Les Fleurs séchées

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Les Fleurs séchées par Sandy Dard



Les Fleurs séchées


© Sandy Dard, 2012 ISBN : 978-2-36673-005-0


Les Fleurs séchées par Sandy Dard



à mes parents.

« Les hautes herbes cachent souvent les plus belles fleurs. » D. Desbiens



Persévère… Ou de la non-énocomie en poésie

« Ne t’arrête surtout pas dans le pas de mes pas. Malgré les ecchymoses, on s’en sortira. La Vie, c’est tant de choses… » La Grande Sophie, Les Roseaux sauvages



I C’est le printemps ; et j’ai bien aimé La Délicatesse. Je suis désolée ; voilà qu’il m’est encore impossible de totalement cesser de vous parler. Je crois que je vous enverrai encore des textos, dans le ciel… Pour l’éternité. Peut-être, j’essaierai. Vous êtes si insaisissable… Moi qui n’aime pas les gens… Je suis toute à mes tourments… De vous retrouver entre deux couvents… Peut-être suis-je incorrigible, vous me manquez encore tellement. Se marier ? Pour l’assumer un tant soit peu, il faudrait que je trouve un moyen d’exister quelque peu…

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II Voilà… J’ai un peu dit ce que je pensais à l’instant T ; et, voilà encore exactement, mon état d’esprit du moment. Maintenant, je vais juste vous raconter l’histoire d’une petite fille triste et mélancolique, la petite souris Rosy. Elle est Unique ; née dans une ville de roses et de violettes… Entre deux parents qui la chérissent sans cesse… Entre une boulangerie, des piles, des bigoudis et tout un tas de petits amis – qu’elle a longtemps pris pour des ennemis.

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III Rosy ; petite fille sage ? Rosy ; petite souris SOLITAIRE mais SOLIDAIRE. Elle ne joue pas ; elle observe. Dans la cour de récréation, elle s’isole, aussi. Déjà… Une vie de rêves et de poésie ? Non, non… Une vie de tristesse et de mélancolie. Pourquoi ? Sa différence fait qu’on la rejette, aussi ; d’où un mal-être qui, là, n’est pas choisi.

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IV Seule ; elle observe la vie d’insouciance et de fantaisie, de ses « non-amis ». Pourquoi ? La question fétiche de tous les enfants du monde, qui ont l’âge de découvrir leur existence entre les 24 et 36 du mois. On l’a cataloguée « différente ». Aussi, elle dessine un peu son vivant, chez un monsieur savant, qui est censé savoir ce qui se trouve un peu dans le cerveau des enfants. Évaluation de quelques jeux de construction et de quelques coups de crayons ; immature mais un peu plus « intelligente » que la moyenne… Rosy est d’autant plus immature qu’elle ne comprend rien à sa nouvelle étiquette… Une petite écolière « différente » ? Elle ne comprend pas…

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V La petite souris somatise, aussi. Elle est stressée dans le ventre de sa maman, qui la désire plus que tout au monde ; pourtant… Le papa ? Il suit le mouvement! Est-ce un leurre ? Elle manque déjà de s’étouffer dans ce ventre aimant. Déjà… Ne voulait-elle pas vivre ? Depuis… Les tourments n’ont plus cessé. Elle tousse jusqu’à vomir, à volonté. À l’école, nouvelle forme d’exclusion… À côté de la poubelle, elle est placée. La petite souris est très malheureuse ; elle se pose beaucoup de questions. On lui a imposé une différence qu’elle ne comprend pas. Et puis, on la rabaisse, encore une fois. Comment, dès lors, se construire une assurance pour avancer ; un respect de soi ainsi qu’une dignité ?

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VI Elle somatise, en permanence. Les médecins n’ont rien fait ; ils ont dit : « Cela passera avec l’âge… » Quel âge ? Donc, entre deux malaises, elle veut lutter… Comment ? À son âge, elle comprend juste qu’elle ne comprend pas. Elle va, donc, logiquement, chercher à comprendre. Les multiples définitions de l’intelligence… Intelligence vient du latin intellegentia (faculté de comprendre), dérivé du latin intellegere signifiant comprendre, et dont le préfixe inter (entre) et le radical legere (choisir, cueillir) ou ligare (lier) suggèrent essentiellement l’aptitude à relier des éléments jusqu’alors séparés. 16


