ue des habitudes alimentaires. Il s’ensuit un appauvrissement de la société, même si avec rédominance des monastères certaines sciences sont conservées. Les nouveaux venus mangen es bouillies d’avoine, et découvrent les choux, le légume européen par excellence, donné au eltes par les Basques. Ils consomment le chou rouge ou vert, pois, lentilles mais aussi la venaison s découvrent des animaux aussi divers que les ânes, les chevaux, et le chameau (acclimaté e urope, le climat étant plus chaud) dont l’étoffe grossière faite avec son poil s’appelle « camelote Les Francs mangent de la viande, avec une sauce aumiel, et des légumes au jus de viande. D Andalousie (à l’origine pays des Vandales) déferlent les cavaliers arabes et berbères sous les ordre Abd Al Rahman avec leurs chevaux de Perse et leurs étriers de Chine. Leur cavalerie légèr t arrêtée à Poitiers par la chevalerie franque, bardée de fer, de Charles Martel. Ils restent hu ècles encore en Espagne, mais aussi en Aquitaine et en Provence. Leur devise « crois ou meurs ermaine et Georges Blond écrivent « ils laisseront des ruines, des descendants aux yeux noi ais aussi, l’algèbre et pour ce qui nous intéresse, le sucre du golfe du Bengale qu’ils découvren près les Perses et les soldats d’Alexandre ». Ils laissent aussi un gâteau : pastis en Quercy, tourtièr u croustade qui sera l’ancêtre du feuilletage C’est cette pâte qui fait la pastilla marocaine. Elle e ussi à l’origine du Strudel dans les pays occupés par les Turcs. Venus du Nord les sauvages Danoi orvégiens et Suédois ravagent l’Europe durant 150 ans sous le nom générique de Vikings. C nt ces éléments d’insécurité, qui facilitent l’avènement de la féodalité « Sécurité contre Liberté e même phénomène se produit aux Indes, en Chine et au Japon, créant des différences de classe amène à des systèmes d’alimentation, aux cuisines diverses en fonction des catégories sociale vec Charlemagne nous assistons au début de la cuisine du Moyen Age. Il est cependant sob peut manger durant un repas : 1er service Herbes potagères. 2éme service ; porc, gibier su ain rond. 3éme service pâtisserie et fruits, la pâtisserie à base de pâte non sucrée n’a rien à vo vec notre pâtisserie moderne. Le pain de dessous, devenu le pain tranchoir, est distribué au auvres. Il est important de savoir qu’au Moyen Age le pauvre a le droit d’être nourri par le rich on comme le parasite romain, mais à la place d’honneur, comme le représentant du Christ su terre (ainsi que Saint Louis le fait par exemple). L’ergot du seigle fait son apparition dans gion de Limoges c’est ce qu’on appelle « Le mal des Ardents ». Le servage d’abord libremen onsenti, fait des ravages. Le mépris des seigneurs pour le travail de la terre, stoppe tout progrè Jean t danindustries -alors Yvesque u monde agricole, durant plusieurs siècles, urbaines connaissent un esso Anles marquable. Les disettes sont nombreuses. Sur le plan de la nourriture et des préparations le onnaissances sont contrastées. Les maîtres cuisiniers médiévaux ignorent la liaison à la farin ourtant connue des Romains. Au Moyen Age comme dans l’Antiquité le fait d’ébouillante s viandes est un raffinement. Jusqu’au XIIIe siècle, les fourneaux sont pratiquement inconnu a cuisine se fait dans d’immenses cheminées, où tournent les broches avec le hasteur qui e t chargé, et où l’on suspend les marmites à faire bouillir. Cela exclut les cuissons au four, d Antiquité. Dans les âtres des cheminées on utilise non des soufflets, mais des « tuyaux à bouche Le pilon est l’instrument indispensable, de la cuisine médiévale, pour piler les épices et souven s viandes de certains plats. Le mortereux (plat de viandes pilées) du Mésnagier de Paris e rtainement à l’origine du mourtayrol auvergnat, et du morteruelo de Valence et autre rovinces ibériques. On retrouve les fruits au début du repas, sous Saint Louis, et la fréquenc
Histoire abrégée & modeste de la cuisine & des cuisiniers
Histoire abrĂŠgĂŠe et modeste de la cuisine et des cuisiniers
Jean-Yves Andant
Histoire abrĂŠgĂŠe et modeste de la cuisine et des cuisiniers
Voici une histoire méconnue du grand public, celle des cuisiniers et de leurs créations. Qui se douterait que la poularde demi-deuil symbole de la cuisine lyonnaise est la création d’une Auvergnate. Du cuisinier nain statufié des pharaons, de « l’embellisseur » sumérien, de l’Archimagirus romain qui ne s’adressait jamais directement au petit peuple des cuisines, à Carême (peut être le plus grand chef de toutes les temps)jusqu’à nos cuisines spectacles et nos chefs hyper médiatisés, l’art culinaire a marqué de son empreinte l’histoire de nos coutumes, de nos écritures voire de nos philosophies par sa « science de gueule » chère à Montaigne. Ce petit livre offre un résumé, imparfait certes, mais véridique de ce métier dur, exigeant, mais exaltant dont Carême disait « le charbon nous brûle mais qu’importe, moins de vie, plus de gloire ». Voici la grande histoire des cuisiniers et ses petites anecdotes.
