#10 Massinissa Selmani - Bleu comme une Orange by art [ ] collector

Massinissa SELMANI Bleu comme une Orange

EDITO

Evelyne & Jacques DERET Fondateurs d’ Art[ ]Collector et collectionneurs

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Art[ ]Collector : des collectionneurs invitent un artiste. Art[ ]Collector, initiative lancée en 2011 par les collectionneurs Evelyne et Jacques Deret, vise à promouvoir les artistes français ou travaillant en France et à valoriser leur travail grâce au soutien de leurs collectionneurs. Réuni autour des collectionneurs Evelyne et Jacques Deret, le comité de sélection d’ « Art[ ]Collector : des collectionneurs invitent un artiste » a choisi pour 2016 Massinissa Selmani. Il est le dixième artiste à bénéficier du programme de soutien et de promotion d’Art[ ]Collector. Son exposition aura lieu au Patio Art Opéra du 19 septembre au 1er octobre 2016 avec la publication du dixième catalogue. Né en 1980 à Alger (Algérie), diplômé de l’Ecole Supérieure des Beaux-arts de Tours, Massinissa Selmani vit et travaille à Tours. Ses dessins et vidéos, inspirés du flot d’images provoquées par l’actualité, mêlent l’humour, l’ironie et parfois la révolte. Présenté à la Biennale de Venise cette année, il a reçu une mention spéciale du Jury présidé par le commissaire Okwui Enwezor. Le comité de sélection d’Art[ ]Collector a choisi de retenir un seul artiste pour l’année 2016, afin de célébrer à la fois le 10ème lauréat et les cinq ans d’existence du programme de mécénat « Art[ ]Collector : des collectionneurs invitent un artiste ».

EDITO À cette étape du mécénat, les fondateurs Evelyne et Jacques Deret organiseront du 14 au 26 novembre au Patio Art Opéra une exposition « 5X2 » qui réunira, sous le commissariat de Philippe Piguet, les 10 lauréats déjà exposés de 2012 à 2016 : Iris Levasseur, Jérémy Liron et Christine Barbe (2012), Karine Rougier et Clément Bagot (2013), Claire Chesnier et Eva Nielsen (2014), Abdelkader Benchamma et Olivier Masmonteil (2015) et Massinissa Selmani (2016). Chaque artiste créera à cette occasion une estampe dans l’atelier de Michael Woolworth à Paris et un portfolio de dix estampes tirées à 35 exemplaires sera ainsi réalisé.

Par ailleurs Art[ ]Collector poursuit et prolonge son engagement aux côtés des jeunes artistes français : - Par un troisième coup de cœur 2016 à l’association « Jeune Création » qui a permis de sélectionner deux des artistes exposés à la galerie Thaddaeus Ropac lors de la 66ème édition de la manifestation en janvier 2016 : Emilie Duserre et Thimothée Schelstraete . Les deux artistes seront exposés du 14 mai au 12 juin 2016 à la galerie de Jeune création (bureau Robin 82, av. Denfert-Rochereau 75014 Paris) - Par une troisième manifestation d’art contemporain en lien avec le Festival d’art lyrique de Saint-Céré Lot-(46): l’association « Art contemporain en pays de Saint-Céré » qu’ils ont créée en 2014 a invité trois artistes : • Charlotte Charbonnel exposera du 1er au 14 août dans un lieu emblématique de Saint-Céré, la Maison des Consuls Place du Mercadial à Saint-Céré. • Anne Touquet graveuse et dessinatrice exposera du 3 au 15 août 2016 à l’espace Orlando de Saint-Jean Lespinasse • Laura Bonnefous photographe plasticienne exposera du 1er au 14 aout à « l’Usine », lieu historique du festival d’art lyrique de Saint-Céré En juin 2015, le programme de mécénat de mécénat « Art[ ]Collector : des collectionneurs invitent un artiste » a reçu le parrainage du Ministère de la culture et de la communication.

