Dix ans et une vie

Dix ans et une vie Emilie Schwartz

Dix ans et une vie par Emilie Schwartz

Le 10 octobre 2010 à 10 heures du matin, Andreas mangea une crème glacée à la vanille enrobée de chocolat noir aux noix de pécan. La journée commençait mal puisqu’Andreas avait enfreint notre code de bonnes conduites mis en place le 10 octobre 2000, date de notre union. Ce dernier précisait qu’aucune sucrerie ne serait autorisée avant le déjeuner. Nous avions décidé ensemble de règles de fonctionnement dans le but de montrer le bon exemple à nos futures progénitures. Pour cela, il eut donc fallu que nous nous tenions nous-mêmes à certains principes que nous jugions élémentaires. Ce règlement se composait de dix articles en référence à la date de notre 5

mariage et énonçait à la fois des règles de savoir-vivre en communauté ainsi que des principes inhérents aux droits de l’homme.

Pendant dix ans, nous avions réussi à respecter chaque règle, dans la mesure où les sanctions étaient strictes et sans appel.

Par exemple, l’article Premier disposait que chacun, au nom de la parité, était libre et égal en droit. Si l’un d’entre nous atteignait à la liberté de l’autre, il s’en suivait une exclusion de l’appartement d’une période supérieure ou égale à 14 jours. Il aurait alors fallu trouver un ami ou un vieil oncle prêt à nous accueillir, puis s’organiser de façon à ce que cette mise à distance forcée ne nuise pas à notre vie professionnelle.

Cette dernière comptait beaucoup à nos yeux et un changement d’environnement nous aurait gravement déstabilisés.

Andreas travaillait comme juge au tribunal 6

pour enfants de Berlin. Je m’occupais de mineurs délinquants récidivistes. Notre investissement au travail nous rapprochait beaucoup et c’est au vu de nos expériences respectives que nous avions établi notre code de bonnes conduites. Nous étions tous deux persuadés que seules des lois préétablies assuraient le bon fonctionnement d’une vie en société. Nous avions banni les chaînes de restauration rapide et limitions notre consommation de sucre. Nous buvions des chocolats chauds en hiver et mangions des glaces en été afin de réguler nos besoins en fonction des saisons. Nous avions également limité notre consommation de viande et pensions sans cesse aux futures générations qui paieraient le prix de nos excès.

D’ailleurs, j’avais arrêté de prendre la pilule le lendemain de notre mariage.

Tout était parfaitement programmé. Nous 7