, ils ont été approchés par des patrons qui les ont embauchés. Aujourd’hui, je veux qu’ils soient des milliers ! HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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La Côte d’Ivoire est un pays où de plus en plus de jeunes entreprennent dans le secteur du digital. La transformation numérique, est-elle virtuelle ou réelle selon vous ? La transformation digitale est bien là et c’est la force de la Côte d’Ivoire ! Un pays d’immigration, avec toutes ces populations qui se croisent et vivent ensemble, cela génère une créativité incroyable. Il suffit de le voir au niveau du langage. Ces populations qui au départ ne parlent pas toutes le même dialecte et viennent enrichir une langue commune. C’est cela qui fait notre particularité et qu’il faut valoriser aujourd’hui. Notre pays est très créatif, et il avance. Nos jeunes sont très inventifs, s’ils sont bien accompagnés, ils pourront réaliser des choses extraordinaires ! ■ 63
PORTRAITS
GÉNÉRATION DIGITALE Brillants et ingénieux, ces jeunes entrepreneurs apportent des solutions en mode numérique. par Dounia Ben Mohamed ODOMITCHI ANIKPO Présidente-directrice générale d’Adei Institute of Technology, 36 ans
« JE SUIS NÉE et j’ai grandi en Côte d’Ivoire, sur la magnifique côte d’Afrique de l’Ouest. J’ai vécu dans d’autres pays et passé ma vie d’adulte aux États-Unis. » C’est ainsi que se présente Odomitchi, avec fraîcheur et enthousiasme. Environ un an après avoir terminé ses études secondaires, elle s’installe aux États-Unis, à Omaha, pour étudier à l’université du Nebraska. Elle en sort avec une maîtrise en Management des systèmes d’information (MSI). Elle poursuit sa carrière dans le développement de logiciels et travaille actuellement en tant qu’ingénieure logiciel principale pour le géant de la technologie dans la Silicon Valley, Google. Avec plus de quinze ans d’expérience à la tête du développement de systèmes logiciels, la jeune femme met aujourd’hui son savoir-faire au service de son pays, à travers l’Adei, un institut de technologie. Ce projet lui tient tellement à cœur qu’elle lui a donné le prénom de sa grand-mère paternelle, Adei. « L’institut Adei établit un pôle d’entrepreneuriat de classe mondiale dans la région Afrique de l’Ouest, et plus largement 64
dans l’Afrique francophone, explique-t-elle. Nous sommes déterminés à mettre en relation les fondateurs, les technologues et les investisseurs avec des innovations de rupture mondiales. » Basée à Abidjan, l’institution vise à « stimuler le développement socio-économique grâce à la technologie, en renforçant les éléments constitutifs de l’écosystème entrepreneurial », tout en tenant compte de la problématique de l’égalité hommes-femmes. Plusieurs outils sont mis en place
comme un programme de formation aux compétences techniques, un programme en entrepreneuriat et un laboratoire d’innovation. Le 8 décembre, Odomitchi lancera officiellement son incubateur à Abidjan. Ses actions sont guidées par son envie de changer le monde : « Mon but dans la vie est d’aider les habitants de mon pays et d’Afrique à avoir une vie meilleure, en particulier les jeunes et les enfants non privilégiés. » adeiinstitute.org
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CHLOE JACKMAN PHOTOGRAPHY
Un pôle d’entrepreneuriat de classe mondiale
consultation des prix et des tendances des produits sur les marchés urbains et ruraux, explique-t-il. La plupart des agriculteurs sont handicapés par un manque de modernisation de la gestion et par l’absence de systèmes informatiques. C’est ce que Lôr Bouôr va changer : il va fournir des statistiques claires et concises sur leurs activités, leurs productions ou encore leurs parcelles et permettre de remplir les conditions de base pour obtenir un financement. » Une digitalisation de l’activité, en mesure d’attirer les jeunes vers le secteur. Du moins, c’est le pari de Jean-Delmas ! ict4dev.ci
JEAN-DELMAS EHUI Fondateur de la start-up ICT4DEV, 38 ans
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Pour une agriculture 2.0 JEAN-DELMAS EHUI a plusieurs cordes à son arc. Cet ingénieur informaticien spécialiste en Web 2.0 est consultant et formateur en Technologies de l’information et de la communication (TIC), mais aussi fondateur de la start-up ICT4DEV. Née en 2012, l’entreprise vise le développement rural à travers le déploiement des nouvelles technologies. Pour cela, ICT4DEV crée une véritable plate-forme intégrée qui met en relation les acteurs du secteur agricole, leur assure conseils et services afin de moderniser HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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leur activité. In fine, il s’agit de résoudre des problèmes quotidiens du monde rural : la paupérisation, la désorganisation du secteur vivrier et la hausse du coût de la vie, tout en essayant de rendre l’agriculture plus performante et compétitive. Lauréat de plusieurs prix nationaux et internationaux, Jean-Delmas a mené une série de projets dans le domaine de l’e-agriculture, accompagné par la Chambre nationale d’agriculture de Côte d’Ivoire. Ainsi naît Lôr Bouôr. « Ce projet repose sur la gestion en ligne des coopératives, à travers un portail d’information, de formation, de mise en relation, doublé d’une application SMS de diffusion et de
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JOSIAS EZECHIEL YOBOU Fondateur de Jeysm Académie, 30 ans
Prouver qu’il y a des compétences chez nos jeunes JURISTE DE FORMATION, Josias est finalement « tombé dans le digital ». Après sa maîtrise de droit, il se donne un an pour se familiariser avec le secteur. Il multiplie alors les stages avec la ferme intention de décrocher un emploi. « Aujourd’hui, j’essaie d’aider d’autres jeunes à développer leur connaissance 65
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dans le digital, car tout le monde ne peut pas être autodidacte. Même moi, après avoir appris sur le tas, j’ai complété ma formation par des certifications », confie-t-il. C’est cette volonté qui a donné naissance à la Jeysm Académie. Partant du constat que les gens étaient à l’affût de formations, mais locales, il démarre sur sa propre page Facebook avec le hashtag #JEYSM, avant de créer une page où il partage du contenu. Au fur et à mesure des demandes, il en vient à faire un site Web. De cette plate-forme virtuelle, des séances de formations réelles sont organisées en partenariat avec des cabinets agréés. Il raconte son exemple le plus récent : « En mars 2018, dans le cadre d’un
partenariat avec l’opérateur MOOV Côte d’Ivoire, nous avons monté Moov Cyberlab et formé plus de 6 000 jeunes à Abidjan et à l’intérieur du pays. » Si aujourd’hui, Josias vise un développement à l’échelle régionale et continentale, il cherche avant tout à convaincre les jeunes des opportunités que leur offre le digital. En homme convaincu, il « veut prouver que le digital peut nourrir son homme en Côte d’Ivoire et en Afrique », que « c’est un levier porteur vers l’autonomie financière des jeunes ». C’est pourquoi il recrute des formateurs avec une moyenne d’âge de 30 ans. Il les forme tous localement pour prouver également qu’il y a des compétences dans le pays. jeysmacademie.net
ANGE FREDERICK BALMA CEO et fondateur de LIFI-LED CI, 39 ans
Diffuser du contenu grâce à la lumière ABIDJANAIS PUR JUS, Ange est sorti de l’université d’Angers (France) avec un Diplôme des hautes études technologiques (DHTC) en ingénierie informatique. « J’aimais bien tout ce qui est informatique, mais sans idée précise », dit-il en souriant. Sans savoir qu’un jour son métier serait de trouver des solutions pour améliorer le quotidien des populations rurales. Il travaille au début pour de grands groupes en Côte d’Ivoire, dont Orange, et en 2009, décide d’ouvrir une agence de voyages, surtout « par passion ». En 2010, Ange se retrouve avec 10 agences à Abidjan, qui proposent aussi des services de transfert d’argent. « C’était stratégique, ce sont des produits d’appel qui permettent de drainer du monde », analyse-t-il. En 2011, ses parents lui demandent de se rendre au village 66
pour mettre de l’ordre dans la plantation familiale, dans l’Ouest. « Là, pendant deux semaines, je me retrouve pour la première fois sans électricité, ni Internet, à vivre le quotidien des populations rurales. Je l’ai vécu comme un appel à faire quelque chose. » Il rassemble son énergie et développe la solution LIFI pour Light Fidelity (« fidélité de la lumière »), une technologie innovante de communication sans fil, basée sur la transmission de l’information par la lumière. « On peut envoyer son image, son contenu, et cela sans Internet, nous explique Ange. Je suis intéressé par la diffusion de contenu éducatif. Je souhaite devenir le Netflix sans Internet de nos villages pour diffuser le maximum de programmes éducatifs. » Depuis 2016, sa solution a déjà été fournie à des villages en Côte d’Ivoire et à Madagascar. « Aujourd’hui, on est en train de s’exporter au Burkina Faso, au Mali, au Libéria. On leur permet de rattraper leur retard, causé par la guerre, en opérant un saut technologique. Nous sommes cinq dans le monde à travailler sur cette solution, je suis le seul en Afrique. Pour garder cette avance, on va implanter un centre de recherche et développement à Aix-en-Provence en France, où l’écosystème est plus adapté que chez nous. » Entre-temps, la société va installer son usine à Vitib, la zone franche dédiée aux NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication), à Bassam. « On a le terrain, il nous reste à lever les fonds ! » Hyperactif, il inaugurait fin novembre à Donvagne, dans la région du Gontougo, une salle de classe multimédia connectée grâce à son installation. Aidé par l’Agence française de développement et Schneider Electric, il se réjouit de « permettre aux gens de se familiariser avec l’outil et de se former ». lifi-led.ci
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AUDREY EHOUMAN CEO et fondatrice d’AE Tech Consulting, fondatrice de Women Techmakers, 27 ans
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Donner une place aux femmes dans les NTIC DE SA SCOLARITÉ dans des écoles catholiques à Abengourou, où elle est née et a grandi, puis à Abidjan pour le secondaire, Audrey en a tiré rigueur et méthode. Elle poursuit en intégrant la filière Méthode informatique appliquée à la gestion des entreprises à l’université Félix HouphouëtBoigny. Car ce qu’Audrey souhaite faire depuis qu’elle a vu Matrix, c’est « apprendre à développer et à utiliser en même temps des logiciels », à l’image du personnage de Trinite. Les débuts sont difficiles, notamment à cause des maths, mais elle se HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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prend à les aimer. « C’est devenu un challenge », se souvient-elle. Pari réussi, d’autant qu’en 2013, elle est sélectionnée pour rejoindre le programme Google Student Ambassadors, et bénéficie d’une formation complète sur les technologies phares de Google, avant d’en devenir l’ambassadrice auprès des étudiants de son université et des différentes communautés de développeurs de la place. « Pendant cette formation, j’ai développé des compétences pour tout ce qui est technologie, outils Google, etc. J’ai également intégré un groupe de développeur Google. Et chaque année, je suis invitée au siège de Google dans la Silicon Valley, en Californie, pour leur conférence annuelle, où l’on a
