LE CHOIX DE MACKY

Le président Sall ne se représentera pas pour un nouveau mandat en février 2024. Une décision historique qui ouvre un immense champ des possibles politiques.



















































































































































Le président Sall ne se représentera pas pour un nouveau mandat en février 2024. Une décision historique qui ouvre un immense champ des possibles politiques.
En Russie, un mercenaire, ancien cuisinier du Kremlin, que lâon croyait sous contrĂŽle, a failli renverser le rĂ©gime du tsar Vladimir Poutine. Sans vraiment le vouloir dâailleurs, ses chars et ses camions ont tout simplement pris la route. Le pouvoir central, dâapparence si puissant, omnipotent, paraĂźt lĂ©zardĂ©. Les clans, dit-on, sont en compĂ©tition. Et personne ne peut vraiment dire oĂč va cette trĂšs grande puissance nuclĂ©aire. On ne peut pas exclure quâun aventurier prenne la main. En Ukraine, la guerre fait rage, civils et soldats meurent tous les jours. Aucune perspective de paix, de sortie de crise, malgrĂ© les risques majeurs de dĂ©rapages et les coĂ»ts pour le monde entier.
Aux Ătats-Unis, un « r Ă©cidiviste », i nculpĂ© quasiment de trahison, empilait les notes « s ecret dĂ©fense » dans les salles de bains en marbre de son palais rococo de Floride⊠Milliardaire Ă ses heures perdues, malgrĂ© une montagne de dette, Donald Trump, 77 ans, teint de peau carotte, caracole en tĂȘte des sondages de la primaire rĂ©publicaine. Et pourrait ĂȘtre Ă nouveau prĂ©sident de la premiĂšre puissance mondiale. On en frĂ©mit⊠Sâil ne va pas en prison dâici-lĂ . Avec des consĂ©quences tout aussi imprĂ©visibles. Face Ă lui, un homme raisonnable, Joe Biden, dâun Ăąge encore plus respectable. 80 ans⊠Le locataire de la Maison Blanche paraĂźt un peu fragile tout de mĂȘme. Il trĂ©buche et bugge de temps en temps. Des dizaines de millions de jeunes AmĂ©ricains sont perdus, dĂ©semparĂ©s. Ce nâest pas enthousiasmant, mais câest lui, Old Joe, le rempart contre le chaos. LâĂ©lection prĂ©sidentielle est prĂ©vue pour novembre 2024. Dans prĂšs de quinze mois. Une éternitĂ©âŠ
Les mĂȘmes Ătats-Unis sont engagĂ©s dans un bras de fer assumĂ© avec la Chine. Beijing est devenu lâadversaire stratĂ©gique, Ă©conomique, politique majeure. Les Ătats-Unis veulent rester maĂźtres du systĂšme, maĂźtres du monde. En experts, ils reconnaissent le talent chinois, lâimpact dâun pays qui en moins dâun demisiĂšcle est passĂ© du sous-dĂ©veloppement au statut de challenger numĂ©ro 1. CĂŽtĂ© CitĂ© interdite, on sâarc-boute sur lâavenir de TaĂŻwan, devenu le marqueur historique et lĂ©gitimant du Parti communiste. Et lâArmĂ©e rouge montre ses muscles dans toute la rĂ©gion, irritant des nations voisines, comme le ViĂȘt Nam, les Philippines,
l âI ndonĂ©sie, lâAustralie⊠Le conflit est possible. Mais surtout la rivalitĂ© Ătats-Unis/Chine rend toute discussion globale quasiment impossible. Comment parler de dĂ©veloppement durable et de changement climatique sans une coopĂ©ration minimale entre les deux pays les plus importants (et les plus pollueurs) du monde ?
E n France, un motard de la police tire Ă bout portant sur Nahel, un gamin de 17 ans, lors « d âun refus dâobtempĂ©rer ». Les images sont bouleversantes. Des soi-disant penseurs de droite et dâextrĂȘme droite trouvent pourtant toutes sortes de raisons qui justifient lâinacceptable. ĂcĆurant. Les extrĂȘmes gauches alimentent les braises. Irresponsables. Les banlieues se soulĂšvent, des nuits de folie vengeresse, dâune « violence rare », avec leurs cortĂšges de destructions, de pillages, dâagressions. Câest stupĂ©fiant, littĂ©ralement. La France est encore un Ătat de droit. La justice fonctionne. Il y a une enquĂȘte sur le policier impliquĂ©. Mais la France refuse aussi de voir le malheur des citĂ©s pĂ©riurbaines, gangrenĂ©es par les trafics, de comprendre Ă©galement Ă quel point elle change, Ă quel point elle devient une nation multiraciale, multiculturelle, multireligieuse. Le dĂ©ni est puissant. Et lâextrĂȘme droite monte tranquillement dans les sondages. LâĂ©lection prĂ©sidentielle est dans quatre ans. Et entre-temps, il y a les Jeux olympiques de Paris. Ăa va swinguerâŠ
En IsraĂ«l, un gouvernement dâultradroite fait sa loi, dans le silence gĂȘnĂ© du reste du monde. La nouvelle majoritĂ©, menĂ©e par lâinoxydable Benjamin Netanyahou, lui-mĂȘme inculpĂ© depuis la nuit des temps dans un certain nombre de dossiers de corruption, veut mener tambour battant sa rĂ©volution identitaire et religieuse. Il faut « Ă©teindre » la Cour suprĂȘme, installer la primautĂ© du sacrĂ©. Et poursuivre la colonisation, coĂ»te que coĂ»te et au plus vite. En Cisjordanie, la rĂ©pression sâaccentue, la situation est incandescente et les civils, comme Ă JĂ©nine, payent le prix de la guerre. LâarmĂ©e dĂ©ploie tout son arsenal face Ă de jeunes militants qui nâont plus rien Ă perdre. La perspective de deux Ătats sur une mĂȘme terre nâa jamais Ă©tĂ© aussi lointaine, aussi inatteignable. Celle dâun seul Ătat, sous rĂ©gime dâapartheid, nâa jamais Ă©tĂ© aussi proche. Le dialogue avec les Ătats arabes dans le cadre des accords dâAbraham est au point mort. Le processus de paix est une fictionâŠÂ â
3 ĂDITO
Et pendant ce temps-là ⊠par Zyad Limam
6 ON EN PARLE CâEST DE LâART, DE LA CULTURE, DE LA MODE ET DU DESIGN Ekiti Sound : La force de la musique
24 PARCOURS Sabine Pakora par Astrid Krivian
TEMPS FORTS
28 Sénégal : Une histoire en marche par Zyad Limam et Cédric Gouverneur
36 PlanĂšte en Ă©tat dâurgence par Zyad Limam
46 Changement de stratégie ? par Emmanuelle Pontié
52 Kaouther Ben Hania : « Raconter nos histoires de lâintĂ©rieur » par Astrid Krivian
60 Xavier Le Clerc : La rage créatrice par Astrid Krivian
P.06 P.36 P.52
66 Georges Momboye : HĂ©riter et transmettre par Philippe Di Nacera
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78 Diversification impérative
82 Estelle Brack : « Le commerce en dollars nâest pas Ă lâavantage des pays Ă©mergents »
84 En Namibie, lâhydrogĂšne vert devient concret
85 Eau potable : La tech israélienne débarque
86 Le Kenya au régime des lourdes taxes
87 Ashok Leyland sâimplante en CĂŽte dâIvoire par CĂ©dric Gouverneur
P.78
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AM : En quoi le Nigeria vous inspire-t-il ?