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Sommaire
01. La plus vieille Cuisine du Monde. L’Egypte : la statue d’un grand Chef : le nain Khnoumhotpou. La Chine. Le feu, 500.000 ans avant J.C. Un chef diététicien à la cour 1115 av. J.-C.
02. Confucius : un maître en gastronomie. La Mésopotamie: Akkad et Sumer, le règne de la graisse de mouton, le code d’Hammourabi, les scribes de la haute cuisine, les alliacés.
03. Antiquité gréco-romaine. Du lièvre d’Aristophane à Archestrate. Des murènes : une vraie fausse légende. Apicius et le canard de Senderens.
04. Le Moyen Age. Le réveil économique. Taillevent. Le sucré-salé, l’acidité et les sauces légères. Le règne des épices. Apothicaires et talmeliers. Les produits récoltés au-dessus du sol, et ceux en dessous. La galimafrée.
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05. La Renaissance. Olivier de Serres. Catherine de Médicis : l’apport italien. Broches automatiques. Les produits du Nouveau Monde.
06. XVII siècle. Pierre de la Varenne. Le roux et les réductions. Vatel. Molière, les Précieuses Ridicules et les mousses.
07. XVIII siècle. Le service à la française. Le décorum. Grimod de la Reynière. Les corporations et leur fin. Apparition des restaurants. 12
08. La Révolution. Brillat Savarin : la Physiologie du goût. Les émigrés : sauce salade en Angleterre et œufs brouillés en Amérique. Les appellations culinaires et les restaurants.
09. Age d’or de la cuisine Française. Le service à la russe. Antonin Carême : une Super Star. Urbain Dubois. Ali-Bab.
10. Appertisation. Un bateau nommé le Frigorifique. Maggi. Liebig.
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11. L’Epoque moderne - 1 fin du XIX. Escoffier. Prosper Montagné.
12. L’Epoque Moderne - 2 fin du XIX-XX Les Femmes dans la Cuisine : les Mères Lyonnaises, la Mère Filloux, une Auvergnate à Lyon et la Poularde demi-deuil, Pellaprat, Pic, Dumaine et Point
13. Le métier de cuisinier. 14. La Nouvelle Cuisine. Les Grands Chefs en Province 15. La Cuisine du futur : avenir ou utopie ?