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l’occasion de se faire un réseau. » En parallèle, elle crée Women Techmakers Abidjan pour convaincre d’autres femmes de s’initier aux NTIC. « Nous sommes aujourd’hui des centaines, avec cinq communautés dans le pays. On encourage les jeunes filles à choisir des carrières en technologie. Très souvent, elles se disent que ce n’est pas pour elles, trop difficile, trop de maths. Or, de mon expérience au collège, les filles étaient toujours les premières en maths. Ce n’est pas difficile, avec la pédagogie, on y arrive et aujourd’hui on ne peut évoluer sans la technologie. » Pour les attirer, Audrey a une méthode bien à elle. « J’organise des ateliers de maquillage et de relooking avec des coachs. À la fin, je leur explique que si ça leur a plu, c’est moins cher de créer une application pour bénéficier de conseils que de faire venir des coachs tous les jours », raconte-t-elle. Le défi est en effet d’attirer plus de femmes. Même si elles sont de plus en plus nombreuses, elles ne se font pas connaître. « Leur potentiel est réel, reconnaît Audrey, mais elles ont juste besoin d’être encadrées. Généralement, je recommande le mentorat. » Des activités qui ont amené l’entrepreneuse à développer un certain nombre de compétences dans le marketing digital, qu’elle a réuni au sein de sa société, AE Tech Consulting, spécialisée dans le digital, le consulting, la formation, le Web et l’événementiel. À ce titre, Audrey prépare une conférence dédiée aux femmes dans le numérique en Côte d’Ivoire, en 2019. À suivre ! ae-techconsulting.com 67
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Barthélemy Kouamé Directeur général d’Acturoutes et concepteur de Timonn, 46 ans
De l’actu en ligne au e-paiement BARTHÉLEMY est un enfant de Bouaké. Ancien journaliste, il quitte son poste au quotidien Fraternité Matin, pour lancer en 2008 Acturoutes, une plate-forme d’informations sur le trafic routier. « L’idée est de réduire les temps de parcours des usagers de la route, explique Barthélemy. On se plaint beaucoup du temps qu’on perd
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dans les bouchons. Avec Acturoutes, on va analyser toutes les causes de blocage de la circulation, un accident, des travaux, ou tout autre obstacle, afin de permettre à l’automobiliste d’emprunter un autre itinéraire. » Une information transmise en temps réel par SMS, dans sa première version, puis, à l’issue d’un partenariat avec Orange, via son réseau d’abonnés. Une affaire florissante : « Depuis 2010, on a atteint parfois des pics de 200 000 abonnements pour une moyenne de 10 000 aujourd’hui », nous confie-t-il. Membre fondateur de l’Association ivoirienne pour le développement des systèmes de transports intelligents, Barthélemy joue un rôle clé dans l’évolution des transports intelligents dans la région. Les messages sont également diffusés sur les radios locales, la start-up en profite pour enrichir son activité en fournissant des news et en encourageant les médias locaux à adopter des éditions spéciales « mobile ». C’est ainsi qu’en 2011, il lance avec ses anciens employeurs, FRATMAT Mobile, l’édition mobile de Fraternité Matin. Il récidive avec d’autres médias du pays et de la région, devenant un promoteur de la presse numérique. Tandis que l’aventure Acturoutes poursuit son chemin, il lance le 1er janvier 2017 une application mobile, Timonn. Cette solution de paiement est une plate-forme de vente de services divers, de la simple baguette aux tickets de concert. « Un réseau de petits avoirs financiers pour faciliter tout type de paiement, précise Barthélemy. Les Européens et les Américains ont Visa et Mastercard, les Asiatiques ont leur propre carte, comme JCB pour les Japonais ; et les Africains ? » C’est à partir de cette constatation que l’entrepreneur crée Timonn, qui compte près de 10 000 utilisateurs et d’une centaine de commerces connectés à ce jour.
Un mode de paiement totalement adapté au continent et qui pourrait franchir ses frontières : « Timonn est opérationnel partout. Nous avons déjà des utilisateurs en Algérie, en Afrique du Sud, et même en Corée ! » Les difficultés en matière de paiement ne sont pas nouvelles, et Timonn se présente comme la solution : « Les Africains sont handicapés quand ils achètent et vendent en ligne. Les coûts sont trop élevés, les délais pour récupérer les fonds trop longs, Timonn offre aux Ivoiriens et aux Africains la possibilité de vendre à des Européens et aux autres, avec un paiement qui leur est propre et en toute sécurité. » acturoutes.info timonn.ci
YOUSSOUF AHMED Cofondateur d’Orus et créateur de l’application Wasora, 27 ans
Une application écocitoyenne YOUSSOUF a toujours été passionné par l’électronique. Très bon élève, il sort en 2015 major de sa promotion, avec un diplôme en science informatique de Supinfo à Rabat (Maroc). De retour au pays, il commence par concevoir, en freelance, des applications pour des PME, avant de poursuivre l’activité avec sa société, Orus, créée en 2016 avec deux autres acolytes. Et il y a cinq mois, ils lancent Pinsdeal. « L’idée est de répertorier les annonces les plus alléchantes dans une zone en particulier », explique-t-il. Avec près d’un millier de visiteurs par jour, présents dans toute la sous-région, l’application est un succès. Il est très vite sollicité par la geekeuse Édith Brou, pour réaliser son application BuzzyAfrica. Mais aujourd’hui, c’est avec Wasora qu’il se fait remarquer,
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une application écocitoyenne. Youssouf constate que dans certains quartiers de la ville, les camions de ramassage des ordures ne passent pas, ou pas régulièrement. « Les déchets peuvent rester entasser des mois, avec les conséquences que l’on connaît, se désole-t-il. Pourtant, les habitants payent leur cotisation. » Le jeune homme va alors imaginer une appli qui permet aux citoyens de prendre en photo les déchets qui n’ont pas été ramassés et de signaler ces endroits. Il propose ses services aux agences en charge du ramassage qui adoptent l’application et s’y abonnent. HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Résultat, même si elle ne concerne que certaines zones pour l’instant, les organismes reçoivent en temps réel les signalements, qu’ils envoient ensuite à leurs agents pour qu’ils règlent le problème. « On diffuse également des astuces aux citoyens sur le recyclage des déchets, poursuit Youssouf. On espère désormais couvrir toutes les zones et enrichir l’application avec des poubelles connectées sur certains points très fréquentés. Nous aurions des capteurs sur ces zones, que l’on va fabriquer localement à partir d’outils recyclés. » orus.ci
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IVES KONAN, CEO d’Ice et concepteur de l’application Fisca, 35 ans
Un agenda fiscal pour faciliter la vie des entrepreneurs IVES, comme d’autres, a rejoint la capitale économique pour y faire ses études. Après un BTS en finance puis en gestion commerciale, il réussit à convaincre le directeur d’un cabinet à le prendre en stage en finance comptable, sûr que « toutes les opportunités se trouvent 69
PORTRAITS
dans ce domaine ». Un an et demi plus tard, il est débauché par un autre cabinet, avant de finalement travailler à son compte en tant que conseiller. Avec son ancien collègue devenu associé, Ives monte, il y a trois ans, un calendrier fiscal électronique, juste pour rappeler à ses clients les différentes échéances fiscales. Ils veulent ainsi donner aux entrepreneurs la possibilité de suivre leur fiscalité et d’anticiper. C’est une réussite ! Le calendrier électronique va évoluer en fonction des besoins pour devenir une application qui alerte l’usager sur toutes les déclarations fiscales et sociales, avec des mises à jour sur la réglementation, des notifications pour rappel, etc. « L’application existe et est actuellement disponible en version test, explique-t-il. On a déjà plus d’une cinquantaine de téléchargements, sans avoir commencé la promotion. C’est une application qui va réellement aider les professionnels, d’autant qu’elle fonctionne sans Internet. » Le jeune entrepreneur travaille également sur deux autres applis. La première est une plate-forme de communication à destination des agriculteurs. Comme toujours, il est parti de la constatation d’un besoin réel. Cette fois-ci, c’est en rencontrant des planteurs qui ne trouvaient pas d’acheteurs pour leurs sacs de placali (manioc moulu). « La plate-forme va être une interface entre producteurs et distributeurs, mais aussi un espace d’échange et de sensibilisation à destination du monde paysan », précise Ives. La deuxième est une application de conciergerie en ligne, à laquelle il réfléchit depuis quelques années, tout en poursuivant sa formation. Car ce créateur inépuisable termine un master 2 finance au sein du groupe CSI-Pôle Polytechnique. fisca.ci 70
ÉVARISTE AKOUMIAN Cofondateur de Solarpak, 37 ans
Une idée lumineuse pour les écoliers LANCÉ DANS des études de droit à l’université Félix Houphouët-Boigny à Abidjan, Évariste fait un virage à 360° vers les nouvelles technologies. En 2009, il crée sa société de vente de matériels informatiques. Ambitieux, il devient très vite le fournisseur du tout Abidjan en high-tech. Il obtient des contrats avec de grands groupes, tels qu’Orange, CFAO ou Coca, et opère sur tout le pays ainsi qu’au Burkina et au Cameroun. C’est au cours d’une de ses livraisons à Soubré que l’entrepreneur a un déclic. « Sur la route, on est tombé en panne près d’un village, raconte-t-il. Je voyais les enfants qui n’étudiaient pas, alors qu’à cette heure, à la
tombée de la nuit, c’est justement l’heure de devoirs. Quand je les ai interrogés, ils m’ont répondu qu’ils ne pouvaient pas étudier parce qu’ils n’avaient pas de lumière. » Interpellé, le jeune homme va y réfléchir pendant des mois, avant d’avoir une idée de génie. « Dans notre pays, nous avons du soleil. Et puisque ces enfants trimballent leurs affaires scolaires dans des sacs de riz, on va leur fournir des cartables solaires. » C’est ainsi que naît Solarpak qui a déjà distribué 500 cartables solaires à des écoliers du pays. « C’est la première phase. Nous voulons fabriquer des milliers de cartables solaires, s’enthousiasmet-il. Parce que le problème ne concerne pas que la Côte d’Ivoire, mais toute l’Afrique. On travaille sur ce projet avec l’idée de produire localement et de commercialiser sur tout le continent, voire au-delà. » solarpak.net HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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WILFRIED-DÉSIRÉ OUONOUAN CEO de Work’D, 25 ans
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Créer des jeux vidéo porteurs de messages ORIGINAIRE DE BOUAKÉ, WilfriedDésiré est un ingénieur diplômé de l’Institut national polytechnique Houphouët-Boigny (INP-HB) de Yamoussoukro. Tout comme les trois autres cofondateurs de cette start-up de conception de jeux vidéo, Work’D, incubée dans Orange Fab (l’accélérateur de start-up du groupe Orange). « Nous avons fondé l’entreprise en 2017 avec l’ambition de produire des jeux vidéo pour le marché africain, avec des contenus qui nous ressemblent, mais aussi pour permettre aux amateurs du monde entier de découvrir notre HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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culture », explique Wilfried-Désiré. L’équipe a déjà produit Points, un premier jeu, clin d’œil à leurs souvenirs d’écolier. « Points est inspiré d’un jeu, Point-point, utilisé dans les écoles primaires un peu partout en Afrique. Il s’agit de former des carrés à partir de points. » Et si leur jeu comptabilise d’ores et déjà 5 000 téléchargements, c’est parce qu’il se joue également sur smartphone. « Cela permet un accès au plus grand nombre. Le jeu a été téléchargé dans 30 pays, dont l’Afghanistan », se félicite le jeune entrepreneur. Un début prometteur mais pas suffisant pour nos gamers, qui visent 100 000 téléchargements en 2019, en misant sur les réseaux sociaux. En attendant, d’autres produits sont en cours d’élaboration.