Ekiti Sound : Je trouve beaucoup dâinspiration dans les musiques fuji, apala ou highlife pour les ambiances plus folk ou les Ă©lĂ©ments percussifs. Mais jâaime Ă©galement les vastes expĂ©rimentations de lâAfrique de lâOuest des annĂ©es 1970, des formations comme Ofege ou Blo⊠Le Nigeria est un pays bĂ©ni par une vaste gamme de sons, quâils proviennent dâun groupe de lâĂglise pentecĂŽtiste ou de lâintense street-pop, forte de producteurs aussi intĂ©ressants que Rexxie. Quelle Ă©tait lâambition artistique de ce nouvel opus ?
Souhaitant que lâon me connaisse mieux, jâai davantage parlĂ© et partagĂ©. Jâavais envie dâĂ©treindre mes auditeurs avec ma musique, de proposer un disque plus ambitieux mais avec un groove accessible. Bref, jâai voulu oser sans choquer. Tout en restant fidĂšle aux piliers dâEkiti Sound (culture, amour, identitĂ©, famille), et sans compromis sur la notion de fidĂ©litĂ©. Il sâagissait de repousser les limites de lâĂ©lectronique africaine, et je crois quâavec le format Dolby Atmos de lâalbum, nous avons crĂ©Ă© une nouvelle expĂ©rience sonore.
Pouvez-vous nous expliquer cette trĂšs belle pochette ?
Quand jâĂ©tais enfant, jâĂ©tais passionnĂ© par les missions spatiales, je lisais tout Ă ce sujet ! Au sein de la sonde Voyager, chacun emportait avec lui une « capsule temporelle » unique. Le message Ă©tait portĂ© par un enregistrement phonographique, gravĂ© sur un disque en cuivre plaquĂ© or contenant des sons et des images sĂ©lectionnĂ©s pour dĂ©crire la diversitĂ© de la vie et de la culture sur Terre. Ce dont lâalbum sâest inspirĂ©, câest du monde qui mâentoure. Je trouve du rĂ©confort dans les musĂ©es, les reliques et lâanalogique, mais je suis fascinĂ© par le progrĂšs et le futur. Cette contradiction se retrouve sur la pochette, qui reprĂ©sente une piĂšce dâor, le mĂ©tal le plus prĂ©cieux â car nous avons tous de la valeur â, qui incarne par ailleurs lâesprit du hip-hop. Ce qui nous renvoie au titre du disque, Drum Money !
Parce que nous sommes tous beaux et uniques, et une fois que nous puisons dans notre horloge interne ou nos Ăąmes, nous en extrayons de lâor⊠Il nâest pas question de richesse matĂ©rielle, mais de sentiments. Pour cela, le roulement de tambour dâun battement de cĆur, lâinstinct intrinsĂšque du rythme, lâamour des sons de notre pays et lâaccomplissement du voyage suffisent. â Propos recueillis par Sophie Rosemont
CONCERTS « MĂDITERRANĂE », Festival dâAix-en-Provence, Rabat (France), du 4 au 24 juillet. festival-aix.com
Ă Ă©couter maintenant !
The Omnichord
Real Book, Blue Note
DE WAJDI RIAHI, pianiste dâexception, qui combine son hĂ©ritage tunisien et sa passion pour le jazz, Ă Walid Ben Selim, chanteur et compositeur originaire de Casablanca, en passant par le jeune tromboniste dâorigine libanaise Robinson Khoury, la programmation des concerts « MĂ©diterranĂ©e », essentiellement instrumentale, dĂ©ploie une grande variĂ©tĂ© de dispositifs et de langages. Et donne la voix aux cultures bordant la mer, tout comme aux artistes qui, aujourdâhui, en sillonnent les rives.
Ă lâimage des Gharbi Twins, trio tunisien de cordes (oud, violon, qanĂ»n), stars au Maghreb et au Moyen-Orient : ambassadeurs des traditions musicales dâun pays dans lequel on apprend et compose aussi en famille, ils se produiront le 21 juillet Ă lâHĂŽtel Maynier dâOppĂšde. Soit le lendemain de lâOrchestre des jeunes de la MĂ©diterranĂ©e, oĂč plus dâune centaine de jeunes instrumentistes, auditionnĂ©s dans les conservatoires du bassin, seront menĂ©s par le chef et compositeur britannique Duncan Ward, au Grand ThĂ©Ăątre de Provence. â Catherine Faye
DĂ©jĂ trois dĂ©cennies dâune carriĂšre irrĂ©prochable et en perpĂ©tuelle rĂ©invention : lâautrice-compositrice et multi-instrumentiste amĂ©ricaine explore la musique quâelle Ă©coutait enfant dans un merveilleux nouvel album foisonnant, The Omnichord Real Book. Autour dâelle, des complices tels que Joan Wasser (Joan As Police Woman), Jason Moran, Jeff Parker, ou encore Thandiswa Mazwai. Variations jazz et trouvailles sonoresâŠ
Kassa Overall Animals, Warp
Ăa balance pas mal Ă Seattle, oĂč rĂ©side ce virtuose batteur, rappeur et songwriter accompli, formĂ© auprĂšs de grands noms du jazz, et dont les propositions tĂ©moignent dâune hybriditĂ© sonore allergique aux Ă©tiquettes. Convoquant hip-hop, post-rock et mĂȘme bossa-nova, cet Animals qui interroge le paradigme humaniste invite, entre autres, Laura Mvula, Lil B, le groupe Shabazz Palaces, le trompettiste Theo CrokerâŠ
Fredy Massamba
Trancestral, Hangaa
Music/RFI Talent
EnregistrĂ© entre YaoundĂ©, Bruxelles, Paris et MontrĂ©al, le nouvel album de lâartiste congolais [voir son « 20 Questions » en p. 90] passe avec souplesse de la rumba au hip-hop en passant par le jazz, sans oublier les traditions de son pays natal et ses racines musicales : chantĂ© en lingala, kituba ou encore kikongo, le bien nommĂ© Transcestral rĂ©sonne de la belle Ăąme dâun artiste aussi bien influencĂ© par Manu Dibango que par Tiken Jah Fakoly. â S.R.
musicale de son ancrage territorial.
