© Somogy éditions d’art, Paris, 2013 www.somogy.fr © Ville du Havre, 2013 Conception graphique/Graphic design : Nelly Riedel Suivi éditorial/Editorial coordination : Lydia Labadi Contributions éditoriales/Editorial contribution : Sandra Pizzo (français), Natasha Edwards (anglais) Traduction du français vers l’anglais/Translation into English : Natasha Edwards Fabrication/Production : Michel Brousset, Béatrice Bourgerie et Mélanie Le Gros ISBN 978-2-7572-0659-1 Dépôt légal : avril/April 2013 Imprimé en Italie/Printed in Italy (Union européenne/European Union)
Regardez, Monsieur Monet... Comme la Seine a changÊ ! Look, Mr Monet... See How the Seine has Changed!
Expositions
Exhibition
Exposition présentée au Havre du 8 juin au 29 septembre 2013 dans le cadre du Festival Normandie Impressionniste Exposition itinérante présentée à Rouen à l’Armada du 6 au 16 juin 2013 puis à Paris. Commissariat : Aymeric Perroy, responsable du patrimoine maritime, Ville du Havre Coordination Ville du Havre : Aymeric Perroy Coordination GIE HAROPA : Séverine Privé-Revel, Céline Longuépée, Véronique Hauchecorne
Exhibition presented in Le Havre from 8 June to 29 September 2013 as part of Normandy Impressionist Festival Travelling exhibition on show in Rouen during the Armada from 6 to 16 June, and in Paris. Curator: Aymeric Perroy, head of marine heritage, Ville du havre Coordination Ville du Havre: Aymeric Perroy Coordination GIE HAROPA: Séverine Privé-Revel, Céline Longuépée, Véronique Hauchecorne
Remerciements
Acknowledgements
Aux auteurs qui ont accepté de collaborer à cet ouvrage, mais également à Serge Aubourg, Jean-Pierre Augereau, Pierre Beaumont, Emmanuel Belin, Hervé Bénard, Pascal Berroyer, Patrick Bertrand, Jean-Paul Bessières-Orsoni, Raphaël Cartier, Nancy Chauvet, Cyril Chédot, Évelyne Cohen, Cécile Condoret, Bruno Corre, Jean-Luc Désiré, Raoul Dollat, Cédric Durand, Chantal Ernoult, Claire ÉtienneSteiner, Olivier Forget, Françoise Gaudin, Stéphanie Girard, Camille Grassin, Anne Guélon, Jean-Yves Hérauville, Guy Joubin, Laurence Le Cieux, Laurent Lascoux, Yves Le Borgne, Noémie Lesueur, Christelle Lollier-Guillon, Isabelle Maraine, Christine Marlot, Delphine Montean, Jean-Daniel Pariset, Nicolas Pernot, Éric Picot, Philippe Pintore, Joël Piquot, Mario Pitassi, Jimmy Poullain, Catherine Quertier, Agnès Reboul, Matthieu Rivallin, Laurent Roblin, Armelle Rospape, Dominique Rouet, Laurent Salomé, Paul Scherrer, Karl Tailleux, Sophie Vielet.
With thanks to all the authors who agreed to collaborate in this work, and also Serge Aubourg, Jean-Pierre Augereau, Pierre Beaumont, Emmanuel Belin, Hervé Bénard, Pascal Berroyer, Patrick Bertrand, Jean-Paul Bessières-Orsoni, Raphaël Cartier, Nancy Chauvet, Cyril Chédot, Evelyne Cohen, Cécile Condoret, Bruno Corre, Jean-Luc Désiré, Raoul Dollat, Cédric Durand, Chantal Ernoult, Claire ÉtienneSteiner, Olivier Forget, Françoise Gaudin, Stéphanie Girard, Camille Grassin, Anne Guélon, Jean-Yves Hérauville, Guy Joubin, Laurence Le Cieux, Laurent Lascoux, Yves Le Borgne, Noémie Lesueur, Christelle Lollier-Guillon, Isabelle Maraine, Christine Marlot, Delphine Montean, Jean-Daniel Pariset, Nicolas Pernot, Eric Picot, Philippe Pintore, Joël Piquot, Mario Pitassi, Jimmy Poullain, Catherine Quertier, Agnès Reboul, Matthieu Rivallin, Laurent Roblin, Armelle Rospape, Dominique Rouet, Laurent Salomé, Paul Scherrer, Karl Tailleux, Sophie Vielet.
Depuis 1945, plusieurs photographes se sont succédé au service photographique du Port Autonome du Havre puis du Grand Port Maritime du Havre : Louis Lecroisey, René Breton, Gérard Né, Michel Miette, Michel Bizien.
Since 1945, many photographers have succeeded each other in the photographic department of first of Le Havre Port Autority and then the Grand Port Maritime du Havre: Louis Lecroisey, René Breton, Gérard Né, Michel Miette, Michel Bizien.
À partir des années 1970, deux photographes se sont succédé au Port Autonome de Rouen : Jean-Luc Boivin et Francis Leroy.
Since 1970, two photographers have succeded each other at the Rouen Port Authority: Jean-Luc Boivin and Francis Leroy.
Sommaire Préfaces
édouard philippe, alexis rouque,
maire du Havre, député de la Seine-Maritime
président du GIE HAROPA
président du Festival Normandie Impressionniste laurent fabius , ministre des Affaires étrangères et vice-président du festival jérôme clément, commissaire général erik orsenna , président du conseil scientifique pierre bergé,
Contents 7
Prefaces
8 9
alexis rouque , chairman of the GIE HAROPA
Introduction
13
écrivain
commissaire d’exposition, responsable du patrimoine maritime, Ville du Havre
laurent fabius , minister of Foreign Affairs and vice-chairman of the festival erik orsenna , chairman of the technical board
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aymeric perroy,
pierre bergé , chairman of the Normandy Impressionist Festival jérôme clément, chief curator
La Seine, de Paris au Havre, c’est la mienne. Mais peut-on employer le possessif ? philippe delerm ,
edouard philippe , mayor of Le Havre, member of parliament for the Seine-Maritime
The Seine, from Paris to Le Havre, it is Mine. But Can One Use the Possessive? philippe delerm , writer
Introduction
aymeric perroy, exhibition curator, head of maritime heritage, Ville du Havre
Claude Monet (1840-1926) : une vie en bord de Seine
15
Claude Monet (1840-1926): A Life Beside the Seine
Seine Métropole
25
Seine Métropole
Gare Saint-Lazare, en voiture pour Le Havre
33
Gare Saint-Lazare, in the Carriage for Le Havre
Paris et ses ports sur une Seine industrielle
43
Paris and its Ports on an Industrial Seine
sylvie patin ,
conservateur général au musée d’Orsay, correspondant de l’Institut
architecte, urbaniste, Grand Prix national d’urbanisme en 1992 antoine grumbach ,
antoine le bas ,
conservateur du patrimoine
bernard le sueur ,
et Cours d’eau
historien, docteur d’État, président de l’association européenne Hommes
sylvie patin , curator at Musée d’Orsay, correspondant of the Institut
antoine grumbach , architect, urban planner, Grand Prix national d’urbanisme in 1992
antoine le bas , state curator
dr bernard le sueur , historian, president of the European Men and Waterways Association
Irriguer les villes
59
Feeding the Towns
Les mues des ports : l’exemple de Rouen
69
Ports in Mutation: The Example of Rouen
historien
gérard cornier ,
ancien chargé du patrimoine maritime au Service de l’Inventaire et du Patrimoine, Région Haute-Normandie
jérôme decoux ,
gérard cornier , historian
jérôme decoux , former head of maritime heritage ancien at the Service de l’Inventaire
et du Patrimoine, Région Haute-Normandie
L’industrialisation de la Basse-Seine
83
Le port est un paysage en mouvement
95
The Port is a Landscape in Movement
Des cargos toujours plus gros sur les routes du grand large
107
Ever Larger Cargo Ships on the Routes of the Open Sea
Une toile à l’horizon
119
A Canvas on the Horizon
La pêche en baie de Seine de Claude Monet à nos jours
131
Fishing in the Bay of the Seine from Claude Monet to Today
Baie de Seine, vallée de la Seine : lieux de lumière et d’eau, lieux de vie
141
Bay of the Seine, Valley of the Seine: Places of Light and Water, Places of Life
chercheur au Service de l’Inventaire et du Patrimoine, Région Haute-Normandie
emmanuelle real ,
aymeric perroy,
claude briot,
responsable du patrimoine maritime, Ville du Havre
historien
philippe valetoux ,
pilote du Havre
attaché de conservation, Ville du Havre
thierry vincent,
géographe, ancien recteur, ancien président du conseil scientifique de la DATAR armand frémont,
The Industrialisation of the Lower Seine
emmanuelle real , researcher at the Service de l’Inventaire et du Patrimoine, Région Haute-Normandie
aymeric perroy, responsable for maritime heritage, Ville du Havre
claude briot, historian
philippe valetoux , marine pilot at Le Havre
thierry vincent, conservation officer, Ville du Havre
armand frémont, geographer, former rector and former chairman of the scientific council
of the DATAR
John Davies, un photographe anglais dans la vallée de la Seine
155
John Davies, a British Photographer in the Seine Valley
Bibliographie
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Bibliography
didier mouchel ,
chef de projet photographie, Pôle Image Haute-Normandie
didier mouchel , head of the photography project, Pôle Image Haute-Normandie
Claude Monet : Argenteuil, le pont du chemin de fer, 1874, Paris, musée d’Orsay./Claude Monet: The Railway Bridge at Argenteuil, 1874, Paris, Musée d’Orsay.