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« On travaille sur un jeu qui consiste à suivre le parcours d’un migrant. L’idée est de montrer que derrière les chiffres, il y a des gens, des histoires. Que les décisions ne sont pas faciles à prendre. » C’est la valeur ajoutée de la jeune structure, des jeux qui portent un message. « Je pense également à un autre jeu, autour des commerçantes de rue qui vendent le pain condiment, ce sandwich composé d’omelette, de petits pois et de saucisson que l’on retrouve dans toute l’Afrique de l’Ouest. Moi, j’ai bien découvert le milk-shake dans un jeu vidéo ! » En attendant, la société a développé une seconde activité, la création de vidéos d’animation pour le compte de sociétés ou d’institutions. workd-group.com 71
TECH
Carte blanche à…
ÉDITH BROU L’AFRIQUE SERA NUMÉRIQUE (OU NE SERA PAS !)
CEO d’Africa Content Group, Édith Brou, blogueuse et « africtiviste », est l’une des influenceuses les plus remarquées de la Toile ivoirienne… et bien au-delà. Passionnée de NTIC, elle plaide pour une révolution 3.0.
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de la population africaine a moins de 25 ans. Si jeunesse va de pair avec innovation, alors le continent a de la chance. Depuis plus d’une dizaine d’années, une énergie motrice et passionnelle, tel un rouleau compresseur, conduit la révolution numérique dans tous les secteurs d’activité. De 4 514 400 utilisateurs en 2000, l’Afrique est passée à 345 676 501 utilisateurs en 2017 (chiffres Worldstats), signe d’un énorme changement des habitudes et d’une maturité du marché. 44 % de la population de l’Afrique subsaharienne est abonnée au mobile. Le développement fulgurant du mobile money au détriment des usages bancaires traditionnels en est la preuve. De nombreux services se sont développés autour de ce nouveau secteur : l’envoi d’argent à quelqu’un, même dans des zones reculées du continent, le paiement de 72
ses factures ou de ses frais de transport… Et de nouveaux marchés s’ouvrent : l’assurance, l’épargne ou bien le microcrédit. Ne dit-on pas que chaque problème que rencontre un Africain est une idée de business ? Cette révolution numérique est encore plus visible avec le foisonnement des start-up qui proposent des solutions toutes plus innovantes les unes que les autres et facilitent la vie des populations. En 2015, le nombre d’usagers de services bancaires mobiles en Afrique était évalué à près de 100 millions. Environ 12 % des adultes détiendraient, en Afrique subsaharienne, un compte bancaire mobile qui n’est relié à aucun compte bancaire classique. Une véritable claque pour le secteur bancaire. Mais nous sommes encore loin du cashless… Les Africains, longtemps privés des joies de l’accès à l’e-commerce, peuvent désormais, depuis leurs smartphones, faire leurs emplettes dans une large gamme de choix. Cette facilité de paiement a d’ailleurs eu comme effet de booster le développement du secteur. HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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L’IMPACT SOCIAL EST VISIBLE
La santé n’est pas en reste avec des initiatives numériques telles que Doctix (une start-up malienne qui facilite la prise de rendez-vous des patients chez leur médecin), WapiMED (une application mobile congolaise qui est un portail multiservice), JokkoSanté (une appli sénégalaise qui mutualise les besoins et les disponibilités en médicaments de ses abonnés) ou encore Doctor Gratis (une application nigériane de consultations médicales). Des pays comme le Kenya ou le Rwanda expérimentent déjà le fonctionnement des villes intelligentes à travers l’usage de drones médicaux pour livrer des poches de sang dans les zones rurales. Au niveau des États, la digitalisation semble être de plus en plus au cœur des préoccupations. HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Bien sûr, quand la volonté politique y est, l’e-gouvernance s’installe dans les habitudes des citoyens, pour lesquels le besoin a toujours été latent. Grâce à Internet, on peut donc faire établir un extrait d’acte de naissance, demander un extrait de casier judiciaire, monter son entreprise ou payer ses impôts. Plus de file d’attente, et donc un gain de temps. Et en la matière, des pays comme le Rwanda ou la Tunisie font figure de modèles à suivre et à copier. Par exemple, dans la capitale rwandaise, grâce à la plateforme très populaire Kigali Permit System, les habitants peuvent accéder à l’ensemble de leurs services municipaux sur Internet puisque toutes les procédures ont été dématérialisées. Les administrés peuvent ainsi faire toutes les démarches en ligne. Tout ceci a d’ailleurs un impact sur le secteur de l’emploi, car les besoins des entreprises en profils spécialisés dans le numérique et dans la technologie sont croissants. Une véritable « chasse » aux profils expérimentés est en cours. Chaque jour, je reçois des messages d’entreprises en quête de personnes expérimentées ou de jeunes dans ce secteur. Pour combler ce manque, les formations et les écoles disponibles se multiplient : on peut citer le projet 10 000 codeurs d’OBJIS, l’entreprise de formations numériques Simplon, le cycle de formation spécialement dédiée aux femmes SheIsTheCode, l’école ESATIC en Côte d’Ivoire, Webforce3 with Jokkolabs au Mali ou encore Ecole 42 en Afrique du Sud. Malgré tout ce chamboulement socioéconomique et cet apparent dynamisme, des efforts restent encore à faire au niveau politique pour améliorer la couverture Internet, accroître l’accessibilité, diminuer les coûts… L’industrie du mobile a déjà transformé les sociétés et les économies de l’Afrique subsaharienne, mais il y a encore de la place pour davantage de croissance et d’innovation si les bonnes conditions sont réunies. Avec environ 2 milliards d’habitants vers 2030, il est probable que l’Afrique soit finalement cette locomotive de la croissance mondiale. Les défis à relever sont énormes, mais la croissance est présente et perdure malgré la chute des cours du pétrole. Cette dernière, même si elle est inégalement répartie, touchera de plus en plus de monde et donnera plus d’impact à cette révolution numérique, pour une amélioration notable du pouvoir d’achat des populations. ■ 73
INDUSTRIE
MATIÈRES PREMIÈRES
LA PALME, TOUTE UNE DÉCLINAISON ! Objectif national : un taux de transformation de 50 % à l’horizon 2020. Un challenge qui ne pourra être relevé sans le concours des entrepreneurs locaux. Exemple, le parcours d’Angora Tano, PDG du groupe Africa West Industries (AWI). L’entreprise est aujourd’hui le leader national dans le marché du savon, qu’elle exporte dans toute la sous-région, et dans la confection d’huile de table. Voyage à Bonoua.
par Lilia Ayari
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e long de la route de Bassam, jusqu’à Bonoua, les chantiers se multiplient. Face à la saturation d’Abidjan, de plus en plus d’industriels s’implantent ici, en périphérie. Parmi eux, Angora Tano, le PDG d’AWI, s’y est installé dès 2011. « En pleine crise », plaisante ce diplômé de l’École des Arts et Métiers de Paris. Après un parcours sans faute au sein de grands groupes, ce dernier a créé une société 100 % africaine, spécialisée dans la transformation des oléagineux. « C’est notre vocation, on ne fait que ça, souligne le PDG. On part de l’huile de palme brute pour fabriquer de l’huile de table, à partir de laquelle on obtient de la stéarine de palme, très adaptée parce que c’est de la matière grasse dure pour la production de savon. » Sa marque, KDO, inonde aujourd’hui les marchés locaux et régionaux, c’est un savon de Marseille made in Côte d’Ivoire.
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Après l’automatisation des process est prévue la digitalisation des données pour gagner en productivité. Ici, à l’usine de Bonoua.
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INDUSTRIE
Leader sur le marché du savon, troisième sur celui de l’huile de table « C’est le taux de matières nobles contenues à l’intérieur du produit qui permet de dire que c’est du savon de Marseille [appellation liée à la méthode de saponification, ndlr]. Il doit être supérieur à 55 %, nous sommes à 68 % », explique Donatien Beli, le chef d’usine. Une caractéristique qui a fait d’AWI le leader national du marché du savon. « On a plutôt bien évolué, confirme modestement Angora Tano, précisant : nous sommes devant Unilever. » Un détail de taille, Unilever étant le géant anglo-néerlandais, leader mondial des produits de grande consommation. Mais l’aventure ne s’arrête pas là. Depuis 2016, AWI produit de l’huile de table. Cette fois, la société ne se positionne pas en pole position, du moins pas encore. « On est troisième sur ce marché derrière Sania et 76
Safi… mais on les talonne », sourit ce patron en train de donner, lui-même, une séance de formation à ses collaborateurs. Si l’activité est récente, elle est en pleine évolution au sein du groupe. « Notre ambition est de remplacer les importations asiatiques d’oléagineux dans la région. » L’Afrique de l’Ouest connaît effectivement un fort déficit en huile, « de l’ordre de 1,8 million de tonnes pour la CEDEAO et 1,2 million pour le Nigeria », souligne Angora Tano, chiffres en tête. Il y a un déficit à combler et un marché sur lequel sa société est bien positionnée, exportatrice dans une dizaine de pays. 60 % de leur production de savon est exportée dans la sous-région, le Ghana est leur premier marché, suivi du Bénin et du Togo. « On va continuer à se déployer dans la région, notre marché naturel, ajoute-t-il, jusqu’au Sénégal, la Guinée, le Liberia, le Mali. » HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Angora Tano, PDG d’AWI, a été élu « Meilleur entrepreneur de l’année 2018 » lors du forum de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI).
