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Les métamorphoses d'un conte
El kantoniko djudyo
Les métamorphoses d'un conte Deux versions judéo-espagnoles du conte « Les trois cheveux d’or du diable »
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Le conte « Les trois cheveux d’or du diable » est connu sous de nombreuses variantes. Dans la classification des contes d’Aarne-Thompson, il correspond au conte-type AT 461, mais le début du récit s’apparente aussi au conte du destin AT 930 « La prophétie qu’un garçon pauvre épousera une fille riche ». En France, ce conte est surtout présent en Bretagne, mais on lui connaît aussi une version poitevine rapportée par Geneviève Massignon dans le recueil De Bouche à oreilles. La version des frères Grimm qui figure dans le premier volume des Contes de l’enfance et du foyer a été collectée en Hesse et dans la région du Main. Selon le folkloriste Antti Arne, les contes de ce type auraient une origine orientale.
Dans les deux versions judéo-espagnoles que nous présentons ici, l’accent est mis sur l’inéluctabilité du destin et le récit est tronqué laissant de côté les trois questions et la quête de la richesse du diable. Cette seconde partie transposée se retrouve toutefois dans
un autre conte judéo-espagnol du Maroc recueilli par Matilda Cohen Sarano. À noter que l’un des motifs du conte – le nourrisson livré à la rivière dans son couffin – évoque l’histoire de Moïse. Nous présentons ci-dessous un résumé du conte des frères Grimm suivi des deux versions judéo-espagnoles évoquées ci-dessus.
Le fils d’une pauvre femme est né coiffé et on lui prédit d’épouser la fille du roi dès qu’il aura quatorze ans. Le roi passe au village et, en apprenant cette naissance et ce présage qu’il juge stupide, il se présente aux parents et leur demande, en échange de beaucoup d’or, de lui confier le nouveau-né. Le roi dépose le nourrisson dans une boîte, qu’il ne tarde pas à jeter à la rivière. La boîte ne coule pas, cependant, comme le roi l’aurait souhaité, mais elle flotte jusqu’à un moulin, où un commis la repêche. Découvrant le bébé, il court le montrer au couple de meuniers, qui, eux-mêmes sans enfants, décident aussitôt de l’adopter. Ils l’élèvent.
Bien plus tard, le roi vient à passer par hasard par le moulin. Après avoir interrogé le couple, il comprend que le garçon qu’ils hébergent est celui dont il avait voulu se débarrasser. Il promet alors aux meuniers de donner deux pièces d’or à leur protégé si celui-ci apporte un message à la reine. Il rédige le message, qui dit que celui qui l’apporte doit être tué sur-le-champ, puis le confie au garçon qui, aussitôt, se met en route. Dans la forêt, il se perd, et il parvient à une petite maison. Il y trouve une vieille femme, qui l’avertit que l’endroit est un repaire de brigands qui le tueront s’ils le trouvent à leur retour. Le garçon est si fatigué, qu’il reste là et s’endort sur un banc.
Les brigands reviennent, le voient, et interrogent la vieille, qui leur dit qu’il est porteur d’une lettre destinée à la reine. En lisant la lettre, ils s’en émeuvent et décident de la remplacer par une autre, disant que la fille du roi doit sans délai épouser le messager. Ils le laissent dormir jusqu’au matin puis lui rendent la lettre à son réveil en lui indiquant le bon chemin.
À son arrivée chez la reine, dès qu’elle a lu le message, les noces sont célébrées. Le couple est heureux et, quand le roi revient, il n’y comprend rien, demande à lire la lettre, et se rend compte de la supercherie. Le roi exige alors de son gendre qu’il parte en enfer et qu’il lui rapporte trois cheveux d’or arrachés de la tête du Diable.
