Botswana Lesdiamants de la justice N° 443 -4 44 -A OÛ T- SE PT EM BR E2 02 3 L13888 -443 - F: 5,90 € -RD ENQUÊTE NUMÉRO 443-444 EN VENTE DEUX MOIS Notre monde vrai Dette La jurisprudence Zambie POR TF OL IO INTERVIEWS BUS IN ES S FaouziBensaïdi Didier Claes Guillaume Diop Feurat Alani Gu ill aum eD iop ABIDJAN CITE AFRO GLOBALE C’estlatroisième villefrancophonedumonde.Unchantierpermanent.Undéfi urbain majeur. Un creusetdecultures et de peuples.Une mégalopole ouvertesur le grandlarge. TUNISIE Quel chemin pour demain ? Ka ïs Sa ïe d. Fr ance 5, 90 € –A fri qu ed uS ud 49 ,9 5r an ds (t ax es in c l. )–A lgér ie 32 0D A–A ll em ag ne 6, 90 € Au tri che 6, 90 € –B elg iq ue 6, 90 € –C anada 9, 99 $C –D OM 6, 90 € –E sp agne 6, 90 € –É ta ts -U ni s8 ,9 9$ Gr èc e 6, 90 € –I ta li e6 ,9 0 € –L ux em bo ur g6 ,9 0 € –M ar oc 39 DH –P ay s- Bas 6, 90 € –P or tug al con t. 6, 90 € Royaume -Uni 5,50 £–Suisse 8,90 FS –TOM 990 FCFP –Tunisie 7,50 DT –ZoneCFA 3500 FCFAISSN0998-9307X0 Le prési de nt lég itim e Mo ham ed Ba zoum. Niamey, le putsch et ses conséquences pa rZya dL im am
Le Marché de la ZLECAf PROMUE PAR EN COLLABORATION AVEC ACCUEILLIE PARL ÉGYPTE
NIAMEY,LE COUP ET SESCONSÉQUENCES
Le coup d’État perpétré le 26 juillet 2023 contre le régime civilet de naturedémocratique du président Mohamed Bazoum au Niger estune tragédie. La da te re stera. Op érat io n, dit -o n, de convenanceetd’opportunitémenée par le chef de la garde présidentielle, le général AbdourahmaneTiani,elleva entraînerune profonde déstabilisation d’un pays clé pour l’architecturerégionale. Tout début août,leprésident est toujours séquestrépar la garde supposée le protéger. DesBrutus et desJuda sans vision stratégique, comme prisonniers dansl’espace -temps, avec leurs déclarationsmar tiales.Etleurs communiqués numéro un,deux, trois… Rien ne pouvaitjustifier une tellemanœuvre, quivastopper un processus actifde développementetderéformes.Lepremier depuis de longues années, malgréses limites,avecune hausse de la croissance,des investissementsextérieurs,l’arrivée du pétrole. Un coup àcourtevue quivaisolerle Niger. Fragiliserlalutte contreles terrorismes. Entraîner, probablement,des divisions au sein desforcesmilitaires.LaCEDEAOalancé un ultimatumetenclenché des sanctions d’une rare sévérité. Menacéd’une opération militaire. La fouleest manipulée, elle descend dans la rueenbrandissantdemanièrepathétique desdrapeauxrusses et en s’at taquantaux murs de l’ambassadedeFrance.
Àl ’heure où ces lignessontécrites ,personne ne sait comment la situa tion va évoluer. Tout est possib le,m êm el ep ire, yc om pr i sl avio le nc eetl a gu err e. La Fr an ce va or gani se rl ’é va cu ati on de ses re ss or ti ss ants et d’au tres ét ra ng ers bl oqu és à Niamey.Accentuant l’isolementdurégime. Niamey, BamakoetOuagadougou,dansune alliance kaki de circonstance,m enac entd e qu it te rl aC ED EAO en cas d’ in te rv en tion mi li ta ir e. Ma is qui aurait le plus ày perdre ?Etcommentpourraientsur vivreces
ré gi me ss’i ls entrai ente nc on fl it ou ve rt avec le urs vo isins -p ar te na ires de l’UEMOA? Qu elle crédib ilité financi ère, mon étaire, pour lestro is pa ys du Sah el ce ntra lsans« la couver ture »esse ntie ll em entd ela Côte d’Ivoire,mais aussi du Sénégal, du Bénin, du Togo,etc.? Commentmener de frontlabataillecontre le terrorismeetlalut te pour le développementsans l’appui,mêmelimité, imparfait,àcourtevue,des pays occidentaux ?Avecl’aidedeMoscou, peut- être ?
Rétablir l’ordreconstitutionnel au Nigerest une urgencemajeure. Abandonner le paysàlui -même serait uneerreur d’ampleur historique.Comment protégerles autres expériencesdémocratiques, lesprogrès économiques en Afrique, et en particulierdansla sous-région, si un militaire peut venir renverser la table àtoutmoment, sans craindre de véritables sanctions?
De Niam ey àB ama ko,l eS ah el do it sor ti rd e cettepolitique desimpassespouraffronter la réalité en face. C’est unedonnéebrutalementincontournable Le Sahel est l’une des régions les plus pauvres, lesplusdéshéritées au monde.Onpeutévidemment évoquerlagouvernance depuis lesindépendances, leséchecs despouvoirsenplace.Mais lescar tes, au dépar t, ne sont vraim entpas favorables. DesÉtats enclavés,sansaccès àlamer,donc structurellement dé sa va ntag és –h ér itag ed el at ristem entc él èb re conférencedeBerlin.Le découpage post-colonial a créé,àpar tirdelacomplexitédudésert,des sociétéshétérogènes, par ticulièrementfragiles, avec des fractures culturelles, so ciolo giques, re li gi euses,e n par ti cu li er entrel es «n ord» et le s« su d»,e nt re de s pop ulation sd ites «b la nc he s» et de sp op ulation s dites «noires».Etauseindeces mêmespopulations, entreéleveurs,agriculteurs,sédentaires, nomades Àces marqueurs de tensions, s’ajoutent unenature par ti cu li èr em en tr ud ee tp eu de po ssib ili té sd e
AF RI QU EM AG AZ INE I 44 3- 444 –A OÛ T- SE PT EM BR E2 02 3 3 édito PA R ZYAD LI MAM
développementagricole,qui restepourtantl’une des premièresclésdudéveloppementéconomique. Les ef fets dévastateurs du chang em entclimatique sont particulièrementvisiblesdanslarégion.L’eau se fait plus rare,les terres sont usées, lesespaces cultivablesdiminuentsousl’effet de la sécheresse et de la population La luttepourles ressourcesnaturelles devientaiguë
Rés ul ta t: au jo ur d’hu i, la pa uvr et éd em as se estundéterminant de la région. Le PIBpar habitant par an resteb ie ne nd eç àd el am oyen ne af ri caine (environ 20 00 dollars)etencoreplusdelamoyenne planétaire(12 60 0dollars): 830dollars au Mali,530 dollars au Nig er,830 dollars au Burkina Faso.D’après le Programmedes Nationsunies pour le développement (PNUD),l’indice de développementhumain (IDH)des paysduSahel figureparmiles plusfaiblesaumonde. Le Niger estau189e rang, le Tchad, avant-dernier (juste devant le SoudanduSud), est au 190e rang, le Burkina Fasoau184e,et le M ali au186 e Aujourd’huiencore, en 2023,20% à30% de la population aurait un besoin qu asip er manentd ’a ss ista nc ehumani ta ire, en pa rticulier alimentaire.Lacroissancenechangepas de manièredynamique cesdonnées. LesannéesCovid-19 n’ontpas aidé. Et la guerre en Ukraine, avec sesconséquencesmacro- économiques globales,non plus
Au cœu rd es mu lti cr is es ,s ep os el aq uest ion es sent ielle de la démographie. Le Sahel(Mali,Burkina, Niger,Tchad) est passé de 15 millions d’habitants àl’aubedes indépendancesàprèsde90millions au tournantdes années2020, soit une multiplication par plus de cinq en soixante ans. Lesprojections moyennes surl’avenirnesontpas par ticulièrementrassurantes. On évoqueplusde150 millionsd’habitants en 20 50, avec un Nigerpeupléde8 0millionsd’habitants…Et un Ma li avec 46 millionsd ’hab itants…U ne vé rita ble «bombelente », unemachine àdétruireles sociétés. Ceta ccroissem entincontrôlé de la population ti ent en partie àlaruralité, où la famillenombreuse resteun signeapparentde« richesse»,mais aussi et surtoutau fondamentalismelatent, au poids du religieuxsur les questions de natalité, de famille, de rappor thommesfemmes,sur lesquestionsdel’éducation et de l’émancipation desfilles.Leprésident Bazoum l’adit àplusieurs reprises :lecontrôledecet te démographieest l’un des paramètrescruciauxdel’avenir. Mais le sujet estperçu comm ehautem entp oliti qu e, inflammabl e, et il faut l’abordertoutenprudence, par toutes petites étapes, alors quelamaison brûle…
Le poids de cettedémographie, sondynamisme, mange lesfaiblesgains de croissance, pèse très lourdement surles raresstructures sanitaires et scolaires, débordeles capacitésd’investissementsdéjàexsangues,alimente la pauvretédemasse.Bamako,Ouaga, Niamey,N’Djamena deviennentdevastes« chaudrons » urbains où unejeunesse pléthoriqueetauchômage pose desproblèmes de sécuritéetdestabilitéàune échelleinégalée.