La Seine La Seine est sans aucun doute la veine, le nerf qui relie le territoire, irriguant Paris, Rouen, Le Havre mais encore toutes les localités, petites et grandes, qui s’égrènent au fil des méandres. Pour tous, la Seine est là, à nos côtés, se dévoilant sous nos yeux, depuis les coteaux, les berges, les ponts, autant de belvédères, de passages, de boucles, de paysages… Il suffit de prononcer ces quelques lettres : « Seine », pour ressentir l’attachement profond des hommes au fleuve, si bien traduit dans les conclusions des textes écrits pour ce catalogue par Philippe Delerm : « C’est pour cela que j’aime vivre la Seine. Juste au bord de l’ailleurs, c’est si fort le pays d’ici. » Ou encore celle d’Armand Frémont, qui à juste titre voit dans cette vallée un lieu référent de l’histoire de l’art et de la civilisation : « Ces lieux-là, comme Florence ou Prague, se transforment avec le temps. Mais ils ne meurent pas. » Claude Monet est un des génies de cette renaissance normande. Une vie à arpenter les berges, les villages, les villes, les ports qui la bordent. Ces paysages, ces œuvres passées dans la mémoire collective universelle demeurent un des fondements de cette unité territoriale de l’axe Seine à laquelle nous nous devons de transmettre un cœur et une chair. Claude Monet est un des piliers de notre culture commune. Cette exposition confronte son regard, le patrimoine qu’il nous a légué et la réalité du territoire. Elle révèle la Seine dans sa permanence et sa modernité. C’est le destin des fleuves. Le corps ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, mais l’œil appréhende les paysages que dessine la Seine dans leur identité profonde. C’est ce voyage étrange auquel nous invite cette exposition magnifique. édouard philippe maire du Havre député de la Seine-Maritime
The Seine The Seine is without any doubt the vein, the nerve, that links the territory, irrigating Paris, Rouen, Le Havre and all the localities, small and large, that dribble along its meanders. For everyone, the Seine is there, by our sides, revealing itself before our eyes, from the hillsides, the banks, the bridges, as many viewpoints, passageways, loops, landscapes... It suffices to utter these few letter: “Seine”, to sense man’s deep attachment to the river, expressed so well in the conclusion of the text written for this catalogue by Philippe Delerm: “It is for that that I like living the Seine. Just beside it, it is so powerful, the land here.” Or also, that of Armand Frémont, who justly sees in this valley a referential site for the history of art and civilisation: “These places, like Florence or Prague, alter over time. But they do not die.” Claude Monet is one of the geniuses of this Normandy renaissance. A life spent wandering the banks, the villages, the towns, the ports that border it. These landscapes, these works that have become part of universal collective memory remain one of the foundations of this territorial unity of the Seine axis, to which we must give a heart and flesh. Claude Monet is one of the pillars of our shared culture. This exhibition contrasts his regard, the heritage he has left us, with the reality of the area. It reveals the Seine in its continuity and its modernity. This is the destiny of rivers. The body never bathes twice in the same river, but the eye learns the landscapes that draw the profound identity of the Seine. This is the strange voyage to which this magnificent exhibition invites us. edouard philippe mayor of Le Havre, member of parliament for the Seine-Maritime
7
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Claude Monet et HAROPA liés par un même fleuve, la Seine… HAROPA (HAvre-ROuen-PAris) est né il y a un an. L’alliance de ces ports grâce au transport maritime et fluvial est aujourd’hui une évidence. À l’heure de Claude Monet, c’était le train entre Paris, Rouen et Le Havre qui était vecteur de modernité et qui constituait le lien le plus évident entre les trois cités. Claude Monet a lui-même vécu et même navigué sur cet axe Seine. Les ports, les berges, le fleuve et ses lumières sont d’ailleurs des sujets de prédilection du peintre. Ses œuvres sont un témoignage du paysage portuaire, où le style impressionniste trouve des inspirations sans limites. Les navires gigantesques, l’immensité des terminaux, les couleurs des conteneurs, des portiques et des grues en mouvement sur les quais sont autant de sujets rêvés pour les yeux des artistes contemporains et notamment pour les photographes. Cet ouvrage présente, à partir d’une sélection d’œuvres majeures du peintre auxquelles répondent des photographies contemporaines, des regards étonnants et touchants sur les paysages des bords de Seine que nous avons à cœur de développer, d’animer et de protéger. alexis rouque président du GIE HAROPA
Claude Monet and HAROPA linked by a same river, the Seine… HAROPA (HAvreROuen-PAris) was born a year ago. Today, the alliance of these ports through maritime and river transport is obvious. In Claude Monet’s day, it was the train between Paris, Rouen and Le Havre that served as vector of modernity and which constituted the most obvious link between the three cities. Claude Monet himself lived and even navigated along this Seine axis. Moreover, the ports, banks, the river and its light were favourite subjects for the painter. His works are a testimony to the port landscape, where Impressionist style found endless inspiration. Today, the giant vessels, the immense terminuses, the colours of the containers, the gantries and cranes moving on the quaysides are just as many dream subjects for contemporary artists, notably photographers. Starting from a selection of major works by the painter to which contemporary photographers have responded, this book presents astonishing and moving visions of the landscapes along the Seine, which we sincerely wish to develop, animate and protect. alexis rouque chairman of the GIE HAROPA
Le succès de la première édition de Normandie Impressionniste fut tel qu’il était nécessaire de lier une nouvelle fois le plus populaire courant artistique moderne et le territoire qui l’a vu s’épanouir. Avec plus d’un million de spectateurs, la Normandie était en fête : guinguettes, déjeuners sur l’herbe, expositions remarquées. Le thème de l’eau choisi pour cette seconde édition est né de la fascination des grands maîtres impressionnistes pour la mer, les rivières et les fleuves. Cinéma, musique, théâtre, colloques, ateliers, festivités, expositions d’art moderne et contemporain ponctueront cinq mois de festival, du 27 avril au 29 septembre 2013, sur les deux régions normandes et sur cinq départements avec le soutien des membres fondateurs et des partenaires institutionnels et financiers. Cette programmation résolument contemporaine prendra toute sa signification avec l’implication d’élèves et d’apprentis investis dans des projets ludiques et professionnels originaux. Avec ses 600 projets tournés vers l’impressionnisme, nous vous souhaitons à toutes et à tous un excellent festival !
pierre bergé président du Festival Normandie Impressionniste l au r e n t fa b i u s ministre des Affaires étrangères et vice-président du festival
jérôme clément commissaire général erik orsenna président du conseil scientifique
The success of the first edition of Normandie Impressionniste was such that it became essential to repeat the association of the most popular modern artistic movement with the territory where it blossomed. With more than one million spectators, Normandy was in festive mood, with open-air dance halls, picnics, exhibitions that attracted international attention. The theme of water chosen for this second edition arose from the fascination the great masters had for the sea and rivers. Cinema, music, theatre, symposia, workshops, festivities and modern and contemporary art exhibitions will animate the five months of the festival, between 27 April and 29 September 2013, across the two regions and five departments of Normandy, with the support of the event’s founding members, institutional partners and financiers. This resolutely contemporary programme will gain its full import with the involvement of students and apprentices in the recreational and innovative professional projects planned. With its 600 projects centred on Impressionism, we wish you all an excellent festival!
pierre bergé President of the Festival Normandie Impressionniste l au r e n t fa b i u s Minister of Foreign Affairs and Vice-President of the festival
jérôme clément Chief Commissioner of Normandie Impressionniste erik orsenna President of the Scientific Committee
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Claude Monet : Le Bassin d’Argenteuil, vers 1872, Paris, musée d’Orsay./Claude Monet: Argenteuil Basin, c.1872, Paris, Musée d’Orsay.
