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© Vindex, 2014.


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SOMMAIRE

La Princesse disparue Un salon d’Enfer Pour une nuit de rêve Repos et vacances La branche verte Une nouvelle vie L’ homme qui n’aimait pas les pizzas La poupée magique Un play-boy d’enfer La chronique de brousse Une journée folle La dernière ballade L’accrochage Sale engrenage Un train d’enfer Le nouveau job Lointains rivages (poème)



La princesse disparue Chaque jour, Floria traversait trois pâtés de maisons pour aller à l’école. Du haut des ses dix ans, cette petite blonde aux yeux noisette était la gentillesse personnifiée, toujours serviable, toujours polie. De plus, elle était la meilleure de sa classe. Ses parents étaient très fiers d’elle. Elle ne leur cachait rien, du moins presque rien. Juste un détail : un monsieur, qu’elle pensait plus âgé que son papa, lui offrait des bonbons, des jouets, plein de cadeaux, chaque jour, à l’entrée et à la sortie de l’école ! Cachés dans son cartable, ces présents trouvaient un abri secret sous son lit, au

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fond de son coffre à jouets. Il était gentil, ce monsieur Patrick. En échange d’un sourire, d’un câlin ou d’une bise, il la comblait de récompenses ! Il lui avait dit qu’un jour il lui montrerait sa maison. De toute façon, c’est lui qui avait demandé le silence à Floria, comme un pacte secret entre eux, prétextant que les autres, les grands, ne comprendraient pas ! Trois mois de ce manège avaient éveillé les soupçons de sa maîtresse, car Floria montrait chaque matin à ses copines un nouveau jouet, puis des bijoux de valeur. Mademoiselle Darny avait cru bien faire en le rappelant, par une lettre à ses parents, le règlement intérieur de l’école interdisant les objets de valeur. Le lendemain, elle avait eu la visite de Claire, la maman de l’enfant. Persuadée d’une erreur, elle n’en avait rien dit, ni à Floria ni à son mari. Qu’elle ne fut pas sa surprise devant les deux bagues en or confisquées à sa fille pour éviter des incidents ?! S’excusant de son oubli du règlement, elle repartit, les bagues dans la


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poche, effrayée que sa fille soit devenue une voleuse ! Elle avait calmé l’institutrice ; pas besoin d’alerter son mari. Cela ne pouvait, ne devait être qu’une crise de l’enfance très passagère ! Le soir même ; en allant faire les courses avec Floria, elle lui demanda la provenance de ces bijoux, en lui montrant les deux bagues. Elle les avait fait estimer par un joaillier : une petite fortune. Son enfant dit les avoir trouvés par terre, un matin, dans la rigole. Volontairement naïve, elle était rassurée, trouvant impossible que sa chérie soit une voleuse ! Les semaines passèrent, mais de nouveaux objets (jouets, livres, bijoux…) découverts dans le coffre, lors d’un ménage plus approfondi, réveillèrent la curiosité maternelle. Cette fois, Claire suivit discrètement sa fille et fut horrifiée par la découverte du secret : leur fille unique soumise à un satyre d’enfants, un sadique, un pédophile ! Malgré ses idées de gauche solidement ancrées, elle était pour la peine de mort contre les abuseurs

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d’enfants, les violeurs. Elle les suivit une semaine, des courtes entrevues quotidiennes aux soi-disant cours de danse des mercredis et samedis, en fait des promenades au zoo, au cinéma, au salon de thé. Sa fille était naïve, bernée par tant de cadeaux, ignorante du mal. Cette situation devait être stoppée, par n’importe quel moyen. Alain, son mari mis au courant, eut un premier réflexe en voulant alerter la police. Sa femme lui fit changer d’avis et organisa une réunion de quartier, où une dizaine de voisins vinrent et assurèrent de leur aide. La police ne lui aurait rien fait, et il recommencerait avec d’autres petites filles innocentes, ailleurs ! Leur devoir de citoyens et de parents allait mettre un terme à ses agissements. Un terme définitif ! Ils organisèrent le piège : pendant une semaine, Floria n’irait pas à l’école. Le salaud viendra aux nouvelles, et un tour de garde allait l’attendre. D’ailleurs, certains soirs, des voisins l’avaient aperçu, restant des heures dans sa voiture, à scruter la fenêtre de Floria.