La «d es tr uc ti on »d el aL ib ye ac er ta in em ent joué un rôle da ns la cr isesécur itaire exis tent ielle que vivent les pays du Sahelcentral. Avec la dissémination d’armes, la pertedecontrôledes frontières nord, la disparition, aussi,des largesses financièresdu guide de la Jamahiriya, Mouammar Kadhafi.Maisles facteurs locauxont uneimpor tancedéterminante.La pauvreté génère des« vocations».Une kalachnikov, une mobylette, quelquescentaines de dollars, c’estnet tement mieuxque la misère…Lemanqued’infrastructures et de services de base afait le jeu de groupes, prosély tes, radicaux,qui ontprospérésur le videlaissé par le sÉta ts et su ru nterrea ud ’i mm en ses frag ilités économiques et humaines. Icioulà, cesgroupes ont pu apparaî trecomme desfacteurs «d’ordre traditionnel».Commesatisfaisantdes besoinsprimaires.Etles groupesterroristes se sont engouf frés dans la brèche, largementouver te.Mus parl’idéologie, par lesressentiments locaux,aussi,etpar la penséefolle d’un grand djihad planétaire.Ils se sont at taqués àdes États minés pa rl es di fféren ce sethni qu es,p ar le co nse rvat ism e religieux, par la pauvreté,par le changementclimatique, par le désespoir desgens. L’Occident,laFrance en premier,est venu àlarescousse (opérationsSer val, Barkhane,etc.).Enprotégeant ce quipouvait l’être.Et en formant, en équipantdes arméesquasimentincapablesdedéfendrelepays. Ceciexpliquantpeut- être cela.Etencoreune fois,sur le terreaud’une immense fragilitédes institutions, dansdes terres où le coup d’État est unetradition ancienne, le putsch est de nouveau d’actualité. Le cycledémarreen2012auMali.Avecune répétitionen2021. Puis,ceseraleBurkinaFaso, àpar tir de janvier2022, en deux étapes.Enfin,tragiquement, le Niger, en juillet 2023
Co mme nt ,d an sc es co ndi ti on ss ia dv er se s, construireles institutions, enclencherces processus durablesetver tueux de réduction de la pauvreté, d’augme ntati on de sr ic hes se s? Lesmilitaires n’ont pas de solution.Ils exercentjuste le pouvoir. Ilsfontles
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ÉD ITO
matamores, se dotent d’organismes aux noms ronflants –rénovation, sauvegarde et tut ti quanti –, préparentet font votercommeunseulhommeetpourlaénième fo is de nouvellesconstitutions, accusentd etousl es maux la France,cet ennemi si pratique, et l’Occident. Ils manipulentles foules,fontbrandirdes drapeaux russes, menacent de s’allierpourfairefaceaux ing érences étrangères,mais au fond,ils ne règlentrien. Au Mali et au Burkina,lasituation estpar ticulièrementdif ficile.Terrorisme, économie, luttecontrelapauvreté, instabilité… Rien ne change.Au- delà de la capitale, l’insécuritéest complète. Et la répression politique s’accentue. Et on ne voit pascomment la junte nigérienne,isolée, coupée de sa ré gion et de so ne nv ironn em ent, sa ns l’ap pu i militairedelaFranceetdes États -Unis,pourratenir. La sauvegarde ne viendrapas de Moscou ou d’un autre hypothétique alliémiraculeux…
Pe rs on ne n’ad es olu ti on mi rac le pou rl ed éf i sahélien. Et cetédito n’apas la prétention d’en proposer. Mais certains paramètresreprésentent àtoutle moinsdes pistesderéflexionetd’action.Sanschangement de cap,lasituationnepourraqu’empirer. Sérieuse ment.Ave cunrisqu eexiste ntie lpourchacun des pays. Il n’yaurapas de changementdecap sans un retourdéfinitif desmilitaires dansles casernes et au front,
à leur devoir de protection de la nation Il n’y aura pas de révolution sahélienne sans stabilitépolitique durable, sans pactesnationaux puissants, engageantspourla sécuritéetledéveloppement,oùlaclasse politique, lessociétésciviles,les entreprises et le business,les religieuxs’unissent danscette luttepourlasurvie. Il n’yaura pasdechangementsil’onn’affronte pas sans taboula question de la démographie et de soncontrôlerapide, si l’on n’ éman ci pe pa sl es je une sf ill es et le sj eu ne s femmes.Iln’y aurapas de renouveausahélien sans un effor tmassifsur l’éducation,l’apprentissage, la formation, si l’on ne sort pascet te immense jeunesse des ténèbres de l’analphabétismeetdel’ignorance. Enfin, la France,les paysoccidentaux, le restedumonde ont un rôle essentiel, crucial àjouer.Ensor tant desparadigmes actuels.Au- delà de la sécurité,des armes, de la luttecontreles terrorismes. Le Sahelab esoind’un apportmassifdefinancements, de transferts de technologies,d’appui au développement(infrastructures,eau, éducation,agriculture…). C’estune cause de longue haleine, nécessaire, qui devrait engagerl’ensembledu G7 et du G20, si soucieux,justement,de sécurité et de luttecontrel’émigration massive…
Et la premièreétape de cettereprise en main, de ce retourdeconfiance en l’avenir, passe par Niamey ■
AF RI QU EM AGA ZINE I 44 3- 444 –A OÛ T- SE PT EM BRE 20 23 5
VINCENT FOURNIER/JEUNE AFRIQUE/RÉA
Le prési dentn ig érien Mo ha med Bazou m, re nver sé par le sforce sm ilitaires put sch is te sl e26jui ll et dernie r.