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LES COLLECTIONNEURS

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L’horizon était là. Graphite on digital pigment print , 67 x 98 cm - 2016 Collection Evelyne DERET

LES COLLECTIONNEURS

Evelyne Deret J’ai rencontré le travail de Massinissa Selmani au salon DDESSINPARIS en 2014. Nous y avions une carte blanche à l’initiative de sa directrice Eve de Meideros et je suis immédiatement tombée en arrêt devant les dessins de Massinissa devant lesquels je n’ai cessé de passer et repasser. J’avais jeté mon dévolu sur l’un d’eux mais il était avec plusieurs autres réservé et Massinissa m‘expliquait patiemment que « non ce n’était pas possible il n’était pas disponible ! ». J’ai aimé d’emblée son travail : sur des fonds très blancs, des actions sont mises en scène sur le ton de l’humour ou de l’ironie. Et l’absurdité qui en ressort est teintée de cet humour qui en désamorce la violence : dans les situations qu’il dessine se confronte et coexiste le comique, le tragique, l’absurde avec une grande sobriété de moyens. Il y a à la fois une dimension documentaire mais qui est vite supplantée par de l’invention, de l’irréalisme qui cependant et paradoxalement convainquent totalement. Les dessins, les montages de Massinissa Selmani obligent à lire plus loin entre les lignes en quelque sorte, entre les images pour redonner un sens à ce qui est d’abord irréaliste, inhabituel, elliptique. J’aime l’intelligence qui s’en dégage ! J’ai appris ensuite qu’il travaillait à partir de photos de presse qui ne sont pas nécessairement liées : il s’agit des conflits, d’accidents, de crimes présentés sous le registre de l’impossibilité, de l’absurdité qu’il traite hors contexte. Et pour lui tout ce blanc justement permet d’occulter le contexte. Et les titres qu’il choisit pour ses séries comme par exemple « économie du vent » reprend et renforce les dimensions d’absurdité auxquelles je suis très sensible. Et,… je pourrais continuer ainsi longtemps car son travail où se déploie ce subtil mélange de tragique et de comique lié par l’humour suscite en moi jubilation, plaisir et réflexion…

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LES COLLECTIONNEURS

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A-t-on besoin des ombres pour se souvenir? #9 Crayon et crayon de couleur sur papier, 40 x 50 cm - 2014 Collection Eve de Meideros

LES COLLECTIONNEURS

Eve de Medeiros, fondatrice de DDESSINPARIS LE CALME AVANT LA TEMPETE Au cœur du travail artistique (le dessin est le médium central de sa pratique), Massinissa Selmani présente l’expérience humaine dans toute son absurdité mais également au cœur de l’engagement. L’artiste puise son inspiration dans l’actualité politique et sociale contemporaine. Il fait acte de son temps, assume son époque en revendiquant son appartenance à un système en mutation, pour mieux l’appréhender et le questionner. Dans la série de onze dessins « A-t-on besoin des ombres pour se souvenir ? » présentée par la Galerie Talmart sur DDESSINPARIS en 2014 ainsi qu’en 2015 à la 56e Biennale de Venise, plus un dessin inédit « All the World’s Futures » sélectionnés par le commissaire, critique d’art, Okwui Enwezor, l’artiste présente, par son trait réaliste et sobre, des scènes mêlant réalité et irréalité, invitant le regardant à lire entre les lignes, à se confronter au brouhaha du monde. L’orientation de la lumière, les ombres contradictoires, offrent un champ d’expérimentation propre à l’artiste. Massinissa Selmani s’intéresse autant à l’espace qu’au trait simple, sobre et silencieux ; ses dessins jouent des pleins et des vides pour ordonner l’espace parfois décentré. Réalisée au graphite sur papier comme tous les dessins de la série des « Ombres », « l’œuvre numéro 9 » acquise en 2014 est une énigme. Une petite fille ou une femme, personnage central, se tient sur le promontoire numéro 2 d’une piscine vide, une girafe rouge laisse apparaître une partie de son cou et sa tête. Pourquoi cette couleur rouge, associée symboliquement à la joie, la passion mais également évoquant la violence, le sang ? Question sans réponse. Toutes les deux regardent dans la même direction sans que rien ne semble se passer. Deux ventilateurs extérieurs éteints sont alignés, l’un derrière l’autre au premier plan du dessin et nous interrogent. Tout semble calme, peut être, avant la tempête...

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LES COLLECTIONNEURS

François-Régis Lumbroso Ma rencontre avec le travail de Massinissa Selmani date de sa série « A-t-on besoin des ombres pour se souvenir ? ». J’ai aimé la façon épurée avec laquelle il traite et s’empare de l’actualité. Il donne une force particulière à ses dessins, avec subtilité et humour, et nous emmène dans un univers souvent ironique et parfois étrange, comme pour mieux nous interroger sur l’impact des images qui nous sont servies et leur traitement médiatique. Le dessin Nube Azul 6, avec lequel j’ai le plaisir de vivre au quotidien, m’a paru être caractéristique de la démarche de l’artiste. Avec la même délicatesse, Massinissa Selmani semble réinterpréter, dans le monde contemporain, une œuvre de Brueghel l’Ancien : « La parabole des aveugles ». La présence d’un journaliste à leur côté, comme étant presque le quatrième d’entre eux, me paraît suggèrer qu’en réalité, au lieu d’être des témoins professionnels et analysants, les médias se comportent souvent comme des aveugles. C’est ce que je retiens de fort et qui correspond selon moi à l’attitude engagée de l’homme libre qu’ est Massinissa Selmani.