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Ils n’eurent pas à attendre longtemps ; le soir même, Patrick, car tel était son prénom, arrive en voiture, et la gare à la place devenue habituelle. Son arrivée a été signalée depuis le début de la rue, quand deux gros costauds ouvrent sa portière et le sortent sans ménagement, le traînant dehors. Patrick essaye de parler, de se défendre ; il est assommé d’un coup de matraque sur la nuque par un voisin policier, habitué à son arme de service. Patrick se réveille, pieds et poings liés, sur un sol cimenté, dans un genre de garage, où se mêlent des odeurs d’essence, des outils, et une dizaine de personnes autour de lui. L’un d’entre eux pose le seau d’eau qui l’a réveillé, et lui un violent coup de pied dans les parties. La douleur fait sortir des larmes aux yeux de la victime. Dans des invectives de haine « salaud, violeur, sadique… », les dix personnes s’excitent, ne lui laissant aucune chance. Chacun, armé d’un outil ou d’une lame, frappe à son tour, comme un tribunal sans avocat, sans pitié, sans psychiatre : un

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vrai peloton d’exécution ! Patrick voit une tache rouge s’agrandir sous lui : il ne ressent plus la souffrance, tellement elle est intense et permanente ! Pourtant il sourit, ayant aperçu Floria derrière la porte attenante au garage. Elle est là, belle, radieuse, vivante, avec quelques gouttes de rosée sur les joues. Plus rien ne compte, plus rien n’existe, sauf elle, son regard, ses cheveux, sa belle robe blanche à fleurs bleues, et son petit cœur ! 16

La rage est passée, les coups ont fini de pleuvoir, mais la leçon a été trop loin : Patrick est mort, baignant dans son sang. Plusieurs mois plus tard, la paix est revenue dans le quartier, mais les complices ne se réunissent plus, certains honteux de leur acte commun. Le lendemain de leur « justice », un journal relatait sur quatre lignes, colonne des faits divers : « … un homme de trente ans environ a été retrouvé mort, sur le ballast de la voie ferrée Paris-Lyon, apparemment tombé du train.


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Il s’agit de Monsieur Patrick Martineaud, demeurant en banlieue parisienne, chef d’entreprise estimé. Une enquête a été ouverte par le Parquet de Lyon. » L’enquête n’a jamais abouti dans ce quartier paisible, mais la tension est montée, les regrets et les envies d’aveux sont apparus. Deux clans opposent les justiciers : les irréductibles et les autres qui doutent ! Un jour, environ un an plus tard, une journaliste, Sophie Granet, cousine du disparu, ayant reconstitué le puzzle du parcours de Patrick, arrive dans le quartier et pose cette question : « Reconnaissez-vous cet homme, s’il vous plaît ? » montrant une photo de son cousin à tout le voisinage. Entre ceux, étrangers à l’exécution, qui l’ont vu, et les repentis qui répondent « Peut-être… » Sophie ne comprend pas le but du passage de Patrick par ici : aucun ami, aucune liaison. Puis, au cours de ses pérégrinations, elle voit Floria,

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jouant seule et prostrée dans un jardin, et elle comprend le pourquoi. Deux ans avant sa mort, Patrick avait perdu dans un accident de voiture sa femme Marie et leur fille Lucille, sosie parfait de Floria. Son article a paru, avec l’histoire de Patrick dans le journal local, et les langues se sont déliées. Les assassins ont tous été arrêtés, jugés et condamnés à de lourdes peines de prison ! Floria sourit et rigole depuis, élevée chez ses grands-parents paternels. Plusieurs fois elle avait essayé de parler à sa mère de cette histoire, dont elle connaissait tout, mais toujours sa mère, redoutant des détails scabreux, la giflait et la faisait taire. Ses parents sont aussi en prison, dans le groupe des lourdes peines.


Un salon d’enfer Une pluie intense et pénétrante accompagne les pas d’un homme emmitouflé dans une grande cape rouge, un long capuchon noir masque son visage ; les flots de gouttelettes semblent s’écarter devant lui. À la vue d’un panneau, l’homme sait que sa destination est proche, bientôt la fin d’une longue quête qui lui aura coûté des années de sa vie. Il ressent les frissons de cet objet tant convoité, comme s’il le possédait déjà ! L’homme fait une halte, s‘adosse contre un mur, submergé par des images du passé. Il revoit le massacre de tous les siens en cette nuit d’horreur dans un temps si lointain ; il

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