CINĂMA
Une Tunisienne espĂšre toujours le retour de ses filles radicalisĂ©es et emprisonnĂ©es en Lybie. Dans ce documentaire hybride, Olfa Hamrouni raconte AUX CĂTĂS DE SON DOUBLE incarnĂ© par Hend Sabri les violences quâelle a subies⊠et infligĂ©es.
« JE DĂTESTE LES FILLES ! » lance Olfa Hamrouni au dĂ©but de ce vrai-faux documentaire. Elle en a pourtant eu quatre, dont deux sont enfermĂ©es depuis des annĂ©es dans une prison libyenne aprĂšs avoir cĂ©dĂ© aux sirĂšnes toxiques de lâĂtat islamique⊠Son histoire avait Ă©tĂ© largement mĂ©diatisĂ©e en 2016 lorsquâelle avait accusĂ© le gouvernement tunisien de ne rien faire pour les rapatrier. En vain. Elle a donc acceptĂ© de se raconter devant la camĂ©ra de Kaouther Ben Hania [voir son interview en pp. 52-59], dans lâespoir de relancer son combat, mais aussi de comprendre comment sa famille en est arrivĂ©e là ⊠Dans son premier long-mĂ©trage, Le Challah de Tunis (2014), la rĂ©alisatrice â qui a depuis Ă©tĂ© nommĂ©e aux Oscars en 2021 pour Lâhomme qui a vendu sa peau â mĂ©langeait dĂ©jĂ fiction et rĂ©alitĂ© en enquĂȘtant sur un agresseur de femmes. Ici, elle a fait appel Ă de jeunes comĂ©diennes pour incarner les deux absentes aux cĂŽtĂ©s de leurs sĆurs, mais aussi de Hend Sabri, qui joue Olfa dans les situations les plus traumatiques (violente premiĂšre nuit de noces, disputes, coupsâŠ), reconstituĂ©es pour les camĂ©ras. Sont aussi filmĂ©es les discussions sur le tournage entre Olfa et son double, et
entre les quatre filles et leur mĂšre, alternant scĂšnes Ă©crites et improvisations. Superbement mis en lumiĂšre et en musique, ce dispositif hybride mĂ©langeant thĂ©Ăątre, cinĂ©ma et thĂ©rapie embarque le spectateur dans la recherche dâune vĂ©ritĂ© difficile. Car Olfa le reconnaĂźt : victime de la violence de son mari (incarnĂ© par Majd Mastoura [voir son interview en pp. 58-59], qui joue avec justesse tous les rĂŽles masculins), elle lâavait Ă©galement Ă©tĂ© de celle de ses parents, avant de devenir bourreau Ă son tour et de battre ses filles sous tous les prĂ©textes. Peu Ă peu, pour les adolescentes, le hijab est devenu une protection, puis le niqab une solution, par jeu, par mode, puis par conviction pour deux dâentre elles, sous lâemprise dâun imam salafiste : « Un petit Daech Ă la maison », raconte lâune dâelles en riant. Car on sourit aussi. Et avec cette mise en scĂšne pourtant artificielle, ce film radical ne triche jamais. « Jâai eu trop peur pour mes filles, je les ai perdues », constate Olfa. Courageux et captivant. â Jean-Marie Chazeau
LES FILLES DâOLFA (Tunisie-France), de Kaouther Ben Hania. Avec Hend Sabri, Olfa Hamrouni, Majd Mastoura. En salles.
IL Y A SOIXANTE-DIX ANS Ă©tait tournĂ© le tout premier film de fiction en Afrique noire francophone, quelques mois avant celui retenu par les historiens (Afrique sur Seine, de Paulin Soumanou Vieyra) : un moyen-mĂ©trage rĂ©alisĂ© en GuinĂ©e par Mamadou TourĂ©, Mouramani, que personne nâa vu depuis longtemps. Le rĂ©alisateur guinĂ©en Thierno Souleymane Diallo est parti Ă sa recherche en se filmant, traversant son pays les pieds nus (pour montrer quâ« on nâa pas dâargent pour acheter des chaussures, ni faire des films aprĂšs des Ă©tudes de cinĂ©ma »). On pĂ©nĂštre dans des salles noires en ruine, dans un marchĂ© oĂč lâon trouve des DVD indiens en version soussou⊠Une enquĂȘte passionnante qui en dit long sur lâhistoire dâun pays autrefois Ă lâavant-garde cinĂ©phile. Qui fait preuve aussi dâun optimisme particuliĂšrement crĂ©atif. â J.-M.C.
AU CIMETIĂRE DE LA PELLICULE (GuinĂ©e-France), de Thierno Souleymane Diallo. En salles.
LâUN DE SES RĂVES ? Ouvrir la « derniĂšre librairie du monde ». Ă 17 ans, Esther, dont lâauteur de LâArabe du futur chronique le quotidien depuis ses 10 ans, aborde maintenant lâĂąge adulte. Le huitiĂšme et avant-dernier tome de la sĂ©rie (vendue Ă plus de 1,5 million dâexemplaires pour les sept premiers) brosse un portrait intime de lâado brune au long nez, avec tout ce qui fait de cette phase de lâexistence lâune des Ă©tapes les plus troublantes : vague Ă lâĂąme, avenir incertain, dĂ©sirs flous⊠Chaque planche dĂ©peint, avec authenticitĂ© et drĂŽlerie, les rĂ©flexions et le quotidien de la jeunesse contemporaine, Ă travers des personnages souvent croquĂ©s en noir et blanc. Ici ou lĂ , des couleurs primaires se rĂ©pandent sur les pages, venant intensifier une Ă©motion, une expression : jaune et bleu, par exemple, lorsquâEsther nous explique sa technique de relaxation mentale (« DĂ©jĂ , jâimagine que je suis en vacances en Bretagne, mais une Bretagne avec du rĂ©chauffement climatique »). Le ton est donnĂ©. â  C.F.
RIAD SATTOUF, Les Cahiers dâEsther : Histoire de mes 17 ans, Tome 8, Allary Ăditions, 56 pages, 17,90 âŹ.
cinĂ©aste guinĂ©en part Ă la recherche dâun moyen-mĂ©trage africain OUBLIĂ.
CâEST Ă MINTABA, en pays bassa, au Cameroun, que Blick Bassy a vu le jour, avant de grandir entre YaoundĂ© et son village natal â oĂč il noue un lien trĂšs fort avec la nature comme la musique. AprĂšs avoir rencontrĂ© le public avec son groupe Macase, il officie en solo depuis 2009, construisant une trame narrative musicale aux multiples chapitres, convoquant le passĂ© dâesclavagisme du continent africain, le bluesman amĂ©ricain Skip James, ou encore le rĂ©sistant anticolonialiste camerounais Ruben Um Nyobe. Sans oublier de signer un trĂšs beau roman, Le Moabi cinĂ©ma⊠Aujourdâhui, il signe un MĂĄdibĂĄ dâune grande Ă©pure mais Ă©motionnellement saisissant, aux arrangements imaginĂ©s avec le musicien français Ă©lectro-pop Malik Djoudi. EntourĂ© de cordes, de cuivres et de claviers, il y raconte, en bassa, le pouvoir de lâeau, si vitale, qui peut terriblement manquer. TantĂŽt chat, tantĂŽt fleur ou oiseau, Blick Bassy confirme ĂȘtre un magnifique conteur. â S.R.