Le garçon né coiffé accepte sa mission sans s’effrayer, prend congé et se met aussitôt en route. Il arrive à la porte d’une ville où il est arrêté par un garde, qui lui demande s’il sait dire pourquoi la fontaine de vin du marché s’est asséchée. Le garçon répond qu’il en donnera la raison dès son retour, et poursuit son chemin. Dans une autre ville, on lui demande pourquoi l’arbre qui donnait des pommes d’or n’en fournit plus à présent et n’a même plus de feuilles. Le garçon fait de nouveau la promesse de l’expliquer quand il repassera. Il arrive ensuite devant un fleuve, où le passeur lui demande pourquoi il doit sans cesse aller d’une rive à l’autre sans que jamais personne ne vienne le relever. Le jeune homme fait la même promesse, et, dès qu’il a franchi le fleuve, il se retrouve devant la porte de l’enfer. Il entre, mais le Diable n’est pas là, et il ne trouve que la grand-mère de celui-ci, assise dans un fauteuil. Il lui explique ce qui l’amène. Elle l’avertit que si le Diable rentre et le trouve, il risque gros, mais elle promet tout de même de l’aider et, pour ce faire, elle le transforme en fourmi et le cache dans un pli de sa robe.
La fourmi fait part à la grand-mère du Diable des trois questions qui lui ont été posées et la grand-mère lui dit de bien écouter au moment où elle arrachera les trois cheveux. Le Diable rentre alors chez lui et, immédiatement, sent la chair humaine. Il fouille dans tous les coins mais ne trouve rien. Une fois qu’il a bien mangé et bien bu, le Diable pose sa tête sur les genoux de sa grand-mère pour qu’elle lui cherche des poux. Il ne tarde pas à s’endormir et la grand-mère en profite pour lui arracher un cheveu, ce qui le réveille brusquement. La vieille lui explique qu’elle a fait un drôle de rêve et que c’est sans
1. L’un de ces devins qui lisent (l’avenir) dans le sable.
2. Son destin.
3. D’un éboueur (estierkol: ordures).
4. Cette année.
5. Villa, résidence d’été mais ici palais.
6. Soucieux, préoccupé.
7. Meurtrir, ronger.
8. Déguisé, travesti. Du turc, tebdil.
9. Un champ désolé.
10. Une cabane en zinc. le vouloir qu’elle l’a tiré par les cheveux. Elle raconte alors le rêve, qui est en fait la première question posée au jeune homme à présent transformé en fourmi. Le Diable explique que dans la fontaine se trouve un crapaud caché sous une pierre et que, si on le tue, le vin se mettra de nouveau à couler. La grand-mère se remet à l’épouiller, attend qu’il s’endorme, lui arrache un deuxième cheveu, et lui pose la deuxième question. Le Diable explique qu’une souris ronge la racine de l’arbre et que, si on la tue, l’arbre donnera à nouveau des pommes d’or. Après arrachage du troisième cheveu, le Diable donne la réponse à la question du passeur. Celuici n’aura qu’à jeter sa rame dans les mains de la première personne voulant aller sur l’autre rive; il serait libéré et l’autre devra prendre sa place. Le Diable s’endort alors jusqu’au lendemain et, quand il s’en va, la fourmi sort du pli de la robe de la grand-mère, qui lui redonne son aspect initial. Il reçoit les trois cheveux d’or et rentre chez lui. Après avoir traversé le fleuve, il explique au passeur ce qu’il doit faire pour être délivré. Dans la ville au pommier, en récompense de la réponse, on lui offre deux ânes chargés d’or, et dans la ville à la fontaine, deux autres ânes également chargés d’or.