Dans l’usine de Bonoua, où est fabriqué le savon KDO.
La prochaine étape, c’est le digital Et pour s’imposer comme leader, il fallait développer le groupe et ses infrastructures. « Nous avons aujourd’hui trois usines. La première, ici à Bonoua, est dédiée à la transformation, où l’on réalise le produit fini, le savon et l’huile de palme. La deuxième à Aboisseau date de 2016 et la plus récente, à Grand Lahou, a été mise en route cette année. » Et de rappeler : « Il faut savoir que le processus de fabrication se fait en trois étapes. La première, la production des régimes, est assurée par les planteurs villageois, qui produisent 70 % des régimes contre 30 % par les industriels sur leurs propres plantations. Nous n’avons pas de plantations, nous nous fournissons via les planteurs. La deuxième étape est la première transformation qui va permettre de fabriquer l’huile de palme brute. Laquelle va ensuite être raffinée dans les usines. » Avec une capacité de raffinement de 100 000 tonnes par an, le groupe produit aujourd’hui 50 000 tonnes de son approvisionnement, soit 80 % de ses besoins. Mais la production doit encore augmenter. Pour atteindre ces nouveaux objectifs, l’entrepreneur mise sur le digital. « Nos process sont déjà entièrement automatisés. La prochaine étape est de digitaliser. Toutes les informations vont être transmises à une base de données en temps réel. » De quoi renforcer la compétitivité du groupe qui, avec 300 salariés, a affiché en 2017 un chiffre d’affaires de 36 milliards de francs CFA. ■ HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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ZONES INDUSTRIELLES : RÉHABILITATION ET CRÉATION SI LES INDUSTRIELS sont de plus en plus nombreux à s’engager dans la modernisation de leurs équipements comme de leur process de production, c’est aussi grâce aux autorités qui ont amorcé la réhabilitation des zones industrielles. Ainsi, 140 ha de parcelles aménagées devraient être disponibles d’ici à 2020 au niveau de la nouvelle zone industrielle d’Akoupé-Zeudji (Sud) estimée à 940 ha, a annoncé Souleymane Diarrassouba, le ministre du Commerce, de l’Industrie et des PME. Tandis que la réhabilitation de la zone industrielle de Yopougon s’achève, celle des zones industrielles de Vridi et de Koumassi comprend des travaux de grande ampleur concernant la voirie, le réseau d’assainissement et de drainage, le réseau d’alimentation en eau potable, le réseau de télécommunication, le réseau électrique et de gaz, la sécurité, l’aménagement des aires de stationnement et également les espaces verts. C’est notamment pour financer ces zones qu’une convention de prêts a été signée le 27 novembre avec trois établissements bancaires, Ecobank, la Banque atlantique de Côte d’Ivoire (BACI) et la Banque nationale d’investissement (BNI) à destination du Fonds de développement des infrastructures industrielles (FODI). Ainsi, 83,5 milliards de francs CFA vont permettre de financer ces aménagements de zones industrielles pour le plus grand bonheur des entreprises en demande. ■ L.A.
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FINANCE
BANQUES LES CLASSIQUES ET LES MODERNES Avec 17 milliards de francs CFA (soit plus de 25 millions d’euros) de transactions par jour, le mobile money est en plein essor, poussant les établissements traditionnels à s’adapter. par Lilia Ayari
S
i le taux de bancarisation reste encore faible, en revanche le mobile banking (services bancaires à partir d’un téléphone mobile) est en plein boom, avec 10 millions de détenteurs de compte mobile money dans le pays. Un paradoxe ? Non, plutôt les premiers pas dans l’ère de l’e-banking et de ses opportunités, en faveur de l’inclusion financière. Celle-ci reste un défi majeur pour le pays, qui ne compte que 19,7 % de bancarisés au niveau national. Le hub de l’Afrique de l’Ouest accuse à ce niveau un certain retard que les autorités sont bien décidées à rattraper.
Tirer un avantage du développement technologique et numérique « Le secteur financier peut et doit tirer un avantage du développement technologique et numérique. Les raisons de croire en l’éclosion d’un secteur bancaire beaucoup plus dynamique s’appuyant sur les FinTech sont nombreuses », a indiqué le 26 avril dernier Bruno Koné, alors ministre de la Communication, de l’Économie numérique et de la Poste, à une conférence sur la FinTech organisée par Attijari Bank, à Abidjan. À cette occasion, il avait invité les banques à comprendre les besoins des populations pour y apporter des solutions, et à faire appel pour cela aux 78
start-up locales. Une démarche dans laquelle certaines se sont déjà engagées. À commencer par Orange, entré en banque fin 2017. En Europe, l’opérateur de téléphonie français a lancé Orange Bank, une banque 100 % numérique. En Côte d’Ivoire, où le groupe domine déjà le secteur de la téléphonie mobile – avec plus de 14 millions de clients (soit plus de 40 % du marché) et près de 6 millions d’abonnés au mobile money –, cela se traduit par le lancement d’une carte Visa qui autorise les retraits, les paiements et d’autres transactions dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Une incursion dans le secteur qui n’a pas été sans bousculer les banques classiques. Même si certaines ont également fait le pari du digital. La Société générale a conçu Yup, un porte-monnaie électronique qui permet à son utilisateur d’avoir accès à différents services financiers, tels que des dépôts ou des retraits d’argent, le règlement de factures, le virement d’un salaire, ou encore la possibilité d’effectuer des transferts domestiques. « Les Africains, par leur façon de consommer les produits et les services bancaires via l’offre mobile, sont en train de réinventer la banque de demain, observe Alexandre Maymat, responsable Afrique, Méditerranée et Outre-mer de Société générale, lors du lancement de Yup. Ignorer ce comportement, ce serait se tirer une balle dans le pied. » HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Standard Chartered Bank a lancé à Abidjan, en mars dernier, sa première banque digitale en Afrique.
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Le premier service 100 % en ligne Récemment arrivée sur le marché, Standard Chartered Bank est allée encore plus loin, introduisant une révolution en Côte d’Ivoire, avec le lancement de la première banque digitale. « Désormais, il devient possible d’ouvrir un compte en quinze minutes maximum à partir d’un smartphone », avait assuré Isaac Foly, le directeur général de la filiale ivoirienne, lors du lancement officiel de l’offre en mars dernier. Et c’est précisément la dynamique du mobile money dans le pays qui a conduit Standard Chartered Bank, présente dans 16 pays en Afrique, à choisir la Côte d’Ivoire pour la première étape du lancement de sa banque digitale. « Une réponse à l’inclusion financière, commentera Bruno Koné. Il y a plus de détenteurs de compte d’argent mobile que de détenteurs de compte bancaire. Le basculement s’est fait en 2017, et il va s’accroître. » Déjà, force est de constater la multiplication des agences, des boxes et autres points de réalisation de prestations de mobile money, à Abidjan, comme à Bouaké, Yamoussoukro ou d’autres grandes villes. Alors qu’en Europe, la tendance est à la restructuration et à la réduction du nombre d’agences physiques. Pour faire face, les banques se sont également mises à l’e-commerce. La Société ivoirienne de banques (SIB) veut séduire les PME en leur proposant plusieurs produits : Conforming leur offre la possibilité de dématérialiser le règlement de leurs fournisseurs, tandis que Leasing se veut une solution de financement pour leurs investissements immobiliers. Dans le cadre de ce dernier, la banque détient 20 % des parts de marché sur deux ans. Et alors que l’entreprise Visa s’implantait dans le pays en 2017, l’United Bank for Africa (UBA) HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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et la Banque internationale pour le commerce et l’industrie en Côte d’Ivoire (BICICI) prennent désormais les devants et adoptent le paiement en ligne. Un produit destiné tout particulièrement aux entreprises. « Cette offre de paiement, agile et flexible, permet de répondre aux besoins quotidiens des entreprises qui souhaitent proposer à leurs clients une méthode simple et sécurisée pour payer des marchandises, des services, des billets de transports, des factures, sans avoir à se déplacer ou à recharger un compte prépayé », indiquait la BICICI dans un communiqué. Cette dernière a également décidé d’aller à la rencontre des consommateurs avec un programme pédagogique diffusé sur une radio locale, destiné à démystifier la banque. Baptisé « Sacré Monsieur Deperpignan », ce programme consiste à aborder et à expliquer, de façon simple et drôle, plusieurs sujets liés au secteur bancaire. Or, si les huit millions d’abonnés à Internet, les sept millions de comptes mobile money et les 17 milliards de francs CFA de transactions par jour participent à l’inclusion financière, il n’en demeure pas moins que les zones les plus reculées, où Internet n’est pas arrivé, restent hors des écrans. « Il ne faut pas se leurrer, les derniers chiffres sont enregistrés grâce à l’essor du mobile banking », nuance Charles Boa, directeur de communication de la jeune Agence de promotion de l’inclusion financière (APIF). Mise en place en mai dernier, l’APIF est destinée, entre autres, à adapter l’offre de services financiers aux populations à faibles revenus, à faciliter l’accès au financement, et ainsi à lutter efficacement contre la pauvreté. Cette création vise à inciter tous les acteurs bancaires (des établissements financiers aux compagnies de téléphonie mobile) à développer leurs services en faveur des plus défavorisés. ■ 79
BUSINESS
LE MADE IN CÔTE D’IVOIRE SANS COMPLEXE NABIL ZORKOT
Des jus, des crêpes, du prêt-à-porter, du wax, du bio… De plus en plus de créateurs se lancent dans la production locale. Et regardent déjà au-delà des frontières du pays. Focus sur neuf entrepreneurs de talent. par Dounia Ben Mohamed 80
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Les créateurs Lili Création, d’Abidjan à New York
CAPTURES D’ÉCRAN
Sali Ouattara a ouvert quatre autres boutiques en Afrique en plus de celle d’Abidjan.
