Magazine Bretons n°103

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BRETONS SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Octobre 2011 Novembre 2014

n°103 69

20364 - 3110 - 5,90 E

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Un magazine proposé par

Christian Guillemot cofondateur d’Ubisoft

“Si on ne fait pas attention, nous allons devenir des Grand-Ouestiens” Jean-Yves Le Drian “Je suis toujours pour la réunification”

La bataille d’Auray La naissance de l’État breton


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Sommaire

103 NOVEMBRE 2014

EMMANUEL PAIN

44

ÉRIC DE BAGNEUX

16

EMMANUEL PAIN

30

©RUE DES ARCHIVES/EPIC

GWÉNAËL SALIOU

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10 E NTRETIEN ACTU Paul Jorion 14 P OLITIQUE Benoît Careil 16 PORTRAIT Marianne Duigou 18 CULTURE Glenn Jegou 20 G ASTRONOMIE Xavier Pensec 22 MUSIQUE La bombarde Duchesse Anne 24 ÉCONOMIE Ronan Le Moal 26 P RESSE Régis Le Sommier 30 P ORTFOLIO Éric de Bagneux 34 E NTRETIEN Jean-Yves Le Drian 40 H ISTOIRE L’histoire de Bretagne en cinq heures 44 M A BRETAGNE Christian Guillemot 52 H ISTOIRE La bataille d’Auray

BRETONS 2, place de la République – BP 43950 – 56039 Vannes Cedex 02 97 47 22 30 www.bretons-mag.com redaction@bretons-mag.com Rédacteur en chef : Didier Le Corre Rédactrice en chef adjointe : Maiwenn Raynaudon-Kerzerho Directeur artistique : David Yven Ont collaboré à ce numéro : Tugdual Denis, Benjamin Keltz, Tangi Kermarrec, Aurélien Lelièvre et Lucie Lautredou. Photographes : Emmanuel Pain et Gwénaël Saliou Relecture : Nathalie Perrot Publicité, promotion : Cécile Derré, Claire Guillemot et Stéphanie Le Borgnic pub@bretons-mag.com

BRETONS est édité par :

Les Éditions Blanc et Noir Directeur de la publication : Didier Le Corre

52

Imprimeur : Calligraphy-Print – 35220 Châteaubourg Distribution : Ouest-France / MLP Dépôt légal : à parution Commission paritaire : 1115K87235 ISSN : 1775 - 8246

PROCHAIN NUMÉRO LE 28 NOVEMBRE


BRÈVES EMMANUEL PAIN

Maria Lambour n’est plus

E

t une part de nous, d’une certaine idée de la Bretagne non plus. Maria Lambour, 103 ans, s’en est allée un lundi 20 octobre. Dernière Bigoudène à porter la coiffe quotidiennement (“Si j’enlève ma coiffe, je n’existe plus”, nous avait-elle dit), dotée d’un fort caractère, elle avait, cinquante ans durant, tenu un bistro-épicerie à Pont-l’Abbé entre 1938 et 1988. Ayant accédé à la reconnaissance avec ses rôles dans les publicités pour Tipiak et Breizh Cola, elle était devenue un symbole de la Bretagne.

Lu dans Depardieu : “En Bretagne, il y a une vraie âme qui revient” ”C’est pour ça que je ne suis pas mécontent que les Bretons aient foutu le feu, l’autre jour. Depuis qu’ils ont fait sauter les péages, il y a une vraie âme qui revient. Guillaume-Thomas Raynal, l’auteur d’Histoire philosophique et politique des deux Indes, qui raconte la formidable histoire du commerce européen en Extrême-Orient, où se sont illustrés beaucoup de Bretons, serait heureux. Les Bretons, eux, ne s’abandonnent pas. Ils montrent qu’ils ont su voyager, découvrir de nouvelles terres, fonder des établissements dans le monde entier. Les Français, je trouve qu’ils ont peur, peur des étrangers.” Gérard Depardieu, Le Point du 2 octobre 2014

Succès du Mooc Edubreizh

Les pompiers de Rennes parlent breton

Pour une première, l’essai est transformé ! La plate-forme d’apprentissage du breton en ligne, Edubreizh, a lancé le 9 juin dernier un Mooc (formation en ligne ouverte à tous) avec comme thème “La langue bretonne en cinq semaines pour des vacances réussies”. 1 173 personnes ont répondu à l’appel, faisant de cette initiative le plus grand cours de breton du monde. Fort de cette réussite, Edubreizh renouvelle l’action avec un second Mooc qui débutera début décembre sur le thème de Noël. Pour aider le site, vous pouvez verser des fonds sur leur Kisskissbankbank.

Comme tous les ans, le calendrier des sapeurs-pompiers de Rennes est paru. Avec une nouveauté : en 2015, les saperienpomperien Roazhon parlent breton, puisque ce calendrier est entièrement bilingue.

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BRETONS

Jean-Paul Ollivier dévoile sa Bretagne Bien qu’il ait mis au clou son micro du mois de juillet où il commentait avec brio les monuments et paysages traversés par le Tour de France, Paulo la Science ne s’arrête pas d’écrire, et encore moins de parler de la Bretagne ! Son dernier ouvrage, Histoire insolite et passionnée de la Bretagne, aux éditions Larousse, explore ce qui fait les particularités et forces de ce territoire qui s’est construit au fil des siècles. Ses propos sont accompagnés de reproductions de documents telles que des affiches, des Unes de journaux et même le discours annoté du général de Gaulle prononcé à Quimper en 1969 !

1 000 noms de famille en Côtes-d’Armor Si vous avez toujours voulu savoir ce que voulait dire votre nom de famille, d’où il venait, Jean-Louis Beaucarnot est là pour vous ! Dans ce horssérie, le généalogiste décrypte 1 000 patronymes existant dans le département. Avec ce magazine, les Corbel, Moal ou autres Urvoas n’auront plus de secrets pour vous.


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BRÈVES

L

DENIS BOURGES

e père du photographe Denis Bourges était médecin dans les Côtesd’Armor. En 2001, il l’a accompagné dans sa dernière année d’exercice, le suivant dans ses visites et observant sa relation aux patients. En 2008, Denis Bourges a poursuivi ce travail avec le remplaçant de son père. Le résultat : Médecin de campagne, un livre rassemblant ces photos émouvantes et sensibles, paru aux Éditions de Juillet, ainsi qu’une exposition visible au Carré d’art, à Chartres-de-Bretagne, jusqu’au 15 novembre.

20 ans de lycée pour Diwan Samedi 18 octobre, le lycée Diwan de Carhaix fêtait ses 20 ans en réunissant nombre d’anciens élèves, professeurs et sympathisants. Unique en Bretagne, les cours y sont dispensés en breton. Et il fait aujourd’hui partie des meilleurs lycées de France selon les classements de taux de réussite au bac. Une belle victoire pour cet établissement qui débuta avec dix-huit élèves en 1994, et qui en accueille 333 actuellement.

Gilles Servat se livre D’un festival au Québec, puis de concerts en entretiens, de Baden jusqu'à Rodez en passant par Hoëdic ou le festival Étonnants voyageurs à Saint-Malo, Gilles Servat se livre à la caméra de Simon Le Peutrec dans ce documentaire, Libre propos d’un homme sensible, où il s’exprime sur les langues et l’école, l’engagement, le conte ou l’avenir, entrecoupé d'intervalles musicaux.

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BRETONS

Le carton d’une télé corse L’ovni télévisuel corse ViaStella n’en finit pas de faire parler de lui, même jusqu’au gouvernement. Avec des audiences uniques en région (29,1% des téléspectateurs corses la regardent quotidiennement), le cas de la chaîne lancée en 2007 intéresse André Vallini, secrétaire d’État à la Réforme territoriale, qui a demandé à François Guilbeau, directeur de France 3, de lui expliquer les raisons de cette réussite. Des résultats qui font écho à la proposition de plusieurs parlementaires bretons pour un véritable service audiovisuel public décentralisé pour la Bretagne.

Un disque pour Krismenn et Alem en 2015 EMMANUEL PAIN

Médecin de campagne

En tournée toute l’année, récompensés par de nombreux prix, ayant mis le feu à Yaouank l’an dernier, les deux compères sortiront leur premier album en 2015. La souscription organisée sur le site Kisskissbankbank s’est révélée fructueuse, avec 5 450 € récoltés quand l’objectif était de 5 000. Une réussite pour Krismenn et Alem, alliant avec succès le trad’ et le beatbox.

Les colliers de l’Hermine 2014 Comme tous les ans, l’Institut culturel de Bretagne va remettre ses colliers de l’ordre de l’Hermine, le 15 novembre au château des ducs à Nantes. Il y aura cinq récipiendaires : Philippe Abjean (voir Bretons n°102), Erwan Vallerie, le militant et écrivain, Jacqueline Lecaudey-Le Guen, figure de la diaspora bretonne à Paris, les cinéastes et photographes Nicole et Félix Le Garrec, auteurs du documentaire Des pierres contre des fusils sur la lutte de Plogoff.


Claude Brumachon

La danse pour dépasser le handicap Directeur du Centre chorégraphique national de Nantes, Claude Brumachon mène avec l’Association pour adultes et jeunes handicapés de Loire-Atlantique (APAJH) un projet soutenu par Groupama : une création de danse contemporaine associant danseurs professionnels et adolescents du collège de La Durantière (44).

EMMANUEL PAIN

“N

ous vivons parfois des moments de grâce absolue !” Claude Brumachon a les yeux qui brillent quand il raconte. Son travail entamé avec les collégiens de La Durantière l’a “bouleversé”. Ce chorégraphe contemporain, directeur du CCN (Centre chorégraphique national de Nantes), mène en effet pour la troisième fois un projet original, sous l’impulsion de l’APAJH 44 (Association pour adultes et jeunes handicapés de Loire-Atlantique). Avec des danseurs professionnels et des élèves de quatrième du collège de La Durantière, il élabore une pièce ambitieuse. Particularité : ces adolescents sont tous porteurs d’un handicap, mental ou moteur.

“On ne parle pas du handicap avec les enfants. On leur parle du corps, de son langage, de ce qu’il peut raconter.” Un questionnement où, dit-il, les danseurs poussant leur corps à l’extrême et ces adolescents qui se heurtent aussi à leurs limites physiques se retrouvent… Le résultat, c’est Le Manoir. “Une hypothétique demeure, aux pièces tracées au sol, où les dix-huit enfants et les cinq danseurs professionnels vont entrer. Chaque pièce aura une qualité, une matière : une pièce collante, une lente, une rapide, une épaisse…” Pendant plusieurs semaines, Claude Brumachon et ses danseurs vont animer des ateliers au collège, travailler sur l’improvisation et la recherche des gestes. Puis, la pièce sera co-écrite avec les adolescents, lors de deux semaines de travail au Centre chorégraphique. Et, fin mars, deux représentations sont prévues au festival Handiclap. Dépassement, confiance, complicité, recherche de soi, épanouissement… Les mots de ceux qui travaillent au quotidien avec ces enfants fusent pour raconter le changement qui s’accomplit alors en eux. “Depuis la naissance, le regard porté sur eux est la plupart du temps négatif. Prendre conscience

que, avec leur corps, ils peuvent être dans la création, dans la beauté, cela inverse les choses et ils sont valorisés. Le handicap, je ne dirais pas qu’il disparaît, mais on l’oublie. Car on se retrouve avant tout dans un spectacle”, explique ainsi le président de l’APAJH 44. Ici, l’ambition artistique est réelle. On ne parle ni de kermesse ni de pitié. Mais “d’art”, de “dignité” et de “citoyenneté”. Et c’est ce qui a séduit Groupama. L’entreprise a en effet mis en place des actions de mécénat, avec un axe fort : favoriser l’accès des personnes handicapées à la culture. Cette année, ce sont les thématiques photographie et danse qui étaient particulièrement soutenues. C’est à ce titre que le projet de Claude Brumachon a reçu une aide de 5 000 euros. Et, chez Groupama, on est les premiers surpris par le nombre de demandes d’aide et l’enthousiasme des projets présentés : “Le mécénat croisé culture et handicap n’est pas quelque chose de très développé. Nous répondons donc à un vrai besoin”.

Chiffres clés

Groupama Loire Bretagne 30 projets soutenus en 2014 dans le cadre du mécénat Culture et handicap.

40 000 € d’enveloppe globale distribuée.

COMMUNIQUÉ

Groupama, un assureur pas comme les autres


BRÈVES

EMMANUEL PAIN

Pierre Toulhoat s’en est allé

L’

artiste quimpérois est décédé le 13 octobre dernier, à l’âge de 91 ans. Inclassable, connu et reconnu pour ses bijoux, il toucha à tout dans son atelier de Quimper : de la céramique aux vitraux en passant par la sculpture. Bretons lui avait consacré un portrait dans le n°60. Il fut également décoré en 2001 de l’ordre de l’Hermine, dont il avait dessiné la médaille.

Le Centre Alma à la mode bigoudène !

Samba de Delphine Coulin à l’écran Servi par un casting prestigieux (Omar Sy, Charlotte Gainsbourg), le dernier film d’Éric Toledano et Olivier Nakache (les réalisateurs d’Intouchables) est inspiré du livre Samba pour la France de la Lorientaise Delphine Coulin (Bretons n°92). Il fait se télescoper deux personnes au parcours totalement différent : Samba, Sénégalais en France depuis dix ans qui se bat pour obtenir des papiers, et Alice, cadre supérieure qui essaye de donner un sens à sa vie en travaillant comme bénévole dans une association d’aide aux sans-papiers. Dans les salles depuis le 15 octobre dernier.

Un “référendum” pour la réunification Après la marinière version grande capeline en 2013, ce sont les Bigoudènes version dentelle qui sont à l’honneur cette année dans la communication du centre commercial Alma, à Rennes. Attirant de plus en plus de consommateurs de toute la Bretagne, le premier centre commercial breton (créé en 1971) continue de jouer sur l’image mode et décalée de la Bretagne pour attirer de nouveaux clients dans ses allées.

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BRETONS

Alors que le débat sur la réforme territoriale ne réunifie toujours pas la Bretagne, malgré les manifestations et le combat de nombreux élus, une nouvelle plate-forme a vu le jour. “Dibab – décidez la Bretagne”, c’est son nom, vise à donner la parole à tous les citoyens en organisant débats, rencontres, ainsi que des votations (référendums consultatifs) citoyennes sur la question de la réunification. La première aura lieu dans la commune de Saint-Viaud (44) le dimanche 30 novembre.

Facebook se met au breton ! Enfin, serait-on tentés de dire ! Après une mobilisation ayant réuni plus de 15 000 internautes sur le réseau social en 2011 dans le groupe “Facebook e brezhoneg”, le géant américain a annoncé le 5 octobre dernier le début des travaux de traduction. Sous forme participative, les utilisateurs peuvent, s’ils le veulent, proposer leurs traductions qui sont ensuite soumises au vote. Avec le lancement du .bzh, 2014 est une année faste pour la langue bretonne sur la toile.

Nantes en Bretagne ? Dominique Le Page, professeur d’histoire à l’université de BourgogneDijon, vient de publier Nantes en Bretagne ?, un ouvrage complet sur cette question. De l’intégration de la cité des ducs et son comté à la Bretagne jusqu’à nos jours, l’auteur visite l’histoire et le présent avec de nombreuses photos, cartes, apartés sur les personnages ayant cousu ou décousu cette relation qui fait tant débat aujourd’hui. Un livre à mettre entre les mains de ceux qui s’intéressent à la question de la réunification, pour mieux en comprendre les enjeux.

Erratum Dans l’article consacré à Corentin Biette, le créateur de Breizhbook, nous écrivions que Plougasnou est léonarde. Conscient de cette erreur et après vos nombreuses remarques, oui, Plougasnou est et reste bien trégorroise.


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DANS LE RESEAU RENAULT OUEST

Concessionnaires et agents participants


L’entretien actu Paul Jorion

“Le capitalisme est en très grand danger” Paul Jorion est un économiste atypique. Anthropologue de formation, il a travaillé dans le secteur financier aux États-Unis et a annoncé avant tout le monde ce qui est devenu la crise des subprimes. Depuis, installé à Vannes, il tient un blog particulièrement suivi et vient de publier un livre de conversations avec l’économiste Bruno Colmant : Penser l’économie autrement. PROPOS RECUEILLIS PAR MAIWENN RAYNAUDON-KERZERHO PHOTO EMMANUEL PAIN

BRETONS : La dernière fois que nous avions échangé (voir Bretons n°62), vous étiez installé à Vannes et vous viviez grâce aux dons des lecteurs de votre blog. Où en êtes-vous aujourd’hui ? PAUL JORION : On a eu l’amabilité de me proposer du boulot, un demi-poste d’enseignant à l’université de Bruxelles. Cela me permet d’éliminer la solution qui consistait à avoir accepté les dons des lecteurs. Je partage mon temps entre Bruxelles et Vannes. Vous venez de publier un livre de conversations avec l’économiste Bruno Colmant. Une des choses sur lesquelles vous semblez être d’accord, c’est que malgré son habillage mathématique, l’économie n’est pas une science exacte ? Non. Et le fait que ce ne soit pas une science exacte explique en grande partie pourquoi les économistes formés dans les plus brillantes facultés n’ont pas vu venir la crise. Il n’y a que les gens qui étaient un peu marginaux par rapport à cette science économique, qui comme moi avaient été formés sur le tard en travaillant dans des banques, qui étaient des économistes extrêmement critiques par rapport à leur discipline, qui l’ont vue arriver.

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BRETONS

Vous avez ainsi mis en avant, en étudiant en tant qu’anthropologue les pêcheurs de Houat, que l’une des premières lois économiques, qui veut que les prix soient fixés en fonction de l’offre et de la demande, n’est pas correcte ? C’est là que je suis entré dans une réflexion critique par rapport à la science économique. Ça m’a pris totalement par surprise. Je n’imaginais pas une seconde que la loi de l’offre et de la demande dans la formation des prix n’apparaîtrait pas ! Et surtout, je me suis aperçu qu’il n’y avait pas d’alternative ! On ne disait pas qu’il y avait plusieurs théories. Il n’y avait que celle-là, à prendre ou à laisser, qui s’était imposée depuis le 18e siècle à une époque où personne ne se préoccupait vraiment de vérifier les hypothèses. Pour vous, c’était une question de rapport de force et de perpétuation d’un ordre social ? En gros, les prix sont fixés pour que le pêcheur et sa famille puisse survivre…

Tout à fait. Là, vous redécouvrez qu’Aristote, en parlant de la formation des prix, avait déjà décrit cela comme ça. Aristote n’est pourtant pas vu comme un économiste… Ce qui a changé, c’est que les milieux financiers ont mis de plus en plus de pression pour qu’une théorie apparaisse et qu’elle soit favorable à la manière dont eux voient les choses. Énormément d’argent a été injecté par les milieux financiers, à la fin du 19e siècle, pour contrer une idée qui avait été émise, même pas par Marx mais par David Ricardo, un grand économiste, qui était agent de change et spéculateur. Il avait dit que la production de richesse apparente du capital était en fait une spoliation de quelqu’un qui avait travaillé quelque part et dont on avait pris une partie des revenus qui auraient dû lui revenir. C’est quelque chose de très évident, mais il y a eu une réaction très violente des milieux financiers qui ont encouragé des recherches mathématiques et pseudo-mathématiques, qui ont abouti aux sciences économiques que l’on connaît maintenant. Et qui tendent à faire croire que le capitalisme est immortel. Une affirmation qui vous laisse assez sceptique… Oui, tout à fait. Il est en très grand danger en ce moment. La démarche s’est faite dans l’autre sens. On n’a pas prouvé que le capitalisme est immortel. On a pris l’immortalité du capitalisme comme étant une hypothèse, un postulat, et on a déduit de ce postulat une attitude des êtres humains qui serait compatible avec ce postulat. On a


circulaient en 2013. On nous expliquait qu’il y avait 85 personnes qui étaient aussi riches que la moitié de l’humanité. En une année, ce chiffre de 85 est tombé à 67, ce qui montre à quelle vitesse la concentration se fait. Et vous citez également un chiffre donné par le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz ? Il nous aurait épatés en disant que 100% des richesses produites en un an aux États-Unis étaient passées aux mains des 1% les plus riches. Mais ce n’est pas même cela, c’est 110% ! C’est-à-dire que pour leur accorder cette somme, il a fallu rogner sur les salaires. C’est pour ça que, quand on nous donne les chiffres aujourd’hui sur le revenu médian aux États-Unis, on voit qu’il est en baisse depuis ces vingt dernières années… Sur la question de la dette, on entend souvent dire qu’on a vécu au-dessus de nos moyens, que chacun doit donc se serrer la ceinture. Vous dites qu’on n’a pas vécu audessus de nos moyens, mais qu’on paye les erreurs de nos dirigeants ? Tout à fait. Cet argument, quand on regarde l’endettement des États, il ne tient pas pour la période avant 2008. Ce n’est qu’à partir de 2008 que la dette explose. Pourquoi ? Parce que les États sont allés solder non seulement les gens qui subissaient des pertes économiques, les conséquences d’une récession, mais aussi les paris spéculatifs faits entre banquiers entre 2001 et 2008. La différence entre 1929 et 2008, quand il y a un crash, c’est qu’en 1929, les États ne sont pas venus au secours des plus riches, ils n’ont pas épongé l’ardoise. Ce qui a accéléré cette concentration des richesses, c’est que les États ont payé l’ardoise, rubis sur l’ongle, ils ont payé tous les paris spéculatifs. défini l’homme rationnel économique comme étant celui qui assure l’immortalité du capitalisme.

entre les groupes, que les salariés puissent avoir des intérêts qui ne sont pas ceux des dirigeants d’entreprise, etc.