La Seine, de Paris au Havre, c’est la mienne. Mais peut-on employer le possessif ? La force du fleuve impose l’élan d’une mémoire collective. Et puis des ombres fortes passent, des regards d’artistes. Monet bien sûr, celui d’Impression, soleil levant, qui donna pour toujours les contours estompés d’une activité portuaire à une façon nouvelle de sentir le monde, de diluer le regard dans la lumière. Mais le Monet aussi des canotages de l’île de Chatou, celui qui blottissait sa famille et son art dans la boucle de Vétheuil, bien avant Giverny, avec la Seine encore si proche. Flaubert, dans l’isolement de son pavillon de Croisset, au bord de l’eau. Et sans doute imaginait-il les palpitations d’Emma Bovary découvrant les méandres du fleuve au moment d’aller rejoindre son amant pour sa coupable extase hebdomadaire. Quand la Seine se gonfle enfin, en s’approchant de l’estuaire, c’est le crève-cœur d’Hugo, le mascaret, Villequier, Léopoldine et Charles emportés dans les flots. Oui, tous ces regards dix-neuvième imprègnent l’imaginaire d’une Seine passant des plaisirs d’eau franciliens au lyrisme des falaises, aux cerisiers de Jumièges, en renonçant à l’injuste épithète d’inférieure pour lui substituer celui de maritime. Enfant, j’ai habité la Seine des plaisirs, mes parents étant instituteurs en Seine-etOise, comme il fallait dire alors. Mais je me rappelle l’odyssée des voyages scolaires m’emmenant découvrir le fleuve sous un jour plus solennel : les ruines de ChâteauGaillard, le point de vue de Bonsecours, le lancement d’un pétrolier dans le port de Rouen. C’était l’époque où Paris Match faisait sa une avec le port de Rouen. C’était l’époque où Paris Match faisait sa une avec le pont de Tancarville. Et puis la vie m’a conduit en Normandie, on a construit le pont de Normandie, j’ai pris le bac à Quillebeuf. Peu à peu j’ai pris mes repères, flâné à ma manière dans le marais Vernier, dégusté à Aizier une ampleur de la Seine qui ne devait plus rien au drame de Victor Hugo. J’ai aimé les ports la nuit, celui de Rouen, celui du Havre, les torchères fascinantes et infernales. J’ai aimé ces ruptures incessantes entre campagne et industrie, qui sont l’essence du paysage français, mais que l’énergie fluviale a concentré au bord de la Seine avec une harmonie singulière. Assez d’espace à chaque fois pour oublier qu’on est encore hier, pour oublier qu’on est aujourd’hui. Bien sûr, tout prépare à la mer, mais par tempérament profond je préfère ce qui est avant. C’est pour cela que j’aime vivre la Seine. Juste au bord de l’ailleurs, c’est si fort, le pays d’ici. philippe delerm écrivain
The Seine, from Paris to Le Havre, it is Mine. But Can One Use the Possessive? The power of the river imposes a leap of collective memory. And the strong shadows pass, the regard of artists. Monet, or course, he of Impression, Sunrise, which would forever make the fuzzy contours of port activity a new way to perceive the world, to dilute the gaze in light. But also the Monet of the canoeists of the Ile de Chatou, he who nestled his family and his art in the loop at Vétheuil, well before Giverny, with the Seine still so near. Flaubert, in the isolation of his villa at Croisset, beside the water. Doubtless he imagined Emma Bovary’s palpitations as she discovered the meanders of the river at the moment she went to join her lover for her guilty weekly exaltation. When the Seine swells at last in approaching the estuary, it’s the heartbreak of Hugo, the tidal bore, Villequier, Léopoldine and Charles carried off by the waves. Yes, all these 19th-century regards permeate the imagination of a Seine moving from the pleasure of Ile-de-France water to the lyricism of cliffs, the cherry trees of Jumièges, in renouncing the unjust epithet of inferior, in the département’s original name, to substitute that of maritime. As a child, I lived in the Seine of pleasure, my parents being schoolteachers in Seineet-Oise, as one said at the time. But I remember the odyssey of school trips taking me to discover the river in a more sombre light: the ruins of Château-Gaillard, the viewpoint at Bonsecours, the launch of a petrol tanker in the port of Rouen. It was the era when Paris Match did a cover with the Tancarville Bridge. And then my life led me to Normandy, the Normandie Bridge was built, I took my baccalauréat at Quillebeuf. Little by little I established my reference points, ambled my way through the Marais Vernier marshland, swallowed at Aizier a quantity of the Seine that owed nothing to the drama of Victor Hugo. I loved ports by night, that of Rouen, that of Le Havre, the fascinating, hellish flares. I loved the continual ruptures between countryside and industry, that are the soul of the French landscape, but which the energy of the river has concentrated along the Seine with particular harmony. Enough space each time to forget that it is still yesterday, to forget it is today. Of course, everything prepares for the sea but, being of thoughtful disposition, I prefer what comes before. It is for that that I like living the Seine. Just beside it, it is so powerful, the land here. philippe delerm writer
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Claude Monet : Soleil couchant sur la Seine à Lavacourt, effet d’ hiver, 1880, Paris, Petit Palais./Claude Monet: Sun Setting on the Seine at Lavacourt, Winter Effect, 1880, Paris, Petit Palais.
Introduction
Introduction
« À examiner l’œuvre de Monet, le voit-on s’acharner à étudier l’eau, le ciel et l’air », note Émile Verhaeren, grand admirateur du peintre. Cette eau, douce puis salée, de Paris au Havre est au cœur de l’œuvre de l’artiste, qui quitte la capitale, enfant, vers 1845, pour venir s’établir au Havre. Grâce au chemin de fer qui, dès 1847, relie les deux villes et facilite les va-et-vient au fil de la Seine, Monet devient le voyageur du fleuve. Il ne le quitte plus, s’installant dans des localités à proximité. À chaque fois, elles sont propices à de nouvelles œuvres qui, replacées dans leur succession géographique, deviennent une promenade au côté du peintre. De là à imaginer une rencontre fortuite sur les chemins de halage, il n’y a qu’un pas… Tel Alfred Bruyas rencontrant Gustave Courbet, il nous viendrait presque ces mots : « Regardez, Monsieur Monet… Comme la Seine a changé ! » La vallée de la Seine de Paris au Havre présente un territoire bien identifié. Ses méandres, ses marais, ses parcs naturels côtoient des zones urbaines, industrielles et portuaires qui dévoilent un paysage original et riche. Claude Monet a été le témoin privilégié et attentif des transformations des communications, des activités et de l’environnement engendrées par la révolution industrielle. Ses œuvres rendent compte de son attirance pour les sujets modernes, les mutations, les évolutions, les ruptures. En descendant la Seine, prenant appui sur une sélection d’une dizaine de ces œuvres, nous prenons le parti de les regarder différemment, de saisir ce que les sujets nous racontent de l’activité maritime, fluviale ou portuaire et de mesurer les évolutions et les permanences jusqu’à nos jours à travers un riche corpus de photographies. Ce « grand écart », fait en réalité de multiples petits pas, ne doit pas se réduire à la notion d’un « avant-après », mais constitue plutôt une façon de s’immiscer dans les sujets grâce à d’autres regards en faisant fi des années. À l’instar d’un enfant qui aurait conservé pieusement ces images et les étalerait sur le tapis, celles-ci deviennent des points de départ à cette réflexion : comment l’homme a-t-il tiré parti de la présence du fleuve ? Comment vivent-ils ensemble côte à côte ? Volontairement, plusieurs approches, plusieurs fonds se mêlent. Des photographes célèbres tels Gustave Le Gray, André Kertész, Henri Cartier-Bresson, Robert Capa, René-Jacques, Willy Ronis, François Kollar, Marcel Bovis, Roger Parry, John Davies…, qui ont, eux aussi, été interpellés par la force d’expression des activités portuaires et, inévitablement, par leur actrice principale : la Seine. Il nous a semblé intéressant d’y ajouter un autre œil, celui du reportage, de la commande passée pour des campagnes de communication, ou simplement dans le but de conserver des archives visuelles. La lecture n’est plus forcément la même, mais n’a-t-elle pas tout son sens dans la perception de l’évolution des activités économiques ? Une sélection a été faite dans diverses collections, dont celles de ports comme Le Havre, qui compte encore un photographe salarié. Mais, les œuvres le dévoilent, le rapport à l’eau, à la Seine, à la mer sur le territoire de Paris à l’estuaire n’est pas seulement réservé aux ports et au développement économique. Les loisirs, du balnéaire à la plaisance, réservés à une élite fortunée à l’époque de Claude Monet, se sont largement démocratisés et sont des respirations dans une vie, comme si l’horizon, la lumière, les ciels du large, les plages demeuraient des rendez-vous indispensables. Finalement, la mer n’est qu’à deux cents kilomètres de Paris, au bout de la Seine !
“To examine Monet’s work sees one dedicated to studying water, the sky and the air,” remarked Emile Verhaeren, a great admirer of the painter. This water, fresh then salt, from Paris to Le Havre is at the heart of the work of the artist, who left the capital as a child, in around 1845, to settle at Le Havre. Thanks to the railway, which by 1847 linked the two towns and facilitated coming and goings along the Seine, Monet became the voyager of the river. He never left it, settling in nearby localities. Each time, they were fertile for new works that, placed in their geographical sequence, become a promenade alongside the painter. From there to imagining a chance encounter on the towpath is just a step... Like Alfred Bruyas meeting Gustave Courbet, he almost brings us these words: “Look, Mr Monet... See how the Seine has changed!” The Seine valley from Paris to Le Havre is a well-identified territory. Its meanders, its marshes, its natural parks mix with urban, industrial and port zones, to reveal an original, rich landscape. Claude Monet was the privileged and attentive witness of the transformations in communications, activities and the environment engendered by the industrial revolution. His works reveal his attraction for modern subjects, by mutations, evolutions, ruptures. In going down the Seine, supported by a choice of around ten of these works, we have made the choice to look at them differently, to observe what the subjects tell us of maritime, river or port activity, and to measure the evolutions and the continuities right up to today through a rich array of photographs. This “big leap”, made in fact of numerous little steps, should not be reduced to the notion of a before and after but, rather, provides a way of working our way into the subjects, thanks to other regards without concern for the years. Like a child who would have preciously preserved these images and spread them out on the carpet, these become starting points for this reflection: how has man taken advantage of the presence of the river? How have they lived together side by side? Several approaches and several archives are deliberately intermingled. Celebrated photographers, such as Gustave Le Gray, André Kertész, Henri Cartier-Bresson, Robert Capa, René-Jacques, Willy Ronis, François Kollar, Marcel Bovis, Roger Parry, John Davies…, they too, have also been captured by the expressive force of port activity and, inevitably, by its leading actress, the Seine. It seemed interesting to us to add another regard, that of documentary, of commissions for advertising campaigns or simply with the aim of keeping a visual record. The interpretation is not necessarily the same, but doesn’t it find its full meaning in the perception of the evolution of economic activity? A selection has been made from diverse collections, including those of ports like Le Havre, which still number a staff photographer. But, the works reveal, the relationship to water, to the Seine, to the sea on the territory from Paris to the estuary is not just reserved for ports and economic development. Leisure activities, from bathing to boating, reserved for a wealthy elite in Claude Monet’s time, have been broadly democratised and provide breathing space in life, as if the horizon, the light, the skies of the open sea, and the beaches remain unmissable rendez-vous. In the end, the sea is only two hundred kilometres from Paris, at the end of the Seine!
ay m e r i c p e r r o y commissaire de l’exposition responsable du patrimoine maritime, Ville du Havre
ay m e r i c p e r r o y exhibition curator, head of maritime heritage, Ville du Havre
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Claude Monet : Le Pont d’Argenteuil, 1874, Paris, musée d’Orsay./Claude Monet: Argenteuil Bridge, 1874, Paris, Musée d’Orsay.