Introduction & Généralités
« Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es » La cuisine est définie comme la préparation raisonnée des denrées comestibles, selon un mode traditionnel propre à chaque groupe social ou ethnique, traditions qui procèdent des ressources locales mais aussi de tabous religieux, de vecteurs de préoccupations de salubrité ou de sauvegarde des liens de sociétés : la religion, la culture, les saisons. La cuisine dépend des croyances, des coutumes et du climat. Les manières de table et les pratiques culinaires sont des miroirs privilégiés des cultures. Dans les différentes manières de manger on peut distinguer sur le plan mondial une variété dans les ustensiles utilisés et surtout dans les aliments consommés. Le couteau n’est utilisé que dans la civilisation occidentale : Europe, Amérique du Nord et une partie de l’Amérique du Sud, la Nouvelle-Zélande et l’Australie. Les Baguettes pointues sont en usage au Japon et en Corée, par contre en Chine elles sont rondes. Certains se servent de cuillère et fourchettes, de cuillères seules, voire des mains dans une autre partie du monde Parmi les interdits se retrouvent l’animal totémique, les vaches en Inde, le porc dans le Judaïsme et l’Islam
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Des aliments ont des zones de consommation bien déterminées par exemple le chien au Japon et Chine, les grenouilles en France et en Asie mais aussi dans certaines parties de l’Amérique du Nord (Louisiane), le cheval en France et au Japon. On trouve la consommation d’escargots et de lapins en France, en Italie et en Espagne. La fermentation est une des premières techniques de conservation des aliments et de cuisine. Les cuissons se font au trou 5000 ans avant notre ère. On fait bouillir en rendant étanche une cuvette dans le sol avec de la glaise, en y jetant des pierres brûlantes dans le liquide comme le feront les bergers landais au XIX siècle ou dans la peau à trois piquets des troupes écossaises de 1327. On se sert de la pierre pour écraser les graines : c’est l’ancêtre du moulin à céréales et du mortier. Au Moyen Orient on trouvera un grill fait de lianes tressées enduites de glaise. 16
Une morale sévère donne une nourriture sobre : Sparte, les Mormons Le vocabulaire de cuisine a une influence sur le langage : cuistre (celui qui annonçait les plats souvent avec emphase), chapelle (kapeleïa : petite mangeoire) édifice ajouté à la demeure principale qui servait parfois de petit débit de boissons. Mais évitons de généraliser, le fait que dans nos campagnes les hommes disent aller à la « chapelle » pour indiquer se rendre au café et ainsi s’épargner la messe à l’église, tient plus de l’anticléralisme que d’une improbable culture hellénique. Ostracisme vient d’huître en grec ancien car on votait l’exil d’un citoyen en écrivant son nom sur une coquille d’huître. Nous nous efforcerons d’indiquer l’origine culinaire destermes avant leur passage dans le langage commun.
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Les cuisiniers mythiques
Tantale manquant d’approvisionnement pour nourrir les dieux sacrifie son fils adultérin et le leur fait manger ; ayant bu de l’Ambroisie boisson spécifique des dieux qui rend immortel, il est condamné au supplice bien connu, pour l’éternité. Prométhée qui vole le feu et le donne aux humains est condamné pour toujours à se faire dévorer le foie par un aigle ou par un vautour.
La cuisine des recettes et des livres de cuisine écrits par des cuisiniers ne commence qu’au Moyen-âge, les livres étant écrits souvent dans un latin approximatif qui devient pour la postérité avec ironie « le latin de cuisine ». La cuisine que l’on aurait pu considérer comme une affaire de femmes devient en prenant de l’importance, de la difficulté et de la pénibilité, donc jouant un rôle sociétal dans des civilisations patriarcales, une affaire d’homme. Esclaves dans l’Antiquité, ils sont des siècles plus tard des personnages magistraux dans les cuisines de palais aux budgets considérables. Le vocabulaire de cuisine est en grande partie militaire, les valets sont des ordonnances, le grand dignitaire du service l’Ecuyer tranchant, les responsable des cuisines : Officiers de Bouche (ce ne sont pas forcément les Queux, du latin coquus : qui font cuire, cous au XIIe dont le nom de coq, cuisinier de bateau, dérive) Ils portèrent l’épée jusqu’à la Révolution et même de nos jours on parle de Brigade.
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La plus vieille cuisine du monde La Bible mentionne Noé quittant l’Arche et cultivant la vigne sur le mont Ararat. Elle ne donne aucune recette culinaire sauf lorsque Abraham recevant les Anges leur offre lait, crème et veau. Nous trouvons une autre vague indication dans le livre de Ruth « Elle s’assoit à côté des moissonneurs, on lui donne du grain rôti ». Cependant durant le passage du livre de « l’Exode » les Hébreux regrettent « Ah ! Les concombres, melons, poireaux, oignons et l’ail d’autrefois » souvenirs de leur séjour en Egypte
La cuisine égyptienne
Le plus grand cuisinier égyptien dont nous ayons connaissance est un nain : khnoumhotpou. Il est présent sous le règne d’Oumas ou de Téti vers -2300. Sa statue fut retrouvée prés du sarcophage d’un pharaon. Elle se trouve maintenant au musée du Caire depuis 1878. C’est le seul cuisinier statufié, il était pourtant d’une grande laideur. Il ne reste aucune recette égyptienne mais on connaît les aliments consommés grâce aux hiéroglyphes : du pain, de la bière, des poissons
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d’eau douce et de mer (La poutargue préparation encore présente de nos jours dans les pays méditerranéens est consommée), des viandes surtout du mouton, du porc, de la volaille et du bœuf pour les fêtes. On trouve des légumes : ail, oignons, fèves, pois chiches, lentilles, concombres, poireaux, peu de fruits sauf les dattes. Aucune femme dans la cuisine, alors qu’elles paraissent en grand nombre dans les autres activités.