CINQUIĂME ALBUM met Ă lâhonneur la langue bassa, tout en Ă©lectronisant Ă bon escient sa folk acoustique. Superbe !BLICK BASSY, MĂĄdibĂĄ, InFinĂ©/ Othantiq AA.
AVENTURES
En tuk-tuk au Maroc ou Ă cheval dans le mĂ©tro de New York, INDIANA JONES retrouve une certaine jeunesse Ă prĂšs de 80 ans, dans le DERNIER VOLET DE LA SAGAâŠ
IL Y A QUINZE ANS, les trucages numĂ©riques et la surenchĂšre scĂ©naristique dâIndiana Jones et le Royaume du crĂąne de cristal avaient assommĂ© le public et la critique : explosion atomique, invasion dâextraterrestres, un fils incarnĂ© par Shia LaBeouf⊠Cette fois-ci, Indy retrouve ses vieux ennemis, les nazis, dans un prologue haletant, en pleine dĂ©bĂącle allemande, Harrison Ford apparaissant avec un visage liftĂ© par de subtils effets spĂ©ciaux qui lui donnent lâĂąge de son personnage en 1944. Vingt-cinq ans plus tard, on le voit prendre sa retraite de professeur dâarchĂ©ologie Ă New York avec son visage dâaujourdâhui (79 ans au moment du tournage), amer et rattrapĂ© par son passĂ© via lâirruption dâune filleule trĂšs sportive, vĂ©nale et peu amĂšne Ă lâĂ©gard de son parrain. Ils se retrouvent pourtant au Maroc, sur les traces dâune moitiĂ© dâantiquitĂ© conçue par ArchimĂšde, permettant de voyager dans le temps pour y changer le cours de lâhistoire, et convoitĂ©e par un
scientifique hitlĂ©rien (Mads Mikkelsen), reconverti en responsable du programme Apollo ! Avec lâaide dâun ado (incarnĂ© par un jeune Français dâorigine mauricienne, Ethann Isidore), ils vont aller de bagarres en poursuites Ă©piques dans les rues de Tanger (tournĂ©es dans la mĂ©dina de FĂšs) et en MĂ©diterranĂ©e. Loin des polĂ©miques sur le comportement colonial dâIndiana Jones, le rĂ©alisateur James Mangold, qui a pris le relais de Steven Spielberg pour cet ultime Ă©pisode, a su moderniser la franchise en insufflant une rĂ©flexion sur le temps. Et en conservant des personnages rĂ©currents comme Sallah, lâami Ă©gyptien, toujours incarnĂ© par lâacteur gallois John Rhys-Davies qui, il y a quelques annĂ©es, se fĂ©licitait « dâincarner enfin un personnage arabe positif dans la culture populaire occidentale » ! â J.-M.C. INDIANA JONES ET LE CADRAN DE LA DESTINĂE (Ătats-Unis), de James Mangold. Avec Harrison Ford, Phoebe Waller-Bridge, Ethann Isidore. En salles.
KIWANGA, lauréate du prestigieux prix Marcel Duchamp 2020, invite à la réflexion.
JEUX DE TRANSPARENCE, asymĂ©trie, dĂ©gradĂ©s de couleurs, voilages ou bulles de verre⊠Les nouvelles installations de Kapwani Kiwanga, exposĂ©es au CAPC musĂ©e dâart contemporain de Bordeaux, proposent une lecture du monde Ă la fois lucide et onirique, en dĂ©construisant les rĂ©cits originels. Ce projet inĂ©dit a Ă©tĂ© pensĂ© en relation avec lâhistoire du lieu, lâEntrepĂŽt lainĂ© (autrefois appelĂ© EntrepĂŽt rĂ©el des denrĂ©es coloniales), destinĂ© au xixe siĂšcle au stockage sous douane des marchandises en provenance des colonies, avant leur expĂ©dition Ă travers lâEurope. Un espace tout en vastes volumes, pierres blanches et arcades, devenu en 1973 un lieu de crĂ©ation contemporaine, oĂč la lĂ©gĂšretĂ© et la fluiditĂ© des crĂ©ations de lâartiste canadienne, dâorigine tanzanienne, viennent dĂ©construire les rĂ©cits qui sous-tendent la gĂ©opolitique contemporaine et les asymĂ©tries de pouvoir. Une Ćuvre engagĂ©e, mise en lumiĂšre Ă la derniĂšre Biennale dâart contemporain de Venise, au New Museum of Contemporary Art, Ă New York, Ă la Haus der Kunst, Ă Munich, ou encore au Museum of Contemporary Art Toronto. â C.F.