1. Faculté de comprendre, de saisir par la pensée ; ensemble des fonctions mentales ayant pour objet la connaissance conceptuelle et rationnelle (par opposition à la sensation et à l’intuition). Aptitude à s’adapter à une situation, à choisir en fonction des circonstances ; capacité de comprendre, de donner un sens à telle ou telle chose 2. «  Être d’intelligence avec quelqu’un  »  ; s’entendre secrètement avec lui 3. «  Vivre en bonne, en mauvaise intelligence avec quelqu’un » ; vivre en bons, en mauvais termes avec lui. Les deux questions de l’unicité de l’intelligence (avec l’opposition fréquente de l’intelligence pratique à l’intelligence abstraite) et des parts respectives de l’hérédité et du milieu sont toujours en débat… (Le Petit Larousse illustré / Wikipédia).

« Avec l’âge, ça passera »… (Elle comprendra.) La question de la maturité reste au cœur du combat. Il s’agit, en effet, d’une question beaucoup plus subjective que celle de l’intelligence. Voudrait-elle rester petite fille, blottie dans la douceur du cocon familial ? Plus tard, d’ailleurs, elle ne saura « tuer » ses parents ; bloquée dans un huis clos inconfortable… Au sommet d’un triangle, qu’elle semble avoir pris dans son cartable ! 17


Elle ne mange pas beaucoup non plus ; elle se sent incongrue. Elle ne comprend plus. Dans ce monde, elle n’existe plus. Que faire ?

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VII Avec l’âge, dans le triangle, elle commence à se sentir à l’étroit. De fait, pour essayer de comprendre, il faut « se frotter » au monde extérieur – ne serait-ce que pour observer… Avant d’agir, retour sur expérience… Pourtant, Rosy se trouve bien, dans la tranquillité de sa bulle rosée… Elle discute avec sa maman, « sans se mouiller » ! Avec l’âge, elle part de plus en plus souvent pour faire le vide… Elle a même trouvé une chambre à louer… Pour écrire… Pour créer son « petit monde* » ; comme elle dit : « Faut-il rester vivant ? » Dans la rue, le plus souvent, je me prends à parler dans une langue inconnue de sourires… Plus de maternelles. Aussi, des géants ou des nains;  des êtres misogynes, des êtres androgynes se tiennent par la main. Tout va bien. Je quitte 19


peu à peu les frontières de la normalité, de la toxicité, de la réalité… Tout va bien. J’ai du mal à m’habituer ; ailleurs aussi… Tout va bien. Sans jamais de questions auxquelles je ne sais jamais répondre, tout va bien. J’ai accouché d’un beau soleil ; celui des autres… Je ne le vois pas… Encore ? Le vert défile horizontalement, les nuages dessinent aussi un rail blanc. (S. Dard, 2011) Elle n’appelle pas au secours ; elle veut juste se retrouver, pour s’apaiser… Toujours cette angoisse d’incompréhension, qui la taraude, malgré tout. Au gré des rencontres, au gré des solitudes, toujours avoir à faire le premier pas… Sans confiance; ne pas se décourager… Plutôt donner à voir. On ne l’écoute pas. * Le petit monde est communément associé à celui des enfants. Cependant, d’un point de vue scientifique, le « phénomène du petit monde » (appelé aussi effet du petit monde également connu sous le vocable « paradoxe de Milgram » car ses résultats semblent contraires à l’intuition) est l’hypothèse que chacun puisse être relié à n’importe quel autre individu par une courte chaîne de relations sociales. Ce concept donna naissance, après l’expérience du petit monde conduite en 1967 par le psycho-sociologue Stanley Milgram, au concept de « six degrés de séparation ». Celui-ci suggère que deux personnes, choisies au hasard parmi les citoyens américains, sont reliées en moyenne par une chaîne de six relations. Par contre, après plus de trente ans, le statut de cette idée comme description de réseaux sociaux hétérogènes reste une question ouverte. 20


VIII À vingt ans, notre petite souris prend des cours de création littéraire ; elle se réfugie dans la poésie. Elle se dit : « Dans mon petit monde, si l’autre ne comprend pas, il sera comme moi. » Nouvelle souffrance… Dans ses phrases à tiroirs, elle se perd. On ne la comprend pas, faute de communication… On la rejette là ; seule, face à toutes ses interrogations! « Une erreur de la nature » peut-elle échouer à dessein ?

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