La cuisine chinoise
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La cuisine chinoise à la période de notre Moyen-âge a déjà 3500 ans derrière elle. 1000 ans avant notre ère elle expérimente déjà des plats nouveaux. En 1115 av. J.-C. la cour impériale engage un diététicien qui est aussi chef de cuisine. Les poètes et les gourmets de cette civilisation écrivent sur la soie et le bambou. Les plats ont les mêmes ingrédients pour les pauvres et pour les riches. On trouve 8000 recettes codifiées, conditionnées par la pauvreté en combustible, ne nécessitant pas plus de10 à 15 minutes de cuisson. La cuisine chinoise a pour grand principe « Complexité croissante dans la conception, simplicité croissante dans le résultat » Confucius grand philosophe chinois 551-479 av. J.-C.Ne mange pas un mets qui a perdu sa couleur et son odeur ordinaire, qui ne soit pas cuit convenablement ou coupé régulièrement, avec la sauce convenable et du gingembre toujours servi sur la table.
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La cuisine mésopotamienne
Notre cuisine occidentale (il faut bien se limiter dans notre propos) commence avec l’apparition de l’écriture cunéiforme en Mésopotamie qui nous apporte pour la première fois une connaissance des pratiques culinaires et des aliments utilisés. Elle se développe avec les listes d’ingrédients établies par les scribes pour quelques lettrés et pour les intendants jusqu’à la cuisine de nos sociétés de lecteurs. Les cuisines ont toujours deux sources : une source populaire et une source savante qui se joindront en France dans la cuisine bourgeoise. La cuisine mésopotamienne commence à Sumer, Akkad et Elam. C est la première à être mise par écrit. Des recettes peu détaillées qui sont réservées aux professionnels, un peu comme dans Le Guide Culinaire d’Escoffier. En les mettant par écrit on veut seulement préserver les secrets des techniques de cuisine et non pas les diffuser. Le nom du plat en est la composante principale : cerf, gazelle, chevreau, agneau, mouton, pigeon, canard, oie, mais pas de gallinacés (originaires d’Indonésie et de Chine ils viendront plus tard)). Beaucoup de légumes figurent dans la composition des repas : navets, céréales, fruits de palmier, figues, grenades, vigne, bulbe, truffes, champignons, herbes, fèves, lentilles, dattes, raisins, semoule. On trouve des confits élaborés avec du miel et de l’huile. On se nourrit de coquillages, poissons, crustacés. Les sauterelles sont appréciées, le lait, le beurre et le saindoux sont utilisés Le peuple étant illettré, les recettes sont écrites par les scribes pour la Haute Cuisine. Le chef appelé Nuhatimmu (cuisinier) doit avoir fait un apprentissage obligatoire. Le cuisinier est de condition servile et exerce sa profession au service des grands. Le goût mésopotamien requiert l’utilisation de graisse de mouton dans presque tous les plats, une saumure SHIKKU est omniprésente
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(cf. garum, nhoc-man, pissalat). Les alliacés sont très prisés : oignons, ail, cive. Le mode de cuisson principal est le fourneau constitué de cylindres verticaux en argile : four et coupole, cuisson directe en milieu humide à la vapeur, indirecte immergée dans du liquide. Ce four dit Turuna qui donne le tannur arabe, le tannura iranien, le tanur turc et le tandur indien. On utilise le Ruqqu : une sorte de marmite en cuivre puis en métal. Trois cents variétés de pains en forme de cœur, de seins, d’oreilles sont inventoriées ainsi qu’une vingtaine de sortes de fromages généralement