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Dans le quartier du Vallon, rue des Jardins, les boutiques de prêt-à-porter féminin se succèdent et se ressemblent. Une pourtant se démarque, Lili création, nouvelle coqueluche des fashionistas de Babi… et d’ailleurs. « J’aimais concevoir mes propres tenues, j’ai commencé par les poster sur les réseaux sociaux, tout le monde m’a appelé pour en commander, et c’est comme ça que le business a démarré », raconte Sali Ouattara, tout juste 27 ans. La petite entreprise de cette Abidjanaise installée aux États-Unis a en effet connu un décollage fulgurant. « J’ai commencé par ouvrir un petit atelier, avec un seul couturier pour faire du sur-mesure. Deux ans après, j’ai eu l’opportunité d’aller poursuive mes études aux États-Unis en marketing et gestion. J’ai fini par m’y installer ». Déjà diplômée d’un master en finance, Sali va dès lors mettre toutes ces compétences au profit de son affaire. Et ça marche ! « Dès le départ, j’ai pensé cette activité comme un business, sans forcément le côté styliste, car je ne le suis pas. En août 2017, j’ai fermé l’atelier pour ouvrir ma première boutique, ici, rue des Jardins », ajoute-elle. En suivront quatre autres, à Bamako, à Brazzaville, à Ouagadougou et la dernière en date, ouverte fin novembre, à Dakar. Le tout en moins d’un an. « Ça marche très bien, malgré la concurrence… Mais ça aussi, c’est le business. » Et pour se démarquer, Sali n’hésite pas à mettre le wax à la portée des jeunes générations, nourries aux autres tendances made in USA. « J’adapte les tissus africains à ce qu’aiment porter les jeunes aujourd’hui. Sans perdre notre valeur ajoutée, le pagne. » Le pagne est ainsi mis sous toutes ses coutures, des sandales aux maillots de bain en passant par les sacs à dos et parapluies. Déjà très présente sur les réseaux sociaux, Sali, qui a reçu le prix Vlisco en 2015, a très vite adopté l’e-commerce pour porter encore plus loin sa marque. lilicreation.net 81
BUSINESS
Naïma Dolls, « des poupées qui nous ressemblent »
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Quatre gammes de poupées ont été développées : grande (50 cm), mannequin, poupon et tradition. prisée des fashionistas de la région et de la diaspora. Avec Naïma Dolls, lancée en 2014, elle récidive avec un produit pour les enfants, mais toujours très mode. « Nous lançons une série collector signée par des stylistes de renom. » Et récemment, début 2018, Sara Coulibaly a ouvert le premier salon de coiffure pour enfants à Abidjan. Avec 5 000 poupées produites l’année dernière, Sara vise désormais le double. « Nous sommes distribués dans les grandes surfaces qui nous ont fait confiance. On propose aussi nos modèles en ligne et on vend ainsi en Afrique, en Europe, aux Antilles, aux États-Unis. Mais on ne peut satisfaire la demande. On doit produire plus. » D’autres jouets sont au programme avec toujours le même ADN, « Africa is beautiful ». naimadolls.com HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Des cheveux tressés ou afro, des jupes en wax avec les accessoires assortis, les poupées Naïma ont tout des plus grandes mannequins. Et c’est précisément là l’idée de leur créatrice, Sara Coulibaly, Ivoirienne de 32 ans. « Des poupées qui nous ressemblent », selon le slogan de cette ligne de jouets qui propose plus qu’un moment ludique. « J’appartiens à cette génération de femmes de la diaspora, revenues au pays aujourd’hui et adepte du nappy. Et comme toutes les mamans, quand j’ai eu ma fille, Naïma, j’ai cherché des jouets qui lui ressemblent, sans les traits caricaturés. Parce que nous posons un regard plus objectif, explique Sara. Les enfants ne sont pas toujours conscients, mais c’est dès cet âge qu’ils doivent être sensibilisés sur ces questions. Être belle au naturel, avec la peau noire, les cheveux crépus. Les poupées Naïma ne s’adressent d’ailleurs pas qu’aux Africains, mais à tous ceux qui s’intéressent à la culture d’Afrique et des Caraïbes. » Des poupées de différents formats, styles, et entièrement conçues en Côte d’Ivoire, dans l’atelier de Sara qui en réalise les dessins. Cette expérience entrepreneuriale est loin d’être la première de cette multidiplômée en dessin d’architecture, en intelligence artificielle et en entrepreneuriat. En 2012, elle se fait connaître avec My Miri, une marque de chaussures
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TSGR, le wax symétrique Il a habillé Soprano, Black M, le roi du Maroc Mohamed VI… En toute simplicité, Tiécoura Sangaré, 32 ans, s’impose dans le monde de la mode, à Abidjan comme à Paris. Alors que sa boutique éphémère ferme ses portes à Abidjan, il poursuit rue de Lappe à Paris, juste avant les fêtes de Noël. Tiécoura fera sur le tard sa plongée dans l’univers de la mode alors que, de retour au pays pour rendre visite à la famille, il se soumet, malgré lui, à une tradition locale qui veut qu’on remette au visiteur un pagne. Or, à ce moment-là, le jeune homme n’en est pas adepte. « Je trouvais ça toujours trop ample. » Et pourtant, quand son regard croise un majestueux paon au centre d’un tissu en wax, c’est le déclic. Résultat, en 2015, il crée sa griffe, TSGR, qui réalise des tuniques, son produit phare autant que ses fameuses espadrilles en wax. La particularité ? Tout est parfaitement symétrique. Dessinées de ses mains et confectionnées dans son atelier à Abidjan (ou pour certains articles en Espagne ou au Portugal), ses créations se démarquent et s’adaptent à la clientèle HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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TSGR modernise le wax grâce à une approche moderne urbaine et chic. occidentale comme africaine. « Je veux prouver qu’avec du wax on peut travailler de la même manière que sur n’importe quel autre tissu. » Avec un credo, le fait main. « On fait en sorte que le fait main devienne du prêt-à-porter », dit-il, et il séduit jusqu’en Islande ! Dans la simplicité, il mène aujourd’hui un projet des plus ambitieux, « installer un show-room ici à Abidjan avec un lieu qui devienne incontournable et une clientèle dans le monde via le commerce en ligne ». Objectif déjà en partie atteint. tiecoura-sangare.com/fr 83
BUSINESS
Les transformateurs Sub Saharian Bio, belles au naturel
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Maïmouna Coulibaly, 31 ans, développe, produit et commercialise des cosmétiques naturels et des soins de bien-être à partir de matières premières locales sous la marque Sub Saharian Bio. « La particularité de nos cosmétiques est les vertus thérapeutiques qu’ils possèdent au-delà de leurs propriétés physiques », explique Maïmouna qui puise dans l’aromathérapie. « Avec l’utilisation des composés aromatiques de plantes à des fins médicales, nos cosmétiques apportent du bien-être : apaisant, relaxant, stimulant, tonique… Nos soins sont des moments privilégiés et agréables que nos clientes s’offrent au quotidien chez elle. » Une clientèle essentiellement féminine, âgée entre 35 et 60 ans, de classe moyenne supérieure à classe aisée, active, qui aime se faire plaisir et a les moyens de le faire. Une aventure entrepreneuriale que la jeune femme n’avait pas anticipée. « J’ai fait quatre années de journalisme, pour ensuite travailler dans l’évènementiel
et le cinéma jusqu’en 2014 où j’ai découvert le monde des soins naturels. Sujette depuis la naissance à des problèmes de peaux récurrents, j’ai profité d’un voyage en Inde, pays réputé pour sa science des plantes, pour rechercher des alternatives naturelles. Non seulement, cette démarche s’est avérée concluante, mais elle a surtout suscité en moi une passion, un désir de faire bien plus que d’être consommatrice ou importatrice de produits provenant de l’extérieur. » Elle démissionne alors en 2015 pour se consacrer à des études en cosmétiques naturels et des recherches sur la pharmacopée africaine. « Je découvre alors que non seulement, nous avons une richesse non exhaustive en termes de matières premières à forte valeur ajoutée dans l’industrie cosmétique, mais surtout, en m’engageant à les valoriser par leur transformation, je crée de la richesse et de la fierté pour ma communauté. Je crois fermement qu’être entrepreneur nous permet de changer les choses. » Et d’ajouter : « Aujourd’hui l’un des défis majeurs du continent est la transformation locale de ses matières premières pour donner un nouveau souffle à notre économie et inverser les rapports de force économiques inégaux. Sub Saharian Bio, c’est ma contribution à cet idéal. » subsaharianbio.com
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Instant chocolat, la #CocoaRevolution !