8 ON EN PARLE C’ESTDEL’A RT,DELACULTU RE , DE LA MODE ET DU DESIGN L’imagedupouvoir
28 PA RCOURS Th iernoSouleymaneDiallo parAstridKrivian
31 C’ESTCOMMENT ? French visa,y aq uoi? parE mmanuelle Pont ié
50 CE QU EJ’AIA PPRIS
TEMPS FORTS
32 Abidjan: La cité afroglobale parZyadLimam
42 Botswana : Lesdiamantsdel’équité parCédricGouver neur
52 Tu nisie :Quel chem in pour demain ? parFrida Dahmani
60 L’A fr iq ue danssav raie dimension parCédricGouver neur
64 Feurat Alani: De Bagdad àPar is parZyadLimam
70 Didier Claes: Le passeu rd’art parLui sa Nannipieri
76 Faouzi Bensaïdi : «Jefaisu ncinéma d’hu manité » parAstridKrivian
82 Gu illau me Diop : «Ladanse estu ncadeau réciproq ue avec le pu blic » parCatherine Faye
AfriqueMagazine estinterd it de diffusionenA lgér ie depuismai 2018.Une décisionsansaucunejustifcation.Cet te grande nation africaineest la seuleduconti nent (etdetoute notrezonedelecture) àexercer unemesuredecensu re d’un autretemps
Le maintien de cettei nterdictionpénalise noslecteursalgér iens avanttout, au moment où le pays s’engage dans un grandmouvement de renouvellement. Nosa misalgér iens peuventnousret rouver su rnot re site Internet : www.afriquemagazine.com
6A FR IQU EM AG AZ INE I 44 3- 444 –A OÛ T- SE PT EM BR E2 02 3
KEHINDE WILEY -N ABIL ZORKOT -F ETHI BELAID/AFP
P.08
3 ÉDITO Niamey, le coup et ses conséquences parZyadLimam
P.52
parAstridKrivian
parZyadLimam
Stop
alimentaires ! parAnnickBeaucousin
BallakéSissoko parAstridKrivian P.32
Ch loéLopes Gomes
88 PORTFOLIO Visa pour l’image2023: Notremonde vrai
104 VIVR EMIEUX
au xintoxications
106 VINGTQUESTIONS À…
N° 44 3- 444 AO ÛT -S EP TE MBR E2 02 3
P.60
BUSINESS
94 Dette: La ju rispr udence Zambie
98 IbrahimaCou libaly : «L’Union eu ropéen ne est davantageu nconcu rrent qu’u npar tenaire»
100 Pétrole :TotalEnergies sous pressionver te
101 Un prog rammesud-coréen pour le rizafr icain
102 Au Niger ia, la frénésie réfor matr ice de Bola Tinu bu
P.64 ENQUÊTE
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FaouziBensaïd Didier Claes Guillaume Diop Feurat Alani
Niamey, le putsch et ses conséquences rZyad Lim PHOTOSDECOUVERTURE : VINCENTFOURNIER/JEUNEAFRIQUE/RÉA -SHUTTERSTOCK -NABIL ZORKOT -PRÉSIDENCE TUNISIE/ZUMA/RÉASVETLANA LOBOFF -EBRAHIM NOROOZI/AP/SIPA
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103 L’A fr iq ue du Sud accroaucharbon parCédricGouver neur diamants de la justice N° 443-444 -AOÛT-SEPTEMBRE 2023 L13888 -443 - F: 5,90 € -R
ON EN PA RL E
C’est ma in te na nt ,e tc ’e st de l’ar t, de la cu ltu re ,d el am od e, du de si gn et du voy ag e
8A FR IQU EM AGA ZINE I 44 3- 444 –A OÛ T- SE PT EM BR E2 02 3
L’IMAGE DU POUVOIR
Unesér ie de PORTR AI TS DE CH EFS
C’ESTSON PORTRA IT officiel de Barack Obama, en 2018,qui apropulsé Kehinde Wileyaurangde star de l’artcontemporain. Puisantses sourcesdans le rococo,l’architecture islamique, le design textile africain,etsurtout lespeintresclassiques, tels le Titien ou Ingres, l’Afro-A méricain s’attache àdéfieretà réorienter lesrécitsdel’histoire(et de celledel’art), àtravers sespersonnages.Six ansavant sa révélation, il s’étaitdéjàlancé dans unesérie inéditede portraitsdechefs d’État africains, en parcourant le continentpourrencontrer différents dirigeants –dontles noms sont confidentielsjusqu’à l’ouverturedel’exposition Avec chacun d’entre eux, il tented’élaborer, en concertation,une composition quiillustreson regard singulier surceque signifie être un leader africain contemporain La vocation de l’exposition estd’examiner le phénomène du pouvoirenA frique –en le mettantenperspective
avec le mondeoccidental–ainsi quelafaçon dont lesrapportsde pouvoiry sont traditionnellement misenscène. ■ CatherineFaye
«KEHINDE WILEY: DÉDALE DU POUVOIR», musée du Quai Branly, Paris(France), du 26 septembre 2023 au 14 janvier2024. quaibranly.fr
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L’a rtis te et le présid enta mér icai nB arack Ob am a deva nt so np or traitoff ic ie l, en févri er 2018
KEHINDE
WILEY -M ARK WILSON/GETTY IMAGES VIA AFP
TIWIZ A
ROCK THECASBAH
Rendanthom
àlalangue
RÉVOLT ÉE ET ENGAGÉE.
C’ESTL’HISTOIRE d’un jeuneKabylequi, adolescent,arriveenFrancelorsdela décennie noire. Il s’appelle SofianeA ït Belaïd, aMatoub Lounès commemodèleet, très vite, trouve refuge dans unemusique aussirévoltée quelui.En2013, aprèsdes études écartées au profit de sesdésirsartistiques,ilforme Tiwiza.Lui chante, assure au guembrietaumandole algérien.Autourdelui vibre le cœur du rock’n’roll: guitare, basse, batterie…Les influences, elles, sont éclectiques,dublues touaregaux mélopées gnawa, sans oublierles productionsnord-américaines.Écrites en kabyle, leschansonsdecepremieralbum, Amen zu,rendent hommage auxoriginesde AïtBelaïd, mais aussiaux femmes orientales.Elles dénoncentleracisme,célèbrentle pouvoirdelanaturecomme de l’amour. Électriqueetenthousiasmant! ■ Sophie Rosemont TIWIZA, Amenzu, Ma Case/Absilone.
SO UN DS
Ajamonet
wh en th epoem s do wh at th ey do, Dr in kSum W TR
Àécouter maintenant ! Résister,quand on est noire, femmeetartiste, et se serv ir du pouvoirdes mots pour construire sonarmure… commeses armes. C’estceque raconteletrèsbeau premieralbum de l’Américaine ajamonet, when thepoems do what they do,sous influenced’A miri Baraka et du Black Arts Movement.Soulignantles violences policières,iln’enélude guère l’attrait musical, fourni parpiano,trompette, flûteouencoredjembé. Prometteur !
Caut ious Clay
Karpeh,Blue Note
Depuis sonpremier album, Deadpan Love (2021),onest raidedingue du musicien,chanteuretcompositeur américain Joshua Karpeh,alias Cautious Clay, dont John Legend et Taylor Swiftadorentletravail…À justetitre puisquecesecond disque,signé surle prestigieuxlabel Blue Note,raviveses influences jazz,avecforce saxo,clarinette basse, vibraphone…Sansoublierle R’n’B, qu’ilmaîtrise àlaperfection.
YemenBlues
Sh abaz i-ATribute to th ePoet,M DC /PIA S
Depuis le débutdes années2010, le Yéménite RavidKahalanimène ce quatuor d’un charisme scénique dévorant,qui s’entend aussienstudio… En témoigne ce Shabazi-ATribute to the Poet,mettant en musiquequelquesbribes de la superbeœuvre du poètejuifyéménite du XVIIe siècle,ShalemShabazi.S’y mêlent avecgrâce blues, funk,musiques orientales,maiségalement mélopées traditionnellesouest-africaines. ■ S.R.
ON EN PA RL E 10 AF RI QU EM AGA ZINE I 44 3- 444 –A OÛT -S EP TE MBR E2 02 3
RY TH ME S
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CEDRICK NÖT -D R( 4)
AVENTURE ÉLECTRISANTE
Un ROMA NI NCLASSABLE su rl ’ascension fu lg urante da ns lesa nnées 1970 d’un duoafro-pu nk imag inai re,sa dislocat ion, et un ultimerev ival desdécen nies plus ta rd.
ENFINTRA DUIT EN FR ANÇA IS, Le Dernier Revival d’Opal&Nev n’estpas un ouvragecomme lesautres. D’une part,parce quel’onest persuadé de lire unehistoirevraie, alorsque tout estinventé,d’autre part,car il ne correspond àaucun genre. Lauréatdel’Aspen WordsLiterar yPrize 2022, sélectionné pour le Women’sPrize forFiction 2022,etdésigné commel’undes meilleurs livres de 2021 parle Washington Post et Esquire entreautres,letexte de l’Afro-Américaine
Dawnie Walton bouscule l’histoire du rockécritepar les Blancs en inventantune icôneafro-punk avantl’heure
Ce mélangeenivrantdeculture popetdepolitique, de pouvoirféministeetdeplaisir,s’appelle Opal,etelledécoiffe.