Claude Monet (18 40-1926) : une vie en bord de Seine Une naissance parisienne, une enfance sur la côte normande Le jeune Claude Monet s’installa avec sa famille au Havre dès sa sixième année : il en conserva toujours l’amour de la mer. Ayant commencé par s’adonner à la caricature, Monet se tourna vers la peinture sur les conseils d’Eugène Boudin, qu’il retrouvait avec Johan-Barthold Jongkind à la ferme Saint-Siméon à Honfleur. Au cours des années 1860, l’artiste travailla en forêt de Fontainebleau. Pour répondre au Déjeuner sur l’herbe d’Édouard Manet (Paris, musée d’Orsay), qui avait figuré au Salon des Refusés de 1863, Monet entreprit son grand Déjeuner sur l’herbe (deux fragments sont exposés au musée d’Orsay, à Paris) et il poursuivit cette recherche de l’insertion de la figure humaine dans la nature avec les Femmes au jardin (Paris, musée d’Orsay). Durant l’hiver 1868-1869 à Étretat, le peintre exécuta un extraordinaire « effet de neige », La Pie (Paris, musée d’Orsay). Manifestant un intérêt croissant pour l’air et les vibrations lumineuses qui entourent les figures, Monet travailla en 1869 aux côtés d’Auguste Renoir à la Grenouillère, une « guinguette » près de Bougival, sur la Seine : ils y mirent au point la technique de l’impressionnisme – la fragmentation de la touche –, cinq ans avant la naissance officielle du mouvement. Le 28 juin 1870, Monet épousait Camille Doncieux, avec qui il avait eu un fils, Jean, en 1867. L’été 1870 signifie la fin d’une époque avec la guerre franco-prussienne. Afin d’échapper à l’enrôlement, le
s y lv i e p at i n
conservateur général au musée d’Orsay, correspondant de l’Institut curator at Musée d’Orsay, correspondant of the Institut
Claude Monet (18 40-1926): A Life Beside the Seine A Parisian birth, a childhood on the Normandy coast The young Claude Monet moved with his family to Le Havre at the age of six, and he always kept his love of the sea. Having begun by devoting himself to caricature, Monet turned to painting on the advice of Eugène Boudin, whom he had met with Johan-Barthold Jongkind at the Ferme SaintSiméon inn in Honfleur. During the 1860s, the artist worked in the forest of Fontainebleau. As a response to Edouard Manet’s Déjeuner sur l’herbe (Paris, Musée d’Orsay), which had featured at the Salon des Refusés of 1863 in Paris, Monet undertook his large Déjeuner sur l’herbe (two fragments of which are exhibited at Musée d’Orsay in Paris) and he pursued this research into the insertion of the human figure in nature with Women in the Garden (Paris, Musée d’Orsay). During the winter of 1868-69 in Etretat, the painter carried out an extraordinary “snowscape”, The Magpie (Paris, Musée d’Orsay). In 1869, displaying a growing interest for air and the vibration of light surrounding the figures, Monet worked alongside Auguste Renoir at La Grenouillère, a riverside guinguette dance hall near Bougival on the Seine: there they developed the technique of Impressionism – the fragmentation of the brushstroke – five years before the official birth of the movement. On 28 June 1870, Monet married Camille Doncieux, with whom he had had a son, Jean, in 1867. Summer 1870 marked the end of an era with the Franco-Prussian War. To avoid conscription, the
Claude Monet ( 1 8 40-1926) : une vie en bord de Seine
« La Seine ! Je l’ai peinte pendant toute ma vie, à toute heure, en toute saison, depuis Paris jusqu’à la mer… Argenteuil, Poissy, Rueil, Vétheuil, Giverny, Rouen, Le Havre… […] Je n’en ai jamais été las : elle est pour moi toujours nouvelle… J’y ai passé des étés torrides, les yeux brûlés par les reflets. Des hivers aussi où il ne faisait pas bon… […] Je me fis construire un atelier dans une barque. C’était une sorte de cabane assez vaste : on y pouvait coucher. Je vivais là, avec mon matériel, guettant les effets de la lumière d’un crépuscule à l’autre… » Propos prêtés à Claude Monet par Marc Elder, À Giverny, chez Claude Monet, 1924.
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“The Seine! I painted it all my life, at all hours, in all seasons, from Paris to the sea... Argenteuil, Poissy, Rueil, Vétheuil, Giverny, Rouen, Le Havre… […] I never tired of it: it is for me always new... I spent torrid summers there, my eyes burnt by the reflections. Winters also when it wasn’t good... […] I built myself a studio in a boat. It was a sort of quite large cabin: one could sleep there. I lived there, with my material, spying on the effects of the light from one dusk to another...” Attributed to Claude Monet by Marc Elder, À Giverny, chez Claude Monet, 1924 Claude Monet : Autoportrait de Claude Monet coiffé d’un béret, 1886, collection particulière. Claude Monet: Self-Portrait of Claude Monet Wearing a Beret, 1886, private collection.
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Claude Monet : L’Embouchure de la Seine à Honfleur, 1865, Pasadena (États-Unis), The Norton Simon Foundation. Claude Monet: The Mouth of the Seine at Honfleur, 1865, Pasadena (United States), The Norton Simon Foundation.
peintre quitta son pays pour Londres où il fit la connaissance de Paul Durand-Ruel, le marchand des futurs impressionnistes ; avec Camille Pissarro, Monet y découvrait les œuvres des paysagistes de l’École anglaise (Turner, Constable, Bonington…) qu’ils regardaient ensemble. Au printemps 1871, Monet passa par la Hollande.
painter left the country for London, where he made the acquaintance of Paul DurandRuel, future dealer of the Impressionists. With Camille Pissarro, Monet discovered there the works of the English landscape school (Turner, Constable, Bonington...) which they looked at together. In the spring of 1871, Monet returned via Holland.
À Argenteuil (1871-1878), au bord de la Seine La Seine retint l’attention du peintre, qui se déplaçait dans son bateau-atelier pour observer les régates de voiliers sur le bassin d’Argenteuil. Monet peignait aussi dans le jardin de ses deux habitations successives et dans la campagne, où il consacra une toile aux Coquelicots (Paris, musée d’Orsay) qui figura en 1874 à la 1re Exposition impressionniste organisée en marge du Salon. Y fut aussi présentée l’Impression, soleil levant (Paris, musée Marmottan Monet) : exécutée au Havre, cette marine devint le tableau éponyme du mouvement. Quand lui fut demandé un titre pour le catalogue, Monet répondit : « Mettez Impression. » Et le critique Louis Leroy de créer, par dérision, le terme « impressionnisme ».
At Argenteuil (1871-1878), on the banks of the Seine The Seine captured the attention of the painter, who moved in his boat-studio to watch sailing regattas on the Argenteuil basin. Monet also painted in the garden of his two successive residences and in the countryside, where he devoted a canvas to the Poppy Field (Paris, Musée d’Orsay), which featured in the first Impressionist exhibition organised on the fringes of the official Salon in 1874. Also presented there was Impression, Sunrise (Paris, Musée Marmottan Monet): this seascape painted at Le Havre became the eponymous painting of the Impressionist movement. When he was asked for a title for the catalogue, Monet answered: “Put Impression”. And, in derision, the critic Louis Leroy created the term “Impressionism”.
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Claude Monet : La Jetée du Havre, 1869, collection particulière./Claude Monet: The Jetty at Le Havre, 1869, private collection.
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Claude Monet : Vue de l’ancien avant-port du Havre, 1874, Philadelphie (États-Unis), Philadelphia Museum of Art. Claude Monet: View of the Old Outer Harbour at Le Havre, 1874, Philadelphia (United States), Philadelphia Museum of Art.
Paris offrit à Monet un sujet « moderne » : la gare Saint-Lazare, abritant les lignes en partance vers les hauts lieux de l’impressionnisme (Argenteuil, Louveciennes et Marly, Pontoise et Auvers, la côte normande…). Un ensemble de vues de La Gare Saint-Lazare de Monet fut la révélation de la 3e Exposition impressionniste (1877). Le développement des liaisons ferroviaires concordait avec la naissance de la peinture de plein air.
Paris provided Monet with a “modern” subject: the Gare St-Lazare train station, serving the lines that left for the principal sites of Impressionism (Argenteuil, Louveciennes and Marly, Pontoise and Auvers, the Normandy coast…). A series of views by Monet of The Gare Saint-Lazare was the revelation of the third Impressionist exhibition in 1877. The development of rail connections coincided with the birth of painting in the open air.
Toujours en bord de Seine, à Vétheuil et Poissy (1878-1883) Monet s’établit un peu plus loin de Paris, « aux bords de la Seine à Vétheuil, dans un endroit ravissant » (à Eugène Murer, 1er septembre 1878). Les paysages peints à Vétheuil, où la Seine est très présente, livrent une impression de désolation qui peut être attribuée aux préoccupations morales et financières de l’artiste : le 5 septembre 1879 s’éteignait Camille, qui ne s’était pas remise depuis la naissance de leur second fils, Michel. Au cours de l’hiver 1879-1880, le dégel de la Seine occasionna une spectaculaire rupture des glaces. « Nous avons eu ici une débâcle terrible et naturellement j’ai essayé d’en faire quelque chose… » (au docteur Georges de Bellio, 8 janvier 1880) : plusieurs
Always beside the Seine, at Vétheuil and Poissy (1878-1883) Monet settled a little further out of Paris “on the banks of the Seine in Vétheuil, in a stunning spot” (to Eugène Murer, 1 September 1878). The landscapes painted at Vétheuil, where the Seine is very present, give an impression of melancholy, which could be attributed to the moral and financial preoccupations of the artist: on 5 September 1879, Camille, who had not recovered after the birth of Michel, their second son, died. During the winter of 1879-80, the thawing of the Seine saw a spectacular cracking of the ice. “We have had a terrible thaw here and naturally I tried to do something about it…” (to Doctor Georges de Bellio, 8 January 1880): several works foreshadow
Étretat
Sainte-Adresse LE HAVRE ROUEN
Trouville
la
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le
l’Eure
l’Ep te
Honfleur
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Giverny Vétheuil Lavacourt
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« Monsieur Monet, que l’hiver ni L’été sa vision ne leurre Habite, en peignant, Giverny Sis auprès de Vernon dans l’Eure. » stéphane mallarmé,
Quatrain d’adresse, 1890.