Le jeune homme né coiffé retrouve enfin sa femme. Quand le roi reçoit les trois cheveux d’or et voit les quatre ânes et leur précieux chargement, il se montre satisfait et estime que le jeune homme peut demeurer son gendre. Le roi lui demande cependant d’où vient tout cet or, et le jeune homme lui parle du fleuve qu’il a traversé et lui dit que, sur l’autre rive il y a autant d’or que de sable: un passeur est là; il suffit de se donner la peine de traverser et on peut alors se servir à loisir. En apprenant cela, mû par sa cupidité, le roi part sur-lechamp en direction du fleuve. Là, le passeur le fait traverser mais, dès qu’ils sont arrivés de l’autre côté, le passeur lui jette sa rame dans les mains et s’éclipse. À partir de ce moment, c’est le roi qui est obligé de ramer sans cesse d’une rive à l’autre, et c’est sans doute ce qu’il fait encore à présent. El kismet de la ija del rey Konseja recogida por Moshe Attias
Avia de ser un rey. Este rey, kaminando un dia por la plaza, esta mirando uno de estos endevinos ke avren en la arena 1 . Vino el rey, le dicho : « Endeviname por mi, a ver kualo sale. » El endevino avrio, y esta mirando ke al rey le va naser este anyo una ija y su kismet 2 va ser el ijo d’un estierkolero 3 . Ya avrio otra ves, sien veses, le salio lo mismo. El rey le dize: « Ke tienes? De ke no me dizes kualo salio? » El endevino le konto: « Ke ke le diga, sinyor rey? Avri sien veses y kada ves sale ke oganyo 4 te va naser una ija y su kismet va ser el ijo d’un estierkolero ke va naser el mismo dia » Y le dio sinyales onde mora el estierkolero. El rey se atorno al konak 5 muy merekioso 6 d’esta novedad ke oyo y empezo a mashkar 7 los dedos: « Ah! Este kismet va ser para mi ija tan dezeada? » Despues se dicho de si para si: « Bueno, yo ya topo remedio ke no sea komo salyo al endevino. »
Paso el anyo y la reina pario una ija, komo disho el endevino. Un poko después del parimiento lo disho el rey al vezir: « Ven mos vestiremos teptil 8 i iremos a ver onde mora el estierkolero y si en verdad le nasio un ijiko. » Fueron y vieron. El rey empezo a tomarle la kaveza al estierkolero y le disho : « Para ke kieres tu este ijiko ? Ya tienes muncho, ke te vivan, y no tienes para mantenerlos. Dame lo a mi an este ijiko, ke no tengo kriaturas, y te v’a dar munchas paras y te vo a enrikeser. » El estierkolero, povreto, viendose muncho estrecho y tuviendo munchas kriaturas – y las paras ke le dieron le taparon los ojos – les vindio el ijo. El rey enkargo a la kriatura y se hue kon el vezir.
Salio ahuera de la sivdad y estuvieron kaminando aste ke vinieron en un kampo deskampio 9 . En medio de akel kampo estan viendo una koliva en zingo 10 . S’aserkaron y vieron ke detrás de la koliva avia un molino de agua.
Mitieron ahí a la kriatura, al lado del karo del molino ke estava arodeando. Dospues harvaron 11 a la puerta de la koliva. Ahí moravan un viejo i una vieja. Le disho el rey a la vieja: « Aresevesh djente aki, solo por esta noche? » « Komo no? le disho la vieja, kon muncha onor. » Los resivieron y durmieron ahí akeya noche; y antes ke amanisiera el dia 12 , se alevantaron i se hueron. Le dize el rey al vezir: « Agora iremos a ver ke sea esta kriatura el kismet de mi ija. »
A la manyana se alevanta la vieja y esta viendo ke el molino no esta kaminando. « Ke afito ? le dize al viejo. No esta kaminando el molino. Tantos anyos ke estamos morando aki, nunka s’aparo. » La vieja, ke mira bueno, esta viendo un bulto 13 en el molino. S’aserko y avrio el bulto, vido una kriatura durmiendo. La tomo en brazos y le dize al viejo : « Parese ke estos ke vinieron anoche no eran benadames: eran algunos andjeles ke el Dyo los mando. Ya savian ke no tenemos kriaturas, mo lo desharon aki i se hueron. » La vieja, de akel dia, estuvo kriando a la kriatura kon regalo grande. Y na 14 ke ya se izo un ijiko de dies anyos, los yamava « padre » y « madre » y eyos lo yamavan « ijo ».