Jeunefille, elle estconvaincuequ’elle peut devenir unestar. Sa rencontre aveclechanteuretcompositeurbritannique NevilleCharles,alias Nev, et le succès de leur duomythique des seventies vont luidonnerraison. Portée parlemonde de la musique, la luttepourles droits civiques,les questions d’identité et dessecretsdefamille,cette histoire estracontée àlamanière d’uneenquête,àlafoiscinématographique
et stéréophonique.C’est S. SunnyCurtis, première Africaine-Américainerédactrice en chef d’un célèbre magazine musical, quiretrace le parcours d’Opal &Nev. Totalement imaginaire –comme tous lespersonnages et lesingrédientsdecette narration électrisante–,la journalistetient un scoop :letandem, disloqué aprèsla mort de sonbatteur,lorsd’une émeute raciale, envisagerait de se reformer, près de quarante ansplustard, pour un ultime revival.Polyphoniqueetinsolite, le récit combine interviews fictives, notesdebas de page,transcriptionsde talk-shows, lettresetnotes. On estimmédiatement happé parlestyle singulier de l’écrivaineetl’aventurepop-rock qu’elle nous conte, plus fascinante quecertaines histoires vraies.Du jamais vu.Acclamé parlapresseetlepublic, le livreest en cours d’adaptation en sérietélévisée pour HBO et produite parl’écrivain et journalisteaméricain Ta-Nehisi Coates.Pourunpremier roman, c’estdulourd. ■ C.F. DAWNIE WA LTON, Le DernierRevival d’Opal&Nev, Zu lma, 512pages,24,50 €
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LI TT ÉR AT UR E
DR (2)
RISQUERLES COULEURS
Remplacerled rapeau israél ienpar celu i de la Pa lest inesur le toit d’un lycéeaucœu r de l’État hébreu :U NDÉFIA DOLESCEN T traité avec unetendresse su rprena nte…
LE CONFLIT ISRA ËLO-PA LESTINIENafaitl’objet de nombreuxfilmsetséries, mais commentrenouveler l’incarnation de cettecolère arabepourune cause aussisouvent dépeinte ?C’est un cinéastepalestinien quiréussit ce pari en mettantenscène desadolescents appartenant àlaquatrièmegénérationdepuis la Nakba (la« catastrophe»), qui, en 1948,av u800 000 Palestiniens devoir abandonner leur maison du jour au lendemain au profit despopulationsjuives. Un lycéenqui ne souhaite surtoutpas fairedepolitique finitpar suiv re un ami quiveutremplacer le drapeauisraélien au frontonde l’écolepar celuidelaPalestine. Un acte de résistance soutenupar unejeune femme, elle-mêmeenrébellion contre le lourd patriarcatdelasociété palestinienne Lestribulationsdecejeune triosonttraitéesavectact
et infinimentde douceur et de nuances. Il yamêmedela tendresseentre cestrois-là, alorsque l’on sent bouillonner un sentimentderévoltejusquederrièrelacaméra.Firaz Khouri ad’ailleurs misdix ansàmonter ce film :« Personne ne voulaitsoutenir monscénario, quiaffirmequ’Israël est un envahisseurayant colonisélaPalestine.Abderrahmane Sissako, présidentdelacommission d’aide auxcinémas du mondeduCentrenational du cinéma (CNC), asoutenu le projet.Maisc’est le seul quej’aiobtenuenEurope. Les financements viennent principalement d’Arabie saoudite, du QataretdeTunisie.» Àl’écran,lerésultatest un petit miracle d’équilibreetdejustesse. ■ Jean -MarieChazeau ALAM (LEDRAPEAU) (France-Tu nisie-Palesti ne), de Fi razK hou ri. Avec Ma hmoodBakri,Sereen Khass, Moha mmad Ka ra ki.Ensalles DR (2)
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DR AM E
Alara s’expose au Brooklyn Museum
Le CONCEPTSTORE DE LU XE NIGÉRI AN déba rq ue àNew York, imag inantu ne bout iq ue exclusivepanafr icai ne.
JUSQU’AU 22 OCTOBR E, le conceptstore Alara, temple nigérian du luxe et de la créativité africaine fondépar Remi Folawiyo,s’installeenplein cœur de NewYork.Àl’occasiondel’arrivée au Brooklyn Museum de l’exposition événement« Africa Fashion», Alaraprésente, dans un pop-up storespécialement conçuàl’intérieur du musée,plusd’une centaine de marquesd’une vingtainedepaysafricains, ou imaginés pardes créatifsissus desdiasporas d’Amérique du Nord. On yretrouverades pièces desstylistes présents dans l’expo,comme Tongoro ou Lafalaise Dion,maisaussi descréations signées Jean-Ser vais Somian,Ousmane Mbayeouencore YinkaIlori.Parmi lesobjetssélectionnés, disponibles égalementdansuncatalogue en ligneexclusif: des cahiersetdes ballonsdebasketdessinéspar Kehinde Wiley, dessacstressés au Ghanadulabel AA KS ou en bois de la marque ég yptienne Boadk, desbijoux sud-africainsdePichulik, et despotsenpapiermâché réalisés pardes femmes eswatiniennespourQuazi Unesélection quineseveutpas exhaustive,maisqui complète avec un regard résolument contemporain l’exposition,dédiéeàl’essor de la mode africaine depuis lesannées1950.
■ LuisaNannipieri
POP-UP STOREALARA, Brooklyn Museum, NewYork(États-Unis), jusqu’au 22 octobre. shopalara.brooklynmuseum.org
DE SI GN
AZIZ TO URÉ
Un ec ré atio n sign ée La fa lais e Di on
SENSEY’ ROOKIE RAP
«POURFAIRE commeles grands frèresdemon quartier quichantaient, j’ai commencé àrapperavecmes amis, nous confie-t-il. Et je fais partie de ceux qui ont continué.» Fort de 2millionsdestreams surson premierEPparul’année dernière, Perlenoire,SenSey’ areçuunaccueil public plus quechaleureuxpourlesingle« Honey Damoiseau»,enduo aveclemusicienhaïtien JoéDwètFilé, qu’iladmiredelonguedate. Né Seydou Cissé, élevéàMelun,celui quis’est longtemps destinéàêtrefootballeur agrandiauson de Ker yJames,LaFouine ou Youssoupha…maisaussi de la musique malienne –etenparticulier Oumou Sangaré–,qui «inf luence forcément» la sienne.Auprogrammedeson premieralbum quiparaîtraàl’automne, Hokage,unterreau urbain,dugrooveetdes sentiments ■ S.R
SENSEY’, Hokage, Play
En concert le 10 septembre àlaCigale.
UNE SAMBA DE RIO AU RIAD
L’all ia nceDRÔLE ET POÉT IQUE entreu ne télénovela brésilien ne et unecoméd ie ma roca ine.
DA NS UNEPETITEV ILLE du Maroc, Abdallah estsurnommé Abdelinhopourson amourdémesuréduBrésil: il en arbore les couleurs,parle portugais, enseigne la sambaetneratejamaisun épisodede Maria,une télénovelaqui metenscène unejeune femme députéeissue desfavelas,enlutte contre un milieucorrompu, dont il estfou amoureux.Lamenace va venir d’unesorte de télévangéliste musulman (incarné avec un charisme incandescent parlecomédien palestinien AliSuliman),qui fascinesamèreetvainterdire la danse et la musiqueàtousles habitants. Abdelinho, quiaréussiàentreren contactavecson héroïnev ia sa parabole,va-t-ilrenverser cettevague ultra-rigoriste? C’esttoutl’enjeu de cettefable esthétiquement très soignée, quirecourt auxcouleurs vivesetàquelqueseffetsspéciaux inspirés pour nous embarquerdansununivers surréalisteetburlesque, loindes personnagesborderlinedes précédents filmsdeHicham Ayouch(commedans Fi ssures,en2009, et Fièvres,en2013).Le cinéaste franco-marocain réussitune odeparticulièrementplaisante àlaliberté individuelle,malgréunfinal assez conformiste. ■ J.-M.C
ABDELINHO (Maroc),deHichamAyouch. Avec Abderrahim Ta mi mi,I nêsMonteiro, Al iSul iman.Ensalles
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FI LM AL BU M
Ce NOU VEAU VENU su r la scènef ra nçaise conv ie desi nf luencesducontinent da ns sesmorceau x la ngou reux et da nsants.
DR (3)
Two.
AFRO -POTENTIEL
Uneode au pouvoi rrévolut ionnai re de L’IM AGINAT IONNOI RE.