“Monsieur Monet, that winter nor Summer his vision doesn’t deceive Lives, in painting, Giverny Set next to Vernon in the Eure.” stéphane mallarmé , Quatrain d’adresse, 1890.
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Argenteuil Poissy Louveciennes Bougival
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Rueil Malmaison
PARIS
Claude Monet : Le Bateau-atelier, 1875-1876, Merion (États-Unis), Barnes Foundation. Claude Monet: The Boat-Studio, 1875-76, Merion (United States), Barnes Foundation.
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œuvres annonçant le procédé des « séries » futures tandis que les plaques de glace sur l’eau mouvante préfigurent l’effet des nymphéas à la surface de l’étang de Giverny. La période de Vétheuil, empreinte d’une tristesse contrastant avec l’éclat de celle d’Argenteuil, constituait une transition : Monet avait accru son indépendance par rapport au groupe des impressionnistes et Durand-Ruel lui assurait un soutien constant ; Alice Hoschedé occupait une place grandissante auprès de l’artiste avant de devenir sa seconde épouse en 1892. Le 24 mai 1881, Monet confiait à Zola : « […] Je suis à la recherche d’un joli endroit aux bords de la Seine. […] J’ai pensé à Poissy… » S’y installant en décembre, il abandonnait la rive droite de la Seine. Mais la rive gauche du fleuve inspirait fort peu le peintre et le malaise éprouvé à Poissy l’aida à prendre conscience de la nécessité de trouver un lieu approprié à son travail, un point d’ancrage. Le 15 avril 1883, Monet annonçait à Durand-Ruel : « […] Une fois installé, j’espère faire des chefs-d’œuvre, car le pays me plaît beaucoup… » Il venait de découvrir Giverny, en Normandie, encore plus loin de la capitale.
the method of his future series, while the sheets of ice on the moving water herald the effect of the water lilies on the surface of the pond in Giverny. The Vétheuil period, marked by a sadness that contrasts with the joy of that at Argenteuil, formed a transition: Monet had increased his independance from the Impressionist group and Durand-Ruel provided constant support. Alice Hoschedé occupied a growing place beside the artist before becoming his second wife in 1892. On 24 May 1881, Monet confided to Emile Zola: “I’m looking for a pretty place on the banks of the Seine. […] I had thought of Poissy...” Moving there in December, he abandoned the Right Bank of the Seine. But the painter was less inspired by the Left Bank and the unease he felt in Poissy made him conscious of the importance of finding a suitable place to work, a place to drop anchor. On 15 April 1883, Monet told Durand: “Once installed, I hope to make masterpieces, because this countryside pleases me a lot...” He had just discovered Giverny in Normandy, even further from the capital.
À Giverny (1883-1926), au confluent de la Seine et de l’Epte « Je suis dans le ravissement, Giverny est un pays splendide pour moi… » (à Théodore Duret, 20 mai 1883). Jusqu’en 1890, Monet quitta souvent Giverny pour se lancer à la recherche de nouveaux paysages (Bordighera en 1884), de mers inconnues (l’Océan à Belle-Île en 1886, la Méditerranée à Antibes en 1888) et de lumières différentes au cours de campagnes de peinture. En 1889, dans une mémorable exposition Monet-Rodin (galerie Georges Petit à Paris), les toiles du peintre voisinèrent avec les sculptures du maître. Alors, « certain de ne jamais retrouver une pareille installation ni un si beau pays » (à Durand-Ruel, 27 octobre 1890), Monet décidait d’acquérir la maison et le jardin de Giverny afin de pouvoir transformer les lieux. La décennie des années 1890 correspond à une orientation décisive dans son art : le peintre entreprit plusieurs « séries » (Meules, Peupliers, Cathédrales…) pour restituer les modifications incessantes subies par le motif selon les changements d’éclairage et variations atmosphériques au fil des heures et des saisons : « […] Je m’entête à une série d’effets différents (des meules) […]. Mais plus je vais, plus je vois qu’il faut beaucoup travailler pour arriver à rendre ce que je cherche : “l’instantanéité”… » (à Gustave Geffroy, 7 octobre 1890). Monet se déplaça le long de la Seine jusqu’à Rouen pour y peindre sa « série » des Cathédrales (1892 et 1893). Après un voyage en Norvège (1895), l’artiste exécutait la « série » des Matinées sur la Seine, qui restitue dans une atmosphère vaporeuse les brumes matinales dansant avec les nuages au-dessus du fleuve. La nostalgie l’incitait à revoir les lieux d’antan : la côte normande (1896 et 1897), Londres, qui lui inspira ses Vues de la Tamise, tandis que s’effectuait aussi un retour à Vétheuil (1900). Le village devenait prétexte à plusieurs Vues de Vétheuil où la Seine occupe le premier plan. Le peintre n’abandonnait plus guère l’univers créé à Giverny, désormais son unique source d’inspiration. Dès 1893, Monet avait fait creuser le bassin, enjambé par un pont japonais, et ce « jardin d’eau » fut l’objet des recherches de l’artiste au cours des vingt dernières années de son existence : « Sachez que je suis absorbé par le travail. Ces paysages d’eau et de reflets sont devenus une obsession » (à Gustave Geffroy, 11 août 1908). Après la découverte de Venise (1908) et le décès d’Alice (1911), Monet n’allait plus quitter Giverny jusqu’à sa mort (5 décembre 1926). En mai 1927, ce fut la révélation des Grandes Décorations de Nymphéas, testament artistique donné à la France par le peintre, encouragé par Clemenceau : Monet en avait conçu la présentation dans deux salles de l’Orangerie, en plein cœur de Paris, le long de la Seine, qui demeurerait ainsi attachée à son œuvre et à son souvenir au-delà de sa disparition…
At Giverny (1883-1926), at the confluence of the Seine and the Epte “I am overjoyed, Giverny is a splendid spot for me” (to Théodore Duret, 20 May 1883). Until 1890, Monet frequently left Giverny in search of new landscapes (Bordighera in 1884), unknown seas (the Atlantic at Belle-Ile in 1886, the Mediterranean at Antibes in 1888) and different lights during his painting campaigns. In 1889, in a memorable exhibition “Monet-Rodin” (Galerie Georges Petit in Paris), the painter’s canvases neighboured the master’s sculptures. Then, “sure to never find a comparable setting, nor such a beautiful countryside” (to Durand-Ruel, 27 October 1890), Monet decided to acquire the house and garden at Giverny in order to be able to transform the place. The decade of the 1890s corresponds with a decisive direction in his art: the painter undertook several “series” (Haystacks, Poplars, Cathedrals...) to recreate the ceaseless modifications undergone by the motif according to changing light and atmospheric variations over the hours and seasons: “[...] I persist with a series of different effects (the haystacks) […]. But the further I go, the more I see that one must work hard to succeed in rendering what I seek: ‘instanteity’... (to Gustave Geffroy, 7 October 1890). Monet moved along the Seine as far as Rouen to paint his “series” of Cathedrals (1892-93). After a voyage to Norway (1895), the artist carried out the “series” of Mornings on the Seine, which recreated in a hazy atmosphere the morning mists dancing with the clouds over the river. Nostalgia incited him to revisit the sites of the past: the Normandy coast (1896 and 1897), London, which inspired his Views of the Thames, while he also returned to Vétheuil (1900). The village became a pretext for several Views of Vétheuil, where the Seine occupies the foreground. Subsequently, the painter barely left the universe created at Giverny, in future his unique source of inspiration. As early as 1893, Monet had had the pond dug, crossed by a Japanese bridge, and this “water garden” was the focus of the artist’s research over the last twenty years of his life: “Know that I am absorbed by work. These landscapes of water and reflection have become an obsession” (to Gustave Geffroy, 11 August 1908). After the discovery of Venice (1908) and the death of Alice (1911), Monet was not to not leave Giverny until his death (5 December 1926). In May 1927, the Large Water-Lily Decorations were unveiled, the artistic legacy given to France by the painter, encouraged by Georges Clemenceau: Monet had conceived their presentation in two rooms of the Orangerie, in the heart of Paris, beside the Seine, which thus remained linked to his work and to his memory after his death.
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Claude Monet : En canot sur l’Epte, vers 1888-1889, São Paulo (Brésil), Museu de Arte./Claude Monet: The Canoe on the Epte, c.1888-89, São Paulo (Brazil), Museu de Arte.
Claude Monet : La Berge à Lavacourt, 1878, Dresde (Allemagne), Gemäldegalerie Neue Meister./Claude Monet: The Riverbank at Lavacourt, 1878, Dresden (Germany), Gemäldegalerie Neue Meister.