Nube azul #6 Crayon et crayon de couleur sur papier, 60 x 75 cm - 2015 Collection François-Régis Lumbroso

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À l’ombre de la couleur

L’Usine ne fait pas les nuages est l’exposition de décembre 2013 qui a marqué le parcours de Massinissa Selmani. Il présentait pour la première fois à la Galerie Talmart la série « A-t-on besoin des ombres pour se souvenir ? » dont six dessins se trouvent aujourd’hui dans la collection du Centre Pompidou. Si, généralement, dans l’œuvre de Massinissa, le texte éclaire sur sa démarche, les deux titres déjà cités en témoignent, le recours à la couleur a été nouveau dans la série des Ombres et est venu participer à la mise en scène de l’absurde. Alors que son usage n’était pas naturel au départ dans la main de l’artiste, le tapis rouge derrière un bus de réfugiés ou le chien bleu devant un mur opaque ont organisé l’espace, orienté le regard et renforcé l’absurdité qui s’est confirmée dans les dessins suivants. La couleur a ouvert un champ poétique, dans le choix du ton et du motif. Elle a aussi accentué l’humour critique contenu dans les dessins, dans lesquels les scènes d’hommes politiques en chaussettes, tenant un ruban vert pour inaugurer un tarmac désert, ou de personnages qui

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regardent dans la direction où rien ne se passe, sont des narrations faisant souvent écho à une culture littéraire et cinématographique personnelle riche. Quand on lit la description du garçon de café par l’écrivain algérien Chawki Amari, extrait du roman « L’ Âne mort », on ne doute pas que l’ouvrage se trouve en bonne place dans la bibliothèque de Massinissa Selmani. Le choix de l’espace, le non-sens, la tragi-comédie, se concentrent en une couleur commune à l’auteur et à l’artiste :

« Le serveur, lourd comme un soleil mort ou une étoile naine en fin de cycle, est debout dans la position de la stèle commémorative en l’honneur des millions de gens qui sont morts de soif dans un café en attendant leur consommation. » La dialectique de l’ombre et du soleil prend une forme légère dans ce dialogue, où l’artiste pose une question existentielle non sans absurdité et où l’auteur fait mourir des clients assoiffés devant un soleil mort… Le salut, sans doute, se trouve dans le sourire.

Marc Monsallier Ancien directeur de la Galerie Talmart

COMMISSARIAT

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Sans titre (série des altérables) Photocopie, graphite sur papier calque, 11 x 15 cm - 2013

Le commissariat de l’exposition Bleu comme une orange est assuré par Catherine David directrice adjointe du Musée d’art moderne de la ville de Paris.

LA GALERIE

Aussitôt rentrée dans l’espace du Mosaic Rooms à Londres, je me suis retrouvée face à l’installation de post-its et la série des coupures de journaux fictifs encadrées. J’ai eu alors envie d’en apprendre davantage. Massinissa a commencé par présenter son travail Diar Echems, son champ de recherche et ses préoccupations. J’ai tout de suite adhéré à la démarche et ressenti le besoin d’examiner chaque dessin, chaque animation vidéo et chaque installation. J’ai été saisie par la simplicité, le minimalisme, la délicatesse et la poésie que dégage le travail de Massinissa. Le montage d’images et de dessins dans un espace vide a la capacité d’agir au-delà de son

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envergure. Imagerie populaire, coupures de journaux, photographie surréaliste et littérature française et algérienne inspirent la majorité des dessins et animations vidéos de Massinissa. Massinissa cherche à créer des scénarios familiers et sociopolitiques qui ont peu de chance de se réaliser en vrai. Il compense toujours ces représentations par un registre tragi-comique. Dans un certain sens, il reflète et met en scène avec une économie de moyens l’absurdité quotidienne que nous vivons.

Vue de l’exposition au Centre de création contemporaine Olivier Debré de Tours, mars 2015. Exposition personnelle.

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LA GALERIE