à base de lait de chèvre Une encyclopédie sur deux colonnes gravées, dont une partie administrative et une partie code alimentaire, c’est le code HAMMOURABI datant de-1700 qui nous donne des enseignements précieux (On aura aussi des indications datant du règne de Naram-Sin -2400, son grand père Sargon d’Akkad a une légende semblable à celle de Moïse). Le pain est mesuré en litres de farine nécessaires à sa composition. Au palais de Makkion trouve 50 moules différents. En Akkadien le responsable des cuisines s’appelle « l’Embellisseur ». On trouve une recette de bouillon qui est une recette de base : « On fait cuire du salé, eau, graisse, cuscute à suffisance, oignons, samidu (?) Ail, poireau, cumin, coriandre le tout à bouillir dans une marmite ». On connaît 25 recettes dites de Yale, université américaine où sont conservées les tablettes. Mais la traduction de certains mets culinaires nous fait défaut. Il y a des tabous alimentaires, soit permanents comme les équidés, les chiens, les serpents (le cochon est consommé mais on le trouvait sale), soit des tabous saisonniers comme le poireau en Janvier (calendrier moderne). On pratique la conservation par le séchage (séchage mot à mot « étaloir ») de l’ail, des viandes, du poisson, du mouton. On utilise la salaison, la conservation à l’huile. On connaît la glace mais son utilisation est rare, car elle est apportée des montagnes du nord. On prépare les viandes et les volailles en ne laissant que les parties faciles à manger et les meilleures. On emploie de la cuscute (plante
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parasite voisine du liseron), de la menthe, ducumin, de l’aneth, de la coriandre, de la roquette, de la rue et des bois (?) pour aromatiser Il y a un vinaigre mais non à base de vin. Les boissons consistent en eau, lait, bière à base de céréales diverses. On boit des vins de fruits, mais le vin que nous connaissons arrive tardivement et reste très cher. Les repas et festins offerts par le roi peuvent durer plusieurs jours, mais il ne faut pas comparer avec nos banquets modernes. Il y a un prélèvement pour « La Table des dieux » qui, en raison de leur régime anthropomorphique, permet de fournir des aliments aux prêtres et aux temples. Après leur présentation ils sont redistribués. Si on met en valeur le bouilli on offre cependant aux dieux des rôtis (en raison sans doute de la préexistence et de l’ancienneté des rites). Un petit rappel sur l’histoire mésopotamienne. Nous y trouvons deux grandes ethnies les Sumériens dont on ne connaît pas l’origine mais détenteurs d’un indéniable savoir. Leur isolement ethnique sans apports extérieurs provoque leur disparition progressive. Au contraire les Akkadiens, des sémites, profitent d’un ajout constant de population, ils utilisent les connaissances des sumériens, progressent et donnent naissance aux Hébreux, Araméens et Arabes Ce petit détour historique pour expliquer pourquoi l’on trouve des traces de cette cuisine mésopotamienne dans la cuisine juive, arabe, turque, grecque voire dans certaines autres cuisines européennes. La consommation des tripes, des abats et surtout du sang sera transmise à nos cuisines européennes. Dans certaines sauces au vin modernes on termine avec du sang et les poumons, les foies sont utilisés, dans la liaison du lièvre à la Royale entre autres. La consommation des petits oiseaux gibiers non vidés et l’emploi desintestins des bécasses pour faire la « rôtie », rappelle la cuisine mésopotamienne, de même que la cuisine du boudin en est un fidèle reflet.
