Nabil HobeĂŻka
Dessine-moi le vent sur le sable Poème en prose
Dessine-moi le vent sur le sable
ISBN 978-2-36673-015-9 © Nabil Hobeïka 2014
Nabil HobeĂŻka
Dessine-moi le vent sur le sable Poèmes en prose
A Paula
« Parce que le cœur, tu le sais bien, est le grand inverseur de la vie ». Valère Novarina, La Quatrième Personne du singulier.
Je suis de ce voyage où tout se perd et se gagne. L’enfant du pays me déchire et me rassemble. Elle sait que les mots affleurent et meurent en silence, entre deux soupirs. Elle sait que le jour se lève de sa belle et tremblante disposition avec des questions et le souffle du vent dans une vie si peu changée, croit-on ici comme ailleurs. Si peu avec tout le présent qui afflue et se dissout dans un chant de quais d’embarquement.
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Parce que notre hiver avec ses lumières dans les mémoires est feu de sarments, chaleur dans le cœur, eau bue frissonnante, je me livre à ses neiges car tu sais combien je voudrais te l’entendre dire. Comme on jette un regard pardelà une fois rien, l’esprit du moment tient dans un dessin, sinon toi une fois sans doute au loin.
Dessine-moi le vent sur le sable
Je suis aux aguets. Le soir tombe. Un feu de bois parfume l’air. Le merle a réclamé le cœur du lierre. La nuit est une histoire renouvelée vieille, jamais sans palpitations. Couvre la distance. Comprime les ombres. Je reste où je suis après la vague, sur ta ligne pour l’éclaircir : le dessin repris d’un trait et de toi-même. Il n’est plus de fond que de toi-même.
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Ce serait que la parole nous délivrât sans détours. Qu’elle advienne ! Couleur peut-être. Rythme et lenteur. L’espace qu’elle occupe regarde d’un rivage à sa mesure. Sur l’arbre en feuilles, sur l’arbre nu s’il échoit. Comme aujourd’hui la pluie sur le chemin s’entête, déjà les mots qu’épelait en larmes l’enfant.
Dessine-moi le vent sur le sable
Devant jouer en chœur, l’archet s’émeut. L’heure est à la neige ne se dit que dans la passion, en franchise pour mieux nous retrouver à l’entendre, ma sœur, où que retentissent les vibrations du monde. Combien t’accompagner m’aurait raffermi ! Combien ma volonté dans un reste de vie bouleversée !
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Qu’avons-nous ma sœur de toi saisi ? Me parles-tu parfois pour que j’apprenne ce que dit un poème muet ? Me parles-tu ? Oh le soir est venu tôt, vite et tôt le triste jardin, l’enclos ! Tu avais compris à voir tes yeux nous fixer. Etre ailleurs ne s’invente pas. Farce est cette vie. Il nous fallait tant l’aimer. Nous y épuiser ne nous a guéris qu’à hauteur d’improbables médecines, pour nous porter vers ta prunelle énigmatique, un bouquet de cette épine.
Dessine-moi le vent sur le sable
Est-ce que le temps, pâleur d’étincelle, aphasique, cille à l’insatiable aphonie des dieux ? Près d’eux assez peu ! L’endurante empreinte qui marqua ton esprit au berceau confondit le matin avec le soir, rien que ton esprit au berceau : frêle frisson contre terre t’illumina. Je sais me raisonner, arguer, me disputer mais tu restes la note en suspens sur l’écume, la cantate méditative.
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