Seine Métropole J’ai eu un rêve. La vallée de la Seine devenait le cadre d’une grande métropole mondiale où l’urbain et la nature seraient réconciliés, Paris-Rouen-Le Havre enrichissant cette région capitale de leurs identités propres et l’ensemble des urbanités diffuses façonnant le cadre de vie d’une ville monde riche de sa diversité et de son potentiel créatif et industriel. J’ai survolé la vallée de la Seine, remonté en bateau le fleuve du Havre à Montereau, parcouru les zones industrielles et les paysages naturels, les quais urbains et les ports animés, suivi les rives du fleuve ou les chemins de grande randonnée des plateaux, traversé les paysages à trois cents à l’heure en TGV entre la Défense et Le Havre, caboté sur l’autoroute devenue le grand boulevard de cette métropole, emprunté les tramways qui quadrillent ce territoire… Et j’ai compris que Bonaparte avait vu juste lorsqu’il déclara en 1802 au Havre : « Paris, Rouen, Le Havre, une seule et même ville dont la Seine est la grande rue. » En proposant Paris-Rouen-Le Havre comme perspective pour le Grand Paris, nous nous inscrivons dans la critique de la croissance radioconcentrique de l’agglomération parisienne. Le sentiment d’appartenance à un territoire métropolitain est indissociable d’une identité géographique. La vallée de la Seine constitue une opportunité exceptionnelle pour donner à chacun le sens de l’habiter, du « topos » sans lequel le « logos » ne peut s’enraciner. Les habitants des communes qui bordent le fleuve partagent une évidente communauté de destin. Ceux des grands ensembles ségrégés sur les plateaux par l’isolement dû au manque de transports collectifs peuvent construire
a n to i n e g r u m b ac h
architecte, urbaniste, Grand Prix national d’urbanisme en 1992 architect, urban planner, Grand Prix national d’urbanisme in 1992
La Seine et ses méandres ont façonné le territoire. Elle est un lien naturel, historique, inscrit dans la vie des riverains. The Seine and its meanders have shaped the land. It is a natural and historical link inscribed in the life of the residents. L’axe Seine présente une alternance de zones urbaines, industrielles et naturelles. Le village préservé de Lavacourt est révélateur. Aujourd’hui encore, il paraît rural alors qu’il n’est situé qu’à quelques kilomètres de Mantes-la-Jolie. The Seine axis provides an alternation between urban, industrial and natural zones. The preserved village of Lavacourt is characteristic. It still appears rural today, yet is only a few kilometres from Mantes-la-Jolie. La Seine est navigable et facilite les liaisons avec la région capitale. Les barges poussées par des pousseurs ont bien souvent remplacé les péniches au gabarit Freycinet. The Seine is navigable and facilitates liaisons with the Paris region. Motorised barges have often replaced Freycinet width barges.
Seine Métropole I had a dream. The Seine valley became the frame for a grand international metropolis where town and nature are reconciled. Paris-Rouen-Le Havre enrich this important region with their own distinct identities and the ensemble of diffuse settlements shape the lifestyle of a world city, rich in its diversity and its creative and industrial potential. I flew over the Seine valley, remounted the river by boat from Le Havre to Montereau, roamed through industrial zones and natural landscapes, city quaysides and animated ports, followed the riverbanks and the footpaths over the plateaux, crossed countryside at 300 km an hour in the TGV between La Défense and Le Havre, trundled on the motorway become the grand boulevard of this metropolis, borrowed the tramways that criss-cross the territory... And I understood that Napoleon was right when he declared at Le Havre in 1802: “Paris, Rouen, Le Havre, a one and same city of which the Seine is the high street.” In proposing Paris-Rouen-Le Havre as the perspective for the Grand Paris, we subscribe to the criticism of the radiocentric growth of the Paris agglomeration. The feeling of belonging to a metropolitan territory is inseparable from a geographical identity. The Seine valley provides an exceptional opportunity to give everyone the sense of living there, of the “topos” without which the “logos” cannot take root. The inhabitants of the communes that border the river share an evident sense of destiny. Those of the big housing estates, who are segregated on the plateaux through the isolation caused by lack of public transport, can construct their belonging to a shared geographical entity by the valorisation of the thalwegs that connect them to the river.
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leur appartenance à une entité géographique commune par la valorisation des talwegs qui les relient au fleuve. L’analyse de la situation concrète a déterminé un principe d’organisation linéaire discontinue et polycentrique disposant d’une identité géographique partageable par tous les habitants. L’association de Paris et du Havre dans un même destin métropolitain repose sur des faits historiques autant que géographiques. Seine Métropole installe la vallée de la Seine comme le monument d’une agglomération de quatorze millions d’habitants. L’analyse de la formation du territoire et la réflexion théorique sur les rapports entre une situation géographique et les modèles du développement nourrissent notre approche. À ces enchevêtrements ville, nature, industrie, il faut associer les développements diffus plus ou moins agrégés aux villages ruraux des plateaux devenus des villages d’urbains, par leurs emplois et leurs modes de vie. Le réseau que ces villages constituent organise une sorte de poly-centralité résidentielle qui accompagne les implantations de la vallée. La prise en compte de ce système associant des formes d’habitat très diversifiées doit être reconnue comme la forme moderne de la métropole du monde européen. La ville linéaire de la vallée et le réseau des villages du plateau sont associés depuis des temps immémoriaux par les talwegs qui les relient. Les ponts, naturellement situés au pied de ces talwegs, ont donné naissance à l’essentiel des villes et des villages de la vallée. Croiser le désir de maintenir l’alternance ville-nature le long du fleuve et la recherche d’une solidarité avec les réseaux résidentiels des plateaux conduit à prendre en compte seize talwegs comme supports d’un déploiement urbain associant les villes-ponts et les urbanisations diffuses. Afin de privilégier le transport collectif, quelle que soit sa forme (bus ou tram), les talwegs permettent d’installer l’armature des déplacements de Seine Métropole, en favorisant les relations entre les pôles d’intermodalité : gares, ports ou échangeurs routiers. S’inscrira un développement urbain associé à ce système de transport. Ce dispositif marque une alternance entre les zones naturelles (agricoles et paysagères) et les zones d’intensité urbaines et industrielles. Le grand paysage est valorisé sans minimiser le désir d’urbanité. Depuis la consultation sur le Grand Paris avec Christian Blanc et l’exposition de la Cité de l’architecture inaugurée par le président Nicolas Sarkozy en avril 2009, le projet s’est enrichi des nombreux échanges entre les élus et l’État. Paris, Rouen, Le Havre et Caen se sont réunis pour envisager les formes de gouvernance adaptées autour du Commissariat à l’aménagement de la Seine, présidé par Antoine Rufenacht, ancien maire du Havre. Les trois ports de Paris, Rouen et Le Havre se sont associés dans un seul : HAROPA (HAvre-ROuen-PAris ou Harbours of Paris). Les études pour le grand port PSM (Paris Seine Métropole) à la confluence Seine-Oise ont été réalisées. La ligne de train à grande vitesse LNPN (Ligne nouvelle Paris-Normandie) a fait l’objet d’un débat public préparé par le préfet Jean-Pierre Duport. Les chambres de commerce et d’industrie des régions et des villes concernées ont créé un GIE pour le développement de la vallée de la Seine. L’amélioration de la desserte francilienne de la vallée entre Paris et Mantes est en cours grâce au prolongement de la ligne de RER Eole à partir de la Défense. Toutes les études sur le Grand Paris intègrent le fait qu’il doit, pour des raisons économiques, s’inscrire dans une étroite relation avec son port naturel, Le Havre, et donc HAROPA. Le CDT (contrat de développement territorial) de la Confluence est en cours d’élaboration. Par une superbe coïncidence, la grande exposition sur l’impressionnisme initiée par Laurent Fabius à partir de Rouen a contribué à l’idée que la vallée de la Seine, de Paris au Havre, est un territoire dont l’identité culturelle participe avec force à la mégapole ouesteuropéenne, qui associe Paris, Londres et Rotterdam comme la Hanse du xxie siècle.
The analysis of the actual situation determined a principle of discontinuous and polycentric linear organisation, with a geographical identity that can be shared by all the inhabitants. The association of Paris and Le Havre in the same metropolitan destiny depends on factors that are as much historic as geographic. Seine Métropole establishes the Seine valley as the monument of an agglomeration of fourteen million inhabitants. Analysis of the formation of the territory and theoretical reflection on the relationships between a geographical situation and models of development nourrish our approach. To this jumble of town, nature and industry, one must add the diffuse develoments more-or-less joined to the rural villages of the plateaux, become urban villages through their jobs and lifestyle. The network formed by these villages forms a sort of residential polycentrality that accompanies the settlements in the valley. The consideration of this system associating very diverse types of habitat must be recognised as the modern form of the European metropolis. The linear valley town and the network of villages on the plateau have been linked since time immemorial by the thalwegs that connect them. The bridges, naturally situated at the foot of these thalwegs, gave birth to most of the towns and villages in the valley. To combine the desire to preserve the town-nature alternation along the river and the search for a solidarity with the residential networks of the plateaux has led to taking into account sixteen thalwegs as supports for an urban expansion associating town-bridges and diffused settlements. In order to privilege public transport, whatever form it takes (bus or tram), the thalwegs allow the installation of a structure for circulation in Seine Métropole, by favourising relationships between the poles of intermodality: stations, ports or road junctions. Urban development would be associated with this transport system. This system marks an alternance between natural zones (agriculture and countryside) and zones of urban density and industry. The general landscape is made more attractive without minimising the desire for urbanness. Since the consultation about Grand Paris with Christian Blanc and the exhibition at the Cité de l’Architecture in Paris, inaugurated by President Nicolas Sarkozy in April 2009, the project has been enriched by numerous discussions between politicians and the state. Paris, Rouen, Le Havre and Caen met to envisage suitable forms of administration around the Commissariat à l’aménagement de la Seine, chaired by Antoine Rufenacht, former mayor of Le Havre. The three ports, Paris, Rouen and Le Havre, have joined in a single body: HAROPA (HAvre-ROuen-PAris ou Harbours of Paris). Studies have been made for the large port PSM (Paris Seine Métropole) at the confluence of the Seine and the Oise. The high-speed LNPN (Ligne nouvelle Paris-Normandie) train line has been the subject of a public debate organised by the préfet Jean-Pierre Duport. The chambers of commerce and industry of the regions and towns concerned have created a GIE (Groupement d’Interet Economique) for the development of the Seine valley. The improvement of access to the valley from the Ile de France is underway thanks to the extension of the RER Eole suburban railway from La Défense. All the studies of the Grand Paris take on board the fact that it must, for economic reasons, be inscribed in a close relationship with its natural port, Le Havre, and thus HAROPA. The CDT (contrat de développement territorial) of the Confluence is in the process of being decided. By a wonderful coincidence, the large exhibition about Impressionism initiated by Laurent Fabius from Rouen has contributed to the idea that the Seine valley from Paris to Le Havre is a territory whose cultural identity contributes greatly to the west European megopolis, associating Paris, London and Rotterdam like the Hanseatic League of the 21st century.