Un dia le dize el rey al vezir: « Te akodras de akeya kriatura ke deshimos ay anyos al molino? Ke seria de el? Kedaria vivo? Ven iremos a ver. » El rey y el vezir se vistieron de dervishes y se hueron a la koliva del viejo i de la vieja. Kuando vinieron estan mirando un chikitiko de dies anyos ke esta ayudando al viejo y a la vieja y yamandolos « padre » y « madre » y eyos lo yamavan « ijo ». El rey ya entendio pishin ke el ijiko es la kriatura ke desharon al molino, ke kedo vivo, i se maraviyo 15 muncho. S’aserko el rey de la vieja i le demanda: « Mozotros venimos aki antes dies anyos i no teniash a ninguno; de onde vos vino este ijiko? » La vieja le konto el kuento entero: komo toparon una kriatura al molino, kon ayuda del Dio, lo kriaron i lo engrandisieron komo su propio ijo.
El rey mira al vezir i el vezir mira el rey: « Ah! dize el rey al vezir, iné 16 va ser el kismet de mi ija? Esto no puede ser. Mira ver komo les tomas la kaveza kon munchas paras para demandarlo de eyos » El vezir le dize a la vieja: « El ninyo parese lijero i meoyudo 17 . Si se iya a la shkola i ambezava, se aziya benadam, iva tener avenir i vozotros ivas a ver bueno de el. Ma sosh proves i no puedesh ayudarlo. Por piadad por el ninyo, dameldolo a mozotros. Vos daremos munchas paras, vos vamos azer rikos i arepozash. El ninyo lo vamos a estudiar y va venir siempre a vervos. » El viejo i la vieja, oyendo esta boka dulse, se kanderearon 18 i achetaron: tomaron una buena suma de paras i les dieron el ijo. Lo bezaron i lo abrazaron i lo mandaron kon los dervishes.
El rey y el vezir tomaron el ijiko por la mano i se lo yevaron. Kaminaron, kaminaron i vinieron en un kampo deskampio. Le dize el rey al vezir: « Agora esta todo en tu mano, mira a ver ke vas a azer por desbarazarmos de el; la espada tienes kon ti. » Apenas entraron al kampo, kito el vezir la espada; le dio dos tres kuchiadas al ninyo, ke kayo pishin en basho envuelto en la sangre. El entindio ke el ijiko ya murio, le disho al rey: «Ya eskapimos de el, vamos de aki. »
Akeya noche kayo hazino el pacha de la sivdad ayi serka. Mandaron a yamar un mediko muy alavado, ke devia de pasar por este kampo. Kuando vino la karosa al kampo, se apararon los kavayos i no kieriyan kaminar. « Kualo ay? », le demando el mediko al karosero 19 . « Ay aki un matado. » El mediko abasho pishin de la karosa, tomo al ijiko en brazos i vido ke tiene ainda riflo 20 . Lo entro a la karosa i lo yevo a su kaza. Lo alimpio la sangre, le izo bandaje; i dospues ke lo aretorno i vido ke ‘sta repozado, lo desho i se hue a su echo. Vijito al pasha hazino i torno a su kaza a kuidar el ijiko.
El mediko era ombre solo i asolado, i viendo ke el ijiko era tanto lindo i ermozo, lo tomo por ijo i lo estava kriando kon muncho regalo. Lo mando a las mijores eshkolas; i el ninyo ke teniya meoyo, se adelantado muy bueno porke no le mankava nada. Se izo grande i ermozo mansevo. Tanto hue el estudio ke se izo mediko alavado i lavorava endjunto kon el padre.