« KAPWANI KIWANGA, RETENUE », CAPC musĂ©e dâart contemporain de Bordeaux (France), jusquâau 7 janvier 2024. capc-bordeaux.fr
JEAN-CHRISTOPHE BERLIN est un Ă©tonnant personnage. KinĂ©sithĂ©rapeute de renom, il exerce Ă Paris, oĂč il reçoit Ă la fois une clientĂšle de quartier et aussi quelques VIP du monde des arts, du business et de la politique. Ancien rugbyman au Stade français, il en a gardĂ© la carrure, la jovialitĂ© et le goĂ»t des bonnes choses. DiplĂŽmĂ© de mĂ©decine du sport et de pathologies du rugby, il sâest impliquĂ© fortement sur la question des accidents, en particulier sur les joueurs les plus jeunes en milieu scolaire et universitaire. Il a aussi vĂ©cu en Afrique, Ă Dakar, pour son service militaire Ă lâhĂŽpital gĂ©nĂ©ral, une aventure de vie dont il sâest inspirĂ© pour son roman Babacar a disparu, paru en 2020 aux Ă©ditions SĂ©maphore. SpĂ©cialiste du dos, Jean-Christophe Berlin est lâauteur dâune bonne quinzaine dâouvrages sur le « mal du siĂšcle » : la sĂ©dentaritĂ©, lâabsence dâexercice physique, les mauvaises postures esquintent doucement mais sĂ»rement toute notre structure dorsale, sans parler des atteintes plus graves, comme lâarthrose lombaire ou la hernie discale. Dans son nouveau livre, Jean-Christophe Berlin propose une approche simple, pratique pour prĂ©venir et soulager les douleurs, renforcer la structure articulaire et musculaire : 60 exercices qui sont construits autour de sa mĂ©thode A4R (assouplissement, relĂąchement musculaire, renforcement musculaire, respiration, retour au calme). Et quelques bons conseils aussi pour sâadapter, Ă long terme, aux situations courantes : au volant, devant son ordinateur, en passant lâaspirateur⊠Une lecture indispensable et facile pour rester « debout » et en forme ! â Zyad Limam
JEAN-CHRISTOPHE BERLIN, Exercices pour prĂ©venir et soulager le mal de dos, Le Courrier du livre, 192 pages, 18 âŹ
Babacar a disparu, Le SĂ©maphore, 202 pages, 20 âŹ
ĂRIC MUKENDI, Mes deux papas, Gallimard, 192 pages,
« DITES-MOI MADAME, pourquoi je dois mâexpliquer devant vous lĂ . Si jâĂ©tais un petit Blanc, je nâaurais quâĂ raconter. Je vous le jure. » DâentrĂ©e, Ăric Mukendi, nĂ© en RĂ©publique dĂ©mocratique du Congo et professeur de français Ă Rouen, afïŹche le dilemme de son personnage : la langue est pour le jeune homme un enjeu social. Les tournures et les mots nâayant ni la mĂȘme saveur, ni la mĂȘme portĂ©e, selon la sphĂšre dâoĂč ils viennent. Depuis son arrivĂ©e en France Ă 7 ans, prĂšs de quatre dĂ©cennies se sont Ă©coulĂ©es, mais lâĂ©crivain nâa pas oubliĂ© ses premiers pas en Europe. DâoĂč une exploration sans complaisance et pleine de piquant de lâentre-deux mĂ©tissĂ© dans lequel le hĂ©ros de son rĂ©cit Ă©volue. Un tĂ©lescopage entre deux mondes, deux cultures, deux modes de vie, deux langues. Et deux papas. Car en rĂ©alitĂ©, celui qui lâĂ©lĂšve en banlieue parisienne est son oncle. Et celui qui vient un jour frapper Ă la porte nâest autre que son pĂšre biologique⊠Cruel dilemme. â C.F.
Double « je »
Un premier roman sur les heurs et les malheurs de lâimmigration, portĂ© par le TALENT DE CONTEUR dâĂric Mukendi.
LITTĂRATURE
DâENTRĂE DE JEU, François-Henri DĂ©sĂ©rable cite en exergue son mentor, Nicolas Bouvier, avant de nous emmener sur ses traces, en Iran. Soixante-dix ans aprĂšs le voyage effectuĂ© de la Yougoslavie Ă lâAfghanistan de lâĂ©crivain suisse (LâUsage du monde), lâauteur de Mon maĂźtre et mon vainqueur (Grand prix du roman de lâAcadĂ©mie française 2021) relĂšve le dĂ©fi de traverser la rĂ©publique islamique, au plus fort de la rĂ©pression contre les manifestations qui suivent le dĂ©cĂšs de Mahsa Amini. ArrĂȘtĂ©e en septembre 2022 par la police des mĆurs pour « port de vĂȘtements inappropriĂ©s », quelques semaines avant lâarrivĂ©e de DĂ©sĂ©rable, cette jeune femme est morte des suites dâune hĂ©morragie cĂ©rĂ©brale, causĂ©e par des violences policiĂšres. MalgrĂ© les mises en garde alarmistes du ministĂšre des
Affaires Ă©trangĂšres, lâancien joueur de hockey sur glace professionnel â qui a Ă©crit son premier livre Ă 25 ans et dĂ©cidĂ© de se consacrer Ă la littĂ©rature âa quand mĂȘme dĂ©cidĂ© de partir prendre le pouls dâun pays aux abois. De TĂ©hĂ©ran aux confins du Baloutchistan, sa narration sâappuie sur la grande tradition du rĂ©cit de voyage, au fil de rencontres, dâanecdotes, dâobservations, du quotidien comme du contexte politique. Parti dans lâesprit de Bouvier (« le programme Ă©tait vague, mais dans de pareilles affaires, lâessentiel est de partir »), il est entrĂ© en contact avec un peuple meurtri et rĂ©voltĂ©,
dont lâĂ©crasante majoritĂ© souhaite la fin du systĂšme en place. « JâespĂšre seulement vivre assez longtemps pour voir tomber ce rĂ©gime, pour voir le jour oĂč lâIran qui a rĂ©primĂ© devra soutenir le regard de lâIran quâil aura rĂ©primĂ© », lui confie son guide dans la plus grande mosquĂ©e sunnite du pays, Makki, Ă Zahedan. Câest dans cette mĂȘme ville, autre chaudron de la contestation, que plus de 90 manifestants ont Ă©tĂ© tuĂ©s par les forces de sĂ©curitĂ©, lors du « vendredi sanglant », le 30 septembre dernier. Entre littĂ©rature et reportage, le rĂ©cit de lâĂ©crivain français prĂȘte ainsi la main Ă une rĂ©volution en marche. Femmes iraniennes en tĂȘte. â C.F.
LâUsure dâun monde : Une traversĂ©e de lâIran, Gallimard, 160 pages, 16 âŹ
Dans son dernier ouvrage, LâUsure dâun monde, une traversĂ©e de lâIran, FRANĂOIS-HENRI DĂSĂRABLE rend hommage Ă une population en rĂ©volte.
TournĂ©e vers un futur durable et dĂ©colonisĂ©, la BIENNALE DâARCHITECTURE exhorte Ă changer de perspective.
LE 18 MAI DERNIER, câest sous un ciel changeant que Venise a accueilli sa Biennale dâarchitecture, rendez-vous incontournable pour tous ceux qui sâinterrogent sur lâĂ©volution et lâimpact de cet art. IntitulĂ©e « Le Laboratoire du futur », cette 18e Ă©dition est particuliĂšre, puisque, pour la premiĂšre fois depuis sa crĂ©ation en 1980, les projecteurs sont braquĂ©s sur les pratiques des professionnels issus du continent et de ses diasporas : prĂšs des trois quarts des 89 participants, sĂ©lectionnĂ©s par la premiĂšre commissaire noire Lesley Lokko, sont ainsi dâorigine africaine. Parmi eux, on trouve les bĂątisseurs, comme David Adjaye, Francis KĂ©rĂ©, Koffi et DiabatĂ©, ou encore Mariam Kamara, mais aussi des noms mĂ©connus, repĂ©rĂ©s autour du globe par lâĂ©quipe de la commissaire ghanĂ©enne et Ă©cossaise.