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AntiquitĂŠ
Greco-Romaine
La Grèce antique
Cadmos cuisinier du roi de Sidon (Phénicie) passe dans la légende pour avoir apporté l’écriture en Grèce. C’est dire l’importance du rôle attribué aux gens du métier dans l’Antiquité. Le changement de nourriture chez les Grecs, peuple venu des steppes et peu habitué aux produits de la mer, se fait quand ils quittent la campagne pour s’établirent en ville. Au départ ils ne prisent guère les aliments d’origine maritime. Pour Homère le poisson est une nourriture infecte, la dernière des naufragés. A Sparte, Lycurgue le Roi Mythique et grand législateur fait des lois anti-somptuaires avec sévères obligations de repas communautaires toutes catégories sociales confondues et un seul met : le brouet noir (civet de viandes et de légumes) pour le Koïnos, le dîner ou réunion de convives. Le petit déjeuner se composait de vin pur et de pain. Exemple de la cuisine grecque antique : une recette de CHIROMENES (Ve av. J.-C.) gagnant d’un concours culinaire : « Truffes bardées de lard de porc de Thessalie, ail haché, épices, figues sèches, miel et raisin sec ! Le tout enfermé dans une croûte de pâte arrosée et l’ensemble cuit à l’étouffée. » *
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Par la suite on mange coquillages, salades puis viandes et légumes (On vote aussi l’exil d’un citoyen avec une coquille d’huître ce qui a donné l’ostracisme). Le Mattye est un plat célèbre à base de pintade. La partie du repas où l’on boit et chante s’appelle le SYMPOSION : on commence par la libation et on chante le Péan (hymne à Apollon et aussi chant guerrier cf. Anabase de Xénophon, retraite des DixMille) Le nec plus ultra du repas consiste à dénaturer le produit et tromper le gourmet par la saveur inattendue (voir certaines tendances de l’époque moderne). Les Grecs grands admirateurs d’Ulysse apprécient la tromperie comme une marque d’intelligence. Hermès dieu du commerce est aussi le patron des voleurs. Les cuisiniers qui jouent un rôle important sont très bien payés. Un cuisinier grec déclare « J’ai gagné dans ma profession autant qu’un comédien ait jamais gagné dans la sienne, mon art est un empire enfumé » * 28
MITHEKO grec de Syracuse (Véme siècle Av. J.-C.) écrit un manuel de cuisine, le livre sera perdu et il n’en restera que des évocations * ARCHESTRATE grand gourmet, poète, philosophe du IVe siècle Av. J.-C. meurt d’inanition par suite d’un cancer de l’estomac. Un de ses plats : la bonite sous la cendre dans la feuille de figuier Il parle de la pintade et dit du foie gras ; « Un foie… ou plutôt une âme ». Seuls subsistent de ses écrits quelques fragments. Il reprend la recette de lièvre d’ARISTOPHANE poète grec d’origine paysanne qui disait « Prenez un lièvre faites-le rôtir et saignant saupoudrez le de sel, et mangez vite » recette qui va à l’encontre des modes de son époque. *
Histoire abrégée et modeste de la cuisine et des cuisiniers
Les Hellènes, originaires des grandes plaines d’Asie Centrale, commencent à manger gibier et viandes puis apprécient les produits de la mer, à tel point que le mot OPSON qui désigne les comestibles ausens premier devient le mot désignant le poisson ! Les viandes sont toujours bouillies avant d’être consommées : c’est considéré comme un raffinement culinaire (Lévi-Strauss anthropologue moderne sera de cet avis associant le rôti à la nature et le bouilli à la culture). En Grèce, comme dans tous les pays, la paysannerie de type traditionnel ne consomme pas de viandes saignantes mais préfère les viandes à cuisson longue sauf en Chine en raison de la pauvreté en combustible. Le lièvre et le porc sont les viandes les plus prisées de l’Antiquité. Les épices d’Archestrate sont sésame, cumin, fenouil, coriandre, pavot, origan, ail, oignons, ciboule, raifort, moutarde, câpres, sel, poivre, vin cuit et vinaigre. * Philoxène, gourmet sicilien (la Sicile étant colonie grecque à l’époque) écrit le Dîner avec Alcibiade comme convive. Aristote considère comme analphabète quiconque ne l’a pas lu. Un second Philoxène, ionien de Leucade, a écrit Le Banquet dont Platon emprunte le titre. Les premiers mots de l’ouvrage sont une parodie d’Homère dans L’Iliade : « Commençant par l’oignon, je finis par le thon » Homère avait écrit : « Commençant par le bon, je finirai par le meilleur » Les Grecs sont de grands consommateurs de rougets comme les Romains, mais les premiers comme les seconds, les préfèrent les plus gros possibles. L’ail sacré en Egypte, est plutôt méprisé en Grèce sauf chez les sportifs. Il est à la mode chez les Romains. Il est originaire de Chine. Cuisiniers et boulangers sont confondus dans une même profession comme ils le seront à Rome.