ÀTRAVERS UNECENTA INED’OBJ ETS, commelamachineàécrire de l’écrivaineféministedescience-fiction OctaviaE.Butleroul’uniforme rouge de Starfleet, portépar l’actrice Nichelle Nicholspourson rôle dans Star Trek, l’exposition «A frof uturism: AHistory of BlackFutures » explorececoncept inventé, il yatrenteans,par le critique culturel américain Mark Dery :ils’appuie surl’idée et la promessed’unavenir meilleurpourles Afro-A méricains. Un moyenaussi d’exprimer un sentimentradical àtravers l’artetdeparlerdel’expériencenoire La scénographie suit uneprogressionlinéaire, de sesracines émergentes dans lessystèmescosmologiques despeuples africainsàtoutesses formes d’expressions actuelles(activisme, mode,musique,artsv isuels, technologie,SF…). L’œuvrelaplusconnueétant peut-êtreleblockbuster BlackPanther,sortieen2018, avecChadwickBoseman dans le rôle de T’Challa, roiduWakanda,unpaysfictif situéenA frique,disposant d’un niveau de technologies bien au-delàdureste du monde. ■ C. F.
«AFROFUTURISM:A HISTORYOFBLACK FUTURES», Muséenationaldel’h istoire et de la cu lt ureafro-amér icai nes, Washington (États-Unis),jusqu’au 24 mars 2024 nmaahc.si.edu
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EX PO SI TI ON
JOSH WEILLEPP -D R
PIERRE LÉPIDI, FRANÇOISE-MARIE SANTUCCI, PATMASIONI, Thomas Sankara, rebelle visionnaire, Marabout, 160pages, 23,95 €
ÉTOILE FILANTE
Unebiographiei llustrée de THOM AS SA NK AR A, icôneburki na béedelalut
RÉVOLUTIONNA IR E, pragmatiqueetécolo avantl’heure,ThomasSankaran’est pasinconnu quandilprend le pouvoirle4 août 1983.Entré très jeune en politique, celuique l’on surnomme le «Che africain »n’a que33ans.Onzeans plus tôt,alorsqu’il fait sesétudesà Madagascar,ce sont l’insurrection et la find’unrégimetaxéde néocolonialiste, en 1972,qui l’amènentàconcevoir l’idée d’une« révolution démocratique populaire» Avantd’êtreassassiné,en1987, lors d’un coup d’État fomentépar Blaise Compaoré,son numéro deux,ilnelui aura falluque quatre années au pouvoirpourconstruireune légende. C’est ce parcours fulgurantd’unhomme,porté par la défensepassionnéedel’A frique et de ses capacitésà se développerpar elle-même, quedeux journalistesfrançaisetunbédéastecongolais remettentenlumière.Dansune mise en abîme éloquenteettrèsbiendocumentée. ■ C.F.
ES SA I
SEUL MAÎTRE ÀBORD
Un plaidoyersincère et percutantdeFatou Diome en faveur de la littérature. IL ÉTAITgrand temps. De se soulever. D’oser dire haut et fort ce quetantd’auteurs et d’autricespensent.Qui mieux queFatou Diomepourtaper du poingsur la table? Uneurgence courageuse, pour dénoncer leur pressurisation parla marchandisation,l’ingérence de certains éditeurs dans l’écriture même,etl’enthousiasmebridé desartistes. Un livren’est pasune distraction.« C’est un acte profond, politique ou intime,une mise en abîme d’un créateur,d’une personne quihalète, reliée au monde parles mots seuls. »Depuis
ROM AN
ÀL’É PREUVE DU MONDE
Plus engagéeque dans ses précédentsromans, Ya smine Chamivisiteles déchirures d’unehumanité contra stée APRÈSDEU XTRÈSbeaux textes, Médéechérie et Dans sa chair,l’écrivaine marocaine proposeunrécit ancrédans un mondedecontradictions et d’inégalités.Une exploration desrépercussions que lesdifficultés sociales,la mondialisation,l’avidité et la représentation du masculin peuventavoir surles êtres. Dans ce roman, lesmotsde l’UruguayenEduardo Galeano, citésenexergue,prennent tout leur sens :« L’indignation doit toujours être la réponse àl’indignité.Laréalité n’est pasune fatalité.» Revenus
FATOUDIOME, Le Verbelibre ou le Silence, AlbinM ichel,192 pages, 19,90 €
sonbest-seller, Le Ventre de l’Atlantique,vingt années de publicationsont fait de cettefemme de lettres franco-sénégalaise une navigatrice au long cours de la littérature. Solitaireet passionnée. Commetousles auteurs.Drôle,poétique, incisive et vraie, elle braveici lesaffres et lesravissementsdel’éclosion d’uneœuvre.Une louvede mer, àl’affût desécueils, dans un océandemots. ■ C.F.
YASMINE CHAMI, Casablanca Circus, ActesSud, 208 pages, 20 €
s’installer àCasablanca, aprèsdes annéespasséesen Occident,unjeune architecte et sa femmehistorienne,enceinte d’unepetitefille, redécouvrent la villetentaculairedeleur enfance. Un universéclaté, entrevanitéhumaine,poids de l’histoire,urbanismeabsurde et enjeux politiques.Aufil de la grossesse, la cité ogressedétruit leurs conv ictions. Leur lien amoureux peuàpeu se délite Etsedissout. ■ C.F.
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BD
te cont re lesi mpér ia lismes.
DR (5)
CINDY POOCH DU CORPS ET DU
«ENLÈV ETON CŒUR », «Délicatesse», «Nyanga»,« Redondant d’amour», «Secretprécieux »: lestitres deschansons de Cindy Poochsont tellementjolis ! Pourtant,pas de tentativede séduire ici, en tout caspas directement :lamusique de cetteartiste,née en France et ayant grandi au Cameroun,brillepar son épure. Tout commesacréatrice parle avecune honnêtetésansfioritures : «Chanter estdevenumon métier –etplus seulementune passion–audébutdela vingtaine, racontecelle quia suivides études littéraires àLyon. Aujourd’hui, plutôt quededireque je suis chanteuse, j’aimemecontenterdedireque je chante.C’est unenuancesubtile quime fait du bien,qui aère monrapport àce métier.» Elle fait de sontimbreprofond soninstrumentprincipal et comprend qu’elle estmusicienne« en composant cetalbum à30ans »! Lequel estbaptisé In Nomine Corpus,dunom de l’un de ses premiers morceaux,paruauprintemps derniersur sonEP Issemou,qui annonçait déjà la structureorganique et la plume sensible de CindyPooch: «Cedisqueest l’expression d’un besoin de re-convoquer moncorps dans ma voix,dansmon lien au monde. Vialacomposition musicale,mon rapport nouveauà la création estune façon, parmi d’autres,d’expérimenter cetteprimautéducorps.»
Lorsqu’on luidemande en quoi sonenfance camerounaise influence sescompositions, entreautresinspirées parles groupesdemaloyaTi’Kaniki et An’Pagay, elle répond :« Monlien àcepaysest inhérentàmon identité. C’estunenvironnement,uncontexte, et puis de l’atavisme aussi… Ma musique témoigne de monhybridation comme d’un lieu àpartentière,etjen’identifie pasforcément lesendroitsprécis où ça va puiser.Cequi estsûr,c’est que le retour au corps, pour moi, passepar la connexion avec lesorigines, lesracines Lesmiennes sont au Cameroun.» ■ S.R. CINDYPOOCH, In NomineCorpus, InFiné.
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un prem ier al bu mTOU T EN ÉLÉGANCE, cettemusicienne franco-camerou na ise réinventeu ne chanson qu ivad roit àl ’â me. MUS IQ UE ANNE-LAURE ÉTIENNE -D R
CŒUR Avec
Troisquestionsà… HabibDechraoui
LE FONDATEURetdirecteur du festival Arabesques,prenant placeàMontpellier, s’attache àprogrammerartistesémergents et figuresemblématiques de la scènearabe actuelle.
AM : Entreles vedettes (Natacha Atlas, HasnaElBecharia…) et les jeunestalents, comment avez-vousimaginé la 18e édition ?
Habib Dechraoui: Celle-ci fera la part belle àlamusique gnaoua,enmêlantses expressions traditionnelles(HamidElKasri…) et la nouvelle génération (Asmâa Hamzaoui…).Cette pratique musicale estenrévolution, et se féminiseaussi.
Nous fêterons les20ans du Trio Joubran, musicienspalestiniensque l’on aaccompagnésàleurs débuts Incubateur de talents, Arabesques soutient la scèneémergente Il yauradeladanse avec HervéKoubi,dujazzavecYazz
Ahmed, MajidBek kas… La scène arabeglobale, de l’électro au classiquesavant, esttrèsriche.Jeregretteque l’on soit peu nombreuxàdéfendreces esthétiquesmusicales en France. Pourquoi avez-vouscréécefestival?