Ătre Ă Venise, avec ses ponts, ses ruelles denses dâhistoire et sa lagune, est pour beaucoup un rĂȘve devenu rĂ©alitĂ©. Fiers et reconnaissants de lâinvitation, ils Ă©changent de maniĂšre enthousiaste avec les visiteurs et la souriante et affairĂ©e Lesley Lokko. Entre deux rencontres, celle-ci assiste Ă lâinauguration de la magnifique exposition « Tropical Modernism: Architecture and Power in West Africa », prĂ©sentĂ©e par le Victoria and Albert Museum, ou chaperonne les visites guidĂ©es dans les grandioses halles de lâArsenal et les pavillons des Giardini. Ce sont notamment dans ces deux lieux historiques de la ville que sâarticule cette immense expo internationale diffuse, qui brouille les frontiĂšres entre art et architecture. Câest le cas pour les pavillons nationaux, comme celui de la Grande-Bretagne, mention spĂ©ciale du jury, mais aussi pour les jeunes professionnels invitĂ©s :
en mĂ©langeant matiĂšres et technologies (vidĂ©o, dessin, rĂ©alitĂ© augmentĂ©e, etc.), ils prĂ©sentent leurs rĂ©flexions en faveur dâune architecture dĂ©carbonisĂ©e et dĂ©colonisĂ©e, qui intĂšgre le contexte historique-social et les besoins des usagers. Certains petits cabinets ont privilĂ©giĂ© une approche trĂšs conceptuelle, quand ils auraient pu mettre en avant leurs projets dĂ©jĂ sortis du sol, mais lâensemble des participants a globalement su articuler une proposition diffĂ©rente. Des voix jusque-lĂ considĂ©rĂ©es comme marginales ont dĂ©sormais toute leur place sur la scĂšne vĂ©nitienne.
MĂȘme sâil les dĂ©couvre Ă peine, le milieu trĂšs occidentalisĂ© de lâarchitecture est enfin prĂȘt Ă les entendre. Câest le cas pour le NigĂ©rian Demas Nwoko, 88 ans, venu retirer un Lion dâor rĂ©compensant sa carriĂšre et accueilli par des cris et des applaudissements Ă©mus. Ce prix et la petite exposition qui lui a Ă©tĂ© dĂ©diĂ©e au cĆur des Giardini visent Ă mieux faire connaĂźtre ce prĂ©curseur de lâarchitecture africaine durable, ancrĂ©e dans les traditions locales dĂšs les annĂ©es 1970. Tout comme les travaux des grands bĂątisseurs dans la section « Force majeure » dĂ©montrent que dâautres modĂšles que celui du « starchitecte » fonctionnent⊠Relançant ainsi lâidĂ©e dâun art plus collectif, rĂ©solument tournĂ© vers le futur, et au service des personnes et de la planĂšte. â  Luisa
NannipieriCOMĂDIE
Un FEEL-GOOD MOVIE dans une banlieue parisienne : quand des mĂšres tentent de
LES MĂDIAS les avaient surnommĂ©s « les bĂ©bĂ©s rappeurs » : en 2015, une vidĂ©o virale de gangsta rap montrait des Ă©coliers brandissant une arme (factice) et des liasses de billets en faisant lâapologie du sexe, de la drogue et du meurtre dans un langage ordurier⊠Ces enfants de Sarcelles ont inspirĂ© ce (premier) film tournĂ© sur les lieux mĂȘmes, dans lequel les mĂšres de trois garçons du clip dĂ©cident de leur donner une leçon en sây mettant Ă leur tour, avec un flow dâenfer ! CoachĂ©, le trio (qui pour faire bonne mesure regroupe une femme noire, une arabe et une blanche) va faire plus de vues que leur progĂ©niture⊠Si lâabattage de Claudia Tagbo fait toujours merveille, la rĂ©vĂ©lation du film est Zaho : la chanteuse algĂ©ro-canadienne incarne
son premier rĂŽle au cinĂ©ma avec une fougue et une drĂŽlerie irrĂ©sistibles. Autour, les hommes jouent les seconds rĂŽles, dont Jean-Pascal Zadi, qui incarne un producteur de showbiz dĂ©calĂ© (« Le rap, câest pas un jeu, câest un game »), et deux guests : Guy2Bezbar dans son propre rĂŽle, et Stomy Bugsy dans celui⊠du maire de Sarcelles ! Parfois bancal et trop plein de bons sentiments, mais heureusement Ă©picĂ© dâun flow percutant. â J.-M.C. YO MAMA (France), de LeĂŻla Sy et Amadou Mariko. Avec Claudia Tagbo, Zaho, Sophie-Marie Larrouy. En salles.
retrouver de lâautoritĂ© sur leurs enfants⊠grĂące au rap !
QUE CE SOIT Ă PARIS, New York ou Milan, les crĂ©ations de Noun Design ont voyagĂ© dans les villes les plus branchĂ©es au monde ces derniers mois. Avec ses tables insolites, ses couleurs Ă©clatantes et ses poufs rigolos, la jeune marque basĂ©e Ă Casablanca a obtenu le soutien de la Maison de lâartisan (qui promeut le savoir-faire marocain) et la consĂ©cration du public. Les clients sâarrachent par exemple la table basse AĂŻn, oĂč terracotta et cĂ©ramique, mate et brillant, sâallient pour former un Ćil envoĂ»tant. Ainsi que les poufs Matisha, tout en rondeurs et pompons, qui tournent sur eux-mĂȘmes et offrent une assise confortable. Depuis vingt-cinq ans dans lâarchi dâintĂ©rieur, et dĂ©jĂ directrice dâune grande entreprise familiale spĂ©cialisĂ©e dans la menuiserie en bois, sa fondatrice DorothĂ©e Navarro a un penchant pour les objets animĂ©s par un reflet de lumiĂšre, des couleurs vives ou la juxtaposition des textures et des matiĂšres. Ses piĂšces, conçues pendant le confinement et disponibles depuis fin 2021, regorgent de vitalitĂ©. Ă travers leurs noms, celles-ci cĂ©lĂšbrent en outre la tradition marocaine, que la designeuse revisite avec des artisans et artisanes du bois, du textile et de la poterie dâexception. Dans un esprit joyeux et hors des sentiers battus. â  L.N.
Les piĂšces pastel et eco-friendly de cette petite MAISON
KENYANE subliment
les savoir-faire nomades.
AVEC SES COLLECTIONS contemporaines aux silhouettes Ă©thĂ©rĂ©es et intemporelles, qui respectent lâenvironnement et financent directement les petits artisans, Hamaji (signifiant « nomade » en swahili de la cĂŽte est du continent) est devenue en quelques annĂ©es une petite maison de mode kenyane au style unique et Ă la qualitĂ© rare. Le label Ă©tait Ă lâorigine un projet de fin dâĂ©tudes de la crĂ©atrice Louise Sommerlatte. AprĂšs des Ă©tudes au Cap et un sĂ©jour Ă Berlin, celle qui est nĂ©e et a grandi au Kenya est revenue sâinstaller en 2018 Ă Kilifi, une ville cĂŽtiĂšre, laquelle lui a inspirĂ© plusieurs de ses piĂšces. Le survol annuel des GuĂȘpiers carmins est par exemple figĂ© dans un motif qui Ă©gaye des
Une partie de la garde-robe est crĂ©Ă©e Ă Â partir de vĂȘtements vintage ou recyclĂ©s.
trenchs, des pantalons, ainsi que de petites robes vert menthe. Le dessin a été travaillé sur des blocs de bois, puis imprimé, avec des teintures végétales, préservant un savoir-faire ancestral.