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Les Jus Martha, 100 % rafraîchissant Depuis six mois, de nouvelles bouteilles de jus de fruit apparaissent sur les étalages des grandes surfaces d’Abidjan. Bissap blanc, bissap rouge, coco ananas, gingembre passion et agrumes, cocota orange ou encore mojito, les goûts semblent infinis. C’est le fruit du travail de Carole Assoukpou, qui décrit son parcours : « J’ai suivi des études de marketing au Sénégal avant de travailler dans la communication. J’ai alors mené une mission de consulting pour une femme qui opère dans la transformation de produits locaux. » Une expérience qui réveille certains souvenirs. « Petite, après la mort de notre père, ma mère, qui était secrétaire dans la fonction publique, pour boucler les fins de mois difficiles, pressait des fruits qu’elle mettait dans des sachets et nous l’aidions. Je lui ai toujours dit qu’un jour, je lui construirais une usine de Bissap. » Promesse tenue en avril 2018, quand elle fonde Les Jus Martha, en hommage à sa mère. « On fait de la transformation de toutes sortes de jus. On a d’excellents fruits en Côte d’Ivoire mais les jus ne sont pas forcément bien conditionnés. On a installé une unité de transformation pour combler ce manque et ça fonctionne. » Mieux, en moins de six mois d’existence, Carole a décroché un contrat avec Carrefour, Shell, et plusieurs restaurateurs locaux. « Le premier week-end à Carrefour, nous avons vendu 150 bouteilles. » Depuis, sur l’ensemble de ses distributeurs, elle en vend 2 000 en moyenne, créant ainsi 10 emplois ! Le défi est désormais de répondre à la demande en augmentant la production, insuffisante pour répondre à la demande. D’autant que la jeune société pense aussi diversification. « On va produire des sauces d’accompagnement pour faciliter la vie des femmes qui travaillent ». Et partir à la conquête du continent ! Page Facebook HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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En face du célèbre Allocodrome, à Cocody, au milieu des odeurs de poulets et d’allocos, un parfum de chocolat s’échappe de l’atelier d’Axel-Emmanuel Gbaou. À 34 ans, cet ancien banquier dirige Instant chocolat, l’une des rares marques de chocolat 100 % ivoirienne. Cette entreprise prospère est présente sur le marché international avec un véritable impact social local. « J’ai étudié le droit public et les sciences politiques à l’université d’Abidjan puis j’ai effectué un master en fiscalité avant de devenir banquier. Mais, depuis tout petit, je rêvais d’avoir mon entreprise et d’être mon propre patron. » Finalement, le cacao va lui permettre de réaliser ce rêve. « Cela m’agaçait de ne pas voir de marques ivoiriennes de tablettes de chocolat dans les rayons des supermarchés. Il fallait agir et vite. J’ai quitté mon poste de banquier. » Décidé à transmettre sa passion à d’autres, celui qui sera sacré champion de Côte d’Ivoire et vice-champion d’Afrique de chocolat-pâtisserie mène un projet « chocolaterie en milieu rural ». Il a décidé de former, en trois ans, 25 000 femmes productrices de cacao afin qu’elles soient vraiment indépendantes financièrement. Pour le moment, elles apprennent la torréfaction des fèves ainsi que le calibrage. Puis, il produit du chocolat pâtissier dans son atelier à Abidjan. Huit cents femmes ont été formées à ce jour. Elles se chargent de transmettre leur savoir-faire à d’autres productrices. Grâce à cela, leur production est commercialisée. » À côté, il développe sa marque avec impatience. « Je vais lancer une nouvelle collection de tablettes de chocolat, emballées dans du pagne. Et fin 2019, je compte exporter les premières tablettes de chocolat fabriquées dans un autre pays d’Afrique avec des recettes innovantes. La #CocoaRevolution est en marche ! » axelemmanuelchocolatier.com
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BUSINESS
Les promoteurs Le Comptoir des Artisans, le concept store rêvé
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La boutique propose un large choix de classiques revisités : masques, plaids brodés, bougies ou statuettes. amateurs d’art cherchent le beau, le travail bien fait, de qualité. Les créations sont ivoiriennes, mais viennent également du Niger, du Burkina Faso, de Guinée ou du Sénégal. À l’étage, se trouve un salon de thé, pour y déguster entre autres un chocolat produit localement, dans un décor emprunté aux salons parisiens, avec des rideaux, de la moquette. Tout un concept en somme. comptoirdesartisans.ci HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Le Comptoir des Artisans est dédié à l’artisanat local, mais pas n’importe lequel, et pas uniquement. Ici on accueille toutes les créations made in Africa à condition qu’elles s’intègrent à un certain standing. « Le Comptoir des Artisans a été créé en mai 2015, il est né du rêve d’une famille très amoureuse de l’art et qui a voulu offrir un espace à tous les artisans qui n’avaient pas la possibilité de s’installer à leur compte », explique Georges Gnamognilo, le responsable de la boutique. La famille Yapobi a depuis fait de cet établissement une référence à Abidjan et au-delà. À côté de leur propre atelier où sont conçus des coussins en bogolan – un tissu produit dans le nord du pays –, on trouve des bougies en forme de statuettes qui ont fait leur renommée à leurs débuts, ou des chaussures pour homme. Toujours dans la modernité, ces
Marin, un soupçon de Bretagne parfumé à l’alloco
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Fruitizz, le premier bar à fruits de Babi Cynthia Aïssy Adédiran a une passion pour les fruits. Lors d’un séjour au Bénin, elle découvre Fruitizz, un bar à jus 100 % naturel. La jeune diplômée en marketing et communication va alors décider d’importer le concept chez elle, à Abidjan. C’est ainsi que le 21 mai est né Fruitizz CI, bar très coloré sis à Angré 8e tranche. « Ce concept né au Bénin propose des jus frais (détox, smoothie, jus verts, etc.) préparés à la minute. Ils sont mis en bouteille sans eau, sans sucre et sans conservateur, souligne Cynthia. La fraîcheur des jus permet donc de conserver tous les nutriments et vitamines présents dans les fruits et légumes choisis. » Même si l’adresse propose aussi des snacks sucrés et salés (crêpes, gaufres), elle séduit surtout avec ses brochettes de fruits, ses salades et autres menus à base de fruits et légumes frais. Selon la saison, les possibilités varient, mais toujours avec un large choix : pomme, ananas, orange, mangue, papaye, banane, citron, pamplemousse, corossol, etc. Forte de ce premier succès, Cynthia planche déjà sur d’autres ouvertures, dans les différentes communes de la ville. fruitizz.ci HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Quand deux Bretons débarquent à Abidjan, cela donne Marin, une crêperie qui s’est installée aux Deux-Plateaux dans la rue des Jardins, en août 2017. Une idée originale de Baï Degui et Akadji Gbongbadje, qui expliquent : « Nous sommes tous les deux Ivoiriens, même si on a grandi en Bretagne. On est revenu avec cette idée d’ouvrir une crêperie. Tout le monde fait des crêpes ici, mais pas la vraie galette bretonne. » Ainsi, la célèbre galette au sarrasin est proposée avec toutes sortes de garnitures, de la classique « œuf-jambon-fromage » à l’originale galette à l’alloco, qui a fait la particularité et la notoriété des lieux. « On a souhaité très vite mettre en place une stratégie de mise en valeur des produits locaux. » Du chocolat ivoirien d’Axel-Emmanuel Gbaou au café d’Ivoryblue, jusqu’aux jus Martha, le local est ici mis en avant. « Aujourd’hui, on monte de nouveaux projets. On a conclu un partenariat avec Vivo Energy qui va nous permettre d’être présents dans les stations Shell. Au-delà des points de vente fixes, on nourrit des ambitions plus grandes, dans la sous-région. On attend de se positionner ici avant de s’exporter. » Ils pensent bien sûr franchise avec toujours la même idée d’emporter des produits locaux avec eux. « On a envie d’un panafricanisme intelligent. Notre richesse c’est notre foi. On est content que les investisseurs regardent aujourd’hui vers l’Afrique, mais si nous, on le fait, ce n’est pas par opportunisme… » Page Facebook 87
FASHION
Le salon de Mariam Diaby propose des tarifs abordables.
TENDANCE
LE NAPPY EST DANS L’HAIR
Gammes de produits cosmétiques naturels, salons de coiffure spécialisés, instituts réparateurs… La Côte d’Ivoire n’a pas échappé au phénomène. Le cheveu naturel revient sous toutes ses formes. par Lilia Ayari
À
31 ans, Nafy, directrice d’une agence bancaire, est une repat. À son retour au pays il y a trois ans, elle avait une inquiétude en particulier : l’entretien de ses cheveux. « J’ai fait le choix, il y a cinq ans, de revenir au naturel, dit-elle. Et notamment en ce qui concerne mes cheveux. Cela a mis du temps, mais je les ai soignés, réparés, entretenus… » Aujourd’hui, arborant une volumineuse coiffure afro, Nafy est une nappy accomplie. « Je vivais auparavant à Londres, et je n’avais aucune difficulté à trouver des soins, des produits naturels et de qualité, ainsi que des instituts spécialisés dans les cheveux afro. Et je n’étais pas sûre de trouver la 88
même chose à Abidjan. » Et pourtant… Alors que le mouvement nappy (dénomination francophone du natural hair movement) est apparu – ou plutôt réapparu – au tournant des années 2000 en Occident, les « natural and happy » se multiplient sur le continent ces cinq dernières années. Y compris à Abidjan, où les femmes sont de plus en plus nombreuses à abandonner tresses, tissages et autres accessoires artificiels pour laisser vivre leur chevelure crépue. Un engouement dont Mariam Diaby a été à la fois témoin et actrice : « Je vivais encore en France en 2011 quand j’ai décidé de me couper les cheveux. C’est là que j’ai découvert la tendance nappy. Je me suis dit, je vais voir ce que ça donne. Sachant que HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Les clientes sont de plus en plus nombreuses à vouloir laisser vivre leur chevelure crépue.
je n’avais jamais appris à m’occuper de mes cheveux au naturel. » Séduite, Mariam s’adonne au nappysme jusqu’à créer, à son retour à Abidjan, le blog Nappys de Babi. « Au départ, l’idée était d’échanger des astuces et conseils, des bonnes adresses. Très vite, j’ai réuni une communauté de 300 à 400 personnes. Et on a commencé à organiser des rencontres. M’occuper de cette communauté – qui compte désormais près de 30 000 membres – a fait ressortir le besoin d’un espace adapté. Car on commençait à voir apparaître des instituts spécialisés mais hors de portée, parce qu’ils étaient très chers pour la cible principale, les 15-35 ans. Au bout de deux ans, j’ai décidé de mettre un centre à disposition, avec les compétences nécessaires, mais aussi des tarifs abordables. »
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Jeunes femmes actives à la recherche d’une beauté naturelle Kun’si ouvre ainsi ses portes en décembre 2017, dans le quartier Koumassi Remblais, au sud d’Abidjan. « Nous fêtons notre premier anniversaire, sourit Mariam, manifestement ravie du premier bilan. Dès le premier mois, nous avons reçu une centaine de clients. » Aujourd’hui, le nombre de clients s’est stabilisé autour d’une cinquantaine par mois, « avec des moments de rush, les fêtes de fin d’année par exemple. » Sa clientèle rassemble des femmes de 24 à 35 ans, actives et déjà nappy, à la recherche de prestations de beauté naturelle, mais aussi de conseils. Et de produits. Car dans son salon, forcément, Mariam propose des gammes de soins pour cheveux crépus, surtout de marques locales. Cette arrivée sur le marché confirme bien l’engouement pour le nappy. « C’est une réalité en Côte d’Ivoire comme ailleurs. La preuve, même une grande marque de cosmétique française vient de sortir sa propre gamme. Il y a de la demande », observe-t-elle. Une niche dans laquelle s’est insérée Sandrine Assouan. Stratégiquement installée dans le quartier du Vallon, prisé par la classe moyenne, cette autre repat, ingénieure en génie chimique de formation, a créé la marque Nature & Traditions, une ligne de produits 100 % naturels : des crèmes et des soins à base de plantes locales, comme un gel douche à base de café et de cacao, un savon noir enrichi en beurre de cacao pour un usage quotidien, ou encore des antimoustiques à base de citronnelle… Ils sont fabriqués de ses propres mains dans son atelier, situé à Angré, et disponibles dans les grandes surfaces et pharmacies de la ville, ainsi que sur le HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Net. « Je veux participer au renouvellement des codes de l’industrie cosmétique en Afrique. Le marché commence à proposer des produits pour les peaux noires et métissées, mais la plupart d’entre eux ne répondent pas spécifiquement à nos problèmes. En outre, nous avons de nombreuses plantes, une flore très riche, que le monde entier (et notamment les laboratoires pharmaceutiques) utilise. C’est pour ces raisons que j’ai décidé de créer cette unité de fabrication sur le continent, où nous en avons le plus besoin. » Par ailleurs, adepte du « belle au naturel », Sandrine organise des ateliers autour de l’acceptation de soi : « L’objectif est d’apprendre aux femmes à se comprendre, aimer leur peau, prendre soin d’elles et définir leurs priorités personnelles. »
Ivoiriens et fiers de l’être Une acceptation de soi qui doit, pour Sara Coulibaly, commencer dès le plus jeune âge. C’est dans cet esprit que la jeune entrepreneuse a lancé il y a quelques années déjà la ligne de poupées Naïma, « des poupées qui nous ressemblent » [voir p. 82]. Elle récidive en ce début d’année avec l’ouverture de Kids Concept, le premier salon de coiffure dédié aux enfants à Abidjan. « Nous devons apprendre à nos enfants à s’aimer tels qu’ils sont, qu’ils sont beaux avec des cheveux lisses, frisés ou crépus », ajoute-t-elle en décrivant son projet. Pour son instigatrice, c’est un concept store plus qu’un salon, où les enfants sont coiffés, mais également « initiés ». S’inspirant également du nappysme, elle ne propose ni défrisage ni extension, mais des tresses, des twists, des nattes, des dreadlocks, etc. Un lieu qui se veut ludique et qui a séduit autant les enfants que les parents, et en particulier la fameuse classe moyenne en pleine émergence, composée d’Ivoiriens fiers de l’être, qui mangent, s’habillent et désormais se coiffent local. Dans l’esprit, l’Ivoirien « is beautiful », un phénomène lui aussi très tendance. ■ 89
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Entouré des communes d’Adjamé, d’Attécoubé, d’Abobo et de Yopougon, le Parc national du Banco s’étend sur 3 474 ha en plein cœur d’Abidjan. Ce réservoir de biodiversité est aussi l’une des dernières forêts primaires d’Afrique de l’Ouest. par Lilia Ayari
Un réseau de 80 km de pistes permet de sillonner le parc.