La Rome antique
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A Rome les spécialistes du bien manger sont siciliens et grecs et deviennent plus considérés que les moralistes et les philosophes, ce dont se plaint Sénèque (les Stoïciens) dans une lettre à Lucullus. Les livraisons de nourriture et les charrois se font la nuit. Aucun chariot ne circule le jour dans les rues où l’on trouve des marchands de boudin grillé, de beignets, de petits poulpes, de brochettes de viandes, de petits oiseaux rôtis, des Thermopolis qui vendent des plats cuisinés chauds à emporter. On peut acheter le fars (gâteau à bon marché romain cf. far breton) ; c’est déjà la cuisine de rue. L’art de la cuisine consiste à donner au porc l’apparence d’une volaille et à des tétines de truie (un régal romain) les apparences d’un poisson. On mange beaucoup de porcs gavés de figues sèches et de vin miellé : leur foie est hypertrophié comme l’est celui des oies. Le culte des Lares, génies domestiques du lieu où elles demeurent, émigre de l’atrium à la cuisine ce qui indique l’importance que prend la nourriture. Ne pas confondre avec les Pénates qui suivent la famille. On améliore le confort des cuisines. A Pompéi on préfère le charbon de bois au bois à cause de la fumée. Cependant par peur de l’incendie, on évite les cuisines dans les grands immeubles de Rome, les Insulae, qui font penser à nos cités modernes, mais démunis d’eau courante. *
Histoire abrégée et modeste de la cuisine et des cuisiniers
De grands gastronomes existent dans la Ville (Urbs : Rome pour les Anciens) Un des plus célèbres est LUCULLUS (-115 à-57 av. J.-C.) général romain redouté il meurt d’un philtre d’amour mal dosé. Gastronome réputé et raffiné, à son chef qui lui demande pourquoi il doit faire un repas de gala alors qu’il n’y a aucun invité, il répond « ce soir Lucullus dîne chez Lucullus » Le personnel spécialisé est au service des riches Romains. La gastronomie romaine nous parait curieuse et parfois très sophistiquée. On coupe les vins comme en Grèce avec eau, vinaigre, miel, résine, eau de mer. Les légionnaires prennent de l’eau vinaigrée comme boisson courante et mangent une galette qui pourrait être l’ancêtre de la pâte à pizza. Dans les poteries on prépare les soupes et bouillons. Les rôtis sont bouillis au préalable. Des produits nouveaux apparaissent : bière, gâteaux, huile d’olive, pâtes, vin, fromages, omelette, sucre, genre de puddings Dans les préférences du consommateur romain on trouve les poissons dont murènes et gros rougets, crustacés, légumes, viandes hachées, et la charcuterie gauloise très prisée. L’anecdote des murènes qui donne lieu à une légende doit être remise dans ses justes proportions : César Augusteest en visite chez Asinius Pollion protecteur de Virgile. Un esclave ayant cassé une pièce de vaisselle, son maître veut le faire jeter aux murènes, Auguste intervient, gracie l’esclave, l’affranchit et ordonne de briser la vaisselle du maître cruel. * Un des grands gastronomes Apicius 91 av. J.C. (il y eut 4 Apicicii) vit sous Néron. (Senderens un chef parisien moderne le fait connaître du grand public en réactualisant sa recette du canard). Une de ses spécialités est la truie aux figues sèches et au vin miellé. Il écrit Ars Magirica et De Re Coquinaria. Ruiné (il ne lui reste que10 millions de sesterces seulement !) il se suicide, se jugeant trop pauvre. Cependant
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son nom deviendra nom commun pour désigner un bon cuisinier « un vrai apicius ». * Les recettes portent les noms des cuisiniers ou des gastronomes.. Potage aux lentilles et châtaignes Potage Vitellius aux pois Hachis de Matthius poireaux et palette de porc. Canard Apicius : voici abrégée la recette actuelle et moderne de Senderens (voir ses livres) : Lever le bateau (la poitrine), coriandre, fenouil, poivre, cumin, poivre du bouillon. Plonger les filets. Faire mariner au frais une nuit avec miel, vin blanc, 60 gr. d’épices. Retirer. Cuire 8 minute à 180° après l’avoir doré à la plancha (institution moderne espagnole) Garniture : bouillon au safran et dattes farcies. 32
* Les Romains utilisent du safran répandu sur le sol en quantité et du chou cru contre l’ivresse (comme les Grecs pour le chou). Le chou est un légume d’origine uniquement européenne. Dans les maisons romaines les cuisines (coquinae) et salles à manger (triclinium) sont aménagées. Les fourneaux, sont une maçonnerie importante en briques. Le chef Archimagirus est inspiré du grec. Il a un adjoint pour transmettre les ordres et ne s’adresse pas directement au petit personnel des cuisines. Certains chefs gagnent l’équivalent de 100.000 Francs/or. Cependant il n’y a toujours aucune femme dans les cuisines. Les terres fertiles des environs de Rome, propriétés des riches romains fournissent la Ville en légumes et aliments. Le pain gaulois, réalisé à la levure de bière, est très apprécié car très léger. Les pauvres mangent des orties avec oseille, chou, fenouil, ail, bettes, sénevé ainsi que le décrit Plaute. Il existe des différences sociales considérables dans la société romaine, impensables dans nos sociétés modernes européennes.