J’étaismusicien, en tournéeauMoyen-Orientetau Maghreb, et la diversitéculturellem’avait frappé.Depar son histoire,lagéopolitique, et au-delà, la France estliéeàces pays. Mais en dehors de l’Institutdumonde arabe, il n’yavait pas d’événements présentant leursarts. Pourtant,lepublic, l’intérêt, l’attente, étaientbienlà. L’idée d’Arabesques estnée ainsi, àJérusalem, dans uneprofonderéf lexion spirituelle. Comment réunirtousles publics ?
Avec beaucoup de volonté, nous ysommes parvenus. Nous avons un public mixte, àl’image de notre société. La difficulté est de faire venir les personnes éloignées de la culture. Au début, nous vendions les places de concert chez le primeur et le boucher des quartiers !Des gens de la génération de mes parents ont ainsi pu réaliser leur rêve d’applaudir Marcel Khalifé ou Khaled. Afin de garder le lien, on mène un travail de terrain toute l’année, par le biais d’actions pédagogiques, culturelles, professionnelles. Nous avons également ouvert la première galerie du quartier de la Paillade, L’Art est Public. ■
Propos recueillispar Astrid Krivian
FESTIVAL ARABESQUES, Montpellier ( France), du 5au17septembre festivalarabesques.fr
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Ci -d essus , Akwa ntukésaé, Th eresah An ko ma h, 20 22 .
Ci -c ontre, Sa ns titre, Troy Ma ka za ,2 02 0.
LUC JENNEPIN -D R( 2) -V INCENT EVERAR TS
AKAA DE RETOUR ÀPARIS
CETAUTOMNE
La 8e éd it iond ’A LSO KNOW N
AS AFRICA mett ra la lu mière su rlapratiquecurator ia le.
LA FOIR EPAR ISIENNEdédiéeaux scènes artistiques
d’Afriqueetdeses diasporasenFrance, Also Known
As Africa,seraderetourauCarreau du Temple pour unehuitièmeédition,du20au22octobre prochain
PendantlaParis ArtWeek, la manifestationaccueillera 36 galeries internationalesqui proposeront lesœuv res d’unecentained’artistesenprovenanced’A frique, d’Europe et desA mériques.Lechoixdel’installation monumentaleaété confié au commissaire Fahamu Pecou, fondateurdel’A frican Diaspora ArtMuseumofAtlanta,
ALSO KNOWNAS
AFRICA, Carreau du Temple, Paris (France),du20au 22 octobre. akaafair.com
quiainv itél’artiste jamaïcain Cosmo Whyte, connupour sesreprésentationsdecommunautés diasporiques en fête et de personnagesqui défientjoyeusement leur passé colonial.Sousladirection artistique d’ArmelleDakouo, cette8e éditionveutaussi mettreenlumière la pratique curatorialeetson impact surl’écrituredel’histoire de l’art. Dans le cadredes Rencontres, arrivéeàleurtroisième édition, on entendra entreautresles voix descommissaires Carine Djuidje(Cameroun), RichardMudarik i(Afrique du Sud) ou encore AllisonGlenn (États-Unis) ■ L.N.
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IR
FO
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Ci -d es su s, Sa ns titre, Davi dM bu yi,2 022.
RENAUD MILLET/JEAN-BAPTISTE MONTEIL COUR TESY GALERIE
POUYF AUCON -D R
CAMILLE
ÀLADETTE DU CLIENT
«JESUISPRÊTàdonnermon corpsetmavie pour qu’un plan existe !»,déclarait Faouzi Bensaïdi [voirson interviewen pp.76-81] en présentant sonnouveau film au Festival de Cannes en maidernier.Lecomédienetréalisateur marocain le prouve unefoisdeplusenlivrant unesorte de western loufoque en cinémascope,esthétiquementtrès maîtrisé. Il nous entraîneaux confinsduroyaume chérifienaux côtés de deux amis, employés parune agence de recouvrement, quinequittentjamaisleurcostumecravate et n’échangent aucunmot !Leduo taiseuxquitteCasapourles régionsdu Sudprofond,afinderécolterles remboursements d’échéances de clientspauvres et surendettés,dansdes villages àf lanc de montagne ou construits au milieudes sables du désert, d’unegrandebeautégraphique.Toutest soigné dans le cadre, sans gros plan ni coupure, carles plansséquences s’enchaînent, sans filet. Mais çan’empêche paslavie d’y faireirruption,aucontraire: on yobser ve avecdélectation toutel’absurdité de certainessituations. Lesdeuxcomparses vont ainsirécupérer au mieuxuntapis ou unechèvre, et
poursuivreleurcollectechaotique àbordd’une guimbarde, atterrissant le soir dans unechambre d’hôtelmiteuse qu’ils partagentpourfairedes économies. Au bout d’uneheure, le film basculesoudain dans uneautre dimension,àla faveurd’une rencontre inattendue dans unestation-ser vice désaffectée. Le road movieburlesque se fait alorsplus abstrait et poétique, délaissant quelquepeu lesdeuxhommes de façonunpeu artificielle, mais pour mieuxréser verde nouvellessurprises,etsanssedépartir d’un regard critique surunmonde capitalistique en roue libre. Commecette séquence magnifique montrant unepetiteépicerie de quartier promiseàladémolition au milieud’unvaste programme immobilier.Àl’intérieur du vieuxcommercecoloréetpeu àpeu dépecé,l’épicierest joué parleréalisateur lui-même ! Unehistoiredansl’histoire,comme bien d’autres pistes dans ce film quel’onpeutréinventeràsaguise. ■ J.-M.C
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CI NÉ MA
L’épopée da ns le GrandSud ma roca in de DEU XAGENTS DU RECOUV REMENT chargésdesouti rerdel ’a rgent àdes fa mi lles su rendet tées…Une FA RCET RAGICOMIQU E du toujou rs aussidouéFaouz iBensa ïd i.
DÉSERTS (France-Allemagne-Belg iq ue-Maroc-Qatar), de Faou zi Bensaïdi. Avec Fehd Benchemsi, Ra bi i Benjhaile, Abdelhad iTaleb.Ensalles DULAC DISTRIBUTION
Du geste àl’esthétique
230piècesd ’A fr iq ue su bsaharien ne réunies pa rles collection neursEWA ET YV ES DEVELONs’exposentàLyon.
CENTRÉESUR LESCULTURESduNigeria et du Cameroun,mais aussid’autrespaysd’A frique de l’Ouestetdel’Est, la collection Develon, constituée depuis lesannées1960, enrichit désormaislepatrimoine africain du muséedes Conf luences(de près de 7000 objets),réparti en trois grands ensembles: AfriqueduNord, Afriquesubsaharienne et Madagascar.
L’exposition,organisée àl’occasion de cettedonation,présentelaquasi-totalité desœuv resd’art rassembléespar le couple: paruresenbois, masquescimiers, ou encore plateaux yorubasévoquenttout àlafoislecontexte de leur création, les techniquesdeleurfabrication,leurs usages rituelsetsociaux,etleurstatut d’objets de collection.Lascénographie s’appuie surdes photosetdes films documentairesdécrivant cérémonies,coutumesetpratiques dessanctuaires
Exhaustifetpertinent,lecatalogue (paruaux Éditionscourtes et longues) rendhommage àl’importanceculturelledes piècesd’art exposées. ■ C.F. «AFRIQUE, MILLE VIES D’OBJETS », muséedes Conf luences, Lyon (France), jusqu’au 18 février2024. museedesconfluences.fr
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AR T
Ma squ efac ial, N ig eria, XXe si ècl e.
PIERRE-OLIVIER DESCHAMPS/AGENCE VU -D R
Africa Fashion Up TOUJOURS AU TOP
Pour sa 3e an née, le défi lé qu iCÉL ÈBRE LESJ EU NES
CR ÉATEUR Sduconti nent aconsacrélamarqueivoir ienne KenteG entleman.