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Ce microcosme de la faune ouest-africaine abrite près de 4 000 espèces.
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éritable havre de paix, la forêt du Banco a été préservée grâce à une volonté politique ancienne. « Le président Houphouët-Boigny l’a instituée en parc national en 1953 – alors qu’elle était déjà classée depuis 1929 comme réserve nationale – et le président actuel, Alassane Ouattara, a obtenu un financement du Fonds vert pour le climat pour le valoriser », souligne le commandant Fousseni Coulibaly, chef de secteur et directeur du Parc national du Banco. Il est à peine 9 heures ce matin-là et le commandant et ses troupes sont déjà en patrouille. Il faut dire que depuis quelques années, l’accent est mis sur la sécurité dans le parc, surveillé jour et nuit par la vingtaine d’agents de l’Office ivoirien des parcs et forêts (OIPF), appuyés par les brigades de gendarmerie mobile. « Nous avons régulière-
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ment des incursions de braconniers qui posent des pièges le soir et viennent récupérer leurs proies le matin, rapporte le commandant. Nous organisons régulièrement des patrouilles en vue de les prendre sur le fait ou à défaut de détruire les pièges. » Ses richesses attirent les braconniers à la recherche de chimpanzés ou de mones de Campbell – un singe que l’on ne peut apercevoir que tôt le matin ou au crépuscule –, d’antilopes (dont les délicats céphalophes), de tortues, d’oiseaux, de serpents… ce microcosme de la faune ouest-africaine abritant près de 4 000 espèces. Singularité du parc, la forêt possède de nombres espèces disparues d’arbres de la région. Notamment grâce à l’arboretum, ce parc de 12 ha créé en 1933 à l’intérieur du domaine où sont plantées et étudiées des variétés locales mais également celles des régions tropicales d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. On en comptabilise plus de 800, parmi lesquelles le niangon, familier HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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La construction de 25 km de clôtures fait partie des aménagements prioritaires du parc.
Les agents de l’Office ivoirien des parcs et forêts patrouillent jour et nuit.
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de la région ou l’okoumé qu’on ne retrouve habituellement qu’en Afrique centrale. C’est un espace pédagogique unique dans la sous-région. De même que la ferme piscicole avec ses étangs situés au cœur du parc ou encore la maison du Gouverneur Reste qui sert d’écomusée.
Un réservoir de biosphère, avec ses 600 ha de forêts primaires Au-delà d’abriter la nappe phréatique qui a longtemps assuré l’approvisionnement en eau potable de la ville d’Abidjan, le Banco est un véritable réservoir de biosphère, avec ses 600 ha de forêts primaires. D’où l’objet des multiples attentions qu’il suscite au niveau local et international. La brigade du commandant Fousseni veille sur tout ce qui pourrait menacer la préservation du site : le braconnage, la collecte de bois de chauffe, les riverains qui jettent leurs
de 10 000 visiteurs l’année dernière. Longtemps, le parc a eu mauvaise presse, considéré comme un repaire de délinquants (à cause de la proximité de la maison d’arrêt), le lieu de crimes rituels et autres rumeurs urbaines. Depuis quelque temps, les autorités rassurent pour attirer des visiteurs assez diversifiés, des expatriés, des touristes européens, des Ivoiriens également qui viennent pique-niquer sur les sites dédiés, des randonneurs ou des joggeurs, sans oublier les chercheurs. Ces derniers viennent notamment étudier les effets du changement climatique sur la faune et la flore locales. « À ce niveau, on a déjà le fait qu’on ne maîtrise plus la saison des pluies, il y a aussi le phénomène d’ensablement dans le nord du parc, du sable qui se retrouve dans le lit de la rivière » rapporte le commandant. L’occasion pour lui de se prêter à un petit rappel historique : « Ce parc doit son nom à la rivière qui y prend sa source que les autochtones appelaient Gbangbo, le nom, selon la légende, du génie des eaux qui l’habitait. Les Français l’ont par la suite rebaptisé Banco. »
ordures… « C’est l’inconvénient quand on est en périphérie des habitations, déplore le commandant, avant d’ajouter : C’est pourquoi nous organisons des campagnes de sensibilisation avec les responsables des communes voisines. Les maires doivent sensibiliser leur population. Le déversement des eaux usées, par exemple, peut avoir des conséquences graves, menacer la nappe phréatique. » Ceci dit, préserver ne veut pas dire fermer au grand public. Bien au contraire, alors que les autorités ivoiriennes tentent de positionner la destination ivoirienne sur la scène touristique continentale, ses parcs et réserves, dont le Banco, participent à l’attractivité du pays. Ce dernier a reçu près 94
Mais les visiteurs préférés ce sont sûrement les enfants, les écoliers d’Abidjan étant des habitués des lieux. C’est pour eux qu’a été créée la Maison de la nature, en plein cœur de la forêt. Ici des ateliers ludiques les invitent à mieux comprendre la nature qui les entoure, et à la protéger. Un pari et un investissement sur l’avenir. Le site compte également la première école forestière ouest-africaine – sa création date de 1938 – où sont formés ceux et celles qui seront chargés demain de préserver les Une famille 14 parcs, réserves et autres sites protégés de chimpanzés nationaux. L’objet de la protection est de a trouvé refuge taille, le poumon vert d’Abidjan capte en dans le Banco. effet plus de 90 000 tonnes de carbones alors que la ville en produit près d’un million par an. De ce point de vue le Banco est une source primordiale d’oxygène et lutte contre l’effet de serre. Alors que la déforestation menace partout sur le continent, ici, la démarche est inverse. « La forêt n’a pas perdu un hectare, au contraire, elle en a gagné depuis 1953 », affirme le commandant, balayant d’un revers de la main les rumeurs laissant entendre que les travaux du futur métro d’Abidjan conduiraient à raser 20 ha de la forêt du Banco. Bien plus qu’un lieu de promenade, ce réservoir hydraulique et lieu d’éducation environnementale est assurément sous haute protection… ■ Pour en savoir plus : oipr.ci
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Oxygéner la ville
À Grand-Béréby, l’hôtel de la Baie des Sirènes a tout pour attirer les voyageurs locaux comme étrangers.
« SUBLIME CÔTE D’IVOIRE » SI LA CÔTE D’IVOIRE n’est pas connue pour être une destination touristique, cela ne signifie pas pour autant que les sites d’attractivités n’existent pas. Au contraire. Et pour les valoriser, les autorités ont élaboré une feuille de route des plus ambitieuses. « Sublime Côte d’Ivoire », c’est le nom attribué à la stratégie de développement du tourisme en Côte d’Ivoire sur la période 2018-2025. Portée par le ministre du Tourisme, Siandou Fofana, elle s’articule autour de trois piliers essentiels : développer un secteur considéré comme moteur de croissance du PIB et démultiplier les recettes fiscales ; favoriser le développement territorial hors Abidjan ; enfin, créer un réservoir d’emplois. « La mise en œuvre de cette stratégie devrait à terme permettre au tourisme de participer pour 7 à 8 % au PIB », a indiqué le ministre Siandou Fofana. Sachant que pour l’heure, le tourisme ne contribue qu’à 2 % du PIB. Le plus grand parc d’attractions en Afrique de l’Ouest. À cet effet, 3 200 milliards de francs CFA
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(4,9 milliards d’euros) doivent être investis dans le secteur d’ici 2025 afin de permettre au pays d’intégrer le top 5 des destinations touristiques en Afrique, et créer au passage 600 000 emplois. Avec au programme, entre autres, la construction en Côte d’Ivoire du plus grand parc d’attractions d’Afrique de l’Ouest, sur une superficie de 100 ha. Déjà positionnée comme capitale locale du business, Abidjan a le potentiel pour devenir une « Medical City », grâce aux nombreuses infrastructures médicales de pointe existantes ou en cours de réalisation. Il s’agira comme le résume le ministre de faire de la Côte d’Ivoire un hub touristique. La prochaine édition du Salon international du tourisme d’Abidjan (SITA), prévue du 27 avril au 1er mai 2019, devra en poser les jalons avec les différents acteurs nationaux et internationaux du tourisme venus y participer. ■ L.A. Pour en savoir plus : cotedivoiretourisme.ci
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ASSITA KONE « UNE DESTINATION IDÉALE POUR LE BLEISURE » Mangalis Hotel Group se lance à l’assaut de l’Afrique de l’Ouest en ouvrant trois hôtels en Côte d’Ivoire d’ici 2019, avec une approche business + leisure. propos recueillis par Dounia Ben Mohamed
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ette dynamique Franco-Ivoirienne a un curriculum bien rempli. De ses vingt ans d’expérience dans le domaine du tourisme et de l’hôtellerie, on retient les noms de belles multinationales comme InterContinental et Accor, et aussi son expertise EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique, Asie). Spécialisée dans les domaines ventes et marketing, elle rejoint en 2017 Mangalis Hotel Group, la branche hôtelière de Teyliom Group, pour développer leur implantation en Afrique de l’Ouest. AM : Avant de poser un pied à Abidjan, le groupe Mangalis a déjà déployé ses hôtels dans la sous-région… Assita Kone : Créée en 2012, Mangalis Hotel Group est la division hôtelière de la holding Teyliom Group, compagnie multisectorielle qui opère dans l’immobilier, la banque, la télécommunication, l’agro-industrie. Mangalis est la compagnie de développement et de gestion des enseignes Noom Hotels (haut de gamme), Seen Hotels (milieu de gamme) et Yaas Hotels (économique). Actuellement nous avons trois hôtels dans la sous-région dont le Noom Hotel Conakry, le Seen Hotel Abidjan Plateau et le Yaas Hotels Dakar Almadies. Et 18 projets sont en cours de développement pour offrir plus de 2 600 chambres de Dakar à Kinshasa à l’horizon 2021. Un sacré challenge ! Déjà pour 2019, quatre ouvertures sont prévues, celles du Noom Hotel Cotonou, du Noom Hotel Niamey, du Noom Hotel Abidjan et d’un resort à Assinie. La force de Mangalis c’est d’offrir une solution à 360 degrés allant du développement à la gestion l’hôtelière.