Vous parlez d’une psychologisation de l’économie : on réduit tout au comportement individuel… Le fait qu’il soit chômeur, dirigeant d’entreprise ou salarié n’a pas d’importance : l’homme est un être rationnel, qui a des comportements économiques, qui calcule l’utilisation de ses ressources par rapport aux objectifs qui sont les siens, etc. Du coup, disparaît l’idée qu’il pourrait y avoir des conflits

Selon vous, la crise n’est pas derrière nous, mais devant nous ? Ce qui dirige le système économique en ce moment, c’est la concentration de la richesse entre les mains de quelques personnes. Il y avait des chiffres qui

Vous proposez donc d’interdire purement et simplement la spéculation ? Ce n’est pas une utopie. Une utopie, ce n’est pas quelque chose qui a déjà existé. L’abrogation des lois qui interdisaient toute spéculation est relativement récente : 1885 en France, ce n’est pas si vieux. C’est tout à fait possible, il suffit de remettre en application les articles qui l’interdisaient. Pour la dette, vous conseillez une cessation de paiement généralisée, que les États en un week-end annulent leur dette ?

BRETONS

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L’entretien actu Oui. Parce qu’on ne peut pas continuer. Aux États-Unis, quand on fait le calcul, les recettes fiscales auront bientôt cessé de suffire pour payer simplement le montant des intérêts sur la dette nationale. En France, le paiement des intérêts est un poste qui se situe un peu au-dessus de la défense nationale et un peu en dessous de celui de l’Éducation nationale. Ce sont des paiements extrêmement importants. Et des facteurs de disparité sociale : les gens les plus pauvres paient en général leurs impôts et les gens les plus riches arrivent à faire ce qu’ils appellent de l’optimisation fiscale, c’est-à-dire à payer moins d’impôts, et ceci essentiellement par des assurances-vie et par d’autres moyens, comme des obligations. C’est à eux que cet argent est versé ! Au titre d’intérêts sur les obligations, ou comme déten-

impossible. Et les bénéfices de la machine qui, elle, va travailler 24 heures sur 24, dont la durée de vie sera très importante, serviront uniquement à deux choses : payer des dividendes aux actionnaires de cette entreprise et multiplier par ce qu’on voit maintenant, un facteur de 450 en moyenne, les gratifications des dirigeants de l’entreprise. On parle de spéculation, mais on ne parle jamais de surprofit. Or il y a des profits qui sont d’un montant scandaleux, qui n’ont aucune justification. Car vous rappelez qu’un actionnaire, en théorie, n’est pas propriétaire d’une entreprise ?

“110% des richesses produites en un an aux États-Unis sont passées aux mains des 1% les plus riches.” teurs d’assurances-vie importantes. Non, une partie de la population a vécu au-dessus des moyens de l’autre ! C’est tout ! Vous proposez également une allocation universelle, ou en alternative, que chaque homme dont le travail est remplacé par une machine reçoive une rente à vie… À partir de la richesse produite par cette machine, oui. C’est la formulation qu’on utilisait au 19e siècle. Moi, j’envisage davantage ce qu’on appellerait une taxe sur la productivité des machines. Quand il y a remplacement d’un être humain par un robot, on confie simplement à celui qui a été remplacé la tâche de retrouver un emploi dans un marché qui vient de se réduire en taille. C’est

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BRETONS

Non. C’est une chose que l’on répète, qu’on trouve même dans les livres d’économie, mais qui n’est pas vraie. Dans le vocabulaire qu’on utilisait au 18e siècle, c’est quelqu’un qui fait des avances à une entreprise sur ses résultats. C’était comme le système des parts sur les bateaux de pêche. Ça n’a rien à voir avec la propriété privée. Ce sont des économistes idéologues, comme Milton Friedman, qui ont répandu cette idée que les actionnaires étaient propriétaires. Mais, quand on regarde en droit, ce n’est absolument pas vrai.

Vous expliquez que l’on consomme 1,6 planète par an, alors que bien évidemment on n’en possède qu’une. Êtes-vous alors un partisan de la décroissance ? Je souligne que nous sommes dans un système capitaliste et que nous devons payer des intérêts sur les sommes qui sont empruntées. Or, dans le système financier et monétaire que nous avons, cet argent payé pour les intérêts doit être produit à partir d’une nouvelle richesse. Donc, si vous dites qu’il ne faut plus de croissance, il faut en tirer les conséquences : s’il n’y a plus de croissance, il n’y a plus de paiement d’intérêts sur les dividendes. C’est inscrit dans notre système, et même dans les institutions européennes, c’est la règle d’or de stabilité financière qui dit bien : si un État veut emprunter à un niveau de taux d’intérêt, il faut que cet État sache qu’il lui faut une croissance supérieure à ce taux, sans quoi, sa dette s’accroît. C’est un simple calcul arithmétique. La crise écologique pourrait donc remettre en cause le système capitaliste ? Il me paraît effectivement très difficile de ne pas remettre en cause certains fondements du système capitaliste. Parce que dans Le Capitalisme à l’agonie, j’ai montré que si on décrit le comportement humain dans les mêmes termes que ceux qu’on utilise pour une espèce animale, on peut dire que nous sommes une espèce colonisatrice et opportuniste. Opportuniste : nous avons beaucoup de ressources pour changer notre comportement si nécessaire. Mais colonisatrice : nous envahissons notre environnement et nous l’épuisons, et nous devons ensuite trouver une solution de rechange. Nous avons le choix : aller habiter sur Mars ou sur la Lune, ou modifier notre comportement. Le choix est très simple. Vous pensez qu’on va le faire ? La seule chose que je peux dire, c’est que je mets toute mon énergie et tout mon temps de veille à essayer de le faire. Est-ce que ça va réussir ? Je ne connais pas la réponse. Je l’espère. J’espère que, dans 1 000 ans, on aura encore le plaisir de lire Aristote. Vous expliquez que pour cela, il faudrait que les dirigeants écoutent plutôt les philosophes que les financiers… Oui. Platon en a déjà parlé il y a 2 500 ans, mais ça n’a pas eu lieu jusqu’ici.

Penser l’économie autrement, Paul Jorion et Bruno Colmant, Fayard, 256 p., 18 €


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Les plus beaux marchés de Noël d’Europe


SOCIÉTÉ 14

BRETONS


Benoît Careil

Billy ze kick s’invite en mairie En mars, Benoît Careil a été élu adjoint au maire de Rennes. Cofondateur de Billy ze kick, groupe déjanté des années 1990, disque d’or avec son tube Mangez moi !, l’écolo compte secouer la culture rennaise. PAR BENJAMIN KELTZ PHOTO GWÉNAËL SALIOU

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es baskets crissent sur le plancher briqué de l’hôtel de ville de Rennes. Ses éclats de rire spasmodiques résonnent entre les murs ornés de dorures de la salle des mariages. Tandis que le photographe de Bretons cale son matériel pour lui tirer le portrait, Benoît Careil raconte sa première fois, niché au sommet de ce pupitre où, seuls, le maire et ses adjoints trônent les soirs de conseil municipal. C’était il y a seulement quelques mois. Pourtant, le nouvel élu aux affaires culturelles en parle comme un vieux roublard. Sûr de lui. Le quinquagénaire à la paire de lunettes noires soulignant son crâne chauve n’a ressenti rien d’autre qu’une “grande légitimité”. Quinze ans de militantisme écolo au compteur, ça compte aux yeux des “copains” verts. Une carrière de musicien à succès, voilà un argument suffisant pour convaincre, lors des tractations d’entre-deux-tours des municipales entre son parti EELV et les socialistes, de lui confier le portefeuille culturel. “OBSÉDÉ PAR LA RÉUSSITE”

Dans la ville rock, Benoît Careil reste Mister Bing, cofondateur du groupe rennais Billy ze kick. Souvenez-vous du tube de l’année 1994, Mangez moi ! Mangez moi !, cette ode aux champignons hallucinogènes qui a tourné en boucle sur les ondes françaises. Ce mélange envoûtant de sonorités reggae teintées de rock, dans lequel les caisses claires claquent et les riffs de guitares wah wah sonnent comme des ritournelles enivrantes, est né sur ses samplers. Cet été 1994, tout l’Hexagone veut sa dose de Billy ze kick. Même Michel Drucker réclame la venue des Bretons dans son émission dominicale. Le groupe préfère finalement semer la zizanie sur le plateau de Michel Field sur France 2 avant de se produire à Nulle part ailleurs devant Philippe Gildas et Antoine de Caunes, hilares. Signé et distribué par le mastodonte PolyGram, le groupe écoule 300 000 CD en quelques mois et devient l’une des formations françaises la plus rapidement disque d’or. En politique comme en musique, Benoît Careil goûte à la réussite après une longue maturation que l’on oublie à la lueur du succès. Avant de remplir l’Olympia, cet étudiant en fac de

sociologie, guitariste reconverti bassiste puis claviériste pour fuir l’avant-scène, écume les groupes locaux. Tous périclitent. “J’ai toujours eu beaucoup d’ambition. J’étais obsédé par la réussite. Je ne pouvais pas travailler avec des musiciens qui ne se consacraient pas à 100 % au projet artistique. Je voulais tenter ma chance à fond”, se souvient celui qui, gamin, rêvait d’être le nouveau Maxime Le Forestier. Avec sa complice de toujours, la chanteuse Nathalie Cousin, ce fan du groupe américain De la soul fonde Billy ze kick, à la fin des années 1980, pour dénoncer la société de consommation, vomir sur la télévision, prôner la fête et ses excès comme antidépresseur... “Nous étions des jeunes au chômage qui avaient des choses à dire, fumaient quelques pétards et voulaient s’amuser. Lorsque nous décrochions une ou deux dates dans le Sud, nous y campions trois semaines, persuadés de trouver d’autres concerts sur place. S’il fallait, on jouait dans la rue. Les copains embarquaient avec nous”, se souvient ce fils d’un professeur et d’une mère au foyer, impliqués dans des associations d’action catholique ouvrière. “Au fond de nous, nous avions la conviction de composer une musique différente qui pouvait marcher.” Après plusieurs années au RMI à vagabonder de café-concert en petite scène

française, la bande à Careil n’y croit pourtant plus. En guise d’adieu, Mister Bing, qui s’amuse davantage comme manager que comme musicien, rassemble tous les enregistrements consignés sur cassette pour composer un CD qu’il expédie comme un ultime SOS artistique. Aux manettes de la sacro-sainte émission La Grosse Boule, diffusée sur Nova, Édouard Baer et Ariel Wizman, tombent amoureux de Mangez-moi ! Mangez-moi ! et des autres chansons du set qu’ils diffusent en boucle, imposant Billy ze kick sur l’autoroute du succès. “MON BILAN ? À LA FIN DU MANDAT”

Preuve qu’un artiste “doit développer son style et rester indépendant” pour percer, selon Benoît Careil. Vingt ans plus tard, Mister Bing baigne pourtant dans le consensus politique permanent. Paradoxal ? L’élu qui veut “démocratiser la culture” assume : “En politique, le compromis est sain et nécessaire. Dans les limites de l’entendable, bien sûr. Soit tu acceptes, soit tu vis sur une île. J’y vois le socle de notre démocratie”. Fondateur du Jardin moderne, centre de ressources pour les musiciens locaux, et d’Adrénaline, association phosphorant autour de la fête et des jeunes dans les années 2000, l’écologiste sait manœuvrer avec tact et doigté. S’il a retenu une leçon de ses années Billy ze kick, c’est que la réussite est terriblement fragile. Une plainte pour incitation à l’usage de stupéfiant, déposée par un policier nantais, a suffi à faire taire le buzz autour du groupe. Aujourd’hui, hors de question de fanfaronner sur sa nouvelle carrière politique : “J’ai accédé aux responsabilités sans renier mes engagements politiques. Voilà une belle fierté. Mon bilan d’élu ? Je le ferai à la fin du mandat. Pas avant”.

BRETONS

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PORTRAIT

Marianne Duigou

Las Vegas kenavo Fini les “fiestas souvenirs” et les “soirées 70-80”. À 93 ans, Marianne Duigou vient de fermer Le Spot, sa discothèque ouverte en 1969, qui a vu danser Nicoletta, Tri Yann et des générations de Bretons. Elle a tenu pendant quatre décennies cette boîte qui a valu au petit bourg de Spézet son surnom de Las Vegas breton. PAR LUCIE LAUTREDOU PHOTO GWÉNAËL SALIOU

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arianne ne voulait pas que tout s’arrête. Sur la porte de bois du Spot, soigneusement peinte en bleu, une affiche témoigne des dernières soirées de la boîte de Spézet, en CentreBretagne : “Juin, le mois de vos 20 ans !” Un programme nostalgique pour les ultimes nuits sous le règne de la Régine bretonne. Désormais le temps est figé autour de la piste de danse. Les serpentins pendent à des stroboscopes qui brûlent de ré-illuminer la piste. Tout est prêt à repartir. Pourtant la fête est finie depuis le 15 juin. “On n’aurait pas dû fermer, c’est mon fils qui a décidé”, rouspète la nonagénaire. Après des nuits passées dans la cabine de DJ à faire danser la Bretagne dans la boîte de sa mère, Jo, 68 ans, a choisi de se consacrer à ses passions : rallye, musique et voyages. Sans offrir d’héritier. Une situation qui chiffonne la chef d’entreprise un brin matriarcale. Marianne écrase le poids de ses 93 ans d’une énergie imposante. Son petit corps frêle, emballé dans un chandail beige, a l’œil affûté, la parole assurée et le geste vif. Quand sa silhouette s’anime, elle révèle une femme joviale mais ferme, et l’on devine la videuse exigeante qu’elle était. Elle a consacré sa vie au travail. Après des études de couture à Quimper, elle s’installe à Paris avec son mari. Leur fils, Jo, naît en 1945 mais l’union avec le “coureur de jupons” ne dure pas et Marianne revient dans le Finistère trois ans plus tard, garçon sous le bras, séparée puis divorcée. Elle coud jusqu’à l’achat d’un petit café en 1964. “Depuis, je n’ai plus jamais fait de couture”, dit-elle. UNE OUVERTURE FOLKLORIQUE

Fille de commerçants, issue d’une “famille de huit gosses où il y avait toujours des jeunes et de la musique”, Marianne a le sens des affaires et de la fête. Elle acquiert un juke-box, propose des jeux et son bistro devient incontournable. Il faut agrandir. Les travaux d’une salle de jeux sont lancés en 1969 dans une bâtisse attenante. Des plans à la réalité, les lieux sont trop vastes. Résultat : ce sera un dancing. Ouverture le 24 décembre 1969. “Année érotique”, rappelle Jo. Les travaux durent et l’équipe a toujours le balai en main quand arrivent les clients. Mère et fils en rient encore. “Une ouverture folklorique est signe de longévité”, devise Jo.

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Commence “l’époque de rêve, les années 70”, se souvient le fils, “les minijupes, la pilule, la drague… Un grand moment de liberté”. Pour la boîte qui peut accueillir jusqu’à 250 personnes et ouvre alors tous les jours, la grande époque s’étale entre 1970 et 1980. “Ça ne désemplissait pas, les gens sortaient et il y avait les noces”, bavarde Marianne, “il fallait voir les jeunes qu’il y avait, les gens venaient de partout, de Quimper, Châteaulin, Pleyben… Même de Paris pour le week-end, le camping était plein et les hôtels tournaient à fond.” “C’est à cette époque qu’un reporter de Ouest-France baptisera Spézet le Las Vegas breton”, raconte Jo. “JAMAIS PEUR”

Il trouve ses disques à Quimper, Paris ou Londres et offre un “quart d’heure spézétois”, à base de musique bretonne. Sa programmation est remarquée jusqu’à Paris. “On avait de l’avance dans notre petit patelin de campagne, Spézet était à l’avant-garde”, dit le sexagénaire. Même Nicoletta viendra danser la gavotte sur un plancher foulé par Stéphane Grappelli, les sœurs Goadec, Tri Yann... Marianne n’a jamais dansé au Spot : “ C’est moi qui faisais danser les autres”. Elle a droit à “toutes les confidences des gars et des filles” et travaille son image. Coquette, c’est “la miss chaussures et miss sacs à main” du coin. Elle s’offre même un manteau de fourrure, mais pas pour séduire. “Je n’avais pas besoin de

plaire à un homme, j’avais du personnel qui était valable”, balaye la patronne qui a employé jusqu’à neuf salariés, “un homme aurait dérangé.” Douée d’une bonne mémoire des visages et n’ayant “jamais peur”, elle reste à l’entrée de la boîte, accueille les noctambules et refoule les “interdits de séjour” avec une fermeté acquise sur le tas. “On apprend à se conduire. Il faut de l’autorité, je n’en avais pas au départ mais c’est venu, on est bien obligé”, dit-elle. "LES JEUNES NE SONT PAS HEUREUX”

“Marianne a eu du dur avec certaines personnes qui étaient méchantes avec elle quand elle leur interdisait l’entrée”, commente Jacqueline, propriétaire de La Crémaillère, bar-restaurant voisin. “Si elle interdisait l’entrée, c’était presque à vie, elle n’oubliait pas et elle avait l’œil. Ce n’est pas qu’elle ne pardonnait pas, elle pardonnait sûrement à certains, mais pas facilement parce qu’il fallait bien mettre de l’ordre.” Les dernières années, la boîte n’ouvre plus que le samedi, et les temps sont durs. “Aujourd’hui, les jeunes ne sont pas heureux, on ne sait pas ce qu’il va advenir, ils sont sans boulot, j’ai vu le déclin”, observe la retraitée devant une tasse de thé au lait, seule addiction confessée. Les villages se vident, les gens sortent moins et les mœurs changent. “Les jeunes arrivent bourrés, il y a des bouteilles partout et des bières dans les sacs des filles.” Elle se tape la tempe du bout des doigts, “c’est à se demander si on a affaire à des gens normaux”. Puis passe la loi anti-tabac, “la fin de tout”, la décision qui “casse l’ambiance”, les clients qui “traînent sur le trottoir”, les nuisances… La propriétaire a des visites de repreneurs potentiels, mais “rien ne se vend alors que tout est à vendre à Spézet, même l’église est à retaper !”, tempêtet-elle avant une prédiction : “Spézet va mourir maintenant”.


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MUSIQUE

Glenn Jegou

Noz’n’roll Voix brittophone de France Bleu Armorique, élu rennais à la jeunesse, Glenn Jegou se dresse comme un ardent défenseur de la culture bretonne. En novembre, le volubile programmateur de Yaouank prépare la seizième édition de son bébé, le plus grand fest-noz breton. PAR BENJAMIN KELTZ PHOTO EMMANUEL PAIN

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i un jour, vous le croisez dans un troquet et qu’il vous propose de jouer la prochaine tournée de bières à un blind-test de musique bretonne, refusez. Abandonnez tout de suite. Fuyez vite. Glenn Jegou est intarissable. Un docteur ès culture celtique. Le Rennais parle de la nouvelle scène régionale comme un œnologue dissèque un vin et se souvient d’artistes traditionnels que, seule, une poignée d’érudits garde en mémoire. D’autant plus qu’à quelques jours du festival Yaouank, rassemblant, du 3 au 22 novembre, 12 000 personnes dont 8 000 danseurs le dernier soir, l’oreille du responsable de la manifestation rennaise est aiguisée comme jamais. Pour concocter la programmation du plus grand fest-noz breton, Glenn Jegou a passé en revue tout ce qui se fait de mieux. Seize ans que Yaouank existe. Seize ans que ses choix musicaux enflamment le parquet du MusikHall de Rennes. Lorsqu’on lui demande s’il n’éprouve pas une once de lassitude, le patron de Skeudenn bro Roazhon, fédération des associations bretonnes du pays de Rennes en charge de la manifestation, vous dévisage de ses yeux ronds. “Comment pourrais-je en avoir marre ?”, s’étonne le quadragénaire. “La musique bretonne aiguise en permanence ma curiosité. Certes, je sors moins depuis que je suis père. Avec Internet, j’écoute tout ce qui se fait de nouveau. Je m’intéresse notamment aux vidéos qui retranscrivent l’ambiance et l’énergie d’une formation.” CARTE BLANCHE POUR LA CULTURE BRETONNE

Depuis la première édition, la voix brittophone de France Bleu Armorique qui a succédé à Denez Prigent en 1993, mûrit une affiche métissée et contemporaine censée convertir les 1525 ans à la musique bretonne. Voilà le cahier des charges de Yaouank, signifiant jeune en breton, rédigé en 1999 par celui qui n’était alors qu’un emploi jeune au sein de Skeudenn bro Roazhon. “À l’époque, la municipalité nous a laissé carte

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blanche. On aurait pu faire une plaquette ou un débat. J’ai proposé un grand festnoz. J’étais convaincu que ça marcherait.” Lors de la première tentative, le festival et ces centaines de bénévoles espèrent 2 500 danseurs. Ils en accueillent le double. RENNES, UNE VILLE BRETONNE ?

