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Noubo, le self-made-man

Il en avait assez qu’on l’appelle « Noucy Boss ». Trop « mauvais gosse des rues ». Alors, il a opté pour « Noubo » (« nou » pour « nouvelle », « bo » pour « bonne œuvre »). Un nouveau nom pour une nouvelle vie :

« C’est vrai, j’ai de la chance, j’aurais pu finir braqueur, voleur ou junky… » Lui slame en nouchi, cet argot qu’il parle depuis son enfance à Port-Bouët. Orphelin de père à 8 ans, il se retrouve seul à 17 ans, la perte de sa mère faisant de la rue sa maison : « La vie m’a imposé un environnement. » Pour survivre, il travaille comme manutentionnaire chez un sous-traitant au port. Puis à l’usine, chez SOTACI, où il dort souvent. « Vagabond du logement », il pose ses maigres affaires dans un centre commercial de Treichville, chez un vendeur de téléphonie. « Mais mes parents m’ont laissé trois choses : la musique, l’amour de la lecture, et une bible », dans laquelle il se réfugie et qui lui a « appris les mots ». Quand il se retourne sur son parcours et pense à ce qu’il est devenu, il est submergé par l’émotion. Comment fait-il pour slamer face à un public ? « Je parviens à contrôler mes larmes. Tout passe dans mon slam. » Tout a commencé par le rap. « Au début, j’écrivais en français, j’écoutais MC Solaar. Vers 2000, j’ai commencé à écrire en nouchi des textes assez profonds, que je disais avec un style particulier. » Il ne sait pas que c’est du slam. C’est l’un de ses amis, avec lesquels il aime partager ses textes, qui lui fait un jour écouter Grand Corps Malade, Kery James et Zaho. « Je me suis pris une claque en constatant que c’était ce que je faisais. » Il se met à écrire à temps complet. Avec le peu d’argent qu’il a, il entre en studio en 2013 et enregistre son premier disque. L’un de ses anciens collègues lui fait rencontrer un membre d’Au nom du slam, qui l’auditionne dans le centre commercial : Noubo fait un tabac devant un public inconnu. Il fait sa première scène avec le collectif. Et intitule son premier spectacle « Ma mère avait raison ». Un hommage à celle dont les valeurs lui ont permis de rester dans le droit chemin : « Elle m’a donné le chant et la lecture, et m’a appris à ne rien attendre des autres. Je vis de mon art, j’ai lancé une ligne de chemises pour hommes, et j’ai un studio d’enregistrement. » À 38 ans, Noubo va bientôt avoir un enfant et attend impatiemment d’ouvrir ce nouveau chapitre de sa vie déjà bien remplie. ■

* « Assis dans mon travail de grouillot, sans cela on ne mange pas, ma parole pour motiver ton esprit de petit malin, l’enfant qui est né au marché n’a peur de rien et rien ne l’arrêtera. »

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