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AKWAEKE EMEZI Être ou ne pas être
Une exploration du genre, par l’une des VOIX SINGULIÈRES DE LA LITTÉRATURE NIGÉRIANE.
DÈS LES PREMIERS MOTS, les dés sont jetés. Vivek Oji est mort. Cette disparition devenant la clé de voûte du dispositif littéraire d’un récit polyphonique troublant. Où passé, présent, réalité et au-delà s’entremêlent. Dès le départ, la dépouille du héros suscite mille interrogations. Et invite à une exploration de l’intime, de l’identité et du genre. Autant de questions sensibles, touchant à l’individu comme à la société nigériane, et auxquelles la personnalité mystérieuse et poignante de Vivek, fauché en pleine jeunesse, donne chair. « Je ne suis pas ce qu’on croit. Je ne l’ai jamais été », confesse au lecteur celui qui n’a pas pu vivre ouvertement ce qu’il a toujours voulu être : un jeune adulte en quête de lui-même, aimant s’habiller en femme, avec une attirance pour les hommes. Mais comment se faire accepter au sein d’une société où chacun essaie de faire de sa réalité une réalité dominante ?
C’est dans cet écartèlement, entre désaveu et tolérance, entre violence et reconnaissance, que ce roman, encensé par la presse anglo-saxonne lors de sa sortie aux États-Unis en 2020, s’inscrit.
Comme en écho au parcours pugnace et singulier d’Akwaeke Emezi, 35 ans, qui se définit comme non-binaire (personne ne se sentant ni homme ni femme), transgenre, se vit comme étant plusieurs. Né-e à Umuahia d’un père nigérian et d’une mère malaisienne, l’artiste et vidéaste habite aujourd’hui New York. De cette mosaïque identitaire, Akwaeke Emezi tire les fils des frontières réelles ou irréelles entre les genres et les cultures, tisse une œuvre texturée et profondément émouvante. Si son précédent roman, partiellement autobiographique, Eau douce, paru en 2018, s’intéressait aux ogbanje (des esprits qui habitent des âmes humaines dans la culture des Igbos, au sud-est du Nigeria), ce nouvel ouvrage pose un regard profond et tendre sur une famille qui s’effondre après la perte tragique et précoce d’un fils incompris. S’inspirant du réalisme magique de Toni Morrison et de Gabriel Garcia Márquez, ou des mondes étranges d’Helen Oyeyemi, Akwaeke Emezi n’a pas fini de nous surprendre. ■ Catherine Faye
AKWAEKE EMEZI
La Mort de Vivek Oji, Gallimard, 288 pages, 22 €.
S Rie
EN PLACE (France),de Jean-Pascal Zadi. Avec lui-même, Éric Judor, Benoît Poelvoorde. Sur Netfl ix.