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Mangalis s’est implanté au Plateau, avec l’hôtel Seen. Quelle est sa particularité et dans quelle mesure vient-il enrichir l’offre abidjanaise déjà très complète ? Abidjan comme de nombreuses capitales africaines offrent essentiellement des hôtels haut de gamme (4 ou 5 étoiles). Il y a donc un manque de diversité pour répondre aux besoins d’une clientèle d’affaires essentiellement à la recherche de produits en milieu de gamme et économique, offrant confort et modernité. Le Seen Hotel Abidjan Plateau fait partie de notre offre milieu de gamme. Il est trendy, son concept architectural a été créé par le cabinet Anglais Design International et les composants de la marque par l’agence Equancy. Il répond aux besoins de cette clientèle désirant une expérience alliant lifestyle et qualité d’hébergement à la portée de leur bourse. L’établissement est doté de 138 chambres et de sept suites, avec un design contemporain ; il y a un restaurant avec une pergola verdoyante, qui est un véritable havre de paix dans le cadre trépidant du Plateau et aussi un espace de conférence et des salles de réunion. Le tout est agrémenté d’une technologique de pointe avec internet à haut débit permettant à nos clients de rester « connectés » en permanence. Et même si notre cible reste principalement business, l’ADN de la marque Seen peut s’étendre à la clientèle de loisirs ou même de resort. Vous construisez un autre établissement, Noom Hotel Abidjan Plateau. Quelle sera sa « touche » ? Noom Hotels est notre enseigne haut de gamme avec une unité déjà ouverte à Conakry. Celui du Plateau sera notre HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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vitrine avec 257 chambres et suites, plus de 800 m2 d’espaces de conférence, différentes offres de restauration, une boîte de nuit… Le tout surplombant la lagune Ébrié avec des vues spectaculaires de la baie de Cocody. Le Noom sera un resort urbain branché avec des services adaptés à une clientèle d’affaires régionale et internationale tout en étant un lieu où l’élite locale pourra se retrouver pour des moments de détente. Au cœur de la marque Noom, nous avons mis l’accent sur l’expérience culinaire, cet hôtel sera donc un lieu prisé pour déguster une cuisine Afro Fusion à l’instar de villes comme Singapour, Londres ou Paris. Vous jouez la carte de l’innovation en matière de choix de matériaux de construction, d’architecture… Une façon de se démarquer dans la skyline du Plateau ? L’hôtel a été conçu par Saota, le cabinet d’architecture de renom sud-africain. Ce bâtiment ent design compte 24 étages, un espace spa, une piscine à débordement avec une vue aérienne sur Cocody… Son architecture hitecture sera du sur-mesure, avec une combinaison de matériaux riaux premium vitrés, de l’aluminium, de l’alucobon, la façade ade va être rétro illuminée. En bref, une nouvelle signaturee de la skyline abidjanaise. Avec ces deux établissements, vous intégrez le secteur touristique ivoirien de plain-pied. ed. Quel est votre regard sur ce secteur au niveau national al et sur ses potentialités ? Nous avons investi sur la destination estination Côte d’Ivoire. C’est un marché important pour Mangalis. Avec le Seen et le Noom, le resort à Assinie (en 2019), 019), suivi un peu plus tard du Yaas Akwaba, nous offrirons frirons au pays, carrefour du voyage d’affairess en Afrique, un portefeuille de produits couvrant ouvrant la quasi-totalité de la demande. Et ce n’est pas tout. La quasitotalité de l’offre d’hébergement ent du pays reste concentrée sur Abidjan avec environ 3 000 chambres bres officiellement recensées, dont ont près de la moitié se trouve dans ns le quartier d’affaires du Plateau. u. Avec une croissance économique ue en forte progression depuis des es années, le pays a un manque réel d’hébergements aux normes dans les villes secondaires. Nous sommes en discussion ion avec des investisseurs privés qui souhaiteraient uhaiteraient apporter des solutions d’offres à San-Pédro,
« Notre savoir-faire nous permet de répondre pondre aux besoins des pays. ys. » HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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Korhogo, Bouaké… Ils sont surtout intéressés par notre enseigne Yaas Hotels (économique). En tant qu’acteur régional multimarque, notre savoir-faire nous permet de répondre aux besoins des pays bien au-delà de leurs capitales. Que pensez-vous du positionnement de la Côte d’Ivoire comme destination touristique ? Les atouts du pays sont réels. Abidjan est seulement à 12 heures de Dubaï, 10 heures de New York, 6 heures de Paris et de la Turquie, avec des vols quotidiens. Sans compter une accessibilité sous-régionale facilitée par les liaisons des compagnies comme Air Côte d’Ivoire, Royal Air Maroc, Air Sénégal. Vous savez, une destination se crée comme l’a démontré Dubaï et bien d’autres villes qui continuent de se réinventer, de se développer pour attirer de gros salons, accrocher les voyageurs à la recherche d’expériences culturellement différentes et nouvelles. atouts et ses points faibles Quels sont ses ato vous ? selon vous? d’Ivoire bénéficie d´atouts natuLa Côte d’Ivo rels qui devront devron être entretenus et mis en être commercialisés. La créavaleur pour êtr tion d’un futur ccentre de convention, l’améinfrastructures routières et lioration des in sanitaires auront auron aussi un réel impact, tout sécurité. Le pays est une destinacomme la sécurit tion idéale pour lle bleisure (tourisme alliant business et lloisirs), mais il doit savoir réinventer pour susciter l’appétit se réinve voyageurs locaux et internades vo tionaux qui ont un très large tiona choix de destinations à travers cho le monde. Dans le domaine du tourrisme, on ne peut se permettre de se reposer sous ses m llauriers. Par exemple, sur le volet de la formation, même si nous observons des améliorations, il y a encore de faire. Recruter du personnel q u o i fai nécessaires pour avec les compétences com satisfaire une clientèle internationale est challenge pour nous en Côte d’Ivoire un réel challeng pays de la sous-région. et dans les autres aut Le secteur doit se munir de plates-formes, de centres d’apprentissages accessibles et d’a de qualité, les formations doivent être au standard international. Chez Mangalis, inte nous investissons d’ailleurs énormément investis dans la formation de nos équipes afin form d’être au top pour nos clients. ■ 97
POUR CONCLURE PAR ouakaltio ouattara
Abidjan, c’est doux ! En zouglou, on dit « même Paris connaît, Abidjan est le plus doux au monde ». Le résumé parfait de l’ambiance abidjanaise où les sujets même les plus sérieux sont tournés en dérision, comme ce fut le cas le 13 décembre dernier. Ce jour-là, les juges de la Cour pénale internationale avaient discuté de la possibilité d’une remise en liberté provisoire de l’ex-président Laurent Gbagbo, et le procureur avait alors déclaré qu’elle serait conditionnée au port d’un bracelet électronique. De nombreux internautes ont donc décidé de se moquer de cette recommandation. Chacun y allait de son mieux, de sa photo avec un téléphone, une montre, des billets de banque ou un trousseau de clefs attaché à la cheville. À Abidjan, tout est beau, et on rit de tout (et surtout du pire).
Même si l’Abidjanais dit que « l’argent ne circule pas », les coins chauds, les salles de spectacles, les bars de plage, les boîtes de nuit, les maquis sont toujours bondés de monde. Avec désormais un peu plus de six millions d’habitants, la capitale économique s’ouvre à ses habitants et à ses visiteurs au son du coupé-décalé, du zoulou ou de la rumba. À Abidjan, on ne dort pas.
Spécialités européennes, asiatiques, arabes et surtout africaines : on y trouve de tout, partout et à n’importe quelle heure. Un véritable carrefour mondial de la bonne ambiance, des rencontres, de l’humour et de la joie. Malgré cette diversité, la ville donne l’impression de toujours courir après du neuf. Cela pourrait expliquer en partie l’accueil triomphal réservé aux fast-foods qui, à peine 98
arrivés sur le marché, rivalisent avec les mets traditionnels. À Abidjan, on mange savoureux.
Côté sécurité, les attaques incessantes des enfants voyous, baptisés « microbes », ne sont pas encore des lointains souvenirs, mais elles ont véritablement baissé. Cela n’empêche pas les Abidjanais de se partager chaque jour des astuces sécuritaires. À Abidjan, on dort de mieux en mieux.
Avec le retour de la paix et de la stabilité, la cité a renoué avec les grands travaux. Après le troisième pont Henri Konan Bédié, la construction prochaine d’un quatrième pont, d’un métro et de l’échangeur de Treichville, la ville est en pleine mutation. Une mutation qui permettra, avec l’exploitation des lignes de transport lagunaire, de réduire considérablement les interminables bouchons aux heures de pointe. Ne vous y méprenez surtout pas. L’indiscipline dans le secteur du transport, si elle n’a pas atteint celle de Lagos, la capitale nigériane, a de quoi vous faire sortir de vos gonds. Il faut compter avec les gbaka, les minicars de transports et les wôrô-wôrô, ces véhicules banalisés qui sont un mal nécessaire pour ceux qui ne peuvent s’offrir une voiture. Le non-respect des feux tricolores et du code de conduite en général, les bagarres à longueur de journée… « Tout nouveau » à Abidjan, cela vous choquera à coup sûr. Mais rassurez-vous, quelques jours suffiront pour vous familiariser avec ce désordre, auxquels s’ajoutent les bruits de klaxons, parfois inutiles et insensés. À Abidjan, il faut « bouger, bouger ».
Bienvenue à Babi ! ■ HORS -SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE
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