Édition après édition, Yaouank s’impose comme un évènement incontournable de Bretagne. Chaque année, ce mélomane, bercé au son du festival des Trans Musicales, s’amuse à désamorcer l’étonnement des journalistes qui découvrent le festival. Non, la culture celtique n’est pas vieillotte. Oui, elle peut sonner punk lorsque les Ramoneurs de menhirs, chouchous du festival, s’écorchent les doigts sur leurs guitares électriques et virer au rap quand Krismenn, chanteur de kan-ha-diskan, mêle sa voix à celle d’Alem, vice-champion du monde de beatbox. “L’image folklorique et passéiste de la musique bretonne a la vie dure. La Bretagne s’est urbanisée. Les créations artistiques aussi”, insiste Glenn Jegou avant de paraphraser Erik Marchand : “À force de dire qu’on


dépoussière la culture bretonne, elle doit sacrément bien briller !” Il en faut plus pour titiller sa bonhomie et faire taire ses éclats de rire qui rythment l’interview. On tente une pique sur le manque de bretonnitude de la capitale régionale. Le globetrotteur au crâne rasé, vêtu de noir, se crispe. Il avoue son “chauvinisme” et défend “sa” ville : “J’ai vécu mon identité bretonne ici. Rennes est un carrefour incroyable où tous les étudiants de la région s’arrêtent un jour. Cette ville est beaucoup critiquée parce que jalousée !” Glenn Jegou dégaine ses arguments comme on récite une poésie pour démystifier la crise identitaire de la capitale bretonne qui compte 700 élèves scolarisés en enseignement bilingue, applique le deuxième niveau de la charte Ya d’ar Brezhoneg, s’apprête à accueillir en 2015 une manche du concours de première catégorie des bagadoù... CONVAINCRE NATHALIE APPÉRÉ

Quand il parle avec autant de conviction, on le croirait en campagne électorale. Il faut dire que Glenn Jegou est devenu un vrai politique. À l’instar de sa mère, Lena Louarn, viceprésidente du conseil régional en charge des langues bretonnes, le militant associatif a rejoint la majorité socialiste. Conseiller municipal et communautaire rennais en charge de la jeunesse depuis 2008, l’élu refuse, cependant, de siéger dans les commissions liées à la culture bretonne. Un tel investissement le contraindrait, pour éviter tout conflit d’intérêt, à abandonner ses fonctions de directeur de Skeudenn bro Roazhon et le priverait de son bébé, Yaouank. L’édile se contente de peser, en coulisse, sur les problématiques régionales. Pas assez pour convaincre Nathalie Appéré, maire de Rennes, de défendre une Bretagne à cinq départements. “Elle respecte mon opinion. Moi, je ne comprends pas la sienne”, grimace-t-il. “Je ne vais quand même pas claquer la porte pour un seul et unique désaccord. Nous travaillons tellement bien ensemble.” Trêve de sujet de discorde. Glenn Jegou vérifie son emploi du temps surchargé et conclut : “J’ai encore un peu de temps. On va boire une bière ?”

Yaouank, du 3 au 22 novembre, au MusikHall à Rennes.

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GASTRONOMIE

Xavier Pensec et Mika Kobayashi

L’amour du sushi

C’est à Brest que se trouve l’un des tout meilleurs restaurants de sushis de France. Cet art culinaire, si japonais, est sublimé par ces deux amoureux des produits de la mer. PAR TANGI KERMARREC PHOTOS EMMANUEL PAIN

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ue des Onze-Martyrs à Brest se trouve un véritable atelier d’alchimiste. Dans leur restaurant Hinoki, Xavier Pensec et sa femme, Mika Kobayashi, se dévouent à l’art du sushi. Acier, pierre à aiguiser, feu, sont là pour sublimer ce que la mer offre de meilleur. Des clients viennent spécialement de Paris, Marseille, d’Espagne ou des Pays-Bas pour goûter dorade, lieu, sardine, poulpe ou ormeau délicatement posés sur une boule de riz. Vivre une expérience culinaire et esthétique. “La semaine dernière, deux clients m’ont dit qu’ils avaient l’impression d’avoir voyagé sous l’océan. Chaque poisson leur racontait une histoire. Le maquereau donne des émotions, on ne peut pas les décrire, c’est gourmand, gras, fondant en bouche... Avec le coquillage, on va entrer dans un autre monde, plus iodé. Il y a une résonance avec les vies de l’océan.” Mika, consultante culinaire et guide de Xavier dans cette aventure, sourit : “La vie au Japon est rythmée par la nature : les tempêtes, les tremblements de terre, les périodes de forte chaleur ou de grand froid. Nous avons développé des capacités sensorielles très fortes. Ça s’applique au poisson”. DES POISSONS SÉLECTIONNÉS UN PAR UN

Ils se sont rencontrés au Japon. Entre deux cours à la Sushi Academy de Tokyo, Xavier a aperçu Mika dans un salon de thé. Du pays du Soleil-Levant, ils sont arrivés dans la Cité du Ponant. À Mika, l’esprit et la capacité de réveiller un talent qui sommeillait dans le Douarneniste de cœur. À Xavier, la force créatrice dans les mains. Depuis leur arrivée en Bretagne et l’ouverture d’Hinoki, ils sillonnent les ports du Finistère à la recherche des plus beaux poissons, des meilleurs fournisseurs. Le souci du détail est poussé à l’extrême : pour garder en vie un poulpe

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acheté le matin au Guilvinec, ils improvisent un vivier dans leur voiture en remplissant une bassine d’eau de mer pour que le céphalopode soit au maximum de sa fraîcheur au moment de sa préparation au restaurant. “Nous sélectionnons chaque poisson et chaque coquillage pièce par pièce. Sardine par sardine ! C’est un travail énorme. Il faut à chaque fois vérifier la technique de pêche, la façon dont le poisson a été tué. S’il a été saigné, vidé immédiatement, qu’il n’y ait pas de sang dans les yeux ni sur le corps, s’il a été bien conditionné, pas tassé dans un bac. Il faut vérifier le taux d’humidité de la chair. Si le poisson a été trop longtemps dans la glace, il aura tendance à dégorger. C’est très difficile de s’y retrouver, même avec du poisson pêché à la ligne. Il suffit que la palangre soit restée trop longtemps dans la mer. Au final, sur un étal de poissonnier, seuls 5% des produits peuvent être mangés crus. C’est du sur-mesure : on ne prend des clients que sur réservation afin d’assurer la fraîcheur et la bonne maturation des poissons.” LES BRUITS DU RIZ

Cette exigence en coulisse se ressent sitôt assis sur un des tabourets au comptoir du petit restaurant. Décoration épurée et lumière tamisée. Xavier Pensec fait face, en kimono, au client. Rapidement, il entraîne le convive dans son univers. Par l’esthétique d’abord : le scintillement du fil du couteau, le brillant des filets de poisson disposés près d’une planche en hinoki, une variété de cyprès japonais. La gestuelle aussi : les mains sculptent le riz pour qu’il épouse la fine tranche de poisson. Tout semble simple. Et pourtant. “Ça m’a pris six ans pour simplement savoir vraiment aiguiser mon couteau. C’est par la répétition qu’on progresse. Maintenant, j’entends mon riz. J’entends les petits bruits du grain de riz, son

bruit et son poids sur ma cuillère en bois sont différents en fonction de la cuisson. Toutes ces sensations me donnent des indications sur mes produits, mes outils. C’est un travail d’artisan.” Un travail de soixante-dix heures par semaine, restitué dans des menus allant de 55 à 85 euros. Des prix à comparer aux meilleurs restaurants de sushis parisiens, 155 euros par exemple pour le Sushi Okuda. VINGT SECONDES POUR DÉGUSTER

Saumon sauvage de ligne d’Alaska, bonite de Concarneau, dorade royale de la rade de Brest, langoustines du Guilvinec... Les sushis défilent sur le comptoir. Puis, c’est au tour de la seiche qui une fois chauffée à la flamme dégage des senteurs d’anis. Entre deux sushis, une gorgée de saké et quelques lamelles de gingembre viennent rafraîchir le palais et les papilles. Et pas question de trop tarder avant de déguster son sushi sans être rappelé à l’ordre par le chef : “Le sushi est toujours meilleur au comptoir. Vous avez vingt secondes pour le déguster, d’une seule bouchée. Après,

le riz baisse en température et les textures changent. On n’a plus les mêmes sensations”. Plus que les poissons nobles comme le bar, les habitués et connaisseurs attendent à chaque service le chinchard, ce cousin du maquereau dénigré en Bretagne. Peu cher et plus habitué à finir en farine, sa chair se révèle divine en sushi. Pour comprendre comment se comportent les poissons et l’influence de l’alimentation sur leur goût, Xavier Pensec va même jusqu’à disséquer l’estomac de ses poissons. Dans une dorade, par exemple, on retrouve des morceaux d’algues et d’étoiles de mer, une tête de crevette... Mika : “Cet hiver, certains poissons n’avaient plus le même goût. Avec les tempêtes, les fonds ont été beaucoup remués. Peutêtre que les algues étaient arrachées, que le phytoplancton était moins présent, et la chaîne alimentaire a été bouleversée. Les repères des poissons ont bougé. Tout a une influence”. Avec le comptoir comme ligne d’horizon derrière lequel on bascule dans l’océan, on observe Xavier Pensec façonner ses petits joyaux de sushis espérant offrir, en une bouchée, “un bijou éphémère qui marque la mémoire pour l’éternité”. Un instant intime et maritime.

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MUSIQUE

La Duchesse Anne

Une nouvelle bombarde est née ! Sous la houlette du bagad de Vannes, un nouvel instrument de musique a vu le jour : la bombarde basse, qui vient compléter les possibilités des bagadoù, et qui a reçu le nom de Duchesse Anne. PAR MAIWENN RAYNAUDON-KERZERHO PHOTO GWÉNAËL SALIOU

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ui a dit que la musique traditionnelle était figée, se contentant de répéter des gestes anciens immuables ? Pas les musiciens du bagad de Vannes en tout cas ! “On la fait vivre comme elle a toujours vécu, on la transforme comme elle a toujours été transformée”, explique ainsi Youenn Le Ret, l’un d’entre eux. Et il tient dans ses mains un objet qui apporte un argument de poids à son discours : rien de moins qu’une nouvelle bombarde, un instrument entièrement inventé, dessiné, fabriqué cette année… Une nouvelle bombarde, mais pour quoi faire ? “Un bagad est de plus en plus un véritable orchestre de musique bretonne. On veut créer de la polyphonie, avec de l’harmonie et des couleurs timbrales différentes.” Et, dans le registre des bombardes, il existait des sopranes, des altos et des ténors, mais pas pour l’instant de basse. “Comme une contrebasse dans un orchestre ou une guitare basse dans un groupe de rock, il nous en fallait une”, explique Youenn Le Ret. “L’oreille a besoin de basse pour la flatter. Surtout dans un registre très aigu : le bagad sonne au-dessus de la clé de sol. Ça peut paraître agressif…”

jour. Le secret ? La fibre de verre. Plus légère que le bois, elle offre pourtant de belles qualités acoustiques. Mais se profile un nouveau casse-tête : imaginer un système de clés adapté. Cette fois, c’est Yves Le Brun, un “clétier” vannetais, qui s’y colle. Le challenge : réussir à boucher sept trous quand un seul est directement accessible avec les doigts. Enfin, reste un dernier obstacle : les anches. Pour les bombardes, elles sont traditionnellement conçues en roseau. Mais en Bretagne, personne ne voyait vraiment comment s’y prendre. C’est finalement Pascal Neuranter, fabricant parisien, qui a relevé le défi… LE SOUTIEN DE LANCELOT

MILLE HEURES DE TRAVAIL

Mais voilà, la bombarde basse, dans le monde des bagadoù, était un vieux serpent de mer… “Un projet comme celui-là nécessite un savoir-faire qui n’existait pas dans la lutherie bretonne. On avait fini par en faire une source de rigolade entre nous !” Car oui, une bombarde basse est nécessairement très longue, avec un système de clés compliqué, une anche différente… Une idée qui semblait donc destinée à rester au rayon des rêves musicaux des sonneurs de toutes les générations. Jusqu’à ce que Youenn Le Ret, alors président et pennsoner (chef d’orchestre) du bagad de Vannes, fasse la rencontre d’Ewen d’Aviau. Le Nazairien n’est pas luthier, mais ingénieur, spécialisé dans l’acoustique. Il raconte néanmoins avoir toujours “baigné dans la danse et la musique traditionnelle”. Un bricoleur touche-à-tout et passionné… “Je me suis dit qu’il pourrait être notre homme !” se souvient Youenn Le Ret. Et Ewen d’Aviau plonge dans le projet. Mille heures de travail et quelques tâtonnements plus tard, un prototype voit le

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Le résultat : un bel instrument d’un mètre cinquante de long, très léger, repeint de noir pour s’harmoniser avec l’ébène des bombardes, et qui sonne deux octaves sous la bombarde soprane classique. Une bombarde, homologuée officiellement par Sonerion, la fédération des bagadoù, qui a reçu le nom de Duchesse Anne. “Cette année, ce sont les 500 ans de la mort d’Anne de Bretagne”, rappelle Youenn Le Ret. “Et puis, c’est aussi le nom d’une des bières conçues par notre partenaire, le brasseur Lancelot.” Car

de rêve de sonneur, la bombarde basse a failli virer au cauchemar. “Jeunes et naïfs”, sourit l’ex-penn-soner, “on ne savait pas où on allait.” Créer un instrument, c’est bien. Mais que fait-on une fois que des artisans ont travaillé dessus pendant des heures ? Comment les rémunérer ? Comment protéger juridiquement l’invention ? “Des choses auxquelles on n’avait pas pensé…”, avoue Youenn Le Ret, qui a dû passer quelques nuits blanches à cause des 16 000 € que lui coûte au final sa bombarde basse... “On a trouvé des partenaires. La brasserie Lancelot et la communauté d’agglo de Vannes”, explique-t-il, tout à sa fierté d’être “le premier joueur de bombarde basse au monde” ! L’instrument a été livré en janvier dernier. Et, dès le mois d’août, le bagad l’intégrait à ses prestations. On peut dire qu’elle lui a plutôt porté bonheur : lors de la finale du concours des bagadoù à Lorient, Vannes a obtenu la troisième place et la quatrième au classement général ! “Ça n’était pas arrivé depuis vingt-cinq ans”, se réjouit Youenn Le Ret, racontant qu’il n’a pas pu faire trois pas durant le weekend sans être arrêté par des joueurs curieux d’approcher la “bête”. De quoi réjouir le Vannetais : “L’idée, ce n’est pas qu’on soit les seuls à en jouer, surtout pas ! Il faut qu’il y ait beaucoup de bagadoù à s’en servir”. Ewen d’Aviau annonce ainsi avoir déjà reçu une demande de devis. D’autres devraient suivre. Pour un modèle entièrement chromatique, il faudra quand même débourser 6 350 €.


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ÉCONOMIE

Ronan Le Moal

Le banquier des start-up Directeur général du CMB-Arkéa, Ronan Le Moal est aussi le parrain de la West Web Valley, une structure qui veut lever des fonds et venir en aide aux entrepreneurs bretons du numérique. PAR MAIWENN RAYNAUDON-KERZERHO PHOTO EMMANUEL PAIN

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n Bretagne, le Crédit Mutuel est une institution. Et même s’il a désormais pris le nom d’Arkéa, il reste pour tout le monde ici le CMB ou le Crédit Mut’, qu’on rangerait presque à côté de son ciré Cotten et de sa boîte de pâté Hénaff dans l’inventaire du patrimoine régional. Il faut dire que deux Bretons sur trois y sont “sociétaires”, puisque la forme mutualiste de l’entreprise préfère ce terme à celui de client. Et que ses 4 500 salariés en Bretagne (sur 8 700 au total) en font le troisième employeur privé de la région, derrière PSA et DCNS… Au Relecq-Kerhuon, le Crédit Mutuel-Arkéa, c’est presque une ville. De grands bâtiments, dont certains flambant neuf, qui surplombent la rade de Brest. Le bureau du directeur général, lui, est au dernier étage du siège historique de l’entreprise. De sa fenêtre, on aperçoit des dizaines de voiles sur l’eau, les écoles de bateau semblent être de sortie en cette après-midi d’été qui n’en finit pas… Pourtant, Ronan Le Moal est plutôt vélo. Ancien très bon coureur amateur, il assure en faire encore entre cinq et six heures par semaine. Et trône dans son bureau une photo en noir et blanc, datée de 1964 : Poulidor et Anquetil au coude-à-coude, dans le Puy-de-Dôme. “Une étape mythique”, raconte Ronan Le Moal, avec le même débit rapide et sec avec lequel il a expliqué la stratégie du groupe Crédit Mutuel-Arkéa et sa propre ascension. Lui, sa victoire d’étape est sans doute celle qui l’a mené, en 2008, à la direction générale de l’entreprise... DIRECTEUR GÉNÉRAL À 36 ANS

Le CV de Ronan Le Moal est celui d’un jeune Brestois brillant, né en 1972 et qui a filé à HEC Paris après sa prépa finistérienne. La capitale, il n’y restera que quatre ans. Trois ans à l’école, un an chez Ernst & Young. À 23 ans, c’est déjà le retour au pays, après avoir fait offre de services au Crédit Mutuel. Commence alors une carrière au sein du groupe, du contrôle de gestion à la direction de filiales. Car Ronan Le Moal est un ambitieux. “Manager”, “challenge”, “aventure”, “responsabilités” sont des mots qui reviennent souvent dans son discours. À 33 ans, on lui confie ainsi la direction d’un courtier

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en ligne. Il pilote le rachat de Fortuneo, qu’il fusionne avec cette filiale. Et, en 2008, le président tout juste nommé, Jean-Pierre Denis, lui propose le poste de directeur général. “Ce n’était pas forcément ce à quoi je pensais ni ce à quoi les gens s’attendaient. Objectivement, à 36 ans, j’étais jeune. Objectivement, il y avait deux ou trois personnes qui étaient mieux positionnées que moi pour ça, qui avaient une expérience que je ne pouvais pas revendiquer. Mais Jean-Pierre Denis a expliqué qu’il cherchait une forme de rupture, quelqu’un avec un profil de développeur fort. Ma mission est de faire en sorte que, à partir d’une très belle entreprise, on ait un groupe qui continue à se développer sur ses terres, son territoire, et en même temps qui s’ouvre sur l’extérieur.” CONTINUER À GRANDIR

Le Crédit Mutuel dans lequel Ronan Le Moal est entré en 1995 a en effet bien changé. “Quand je suis arrivé dans la maison, on devait être 4 500 salariés. Nous sommes 8 700 aujourd’hui. On devait faire un résultat de 450 millions de francs, c’està-dire un peu moins de 100 M€. Aujourd’hui, on est à 250-300 M€. C’était l’époque où le groupe se constituait. On commençait à avoir, en plus du CMB, le Crédit Mutuel du Sud-Ouest,

celui du Massif central, et les filiales prenaient leur essor.” Banque en ligne, assurances-vie, crédit en ligne… Le groupe s’est effectivement largement diversifié. Son réseau historique du Crédit Mutuel de Bretagne ne représente plus que 50% de son activité. Et si Ronan Le Moal ne veut pas s’exprimer sur le conflit qui l’oppose à l’autre grande fédération du Crédit Mutuel, celle de l’Est, il analyse : “J’ai l’habitude de dire qu’après Brest, il reste Molène, Ouessant et New York. On nous a souvent prêté d’être un peu cloisonnés, en marge de la France, ce qui n’est pas faux. Nous n’avons pas beaucoup de territoires d’expression possibles. Comment continuer à grandir ? On est


très fiers d’être un employeur finistérien. Très fiers d’être une des rares banques, si ce n’est la seule, qui a encore ses centres de décision en région. De proposer à nos collaborateurs une qualité de vie qu’on n’a pas forcément ailleurs, en tout cas pour celui qui n’aime pas avoir 30° tous les jours… On n’a jamais imaginé faire autrement. Simplement, il y a une contrepartie à ça. Le monde bouge, change et si on veut continuer à exister, il faut grandir – pas grossir. Ceux qui ont été dans l’histoire les plus forts chez eux ont aussi été de grands conquérants.” “RENDRE À LA RÉGION”

Et dans cette stratégie mêlant ancrage local et développement national, Ronan Le Moal voit dans le numérique une opportunité fabuleuse. Et c’est de toute façon un univers qui a toujours passionné celui qui se définit comme un “entrepreneur frustré”. De sa rencontre avec Charles Cabillic et Sébastien Le Corfec, deux patrons du numérique brestois, est alors née

l’idée de la West Web Valley. “Dans le web, je caricature un peu, mais ce qu’il faut c’est de bonnes idées et des coûts faibles. Des gens qui ont de beaux projets dans le numérique en Bretagne, il y en a beaucoup. Les coûts faibles, on les a : à Brest, les salaires sont modérés, les locaux ne coûtent pas cher, il y a un faible turn-over, plus de stabilité… On a toutes les bonnes conditions pour créer de belles boîtes web ! Simplement, il faut greffer cela à un écosystème marketing, financier, que nous on connaît bien grâce à nos carnets d’adresses.”

La West Web Valley est donc une structure d’investissement, qui vient en aide aux entreprises numériques. Soutien évidemment financier, grâce à une levée de fonds qui devrait atteindre dans un premier temps les 5 M€. Mais ces patrons bretons veulent aussi jouer la carte de la solidarité : “Aidons ces boîtes à se développer en fédérant des patrons qui donnent de leur argent et de leur temps pour faire bénéficier de leur expertise et de leur carnet d’adresses”. Et la fibre bretonne du patron, qui avoue ne pas être “passionné” par les débats du type réunification, s’exprime là : “Notre ambition, citoyenne quelque part, c’est de rendre un peu à la région ce qu’on a pu recevoir”.