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François Kollar : La Seine prise des tours Notre-Dame, vers 1935, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine. François Kollar: The Seine Taken from the Towers of Notre-Dame, c.1935, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine.
La Seine et ses méandres La vallée de la Seine présente une diversité d’aménagements entre zones urbaines, industrielles, agricoles et naturelles.
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Touring Club de France : Mantes-la-Jolie, vers 1910, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine. Touring Club de France: Mantes-la-Jolie, c.1910, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine.
The Seine and its Meanders The Seine valley displays a wide variety of land use between urban, industrial, agricultural and natural areas.
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Jean Jablonski – Touring Club de France : Rouen vue de la colline de Bonsecours, vers 1920, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine. Jean Jablonski – Touring Club de France: Rouen Seen from Bonsecours Hill, c.1920, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine.
Service photographique du Port Autonome de Rouen : Rouen, vue du port depuis la campagne environnante, vers 1980, Grand Port Maritime de Rouen. Photographic service of the Rouen Port Authority: Rouen, View of the Port from the Surrounding Countryside, c.1980, Rouen Port Authority.
Vivre, la Seine à portée de regard Élément naturel vivant, la Seine est une présence pour les millions de personnes qui vivent à moins de dix kilomètres du fleuve.
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Henri Cartier-Bresson : Caudebec-en-Caux, 1955, Magnum Photos. Henri Cartier-Bresson: Caudebec-en-Caux, 1955, Magnum Photos.
Live with the Seine in Sight A living natural element, the Seine is a presence for the millions of people who live within ten kilometres of the river.
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Henri Cartier-Bresson : Honfleur, 1955, Magnum Photos. Henri Cartier-Bresson: Honfleur, 1955, Magnum Photos.
Claude Monet : La Gare Saint-Lazare, 1877, Paris, musée d’Orsay. / Claude Monet: The Gare Saint-Lazare, 1877, Paris, Musée d’Orsay.
Gare Saint-Lazare, en voiture pour Le Havre La ligne de chemin de fer Paris-Rouen-Le Havre, achevée en 1847, va bouleverser les communications et favoriser le développement économique de la vallée et des ports. The Paris-Rouen-Le Havre railway, completed in 1847, was to shake up communications and favour the economic development of the valley and the ports. De métal et de verre, la gare Saint-Lazare est un bon exemple de l’architecture industrielle du xixe siècle présente également dans les ports (docks, hangars, ponts…). À l’époque, les navires sont eux aussi des œuvres représentatives de l’architecture métallique : surfaces rivetées, décor ouvragé des épontilles, éclairage zénithal… In metal and glass, Saint-Lazare station is a fine example of 19th-century industrial architecture, present also in the ports (docks, hangars, bridges...). At the time, the ships were also works representing metal construction: riveted surfaces, the finely worked decoration of stanchions, zenithal lighting...
La gare Saint-Lazare, destinée aux passagers, dessert l’Ouest parisien et la Normandie. Les lignes servent aussi au fret, qui va très vite concurrencer le transport fluvial. Intended for passenger transport, Saint-Lazare station served western Paris and Normandy. Also used for freight, the lines would very quickly rival river transport.
Les paquebots de ligne sont le prolongement sur mer du chemin de fer. Les passagers se rendent au Havre par des trains spéciaux dits « transatlantiques ». Steamships were an extension of the railways in the sea. Passengers reached Le Havre by special trains known as the “Transatlantiques”.
Au xixe siècle, la création d’une desserte ferroviaire entre Paris et Le Havre vise à concurrencer l’important trafic fluvial qui approvisionne la capitale en s’appropriant l’avance technique des ingénieurs britanniques et en s’appuyant sur la réussite récente des lignes françaises de Saint-Germain (1837) et de Versailles (1838). La compagnie ferroviaire obtient en 1840 une concession sur un projet suivant la Seine, à réaliser en cinq ans. Le choix d’emprunter la vallée limite la construction d’ouvrages d’art et permet d’offrir une desserte rapide aux entreprises bordant le fleuve. Mise en service dès 1843 pour le tronçon de Rouen puis dès 1847 pour celui du Havre, la ligne se révèle vite rentable grâce à l’exploitation d’un intense trafic marchandises ; le transport voyageurs, d’abord moins fructueux, évoluera avec le développement des liaisons trans-Manche et transatlantiques, puis avec la desserte progressive des cités balnéaires de la Côte d’Albâtre (Étretat) et celle d’une liaison vers Londres via Dieppe. Dès sa fondation par le banquier anglais Edward Blount, associé à Charles Laffitte, la compagnie opère donc un transfert décisif de technologie britannique en s’assurant la coopération de pionniers de l’industrie ferroviaire : l’ingénieur-chef, les principaux entrepreneurs, une grande partie des ouvriers, anglais et irlandais. Dans un premier temps, les industriels Allcard et Buddicom produisent le matériel roulant. Parallèlement à l’emprunt d’une technologie ferroviaire, la construction des gares et celle des ouvrages d’art relèvent d’une culture où excellent architectes et ingénieurs français, issus d’écoles supérieures
a n to i n e l e b a s
conservateur du patrimoine state curator
Gare Saint-Lazare, in the Carriage for Le Havre In the 19th century, the creation of a railway line between Paris and Le Havre aimed to rival the important river traffic that supplied the French capital, making use of the technical advance of British engineers and based on the recent success of the French lines of Saint-Germain (1837) and Versailles (1838). In 1840, the rail company obtained a concession for a project following the Seine, to be completed in five years. The decision to use the valley limited the construction of major engineering works and allowed the possibility of a rapid service for businesses beside the river. Put into service as early as 1843 for the Rouen section, and 1847 for that of Le Havre, the line soon proved profitable thanks to important goods traffic; passenger traffic, originally less fruitful, evolved with the development of cross-Channel and Transatlantic links, and then with the progressive service of the seaside resorts of the Alabaster Coast (Etretat) and that of a liaison towards London via Dieppe. As soon as it was founded by English banker Edward Blount, associated with Charles Laffitte, the company operated a decisive transfer of British technology in cooperation with pioneers of the railway industry: the chief engineer, the principal entrepreneurs, a large number of the workers were English and Irish. At the beginning, the industrialists Allcard and Buddicom produced the rolling stock. In parallel with borrowing railway technology, the construction of the stations and engineering works stemmed from a culture where excellent French architects and engineers, were produced
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qui forment des professionnels réputés. La gare, monument emblématique de l’architecture ferroviaire, présente un double visage. Elle dresse face à la ville une élévation monumentale dont la façade de pierre, voire de brique enduite, obéit à une savante composition inspirant confiance et respect. Au-delà des guichets, de vastes halles abritent les convois. Autant le premier bâtiment relève du geste de l’architecte, chargé d’édifier pour la compagnie salons, bureaux, logements de fonction ainsi que des services commerciaux, autant les halles témoignent de l’étendue de la science de l’ingénieur, qui déploie à Paris, à Rouen comme au Havre les ressources de son talent. À la place de la pierre, le métal se décline ici sous la forme de fonte, de fer ou d’acier ; la brique ose se montrer ; et le verre en couverture complète la panoplie des matériaux de l’industrie. Aux charpentes articulées – de type Polonceau, que figure Claude Monet – succèdent à Paris celles à tôle rivetée d’Eugène Flachat et au Havre celles en arc brisé surbaissé. La construction ferroviaire assure ainsi la diffusion et le triomphe tranquille d’une architecture exploitant les potentialités techniques et les coûts modérés des nouveaux matériaux de l’industrie. Ces vastes halles aux colonnes effilées et aux élévations impressionnantes apparaissent alors aux contemporains avisés comme les « cathédrales » de la modernité, expression la plus juste du monde industriel émergent. Le rationalisme structurel à l’œuvre dans les gares apparaît plus clairement encore dans la réalisation des ouvrages d’art : viaducs métalliques lancés sur la Seine jusqu’à Rouen et viaducs maçonnés au-delà, dont celui de Barentin s’avère emblématique. Comme Claude Monet le montre à travers la béance de son œuvre, une gare, c’est aussi une porte ouverte sur l’extérieur. Avec le développement des réseaux, c’est l’Europe entière qui s’anime et multiplie les échanges de toutes sortes (expositions universelles). Ainsi, l’ouverture due aux réseaux ferroviaires s’avère porteuse de mutations culturelles comme d’évolutions intellectuelles. L’anglophilie ambiante vers 1860 favorise l’introduction sur le continent de sports – rugby, tennis, yachting, natation, golf… – qui transforment la vie des citadins ; à l’instar de Maupassant, le train leur permet aussi de découvrir les ressources des environs de Paris, voire le plaisir des bains de mer. Le rail assure ainsi l’essor de la villégiature, dont l’architecture pittoresque renouvelle le répertoire formel de la maison individuelle (de bord de mer ou de banlieue) et celui de la construction hôtelière. La gare ouvre aussi une fenêtre sur la ville moderne, qui se construit avec elle et autour d’elle, conformément à l’urbanisme haussmannien : près de la gare SaintLazare s’établissent les grands magasins et les principales banques. Avec l’hôtel Terminus, brasseries et restaurants égayent un quartier aux larges boulevards qui facilitent la fluidité des trafics et la circulation des omnibus. Cependant, derrière la majesté cossue du bâtiment voyageurs, au-delà de la grande halle, la gare se développe et se complète d’un triage, d’un dépôt du matériel roulant cerné d’ateliers d’entretien, d’entrepôts et de magasins. L’essor du réseau ferroviaire contribue ainsi à la multiplication d’installations techniques et industrielles qui renouvellent le paysage bâti aux abords des villes et participent à la croissance des faubourgs. En décloisonnant l’univers de la ville et celui des campagnes, en bouleversant leurs relations réciproques, le rail va également bouleverser l’évolution de la peinture. De jeunes artistes pratiquent, entre leur Normandie natale et la capitale, de fréquents allers-retours ; et cette mobilité est à l’origine d’un renouveau pictural dont le rail s’avère le vecteur privilégié et la Normandie, aux lumières si changeantes, une source d’inspiration. Leur coup de génie vient de ce qu’ils font du train, de la ville et de la modernité technique le véritable motif de leurs œuvres. Car leur apport réside moins dans le sujet apparent de leurs tableaux que dans le point de