Histoire abrégée et modeste de la cuisine et des cuisiniers
En plus des poissons déjà cités, on consomme des truites, brochets et même tortues de la Mer Rouge (on sait utiliser la glace et la conserver). On sale beaucoup, le sel est une base importante dans les échanges économiques de l’Antiquité. On utilise beaucoup les épices : cardamome, cumin, anis, aneth d’Egypte, gingembre arabe, safran de Sicile, raifort, sésame de Grèce, poivre. On mange du paon dans les dîners de galas. Les vins cuits ou aromatisés servent d’apéritifs : vermouths au poivre, absinthe, hysope, pommes de pin. * Les plats sont assaisonnés de garum : le préféré est le garum sociorum (garum des alliés) fait d’intestins de maquereaux d’Ibérie, macérés au sel provenant de Carthagène. Le veau (vitellus) était consommé chez les riches. Varron prétendait qu’Italie venait du nom de cet animal-le veau est toujours très prisé en Italie moderne). On mange du gibier, mais aussi des loirs engraissés aux glands et aux châtaignes. Cette pratique, se perpétue jusqu’au Moyen Age. * Voici un exemple de menu offert par Lentulus, pour sa nomination comme Flamine de Mars : Fruits de mer, oursins, huîtres crues. Grives, poules grasses sur asperges. Terrine d’ huîtres et palourdes cuites. De nouveau coquillages, spondyles. Filets de sanglier et chevreuil, pâté de volaille, becfigues puis encore fruits de mer et poulpes. On notera l’absence de viandes de boucherie trop coûteuses. Le bourgeois romain prend son petit déjeuner de 7 à 9 heures, avec pain frotté de sel ou d’ail trempé de vin, parfois il y a du miel, du fromage, du lait, des œufs, des fruits secs.
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Jean-Yves Andant
De 11 à 12 heures viennent des viandes froides et des légumes de la veille. La Cena se prend à 14 heures en hiver, 16 heures en été. Au menu familial : bouillie de légumes, poissons, viandes en quantité modérée : chevreau, porc, volaille, veau quelques fois, La cène ne comporte jamais de bœuf. Quelques spécialités en cuisine : tétines de truie, langues d’oiseaux, hure de sanglier, rôti de lièvre. Manger couché, est une marque de rang social. Le chiffre normal de convives est 9. Le lit peut supporter de 12 à 15 convives. Le Triclinium, salle à manger, porte son nom en raison de sa capacité à contenir trois lits. * Marcus Apicius nous donne la recette suivante : Ragoût malin : Bettes blanches émincées, poireaux, ache, bulbe, escargots, gésiers de poulet, petits oiseaux et saucisses, prunes de Damas, andouillettes de Lucanie, garum, vin, huile, vinaigre, poivre, livèche, gingembre, le tout lié avec des œufs etc. * Dans le repas ridicule du Satiricon de Pétrone le cochon est étripé devant les convives, le ventre étant garni de nourriture de toute sorte. César, Auguste, Hadrien étaient sobres. Pas de spectacles nocturnes dans l’Antiquité. Les soirées se passent à la Maison. Les libations « À l’Empereur » « A notre Armée ».
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Le
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