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PORTRAIT : RÉGIS LE SOMMIER

RÉGIS LE SOMMIER

“Nos hommes politiques sont

incroyables” Directeur adjoint de Paris Match, Régis Le Sommier a longtemps frayé dans le sillage de l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Breton, fils de militaire, pétri de l’esthétisme austère du Finistère nord, ce patron de presse est habité par l’âme de ceux pour qui seul le terrain compte. PAR TUGDUAL DENIS PHOTO EMMANUEL PAIN

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ans la mesure où il est possible d’échanger avec lui des SMS, en pleine semaine, à 4 h 30 du matin, il est plausible que Régis Le Sommier soit insomniaque. Ce n’est pas tout à fait ça : un biberon donné à un enfant de 2 ans et ceci explique cela. Mais le rapport au sommeil du jeune (45 ans) directeur adjoint de la rédaction de Paris Match n’est pas totalement neutre pour autant : “Je n’ai jamais beaucoup dormi chez moi, alors que je dors très bien dans les avions militaires. Mieux, en 2010, quand j’étais embedded avec l’armée américaine en Afghanistan, nous

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faisions des marches de huit heures, stoppées parfois par l’inspection d’un village : il m’arrivait alors de dormir debout et, au let’s go, de suivre le soldat devant moi comme un automate”. Grand, beau comme un capitaine parachutiste, une voix sur-masculine : Régis Le Sommier, avant d’être un patron de presse, se définit et s’observe avant tout comme un reporter. LE JOURNALISTE, “UN MAL NÉCESSAIRE” POUR L’ARMÉE

Un reporter d’Armorique qui a côtoyé longtemps l’Amérique : celle d’Obama et de Bush, celle des couloirs du pouvoir ou celle des GI issus de l’Amérique profonde. Il en a gardé une mentalité en partie anglo-saxonne, qui le pousse inconsciemment à voir les défauts d’une France à certains égards immature. “Depuis la guerre d’Algérie, l’armée française a un problème de déconnexion avec le peuple. Pour les Américains, le journaliste est un mal nécessaire. Avec l’armée française, les choses sont beaucoup plus floues : on peut être éjecté d’un reportage pour un papier qui a déplu à un supérieur. Sur le plan politique aussi, les choses diffèrent beaucoup. J’ai interviewé Bush en mai 2004 en tête-à-tête à la Maison-Blanche après le début de la guerre d’Irak. Toutes les questions peuvent être posées. Cela dure dix-sept minutes. Une heure et demie après, on me fournissait le script de l’entretien, où rien ne manquait. Ils ne m’ont jamais demandé à relire l’entretien. Donald Rumsfeld, qui n’est pas simple, n’a jamais non plus demandé à relire un entretien. Ici, les hommes politiques sont incroyables. Récemment, François Bayrou nous a appelés catastrophé à cause d’une ligne dans une interview où il disait qu’il préférait


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PORTRAIT : RÉGIS LE SOMMIER

Hervé Morin à Yves Jégo... Il disait qu’on l’avait trahi, qu’il allait appeler Arnaud Lagardère (propriétaire de Match) et Denis Olivennes (directeur de la branche médias du groupe Lagardère). Voilà pourquoi nous incitons nos journalistes à écrire des papiers avec des citations plutôt que des entretiens. Nous en sommes réduits à ça...” UNE TRIBU DE PAYSANS

Régis Le Sommier critique également ces journalistes français qui, venus accompagner la délégation de François Hollande à la Maison-Blanche, n’avaient rien trouvé de mieux à faire que de se prendre en photo dans le bureau ovale avec leur téléphone portable, via un selfie. Sans doute parce que les Américains ont jugé ça ridicule. Mais surtout parce qu’il a gardé de son éducation la nécessité d’une certaine tenue... Son père, formé à l’École navale, était sous-marinier. La famille déménage non pas de port en port mais de base en base : Cherbourg, Toulon, Brest. Avec, parfois, le destin qui s’en mêle. En octobre 1968, son

la Sarthe. Il se mariera ensuite avec une jeune fille issue du Finistère nord. C’est de cette Bretagne-là que leur fils Régis se revendique aujourd’hui. Et non sans poésie, inspiré pourtant d’un simple demi de bière pris sur une terrasse en face de la Maison de la radio, à Paris : “Je viens d’un endroit où les gens ont les pieds dans la glaise. Cette Bretagne n’est pas celle des crêpes, des volets bleus ou des rochers de Perros-Guirec. C’est celle du matriarcat, de la mort qui envahit tout, des flaques d’eau du mois d’août et de la Toussaint. Une Bretagne dure, enfermée en elle-même, avec ses blessures. Où l’on confie les secrets familiaux au compte-gouttes”. Comme celui qui établit que le père de Régis aurait pu devenir prêtre, incarnant ainsi “le viscéral catholicisme” de la lignée qui était la

“Je viens d’une Bretagne dure, enfermée en elle-même, avec ses blessures. Où l’on confie les secrets familiaux au compte-gouttes.” père se voit affecté à Toulon, mais parvient à échanger de poste avec un confrère envoyé à Lorient, mais plus enclin à vivre en Méditerranée. Un mois après, le sous-marin de celui avec qui il venait d’échanger coulait. Le père de Régis Le Sommier poursuivra sa carrière sur des sousmarins nucléaires, ceux où les missions ne durent pas moins de soixante-dix jours, et d’où l’on revient blanc comme un linge. L’histoire de la famille Le Sommier, c’est celle d’une tribu intégralement bretonne de paysans, surclassée par les grâces de la méritocratie à la française. D’abord gardien de cochons, le père du futur journaliste s’élève en poursuivant des études au lycée militaire de La Flèche, auquel il a le droit puisque sa mère est veuve. Petit déménagement : il s’agit, pour cet enfant des Côtes-d’Armor, de rejoindre

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sienne. Côté maternel, où la grand-mère s’exprime en breton, on transmet le goût pour cette langue aride mais indispensable. Régis Le Sommier la parle aujourd’hui. Grâce à elle, donc, mais aussi à des “cours sauvages” pris à l’université parisienne de Dauphine. De la Bretagne, le directeur adjoint de la rédaction de Match peut en parler tous les jours à ses collègues. Avec Olivier Royant, le directeur du journal, avec Gilles Martin-Chauffier, avec François Pédron. Ce quarteron de Bretons n’agit pas en franc-maçonnerie régionale, assure Le Sommier : “Je n’ai jamais recruté quelqu’un parce qu’il était Breton.” En revanche, cela donne un esprit particulier au journal. Et cela permet peut-être de garder les pieds sur terre au moment de gérer les dossiers chauds, y compris internes. Par exemple, le cas de l’ex-première dame. Régis Le Sommier, lui, dit “Valérie”, parce qu’il la connaît. Un peu soulagé, il constate : “C’est plus clair aujourd’hui... Les dix-huit mois où elle était première dame ont été compliqués. Pendant ces dix-huit mois, nous n’avions pas une source à l’Élysée, mais une journaliste


CHRIS HONDROS

culture qui faisait des critiques de livres, et qui partageait la vie du président. Par ailleurs, Denis Trierweiler continue à travailler au journal, au secrétariat de rédaction. C’est un type adorable”. MATCH, UN SACERDOCE

Vu de l’extérieur, on n’imagine pas à quel point les choses s’entremêlent. “Mais la vie de Valérie, c’est vingt ans à Match. Moi, c’est dix-sept. C’est donc une sorte de grande famille, bien que dysfonctionnelle. Cette histoire d’amour dingue avec Hollande, elle ne se décrète pas. On ne peut pas lui reprocher d’être un jour tombée amoureuse.” La plupart des confrères ont des carrières dans plusieurs journaux. À Match, c’est un engagement différent, car total. De l’ordre du sacerdoce : “La vie privée, on fait un peu avec ce qu’on a... Beaucoup d’entre nous sont divorcés, ont des vies compliquées”. Celle de Valérie Trierweiler est devenue archipublique quand celle-ci a décidé de la raconter dans ce livre tant

écoulé depuis. Les collègues ont, une fois de plus, été exposés, puisqu’il est aussi question de Match dans cet ouvrage. “J’ai trouvé son livre pas mal”, assure Régis Le Sommier. “Les hommes politiques qui disent “je ne lirai jamais ce torchon”, je trouve cela sidérant, alors qu’il a connu un énorme succès public. C’est le signe d’une grande déconnexion. Ce livre, au-delà de l’histoire d’amour, nous permet une plongée à l’Élysée. On ne peut pas retirer à Valérie sa qualité de témoin. Et je ne crois pas qu’elle ait menti : c’est une emmerdeuse de première, mais elle dit la vérité. D’ailleurs, le livre donne à voir un François Hollande constamment en train de travailler. La vraie leçon de ce livre, c’est qu’on ne gagne jamais à humilier quelqu’un.” L’autre leçon du livre, c’est que les plus hautes personnalités de l’État sont parfois de médiocres personnages de roman. L’époque n’est plus aux héros. Ou alors, les héros ont bien changé, salis par l’immédiateté de l’information, la fin du mystère, le déclin des idoles. Voilà sans doute l’un des problèmes auquel est confronté Paris Match. Il reste heureusement les méchants... Dans un portrait croisé de Barack Obama et Vladimir Poutine écrit dans l’hebdomadaire par Régis Le Sommier, c’est le Russe qui fascinait. “Au journal, on dit : il y aura toujours de la place pour un bon dictateur.” C’est de l’humour. Fût-il celui du désespoir de la presse.

Régis Le Sommier, lors d’un reportage en octobre 2010, dans un poste de combat avancé à l’ouest de Kandahar, en Afghanistan.

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PORTFOLIO : ÉRIC DE BAGNEUX

ÉRIC DE BAGNEUX

INSOMNIES CRÉATIVES

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e vous inquiétez pas si, au beau milieu de la nuit, vous apercevez dans un champ de menhirs ou dans la vasière d’un cimetière de bateaux, un homme qui s’agite étrangement en jouant avec une lampe de poche. Il s’agit certainement d’Éric de Bagneux. Ce photographe a des nuits très courtes. Mais au lieu de rester chez lui, cet insomniaque parcourt le Morbihan, entre deux et quatre heures du matin, son appareil à la main. À l’aide de sa lampe et grâce à un temps de pose très long, il obtient ces images étonnantes. La lumière révèle des couleurs, des formes, en crée d’autres. Et ces carcasses de bateaux, ces alignements de pierres ou ces blockhaus, saisis au beau milieu de la nuit, s’éclairent sous un jour nouveau… 30

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PORTFOLIO : ÉRIC DE BAGNEUX


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ENTRETIEN : JEAN-YVES LE DRIAN

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“Je suis toujour pour la réunific 34

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Après la manifestation pour la réunification du 27 septembre dernier et alors que le projet de réforme territoriale sera voté en novembre au Sénat et en décembre à l’Assemblée nationale, le ministre de la Défense revient sur son opposition ferme à toute idée de fusion entre Bretagne et Pays de la Loire. Il réaffirme également son vœu de voir un jour Nantes réintégrer la région administrative.

rs cation”

PROPOS RECUEILLIS PAR DIDIER LE CORRE ET MAIWENN RAYNAUDON-KERZERHO PHOTOS EMMANUEL PAIN

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ENTRETIEN : JEAN-YVES LE DRIAN

“Le risque majeur, c’était la fusion avec les Pays de la Loire” BRETONS : Le 27 septembre dernier, une manifestation a réuni entre 20 et 25 000 personnes à Nantes en faveur de la réunification. Qu’est-ce que cela vous inspire ? JEAN-YVES LE DRIAN : C’est un gros évènement, qui doit être pris en considération et qui traduit l’affirmation d’une histoire, d’une continuité. Ce qui m’a marqué, c’est que la thématique de la manifestation n’était pas uniquement la Bretagne à cinq, c’était aussi “non à la fusion entre la Bretagne et les Pays de la Loire”. Je considère que, dans la période que nous venons de vivre, le risque majeur auquel nous avons échappé, grâce à la détermination collective, c’est le risque de fusion. Pour moi, fusion égale dilution. Et dilution égale fin d’une région. Certains avaient une attitude un peu perverse en disant qu’à partir du moment où il y avait fusion, la Bretagne était réunifiée… Ce n’est pas mon avis, je suis favorable à une coopération renforcée avec les Pays de la Loire, mais qui maintienne l’identité de la Bretagne. Auparavant, vous veniez dans ces manifestations pour la réunification ? Oui ! Mais ce n’est pas le rôle d’un ministre en exercice, surtout de la Défense… Mais vous restez pour la réunification ? Je n’ai jamais changé d’avis sur le sujet. Simplement, j’ai mis en garde un certain nombre de personnes ces temps derniers sur le fait que le sujet prioritaire du moment, c’était d’éviter la fusion. Et je dois vous dire qu’on n’est pas passés loin… Est-il vrai que vous avez mis votre démission dans la balance ?

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Je ne le dirai que quand je serai mort ! Je ne raconte pas mes entretiens avec le président de la République. La fusion, c’était pour moi inacceptable. Par rapport à mes fondamentaux d’abord, et à mon histoire personnelle aussi. Mais ce serait pour la Bretagne une sorte de fin. Ça n’empêche pas de continuer à vouloir la réunification. Mais le risque, c’était la fusion. Il y a un certain nombre d’acteurs qui pensent que la région, c’est une administration qui gère un certain nombre de compétences de l’action publique. Pour certaines régions, c’est vrai. Mais pour la Bretagne, ce n’est pas qu’une administration, c’est une identification. Marylise Lebranchu a ainsi fait la distinction entre la région administrative et la région historique et culturelle qui, selon elle, ne sont pas forcées de coïncider… Je respecte les positions de chacun. La Bretagne, la région, pour les Bretons, c’est la référence de leur manière d’être ensemble, c’est une culture, une volonté collective qui dépasse le concept d’une administration. Je l’ai expliqué au président de la République et au Premier ministre. Ça n’empêche pas du tout de très bonnes relations avec les Pays de la Loire dans de nombreux domaines. Cela existe déjà et il faut le renforcer. On a l’impression que la Bretagne à cinq fait peur aux grands élus ? On a entendu certains parler de chouannerie… C’est autre chose. Il y a un discours au

niveau parisien, qui n’est pas d’ailleurs réservé aux élus, qui est aussi partagé par un certain nombre de journalistes, qui a consisté à dire, au moment où on restait à quatre, “la Bretagne, c’est le repli breton”. J’ai même entendu le mot “ethnicisme”. La Bretagne n’a pas vocation à se recroqueviller et son identité n’est pas une identité contestataire. La Bretagne a une identité créatrice, une identité d’ouverture, une identité qui s’appuie sur son histoire et profondément ancrée dans l’Europe. Mais c’est parce qu’on a bien les pieds sur terre qu’on peut avoir la tête dans les étoiles et se projeter dans l’avenir ! La Bretagne est une terre ouverte, d’autant plus qu’elle est enracinée. Cette histoire de repli a rejailli ces temps derniers au moment du débat sur la fusion. Et ça ne correspond en rien à la réalité. Lors de la manifestation à Nantes, on a vu des pancartes “élus PS, arrêtez de trahir”. Votre sentiment… Ce n’est pas avec des anathèmes qu’on fait avancer l’histoire. Ce que ça voulait aussi dire, c’est qu’on ne vous a pas entendus, vous et d’autres élus PS, réclamer la réunification … C’est là qu’il y avait une difficulté de compréhension et que des gens comme moi devaient assurer leurs responsabilités. Le sujet qui était sur la table, ce n’était pas le sujet des départements. Le sujet qui était sur la table, c’était : est-ce qu’on va ou pas fusionner les régions ? Le gouvernement avait dit qu’il ne posait pas la question des départements maintenant. Parce que ce serait trop compliqué, parce qu’il y a une quinzaine de cas problématiques en France et pas uniquement la Loire-Atlantique.


éveillé toute la nuit du vote parce que l’enjeu était vraiment crucial… De l’extérieur, il y a quand même quelque chose qui surprend les gens. Les sondages, les manifestations, montrent que la réunification est demandée par les citoyens. N’est-ce pas un déni de démocratie ? Le sondage, ce n’est pas la démocratie. J’ai vu tous les sondages, et beaucoup me satisfont. Mais il y aura la nécessité d’une vérification démocratique. Quand Philippe Grosvalet, président du conseil général de Loire-Atlantique et favorable à la fusion, dit qu’il ne consultera pas la population parce qu’il sait que la réponse sera en faveur de la réunification… J’aimerais bien que la réponse soit favorable... Ma position n’a jamais changé. J’ai toujours été contre le Grand Ouest mou, le Gom, comme je l’appelle. J’ai toujours pensé qu’il faut une vérification démocratique en Loire-Atlantique et en Bretagne. Ce n’est pas dans mes fonctions de dire comment, mais il faut le faire. Surtout au moment où on s’engage dans une réforme territoriale qui va donner du pouvoir aux régions. Manuel Valls l’a réaffirmé à l’assemblée générale de l’ARF, la réunion des présidents de région à Toulouse. Cette réforme dit enfin clairement les choses : le lieu de l’action et de la cohérence économique, de la formation, de l’aménagement du territoire, de l’innovation, de l’apprentissage, c’est la région. Et elle aura les moyens financiers de mener ces missions. C’est la région qui est le levier du redressement économique du pays. Enfin un Premier ministre le dit ! Cette loi, qui est à mon avis considérable, il faut maintenant qu’elle soit débattue et votée, au Sénat et à l’Assemblée nationale

Si certains disent “traîtres”, c’est qu’ils n’ont pas compris le sujet, ou bien qu’ils sont malveillants. Il en existe toujours ! Mais moi, je n’ai pas changé d’avis. Je constate d’ailleurs qu’il y a des convertis récents, qui ne sont pas contraints par des responsabilités gouvernementales, qui sont là désormais. Et j’en suis très content. Lors des précédentes manifestations, quand j’étais président de région, ils n’étaient pas encore au rendez-vous. Vous dites que la question des départements n’était pas la question. Mais le droit d’option est dans le texte de loi et il est complètement verrouillé. C’était donc quand même la question ?

Ce n’était pas le sujet du moment et si on n’avait pas été quelques-uns à être vigilants, il n’y aurait plus de sujet du tout. Avec qui avez-vous combattu la fusion ? Avec beaucoup de parlementaires de droite et de gauche qui pensent que la relation avec les Pays de la Loire passe par une coopération mais pas par la fusion. En face, il y avait des gens très motivés pour la fusion ? Jusqu’à la nuit du vote ! Je suis resté

Vous avez souvent mis en avant des régions comme l’Écosse ou le Pays de Galles… Avec une différence par rapport à ce que nous voulons en France : ni l’Écosse ni le Pays de Galles n’ont de fiscalité propre. Ces régions ont une dotation annuelle, mais pas de fiscalité propre. En Écosse, il s’est passé un évènement important, le référendum pour l’indépendance. Comment l’avez-vous vécu ? C’était un évènement très important, avec une vraie mobilisation électorale. Et un résultat un peu surprenant, je ne pensais pas qu’il y aurait eu tant d’écart. Maintenant, la messe est dite, la question ne se reposera plus durant de nombreuses années, comme au Québec. Il

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ENTRETIEN : JEAN-YVES LE DRIAN

faut laisser passer une génération politique. C’était la première fois qu’il y avait une demande populaire de prendre en main son destin, sans violence ? Oui. Avec le résultat qu’on connaît : l’Europe des régions n’est pas encore née… Mais est-ce une marche en avant ? Qu’il y ait consultation des citoyens sur cette échéance-là et sur leur propre destin, oui. Mais l’histoire de l’Écosse est particulière. L’histoire du Pays de Galles est totalement différente. En plus, les Écossais sont comme les Bretons, ils sont très Européens. Vous dites que l’image de la Bretagne à Paris n’est pas très bonne… Nous avions un mouvement considérable anti-breton à l’Assemblée nationale. Droite-gauche. Qui disait : “Et en plus, ils veulent rester tout seuls”. Ça passait par des amendements subreptices, sous prétexte de régler le problème du Nord-Pas-de-Calais, on en profitait pour fusionner Bretagne et Pays de la Loire. Les Bretons sont vus comme d’éternels mécontents ? Je pense qu’il y a eu cet esprit-là, dans l’opinion de certains parlementaires et, au-delà, dans l’opinion nationale. Il faut se défendre contre ça, et on a tous les moyens de le faire, d’afficher notre identité créatrice, positive. L’heure est venue de le faire, de nous mobiliser pour montrer qui nous sommes vraiment. Par ailleurs, il y a en Bretagne des tas de choses innovantes, même si des secteurs sont en crise. Mais c’est pareil partout dans le pays ! J’étais la semaine dernière au lancement du pôle d’excellence cyber défense de Rennes. C’est aussi important que le lancement du Cnet il y a quelques années à Lannion ! Ça va donner à la Bretagne une dimension européenne, voire mondiale, exceptionnelle ! Quand on voit tous les investissements qui se font dans tous les domaines en ce moment, il y a une Bretagne qui marche, valorisante, conquérante ! Il existe aussi des situations de crise ponctuelles, il faut les prendre en considération, essayer d’y répondre le mieux possible. Et souvent,

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il n’y a pas de lien entre les différentes crises. Sur les légumes, il y a le blocus russe, mais aussi des conditions météorologiques particulières et une vraie surproduction. Par contre, je suis totalement opposé à la violence. Brûler la MSA, c’est inacceptable. Trouvons les moyens de reprendre notre chemin, notre feuille de route, d’une région innovante, créatrice et ouverte, parce que c’est ce qu’elle est. En ce moment, la Bretagne est râleuse… Il faut être râleur, ça ne me gêne pas. Mais il y a des acteurs qui ont voulu la faire passer pour ringarde. C’est différent.

Dans le mouvement des Bonnets rouges, il y avait aussi des questions de fierté régionale ? Vous trouvez ? De la part de qui ? On a vu tous ces Gwenn-ha-Du brandis… La Manif pour tous en a aussi ! Au sommet du Tourmalet, il y en a aussi. Le Gwenn-ha-Du est un symbole. Il doit être porteur de fierté et d’affirmation collective et non l’emblème de révolte momentanée. Notre job, c’est d’inverser cela, cette image négative. Parce qu’on a pris un coup. Je n’accuse pas spécialement les Bonnets rouges, mais ceux qui nous ont caricaturés comme ça. Sur les onze propositions contradictoires de la réunion de Morlaix, cela ne fait pas un programme! Serez-vous candidat aux régionales l’année prochaine ?