Un dia se deklaro guera. El rey se mitio a la kavesera de la armada para irse al fronte. El
11. Ils frappèrent. De l’arabisme en castillan ancien, ahavar.
12. Le lever du jour.
13. Un paquet.
14. Tiens, voilà.
15. Il s’étonna beaucoup.
16. Malgré tout, tout de même.
17. Vif et intelligent.
18. Se laissèrent abuser (du verbe kandesearse).
19. Au cocher.
20. Un dernier soupir.
21. Adoptif.
22. Les lèvres.
23. Mandataire, plénipotentiaire, régent.
24. Monta à cheval.
25. Un tour, une promenade.
26. Par esprit de contrariété, amour-propre (du grec). kamino pasava por akeya sivdad ke estava el mediko ke lo teniya en amistad i el rey apozo a su kaza. Esta mirando un mansevo alto i ermozo lavorando kon el mediko i lo estava yamando « papa » i el mediko lo yama « ijo ». El rey esta maraviyado, porke savia ke el mediko no tiene ijos. Le demando el rey al mediko : « Yo ya sé ke no te kazates, d’onde te vino este ijo ermozo ? » El mediko le arespondio: « Verdad es lo ke dizes, sinyor rey; nunka me kazi; i este es mi ijo aporfijado 21 . » I konto el kuento entero : komo lo topo una noche ferido al kampo, lo arekojo a su kaza i lo kuido asta ke sano; i dospues lo aporfijo, le dio estudio i lo izo mediko alavado.
El rey se modrio los mushos 22 i se disho de si para si: « Este va ser iné el kismet de mi ija? No! Kalé ke lo maté! » Sin piedrer tiempo le dize al mediko : « Kiero ke me agas un plazer. Tengo de menester de una persona fiela para yevar una karta a mi palasio. Mesajero mas fiel de tu ijo no puedo topar. Achetas ke me aga este mandado? » « De ke no, sinyor rey? Ke sea tu esklavo. » Al punto se asento el rey i eskrivio una karta a su vekiel 23 , ke esta en su lugar, diziendo: « Al punto ke vas a ver este mansevo ke te da mi karta, lo matas pishin y me mandas sinyal de su sangre. » Lo vistieron al mansevo komo un prinsipe, le dio el rey la karta en su mano i le disho: « No atornes sin repuesta an esta karta. » El muchacho, ke era muy ermozo i ke estava byen vestido, se izo una flama, se bineo al kavayo 24 i se hue azer el mandado del rey.
Ya se izo de noche i el mansevo estava ainda por kamino. Kuando arivo a la sivdad, topo las puertas del konak seradas. Onde va pasar la nochada? Ato el kavayo i se estiro en basho al lado una pared enfrente del konak. El balkon de la ija del rey era djusto enfrente del lugar onde se echo a durmir el mansevo.
Akeya noche no le entro eshuenyo a la ija del rey i salio a dar un dolash 25 al balkon. Esta ke ve la luz aklarando la kara ermoza del mansevo, le disho : « Mansevo ! Sosh de los d’ariva o de los d’abasho? » El mansevo l’arespondio: « So de los d’ariva. Vine por un mandado del rey i trushe una karta para el vekiel. Topi las puertas del konak seradas. Manyana demanyana kuando s’avren se la v’a dar. » Le dize eya: « So la ija del rey i esto en kuidado por mi padre. Si t’echo una kuedra de ariva, me das la karta? No t’espantes, yo se la v’a dar kon mi mano al vekiel. » « Porke no? », le dize el mansevo. La ija del rey echo la kuedra i tomo la karta.
Eya ke la avre i melda, se dize: « Loko esta este padre mio, ke ordena a matar este mansevo ? Porke razon ? Ke le izo ? ». Eya ke ya se aviya namorado del mansevo se disho: « Por pismas 26 lo vo azer i me vo kazar kon el. » Ke izo? S’asento i eskrivio al vezir una karta kontra: « Kuando ves este mansevo ke te dé mi karta, lo kazas pishin kon mi ija i me mandas haber. » A la manyana le dio la karta al vekiel; i este sin pedrer tiempo izo el komando del rey i le mando haber.