Une partie de la garde-robe de la marque est crĂ©Ă©e Ă partir de vĂȘtements vintage ou recyclĂ©s : celle-ci comprend surtout des piĂšces estivales aux couleurs pastel (caftans, petits hauts, pantalons palazzo, combinaisons), mais aussi des blazers et blousons automne-hiver (fantaisistes vestes Kantha, par exemple). La designeuse travaille Ă©galement avec du coton et du Tencel, un tissu soyeux en fibres dâarbres, produit dans une petite usine Ă zĂ©ro Ă©mission situĂ©e dans la rĂ©serve naturelle kĂ©nyane de Rukinga. Certaines crĂ©ations, comme la jupe en dentelle de soie et coton filĂ©e Ă la main au pied du mont Kenya, ou le top perlĂ© Antassia, rĂ©alisĂ© par un groupe de femmes Samburu dans le nord du pays, tĂ©moignent directement de la richesse de lâartisanat traditionnel. De la conception des dessins au tissage, jusquâĂ la rĂ©alisation des broderies qui rehaussent les petits dĂ©tails, câest principalement le travail des femmes qui permet Ă Hamaji dâexister. Et câest pour elles que la marque propose des crĂ©ations centrĂ©es sur une fĂ©minitĂ© nomade, Ă lâĂ©lĂ©gance fluide. hamajistudio.com â  L.N.
Les crĂ©ations, plutĂŽt estivales, tĂ©moignent de la richesse de lâartisanat traditionnel.
deux tables à tester sur Victoria Island.
PARMI LES NOUVELLES ADRESSES de Lagos, le Ona mĂ©rite une mention spĂ©ciale. Ouverte par la cheffe nigĂ©riane Obehi Ekhomu et son mari il y a un peu plus dâun an, cette table gastronomique Ă la dĂ©co minimaliste et Ă la vaisselle artisanale a pour objectif de donner ses lettres de noblesse Ă la cuisine locale et aux techniques de cuisson ancestrales, comme la fermentation ou le fumage. Lâune des recettes phares, servie dans une assiette bleue en verre soufflĂ© agrĂ©mentĂ©e de coquillages, sublime les escargots africains. Les mollusques fumĂ©s, de terre et de mer, arrivent avec une crĂšme dâail rĂŽti Ă la noix de muscade, huile de piment fermentĂ©e et chips de manioc. LâĂ©tĂ©, la cuisine met Ă lâhonneur les cĂ©rĂ©ales de saison, comme le fonio,
le millet et le sorgho, et toute lâannĂ©e, sont proposĂ©s plus de 50 boissons maison et des spiritueux distillĂ©s sur le continent. Y compris lâogogoro et le vin de palme. Pour sâextraire du brouhaha mĂ©tropolitain, on peut passer chez The House. Un lieu de socialisation chaleureux, Ă destination de la population cosmopolite et dynamique qui aime se dĂ©tendre ailleurs que dans les clubs. Dans cet univers inclusif, chaque piĂšce a son ambiance, son thĂšme et sa carte. Les crĂ©ateurs du lieu invitent Ă se laisser guider par ses envies du moment : des plats gastronomiques dans la White Room ou dâinspiration caribĂ©enne sur un canapĂ© dans lâune des autres piĂšces ? Et pourquoi pas de la fusion afro, comme les cuisses de dinde avec riz jollof fumĂ© maison â connu dans tout Lagos â, ou le Blackened Suya Burger ? DĂ©tendez-vous, et faites comme chez vous ! thehouseng.com â L.N.
Ăgauche et
ci-dessous,le Ona redonne ses lettres de noblesse à la cuisine locale. Ci-contre et ci-dessus, The House accueille une population cosmopolite.
MĂME DANS LE QUARTIER glamour de LâHivernage, rĂ©putĂ© pour ses magnifiques palaces, la structure circulaire et la carapace dâacier du Nobu HĂŽtel Marrakech (ancien The Pearl) attirent les regards. Premier Ă©tablissement en Afrique du groupe cofondĂ© par Robert de Niro et le chef japonais Nobu Matsuhisa, lâhĂŽtel a Ă©tĂ© officiellement inaugurĂ© fin mai par lâacteur hollywoodien en personne. Les trois Ă©tages du bĂątiment, son spa de 2 000 m2 et ses 71 chambres et suites (nuit Ă partir de 390 euros) ont Ă©tĂ© entiĂšrement rĂ©novĂ©s, intĂ©grant au dĂ©cor signĂ© Jacques Garcia des Ă©lĂ©ments plus frais et lumineux conçus par Stevani & Silva. Ces derniers ont rĂ©interprĂ©tĂ© la signature esthĂ©tique japonisante de Nobu, des murs
en bois clair et du mobilier sur mesure aux lignes Ă©purĂ©es, avec des touches modernes et traditionnelles. Le nouveau design crĂ©e une continuitĂ© dâambiance entre le bar lounge, le restaurant signature au rez-de-chaussĂ©e, oĂč lâon cĂ©lĂšbre la cuisine fusion du cĂ©lĂšbre chef, et le Rooftop Garden. Ce second restaurant aux influences mĂ©diterranĂ©ennes et marocaines est aussi un cocktail bar intime et chaleureux, avec solarium et piscine en zellige. RĂ©amĂ©nagĂ© avec goĂ»t, le toit-jardin est lâune des places to be de la ville : on peut y venir profiter dâun DJ set ou se rĂ©galer les yeux avec une vue Ă 360° sur les montagnes de lâAtlas, la mĂ©dina et lâiconique minaret de la Koutoubia. marrakech.nobuhotels.com â
Le groupe commence son AVENTURE AFRICAINE fort dâun rooftop dâexception qui offre une vue imprenable sur la ville ocre.