Aujourd’hui je suis ministre de la Défense dans un contexte international très difficile avec des menaces terroristes. Les autres questions viendront plus tard. Pendant ce temps-là, à droite, ça s’active… J’ai vu ça, il y a de la compétition ! Et Marc Le Fur joue à fond la carte de la Bretagne, on l’a vu partout, notamment à la manifestation à Nantes… Il faudrait qu’il convainque ses amis des Pays de la Loire et de Bretagne, ce serait bien, que la fusion n’est pas la solution. Je crois qu’il faut qu’on mette en avant, plus que jamais, nos talents, nos capacités d’action collective, notre capacité d’anticiper, nos innovations,

Invraisemblable ! Parfois des journalistes, qui venaient me parler défense, terminaient l’entretien en me disant que nous étions ridicules, nous les Bretons, à vouloir rester seuls ! Il a fallu que je me mette en colère ! Vous réfutez l’analyse qui dit que ce seraient les fondements de la Bretagne, l’agroalimentaire, qui s’effondreraient ? Ce n’est pas du tout ça ! Comme ministre de la Défense, je ne peux pas aller visiter des entreprises agroalimentaires tous les jours, mais il y en a plein qui investis-

“En Bretagne, il y a plein de choses qui se font, et ça va bien, on exporte ! On est la quatrième région de France pour le dépôt des brevets. Ce qui est le critère de l’innovation !” nos nombreuses créations d’entreprise, les formes de solidarité interne qui existent… Tout ce qui fait le cœur de la Bretagne. Quand on regarde les performances économiques de la Bretagne, l’énergie des Bretons, c’est une région effectivement très performante. Comment se fait-il que de l’extérieur, il y a toujours cette image de repli ? Parfois, nous avons le vent en poupe, nos valeurs sont unanimement reconnues, et il suffit qu’il y ait une chose qui s’enraye et on nous ringardise. Ce n’est pas acceptable. Sur la fusion, c’est invraisemblable ce que j’ai entendu !

sent. Sauf qu’on n’en parle pas ! 700 M€ d’investissement sont programmés dans l’agroalimentaire de haute technologie, de pointe ! En Bretagne, il y a plein de choses qui se font, et ça va bien, ça exporte ! On est la quatrième région de France pour le dépôt des brevets. Ce qui est le critère de l’innovation ! On est devant l’Aquitaine, les Pays de la Loire… On a une capacité de recherche et de

développement considérable face au ressac négatif que nous avons vécu... Il faut qu’on embraye sur un discours positif, et je pense qu’on pourra le faire, il faudra qu’on se mouille la chemise. Est-ce que vous comprenez qu’il y ait une certaine déception ? Il y a eu beaucoup de Bretons au gouvernement, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps, et finalement, sur les questions très bretonnes, ça n’avance pas : la réunification, le statut pour la langue, la charte des langues régionales est égarée quelque part dans les méandres du Sénat… Il faut qu’on se mette tous dans la tête quelque chose : qu’est-ce qu’il faut pour que la langue bretonne survive ? Des profs, des profs, des profs. Il n’y a que ça. Il n’y a pas suffisamment de jeunes qui s’orientent vers ce métier d’enseigner la langue bretonne et les trois filières sont en manque de profs. La Région Bretagne, sous ma responsabilité, a créé des bourses qui s’appellent Skoazell, qui permettent aux étudiants désirant enseigner le breton de payer leurs études pendant trois ans. Et ça marche. C’est la solution, il n’y en a pas d’autre ! Oui, mais une école bilingue occitane dans le Limousin doit rembourser une subvention du conseil régional, la signalétique bilingue a été attaquée devant le tribunal administratif… En l’absence de statut, tout cela reste fragile ! Moi, je suis un homme du concret, du réalisme, de l’opérabilité. Il reste deux ans et demi, y compris pour la charte. C’est important, je ne le nie pas. Continuons à nous battre là-dessus. Et sur la langue bretonne, l’urgence, c’est de renforcer la formation des profs, pour qu’on ait des profs dans les écoles. Et sur la réunification et le pouvoir des régions, quand même, quel est le gouvernement, depuis trente ans, qui a dit : “Le pouvoir aux régions” ? Même s’il y a toujours un combat entre les jacobins et les régionalistes, c’est permanent… Vous aviez dit, dans un entretien à Bretons au printemps, qu’il fallait commencer par redéfinir les compétences des régions, que sinon on allait se risquer à des “redécoupages hasardeux pour amuser la galerie”… Je maintiens que le sujet essentiel, c’est l’affirmation et l’élargissement des compétences pour les régions. Pour le reste, j’essaye de peser là où je peux et, sur la fusion, je peux vous dire qu’il faut demeurer vigilant. Et après, il faut faire en sorte que le droit d’option soit assoupli. Ce sera le travail des parlementaires dans les jours qui viennent.

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L’HISTOIRE DE BRETAGNE EN CINQ HEURES

Toute l’histoire de Bretagne

5 heures en

Connaissance de la Bretagne, des origines à nos jours, Jean-Jacques Monnier et Olivier Caillebot, Skol Vreizh, 20 €

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L’historien Jean-Jacques Monnier et le réalisateur Olivier Caillebot viennent d’achever un travail colossal : un DVD documentaire d’une durée de cinq heures, retraçant toute l’histoire de Bretagne, des premiers hommes aux défis d’aujourd’hui, qui sera disponible en librairie et gratuitement dans les collèges et lycées. PAR MAIWENN RAYNAUDON-KERZERHO PHOTOS EMMANUEL PAIN


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ominoë, Cadoudal, Conlie, l’abbé Perrot, Yann-Ber Calloc’h, Tanguy-Prigent, les Seiz Breur, le Célib n’auront plus de secrets pour beaucoup… Et plus personne ne pourra dire : Je ne peux pas enseigner l’histoire de la Bretagne puisque je ne l’ai pas apprise !” L’historien Jean-Jacques Monnier n’est pas peu fier du travail qu’il vient de boucler, avec l’aide du réalisateur Olivier Caillebot. Les deux hommes n’en sont pas à leur coup d’essai. En 2012, ils avaient édité un livre-CD, totalisant plus de quatre heures d’écoute. Sous forme de questions-réponses agrémentées de musiques et bruitages, l’historien revenait sur les grands épisodes de l’histoire de Bretagne. “On pouvait l’écouter sur sa chaîne comme sur son ordinateur. Beaucoup l’ont découvert via l’autoradio sur la route du travail ou des vacances”, décrit Olivier Caillebot. Le succès a été immédiat : les premiers 5 000 exemplaires disponibles se sont écoulés en quelques mois… L’idée de décliner le concept en film s’est alors naturellement imposée. Pendant dix-huit mois, les deux hommes ont planché sur l’histoire de la région, traquant documents inédits et archives intéressantes, commandant des musiques originales ou des illustrations sur-mesure. “Les services d’archives des armées allemande, américaine, britannique et française nous ont fourni des films exceptionnels et inédits, comme le bombardement du château de Trévarez par un escadron de “mosquitos” ou les purges d’après la Libération, à Rennes, des scènes terribles!”, décrit ainsi Olivier Caillebot. Le résultat : un documentaire de cinq heures quarante, où un dialogue entre les deux hommes sert de base pour retracer toute l’histoire de la région, des premiers habitants de la préhistoire aux grands défis économiques et sociétaux d’aujourd’hui. Cinq heures rythmées par de la musique, plus de 3 000 documents sonores ou visuels. Une version en breton a également été produite.

“Plus personne ne pourra dire : Je ne peux pas enseigner l’histoire de la Bretagne puisque je ne l’ai pas apprise !” Jean-Jacques Monnier, historien Le double DVD, édité par Skol Vreizh, sera disponible en librairie, à un prix rendu abordable (20 €) grâce au soutien du conseil régional. Une partie sera mise gratuitement à la disposition des centres de documentation des établissements scolaires. Une version allégée pourra aussi être consultée sur Internet. Et, en attendant de vous le procurer, voici déjà un aperçu de quelques thèmes qui y sont développés, commentés par Jean-Jacques Monnier…

“Nous avons des images du bombardement du château de Trévarez ou des purges d’après la Libération, à Rennes, des scènes terribles !” Olivier Caillebot, réalisateur

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L’HISTOIRE DE BRETAGNE EN CINQ HEURES

En cinq heures de documentaire, de nombreux thèmes sont abordés. En voici quelques-uns, commentés par Jean-Jacques Monnier.

POURQUOI LA BRETAGNE N’EST-ELLE PAS RESTÉE INDÉPENDANTE ? Parce qu’elle était moins peuplée et plus faible militairement que la France

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e Nominoë, ou du roi Morvan, un peu plus tôt, jusqu’à la domination normande du 10e siècle, la Bretagne est indépendante. Après, elle s’insère dans l’Europe féodale hiérarchisée, avec des liens personnels de prince à prince. Son duc rend souvent un hommage simple au roi de France ou au roi d’Angleterre, tout en s’efforçant de renforcer son propre pouvoir. Beaucoup moins peuplée que le royaume Le sacre de Nominoë, premier roi de France et moins puissante de Bretagne. militairement que ses deux voisins, elle pratique une politique de bascule. Au 14e siècle, les Montforts mènent une politique d’indépendance et de renforcement du pouvoir ducal : monnaie, institutions, apparat, mécénat, encouragements aux travaux historiques renforçant le patriotisme et le sentiment identitaire... La prospérité du 15e siècle et la politique maritime dynamique donnent un grand élan au duché. Mais l’Angleterre se trouve prise dans une guerre civile et le pouvoir royal français renforce sa volonté d’annexion. De 1487 à 1491, les troupes françaises attaquent. La terrible défaite de 1488 oblige François II à signer un traité inégal. Il meurt peu après. Dans un pays envahi et ravagé, la jeune Anne – une fillette, comme on le voit dans le film – n’a pas d’autre choix que d’épouser Charles VIII. Mais à un million contre vingt, la Bretagne avait peu de chance de conserver son indépendance. Du moins s’efforce-t-elle de préserver son autonomie et sa liberté commerciale, ce qui réussit plutôt bien. L’âge d’or continue donc, avec des hauts et des bas, jusqu’au règne personnel de Louis XIV.

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LA BRETAGNE EST-ELLE UN DES PAYS D’EUROPE QUI A LE MOINS CHANGÉ DANS SES FRONTIÈRES ? Oui, de Nominoë à la création des départements

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a frontière de la Bretagne est remarquablement stable, soulignée par une série de forteresses, de Fougères à Clisson, et une zone tampon presque vide, avec des toponymes comportant le mot “désert”. Le traité d’Union de 1532 n’est pas une rupture. Les limites restent les mêmes, avec quelques territoires mixtes aux confins du bas Poitou, les “marches communes”. À la Révolution, la création des départements ne modifie pas le territoire breton, dont le tracé est respecté par celui des cinq départements. Il faut juste faire quelques petites modifications au niveau de ces marches communes, puisque la loi n’autorise plus qu’un territoire soit commun à deux entités administratives différentes. La limite sud-est de la Bretagne est attestée au moins depuis le 12e siècle. Et, hormis quelques exceptions, la limite orientale existe depuis le 10e siècle.

POURQUOI L’ÉTAT A-T-IL COMBATTU LA LANGUE BRETONNE ? C’était une lutte idéologique

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e combat contre la langue bretonne, c’est l’autre volet du jacobinisme administratif. “Je ne veux voir qu’une langue, qu’une culture, la mienne !” Nos DVD rassemblent un beau florilège de citations authentiques et datées attestant de ce combat. Cette lutte s’est développée lorsque la France était menacée d’invasion ou lorsqu’elle préparait la guerre de revanche. La caste dirigeante profite aujourd’hui des difficultés économiques de l’Europe et du contexte international troublé pour renforcer son idéologie du repli jacobin et de l’ennemi extérieur et intérieur. L’article 2 de la Constitution, qui empêche un sauvetage des langues régionales, a été vendu aux députés comme une protection contre l’anglais ! Parallèlement, une partie du personnel politique qui a voté cet article en 1992 nous dit qu’il vaut mieux enseigner l’anglais que les langues régionales. Comme si l’un s’opposait à l’autre. Depuis 1992, la montée des périls n’a pas été enrayée, mais la guerre idéologique contre la diversité culturelle interne s’est renforcée avec succès. Les pouvoirs n’ont pas réussi grand-chose, sauf à affaiblir la richesse de la diversité culturelle.


GWÉNAËL SALIOU

LES BONNETS ROUGES, PONTCALLEC, LA CHOUANNERIE, LE FLB… L’HISTOIRE DE LA BRETAGNE EST FAITE DE RÉVOLTES ? C’est parce qu’on ne nous écoute pas !

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uand un État se transforme en monarchie absolue et prétend décider l’essentiel en son centre, la révolte est le seul moyen d’expression, puisque le pouvoir local ne compte plus. En 1675, Papier timbré et Bonnets rouges sont des révoltes contre l’arbitraire et l’injustice, locale et royale, alors que la politique économique et militaire asphyxie l’économie bretonne. Les difficultés et la volonté royale de rogner les libertés bretonnes expliquent la conspiration de Pontcallec. La Chouannerie, c’est d’abord le refus de la conscription et l’opposition à la politique partiale d’un régime où les bourgeois aisés sont les maîtres et accroissent leur emprise sur les campagnes. Ensuite, on se trouve les alliés qu’on peut. Par rapport à Paris, la Bretagne demeure le bout du monde, toujours incomprise, comme l’a dit Hugo, et suspecte, comme on l’a vu avec l’affaire du camp de Conlie en 1870. Tout ce qui pourrait être résolu par le dialogue et la démocratie aboutit à l’épreuve de force. Avant le FLB, il y a eu les grands mouvements paysans de 1960-1962, qui donnent l’impression que le pouvoir central n’agit que lorsqu’il y a un rapport de force. On a vu la même chose avec l’écotaxe où une idée intéressante se trouve appliquée avec un refus d’analyser ses répercussions locales. On applique la même mesure à l’Alsace qui a trop de transit routier et à la Bretagne qui n’a que la route pour exporter ses produits agricoles. Avec les Bretons, comme les Alsaciens, plus loyaux vis-à-vis de l’État que beaucoup d’autres, l’État se comporte avec méfiance et souvent avec hostilité. Même aujourd’hui, la haute administration et une partie des politiques veulent profiter du projet de réforme régionale pour faire disparaître les entités Bretagne et Alsace, alors que cela ne correspond pas au vœu des populations. Pour la Corse, on est revenu à plus de prudence parce que les Corses ont été moins pacifiques et légalistes que les Bretons. Terrible encouragement à la violence ! Dans la monarchie française d’avant 1789 comme dans la République jacobine de 1875 à nos jours, on oublie la démocratie, on n’écoute pas la modération bretonne, et quand certains, rarement, en arrivent à utiliser les moyens des Corses, le pouvoir et sa cour médiatique vont parler de communautarisme, d’extrême droite, de séparatisme… On a un pouvoir central qui se proclame républicain et qui décrète que les opposants ne le sont pas. Seulement, il oublie en permanence la liberté, l’égalité, la fraternité, la démocratie. Le vieil héritage monarchique se déguise en républicanisme.

LES BRETONS ONT-ILS TOUJOURS MANIFESTÉ UN CARACTÈRE PARTICULIER ? Sans doute une certaine modération

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ttention à ne pas tomber dans l’ethnotype! De l’extérieur, le Breton est vu comme un bon épagneul breton, “têtu et fidèle”. C’est vrai que sa patience face aux refus, aux atermoiements, aux vexations, semble considérable. La conquête militaire royale de 1487-1491 a été d’une extrême brutalité, délibérée, avec beaucoup de mises à sac, de violences contre les personnes, de destructions. On a l’impression que la population a été terrorisée. Pour éviter que cela se reproduise, elle a courbé l’échine. Elle s’est accrochée à des symboles, comme Anne de Bretagne. À certains moments, l’oppression a paru insupportable et l’on a eu des sortes de jacqueries, des guerres de la Ligue aux Bonnets rouges puis à la Chouannerie, qui étaient essentiellement défensives. Il ne s’agissait pas de prendre le pouvoir mais de limiter ses excès. On a retrouvé un tel refus dans l’ordre du symbolique, lors de l’application brutale et armée des lois laïques des années 1900, ce qui a réactivé des fractures profondes datant du 15e siècle, et peut-être d’avant. Il semble aussi que les Bretons aient gardé le souvenir inconscient de ces répressions et aient tout fait pour les éviter, d’où une grande patience, un modérantisme politique et le souhait de réformes en douceur. C’est passé par un soutien majoritaire aux Girondins sous la Révolution, une prédominance précoce du vote républicain modéré, puis chrétien-social, puis démocrate-chrétien, puis centriste, puis socialiste. Cette modération extrême est une sorte de peur de l’inconnu, de l’affrontement avec l’État. D’après les enquêtes, les Bretons sont sans doute les plus attachés à leur “région”, souhaitent la voir disposer de plus de pouvoirs, mais ne veulent pas de statut spécial. Être comme les autres, ne rien demander de particulier, tout en sachant qu’on est particulier et en étant attaché à ces particularités! Que de paradoxes !

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Ma Bretagne

“La réforme territoriale, c’est de la manipulation génétique” Ubisoft, la société qu’il a créée avec ses quatre frères en 1986 à Carentoir (Morbihan), est un des éditeurs les plus importants de jeux vidéo au monde, pèse 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires et emploie 9 000 personnes. Avec AMA, Advanced Mobile Applications, Christian Guillemot dirige aujourd’hui à partir de Malestroit, autre commune morbihannaise, le développement des Google Glass dans le domaine de la santé. Entretien avec l’une des personnalités bretonnes les plus engagées sur la réunification et l’avenir de la région. PROPOS RECUEILLIS PAR DIDIER LE CORRE PHOTOS EMMANUEL PAIN

BRETONS : Où êtes-vous né ? CHRISTIAN GUILLEMOT : À Malestroit, dans le Morbihan. Mes parents travaillaient à Carentoir, à 20 kilomètres. Ils étaient négociants en produits du sol pour que celui-ci puisse produire mieux et plus. Mes deux parents ont, par la force des choses, repris chacun le commerce de leurs parents qui, eux-mêmes, étaient dans ce métier du négoce en produits du sol. Vous avez grandi dans une ambiance très commerciale ? C’est vrai. J’ai grandi ainsi que mes frères dans un monde où le commerce

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était très présent, le négoce, l’échange. À tel point qu’on avait le droit de faire du commerce, ou alors du commerce. Autrement, on pouvait choisir le commerce. Ça se manifestait par des conversations familiales ? Oui. On entendait parler de clients, de fournisseurs, de factures… à chaque repas. On était baignés dans le monde du commerce. Et si les grands-parents venaient, on remontait une génération sur la relation avec la banque, le client, un concurrent. Pendant toute leur jeunesse, mes frères aînés ont vécu avec l’entreprise, parce qu’il y avait des livraisons, des clients, parce que c’était ouvert tous les jours sauf le dimanche après-midi. Le dimanche matin, les gens allaient à la messe et venaient ensuite régler leurs factures à la maison. Est-ce vrai que vos parents ont été parmi les premiers à proposer des ordinateurs aux paysans ? Oui, c’est vrai. Mon père était vraiment passionné de technologie. Il était commerçant, mais créatif. Dans la famille, on a essayé beaucoup de métiers. Mes

parents ont été négociants en vin, en spiritueux, mon grand-père avait exporté des pommes d’Allemagne par wagons entiers. C’étaient des négociants, mais des négociants créatifs dans leurs activités. Mon père, lui, a toujours été passionné par la technologie. C’est assez naturellement que nous nous sommes intéressés à ça. Le lien s’est fait lorsque l’activité de négoce est allée moins bien du fait de la crise de l’agriculture. Mes frères aînés sont venus dans l’entreprise pour essayer de l’aider à ne pas péricliter, c’était dans les années 1980. Ils ont apporté cette connaissance de l’informatique. Nous avons, dans les années


1981-1982-1983, tenté de vendre des applications de gestion de vaches laitières aux agriculteurs, avec des démonstrations en plein champ. C’était un challenge incroyable à l’époque ? Oui, même si on n’a rien vendu ! Mais, c’est l’ADN de la famille. Ensuite, on s’est dit pourquoi ne pas essayer de vendre des ordinateurs à Carentoir. Nous avons acheté des Idem HT-XT, on a créé un bureau d’exposition et organisé une journée porte ouverte. Nous avions envoyé un courrier dans toute la Bretagne. On a eu énormément de monde, malgré la neige. On a fait une démonstration de

ce qu’on pouvait réaliser avec des ordinateurs PC, en 1984. On en a vendu aux écoles de Redon, à quelques entreprises de Carentoir. C’est par ce biais que nous avons été en contact avec le monde du jeu, parce qu’avec ces ordinateurs, nous vendions aussi quelques jeux. Michel, un de mes frères, en vacances en Angleterre, a découvert que les jeux étaient à la moitié de notre prix d’achat chez notre grossiste de Rennes. Il a acheté un gros sac et à peu près tous

les jeux qu’il a vus dans le magasin. On a mis une annonce dans un magazine national, la liste des jeux et un coupon de commande. L’ensemble de ce qu’il avait acheté en Angleterre a été vendu dans les quinze jours qui ont suivi. On s’est aperçus qu’il y avait une demande importante. Je crois me souvenir qu’il y avait la même marge sur cinq cassettes de jeux que sur deux tonnes d’engrais. Les deux tonnes, il fallait les livrer avec deux chauffeurs de camion. Et on était payés à la récolte, donc six mois après, si la récolte était bonne. Si elle ne l’était pas, il fallait attendre un an. Pour ce qui était des jeux, ça se vendait bien,

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Ma Bretagne la marge était intéressante, même en les vendant beaucoup moins cher que les prix pratiqués en France à l’époque. C’est vraiment la même découverte que celle d’Yves Rocher quand il a vu que dans ces petits flacons il y avait deux francs cinquante de substrat, mais qui pouvait être vendus beaucoup plus cher. Nous, on a découvert que pour les jeux, il existait une demande forte, en vente par correspondance on n’avait pas de limite en termes de marché, et qu’il y avait un vrai engouement pour ça. Dans les semaines qui ont suivi, on a eu un taux de croissance de l’ordre de 40% par mois. C’était en 1984. Fin 1985, on était le premier distributeur français de jeux vidéo, sous le nom de Guillemot International Software, GIS. Vous étiez tous associés ? Il s’agissait de l’entreprise de nos parents. Ils étaient négociants en beaucoup de choses, ils sont devenus négociants en jeux vidéo. Ils achetaient aux Britanniques et vendaient aux Français. C’était une entreprise familiale. Fin 1985, début 1986, on a trouvé que c’était peut-être une bonne idée de commencer à créer des jeux. En avril 1986, on a lancé Ubisoft, pour créer des jeux. Pourquoi ce nom d’Ubisoft ? Il y a beaucoup de Bretons qui aimeraient que Ubi signifie Union des Bretons indépendants, Union pour une Bretagne indépendante ou intelligente. En réalité, Ubi est un nom inventé par mon frère Gérard parce qu’il trouvait que ça sonnait bien. On est désolés… Est-il vrai que c’est vous qui avez été le personnage central qui a joué l’introduction en bourse en 1996 ? Oui, car j’étais responsable juridique, fiscal, comptable. En janvier 1996, on a considéré qu’il fallait trouver des sources de financement et on a estimé qu’il serait intéressant de coter l’entreprise en bourse. Et là, mon père m’a donné le “Que sais-je?” L’Introduction en bourse. J’ai lu ce livre et on a coté Ubisoft en juin après beaucoup de travail. Aujourd’hui, nous avons encore le deuxième record de la bourse de Paris pour le nombre de fois où les titres ont été demandés. À ce moment-là, vous étiez encore en Angleterre… Non, j’étais revenu à Carentoir pour démarrer les filiales étrangères. Quand il s’est agi de coter Ubisoft en 1996,

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Guillemot en 1998 et Gameloft en 2000, tout ça s’est fait de Carentoir. Aujourd’hui, que reste-t-il à Carentoir ? Il reste toute l’équipe administrative qui a participé à ces cotations, dont une bonne partie de la direction générale, administrative et comptable de beaucoup d’entités. Même si chaque groupe à des entités administratives qui se sont déployées dans chaque continent, l’administration générale, la consolidation et la présentation de tous les comptes auprès des organismes financiers se fait à Carentoir. Et où se situent géographiquement les cinq frères ? Aujourd’hui, il y a deux frères en Bretagne, un à Vannes et un à Rennes. Un autre à Paris, puis Londres et New York. Combien y a-t-il de salariés au total ? Ubisoft aujourd’hui, c’est 9 000 salariés. Je pense qu’il y a entre 2 700 et 3 000 salariés en France. Le reste se situe en Amérique du Nord et notamment au Canada, mais aussi à Shanghai. Ce sont nos trois plus grands pôles. Et il existe des centres de production dans une trentaine de pays ainsi que des filiales de distribution. Et la Bretagne dans tout ça ? Vous êtes parti très jeune sur des projets qui prennent beaucoup d’énergie… On a géré nos affaires en fonction des besoins de l’entreprise plutôt que de chercher à développer des entreprises en Bretagne. C’est-à-dire qu’à un moment, il faut être aux États-Unis, puis produire aux États-Unis, puis être en Asie et produire en Asie, car le goût des consommateurs est différent selon les continents. Donc, il faut produire des jeux dans chaque continent. Mais néanmoins, on a toujours voulu développer en Bretagne. Je pense que mes frères et moi sommes imprégnés de la Bretagne et avons tous conscience d’être Bretons. Mais nous sommes aussi entrepreneurs depuis toujours. Ce sont deux forces aussi puissantes l’une que l’autre. Nous avons ce regret de ne pas avoir plus développé en Bretagne.