El rey s’aranko los kaveyos de la barba, ma un punto dospues se arepozo i entendio ke no lo kulpa ninguno. Kizo pelear kon el kismet i hue vensido. I se konforto ke el muchacho es ermozo i sezudo i la ija venturoza. Lo tomo a pasiensia; i atornando de la guera izo fiesta grande.
Eyos tengan bien i mozotros tambien.
Ce conte fut recueilli par Moshe Attias auprès de son père Daniel Attias (Salonique 1870 – Jérusalem 1938). Originellement manuscrit en caractères hébraïques solitreo puis retranscrit en caractères latins par le collecteur. Publication de la revue de l’Institut Arias Montano, Estudios Sefardies num. 1 – Madrid, CSIC, 1978.
La ija del rey i el ijo del guertelano
Konseja recojida por Matilda Koen Sarano
En una sivdad avía un rey i en otra sivdad avía un guertelano.
Al mazal 1 parieron: la reyna parió una ija i la mujer del guertelano parió un ijo.
Pasó tiempo: sinko anyos… dies anyos… el rey ke tenía la ija kijo saver ke mazal va tener su ija. Yamó al konsejero i le demandó ke mire en las estreyas kon ken se va kazar su ija.
El konsejero suvió a la estreeríya i miró ke esta ija de rey se va kazar un… ijo de guertelano. Vino, se lo kontó al rey: « Sinyor rey, vuestra ija se va kazar kon el ijo de un guertelano, ke mora en fulán lugar 2 ! »
« Ansina? », disho el rey. « Esto ya lo arreglo yo! »
Pasó tiempo de esto. Un día lo yamó al konsejero i le disho: « Vas a ir ande el rey de fulán lugar i le vas a dar esta letra de mi parte. »
« Bueno! », disho el konsejero i se fue.
Kuando el rey de akel lugar resivió esta letra, dishó: « Yamámelo al ijo del guertelano, ke kero avlar kon él. »
Vino el ijo del guertelano. Le disho el rey : « Mira, mansevo, me vas azer un plazer. Vas a partir a tala sivdad. Te vamos a dar una letra ke la entreges al rey. »
« Bueno! », disho el mansevo, i salió a kamino.
Desha kampo, toma kampo, el mansevo kayó muy kansado. S’asentó desbasho de un arvolé i kedó durmiendo. La letrizika la tinía afuera del jaketiko.
Por ayí pasó Eliau anaví 3 . Miró la letra. El ke mira ! Estava skrito ayá : « Sinyor rey, pishín 4 ke vesh a este mansevo, sin asperar tomalde la kavesa! »
S’espertó el mansevo al día. Se sta indo ande el rey: él no save nada. Arivó al saray del rey 5 , lo arresivieron, kitó la letra, se la dio al rey.
El rey meldó la letra. El ke melda la letra, vee: « Sinyor rey, pishín ke vesh a este mansevo kazaldo kon vuestra ija. No asperésh! »
Pishín s’izo la boda. Entre los musafires 6 vino i el rey de la otra sivdad, lo vido al mansevo, le disho el rey: « Kualo izites ?! Este es el ijo del guertelano ! Yo skriví komo me demandates tú : pishín ke vash a ver a este mansevo le vash a tomar la kavesa! I tú lo kazates kon tu ija! »
Meldó el rey otra vez la letra, lo yamó al konsejero i le disho: « Ke kere dizir esto? »
Le disho el konsejero: « Sinyor rey, lo ke aze el Dio en los sielos, la tierra nunka lo enfasa. Esto era el mazal de vuestra ija! »
In Matilda Koen Sarano, De Saragosa a Yerushaláyim, Kuentos Sefaradís, Edisión Ibercaja, Saragosse, 1995. 1. Par chance
2. En tel endroit.
3. Le prophète Elie. On note que le prophète Elie prend ici le rôle des brigands du conte des Grimm!
4. Aussitôt.
5. Le palais du roi.
6. Les invités.