ARR IVÉ ÀSATROISIÈME ÉDITION, le défilé événement Africa FashionUpapermisaux cinq jeuneslauréats de ce concours dédiéàlamodecontemporainedese produire dans un lieu emblématique, le 7juillet dernier: lesjardins du muséeduQuaiBranly. Un décord’exception pour un rendez-vousincontournable,nédelavolonté de l’ancienne mannequinValérie Ka de mettreenlumière la nouvelle génération de créateurs africainsetdes diasporas. En attendantlegrand soir,les designerssélectionnés(sur 155candidatures) ont égalementpuprofiterd’une semaine en immersiondansles coulisses de la mode parisienne La soirée étaitouverte pour la première fois au grand public,qui apuassisteraudéfiléetà la remise du prix au GrandDesigner2023:l’Ivoirien Aristide Loua. Ayant grandi entreNew Delhi,Pondichér yetNew York,avant
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Le pri xG ra nd De si gner 20 23 aété re mi sàl ’Ivo iri en Ari stid eLou a.
VINCENT SHANGO -K AMSON.FR AF RI QU EM AGA ZINE I 44 3- 444 –A OÛ T- SE PT EM BR E2 02 3
Le
lab el ré com pe nsé propose des pi èce s conte mpo ra in es et col orée s.
Le srob es pa tc hwo rk de la marqu e su d- af ricain e La aniraani so nt cousue s àl am ai nà par ti rd et is su s d’oc casion
de rentrer àAbidjanen2015pourlancerson label, KenteGentleman,ilaconquis le jury avec ses piècescontemporaines et colorées, réalisées avec destissuslocaux. Et dévoilésapremière collection féminine, «A woman wearingasuit»,unhommage àlamagnifique RobinGivensetàson st yleiconique dans le film Boomerang (deReginaldHudlin, 1992).
Seulefemme lauréate,laSud-A fricaine Shamyra Moodley aprésentéles robes patchworkdesamarque Laaniraani :cousues et brodéesàlamain àpartir de tissus d’occasion,elles évoquent sesracines indiennes et africaines.L’Éthiopien Yonael Marga afaitdéfiler dessilhouettes en noir et blancà l’allure afrofuturiste: chaque pièce estfinementdécorée pardes broderies, teintes avec de l’encredesarégionetinspiréespar desmotifs traditionnels.Minimaliste et géométrique, le Nigérian IbrahimTaju remetaugoûtdujourles classiques de l’urbanstyle avec TJ WHO. Tandis queleGhanéen Larr y Jafaru s’inspiredelanature, l’art et la mode desannées 1970 pour créerles collectionsdesamarqueLarry Jay,qui allienttissusde récupération et batikstissés et teints artisanalement.Des talentsàsuivre! ■ L.N.
Le ss il houettes de l’Ét hio pi en Yo na el Ma rg a so nt fi ne me nt déc orée sp ar des b ro de ries
Les collecti on s du Gh an ée n La rr yJ afar u all ie nt ti ssus de ré cu pé ra ti on et ba tiks ti ssés et te ints ar ti sa na le me nt
Le st yl e minimali steet géo métri qu e du Ni gé ri an Ib ra him Taju
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KAMSON.FR (4)
REPASAVEC VUEAUCAP
Deux ad resses pour se régaleravecDES PLATS IN VENTIFSETÉTONNANTS,les yeux rivés surlaforêt ou la cité.
JUSTEAU-DESSUS de la prestigieuse banlieue de Constantia, nichédanslaforêt quidominelaroute du vin, le restaurant La Colombe atout d’uneidyllique cabane blanchedansles arbres.Installédansune salle avec vuesur l’iconique montagne de la Table, on ysavoure desclassiquesdelagastronomie françaiseréinterprétés àlasud-africaine.Les menusdégustationsd’hiver, serv is jusqu’àfin août,s’ouv rent parl’amuse-bouche signature« le niddecolombe », àbasedecitronnelle, gingembre, pomelo et kalamansi (unagrumejuteux et aromatique jaune, quisertà reproduire l’œuf). S’ensuiventdel’agneauduKaroo,delalangoustine ou desgnocchisaux herbes,côté végétarien.Letout serv idansdes assiettesenforme de ruchesauvage, glands ou oursin :unclind’œil scéniqueàlarichesse naturelledelarégion lacolombe.restaurant/food
L’ambiance estpluscitadinechez Fyn.Récemment rénové, ce fleurondelagastronomiedurable installé dans le centre-v illeoffre unev ue magnifique surLeCap et la montagne de la Table, depuis sa verrière àdoublehauteur. Ilpropose unecuisineàlasensibilité nippone, quirecherche l’équilibredes saveurs prononcées du terroirafricain
et emprunte lestechniquesculinaires du Japon. Ici, tout est local: coquillages,algues, laitue de mer, épinards desdunes, ou encore truffesduCap.Les chefspeuvent ainsiser virdela viande de bœuf Wagyu du Capavecshiitake et algues hijiki, ou biendufilet d’antilopedelarégiond’Outeniqua en croûte de noisette et parmesan,avecpurée de céleri et my rtilles fermentées.Étonnantetdélicieux fynrestaurant.com ■ L.N.
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SP OT S
Ch ez La Col om be (c i- de ssus et ci -c ontre), on savou re de sc lassiqu es d el ag as tron om ie frança ise ré inte rp rétés àl asud -a fr ic ain e.
DR -L ISA DAUBERMANN PHOT OGRAPHY -D RBRUCE TUCK
Plu sc itad in, Fy ne st ins ta ll éd ans l ec entre- vil le
AFRICANWATER CITIES Desflots et desvilles
Avec un ouvragei llustréi nédit et inspirant, le Nigérian KU NLÉ
ADEY EM Iexplore la vieu rbai ne au bord de l’eau, face au x défisdenot re temps.
PR ESQUEL AMOITIÉdelapopulation mondiale vità côté d’un bassin,d’une rivière ou de la mer: 80 % desplusgrandes villes du globeont étéconstruites près de l’eau, et unebonne partie d’entreelles se trouvent surlecontinent af ricain.Avecleliv re Af ricanWater Cities,lecabinetd’architectureNLÉ (« àlamaison» en yoruba)deKunlé Adeyemiinterroge la façondont cesv illes,mégalopoles et communautés, font face àdeux défismajeurs de notre temps: la rapideurbanisationet leschangements climatiques. Connue notamment pour sonprojetd’école flottantedanslebidonvillenigérian de Makoko,l’agencebasée àA msterdam et Lagosa constitué dès2011ungroupederecherche surlesujet.Pendant
plus de dixans,les architectes ont observécomment descités telles Lagos, Abidjan, Conakr y, Kinshasa, Luanda,Dar es Salam, Dakar, Cotonou ou encore Mogadiscio,etdes collectivitéscomme Makoko,Ganvié et Nzulezuapprennent às’adapter auxchangements. Ici, l’eaureprésentetantundangerqu’uneressource. Elledev ient un atoutgéographique,économiqueet environnemental, quifaçonne le développement urbain et social.Magnifiquement illustréavecdes photos, des infographies et descar tesqui aident àmieux visualiser lesenjeuxdechaquerégion, Af ricanWater Cities présente de façoninédite unesynthèsef rappante et inspirante de cesannéesd’étudessur le terrain. nleworks.com ■
AR CH I
L.N.
KRIOLSCOPE -D R
Le Fl oating Mu sic Hub,u np rojet du ca bi netN LÉ.
GRIMPER SURLETOIT DE L’AFRIQUE
Sommet volcaniquemajestueu xetmagique, LE KILIMA NDJA RO fait toujours rêver lestrekkeurs,mêmesises neiges ne sont plus éternelles.
ON EN PA RL E 26 AF RI QU EM AGA ZINE I 44 3- 444 –A OÛ T- SE PT EM BR E2 02 3 DE ST IN AT IO N
ÀL AFRONTIÈRE entreleKenya et la Tanzanie se dresselaplusmythique desmontagnesafricaines, et la quatrième la plus hauteaumonde :leK ilimandjaro. Plusprécisément, ce massif estformé partrois volcans: le Shiraetses aiguilles àl’ouest,leMawenzi(le plus sauvage) àl’est,etleK iboaucentre. Sonpic Uhuru(«liberté », en swahili) culmine à5892mètres: un nomchoisien1961 parleprésident tanzanienJulius Nyerere, pour célébrer l’indépendance du pays et en faireunsymbole d’espoir et de dignité pour le continent. Ici, auxabordsd’une impressionnantecaldeirade3,6 km de longsur 2,4kmdelarge,l’air estsiraréfié quel’oninspire àchaquefoismoins de la moitié de l’oxygèneprésent au niveau de la mer. Lessix voiesd’ascension du Kilimandjaro (une septième ne sert qu’à la descente) traversentlaforêt tropicale et lescanyons volcaniques, et sont
praticablesmêmepar lesdébutants. Mais le véritabledéfiàrelever estlemal d’altitude si l’on veutvoirl’aubeéclairer cetincroyablepaysage lunaire, parfois encore parsemédeblocs de glaciers auxsaisons sèches( janvier-févrieret juin-septembre).Sadizainedeglaciers s’étendait surprèsde20km2 àlafin du XIXe siècle,maisaujourd’hui, la calotte glaciaireseréduitcomme peudechagrin et pourrait disparaîtred’ici àquinzeans. La fauteégalement àladéforestation,qui contribuelocalementaux changements climatiquesetimpacte le niveau d’enneigement. La pertedeson halo blancnesemblepas pour autant arrêter les marcheurs,qui continuent de rêver du toit de l’Afrique. Qu’ils optentpourla voie plus spectaculaireoul’une desmoins fréquentées,pourune excursiontout confort, avecchefetcouchagedeluxe, ou plus simple,ils ontl’embarrasduchoix.