C’est-à-dire ? À un moment, Ubi était à Carentoir, puis nous sommes allés à Redon. Il y avait ensuite un tel taux de développement qu’il fallait trouver des locaux importants avec de l’espace. On a cherché à Rennes mais la ville était trop chère. Et c’est pour cela que nous nous sommes installés à Compiègne, puis à Montreuil. Le coût des locaux était la moitié de ce que nous trouvions à Rennes. Et pour la petite histoire, actuellement AMA est à Rennes, et nous avons exactement la même expérience qu’il y a vingt-cinq ans sur la difficulté de trouver des locaux


suffisamment grands et bon marché. C’est une ville où il y a peu de foncier disponible et l’offre est donc trop onéreuse au regard des autres villes. À côté de ça, à Londres, c’est gratuit. Pardon ? Oui, la Tech City de Londres, c’est gratuit. La société AMA s’est développée là-bas. Et AMA est en train de devenir la seule société non Américaine agréée par Google pour les applications pour les Google Glass. Londres aimerait bien avoir cette application car la société est Britannique. Et nous sommes donc dans un dilemme épouvantable, où nous, Bretons et en Bretagne, avons des problèmes pour trouver des locaux

Certains qui arrivent, certains qui partent, certains pour lesquels c’est trop tard, d’autres pas encore. Et le problème, c’est qu’il n’y a pas de gare. On a tout ce qu’il faut pour réussir : des jeunes très bien formés en Bretagne, presque trop bien, et ils sont tous en train de partir. Alors oui, pour les Google Glass, on travaille sur des applications pour objets connectés, on fait de la télémédecine entre la clinique des Augustines, les maisons de retraite de Guer ou de Malestroit, qui sont à chaque fois des

Vous êtes les seuls à travailler dessus en France ? On est les seuls à travailler sur ces sujets-là de manière aussi précise en dehors des États-Unis. Et c’est en Bretagne. On a décidé de faire un focus sur la médecine. Parce que le numérique est un monde où il faut être le meilleur dans un sujet. Et donc, la Bretagne dans tout ça… Avec mes frères, dans les années soixante-dix, nous avons séjourné dans une maison à côté de La Baule, à SainteMarguerite. Je crois que c’était en 1972, juste après le triomphe d’Alan Stivell à l’Olympia. Et mes frères mettaient le disque d’Alan Stivell à fond, presque de jour comme de nuit. C’était une mu-

“À Malestroit, nous sommes les seuls à travailler sur le développement des Google Glass en dehors des États-Unis.” suffisamment grands et à un prix normal à Rennes. Vous voulez dire que les applications pour les Google Glass sont développées en Bretagne ? Il est évident qu’on peut développer en Bretagne une activité considérable de numérique dans les années qui viennent. Pour moi, le numérique représentera au moins un tiers des emplois d’ici quatre ou cinq ans. Il y a vingt-cinq ans, on a vu passer un train qui s’appelait le jeu vidéo, on est montés dedans, à Carentoir. Ça nous a emmenés à construire un groupe de 20 000 personnes. À La Gacilly, qui est aussi une commune de 2 000 habitants, ils ont vu passer un métier qui s’appelait le cosmétique, ils sont montés dans ce train-là et ils sont 16 ou 17 000 avec un magnifique groupe international. Dans le numérique, je considère qu’il y a 1 000 trains qui passent aujourd’hui.

premières mondiales. On travaille sur des greffes entre Rennes et l’autre bout de la France. Pour la petite histoire, aujourd’hui ça se fait par téléphone, c’est très effrayant. Alors il est comment mon foie ? Il est rose. Mais rose comment ? Et grand comment ? Avec les lunettes, le professeur qui est à Rennes peut voir le greffon. Les lunettes connectées, c’est aussi permettre à quelqu’un qui fait un AVC à Brest de bénéficier d’une auscultation en télémédecine avec Rennes et de ne pas perdre des minutes ultra précieuses. Je pense que dans quelques années on trouvera étonnant qu’on ait pu faire intervenir une ambulance sur le site d’un accident de la route sans que quelqu’un ait mis des lunettes pour avoir accès à un spécialiste.

sique extraordinaire à l’époque. Je pense que cette musique a vraiment ancré la conscience des cinq frères dans l’idée qu’on était vraiment Bretons, avec une culture et une musique particulières. Comment devient-on militant ? Moi, je ne me considère pas comme militant. Je mets beaucoup de valeur dans ce mot. Un militant, c’est quelqu’un qui prend une grande partie de son temps et de son énergie pour défendre quelque chose de manière constante et active. Par contre, pour moi, l’idée de la Bretagne à cinq départements est une évidence, d’autant plus que je suis du monde de l’économie. Je pense que la France a pris du capital économique de la Bretagne et depuis, ça fonctionne vraiment moins bien. Nantes est la capitale économique, Rennes, la capitale administrative. Et sans la capitale économique, on est quand même beaucoup

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Ma Bretagne moins fort pour le développement. Elle manque à la Bretagne depuis soixantedix ans. Ce qui est étonnant, c’est que le côté économie qui devrait m’éloigner de la Bretagne a un effet inverse. Par exemple, j’essaie de toutes mes forces de développer des activités numériques en Bretagne. Et là, Nantes fait clairement défaut. Pourquoi ? D’abord, lorsqu’on regarde les budgets de toutes les régions européennes qui sont en dévolution (transfert de pouvoir, ndlr), comme le Pays de Galles, l’Écosse, la Bavière ou les régions espagnoles, pour des tailles équivalentes, ces régions ont entre quinze et vingtcinq milliards. Je crois que la Bretagne est à peine à deux milliards. On est à

des autres régions, tout ceci est handicapant pour le développement. Aujourd’hui, j’essaye de manière presque contre-productive de développer AMA en Bretagne. Vraiment, c’est beaucoup plus difficile qu’ailleurs. Mais, comme on est un peu têtus en Bretagne, je me dis que ce serait bien qu’il y ait une société qui, à la veille d’un développement très important, s’enracine en Bretagne et se développe ici. Sachant que le numérique est une activité intéressante pour la Bretagne, car elle ne demande aucune infrastructure particulière. La

“Pour un Nantais, il y a vingt ans, il était préférable d’être Français plutôt que Breton. Aujourd’hui, c’est l’inverse.” moins du dixième pour une population similaire. Et je pense qu’on est mieux géré par soi-même que par des gens qui sont à 500 ou 600 kilomètres qui ne comprennent peut-être pas bien les enjeux économiques. La partition de la Bretagne est un problème. Le fait que la Bretagne n’ait pas la possibilité de réfléchir à son propre destin économique est un problème encore plus grand. Je suis convaincu que les limites du développement économique de la Bretagne ont leur source dans le fait que les décisions ne sont pas prises en Bretagne, que les centres de décision n’y sont pas, que le budget est au dixième ou au vingtième

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ressource principale, ce sont des jeunes bien formés. On en a, voire même plus qu’ailleurs. Dans ce même esprit, avec l’aide du nouveau maire, nous allons créer une nurserie numérique, à Malestroit. Qu’est-ce que c’est ? Une pépinière d’entreprises spécialisées dans le numérique. On a eu un succès extraordinaire. On a eu l’idée en

mai et on a ouvert en juillet, avec six premiers projets. Cet été, on a eu dix projets supplémentaires, parmi lesquels on en a sélectionné trois. On a donc neuf projets à la nurserie numérique de Malestroit, de jeunes start-up du numérique. Je suis le responsable de la nurserie et je me trouve baigné dans le monde des financements nationaux, régionaux, départementaux et européens pour l’aide au développement des entreprises innovantes. Et donc ? Et donc, ce n’est pas facile… Je suis confronté et en contact avec toute la machine. Elle est complexe, je trouve, et pas super efficace. J’ai l’impression qu’être créateur d’entreprise en France, c’est plus dur qu’ailleurs. C’est du fait de cette centralisation ? Oui. Parce que tout le monde nous dit : si vous voulez vraiment être aidés, il faut aller à Paris. C’est la phrase typique. Les centres de décision sont à Paris, et je pense que Paris est probablement plus


de la Bretagne, on s’y intéresse, on lit de plus en plus et on devient conscient du fait que la Bretagne existe, qu’elle a une histoire, qu’elle a été indépendante pendant 1 000 ans et qu’on n’en a jamais entendu parler avant.

sensible à une entreprise qui serait dans une pépinière de région parisienne plutôt qu’à Malestroit. Mais les choses sont telles qu’elles sont. Je crois aussi qu’en Bretagne on a adopté un comportement national, français. Entre le monde de l’entreprise et le monde de l’administration… Je pense que si la Bretagne avait un budget normal par rapport à sa population, de l’ordre de 20 milliards d’euros, celui consacré au développement économique serait beaucoup plus conséquent. Le numérique représentera à peu près un tiers des emplois dans cinq ans et il est essentiel d’investir dans ces métiers-là puisqu’il ne faut pas d’infrastructures particulières. Il suffit juste de mettre en contact de jeunes diplômés intelligents avec des entrepreneurs et un petit peu de moyens. Vous êtes pour plus d’autonomie, mais pas dans le militantisme rêveur, romantique, historique… Non, c’est pragmatique. Mais j’ai quand même eu un déclic en tombant sur un livre d’histoire de Bretagne. C’est tout à fait symptomatique. Il y a une histoire

C’est souvent la découverte de l’histoire ou de la langue… Ça peut être la langue. Lorsqu’on est jeune, on cherche toujours à savoir s’il n’y a pas quelqu’un qui porte son nom et qui, à un moment donné, a fait partie de l’histoire. Est-ce qu’un Guillemot ne serait pas entré dans l’histoire ? Et en fait, il y en a un. Pas beaucoup, mais un. C’est Pierre Guillemot, Roue Beignon, Roi de Bignan, un chouan lieutenant de Cadoudal. Il a été bousculé par la Révolution, ça l’a révolté. Il est devenu chouan et a été contrerévolutionnaire. Voilà, on trouve un personnage dans l’histoire qui vous fait découvrir la Chouannerie, vous tombez sur un livre et vous découvrez que le territoire breton a une histoire. Et après, vous tombez sur un autre livre magnifique, très important, que je ne cesse de donner à tous les gens que je rencontre en Bretagne ou ailleurs : le Barzaz Breizh. Un magnifique livre. C’est très important qu’il traite d’évènements qui se sont passés dans des lieux que vous connaissez par cœur. Pour nous à Carentoir, c’était la bataille des Trente qui était proche de Ploërmel, la bataille avec Charles le Chauve était à Glénac et à Bains-sur-Oust, Nominoë habitait Coët-Leu qui est à 5 kilomètres de Malestroit… Non seulement vous découvrez des choses dont personne ne vous a jamais parlé mais, en plus, des lieux où vous avez vécu. C’est là que vous prenez conscience qu’il doit y avoir un problème dans le logiciel. Vous devenez passionné d’histoire, vous tirez le fil et ça part dans tous les sens. Vous lisez tout ce que vous trouvez et vous tombez sur l’histoire de la Bretagne en six volumes d’Arthur de La Borderie. 3 600 pages. Vous arrivez à assouvir votre passion du sujet ! Mais vous vous dites qu’il y a des

gens qui organisent les choses de façon étonnante puisqu’ils trouvent que finalement, il n’est pas utile que vous connaissiez votre histoire. Ça, ça vous amène à la langue. Un jour, j’ai décidé de faire un stage de langue bretonne, pour voir. Alors là, vous découvrez une deuxième chose extraordinaire : après quelques stages de breton, chez Skol an Emsav à Rennes, quand vous vous baladez à moto dans le sud du Morbihan ou dans le Finistère, toutes les pancartes que vous croisez veulent dire quelque chose ! Alors qu’avant, il s’agissait de noms. Mais ces noms ont une signification, décrivent le lieu. Sans avoir appris la langue, je ne pouvais pas le savoir. On est dans une espèce de quête. Après, vous ne devenez pas forcément militant mais vous réalisez qu’il y a une richesse formidable à laquelle vous n’aviez pas accès et qui est tout à fait intéressante. Voilà, je pense qu’on y vient par l’histoire, par la langue, par la musique. La Bretagne existe. Toute cette culture, c’est gigantesque ! Mais je suis contre une certaine violence qui a existé dans le militantisme breton. C’est globalement négatif. Les Bonnets rouges, par exemple ? Une fois que vous êtes conscient que ce qu’on vous a dit n’est pas aussi clair qu’il n’y paraissait, vous comprenez un peu mieux pourquoi des gens se sont révoltés. Par contre, moi je considère que les Écossais nous ont fait une formidable démonstration de démocratie. Parce que contrairement aux Irlandais du Nord, aux Basques, aux Bretons aussi, les Écossais sont en train de prendre la main sur leurs affaires sans qu’il n’y ait eu de violence. C’est un peuple très évolué qui a réussi à maîtriser son destin. En France, c’est plus difficile car l’État central n’a jamais été très ouvert. En ce moment, l’image de la Bretagne n’est pas très bonne auprès des élus hors de la région qui pensent qu’une chouannerie est toujours possible… Moi, j’ai l’impression que l’image dans le monde économique, et notamment vue de Loire-Atlantique, n’était pas très favorable jusqu’à il y a quinze ou vingt ans. Parce que la Bretagne n’était pas très en avance et, quand on était Nantais, il était préférable d’être Français plutôt que Breton. Aujourd’hui, pour moi, le sentiment est inversé. La marque Bretagne existe, elle est reconnue dans le monde, et il est plus intéressant

BRETONS

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Ma Bretagne pour une entreprise de faire partie de la Bretagne et de sa marque internationale, que de ne pas en faire partie. Les Bonnets rouges, c’est un phénomène très intéressant parce que c’est un aspect typiquement breton, dans le sens où il y a un mélange de tous ceux qui travaillent. Qu’ils soient de gauche, de droite, entrepreneurs, paysans, pêcheurs… Ils ont un souci et c’est assez marrant parce que ça révèle la vraie culture bretonne : quand ça ne va pas, tout le monde est ensemble pour essayer de résoudre le problème. C’est très déstabilisant pour l’État central. Lui qui avait bien organisé : les gens de gauche, les gens du centre, les gens de droite, les syndicalistes forcément contre les patrons et inversement. Là, pour le coup, quand l’économie ne fonctionne plus, comme ces gens-là ont la Bretagne au corps, ils vont manifester pour la Bretagne en général. Les arguments contre la réunification, notamment ceux des élus nantais, c’est que Nantes n’a rien à gagner à la Bretagne. Qu’est-ce que vous leur répondez ? Pour moi, c’est une erreur de penser ça. Nantes est la capitale économique de la Bretagne, mais avec l’arrivée du numérique, elle sera moins visible. Les deux choses les plus importantes dans le business aujourd’hui, ce sont les marques et la communication. Nantes n’a pas de marque et ne peut pas communiquer. Dans le numérique, on peut tout faire de partout, mais on a besoin d’être de quelque part. Est-ce que la marque Bretagne existe partout ? Oui, mais on n’a pas ici en Bretagne l’image qu’ont les observateurs étrangers de nous. Un groupe breton a une signification pour un Californien. Un groupe ligérien n’a aucune signification. Par contre, Val de Loire, oui. Parce que les Américains savent expliquer où est le Val de Loire. Cette évolution de la Bretagne ne nécessite-elle pas un parti politique ? Aujourd’hui, tous ne recueillent que quelques intentions de vote… L’exemple écossais est idéal dans le sens où il n’y a eu aucune violence, ils ont réussi à prendre leur destin en main de manière économique, culturelle. C’est un peuple apaisé et heureux. La dévolution a été très favorable au sentiment d’appartenance au Royaume-Uni. Si vous ne privez pas quelqu’un d’un droit, il est globalement satisfait de faire partie

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de l’ensemble. Ce que j’en ai compris, c’est que parce qu’il y avait la dévolution, les Écossais ne voyaient pas l’union comme un problème, ça ne leur enlevait rien, c’était plutôt un plus. On a en France un phénomène assez différent, puisque l’État central a très bien travaillé pour laisser penser aux Bretons, et aux autres aussi, que la France n’était pas une agrégation de peuples, mais plutôt un territoire où du jour au lendemain on est tous devenus Français ! Et

plupart se sont faits à l’idée qu’il n’y avait qu’un pays, avec une seule culture, une seule langue. La partition de la Bretagne depuis soixante-dix ans a les mêmes effets. Il existe des personnes qui trouvent que c’est comme ça et qu’il n’y a pas lieu de changer les choses. D’où la difficulté pour la réforme territoriale… C’est de la manipulation génétique. Pour chacun, en France, la région fait partie de son code génétique. C’est ce qui le définit, qu’il soit Bourguignon, Alsacien. Mélanger techniquement des régions qui ont toutes un petit millier d’années d’existence, pour moi, ça s’apparente à

“Qui sont ces gens pour décider de changer quelque chose qui existe depuis 1 000 ans ? En 2014, tu ne seras plus Breton mais GrandOuestien. C’est énorme !” d’ailleurs le drapeau est tout à fait symptomatique de cette histoire, puisque sur les îles britanniques, c’est l’Union Jack, l’union de tous les drapeaux, alors qu’en France, ce sont trois couleurs qui n’ont rien à voir avec les peuples qui y vivent. Ce n’est pas une agrégation de peuples qui a décidé d’avoir un destin commun, c’est quelqu’un qui a décidé qu’on aurait un drapeau tricolore et voilà. On est tous les mêmes. Je trouve que le travail a été plutôt bien fait puisque, à part ceux qui sont tombés sur un livre d’histoire de leur région, tous les autres n’ont appris que l’histoire de France. La

de la manipulation génétique. Après, il n’est plus possible de s’identifier à son territoire. C’est la philosophie du GrandOuestien. Et je trouve qu’on est dans une période où on est drôlement présomptueux, on ne se rend pas compte de la responsabilité qui est prise de décider comme ça, d’un claquement de doigts, de changer quelque chose qui existe depuis plusieurs siècles. Et sans concertation… Sur la méthode, n’en parlons pas. Qui sont ces gens, pour décider de changer quelque chose qui existe depuis 1 000 ans ? En 2014, tu ne seras plus Breton mais Grand-Ouestien. Et toi, tu ne seras plus Alsacien, mais Alsaco-Champeno-Je-nesais-pas-quoi. C’est énorme !