La Freak, journal dâune femme vaudou, la comĂ©dienne dâorigine ivoirienne questionne lâaltĂ©ritĂ© en mettant au jour les clichĂ©s sur les minoritĂ©s. Intime et politique, Ă©mouvant et satirique, ce seule en scĂšne est prĂ©sentĂ© au festival dâAvignon. par Astrid Krivian
Mama africaine, maraboute, prostituĂ©e, femme de mĂ©nage, sommĂ©e de tchiper et de parler avec un « accent africain »⊠Sabine Pakora a longtemps souffert des rĂŽles stĂ©rĂ©otypĂ©s, essentialisĂ©s, quâon lui proposait dâincarner au cinĂ©ma et Ă la tĂ©lĂ©vision française. Des personnages empreints dâun regard exotisant, hĂ©ritĂ©s dâun imaginaire colonial : « Je me sentais rĂ©ifiĂ©e. Jâai beaucoup jouĂ© la prĂȘtresse vaudoue, laquelle reprĂ©sente le fantasme de la sociĂ©tĂ© française sur lâAfrique. JâĂ©tais la cerise exotique sur le gĂąteau », raconte lâactrice, entre deux gorgĂ©es de soda, sur une terrasse parisienne ensoleillĂ©e. Forte de ses Ă©tudes en anthropologie et en sociologie, qui lui ont permis dâaffĂ»ter et de nourrir ses rĂ©flexions, de politiser ses expĂ©riences artistiques et professionnelles, elle a Ă©crit un spectacle inspirĂ© de son parcours : La Freak, journal dâune femme vaudou, quâelle interprĂšte seule et met en scĂšne. « Il pose la problĂ©matique de lâassignation, des stĂ©rĂ©otypes, des stigmatisations. Je questionne lâaltĂ©ritĂ©, la relation de la norme et de la pĂ©riphĂ©rie. DĂšs que tu es un peu diffĂ©rent, tu es ostracisĂ©, âfreakisĂ©â », sâindigne celle qui a tĂ©moignĂ© dans lâouvrage collectif Noire nâest pas mon mĂ©tier, initiĂ© par AĂŻssa MaĂŻga en 2018. Si rien ne la prĂ©destinait Ă ĂȘtre comĂ©dienne, lâart dramatique constitue pourtant le fil rouge de son existence. NĂ©e en CĂŽte dâIvoire, oĂč son pĂšre a fait fortune dans lâexploitation du bois, Sabine Pakora arrive en France Ă 4 ans avec sa famille, Ă Paris, puis dans le Sud. Ne trouvant pas de compagnon de jeu au sein de sa fratrie, la cadette sâinvente des histoires avec ses poupĂ©es et sâĂ©vade Ă travers la tĂ©lĂ©vision, rejouant par cĆur des scĂšnes de films face au miroir. Quand son pĂšre fait faillite, il abandonne ses enfants Ă lâAide sociale Ă lâenfance. Ă 7 ans, le lien avec sa mĂšre, que ce dernier a rĂ©pudiĂ©e, est aussi coupĂ©. Le cinĂ©ma revĂȘt alors un sens encore plus vital, nĂ©cessaire. « Je vivais un traumatisme ; câĂ©tait compliquĂ© de mettre des mots sur la douleur. Le septiĂšme art me permettait de rĂȘver, de me projeter, de suivre des personnages qui exprimaient Ă©motions et pensĂ©es », confie cette fan de Sergio Leone, de Romy Schneider, et du film musical Les Demoiselles de Rochefort AprĂšs un bac thĂ©Ăątre, une formation au Conservatoire dâart dramatique de Montpellier, puis Ă lâĂcole supĂ©rieure dâart dramatique, Ă Paris, lâactrice sâĂ©prend de danse africaine : « Je me suis ainsi rĂ©appropriĂ© ma propre culture. » Elle tourne dans le monde entier avec la compagnie Montalvo-Hervieu, est Ă lâaffiche de la comĂ©die musicale Kirikou. Puis, suite Ă une blessure, et mue par un dĂ©sir profond de travailler des textes, elle revient Ă ses premiĂšres amours : sur les planches, elle joue notamment sous la direction de Hassane Kassi KouyatĂ© et, sur grand Ă©cran, de Lucien Jean-Baptiste et de Toledano et Nakache. Actuellement, elle tourne un projet amĂ©ricain : « Un rĂŽle qui nâest pas stigmatisĂ©. Je me sens libre. Câest donc possible ! » Et planche sur lâĂ©criture de lâhistoire de ses parents, quâelle nâa quasi pas connus. « Je veux dĂ©couvrir quelle Ă©tait leur jeunesse pendant la pĂ©riode coloniale. Câest aussi mon hĂ©ritage. » â La Freak, journal dâune femme vaudou, du 7 au 26 juillet, Ă la Chapelle du verbe incarnĂ©, Ă Avignon (France).
«Le septiĂšme art mede rĂȘverpermettait , de me projeter.»
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Le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial sâest dĂ©roulĂ© en juin dernier, Ă Paris. La plupart des chefs dâĂtat africains Ă©taient lĂ . Et⊠de nouvelles promesses pour aider le continent Ă lutter contre le changement climatique et Ă rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s ont Ă©tĂ© faites. AprĂšs toutes celles qui les ont prĂ©cĂ©dĂ©es lors des multiples COP, et pas vraiment encore suivies dâeffets. Mais il nâempĂȘche, câest bien, il faut ĂȘtre lĂ , montrer que lâon est concernĂ©s, prĂ©occupĂ©s, demander encore et encore, pour obtenir un jour les fonds nĂ©cessaires Ă la « survie » de lâAfrique. MĂȘme si le continent ne participe quâĂ 3 % des Ă©missions de gaz Ă effet de serre dans le monde, il rĂ©colte de plein fouet les consĂ©quences de la pollution gĂ©nĂ©rĂ©e par les autres. Et il faut urgemment des sous pour mettre en place des politiques intelligentes, innovantes, efficaces, afin dâĂ©viter les terres brĂ»lĂ©es, les rĂ©coltes anĂ©anties, lâeau rarĂ©fiĂ©e, etc.
Cela dit, avant de disposer des fonds nĂ©cessaires et de mettre en place les solutions adaptĂ©es, le premier travail serait de conscientiser les populations. Et câest peut-ĂȘtre le plus grand chantier. Dans des pays oĂč la pauvretĂ© frappe la plus importante partie des habitants, faire comprendre quâil faut changer de comportement pour lutter contre la dĂ©forestation, abandonner des pratiques ancestrales pour des nouvelles technologies coĂ»teuses, ou encore tout simplement faire le tri des dĂ©chets alors que le ramassage des ordures nâexiste peu ou pas, devrait ĂȘtre un combat de tous les jours pour les gouvernements. Pourtant, les affiches, messages, articles, rĂ©unions locales explicatives sur le sujet ne sont vraiment pas lĂ©gion. Dans des sociĂ©tĂ©s qui vivent au jour le jour, oĂč lâurgence, câest encore manger et se soigner, les mĂ©faits des comportements sur lâavenir du climat, on sâen moque comme de sa premiĂšre igname. Et câest malheureusement assez normal. Câest donc aux mĂȘmes gouvernements qui viennent demander des fonds dans les rĂ©unions mondiales sur le sujet de travailler dĂ©jĂ chez eux, dâaugmenter les budgets de leurs ministĂšres concernĂ©s, dâinstaurer des programmes Ă lâĂ©cole, de sensibiliser et dâĂ©duquer les populations. Câest lĂ lâurgence. Et accessoirement de montrer lâexemple.
Les enfants de prĂ©sidents ou les milliardaires locaux qui empruntent un avion pour sillonner leur propre pays, alors quâil y a des routes, câest tout Ă fait contre-productif. Ceux qui le font aujourdâhui dans la plupart des pays « riches » sont au minimum Ă©pinglĂ©s par les mĂ©dias. Câest donc une profonde refonte des mentalitĂ©s et des comportements qui doit sâopĂ©rer. De haut en bas. Avant mĂȘme dâimaginer pouvoir lutter utilement Ă la prĂ©servation du continent. â
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