Ànoter que, si la loi oblige àembaucher porteurs et guides locaux,ilvautmieux faireconfiance àune compagnieassociée au KilimanjaroPorters Assistance Project(kiliporters.org), pour une ascension éthiqueetresponsable. ■ L.N.
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SHUTTERST OCK
Thierno Souleymane Diallo
LE RÉALISATEURGUINÉENPARTÀLARECHERCHE du premierfilmd’Afrique francophonesubsaharienne dans sondocumentaire, Au cimetièredelapellicule.Une œuvre de résistance culturelle surlaplace du septième artdansson pays.
par AstridKrivian
Dans Au cimetièredelapellicule, ThiernoSouleymaneDiallo, caméra au poing, parcourt sonpayssur lestracesde Mouramani, de Mamadou Touré, le premier film d’Afriquefrancophonesubsaharienne,en1953. La quêtedecette œuvre disparue,qui le mène jusqu’àParis,est un prétexte pour dresserunétatdes lieux du septième artenGuinée, explorer sonhistoireets’interrogersur sa placedans la viedes citoyens.Undétailqui en ditlong: le réalisateur–également scénariste–cheminepieds nus, manifestant ainsi sa révoltecontre la défaillance criante despolitiquesculturelles.« Je suis cinéaste dans un pays où il n’ya pasunfranc pour fairedes films. Mais je résiste. »À la rencontre despionniers et deslieux emblématiques aujourd’huidélabrés, il exhume un tempseffer vescent.« Dans lesannées1960, le pays était doté de 32 salles,contretrois actuellement.L’institution Sily Cinéma étaitchargée de la production,dela distribution et de la diff usion. Lesautorités envoyaient lesétudiants se former àl’étranger. Ellesorganisaient desprojectionsdefilms de propagande pour éduquerlepeupleàlarévolutionsocialiste. »Dès 1984,àlafin du régime de SékouTouré,qui avaitdéjàarrêtélaproduction et jetédes réalisateurs en prison,les salles obscures baissent le rideau,étrangléespar lesajustements structurelsimposés parleFonds monétaireinternational et le système libéralcapitaliste.Cedocumentaireinterpelleaussisur la baisse mondiale de fréquentation dessallesobscures: «Elles sont l’essence du septième art. Elles créentlasocialisation, l’expérience collective,lespectacle.Lestreaming, la télévision ne peuventles remplacer. »
C’estjustement surlegrand écranque la magiedes images animéesl’a conquis,à Labé, où il agrandi. Enfant,ilfaitl’école buissonnière pour voir desfilmsindiens, puis lesraconter àses copainsenajoutantdes séquences nées de sonimagination.Adolescent,lecinéma reste le lieu de sorties, de rencontres et de fêtes. Naturellement,ill’étudieàl’Institutsupérieur desartsdeGuinée, àDubréka.Ildécouvreles réalisateurs africains: Abderrahmane Sissako, OusmaneSembène, Souley mane Cissé… Et surtout Cheick FantamadyCamara,son professeur :« Il m’aappris àfairedes filmsqui me ressemblentetqui parlentàmasociété.»
So rtie dans le ssal le sf ra nça ise s l e5 ju il let.
Aprèsdeuxmasters (cinéma documentaireetréalisation documentaire de création), il tourne deux moyens-métrages: Un homme pour ma famille, en 2015,et Nô Mëtî Sîfâdhe, en 2018.« Le documentaireest un cinéma de mémoire, quiaideà la construction desmentalités. »Thierno Souley mane Dialloinv iteà puiser l’inspirationdansles contes et légendesancestraux. «Notre cinéma se trouve égalementdanslamémoire de nosaïeux.Ils nous contaientl’histoire de nossociétésavant la colonisation, et ces récits sont en traindes’effacer », alerte celuiqui plaide pour la préser vation et l’archivage du patrimoine matériel et immatériel.Faceaux obstaclespourexercer sonmétier, il oppose sa résistance :« Ne pasprioriser le septième artcrée beaucoup de dégâts culturels, économiques, identitaires.Les réalisateurs sont livrés àeux-mêmes, mais il n’estpas question d’abandonner.Car un peuplequi ne se regardepas estamené àdisparaître.» ■
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PA RC OU RS
DR
RONNY HEINE/BERLINALE PA NORAMA
«Notre cinéma se trouve aussidans la mémoire de nosaïeux.»
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FRENCH VISA,YA QUOI ?
Le sujetafaitlongfeu,cer tes. Depuis bienlongtemps, lesaventuresvécuesdans lesconsulats français du continentpar desamisafricainsqui veulentvenir en France pour dessoins,des vacancesouautres,sontlégion.Comme celle de ce ministred’Étatd’unpays d’Afriquecentrale: «Ona ditàmon aidedecamp par ti renouveler mon visa que, dorénavant, tout le mondedevait venirs’alignerausoleilenpersonne,ministreoupas,pourcegenre de démarche. Résultat,jevais désormais en Suisse pour messoins et messéjours de repos. »
On peut comp rend re le french st ress ,q ui cons is te àévi teru ne im mi grat ion de pauvres hères, produisantdes faux cer ti ficats d’hébergement ou autres ,décidés às ’incruster dansl ’Hexagone. Mais un peudediscernementnenuitpas,non ?Lesujet, encore unefois éculé, arebondi tout seul le mois dernierlorsqu’unécrivaind’Afriquedel’Ouest,Venance Konan,connu et reconnu àl’international,occupantunpostedepremier plan dansson pays, s’est vu refuser un visapourParis,au motif de…« manquede fiabilité ». L’histoire afait le tour de la Toile. Et il estprobable quelafonctionnaireexpatriée qui a signélerefussoitaujourd’hui un peugênée, au minimum Unetelle méconnaissancedupaysoùelleréside,deses intellectuels,ses stars et ses élites,c’est pasbienglorieux! En quoi ce genrederessortissantetsademande de courtséjour sont-elles unemenacepourlaRépubliquefrançaise, où, d’ailleurs, ses ouvrages sont édités ?N’est-cepas présomptueux de penserque tout le mondeveuts’installerchezles Blancs ?Ben non,c’est fini,ça.
Il yabeaucoupd ’Afr icains qui ont réus si ,sont très bien chez euxetnerêvent nullement de bérets et de baguettesdepain. Et ce genredebouletteest loin d’être isolée.Onraconte quedes circulaires «circulent »dansles consulats français,demandant de durcir,voire de contourner la loisur lesdemandes de visa.Ondemande plus de pièces àchaquefois, on ne répond plus dans lestemps, presque exprès,àquelqu’un qui ades rendez-vousmédicaux ou doit assister àdes conseilsd’administration àdates fixes,etc
Bref,del ’avisdetousles Africains« aisés»,ilest plus facile aujourd ’hui d’aller dans n’importequelpayseuropéen ou auxÉtats -Unisplutôtqu’au «paysdes droits de l’homme ». Ycompris pour uneimmigrationditepositive,enrichissante, intellectuelle. Et au-delà de cetteréalité,c’est l’imageentière de la France qui estmiseàmal.Celapar ticipeaussi, bienentendu,àlamontéedurejet de l’Hexagone dansles payssubsahariens. Unerelation historiquequi se romptpeu àpeu.Etpas forcémentauprofit de la France.Loins’enfaut. ■
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PA R EM MAN UE LL EP ON TI É
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