HISTOIRE : LA BATAILLE D’AURAY

La bataille d’Auray

La naissance de l’État breton 52

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©RUE DES ARCHIVES/EPIC

Il y a 650 ans, cette bataille mettait un terme à la guerre de Succession de Bretagne. Et la victoire de Jean de Montfort permettait alors au duché de Bretagne de devenir un véritable État, indépendant du roi de France. PAR MAIWENN RAYNAUDON-KERZERHO

“L

e 30 septembre 1364, au lendemain de la bataille, la Bretagne se réveille nation.” Interrogé le mois dernier sur Europe 1, l’écrivain Yann Queffélec décrivait la portée symbolique de cet évènement que fut la bataille d’Auray. “La nation bretonne est née à ce moment”, expliquait-il encore. Que s’est-il passé ce jour-là, pour que la Bretagne en soit changée ? Il y a tout juste 650 ans, deux armées se rencontraient devant le château d’Auray. L’une menée par Charles de Blois, l’autre par Jean de Montfort, tous deux prétendants au trône ducal. En pleine guerre de Cent Ans, certains historiens n’ont voulu y voir qu’un épisode de plus dans le conflit opposant Anglais et Français. Charles de Blois est en effet le neveu du roi de France. Jean de Montfort, lui, a été élevé à la cour du roi d’Angleterre et bénéficie de son soutien… Mais ce sont bien des enjeux bretons qui sont réglés sur les landes d’Auray, par les armes. Et la victoire de Jean de Montfort, devenu Jean IV, ouvre la voie à la construction d’un véritable État breton, indépendant du roi de France. Mais, pour bien le comprendre, il faut revenir à ce jour sanglant et à ses nombreux protagonistes, parmi lesquels des hommes et des femmes qui feraient de parfaits personnages de romans d’aventure… UNE VÉRITABLE GUERRE CIVILE

29 septembre 1364. C’est un dimanche, le jour de la SaintMichel. Des milliers d’hommes se font face, non loin du château d’Auray, de chaque côté de la rivière du Loch. Ce qui va se régler ? La question de savoir qui va monter sur le trône ducal breton. En effet, en 1341, le duc de Bretagne, Jean III, est mort sans héritier direct. Deux prétendants se font alors connaître. D’un côté, il y a son demi-frère, Jean, comte de Montfort. Il est né de la deuxième union de leur père, Arthur III. Il est donc l’héritier mâle le plus proche, mais ne dispose en son nom que du comté de Guérande. Bref, il n’a pas vraiment les moyens de ses ambitions. De l’autre côté, il y a Charles de Blois. Neveu du puissant roi de France, il réclame les droits sur le duché au nom

de sa femme. Jeanne de Penthièvre est en effet la nièce du duc disparu. Et elle fait valoir que, dans la coutume de Bretagne, les femmes ont le droit de succéder aux hommes… D’ailleurs, Jeanne sera toujours l’aiguillon de son mari, durant les longues années de guerre : eh bien oui, c’est de son héritage dont il s’agit ! Elle se chargera bien de le rappeler à Charles, lorsque celui-ci semblera trop tenté par un partage équitable du duché en échange de la paix… Le conflit est d’abord porté devant les tribunaux. Mais il dégénère bien vite en guerre civile. La Bretagne paraît coupée en deux. Charles de Blois et Jeanne de Penthièvre recrutent leur supporters plutôt en Haute-Bretagne, parmi la grande noblesse. Jean de Montfort s’appuie sur la Basse-Bretagne et la petite noblesse. L’historienne Laurence Moal, dans un ouvrage consacré à la bataille d’Auray, nuance : “En réalité, la fidélité des partisans dépend souvent de considérations qui n’ont pas grandchose à voir avec la légitimité de la cause défendue. Ils sont prêts à servir celui des deux prétendants qui sert leurs intérêts ou qui paie le mieux, n’hésitant pas le cas échéant à se rallier à l’autre camp”. LA GUERRE DES DEUX JEANNE

Quant au petit peuple, il semble d’abord indifférent et, ensuite, surtout lassé de ces combats qui n’apportent que violence, ruine et misère. Car la guerre de Succession de Bretagne durera plus de vingt-cinq ans… Pendant des mois, sièges, embuscades et trêves précaires se succèdent. Mais le jeu des rois anglais et français envenime la situation. Ainsi, en décembre 1341, Jean de Montfort est arrêté par le roi de France et mis en prison. La guerre est perdue ? Non, c’est sans

“Le 30 septembre 1364, au lendemain de la bataille, la Bretagne se réveille nation.” Yann Queffélec, écrivain BRETONS

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©RUE DES ARCHIVES/CCI

HISTOIRE : LA BATAILLE D’AURAY

compter sur son épouse, Jeanne, elle aussi. Jeanne de Flandre, surnommée Jeanne la Flamme, se retranche à Hennebont, confie son fils au roi d’Angleterre, à qui elle demande du soutien. Elle prend la tête de la résistance, remotive les troupes, jusqu’à la libération de son mari. Et la guerre, parfois appelée la guerre des Deux Jeanne, repart de plus belle… Même la mort de Jean de Montfort, en 1345, n’y met pas un terme. Jeanne la Flamme aurait alors sombré dans la folie et est amenée en Angleterre. Mais son fils, prénommé également Jean, attend ses 22 ans pour revenir au pays. Et bientôt, il met le siège devant la ville d’Auray. Pourquoi Auray ? “La ville constitue un enjeu stratégique”, écrit Laurence Moal. “Construite sur l’escarpement d’une colline, elle dispose d’un port abrité et d’un pont sur la route qui ouvre à Vannes le passage vers l’ouest. Depuis 1342, Auray a toujours suivi le parti de Charles de Blois. Elle lui assure sur la côte sud du duché une communication avec l’océan et est un coin enfoncé dans les positions montfortistes. En la prenant, Jean se rendrait donc maître de tout le littoral méridional du duché, de Quimperlé jusqu’à Vannes (son lieu de résidence) et le Golfe du Morbihan.” DES MERCENAIRES DANS LES DEUX CAMPS

Alors bien sûr, Charles de Blois ne l’entend pas de cette oreille. Il est un peu patraque, quelque part sur la côte nord de la Bretagne. Mais il reçoit vite du soutien. Son oncle Charles V, roi de France de son état, lui envoie 1 000 lances ainsi que son propre frère, le duc de Bourgogne, pour le seconder. Bertrand Du Guesclin lui-même accourt avec ses hommes. Il retrouvera d’ailleurs sur le champ de bataille, parmi ses opposants, un de ses meilleurs amis, Olivier de Clisson. Ce dernier a été élevé en Angleterre : son père a été tué par le roi de France dont il rêve depuis de se venger ! Il a alors choisi logiquement le parti de Montfort… C’est donc un joyeux bazar ! Jean de Montfort peut bien sûr compter sur les Anglais. Et notamment sur John Chandos, considéré comme le meilleur capitaine de son pays. Mais Gallois, Génois, Gascons, Normands, Poitevins… On trouve toutes les nationalités des deux côtés de la bataille ! En réalité, il est bien difficile d’y voir clair dans ces troupes. “Évoquer une armée bretonne serait donc anachronique pour l’un ou l’autre camp et il est préférable de parler d’une armée anglo-bretonne derrière Montfort et franco-bretonne derrière Blois”, écrit encore Laurence Moal dans Auray 1364, un combat pour la Bretagne, tout en soulignant la présence dans les deux camps de mercenaires de tous les pays, seulement attirés par l’appât du gain... Tout est fait jusqu’au dernier moment pour éviter la rencontre des armes. Tractations, médiations d’hommes d’Église… Car les véritables batailles rangées sont rares au Moyen Âge. On préfère les sièges, les razzias ou autres joyeusetés à un corps-à-corps ordonné. Il semblerait même que les principaux protagonistes auraient

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BRETONS

bien aimé jeter l’éponge. Charles de Blois “bigot moraliste parfaitement ennuyeux”, croit savoir Queffélec, et Jean de Montfort “falot et assez craintif” n’auraient pas vraiment eu la trempe de combattants sanguinaires. Et pourtant… Est-ce la brute Du Guesclin qui aurait poussé à la bataille ? Ou le fourbe anglais Chandos qui aurait saboté les négociations de paix ? Ou encore l’intransigeance de Jeanne de Penthièvre qui n’entendait pas laisser son mari tranquille sans avoir définitivement réglé son sort à ce satané Montfort ? En tout cas, juste après la messe, le matin du 29 septembre, le combat s’engage. Et tous les chroniqueurs

Jean de Montfort devant le corps de Charles de Blois.


s’accordent à le décrire comme parfaitement sanglant. Laurence Moal fait un inventaire des armes de l’époque : lances, arcs, épées, couteaux… Et la préférée de Du Guesclin, la hache qui “fend les crânes, brise les épaules, fracasse les bras et les cuisses” et peut même couper un corps en deux…

France comme leur suzerain. C’est ce qu’explique l’historien Jean Kerhervé, cité par Laurence Moal : “Profitant de circonstances très favorables créées par la guerre de Cent Ans et les difficultés de la monarchie française, les ducs de Bretagne de la maison de Montfort, comme d’autres princes de leur temps, s’essayèrent à transformer leur duché en État avec d’autant plus de constance et d’opiniâtreté qu’ils ne devaient pas leur trône au roi de France, mais à la victoire de leurs armes sur le champ d’Auray, le 29 septembre 1364”.

UNE POLITIQUE D’INDÉPENDANCE

CHARLES DE BLOIS, UN HÉROS ?

L’avantage semble d’abord être du côté de Charles de Blois. Il tue un combattant revêtu d’une tunique d’hermines, pensant abattre son ennemi. Raté, ce n’était que le cousin de Jean de Montfort. Finalement, c’est Charles de Blois qui succombe, dans des circonstances restées obscures. À la nouvelle de sa mort, c’est la débandade parmi ses partisans. On capture ceux qui sont susceptibles d’être échangés contre des rançons, on tue les autres. Du Guesclin

Pourtant moins connue que les batailles de Nominoë à Ballon ou de François II à Saint-Aubin-du-Cormier, celle d’Auray a aussi donné lieu à des querelles idéologiques. Mais les choses sont un peu trop compliquées pour être utilisées comme symbole, il n’y a pas d’un côté les Bretons luttant pour leur indépendance, de l’autre les Français rêvant de les annexer… Au 19e siècle, l’historien Arthur de La Borderie ou le militant Régis de l’Estourbeillon

“Évoquer une armée bretonne serait donc anachronique pour l’un ou l’autre camp et il est préférable de parler d’une armée anglo-bretonne derrière Montfort et franco-bretonne derrière Blois.” Laurence Moal, historienne se rend, Olivier de Clisson a perdu un œil. Difficile d’avoir une idée précise des pertes. Côté franco-breton, on parle de 900 à 6 000 morts. Côté Montfort, on évoque parfois le simple chiffre de 20 ! La victoire de Montfort n’apporte pas toutefois la paix immédiate. Il reste à annihiler toutes les poches de résistance et les quelques villes restées fidèles aux Blois. Et surtout, il faut calmer l’indomptable Jeanne de Penthièvre, qui poursuit la lutte… C’est définitivement fait le 12 avril 1365, avec la signature du traité de Guérande. Jean de Montfort est sacré duc, sous le nom de Jean IV. Jeanne de Penthièvre conserve quant à elle la propriété de ses biens, reçoit une rente à vie et peut porter le titre de duchesse. En revanche, ses enfants seront des vassaux du nouveau duc, qui prête lui-même un hommage très ambigu au roi de France… Car Jean IV et son fils Jean V par la suite n’auront alors de cesse d’affirmer leur indépendance, instaurant des institutions autonomes et ne reconnaissant plus le roi de

prendront ainsi le parti de Charles de Blois. Ces catholiques fervents admirent ce combattant réputé très pieux qui fut béatifié par la suite. De plus, ils détestent les Anglais, soutiens de Montfort… Mais, au 20e siècle, le regard évolue, comme le décrit Laurence Moal : “La radicalisation du mouvement breton change la vision de la bataille d’Auray. Charles de Blois a beau être un saint, il n’en a pas moins été soutenu par la France. Ce revirement profite à l’image de Jean IV, vu comme le principal artisan de l’indépendance bretonne, au même titre que Nominoë”. Jean IV ou Charles de Blois, Jeanne de Penthièvre ou Jeanne la Flamme ? En tout cas, les personnages romanesques à ranger au rayon des héros bretons, auprès de Nominoë ou Anne de Bretagne ne manquent pas…

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“En Bretagne, on n’est pas dans le paraître” En 1902, le breton est interdit !

Quiz de l'été Testez votre culture bretonne !

79 - OLIVIER DE KERSAUSON

81 n°69

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Un magazine proposé par

L’historienne revient sur le succès de son livre Composition française

Après le succès de Fils de Ploucs, voici son nouveau livre Catholiques et Bretons toujours ?

Mona Ozouf

Jean Rohou

Un magazine proposé par

Olivier de Kersauson

20364 - 2610 - 04,90 E

Bretagne et République

sont-elles compatibles ? Les 10 chansons qui ont marqué la Bretagne

1932 à Rennes Le premier attentat politique breton

80 - MONA OZOUF

Le Vauban Histoire d’une légende brestoise

Octobre Décembre 2011 2012

82 n°69

Un magazine magazine proposé proposé par par Un

les plus intellos ? Jean-Guy Le Floch Le patron d’ArmorLux se raconte

“Sans le breton la Bretagne n’existe plus” La maison néo-bretonne Pourquoi ?

Skol Vreizh L’édition militante

Un magazine proposé par

Et un résultat surprenant

Parler breton, à quoi ça sert ? Erwann Créac’h nous raconte À L’Aise Breizh

69% des Bretons ignorent leur histoire

Louis Élégoët Histoire du mystérieux Pays Pagan

82 - MARTIAL MÉNARD

85 - L’ÉMIGRATION BRETONNE

86 - FOOT : DES ÉQUIPES BRETONNES ?

L’analyse de Romain Pasquier, politologue

Hervé Lossec nous raconte sa Bretagne

83 - LE GWENN-HA-DU

Zones commerciales : Les centres-villes vont-ils mourir ?

84 - NOTRE SONDAGE IFOP

BRETONS BRETONS SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Octobre 2011 Décembre 2013

20364 - 1109 - 5,90 E

Un magazine proposé par

Carnac Naissance d’une station

20364 - 2911 - 05,90 E

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Plogoff, le FLB, les paysans du Léon...

Octobre2014 2011 Janvier

Un magazine proposé par

n°69 94

Le club breton de Jean-Yves Le Drian

90 - LES FRÈRES MORVAN

Jean-Paul Ollivier nous raconte sa Bretagne

91 - RENÉ PÉTILLON

92 - IRÈNE FRAIN

Le maire de Carhaix mène la fronde

Christian Troadec :

“Les Bonnets rouges ne lâcheront rien !”

Ils sont passés par les lycées de Vannes

93 - LES BONNETS ROUGES

20364 - 2712 - 05,90 E

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Pourquoi la Bretagne se révolte

Mais qui était vraiment Anne de Bretagne ?

Thomas Fersen Pourquoi il a choisi la Bretagne

94 - CHRISTIAN TROADEC

BRETONS BRETONS bretons bretons BRETONS

BRETONS

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Octobre Mai 20142011

Un magazine proposé par

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Un magazine proposé par

Il y a 50 ans,

Ils sont attachés à des valeurs dites conservatrices

Les Bretons sont-ils réacs ?

Octobre 2011 Juin 2014

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Un magazine proposé par

Éric Tabarly

Loïc Hénaff nous raconte sa Bretagne

Pourquoi il n’y a pas de péages en Bretagne

96 - LES PARTIS BRETONS

97 - JEAN-YVES LE DRIAN

98 - ÉRIC TABARLY

Hoëdic Une île rock’n’roll

ro 100 t 2014 - NUmé Juillet-aoû

Un magazine proposé par

Le phénomène des tee-shirts identitaires

99 - RAYMOND DOMENECH

20364 - 2706 - 05,90 E

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Les 100 Bretons qui comptent Ce que les autres nous envient Les mots bretons à connaître...

100 - SPÉCIAL N°100

Octobre Octobre2011 2014

n°69 102 n°

La

Vallée des Saints Le

Pourquoi les Bretons ignorent leur histoire

Un magazine proposé par

20364 - 2609 - 05,90 E

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Marc Le Fur raconte sa Bretagne

20364 - 2509 - 5,90 E

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Un magazine proposé par

Philippe Abjean “Les gens ont besoin de sacré” Roland Beaumanoir Le patron malouin se raconte

Stade Rennais Le retour de René Ruello

101 - LES BRETONS ET LEUR HISTOIRE

Tro Breizh La sauvegarde des chapelles

Et Nominoë, Jean V, La Rouërie, Cadoudal, Le Chapelier, alors ?

minoë... gadoù, No Crachin, ba

voir ! ’il faut sa Tout ce qu 100 façons d’être Breton

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Non, il n’y a pas qu’Anne de Bretagne !

cation, lé, réunifi Beurre sa

“Comment

Sur la route avec Jérôme Kerviel

n° n°69 101

Raymond Domenech

La naissance je suis devenu de la légende Breton”

société ⁄ culture ⁄ politique ⁄ économie

Octobre 20112014 Septembre

20364 - 3005 - 05,90 E

n° n°69 99

L’ancien sélectionneur vit aujourd'hui dans les Côtes-d’Armor

sa première victoire sur la Transat anglaise révolutionnait le monde de la voile

Langue, patrimoine, histoire, identité, territoire, tradition...

kevredigezh ⁄ seveNadur ⁄ poLiTikerezh ⁄ ekoNomiezh

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

20364 - 2504 - 05,90 E

n°69 98

20364 - 2401 - 05,90 E

<:HIMKNG=YUZ^UV:?m@e@k@b@a>

95 - LES BRETONS SONT-ILS RÉACS ?

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Un magazine proposé par

n°69 93

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Les Blues Brothers bretons

Jean-Luc Mélenchon “Je combats le régionalisme”

Jean-Yves Le Drian raconte sa prise de fonction

78 - CERCLES ET BAGADOÙ

Les frères Morvan

Octobre2014 2011 Février

La Bretagne de Jean-Yves Lafesse

Langue, réunification, identité... Ce que pensent les Bretons

publie un impressionnant Dictionnaire français-breton, resurgit l’éternelle question

Octobre 2011 Août - septembre 2013

n°69 95

Tradition moderne

77 - DENEZ PRIGENT

Ils chantent depuis 1958 et sont toujours programmés dans les festivals majeurs

Yves de Kerdrel, directeur de Valeurs Actuelles

Élections Pourquoi Rennes est si différente

Ifop-Bretons :

n°69 90

89 - JEAN FAILLER

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Un magazine proposé par

BRETONS

88 - YANN QUEFFÉLEC

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Notre sondage

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

87 - LES BRETONS ET L’HUMOUR

20364 20364- -2309 2906- -04,90 04,90EE

78 n°69

Cercles celtiques, bagadoù, pourquoi les jeunes s’y intéressent toujours ?

Denez Prigent

84 n°69

<:HIMKNG=YUY^UY:?c@d@l@l@a>

Martial Ménard

81 - JEAN ROHOU

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Octobre Juillet 2012 2011

société ⁄ culture ⁄ politique ⁄ économie

Alors que

Bernard Poignant Le conseiller influent de Hollande

77 n°69

Alors que l’artiste breton le plus talentueux prépare son nouvel album, il nous raconte sa Bretagne

Octobre Février 2013 2011

20364 - 2311 - 04,90 E

Comprendre les noms de lieux, le monde qui nous entoure Réussir à l’école Trouver un emploi...

“Les Bretons ont rejeté l’Église, pas le message de générosité de l’Évangile”

Unmagazine magazineproposé proposépar par Un

20364 20364- -2309 2505- -04,90 04,90EE

bretons

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Octobre Novembre 2011 2012

<:HIMKNG=YUY^UY:?c@nh@k@jo@a>

75 - LA VIE SUR LES ÎLES 76 - LES BRETONS INTELLOS

BRETONS BRETONS BRETONS BRETONS Octobre Août-Septembre 2011 2012

76 n°69

Les Bretons sont-ils Ondine Morin et son père, François, habitants d’Ouessant

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Octobre Juin 2012 2011

20364 20364- -2309 2704- -04,90 04,90EE

Ils sont les meilleurs au bac Ils lisent plus de livres Ils lisent plus de quotidiens Ils vont plus au cinéma...

Baisse de la population Peu d’activités économiques Coût de l’immobilier Désengagement des pouvoirs publics

Alan Stivell

20364 - 2701 - 04,90 E

Octobre Mai 20122011

Jean Ollivro Professeur à Sciences-Po Rennes

40 ans après

Yvan Le Bolloc’h

Michel Guyot Le Stade Brestois dans la peau

74 n°69

Octobre Avril 2012 2011

De retour à l’Olympia

Il a marqué 2011 avec son Breizh Tour

“Être Breton, c’est défendre un esprit, une résistance”

20364 - 2309 - 04,90 E

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

Octobre Mars 2012 2011

20364 - 2501 - 04,90 E

n°69

Décembre 20364 - 2309 - 04,90 E 2011

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

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Un magazine proposé par

Octobre 2011

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SOCIÉTÉ ⁄ CULTURE ⁄ POLITIQUE ⁄ ÉCONOMIE

102 - PHILIPPE ABJEAN

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Il y a 30 ans dans

La Bretagne en novembre 1984 Lorient, ville où l’on meurt le plus d’alcoolisme

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Peut-on s’adresser à la justice en breton ? Jil Killevere s’était déjà fait remarquer quelques années auparavant pour avoir passé, et obtenu, son bac en breton. Cette fois, c’est son statut d’objecteur de conscience qu’il a demandé, dans une requête rédigée en breton. Refus du tribunal administratif. En appel, son avocat Yann Choucq souligne que le seul texte qui oblige la rédaction en français des actes de justice en français est l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539. Et encore y précisait-on que le latin devait être remplacé par “le langage maternel français”. Or, précise l’avocat, la langue maternelle de Jil Killevere est le breton… Mais le tribunal tranche : c’est non.

L’accueil des Basques en Bretagne pose problème Les réfugiés basques fuyant l’Espagne et demandant l’asile en France désirent souvent s’installer en Bretagne. Cette fois-ci, la préfecture a refusé, arguant que “ces individus sont liés à des groupes armés et organisés dont l’activité constitue une atteinte à l’ordre public sur le territoire français”.

58

BRETONS

Une étude médicale menée par le professeur Picheral a établi un classement national des villes où l’on meurt le plus par alcoolisme. C’est Lorient qui arrive en tête, suivie de plusieurs communes du Nord (Calais, Douai, Lens, Béthune, Boulogne, Valenciennes et Bruay). Vient ensuite la deuxième ville bretonne, Brest. L’étude démontre également qu’en Bretagne, les vins consommés titrent à 12° dans 80% des cas. Ils ne représentent que 10% de la consommation dans le LanguedocRoussillon, où l’on préfère des vins à moins de 10°.