by colleges that trained reputed professionals. The station, emblematic monument of railway architecture, presented a double face. Towards the town, it revealed a monumental structure whose facade in stone, or perhaps stuccoed brick, obeyed a knowing composition inspiring confidence and respect. Beyond the ticket office, vast concourses sheltered the convoys. As much as the first building expressed the gesture of the architect, charged to build lounges, offices, and official accommodation, as well as the commercial services, so did the station concourse bear witness to the extent of the science of the engineer, who rolled out the resources of his talent in Paris and Rouen as in Le Havre. In place of stone, metal was declined here in the form of cast iron, iron or steel; brick dared to reveal itself; and glass as covering completed the panoply of industrial materials. The articulated vaults – of the Polonceau type depicted by Claude Monet – were succeeded in Paris by those in riveted sheet metal of Eugène Flachat and in Le Havre those in lowered Gothic arches. Railway construction thus guaranteed the diffusion and quiet triumph of an architecture that made the most of the technical potential and moderate costs of new industrial materials. These vast concourses with slim columns and impressive heights appeared to knowing contemporaries like “cathedrals” of modernity, true expression of the emerging industrial world. The structural rationalism of the stations was even more evident in the engineering works: metal viaducts over the Seine as far as Rouen and masonry viaducts beyond that, of which the one at Barentin is emblematic. As Claude Monet shows through the opening in his work, a station is also a doorway opening to the exterior. With the development of rail networks, the whole of Europe awakened and multiplied exchanges of all sorts (World Fairs). Thus the opening up due to rail networks proved favourable to cultural mutations and intellectual evolution. The Anglophile mood around 1860 favoured the introduction in continental Europe of sports – rugby, tennis, yachting, swimming, golf… – that transformed the life of urban populations. Following the example of Maupassant, the train allowed them, too, to discover the resources of the Paris region or the pleasures of sea bathing. Rail thus confirmed the growth of holiday destinations, whose picturesque architecture renewed the formal repertoire of the private home (by the sea or in the suburbs) and of hotel construction. The station also opened a window on the modern town, built with and around it, following the principles of Haussmannian urbanism: the department stores and main banks set up near the Gare St-Lazare. With the Hôtel Terminus, brasseries and restaurants brightened up a district of wide boulevards, which facilitated the fluidity of traffic and the circulation of the omnibus. However, behind the majestic opulence of the passenger terminus, beyond the grand concourse, the station developed and was complimented by a sorting office, and train sheds surrounded by workshops, warehouses and storerooms. The growth of the railway network thus contributed to the multiplication of technical and industrial facilities that renewed the built landscape on the edge of towns and participated in the growth of the suburbs. In breaking down the division between the world of the city and that of the countryside, in overturning their reciprocal relationship, rail would equally shake up the evolution of painting. Young artists made frequent journeys between their native Normandy and the capital; and this mobility was at the origins of a pictorial renewal, in which rail proved the prime vector and Normandy, with its ever-changing light, a source of inspiration. Their stroke of genius came from making the train, the town and technological modernity the true motif of their works, because their contribution lies less in their paintings’ apparent subjects than in the point of view adopted. They were
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René-Jacques : Place de l’Europe, hiver 1945-1946, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine. René-Jacques: Place de l’Europe, winter 1945-1946, Paris, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine.
vue adopté : ils perçoivent les premiers combien le chemin de fer s’avère, par son intrusion, l’acteur principal d’une mutation paysagère inédite dont la ville sort transformée et d’où de modestes paysages normands tirent une consistance imprévue. Depuis sa création, le train n’a cessé de structurer et de rapprocher les activités des hommes qui vivent et travaillent dans le Val de Seine. Il est temps désormais de rappeler combien, de Paris jusqu’au Havre, le rail, après le fleuve, a contribué au renouveau monumental et artistique d’un continent. Paradoxalement, le train qui amène de jeunes artistes normands à Paris leur procure aussi un moyen d’évasion autant qu’un motif d’inspiration. Car la construction ferroviaire est au centre de leur révolution picturale en ce qu’elle justifie souvent à elle seule leurs motifs. Son apport à l’évolution artistique sera également à l’origine de quelques-uns de leurs chefs-d’œuvre en inspirant aux peintres impressionnistes une manière inédite. En introduisant une vision dynamique du monde moderne, le train se révèle un moteur irremplaçable de leur création : leur peinture est celle d’un monde en mouvement que tente de capter l’artiste voyageur. Ces œuvres nous restituent les métamorphoses du réel saisies dans l’instant, à travers une peinture qui illustre son éphémère vision.
the first to perceive how far the railway proved, by its intrusion, the principal actor of an unprecedented mutation of the landscape from which the town emerged transformed and where the modest Normandy landscapes were unexpectedly consistent. Since its creation, the train never ceased to structure and bring closer together the activities of the people who lived and worked in the Seine valley. It is time to remember in future how much from Paris to Le Havre, the railway, after the river, contributed to the monumental and artistic renewal of a continent. Paradoxically, the train that brought the young Normandy artists to Paris also provided them with a means of escape as much as an inspiration. Because the railway construction was at the centre of their pictorial revolution in that it often justified itself as a motif in its own right. Its place in artistic evolution would equally be at the origin of some of their masterpieces in inspiring Impressionist painters in an unprecedented way. In introducing a dynamic vision of the world, the train revealed itself as an irreplaceable motor of their creation: their painting is that of a world in movement that the voyager-artist tried to capture. These works give us back the metamorphosis of reality seized instantly, through a painting that illustrates its ephemeral vision.
Le réseau Avec le développement économique et urbain de la vallée de la Seine et de l’agglomération parisienne, le réseau initial est actuellement saturé.
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François Kollar : Le Rail. Ouvriers sur les voies de circulation, 1931, Paris, bibliothèque Forney. François Kollar: The Railways. Workers on the Tracks, 1931, Paris, Bibliothèque Forney.
The Network With the urban and economic development of the Seine valley and the Paris agglomeration, the initial network is now saturated.
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Service photographique du Grand Port Maritime du Havre : Voies sur le port du Havre, 2012, Grand Port Maritime du Havre. Photographic service of Le Havre Port Authority: Railway Tracks in the Port of Le Havre, 2012, Le Havre Port Authority.
Paris-New York via Le Havre À l’époque des paquebots de ligne, des trains transatlantiques partent de la gare Saint-Lazare et desservent les gares maritimes du Havre.
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Anonyme : Le Havre, gare ferroviaire du Port Autonome du Havre reliée à la gare maritime de la Compagnie générale transatlantique. À quai, le paquebot Normandie, 1935, Le Havre, association French Lines. Anonymous: Le Havre, Railway Station of the Port Autonome at Le Havre Linked to the Passenger Terminal of the Compagnie Générale Transatlantique. At quay, the Cruise Ship Normandie, 1935, Le Havre, Association French Lines.
Paris-New York via Le Havre At the time of the steamships, the Transatlantic trains left from Gare Saint-Lazare and served the passenger terminals of Le Havre.
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Service photographique du Port Autonome du Havre : Le Havre, locomotives traversant le canal de Tancarville sur le pont V, 1934, Grand Port Maritime du Havre. Photographic service of Le Havre Port Authority: Le Havre, Locomotives Crossing the Tancarville Canal on the Bridge 5, 1934, Le Havre Port Authority.
Denis Couchaux : Locomotive 231 G 558 « Pacific État » classée Monument historique, conservée par l’association Pacific Vapeur Club basée à Sotteville-Lès-Rouen, vers 2005, Rouen, Service de l’Inventaire et du Patrimoine, Région Haute-Normandie. Denis Couchaux : Locomotive 231 G 558 “Pacific État” Listed Historic Monument, conserved by the Association Pacific Vapeur Club Based at Sotteville-Lès-Rouen, c. 2005 Rouen, Service de l’Inventaire et du Patrimoine, Région Haute-Normandie.
Le fret sur le rail Dans l’approche multimodale actuelle, le transport des marchandises par le rail est amené à se développer entre Paris, Rouen et Le Havre, au même titre que le fluvial.
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Service photographique du Port Autonome du Havre : Le Havre, chargement de régimes de bananes dans un wagon frigorifique sous un hangar quai de Guinée, 1934, Grand Port Maritime du Havre. Photographic service of Le Havre Port Authority: Le Havre, Loading Bananas in a Refrigerated Wagon under a Hangar, Quai de Guinée, 1934, Le Havre Port Authority.
Freight on the Rail In the current multimodal approach, the encouragement of freight transport by rail is set to develop between Paris, Rouen and Le Havre in parallel to river transport.
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Service photographique du Port Autonome du Havre : Le Havre, chargement par des dockers de sacs de grains dans des wagons, 1961, Grand Port Maritime du Havre. Photographic service of Le Havre Port Authority: Le Havre, Dockers Loading Grain Sacks into Wagons, 1961, Le Havre Port Authority.