Le Conseil d’État dit non à la réunification Saisi par l’association BretagneEurope, le Conseil d’État a confirmé une décision ministérielle du 7 mars 1983 refusant le rattachement de la Loire-Atlantique à la région Bretagne. Le recours en excès de pouvoir tenté par l’association a été rejeté…

Des militants vannetais en prison La police a arrêté plusieurs militants bretons de la région vannetaise, soupçonnés d’avoir participé à des attentats contre des transformateurs EDF. Le 10 novembre, une centaine de manifestants défilent jusqu’à la prison pour demander leur libération. En chemin, par hasard, ils croisent le juge d’instruction en charge

de l’affaire. Pris à partie, il finit par se réfugier dans une cabine téléphonique, encerclée par une ronde de militants scandant des slogans, d’où il appelle la police… Le journaliste note que, si le ton est si tendu, c’est que “la colère monte très fort contre une gauche que l’on a portée au pouvoir et qui, aujourd’hui, déçoit gravement. Dernière déception : le retrait du projet de loi Destrade sur les langues et cultures de France, reculade inadmissible aux yeux des enseignants laïques bretons”.

L’ardoise salée de La Beaujoire La facture du nouveau stade nantais est arrivée sur le bureau du maire, Michel Chauty. Et il n’en est pas vraiment ravi, ayant hérité de ce projet de la précédente équipe municipale. Le coût de la construction de La Beaujoire s’élève en effet à 144 millions de francs hors taxes, soit le double de ce qui était prévu !

Cinq fois plus de crêpiers en dix ans ! La crêpe a le vent en poupe. La preuve : sur les quatre départements de la Bretagne administrative, on dénombre 1 680 professionnels. Soit cinq fois plus que dix ans auparavant. Les Français et les Bretons auraient “retrouvé le goût de la galette”, poussés en cela par des “considérations d’ordre économique” explique ainsi Loïc Pourdieu-Le Coz, qui vient de lancer des formations à la profession de crêpier…


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Embarquez avec le plus célèbre des reporters Corsaires, chasseurs de trésors, paquebots, naufrages, chants de marins… Explorez l’histoire maritime avec Tintin et le capitaine Haddock.

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A-NEVEZ E BREZHONEG

Brezhoneg er bed ekonomikel

D

enez Pichon a zo rener Askorn médical, un embregerezh a grou ostilhoù medisinel. Er gazetenn Ya ! eo bet aterset. Reiñ a ra e soñj diwar-benn plas ar brezhoneg er bed ekonomikel : “Deuet on da vezañ kendrec’het e oa un dra vat evit an embregerezh hag evit implijidi an embregerezh. Degas a ra brud un tammig marteze, arc’hant ne lavaran ket. Met a-hend all, prechañ brezhoneg ne goust ket ker kennebeut ! Un dibab eo hepken ha pep hini a c’hellfe ober an dibab-se, hep gortoz war-lerc’h ar stad pe me oar-me petra all… O selaou an dud on deuet da vezañ kendrec’het e oa ur mennozh mat ober gant ar brezhoneg. (…) Ar brezhoneg zo deuet da vezañ un dra hag a laka an embregerezh da vezañ disheñvel diouzh ar re all. (…) Evit an implijidi eo deuet ar brezhoneg da vezañ ur seurt arouez pozitivel eus an embregerezh.” Er memes kazetenn ez eus bet tu lenn ivez un atersadenn gant André Lavanant. Kinnig a rae ul lec’hienn he anv construirelabretagne.org, lec’h m’eo bet bodet a-bep seurt arguzennoù evit an adunaniñ. Eñ ivez en deus lakaet ar brezhoneg da vevañ pa oa rener un embregerezh. Atav gant ar mennozh stourm evit ar vro : “Ar memes youl eo he deus dalc’het ac’hanon da labourat e Breizh ha d’en em gaout e-penn un embregerezh rak

60

BRETONS

ur yezh “minorel” a vez gwelet re evel un ostilh sevenadurel padal e tle kaout he flas er vuhez foran ha neuze e bed al labour ivez.” Er bed ekonomikel, met er vuhez foran dre vras e c’hell bezañ pouezus implij ar yezh. Perig ar Berr, bet maer Ploneiz e-pad triwec’h vloaz, a gomz diwarbenn e skiant-prenet : “Talvoudustre eo gouzout brezhoneg, dreistholl evit ar re gozh… Kavout a reont kalz aesoc’h mont e brezhoneg eget e galleg… Dreist-holl pa veze traoù luziet, diaes da zisplegañ e galleg. Muioc’h a fiziañs o deus-int.” Ha petra gwelloc’h eget an tele evit diorren ar yezh ? “Sevel ur gwir hentad produiñ” : setu ar pezh a c’houlenn Lionel Buannic, rener Brezhoweb, ur chadenn tele war ar rouedad. Ar gelaouenn Bremañ he deus goustlet doser ar miz d’ar skinwel e brezhoneg. Kaoz a zo eus dazont Frañs 3, eus hini Brezhoweb hag he c’hoar vihan e bro Okitania hag ivez eus Breizh Vod, lañset gant Dizale, ur servij a ginnig prenañ pe feurmiñ filmoù ha tresadennoù-bev war Internet… Ha peogwir emañ dazont ar yezh da gentañ etre daouarn ar re yaouankañ, setu daou levr embannet nevez zo : Ar pezh a blij din, gant skrid Soazig ha Saig Pouldu ha tresadennoù Noémie Lassalle, e ti An alarc’h embannadurioù ha Skeudennaoueg Arzhig du, e ti Bannoù-Heol.

D

enez Pichon est le directeur d’Askorn Medical, une entreprise qui conçoit du matériel pour les orthopédistes. Et il a depuis longtemps fait une place à la langue bretonne dans sa structure. Il explique dans Ya ! pourquoi : “J’ai été peu à peu convaincu que c’est une bonne chose pour l’entreprise et pour les salariés. Cela apporte peut-être un peu de visibilité, mais pas d’argent. (…) Mais le breton nous démarque des autres. Et pour les salariés, le breton est devenu un symbole positif de l’entreprise”. Dans le même hebdomadaire, on peut aussi lire une interview d’André Lavanant, l’un des fondateurs du site construirelabretagne.org qui réunit des arguments en faveur de la réunification. Il a été également chef d’entreprise et y a mis en avant le breton. “Une langue “minoritaire” est trop perçue comme un outil culturel alors qu’elle doit avoir sa place dans la vie publique et donc dans le monde du travail”, explique-t-il. L’utilité du breton dans la vie publique ? Perig ar Berr, qui fut maire de Ploneis, près de Quimper, pendant dix-huit ans, peut en témoigner. “Il est très important de savoir parler breton, surtout auprès des personnes âgées. (…) Ils ont plus confiance.” Bremañ a quant à lui consacré son dossier du mois à la télé en langue bretonne : projet de refondation de France 3, Brezhoweb, Breizh Vod… Où en sont les principaux diffuseurs existants ? À noter également, la publication de deux livres pour les plus petits : Skeudennaoueg Arzhig Du, chez Bannoù-Heol, un imagier autour de l’univers de Petit ours brun, et Ar pezh a blij din, une petite histoire illustrée par Noémie Lassalle.



LIVRES EUX AUTRES, DE GOAREM-TREUZ Hervé Jaouen, Éditions Presses de la Cité, 312 p., 20 € Suite et fin de l’histoire des Scouarnec-Gwenan, petits agriculteurs et maraîchers des environs de Quimper, dont Hervé Jaouen retrace roman après roman la destinée : avec ce sixième volume, il offre cette fois un regard sur le basculement de campagnards dans le monde nouveau des Trente Glorieuses, avec les bouleversements que cela entraîne dans les vies et au sein même des familles.

ÉCLATS DE 14 Jean Rouaud, Éditions Dialogues, 95 p., 14 € Jean Rouaud renoue avec un thème qui le constitue : la Première Guerre mondiale. Dans cet ouvrage court, il décline la guerre sous les quatre éléments de l’univers : la terre, le feu, l’eau, l’air. Ses écrits sont accompagnés des illustrations de Mathurin Méheut, qui fut en première ligne, au plus proche des combats, lors de cette guerre.

ET TOUJOURS CES OMBRES SUR LE FLEUVE… Nathalie de Broc, Éditions Presses de la Cité, 261 p., 20 € L’auteure quimpéroise nous fait replonger dans des heures sanglantes de l’histoire de France. En 1793, au plus fort de la Terreur, les “mariages républicains”, c’est-à-dire des noyades atroces, se multiplient à Nantes. Lucile, 12 ans, assiste impuissante à celui de ses parents et de son frère, jetés dans la Loire. Elle n’a désormais plus qu’un objectif, se venger de ceux qui ont détruit sa famille.

BATRACIENS ET REPTILES EN BRETAGNE Textes de Stéphane Brousse, dessins de Sandra Lefrançois, Yoran Embanner, 133 p., 30 € Amateurs de nature et de balade, ce livre est pour vous. Les textes de Stéphane Brousse s’associent aux planches de Sandra Lefrançois pour offrir des fiches qui vous permettront de vous familiariser avec les reptiles de Bretagne, de découvrir des balades naturalistes ou encore des dossiers thématiques. De plus, 1 € sera reversé à Eau et rivières de Bretagne pour chaque livre acheté.

LE COSTUME GLAZIK Anne-Marie Goalès, Marie-Paule Postec, Paul Balbous, Coop Breizh, 184 p., 22 € Regroupant une trentaine de communes autour de Quimper, tirant son nom de la couleur bleue de ses costumes traditionnels, le pays Glazik est un territoire à part en Bretagne. Cet ouvrage propose une synthèse de la mode locale avec de nombreux documents d’époque, une iconographie inédite pour mieux comprendre et admirer ces costumes uniques.

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BRETONS

MONTS D’ARRÉE, PAROLES DE FEMMES Anne Guillou, Amélie Garrot-Hascoët, Editions Locus Solus, 64 p., 15 € Ce livre recueille les témoignages de trente-cinq femmes de tout âge, nées ou ayant choisi de demeurer dans les Monts d’Arrée, dévoilant leur vie de tous les jours, leurs sentiments, leurs parcours. De l’arrivée de l’électricité jusqu’à celle d’Internet, en passant par les conditions de vie des femmes en milieu rural, ce livre leur donne la parole.

FINISTERRAE TU GARDERAS LE SECRET Jeanne Bocquenet-Carle, Éditions Rageot, 354 p., 12,90 € Après ses deux précédents ouvrages consacrés à Anne de Bretagne intitulés Les Insoumis, Jeanne Bocquenet-Carle revient avec le tome 1 d’une nouvelle saga, Finisterrae. L’histoire met en scène Katell, 15 ans, qui vit avec sa famille à Paris. Alors qu’elle ne connaît pas la Bretagne, elle se voit obligée de déménager à SainteMarie-du-Menez-Hom suite au décès d’une grand-mère dont elle ignore même le nom. Débute alors une nouvelle vie pour Katell, pleine de surprises et rebondissements…

MÉDECIN DE CAMPAGNE Denis Bourges, Les Éditions de Juillet, 100 p., 35 € Maison d’édition spécialisée dans les beaux livres, Les Éditions de Juillet publient ce livre où Denis Bourges, photographe, accompagne son père, médecin de campagne dans les Côtes-d’Armor, dans sa dernière année d’exercice en 2001. Il revient en 2008, suivre le successeur de son père. Cet ouvrage témoigne de la relation, de l’intimité qui s’installe entre le patient et le médecin, dans ces territoires où la désertification fait rage.

EN FIN DE DROITS Yvon Le Men, dessins de Pef, Éditions Bruno Doucey, 80 p., 13 € Un poème comme une réponse à une lettre reçue de Pôle emploi… Lorsqu’il apprend qu’il est radié du régime des intermittents du spectacle et qu’il est contraint de rembourser des années d’indemnités, Yvon Le Men voit le souvenir de la pauvreté lui revenir. Il décide donc de mettre des mots, des rimes, des vers sur son histoire, accompagnés des dessins de Pef.

ANNE DE BRETAGNE, DU DUCHÉ AU ROYAUME Thierry Jigourel, Éditions Ouest-France, 96 p., 12,50 € Ce livre retrace dans son contexte historique la vie d’Anne de Bretagne, de sa naissance en 1477 à Nantes jusqu’à la publication en 1532 du traité d’Union perpétuelle de la Bretagne et de la France. Découpé en neuf chapitres, agrémenté de nombreuses illustrations, suivant l’ordre chronologique, il permet de mieux comprendre la vie de celle qui aujourd’hui encore tient une grande place en Bretagne.

ANOMALIE P Stéphane Pajot, Éditions l’Atalante, 160 p., 12,50 € Nantes. Sur fond de drogue, meurtres, trafics, Stéphane Pajot nous emmène dans les pas de Tristan Madec, la trentaine. Depuis que son frère est mort il y a quinze ans, au Lac de Grand-Lieu, il navigue en eaux troubles. Consommateur récréatif de drogues, on lui fait découvrir le batraxil, permettant de faire des rêves volontaires. Au même moment, alors qu’il pense pouvoir affronter ses vieux démons, deux personnes trouvent la mort sous ses yeux, dans des circonstances louches. Un polar dans la veine du noir et du surréalisme.


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Je commande le livre Paroles de Bretons volume 1 Prix : 15 € plus 3 € de frais de port

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AGENDA YAOUANK

LES INATTENDUS 4*

Rennes, du 3 au 22 novembre

Brest, le 21 novembre

Yaouank va vous faire danser en ce mois de novembre. Le festival, tête de pont des musiques bretonnes actuelles, s’installe à coups de festoùnoz, cinéma en breton et concerts dans les hauts lieux de la vie rennaise comme l’Ubu, les Champs libres ou le 1988. Le plus grand fest-noz du monde clôturera ce mois au Musikhall, où sont attendus plus de 7000 danseurs et danseuses au son de Krismenn et Alem, des Ramoneurs de menhirs, Beat Bouet Trio et bien d’autres.

FESTIVAL DU LIVRE DE GUÉRANDE Guérande (44), 22 et 23 novembre Pour sa onzième année, le Festival du livre en Bretagne se tiendra comme toujours à Guérande, avec Jean Rouaud (prix Goncourt 1990) en président d’honneur. Durant ces deux jours, près de 150 auteurs et 60 éditeurs seront présents pour des séances de dédicaces, ainsi que de nombreux invités, comme Irène Frain, Sorj Chalandon, Jean-Joseph Julaud, Daniel Cario, Yves Viollier ou encore Gilles Servat que vous pourrez croiser lors des rencontres et débats.

DE GAINSBOROUGH À TURNER Quimper, jusqu’au 26 janvier 2015 En collaboration avec le musée du Louvre, cette exposition vous propose une soixantaine d’œuvres retraçant l’âge d’or de la production artistique en Grande-Bretagne. Sont exposées au musée des beaux-arts les toiles de Ramsay, Reynolds, Romney ainsi qu’un ensemble de portraits romantiques de Thomas Lawrence, des témoins de l’époque victorienne.

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BRETONS

Pour cette quatrième édition, Quai Ouest innove. Son but est toujours de mettre en valeur et de faire découvrir de jeunes groupes au public. Les Brestois de Wicked commenceront avec des compos résolument blues-rock, suivront les Nimois de Mofo Party Plan dans un style pop-électro. La nouveauté se situe avec le set en fin de soirée de DJ Jumo.

COSMIX, VOYAGE SPATIAL, SONORE, VISUEL ET SENSORIEL Pleumeur-Bodou (22), 21 novembre Prêt pour le décollage ? Le radôme va vous faire voyager dans l’espace sans que vous vous leviez de votre transat. L’artiste DJ Julien Tiné, accompagné de Maxime Piquel, le directeur du planétarium, et du conférencier Philippe Adrian, est à la baguette de cette création de plus de deux heures mêlant sons et images, dans le planétarium de Bretagne, sur un écran à 360°.

29e FESTIVAL EUROPÉEN DU FILM COURT Brest, du 11 au 16 novembre Brest, capitale européenne du film court pendant une semaine ! deux cents films seront diffusés en ville, dont soixante-dix en compétition pour les différents prix. Des rencontres avec des réalisateurs et des ateliers sont également au programme de la semaine. Après la cérémonie de remise des prix le samedi 15, un duel opposera les courts métrages de professionnels du cinéma pour conquérir le public du Quartz.

NOIR SUR LA VILLE Lamballe (22), du 14 au 16 novembre L’association La fureur du noir mobilise toute la ville pour ce festival dédié au roman noir et à la littérature policière. Des expositions aux débats, en passant par des projections, le programme de cette année invite Ignacio del Valle, Ian Manook, Gérard Alle, Maud Tabachnik… Sans oublier le concours de nouvelles, seizième du nom, avec comme thème l’expression “dur à cuire”.


JEAN HÉNAFF SAS - RC Quimper B 402 978 639 - Crédit photo : Studio Claude Prigent - 035106

ffacrément bon ffe pâté !

Savoureux et équilibré, le Pâté Hénaff est préparé avec les meilleurs morceaux du porc y compris les jambons, les rôtis et même le filet mignon… un mélange secret d’épices, une pincée de sel de mer et c’est tout. D’un point de vue nutritionnel comme pour le goût, ça change tout. Hénaff est la 1ère PME indépendante à s’engager avec l’État dans le cadre du Plan National de Nutrition et Santé (PNNS) dont le but est de proposer aux Français une alimentation toujours plus saine et plus équilibrée.

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Peintres de la Bretagne

20364 - 1107 - 5,90 E

Les plus beaux musées de Bretagne

Découvrez les artistes d’aujourd'hui

N°11

Locronan, Saint-Suliac, Moncontour, La Gacilly, Le Faou, Bécherel... Partez à la découverte de l’histoire, du patrimoine et des légendes des plus beaux villages bretons.

Hors-série

HISTOIRE HORS-SÉRIE N°17 – OCTOBRE 2013 Un magazine proposé par

20364 - 910 - 05,90 E

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Les plus jolis villages bretons

La Bretagne contre la

Révolution ?

La Révolution est née à Rennes

Les Bretons L'épopée défendent des leurs prêtres chouans

N°12

Les sites extraordinaires de Bretagne

HISTOIRE Un magazine proposé par

Les Bretons

enLa14-18 guerre qui a

20364 - 1112 - 05,90 E

<:HIMKNG=YUZ^UV:?l@b@b@c@k>

La Pointe du Raz, la Côte Sauvage, la Pointe du Van, le Sillon de Talbert, le Cap Fréhel, les marais de Guérande...

Hors-série

HORS-SÉRIE N°18 – DÉCEMBRE 2013

changé la Bretagne

Les batailles : Dixmude, les Dardanelles...

Les Bretons, de la chair à canon ?

N°13

N°14

HISTOIRE Un magazine proposé par

ZÉRO

Léon Gambetta Il a sacrifié l’Armée de Bretagne en 1870

Les 20364 - 1112 - 05,90 E

L’empoisonneuse Hélène Jégado, la disparition du docteur Godard, le drame de la famille de Ligonnès...

Hors-série

HORS-SÉRIE N°19 – MARS 2014

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Les grandes affaires criminelles

et les

héros

zéros

de l’histoire de Bretagne HÉROS

ZÉRO

Alphonse Arzel

Il obtient justice pour l’Amoco

Jean-Baptiste Carrier

Il noie des milliers de chouans

La Bretagne il y a 100 ans Vieux métiers disparus, vie des gens de la côte, de la campagne, destin des enfants, transformation des villes, jours de fête, religion et croyances…

N°16 Peintres de la Bretagne Paul Gauguin, Mathurin Méheut, Claude Monet, Henri Rivière... Découvrez tous les peintres de la Bretagne, des classiques aux contemporains.

N°17 La Bretagne contre la Révolution ? Pourquoi la Révolution est née en Bretagne ? Comment la Bretagne est devenue contrerévolutionnaire ?

Les Bretons dans les tranchées, les grandes batailles, le patriotisme à l’école, la guerre à l’arrière, l’héritage du conflit...

N°19 Les héros et les zéros Des personnages les plus lumineux (Georges Cadoudal, le général de Bollardière...) aux plus sombres (les négriers nantais, Célestin Lainé...), une autre façon de découvrir l’histoire.

Chapelles, manoirs, abbayes... Partez à la découverte d’un patrimoine breton parfois méconnu mais d’une richesse extraordinaire !

Où trouver l’Ankou, est-ce que les korrigans existent ? Suivez l’itinéraire de Patrik Ewen...

Hors-série HORS-SÉRIE N°21 – OCTOBRE 2014 Un magazine proposé par

Les Vénètes, les corsaires, Jacques Cartier, la Brittany Ferries, Tabarly, Kersauson, Desjoyeaux, la pêche...

N°18 Les Bretons en 14-18

N°20 Trésors de Bretagne

N°15 Contes et légendes

Actuellement en kiosque :

Les Bretons et la mer

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Un magazine proposé par

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Chateaubriand, Céline, Xavier Grall, Le Clézio, Ernest Renan, Jules Verne...

Hors-série HORS-SÉRIE N°16 – ÉTÉ 2013

20364 - 810 - 5,90 E

N°9 Les écrivains bretons

Voile

Pourquoi les Bretons sont les meilleurs ?

Irène Frain

"Ici, tout le monde est lié à la mer"

La mer, 1000 ans d’histoire ! Des Vénètes de l’Antiquité aux skippers d’aujourd’hui, en passant par les corsaires malouins, l’aventure de la Brittany Ferries ou le business de la mer, découvrez l’histoire exceptionnelle de la relation des Bretons à l’océan.

Commandez-les et abonnez-vous sur notre site : www.bretons-mag.com Bon de commande à découper et à envoyer aux Éditions Blanc et Noir - 2, place de la République - BP 43950 - 56039 Vannes Cedex. Je commande le(s) n° J’envoie un chèque de

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